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Tunisie : les apports de la communication publique dans le domaine de la Santé
1. Cercle des communicants francophones
Tribune libre de Hichem Ben Hassine, responsable de la communication de l’Institut Pasteur de
Tunis.
Les apports de la communication publique dans le domaine de la santé
en Tunisie : construire sur l’existant
En janvier 2011, la révolution tunisienne marque le début de la démocratie en Tunisie. Premiers
gains, la liberté d’expression, la liberté d’informer. Rapidement, la multiplication des médias libres,
associée aux nombreuses revendications post-révolution de la société tunisienne ont poussé l’Etat et
ses structures à communiquer davantage. Plus fréquente, cette communication se fait souvent dans
l’urgence, par manque de structures, d’identification des besoins et de stratégie.
Dans la Santé, comme dans les autres domaines du secteur public, la communication est centralisée
au niveau du Ministère et de ses directions, lesquelles sont dotées de services de presse et certains
de services de communication, notamment les offices et les agences. Les directions régionales et les
institutions de santé, sont quant à elles dépourvues de structures et de réflexes en communication et
il est fréquent que le ministère de la Santé doivent « gérer » les sollicitations médiatiques au niveau
régional et institutionnel.
A l’époque du Président Habib Bourguiba principalement, la communication en matière de Santé
via les campagnes de prévention et d’éducation à la Santé a largement bénéficié des canaux
médiatiques et institutionnels entièrement contrôlés par l’Etat. Par cette présence médiatique
régulière le système de Santé avait acquis la confiance du citoyen. Mais le développement, durant
les 20 dernières années, du secteur privé et de sa communication et le gap perçu avec le secteur
public associé à la quasi-absence de communication publique en matière de Santé, a entraîné une
crise de confiance entre le système de Santé et le citoyen tunisien qui se tourne davantage vers le
privé. Cela a notamment eu pour conséquence l’accroissement du déficit de la Caisse Nationale
d’Assurance Maladie (CNAM) dont 80% des remboursements viennent des dépenses réalisées dans
le secteur privé.
Par ailleurs, après avoir été majoritairement touchée par les maladies infectieuses, la Tunisie est
actuellement en transition épidémiologique avec l’émergence de plusieurs maladies chroniques
(hypertension artérielle, diabète…), liées principalement au mode de vie sédentaire, et la
surconsommation de gras, sucres et sel. Le précédent ministre de la Santé, Mohamed Salah Ben
Ammar, lors d’une conférence de presse en décembre 2014, a mis en garde contre « une catastrophe
sanitaire dans 30 ans, si les Tunisiens ne changent pas leur comportement alimentaire ».
Pour remettre les choses à plat et avoir une véritable réflexion sur ce que doit devenir le système de
Santé en Tunisie et contribuer à concrétiser le droit à la Santé (consacré par la Constitution de
janvier 2014) un dialogue sociétal sur les politiques, les stratégies et les plans nationaux de Santé,
avec le soutien de l’Organisation Mondiale de la Santé a été lancé. L’approche participative de ce
dialogue entamé en 2012 a abouti à l’édition d’un livre blanc présentant 8 chantiers prioritaires dans
lesquels on retrouve, la Promotion de la Santé et la réforme de la gouvernance du système de Santé
avec notamment une communication interne et externe plus structurée et moins centralisée.
Depuis 2011, on constate une prise de conscience des professionnels de la Santé, des responsables
2. nationaux et régionaux qui s’entendent tous sur la nécessité de développer la communication
publique de notre système de Santé.
L’une des missions de cette communication publique sera en priorité de rétablir la confiance dans le
système de Santé et principalement celle du citoyen pour en faire un partenaire et un acteur de
sa propre santé. Cela implique la création de nouveaux métiers/profils et une décentralisation de la
communication publique.
Pour lancer cette dynamique de changement, tout en s’appuyant sur les conclusions du dialogue
sociétal, il faudrait réunir les acteurs, connaissances et expériences dans les domaines de la
communication en Santé, qui existent déjà dans nos structures publiques (notamment celles qui
font de la prévention et de l’éducation à la Santé) dans la société civile, les sociétés savantes, le
secteur privé.
Ces personnes composeront une commission nationale représentative chargée de définir, la
portée, la stratégie, les objectifs, la mise en œuvre d'une communication publique dans le système
de santé.
La troisième étape serait la création progressive, au niveau national, régional puis institutionnel de
services de communication avec des profils spécifiques qui appliqueront cette stratégie nationale.
Ces services communication auront également pour objectifs de développer la communication
interne des structures et la communication entre acteurs du système de Santé, qui de l’avis général,
a besoin de plus de cohésion et de collaborations. Ils participeront par conséquent, au management
du système de Santé en collaborant à l’évolution des mentalités, par plus de transparence, la
fluidification des circuits d’information et l’ouverture des structures publiques sur leur
environnement.
Depuis quelques mois plusieurs initiatives ont été prises dans ce sens au sein des directions des
ministères et le ministre de la Santé actuel Said Aïdi (en poste depuis février 2015), a récemment
annoncé qu’il plaçait la prévention et la gouvernance parmi les 5 axes prioritaires des réformes à
mettre en place dans le secteur de la Santé.
La prise de conscience générale semble acquise, à tous les niveaux. Il est temps de passer à la
conception d’une stratégie nationale de communication publique. Celle-ci ne peut être pensée qu’à
long terme et faire régulièrement l’objet d’évaluations, pour avoir un réel impact durant les
décennies à venir.
La Tunisie a réussi sa transition vers la démocratie parce qu’elle a compris que seul le consensus,
qui nécessite, patience, compromis et surtout une ambition commune, permettrait d’y aboutir. Les
conditions sont réunies. Nous avons les capacités et les compétences pour réellement relever le défi
d’une communication publique efficace et bienveillante dans le système de Santé en Tunisie.
N’ayons pas peur de nous y lancer !
Je tiens à remercier pour leurs témoignages et conseils :
Dr. Zied Laatiri, Direction de la Santé de la ville de Ben Arous
Dr. Chokri Hamouda, Directeur de l’Institut Supérieur des Sciences Infirmières de Tunis
Dr Mohamed Salah Ben Ammar, Ministre de la Santé (janvier 2014-février 2015)
Tribune publiée en octobre 2015
3. Le Cercle vise à faire progresser la #ComPublique et la
#ComPol dans le monde francophone. C’est un espace de
dialogue, de partage d'expériences et de valorisation de tous.
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