Face à la disruption, aux progrès exponentiels des technologies numériques de l’information et de la communication, la non-adaptabilité des individus et des structures entrepreneuriales utilisateurs de ces technologies, reste un enjeu majeur pour les économies et les sociétés. Évolution accélérée des outils, des formats, des plateformes, disruption dans les modèles économiques et dans les pratiques de production, de gestion et de distribution des contenus, tous ces éléments ont un impact sur les industries et services qui utilisent des médias numériques.
Création, production, veille, curation, diffusion, publicité... Les contenus dédiés à l’informa- tion des marques s’inspirent, sciemment ou non, des évolutions et innovations touchant les contenus des médias sur le web. Les industries des médias en ligne fournissent un vaste laboratoire de tests pour voir ce qui marche ou pas dans les contenus d’information.
Les marques ont besoin d’informer et grâce aux technologies d’internet, elles ont la capacité d’utiliser les mêmes moyens que les médias en ligne.
Dans cette économie basée sur l’attention, l’utilisateur est quant à lui confronté à une quantité d’information ingérable sur son principal objet connecté, son mobile. Finalement, il préfère se réfugier dans une consommation plus digeste de contenus d’information en vidéo ou de listes d’articles agrégés par les moteurs de recherche. Il se tourne aussi vers les contenus que partagent ses communautés ou vers des contenus personnalisés, adaptés à ses centres d’intérêts.
Par ailleurs, face à la capacité des internautes à rejeter les impressions de messages publici- taires imposées unilatéralement par les annonceurs sur le web, les marques ont investi l’espace de discussion, reprenant les outils informationnels utilisés par les médias d’information.
Cette plongée dans l’industrie de l’information sur internet et sur les médias sociaux comporte bien des défis, tandis que l’industrie des médias en ligne est elle-même confrontée à une re- mise en question qui touche tous ses modèles à la fois : éthiques, financiers, créatifs, notam- ment. Comprendre ces défis doit permettre aux marques d’ajuster leurs stratégies et de se lan- cer sur ces supports de façon appropriée, sans perte inutile de temps, de réputation ni de budget.
Thèse professionnelle MBA Marketing et Commerce sur Internet
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Antoine FILIPE
INSTITUT LEONARD DE VINCI
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enregistrée au RNCP par arrêté du 7/07/2017 publié au JO le
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La disruption des médias en ligne
doit-elle inspirer
les contenus de marque ?
Date de remise : ………..
2. Remerciements
Je tiens à remercier avant tout mon épouse ainsi que mes enfants, qui m’ont grandement sou-
tenu pendant ces quelques mois de travail partagés entre mon employeur et le MBA MCI.
Je remercie Dominique Suhr, Auteur et Expert en Chimie des Matériaux et Jérémie Arbona,
Rédacteur en Chef, pour leurs conseils précieux en cours de rédaction.
Je remercie également mes responsables pédagogiques, Christophe Dané, pour son expertise
et son écoute, et Alexandre Stopnicki, pour son rôle exemplaire de coach pendant la forma-
tion.
Je remercie enfin tous ceux qui ont accepté de fournir des informations ou de m’ouvrir des
portes pour disposer d’éléments essentiels à la rédaction de ce document. Je pense en particu-
lier à Virginie Lubot, Directrice Executive Adjointe et à Yoann Dénée, Directeur des exper-
tises digitales, de Prisma Media, ainsi qu’à Emmanuel Alix, Directeur du Pôle Numérique du
groupe L’Équipe. Merci enfin à Benoît Raphaël, Innovateur en Médias Numériques, pour son
rôle d’inspirateur et « chef de labo » pour la presse numérique en France.
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3. Remerciements 1
Introduction 3
Summary 7
1.« Le contenu est roi » 9
Un terreau fertile à l’innovation et aux services 9
L’image au coeur de la consommation contemporaine 12
L’ère post- 2.0 16
L’avènement des plateformes globales 18
L’adaptabilité des contenus 23
Par où commence la recherche 25
2.Le « roi » serait-il mort ? 27
Disruption précoce et réaction tardive ? 27
Des communautés conquises 30
Authenticité et véracité des contenus : des qualités rares 34
Quel bon mix économique ? 40
La persistance des « contenus sponsorisés » 44
« Presse native » contre « social natif » ? 46
3.Longue vie au roi 55
La marque média : un repère 57
Des contenus authentiques, pertinents et utiles 60
De l’expérience de marque 63
Créer des communautés avant de vendre 64
Données et programmatique 68
La multiplication des points de contact 73
Les formats de contenus en mouvement 75
La fin de l’image fixe ? 79
Statistiques + code = information digeste 80
Live ou stock 82
Contenus « immersifs » 84
L'humain et les robots au cœur des dispositifs 86
L’intelligence artificielle au secours de la DCX 89
L’avènement de la content factory 91
L’organisation des services spécialisés est-elle obsolète ? 101
Concepts actuels et émergents pour la gestion et la distribution des médias numériques 105
Conclusion 111
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4. Introduction
Face à la disruption, aux progrès exponentiels des technologies numériques de l’in-
formation et de la communication, la non-adaptabilité des individus et des structures entre-
preneuriales utilisateurs de ces technologies, reste un enjeu majeur pour les économies et les
sociétés. Évolution accélérée des outils, des formats, des plateformes, disruption dans les mo-
dèles économiques et dans les pratiques de production, de gestion et de distribution des
contenus, tous ces éléments ont un impact sur les industries et services qui utilisent des mé-
dias numériques.
Création, production, veille, curation, diffusion, publicité… Les contenus dédiés à l’informa-
tion des marques s’inspirent, sciemment ou non, des évolutions et innovations touchant les
contenus des médias sur le web. Les industries des médias en ligne fournissent un vaste labo-
ratoire de tests pour voir ce qui marche ou pas dans les contenus d’information.
Les marques ont besoin d’informer et grâce aux technologies d’internet, elles ont la capacité
d’utiliser les mêmes moyens que les médias en ligne.
Dans cette économie basée sur l’attention, l’utilisateur est quant à lui confronté à une quantité
d’information ingérable sur son principal objet connecté, son mobile. Finalement, il préfère se
réfugier dans une consommation plus digeste de contenus d’information en vidéo ou de listes
d’articles agrégés par les moteurs de recherche. Il se tourne aussi vers les contenus que par-
tagent ses communautés ou vers des contenus personnalisés, adaptés à ses centres d’intérêts.
Par ailleurs, face à la capacité des internautes à rejeter les impressions de messages publici-
taires imposées unilatéralement par les annonceurs sur le web, les marques ont investi l’es-
pace de discussion, reprenant les outils informationnels utilisés par les médias d’information.
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5. Cette plongée dans l’industrie de l’information sur internet et sur les médias sociaux comporte
bien des défis, tandis que l’industrie des médias en ligne est elle-même confrontée à une re-
mise en question qui touche tous ses modèles à la fois : éthiques, financiers, créatifs, notam-
ment. Comprendre ces défis doit permettre aux marques d’ajuster leurs stratégies et de se lan-
cer sur ces supports de façon appropriée, sans perte inutile de temps, de réputation ni de bud-
get.
Nous allons parcourir dans ce document les disruptions rapides et les évolutions plus progres-
sives de l’industrie de l’information numérique. Elles impliquent des ajustements qui sont
cruciaux pour les rendements des contenus, en matière d’audience et du point de vue finan-
cier. En optimisant la prise en compte des évolutions nécessaires, au niveau technique et au
niveau organisationnel, on modifie et on enrichit profondément les expériences des utilisa-
teurs, ainsi que les capacités des travailleurs des industries des contenus d’information, qu’ils
soient de presse ou de marque.
Nous verrons en fin de document la mise en place d’une plateforme humaine et technique qui
prend en compte les défis actuels et à venir se présentant aux organisations chargées de pro-
duire, gérer et distribuer les contenus. Sur la base d’exemples tels que le Washington Post au
États-Unis, qui a créé en interne un système performant pour la gestion, la distribution et le
suivi des performances de ses contenus, nous essayerons de comprendre pourquoi et comment
certains médias deviennent de véritables entreprises technologiques dans le numérique. En
évitant l’innovation au seul titre de l’innovation mais en gardant à l’esprit les contraintes pro-
fessionnelles et financières de toute structure, nous étudierons la mise en place d’une « fa-
brique à contenus ». Celle-ci peut être déployée à plusieurs échelles, simple content factory
pour les ETI ou Enterprise Content Factory -ECF-, pour gérer les workflows de contenus in1 -
ter-métiers dans les grandes entreprises.
Avant la livraison des contenus à l’utilisateur final interviennent la production et la logistique
pour les gérer et les distribuer. La content factory propose de créer des cercles vertueux qui
profitent des technologies web disponibles pour réaliser ces étapes sur une seule et même pla-
teforme de façon collaborative, en interconnectant les différents outils et fonctionnalités mis
en oeuvre au cours de des workflows. Les innovations technologiques ainsi que l’accompa-
ETI : Entreprises de Taille Intermédiaire1
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6. gnement des utilisateurs permettent d’aboutir les transformations et l’optimisation de sys-
tèmes numériques et d’usages qui fonctionnent souvent en silos, l’objectif étant d’aboutir à de
véritables espaces de co-working virtuels, simple à utiliser et où l’on a plaisir à se connecter
pour travailler.
La content factory réunit une typologie de contenus et d’utilisateurs importante.
Par ailleurs, elle est constituée de trois parties essentielles que nous aborderons dans ce do-
cument. D’abord, la gestion des assets de contenus et de documents ou Digital Asset Mana-
gement, ensuite les interfaces pour accéder à ces assets et enfin, les API et web services pour
travailler avec ces assets, les éditer et les distribuer. Nous verrons plus en détails ces notions
et ce qu’elles impliquent dans le cadre d’assets de marques.
Trouver le meilleur compromis entre technologie et expérience utilisateur dans la fabrication
et la mise à disposition des contenus numériques est une question sous-jacente à ce travail
mais néanmoins essentielle. Cette problématique touche à la fois les collaborateurs internes
qui fabriquent l’expérience utilisateur au sein de la plateforme content factory mais aussi les
utilisateurs clients qui sont en contact avec les contenus, interfaces et interactivités qui y
mènent. Technologie et User eXperience -UX- peuvent s’entraîner positivement mais l’inno-
vation trop précoce peut au contraire représenter une nuisance pour l’utilisateur. La technolo-
gie doit être mature pour les usages.
L’observation de l’évolution de l’UX au sein des médias en ligne est intéressante, y compris
dans l’optique d’améliorer une UX pour des contenus de marque. Dans ces deux contextes, on
fait référence à une expérience digitale qui fournit de l’information destinée à un abonné, un
client. Cette Digital Customer Experience -DCX-, vise l’individu récepteur d’une émotion
suscitée par les contenus à disposition et acteur de la conversion recherchée par la marque.
Cette DCX correspond à une série de points de contact numériques, à tout moment, en tout
lieu et sur tous les terminaux. C’est aussi le cas du côté fabrique, où les collaborateurs du mé-
dia, de marque ou de presse, sont les utilisateurs d’un système applicatif en réseau que l’on
appellera ici la content factory.
Ce travail a été documenté au cours d’entretiens avec des utilisateurs, avec des experts, au
travers de conférences, de veille lors de salons professionnels mais aussi au cours des mis-
sions au sein de mon entreprise, dans le cadre de la gestion des contenus et enfin, en prati-
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7. quant l’apprentissage itératif, en particulier lors d’un Proof of Concept -PoC- intitulé
« Content Factory: our content everywhere » et pendant la mise en place du nouveau sytème
de DAM de l’entreprise. J’ai également capitalisé sur des interventions et travaux réalisés au
sein du MBA à l’Institut Léonard de Vinci. Tous ces éléments m’ont permis de recueillir les
constats, inquiétudes, espoirs et réussites du monde professionnel des médias numériques.
L’objectif de ce document est de fournir une vision, pour les deux à trois prochaines années,
des problématiques, défis et tendances qui attendent les industries de contenus information-
nels.
Nous n’évoquerons pas les contenus dits « de divertissement » dans ce document où excep-
tionnellement, sur des aspects innovants qui peuvent être reliés à la diffusion de l’information
pour la presse en ligne ou la marque média. Les jeux vidéos, les programmes de sport, de di-
vertissement, le cinéma ou les séries en ligne, notamment, correspondent à une typologie de
produits et d’usages que nous ne traiterons pas ici. Nous n’aurons pas non plus l’occasion
d’aborder les sites et contenus des chaînes de télévision traditionnelles car leur services cor-
respondent presque essentiellement à de la rediffusion délinéarisée -dite en replay- de conte-
nus télévisés. Enfin, l’impression de publicité numérique dite « display programmatique » ne
sera abordée que très brièvement, du point de vue des tendances, risques et opportunités de
l’achat et de la création programmatique chez les médias en ligne afin de situer le contexte
économique ainsi que les limites du modèle.
A noter également que nous ne ferons pas la distinction entre web et web mobile dans ce do-
cument, sauf à préciser la réception sur un type de terminal, par exemple « sur mobile » ou
« sur ordinateur ».
Je vous souhaite une bonne lecture.
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8. Summary
In order to face the challenges of new practices in the online information industry,
companies must re-evaluate their innovation strategies in terms of brand content. These stra-
tegies must consider online media industry’s challenges because they are coming to the brand,
as it has this new position of a -owned- media. These challenge are financial, creative and
technical. They represent real disruptions but also specific opportunities.
The web’s communication space is a seamless experience for users. These users are confron-
ted, along with the brand experience, with the negative consequences of these disruptions, du-
ring their contacts with digital media on the web at large: fake news, intrusive advertising,
over quantity of content… Besides, digital media accelerates its innovation and provide a
wide range of new ways to produce, distribute and manage content.
The brand's online media aims to represents a complete user experience adapted to its
customers needs. It has to provide them with the best response to their information needs via
digital media. It's about working on the digital customer experience to make it fluid and not
just enjoyable, but to reach an emotional, visual and informative experience at the highest le-
vel of quality. This experience results from content itself, but also user interface and site[s]
and application[s] information’s structure evaluation. It is based on four key points: the gate-
way to content, its consumption, the actions on the brand's platforms before leaving and the
data left by the user.
To support these objectives, the Enterprise Content Factory - ECF - is the human and
technical platform. It responds to the accelerated challenges of content production, distribu-
tion and monitoring for the brand. It has its own UX and it’s also a main point of its success
as a driver of change in the communications and marketing job’s families, because it needs
users’ consent and adoption.
As Washington Post’s new editorial and content management platform and system are
seen as a model for the news industry, brand platforms need to realize that the same digital
transformation is waiting for their structures of work. The ECF offers a centralized content
management system based on renewed digital concepts, bringing together digital asset mana-
gement, DAM, product information management, PIM, and soon, content management sys-
tem, CMS. Collaborative workflows and editing capabilities enable employees to develop
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9. new ways of working. The ECF also makes it possible to manage a multitude of assets, me-
dia, documents, descriptive sheet ... and to distribute them in two clicks or in an automated
way towards ATAWADAC media or devices. It also allows to monitor the performance of2
content in a clear and visual way, on a number of objectives and KPIs.
Even with its commercial purposes, the brand remains a benchmark for the consumer
and user in a digital environment where sources of information are multiple and where the
content is not verified. The brand can show all its innovation capabilities through an optimi-
zed customer experience trough quality and crystal-clear content.
In addition, it is important to note that innovation for the sole purpose of innovating has no
return on investment and it can even go against the digital customer experience. Media
consumption uses are a priority. Workshops and limited scale A / B tests are a must-do when
seeking for agile improvement.
Brands wishing to integrate into the global daily flow of digital information must set up these
content factories to obtain the efficiency, quality, consistency and security, necessary for their
content’s supervision.
« AnyTime, AnyWhere, AnyDevice » is a term invented by Xavier Dalloz, IT consultant, to describe the mobile user capability2
to access to content without any limitation.
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10. 1.« Le contenu est roi »
La citation de Bill Gates, « Content is king », parue dans son article du 1er mars 1996 est in3 -
tervenue dans un contexte où les changements dus à l’usage de l’Internet n'impliquaient pas
encore les grandes industries de l’information et du divertissement. Déjà, le patron de Mi-
crosoft évoquait la différence entre les contenus multimédia en ligne, disponibles hors flux, et
les contenus traditionnels diffusés en linéaire ou imprimés. Sa réflexion prévoyait déjà la né-
cessité d'adaptation de ces derniers dans le cadre de diffusions sur les supports connectés.
Dans ce premier chapitre, nous allons nous intéresser à des tendances majeures dans l'indus-
trie des médias en ligne. Il s'agit de parcourir les principales évolutions, notamment socio-
culturelles, économiques et technologiques qui ont contribué à l'état des médias connectés tels
que nous les connaissons aujourd'hui. Que sont devenus les réseaux sociaux suite à leur émer-
gence depuis le début de ce siècle ? Qu’est-ce qui succède à cette vague que l'on a nommé
web 2.0 ? Quelles spécificités a pris la diffusion des contenus d’information dans cet environ-
nement interconnecté ?
Un terreau fertile à l’innovation et aux services
Tous les services et y compris ceux proposés par les grandes plateformes que l’on nomme
communément les GAFAM -pour Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft- et aux-
quelles nous pourrions ajouter les grands médias comme les plus petits, tous les services, y
compris d’information, profitent d’un certain nombre de technologies et de principes originels
du web. Afin de comprendre où nous en sommes aujourd’hui, il est nécessaire de revenir sur
quelques notions constitutives du web afin de comprendre les services qui y sont proposés
aujourd’hui.
http://web.archive.org/web/20010126005200/http://www.microsoft.com/billgates/columns/1996essay/essay960103.asp3
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11. • Internet trouve son fondement juridique dans l'existence d'un « principe de libre-circula-
tion de l'information qui remonte au XIXe siècle, lors de l'émergence du télégraphe » . De4 -
puis, « ce principe a émergé graduellement de la rencontre progressive puis de la sym-
biose entre la libre-circulation internationale des services et la liberté d’expression ». Le
réseau des réseaux, est constitué de millions de réseaux publics ou privés, constitués eux-
mêmes de sous-réseaux autonomes, et de protocoles standardisés pour la transmission des
données.
• Le web est une application d’Internet basée sur un système de liens hypertexte qui lient
des pages entre elles, consultables à l’aide d’une application, le navigateur, qui permet
l’affichage d’éléments à l’écran.
• La neutralité du net est un principe qui garantit l’absence de discrimination par les opéra-
teurs de télécommunications « à l'égard de la source, de la destination ou du contenu de
l'information transmise sur le réseau » Internet. Ce principe est entré dans la législation5
début 2016 dans le cadre du Projet de loi pour une République numérique, où la responsa-
bilité du respect de cette neutralité du réseau est confiée à l'Autorité de Régulation des
Communications Électroniques et des Postes -ARCEP-. Ce principe est encore respecté
mais des limitations techniques peuvent être pratiquées, en particulier pour des raisons de
disponibilité de la bande passante et pour contrer des menaces visant à garantir la sécurité
des citoyens. De fervents défenseurs s’opposent à un contrôle plus poussé des données
échangées, au grand dam des industries culturelles notamment qui ne sont pas financées
par la publicité en ligne, comme le cinéma. Le contrôle de certains contenus sur Internet
peut également subir des filtres des plateformes de distribution OTT, en particulier suite à
des plaintes d’utilisateurs ou par le biais d’algorithmes de contrôle plus ou moins effi-
caces.
• Les services par contournement, ou Over The Top -OTT-, sont la fourniture de contenus
télévisés, de services de messagerie ou d’appels voix ou vidéo, via le web, sans passer par
les interfaces de l’opérateur mais en utilisant simplement sa connexion.
• Le Content Delivery Network –ou CDN- est un sous-réseau de serveurs qui duplique les
contenus d’après des serveurs sources et permet de les distribuer grâce au serveur du réseau
https://fr.wikipedia.org/wiki/Internet; voir aussi http://www.libertesnumeriques.net/evenements/bayart-internet-sciencespo4
https://fr.wikipedia.org/wiki/Neutralit%C3%A9_du_r%C3%A9seau5
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12. le plus proche de la zone de livraison, optimisant ainsi la rapidité de réception de ces conte-
nus et l’expérience utilisateur, ainsi que les coûts de bande passante.
C’est notamment grâce à ces concepts et technologies de stockage et de gestion des données
en réseau, que l’innovation a pu se développer autour de l’économie numérique connectée et
que des services utilisant toutes ces capacités à transmettre de l’information multimédia ont
pu émerger et devenir aujourd’hui prépondérants. Les médias en ligne profitent également de
ces caractéristiques ouvertes du web. Ce réseau s’est beaucoup diversifié en ce qui concerne
les infrastructures de télécommunications. L’utilisateur lui-même est « hyperconnecté » au
travers de plusieurs terminaux et progressivement à des matériels utilitaires du quotidien,
montre, voiture, domotique robotisée… Aujourd’hui, les Français passent près d’un tiers de la
journée connectés. Ils passent en moyenne 7h40 par jour sur Internet -+1h10 depuis 2016-
dont près de 3h sur leur smartphone -+1h depuis 2016-, selon un sondage CSA-BNP Paribas.
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13. L’image au coeur de la consommation contemporaine
Nous sommes des êtres visuels. La vision et son traitement par le cerveau humain se-
raient liés à deux des principales fonctions vitales de l’homme que sont la recherche de nour-
riture pour la chasse et l’évitement des prédateurs. Les aires cérébrales visuelles représentent
près d’un tiers de notre cerveau. En effet, la quantité importante d’informations visuelles que
l’on peut potentiellement traiter est liée à notre capacité à voir le détail des couleurs dans le
spectre dit visible .6
L’image est au coeur de la consommation des contenus d’information contemporaine.
Le caractère multimédia du support internet, relevé dans le billet de Bill Gates « Content Is
King », y est pour beaucoup. La croissance de l’utilisation et de la consommation d’images
sur les supports connectés est due à deux facteurs principaux. D’abord, les capacités tech-
niques des infrastructures réseaux et des terminaux mais aussi les capacités applicatives qui
permettent de transmettre et de réceptionner des images de plus en plus rapidement, pour une
consommation immédiate et même en direct, sur des terminaux que l’on a constamment avec
nous. Le deuxième facteur qui pousse à la consommation de vidéos sur mobile est ce que l’on
décrit par le terme « infobésité ». Le biologiste Pierre Joliot a affirmé que « face à la crois-
sance explosive des techniques de communication de l’information, les capacités de notre
cerveau d’acquérir, de stocker, d’assimiler et d’émettre de l’information sont restées inchan-
gées » . La conséquence de cette surabondance de contenus disponibles quand on les re7 -
cherche mais aussi quand on ne les sollicite pas, de façon intrusive, est donc une incapacité de
traitement. Irions-nous naturellement prendre l’information là où elle est la plus assimilable,
le plus digeste -en l’occurence avec l’image -infographies, photos, illustrations, vidéos…- ?
Par l’image, notre oeil est irrémédiablement sollicité et notre attention plus facilement captée.
Cela est devenu une qualité essentielle pour un contenu dans un contexte où l’utilisateur qui
cherche à s’informer est débordé par la quantité d’information disponible, utile ou inutile,
quand bien même les moteurs de recherche l’aiguille vers ce qu’il recherche en premier. A
cette « friche » de pétaoctets de matière éditoriale, de presse ou dédiée à la communication de
marque, il faut ajouter les contenus de divertissement qui fleurissent sur toutes les plate-
formes, ainsi que la publicité.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Spectre_visible6
La recherche passionnément; De Pierre Joliot; Éditions Odile Jacob; 1 févr. 20017
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14. Allié aux capacités techniques des réseaux qui progressent , le format réduit des8
écrans mobiles a également favorisé la consommation de contenus audiovisuels plutôt
qu’écrits. Les formats de vidéos courts, appréciés en particulier par les 16-24 ans, selon l’In-
teractive Advertising Bureau -IAB-, mais plus digestes pour tous les utilisateurs, se sont gran-
dement développés.
Les internautes devraient passer cette année plus de 47 minutes par jour à regarder des
vidéos en ligne, contre moins de 40 minutes en 2016, selon une étude réalisée dans 63 pays .9
Pour ce qui concerne la vidéo en ligne, en 2017, elle représente 70% du trafic internet tout
confondu selon des estimations de l’entreprise informatique Cisco, spécialisée dans les ré-
seaux. YouTube, la première plateforme devant Facebook pour la consommation d’images
vidéos, reçoit plus de un milliard de visiteurs uniques chaque jour. De plus, avoir une vidéo
sur sa landing page, peut augmenter son taux de conversion de 80% selon l’étude de Eye-
viewdigital, une société spécialisée dans le marketing… vidéo. La vidéo serait un moyen de
conserver les visiteurs sur son site plus longtemps. Une étude réalisée par l’institut de re-
cherche Statisticbrain indique qu’un internaute ne laisse que 8 secondes pour être capté, avant
de se désintéresser. Une vidéo, qui plus est personnalisée à ses besoins ou à ses centres d’inté-
rêts, le pousserait donc à rester plus longtemps sur un site. Elle clarifie aussi le fonctionne-
ment et la perception d’une offre de produits ou de services qui peuvent être complexes. Cela
peut être une vidéo commerciale de démonstration ou un tutoriel par exemple.
De plus, peu de gens sont capables d’assimiler rapidement des blocs de textes importants, sur-
tout sur un écran. La vidéo facilite le contact et permet rapidement d’avoir un aperçu du ser-
vice et des fonctionnalités offerts.
On note cependant quelques tendances à contre-courant de ces affirmations de l’évolu-
tion du web vers le média d’information vidéo.
D’abord, les formats plus longs d’information vidéo ne disparaissent pas et sont toujours
consommés chez soi sur un écran plus grand ou dans un temps de mobilité plus long, dès lors
que les débits de connexion le permettent ou en téléchargement anticipé -autorisé par cer-
taines plateformes-.
Carte interactive de l’évolution des débits de données du Northwestern University Knight Lab :
8
https://cdn.knightlab.com/libs/timeline3/latest/embed/index.html?source=1yCLWtajqocd5MxVB-bGhRPX4wTswu0wbgq-
V4ts4yEmI&font=Default&lang=en&initial_zoom=2&height=650
https://www.zenithmedia.com/mobile-devices-lift-online-video-viewing-20-2017/9
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15. Par ailleurs, l’écrit serait de retour comme l’affirme l’agence Les Éclaireurs de la Com et10
cela contredit l’affirmation d’un responsable de Facebook sur la « disparition de l’écrit » dans
quatre ans. L’article de l’agence de communication note que certains sites qui ont dédié leurs
contenus à la vidéo en ligne, voient un effondrement net de leur audience sur un an. Pourtant,
les exemples pris sont des sites de vidéos très spécialisées, comme Vice Sports et Fox Sports,
peu représentatifs de la totalité des contenus vidéos sur internet et de l’évolution de l’en-
semble des offres sportives du paysage audiovisuel américain; De plus, la distinction n’est pas
faite entre les résultats d’audience des contenus vidéos réalisés ou versés « nativement » sur
les média sociaux et ceux hébergés sur les plateformes de ces médias. L’article s’appuie toute-
fois sur une étude du Reuters Institute de juin 2016 , qui note que la distribution de vidéo sur11
les sites d’information correspond davantage à une volonté de modernisation des éditeurs de
presse qu’à une demande réelle des utilisateurs : d’après l’étude qui se base sur trente publica-
tions en Europe et en Amérique du Nord, seulement 2,5% du temps passé sur les sites d’in-
formation le serait à regarder de la vidéo, tandis que les 97,5% seraient passés à lire du texte.
Cela relativise en effet le « tout-vidéo ». L’étude note par ailleurs que les formats vidéos les
plus appréciés sont ceux de moins d’une minute, qui utilisent des sous-titres plus que l’audio
pour relayer l’information. Une autre revanche de l’écrit ?
L’article des Éclaireurs de la Com cité plus haut note également le fait que la vidéo ne favo-
rise pas l’accessibilité des contenus aux internautes avec un handicap. Pourtant, ce média
permet de toucher à la fois les mal-voyants et les mal-entendants -grâce aux sous-titres créés
par l’éditeur ou générés par certaines plateformes de diffusion-. Youtube en particulier met en
avant la possibilité d’utiliser un screen reader, ou lecteur d’écran en français, un logiciel qui
permet de retranscrire ce qui se passe à l’écran en audio-texte ou en braille. Les exigences du
W3C ne sont pas pénalisées avec la vidéo mais elles nécessitent la réalisation de certains élé-
ments éditoriaux simples en amont de production, avec la fourniture d’une retranscription des
voix et/ou textes par exemple ou l’automatisation de leur reconnaissance disponible sur des
plateformes de distribution évoluées.
La prépondérance du texte revient néanmoins sur des régions où la couverture en haut débit
mobile, 3g ou 4g, est faible ou inexistante, ce qui est le cas encore dans de nombreuses ré-
gions du globe, comme l’Inde ou l’Afrique. Des plateformes de contenus telles que Twitter ou
http://www.eclaireursdelacom.fr/strategie-de-contenus-cest-verifie-le-100-video-est-un-desastre/10
http://www.digitalnewsreport.org/publications/2016/future-online-news-video/11
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16. Google proposent ainsi des versions news lite de leurs pages et l’on voit même des sites mo-
biles dont les pages principales sont constituées uniquement de textes, soit intégrées manuel-
lement, soit importées dynamiquement via des flux XML.
GOOGLE NEWS EN MODE NORMAL OU LITE - SOURCE : GOOGLE
Une autre tendance, qui va à contre-courant de cet essor de la vidéo dans les médias en ligne,
est le retour du podcast audio. En France, 39% des français écoutent des podcasts audio selon
un sondage OpinionWay. Les objectifs principaux de ces personnes sont de rentabiliser leur
temps libre en étant multitâche grâce à l’audio ou de pouvoir se déconnecter, en se relaxant,
en s’endormant… Des usages que ne propose pas la vidéo.
Globalement néanmoins, dans ce contexte de mise à disposition et de consommation
de l’image, celle-ci est devenue indéniablement un outil de communication indispensable
pour le marketing et la publicité. Ce Picture Marketing a investi les médias sociaux et les mé-
dias en ligne dans leur ensemble, surfant sur cette capacité d’engagement du spectateur vis-à-
vis des contenus vidéos.
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17. L’ère post- 2.0
« L’imprimerie a permis au peuple de lire, internet va lui permettre d’écrire » .12
En 1996, lorsque Bill Gates affirme que le « contenu est roi », peu de contenus sont adaptés
aux réseaux numériques. Quelques informaticiens ou chercheurs déposent sur des serveurs
des photos et du texte pour constituer une page en HTML sur des projets de recherche puis13
les pages personnelles fleurissent mais les contenus disponibles ne sont pas des contenus de
qualité professionnelle, sans préjuger par ailleurs de leur qualité intrinsèque. Le fait que ces
pages ne soient pas optimisées pour les bas débits des connexions des débuts de l’internet, ne
facilite pas les visites des internautes.
Il faut attendre le web 2.0 , au début des années 2000, pour voir se développer les contenus14
produits par les utilisateurs de façon exponentielle. Le User Generated Content ou UGC, est
hébergés sur des CMS de blogs ou sur les plateformes de médias participatifs en ligne, dé15 -
diés à la vidéo, à la photo, à l’écriture. Nous passerons vite là-dessus mais il faut noter que le
nombre de blogs explose alors dans le monde avec 50 millions de blogs recensés en 2006 par
Technorati, un moteur de recherche américain spécialisé dans les blogs. Puis en 2013, c’est
200 millions de blogs qui seraient recensés dans une étude de étude réalisée par l’agence de
marketing digitale Acti. Nadia Leroy, ancienne responsable Média et Digital chez L’Oréal et
entrepreneuse, explique que ce sont « les clients de la marque de cosmétiques qui sont deve-
nus des blogueurs(euses) et des vlogeurs(euses) qui continuent aujourd’hui de partager avec16
d’autres consommateurs leurs expériences ». Cette opportunité reste unique pour disposer de
leviers de contenus encore en partie earn mais davanatage paid au final si l’on souhaite dis17 -
poser de vrais influenceurs, sur les réseaux sociaux.
Benjamin Bayart La Bataille HADOPI, collectif d'auteurs, éditions [In Libro Veritas], 200912
Le HTML est le format de données conçu pour représenter les pages web -https://fr.wikipedia.org/wiki/Hypertext_Markup_13 -
Language-. Créé par Tim Berners-Lee pour le World Wide Web, le HTML est une application de SGML.
Web 2.0 est une expression inventée en 2003 par Dale Dougherty, cadre de O'Reilly Media, maison d’édition américaine14
spécialisée dans l’informatique.
Les Content Management Systems -CMS- ou Systèmes de Gestion de Contenu -SGC- en français sont une famille de logi15 -
ciels destinés à la conception et à la mise à jour de pages web. https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_de_gestion_-
de_contenu
Les vlogueurs sont des blogueurs spécialisés dans les contenus vidéos.16
Une définition assez complète des owned, earned et paid media : http://www.contentmarketingacademie.fr/paid-owned-et-17
earned-media-poem-quelle-distribution-pour-vos-contenus/
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18. La grande période des blogs a vu émerger des experts très spécialisés dans leur domaine et qui
sont devenus fameux. La démocratisation du matériel photo et vidéo en haute définition a
aussi beaucoup rehaussé le niveau des productions vidéo amateurs au « minimum
regardable » et contribué à faire grossir la vague des vlogs. L’émergence de quelques youtu-
bers, ces vidéoastes qui ont acquis une notoriété en se mettant en scène sur la plateforme vi-
déo, a permis de constituer un réservoir de personnalités influentes pour les marques. Ce suc-
cès les a poussé à la professionnalisation. Les signes de reconnaissance des youtubers sont
« la mobilisation et la manifestation de jeux de language, c’est-à-dire un ensemble de rites,
d’actions, de formes plus ou moins communes qui permettent de les assimiler à cette figure
sociale » . Les youtubers, même s’ils manient l’humour, se rapprochent d’une certaine forme18
éditoriale en dépeignant des caractéristiques de la société ou simplement la nature de
l’homme. Pour Marc Jahjah, de l’Institut National de l’Audiovisuel -INA- les vidéos des you-
tubers « sont représentatives et symptomatiques d’une certaine écriture journalistique sur le
web, qui agrège, parfois rapidement, des sources disparates dans de petits articles pour antici-
per le -faible- degré d’attention du lecteur et lui fournir une structuration visuelle facile à ap-
préhender ».
Pour la plupart des youtubers néanmoins, il faut dire que les conditions de production sont
plutôt précaires et qu’une activité sur les réseaux sociaux est peu rentable avec la publicité
publicité en-deçà de cinq cent mille à un million d’abonnés.
L’autre pendant essentiel de l’après web 2.0 est la remise en question du blog en tant
que support média dominant. Pour Nicolas Dalmar, un des fondateurs des Golden Blogs
Awards, un trophée annuel des meilleurs blogueurs français par catégorie, le blog, en tant que
support média, « reste pertinent pour des contenus de niche, ultra-spécialisés » mais il est re-
mis en question sur les contenus populaires dits « grand public ». Dans sa forme initiale, le
blog est en effet en déclin, sévèrement concurrencé par les contenus réalisés nativement sur
de grandes plateformes dédiées au visuel et aux services de communication interpersonnelle
en réseaux, comme Instagram ou Snapchat. Elles sont réellement mobile first et constamment
dans l’innovation sur l’expérience utilisateur et elles disposent d’un parc d’utilisateurs colos-
sal qui réalise un trafic quotidien. Plus « traditionnel », Tumblr, qui s’était positionné comme
une plateforme de micro-blogging dès sa création en 2007, diffuse aujourd’hui beaucoup
http://www.inaglobal.fr/numerique/article/le-youtubeur-existe-t-il-1001218
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19. d’images et en particulier du gif animé. Ce n’est pas un choix de la plateforme elle-même
mais ce sont les usages de ses utilisateurs : un virage « organique » vers l’image en somme.
Globalement, Nicolas Dalmar note que « beaucoup de plateformes dédiées aux blogs, comme
hautetfort.com ou blogspirit.com » en France, « survivent » et leur fin semble proche. Toute-
fois, elles ne produisent pas elles-mêmes de contenus au même titre que des supports médias
de renom, pure players web, considérés également comme des blogs à l’origine, tels que le19
Huffington Post, Buzzfeed, Mashable ou Techcrunch . Ces sites web voient passer 1 million20
de visiteurs par jour et pèsent quelques dizaines de millions d’euros pour certains. Cependant,
Mashable, un « blog d’information renommé », a vu passer son prix d’achat de 250 à 50 mil-
lions de dollars, avant d’être acheté mi-novembre 2017 par Ziff Davis, un grand éditeur de
contenus spécialisés. Est-ce encore une preuve de la fin du blog en tant que format ?
Si l’on considère les influenceurs les plus populaires, on s’aperçoit qu’ils sont présents
sur le web à la fois sur Instagram, sur Twitter sur Facebook… et qu’ils disposent d’un blog ou
se retrouvent leurs différents contenus. Ils animent leur communauté au même titre qu’une
véritable marque ou qu’un média.
Le blog de niche bien référencé reste en tous cas un vecteur de trafic en longue traîne21
sur des sujets bien spécifiques mais tandis que les contenus natifs prennent de l’ampleur -et
du temps aux créateurs- la tendance de la ruée vers le blogs est bel et bien finie.
L’avènement des plateformes globales
Guillaume Champeau, actuellement Directeur de l'Éthique et des Relations Publiques
chez Qwant.com disait dans les colonnes de Numerama.com en 2016, que « des informations
qui prenaient des semaines à être obtenues il y a quelques siècles, des jours au 19e siècle, des
heures au 20e siècle, puis des minutes et désormais des secondes, ne nous parviennent tou-
jours pas assez vite. (…) Il y aura désormais d’un côté les pages HTML conformes aux re-
commandations du W3C, et de l’autre les mêmes pages HTML AMP conformes aux restric-
Entreprises qui n’exercent leurs activités que sur internet19
https://www.lifewire.com/top-most-popular-blogs-348636520
Le concept de « longue traîne » en SEO "désigne les mots clés qui attirent chacun peu de visiteurs sur un site Internet, mais21
dont le cumul peut représenter une part non négligeable du trafic total d'un site ». https://fr.wikipedia.org/wiki/
Longue_tra%C3%AEne#La_longue_traîne_en_référencement_naturel
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20. tions strictes imposées par le groupe » Google, qui standardise ces pages afin qu’elles s’af-
fichent plus rapidement sur mobile.
Les plateformes Google et Facebook prônent ainsi depuis près d’un an des formats de conte-
nus plus adaptés à la consultation sur mobile : Accelerated Mobile Page -AMP- pour le pre-
mier et Instant Articles pour le second. Ces formats permettent notamment d’accélérer le
chargement des pages et ils sont même privilégiés dans les résultats des recherches mobiles de
Google. Concernant les Instant Articles de Facebook, le format est privilégié dans les flux qui
apparaissent sur les pages du média social. Apple News est le format d’Apple qui s’appuie sur
le même principe et qui est privilégié dans le flux d’actualité des terminaux de la marque à la
pomme. Les avantages avancés sont nombreux et dans de nombreux domaines, car ces véri-
tables framework de développement autorisent des fonctionnalités à la fois pour la lecture de
contenus mais aussi pour le e-commerce, la publicité… Cette définition de standards, certes
basée sur le HTML, semble néanmoins inquiéter les éditeurs et les partisans du web ouvert
qui la considère comme une mainmise sur les standards web. Face -ou grâce- à cette mé-
fiance, Apple par exemple, a directement lié ses flux de News sur ses terminaux aux pages
web des éditeurs. Ce qui n’est pas le cas de Google qui conserve un flux d’articles AMP qui
dirige vers une adresse en « google.fr/amp/…/www.sitedel'editeur… » mais bien entendu,
pour plus de visibilité, il est possible de suivre le trafic grâce à… Google Analytics notam-
ment. On peut ainsi connecter les pages AMP à toute solution d’analytique et suivre en tests
AB ce qui fonctionne le mieux, AMP ou HTML 5 classique. En outre, les contenus aux
normes AMP peuvent désormais être aussi diffusés sur Facebook et le code AMP est open
source, ce qui ne manque pas de transparence.
Selon Google, le passage à l’AMP est rentable du point de vue de l’expérience utilisateur et
du positionnement dans les résultats. Le Washington Post aurait notamment, depuis le passage
au format, augmenté les visites venant des moteurs de recherche de 23% et la vitesse d’affi-
chage de ses pages de 88% en comparaison avec son site web mobile historique . Google22
met ainsi clairement en valeur ce format sur mobile.
L’étude de cas du Washington Post sur les pages du projet AMP : https://www.ampproject.org/case-studies/washington22 -
post/
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21. SOURCE : HTTPS://SEARCH.GOOGLE.COM/TEST/AMP
Le moteur de recherche et la régie publicitaire Google, filiale du groupe Alphabet Inc., avance
pour l’expérience utilisateur et pour conserver l’avantage en matière d’innovation. Il est com-
préhensible que les grands groupes du web veulent faciliter l’accès via le terminal mobile,
puisque celui-ci représentait plus de 50% du trafic web global fin 2016 . Aucune étude com23 -
parative plus récente n’a été trouvée sur les usages mobiles par rapport au PC mais l’évolution
de 10% annuels en moyenne depuis 2013, pourrait laisser envisager une progression similaire
pour 2017.
COMPARAISON DES USAGES INTERNET ENTRE PC ET MOBILE [DE 2009 À 2016] - SOURCE : STATCOUNTER.COM
Cependant, la méfiance des éditeurs est compréhensible. Les diffuseurs TV avaient déjà vu
leur lien direct avec les téléspectateurs se rompre avec l’arrivée des box, puis avec celle des
services TV en OTT. Dans l’édition papier, ils ont vu leur lien direct avec leurs lecteurs se
rompre au niveau des kiosques avec l’accès à la presse sur internet. Les éditeurs de sites de
http://gs.statcounter.com/press/mobile-and-tablet-internet-usage-exceeds-desktop-for-first-time-worldwide23
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22. médias en ligne voient maintenant le lien avec leurs visiteurs se morceler dans une compéti-
tion acharnée au trafic sur le réseau. Se plier maintenant à des normes imposées pour mieux
apparaître sur un moteur de recherche n’est pas évident et ce, d’autant plus que ce sont des
contraintes que les éditeurs doivent prendre en charge sur leurs budgets.
Les plateformes géantes de la Silicon Valley sont devenues tellement incontournables dans le
bon fonctionnement du web, qu’elles deviennent libres de définir entre elles de ce qui est bon
pour le réseau des réseaux et en particulier concernant le passage massif vers le mobile. Cela
nécessite une prise de conscience, du côté des éditeurs comme de la part des marques.
La « plateformisation des médias » que décrit Nicolas Jaimes dans le journaldunet.com en24
mars 2016, est certainement le résultat de la prise de conscience des éditeurs de grands mé-
dias-marques, concernant la perte de leur autonomie sur le web et le choix entre l’intégration
de leurs contenus au sein des grandes plateformes, en particulier les médias sociaux et les mo-
teurs de recherche globaux, et le développement de leurs propres supports, avec les risques et
les coûts induits par l’un ou l’autre de ces choix. Un équilibre entre les deux approches
semble pour l’instant s’imposer chez les grands éditeurs de presse. Pour les nouveaux arri-
vants qui sont davantage dans la disruption numérique, l’approche de la « plateformisation »
complète, sur les médias sociaux notamment, semble privilégiée. On pense notamment à Brut
ou MinuteBuzz en France.
Pour revenir aux pages AMP, selon Google celles-ci se chargent plus rapidement et
présentent mieux que les pages HTML standards sur les appareils mobiles. Ce format de
pages est également privilégié à l’affichage par Linkedin et Twitter, notamment. Est-ce que
cela signifie que ces grandes plateformes pensent également que l’AMP est un progrès pour
l’expérience utilisateur ou est-ce parce que cela contrecarre quelque peu le format Instant Ar-
ticle avancé par Facebook ?
http://www.journaldunet.com/media/publishers/1174182-plateformisation-des-medias/24
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23. TEMPLATE DE DOCUMENT EN AMP AVEC UN ENTETE EN HTML ET UN APPEL À LA FRAMEWORK AMP
Les plateformes Facebook et Google investissent dans la production média en soutenant et
finançant depuis peu des projets dédiés aux médias en ligne et aux journalistes. Apple, de son
côté, avait embauché des journalistes en 2015 pour son projet Apple News.
Google est sans doute le plus dynamique dans sa relation avec les médias avec la Digital
News Initiative, son fonds d'innovation dans le secteur, lancé en 2016.
Les grandes marques de plateformes applicatives, les GAFAM, développent toutes des visions
et activités en lien avec les médias car elles s’apprêtent bien entendu à terme, à être des points
d’entrée incontournables voire principaux vers les contenus numériques, que ce soit sur mo-
bile, en voiture ou à la maison.
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24. L’adaptabilité des contenus
Au-delà des objets connectés et notamment des montres, qui ont pour l’instant un impact limi-
té sur la création de contenus, il y a surtout l’explosion des usages mobiles, qui amène à
mettre au premier plan, l’adaptabilité des contenus. Le fait d’interpeller l’attention du mobi-
naute, au milieu d’un défilement rapide sur le petit écran, est un défi pour nombre d’éditeurs
et d’annonceurs, et s’adapter au support est un enjeu afin de fournir une expérience optimisée.
Bastien Schupp, Directeur Marque et communication Marketing chez Renault, exprimait ré-
cemment ces spécificités en ces termes : « Sur les nouveaux supports -mobiles-, la consom-
mation est plus rapide et éphémère ce qui impose des contraintes nouvelles quant aux formats
et à la vitesse (…) »
Cela s’avère compliqué et coûteux, en matière de production de contenus, de considérer tous
les réseaux de diffusion. Les formats des contenus prêts-à-diffuser doivent pourtant être dé-
diés au support visé dans le cadre de la diffusion. Il est donc nécessaire de trouver les work-
flows nécessaires à une adaptation facilitée, rapide et économique. C’est sans doute un des
objectifs de la content factory, que nous aborderons dans le dernier chapitre.
Les données collectées sur le support mobile et le caractère beaucoup plus individuel du ter-
minal, permettent par ailleurs de fournir une expérience et des contenus d’autant plus adaptés.
Si la publicité pratique une très forte adaptabilité grâce au réseau Adwords de Google, qui
connaît bien les pratiques des utilisateurs et délivre le display en fonction de leurs supports,
les contenus d’information semblent grandement influencés par ces pratiques marketing. Les
éditeurs semblent en effet se donner les moyens de procurer une expérience de consommation
de contenus optimisée en fonction du contexte de leur consommation, de leurs pratiques web
et de leur historique. Sur mobile, les parcours utilisateurs doivent être appréhendés en exploi-
tant les nombreuses possibilités du terminal mobile. Par exemple, une grande majorité d’utili-
sateurs acceptent d’être géolocalisés si cela est utile à une application sur leur mobile. Selon
les données stockées et analysées, il est possible de savoir ce que votre visiteur recherche, et
lui proposer un contenu, une vidéo ou une landing-page , adaptés à ses besoins.25
« Une landing page, ou page d'atterrissage en français, est une page isolée d'un site Internet, destinée à être celle sur la25 -
quelle arrive un internaute, après avoir cliqué sur un lien externe. Il s'agit le plus souvent d'un lien commercial (e-pub, newslet-
ter, mot clé) ou d'un lien de contact. » http://www.journaldunet.com/business/dictionnaire-du-marketing/1198313-landing-
page-definition-traduction/
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25. L’adaptive content permet de personnaliser l’expérience vécue sur une application ou un site
web en réalisant des ajustements qui capitalisent sur les profils des utilisateurs.
L’adaptation -davantage que l’adaptabilité- des contenus sur mobile c’est aussi, si l’on prend
l’exemple de la vidéo, la question du choix du format. Horizontal et rectangulaire ou format
carré, telle est la question. Celle-ci ne se pose pas en ces termes selon les retours d’experts
questionnés au dernier salon des professionnels de l’audiovisuel SATIS 2017, à La Plaine
Saint-Denis. Pour eux, il s’agit d’adapter le format au contexte de diffusion et à l’audience.
Pourtant, cela peut être contraignant quant au budget et à l’organisation de la production. Ce-
pendant, quand on est passé du 4:3 au 16:9 dans l’industrie audiovisuelle, la question de sa-
voir en quel format il fallait produire a vite été dépassée, dès lors que le format s’est imposé,
que toutes les télévisions sont devenues 16:9 chez les téléspectateurs et que les chaînes ne dif-
fusaient plus que ce format. La transition fut néanmoins difficile pour les producteurs vidéo,
qui ne savaient plus en quel format produire afin de pouvoir multi-diffuser leurs produits. Il
fut même un temps où la consigne fut de tourner des images 16:9 et de mettre les sujets à
l’image au centre, en considérant une possible diffusion en 4:3. Les supports et les usages im-
posent les formats mais le manque d’homogénéité actuelle entre les formats vidéo gêne sans
aucun doute les professionnels. Il est en effet plus compliqué de prévoir lors d’un tournage en
16:9 que la vidéo pourra être diffusée en 9:16.
L’utilisateur consomme en mobilité, apprécie la vidéo pour les raisons que nous avons
vu dans les sections précédentes et accède aux contenus aussi bien de son mobile, de sa ta-
blette ou de son écran TV. Les éditeurs de contenus de presse comme de marques, peuvent
difficilement considérer l’adaptabilité des contenus à tous les contextes de diffusion pendant
la vie du contenu. Ils doivent ainsi considérer avant tout la cible d’audience, ses habitudes de
consommation et ses supports et adapter leurs productions sur ces bases. Ils peuvent néan-
moins considérer le caractère multi-canal au moment de la production, sans pour autant aug-
menter foncièrement leurs coûts, en utilisant les nombreuses techniques de production à dis-
position.
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26. Par où commence la recherche
Les utilisateurs sont en grande majorité paresseux. Ils cherchent l’accès le plus simple qui leur
fournira ce dont ils ont besoin sur le réseau. La question de la distribution des contenus se
pose aussi par la « porte d’entrée » qui mène au réseau, dès lors que l’on interagit avec un
terminal. Les moteurs de recherche filtrent les contenus disponibles au regard des besoins des
internautes. Présents partout, ils indexent les pages et les médias à disposition pour les mettre
à disposition au travers de tous les terminaux et de toutes les interfaces : navigateurs, ap-
plications mobiles, pages d’accueil de médias en ligne, chatbots…
Les mobinautes font de plus en plus appel aux assistants vocaux et à la recherche vocale :
Google avec son Assistant, Apple avec Siri, Microsoft avec Cortana et Amazon avec Alexa.
Leurs pendants d’intérieur, comme Google Home, avec une couche logicielle basée sur les
assistants vocaux mobiles, s’installent dans la maison et dans les usages aux États-Unis.
Google a avancé en début d’année 2017 les résultats d’une enquête réalisée avec Northstar
Research, selon laquelle plus de la moitié des adolescents américains et 41% des adultes uti-
lisent la recherche vocale quotidiennement, et ces chiffres seraient en croissance continue.
« 2017 est l’année de la recherche vocale » selon Forbes . Selon Techcrunch « 35.6 millions26
d’américains utilisent un terminal d’assistance par la voix au moins une fois par mois » cette
année .27
Le groupe L’Équipe en France, en quête constante d’innovation numérique dans les médias,
vient de créer une application pour Google Home . S’agit-il de s’implanter sérieusement dans28
ces nouveaux accès aux contenus dès maintenant ? L’utilisateur de Google Home peut ainsi
obtenir le « Flash L’Equipe, un résumé de l'actualité sportive », « tester sa culture sportive »
ou connaître l’histoire du sport avec «L'Histoire du jour». Ces contenus sont également dis-
ponibles via l'Assistant Google sur mobile.
https://www.forbes.com/sites/forbesagencycouncil/2017/01/03/2017-will-be-the-year-of-voice-search/26
https://techcrunch.com/2017/05/08/amazon-to-control-70-percent-of-the-voice-controlled-speaker-market-this-year/27
https://www.lequipe.fr/Medias/Actualites/L-equipe-arrive-sur-google-home/84539828
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27. Ce ne sont que les prémices des assistances vocales sur terminal mobile et à domicile
qui, même si elles commencent à s’implanter aux États-Unis, manquent un peu de maturité
dans certaines fonctionnalités, dans la fluidité, dans la pertinence quant certains résultats de
requête et dans l’adaptation des traductions locales de l’assistance vocale, comme le montrent
certains tests .29
Un exemple de tests de l’assistant vocal Google Home : https://www.youtube.com/watch?v=Mb4tN-L6hc429
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28. 2.Le « roi » serait-il mort ?
Volontairement accrocheur ce titre, « le roi serait-il mort ? », découle du constat que le
contenu « roi » s’est progressivement transformé en matière première assez commune, dispo-
nible sur le web au milieu d’une offre très importante. Les médias en ligne sont en pleine crise
identitaire car tous leurs modèles, économiques, de production et de distribution d’informa-
tion, mais aussi éthiques, sont remis en question par un certain nombre de facteurs. Nous al-
lons lister dans ce chapitre un certain nombre de facteurs, innovations et états de fait qui dis-
ruptent les médias en ligne, traditionnels comme pure players, ce qui nous mènera au pro-
chain chapitre vers les enseignements à tirer ainsi que les perspectives.
Ces facteurs de disruption sont intéressants pour les marques, car ils préfigurent des
profonds changements qui auront, d’une façon ou d’une autre, une influence sur les contenus
promotionnels de marque.
Nous sommes dans une « économie de l’attention » selon Jean Tirole. L’économiste et
Prix Nobel évoque cette course à l’attention vu du côté de l’utilisateur, en disant que « nous
disposons de trop d’offres, et non de trop peu. Notre problème est d’utiliser au mieux le temps
et l’attention que nous décidons d’allouer à ces activités . »30
Cette attention, ce reach , c’est le « graal » de tous les éditeurs et de tous les annonceurs.31
Disruption précoce et réaction tardive ?
« Dans les rédactions, on travaille quotidiennement à la production de contenus conçus
pour la plateforme de Mark Zuckerberg ». C’est ce qu’affirme Frenchweb, le magazine sur
l’innovation web édité par Adsvark, dans un article du 16 novembre 2017. Le site web ajoute
que « à LCI par exemple, la rédaction doit produire 14 heures de direct par mois et
Jean Tirole -via Linkedin Pulse- https://www.linkedin.com/pulse/les-plates-formes-gardiennes-de-l%C3%A9conomie-30
num%C3%A9rique-jean-tirole
Le reach est la couverture d’une campagne, d’un site ou d’un réseau publicitaire. Pour une campagne, c’est le pourcentage31
d’internautes ou d’individus appartenant à la cible ayant été exposé à une création publicitaire au moins une fois pendant la
période de la campagne. Pour un site ou un réseau , le reach c’est la part de la population internaute touchée par le site ou
réseau sur une période donnée. In definitions-marketing.com/definition/reach/
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29. chaque séquence de live doit durer entre 6 et 20 minutes – Un timing précis qu’il vaut mieux
respecter car les contrôles sont stricts, explique-t-on en interne ». Les médias sont-ils devenus
totalement dépendants de Facebook et de Google ?
La disruption des médias dits « traditionnels » fut précoce mais leur transformation digitale
fut lente et frileuse. Pourquoi ? Une des raisons est sans doute la croyance dans la résilience
des médias-marques à forte notoriété. Les médias ont-ils pris en compte l’ampleur des possi-
bilités liés aux réseaux numériques, à l’Internet….? En outre, la disruption et le morcellement
de l’audience sont devenus tels que tous les médias doivent aujourd’hui constamment innover
pour rester compétitifs, au même titre que des entreprises technologiques.
Malgré les regroupements industriels entre groupes de télécoms et groupes de médias, qui ont
eu lieu au début de la démocratisation de l’accès au réseau Internet, pour le meilleur et surtout
pour le pire , les entreprises de presse ont finalement mis vingt ans pour réellement com32 -
prendre que des changements majeurs étaient inévitables.
« UNE PETITE FAVEUR À DEMANDER » : VIGNETTE EN FIN D’ARTICLE SUR LE SITE DU QUOTIDIEN BRITANNIQUE
THEGUARDIAN.COM EN NOVEMBRE 2017
« Les GAFAM contre l’internet, une économie politique du numérique » de Nikos SMYRNAIOS; chapitre Privatisation de32
l’internet et concentration oligopolistique; Éditions INA
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30. Les modèles économiques et les technologies n’étaient sans doute pas tout à fait matures au
début de l’Internet et la notoriété des grandes marques leur permettait de contrer une baisse de
leur chiffre d’affaires trop conséquente. Ces marques de presse avaient néanmoins pressenti
que leur position était fragilisée mais elles se sont focalisées sur la menace des opérateurs sur
l’accès aux utilisateurs via les box et elles n’ont pas réellement vu venir l’ampleur du phéno-
mène des réseaux sociaux. En effet, les médias audiovisuels ont dû nécessairement dévelop-
per des offres communes avec les opérateurs mais il aura fallu attendre plus récemment pour
avoir à disposition des offres groupées avec de la presse sur les box, par exemple avec les
offres SFR média et Canal+ avec les contenus de L’Équipe intégrés. C’est surprenant étant
donné les possibilités, y compris technologiques, en matière de médias, fournies par la distri-
bution IP au travers des box. Finalement, il aura fallu voir une baisse significative des revenus
sur la vente des formats imprimés -en moyenne -1,5% sur un an selon l’ACPM -, pour voir33
les grands médias marques prendre réellement en main leur destin numérique. Est-il trop
tard ? Ça le sera quand les médias traditionnels et pure players seront devenus de simples
usines à contenus pour les grandes plateformes. Du point de vue technologique, les entre-
prises sont déjà incomparables. Du point de vue des communautés, du capital d’utilisateurs,
elles le sont aussi. Dit avec une emphase toute révolutionnaire : il ne reste plus aux médias
que le regroupement des forces pour une dernière tentative de résistance, avant la colonisation
culturelle et économique complète du réseau d’information public occidental par les majors
du web américain. Dit avec des termes marketing : il est nécessaire de regrouper les actifs
dans le domaine des données clients et des inventaires publicitaires pour exister face aux 68%
de parts du marché publicitaire numérique français et aux 92% du marché mobile tenus par
les entreprises de la Silicon Valley . En France, cela se caractérise par les projets Gravity et34
Skyline, qui réunissent de grands groupes de presse français.
Qu’est-ce que ces bouleversements publicitaires impliquent du point de vue des annonceurs ?
Au premier coup d’oeil, cela signifie sans doute juste un transfert des budgets publicitaires
vers les régies globales et automatisées des plateformes GAFAM. À terme, cela signifie peut-
être d’autres problématiques.
ACPM : Alliance pour les Chiffres de la Presse et des Médias33
Selon l’Observatoire de l'e-pub, PwC, Udecam et SRI34
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31. Des communautés conquises
NEW YORK TIMES SUNDAY REVIEW -13 OCT. 2017- : « NOUS COMMENÇONS À COMPRENDRE QUE LES ENTRE-
PRISES TECH DE LA SILICON VALLEY N’ONT PAS À COEUR NOS INTÉRÊTS »35
Le média est social.
Quand Le Figaro Classified a décidé de reprendre Viadeo fin 2016, il était sans doute
déjà trop tard pour contrer Linkedin. Ce réseau social avait déjà effectué une expansion mo-
nopolistique dans les pays occidentaux. Innovation servicielle, notamment grâce à quelques
rachats d’outils applicatifs intégrés à la plateforme, expérience utilisateur fonctionnelle, ré-
seau mondial et globalisé, ont sans doute pris part dans cette concentration des utilisateurs qui
souhaitent disposer d’un vitrine pour leur carrière professionnelle.
Auparavant, certaines -rares- marques médias françaises ont tenté de développer des
réseaux sociaux. On pense à skyrock.com par exemple, qui fut à l’origine le support de pages
personnelles populaire Skyblog, a perdu en trois ans, de 2014 à 2017, plus de 40% de ses
https://www.nytimes.com/interactive/2017/10/13/opinion/sunday/Silicon-Valley-Is-Not-Your-Friend.html35
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32. comptes utilisateurs, passant de 23 millions à 16 millions. Classé 27e site français par Alexa
en 2013, il est aujourd’hui classé 277e en France. La perte de terrain est plus que conséquente
en si peu de temps. Cette expérience montre le résultat décevant de la tentative de développer
un réseau social pour un groupe de l’industrie des médias français face aux géants américains
du domaine. De plus, ce constat s’applique à tous les réseaux sociaux produits en France,
comme Viadeo ou Les Copains d’Avant. Les raisons sont multiples. Les capacités d’investis-
sement des groupes mondiaux comme Facebook et leur travail de traduction de qualité des
interfaces et services, à l’origine en anglais, ont permis aux internautes de tous les pays d’ac-
céder à ces plateformes facilement. Les capacités technologiques et l’expérience utilisateur
ont fait le reste.
Les réseaux sociaux on pris le statut de médias -sociaux- globaux, qui ont entre-temps déve-
loppé de tels panels d’utilisateurs et de tels possibilités de segmentation pour proposer aux
annonceurs des inventaires ciblés, alors que les médias-marques traditionnels sont contraints
de regrouper leur base de données utilisateurs et leurs inventaires de display publicitaire no-
tamment. Il s’agit de proposer des offres pour contrer une transition évidente des budgets pu-
blicitaires vers les grandes bases de données publicitaires des médias sociaux et des plate-
formes numériques globales en général. Nous y reviendrons plus tard.
La Chine, qui n’a jamais vraiment ouvert son réseau au niveau national, l’a ouvert pe-
tit à petit en filtrant. Cependant, ces restrictions pour des raisons politiques, si elles ont sans
doute limité l’accès à l’information aux citoyens chinois, ont procuré une grande liberté aux
acteurs de l’économie locale de l’Internet. Ils ont ainsi pu se développer à leur rythme, sans la
concurrence des « poids lourds » du web américain. Certes, ces services chinois ont souvent
copié nettement les services des grandes plateformes applicatives américaines et globales, tels
que Baidu, qui s’inspire de Google et de Wikipédia, ou Wechat, qui s’inspire de Facebook.
Aujourd’hui, les entreprises du web chinois existent bel et bien et elles sont tout aussi inno-
vantes, voire davantage encore dans certains cas, que les géants américains et mondiaux.
Malheureusement, cet avantage s’est fait au travers d’un fort protectionnisme culturel et poli-
tique.
En France, le train semble déjà passé. Les internautes, en particulier la génération Y -
appelée aussi millenials- qui a entre 15 à 35 ans, est grandement acquise à des plateformes
que la qualité des services, l’innovation et le caractère global, rendent attractives.
L’hégémonie des industries numériques de la Silicon Valley engendre une hégémonie
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33. culturelle. C’est ce que décrit Henri Verdier dans Usbeketrica en ajoutant que « ce qui est36
frappant, c'est la difficulté à faire émerger une réponse culturelle à ce défi culturel ». Car
techniquement, rien à dire. L’innovation des solutions et services des GAFAM est exemplaire.
Cependant, ce que Henri Verdier omet dans son discours, c’est que cette capacité technique
propose une expérience utilisateur telle, que les usages y sont progressivement associés. La
réponse culturelle est sans doute essentielle mais pas suffisante. Qwant développe les aspects
différentiants : le respect des données, le côté libre, le « Fait en Europe »… Soit, mais si le
service souhaite peser face à Google, il manque peut-être aussi la partie servicielle. Pourquoi
ne pas développer par exemple des services applicatifs de création de documents en ligne par
exemple, une sorte de Qwant Docs, identique à Google Docs. Les ressources open source
existent sur internet pour le faire. Le serviciel est essentiel pour entraîner les usages et une
plateforme en ligne ne peut pas se contenter de fournir ou d’agréger des informations, aussi
qualitative soit l’expérience utilisateur dans la recherche, comme c’est le cas pour Qwant.
En outre, pourquoi l’écosystème web et médias français et européen n’a-t-il pas réussi
à créer des réseaux sociaux à la hauteur de Facebook ou des moteurs de recherche à celle de
Google ? En plus de Qwant, qui survit grâce aux soutiens financiers publics, il y a Mastodon.-
social en France, l’équivalent de Twitter en open source, qui compte un peu moins de 1 mil37 -
lion de comptes créés.
Aujourd’hui on assiste à une prise de conscience générale pour faire face au poids
monopolistique des GAFAM, ces « softwares networks » mondiaux -les « SONETS »-, pour
reprendre l’expression de Pierre Bélanger, fondateur des médias SKYROCK et SKYBLOG-.
Est-ce que l’enjeu est réalisable ? Les grandes marques industrielles décideront aussi de l’al-
location de leurs financements publicitaires et de leurs investissements techniques dans le
prochaines années. Il est nécessaire de trouver des modes de collaboration avec les GAFAM,
qui ont la capacité de porter l’innovation dans nos territoires. Une disruption non-constructive
n’est pas favorable au développement et à la consommation et donc défavorable à toute l’éco-
nomie mondiale.
Cette constatation de monopole des GAFAM sur le volet de l’information est grande-
ment reprise dans les critiques que leur font les supports et groupes de presse dans le monde.
Dans l’industrie des médias française, on note ainsi des regroupements dans le cadre de la
https://usbeketrica.com/article/la-silicon-valley-nouvelle-capitale-mondiale-de-la-culture36
https://mastodon.social/about37
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34. préservation d’intérêts économiques. Skyline, lancé le 6 juillet 2017, est un projet qui réunit
les capacités d’inventaires de placements publicitaires du Groupe Figaro -Lefigaro.fr, Linter-
naute, Le Journal des femmes, Madame Figaro…- et du Groupe Le Monde (Lemonde.fr, Tele-
rama.fr, L’Obs, Le Huffpost…). Par ailleurs, Gravity, lancé le 4 juillet 2017, regroupe les
données des utilisateurs et clients des groupes Prisma Media, Condé Nast, la FNAC Darty,
Les Echos, Lagardère, SoLocal, SFR, les titres La Dépêche, Le Télégramme, Sud Ouest, L'E-
quipe ainsi que certains sites web de M6. Ce sont des partenariats stratégiques entre de grands
groupes de médias qui diffèrent selon les groupes médias et selon les « places de marchés »
publicitaires concernés. L’idée qui reste commune néanmoins, est de proposer aux annonceurs
des bases d’utilisateurs qui ont un poids, en particulier qualitatif, en matière de « reach » pu-
blicitaire.
Critique sur les monopoles dans l’économie numérique des GAFAM, la Commissaire
européenne à la concurrence Margrethe Vestager, a affirmé lors du Web Summit 2017 : « Ce
ne doit pas être la taille d'une entreprise, ni ses connexions gouvernementales qui font son
succès, mais sa capacité d'innovation et la qualité de ses produits ».
Les GAFAM ont bien entendu gagné leur place omniprésente dans le paysage numérique38
mondial et c’est à force d’idées et d’innovation. C’est sans doute aussi grâce à la capacité
d’investissement, en particulier privé, aux États-Unis. Cependant, la régulation a peut-être un
mérite, sans aller dans un protectionnisme à la chinoise, c’est de permettre d’équilibrer un peu
plus la course infernale qui serait perdue d’avance sinon, que mènent les entreprises tech en
Europe. Gardons néanmoins en tête que grâce aux GAFAM, le monde numérique a considé-
rablement progressé et cela, on ne peut pas leur enlever. Mais gardons aussi en tête quelques
exemples positifs de la qualité de l’innovation européenne -et en l’occurrence française-. Un
des fondateurs de Linkedin, le réseau professionnel mondial, est un Français -Jean-Luc
Vaillant-. C’est l’entreprise d’un français -Antoine Blondeau-, qui est à l’origine des techno-
logies de Language Processing sur lesquelles se base SIRI, l’assistant vocal d’Apple. C’était
pourtant avec des financements américains.
Les marques industrielles françaises et européennes ont certainement intérêt à bien
anticiper le placement de leurs priorités quant à l’innovation et aux partenariats pour les an-
nées à venir, afin de garantir des accès et des supports vers l’information et les services
connectés.
En référence au « paysage audiovisuel » représenté par les télévisions traditionnelles38
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35. Authenticité et véracité des contenus : des qualités rares
Emmanuel Hoog, P-DG de l’AFP, disait récemment : « Il y a de plus en plus de producteurs
et de moins en moins de cartes de presse, de plus en plus de contenus mais d’une extrême re-
dondance. A l’échelle mondiale, sur une journée, seule 40% de l'offre est originale. »
Cette surcharge d’information redondante, cette « infobésité », que les contenus soient de
qualité ou pire encore, quand ils ne le sont pas, créé une fragmentation importante de l’offre et
une difficulté pour les éditeurs à trouver un modèle rentable.
D’une part, l’internaute trouve souvent le même contenu , en particulier pour de l’information
non spécialisée, via une autre source et gratuitement. D’autre part, la profusion de la mise à
disposition sature l’internaute dans sa recherche, sauf à chercher des supports ou des marques
très précises. Pour émerger dans cette offre importante et mondiale, faut-il être réellement
plus racoleur que ses concurrents ? Pas forcément. Car si la stratégie sensationnaliste rapporte
un maximum dans la course aux clics, à long terme, les internautes finissent par établir leur
propre sélection, leur propre classement, de marques, de chaînes, de comptes, de pages… à
l'intérieur de rubriques, telle l'information-poubelle, dont il est difficile de s'extraire. Sans
compter que les internautes se lassent vite et ont tendance à se tourner davantage vers des
contenus plus rafraîchissants, voire informationnels. La montée des contenus produits par
tout-un-chacun, ainsi que la dévalorisation - temporaire ? - du statut de référents des journa-
listes, ont fait que certains principes journalistiques - telle la double vérification d'une infor-
mation avant sa publication - ont disparu et laissent le lecteur/spectateur/utilisateur face à un
ensemble d’informations privées de garde-fous.
Sur les supports numériques, la curation, l’agrégation et la copie ont amplifié le phénomène
de churnalism .39
Le métier des marketeurs est de diffuser sur les réseaux les contenus de leurs
marques et il faut bien le dire, si certains sont de vraies « plumes », d’autres ne sont pas ré-
dacteurs dans l’âme. Steve Kearns travaille à Linkedin en tant que Responsable Marque. Il a
dépeint les qualités des journalistes recherchées –et introuvables- chez les marketeurs. Il a
aussi prôné de belles carrières pour les journalistes dans la promotion des marques. Pour lui,
« Le churnalism est un journalisme de communiqués d’agence, de réduction de coûts, d’articles sans reportages sur le ter39 -
rain, et sans vérification ». Wikipédia note dans sa page –uniquement en version anglaise https://en.wikipedia.org/wiki/Churna-
lism - sur le phénomène du Churnalism, que « cette tendance du journalisme a augmenté à un point que beaucoup d’histoires
trouvées dans la presse ne sont plus originales ».
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36. ce qu’il manque aux marketeurs dans cette demande grandissante de contenus, ce sont surtout
l’esprit critique, les capacités pour une écriture rapide et efficace et la compréhension basique
du contexte des médias.
Un membre de Linkedin évoquait récemment le besoin d’objectivité et de vérité des sup40 -
ports de presse professionnelle spécialisée. En effet, ces supports servent à beaucoup de gens
pour faire des choix d’achats ou pour se documenter dans le cadre de leurs affaires. La
confiance dans l’industrie des contenus de presse spécialisée en ligne est nécessaire à l’achat
de l’information. C’est même un des critères de valeur, si ce n’est le principal.
Les utilisateurs et consommateurs de contenus subissent globalement la surabondance
et le manque de qualité et d’objectivité, des qualités souhaitées, en particulier pour les conte-
nus destinés aux professionnels. Les contenus spécialisés doivent en effet fournir des faits vé-
rifiés et montrer les véritables enjeux. Cela se financera de plus en plus sans doute, comme
tout contenu exclusif et/ou qualitativement au-dessus du lot.
En outre, pour émerger dans cette offre importante de contenus désormais mondiale,
faut-il être réellement plus racoleur que les autres ? Cela n’est pas si sûr car dans le top 50 des
sites de presse français pour ce qui est de l’audience, on ne trouve aucun support à caractère
sensationnaliste. La nécessité d’adaptation de ces supports, même à l’origine issus de la
presse traditionnelle, vers un traitement des articles -titrage, vignette… - spécifiques à leur
support web, est cependant notable.
Si la mise à jour des algorithmes Panda de Google a fortement pénalisé les contenus
dupliqués et les sites « fermes à contenus », le principe qui consiste à emmener le plus d’utili-
sateurs possibles à consulter le plus de pages possibles pour afficher le plus de publicités en
display et ainsi récolter le plus de revenus publicitaires, se porte par contre lui très bien. La
tendance acceptable consiste à afficher des contenus en liens sponsorisés en bas des articles
d’éditeurs, comme Taboola ou Outbrain, une solution installée sur plus de 3,5 milliards de
pages dans le monde et qui génère plus de 200 millions de clics/mois-. Cela s’appelle recom-
mandation ou découverte de contenu. Différents et plus dangereux pour les budgets des an-
nonceurs sont les impressions publicitaires sur des sites fantômes, créés uniquement pour réa-
liser des impressions publicitaires et récolter ainsi des revenus. Une vaste arnaque qui touche
les investissements publicitaires de grandes marques aux États-Unis.
Membre dont il n’a pas été possible de retrouver la référence40
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37. Les réponses ne sont peut-être pas dans la course aux clics mais au contraire dans la
protection des valeurs qui donnent crédit au journalisme. Le « sensationnaliste » est subjectif
car l’on peut faire un titre attrayant sans pour autant proposer un contenu racoleur et c’est ce
qu’on toujours fait les quotidiens ou magazines en presse papier.
Les internautes classent en tous cas les marques, les chaînes, les comptes, les pages… dans
des rubriques « thématiques » et il est extrêmement difficile de sortir de celle de l’informa-
tion-poubelle. De plus, ils se lassent de certains contenus et se tournent souvent au final vers
des contenus plus rafraîchissants ou davantage informationnels.
Les publicités intrusives et le harcèlement publicitaire, sur mobile notamment, n’ont
pas aidé à renforcer la confiance des utilisateurs. De nombreuses plaintes sont disponibles
dans les forums internet sur ce type d’intrusions publicitaires. Si l’indulgence des utilisateurs
doit être préservée et pour que ceux-ci ne soient pas contraints d’installer des adblockers sur
mobile, il est nécessaire de prévenir les publicités intrusives qui peuvent apparaître sur mo-
bile, en particulier celles qui empêchent toute sortie, retour ou clic de l’utilisateur, autre que
sur la bannière.
Les fausses informations, plus communément appelées « Fake News », fruits d’une
nouvelle cyberpropagande alliant le plus souvent technologies numériques publicitaires et
techniques éditoriales dites « people » ou « choc », utilisent la puissance de diffusion des pla-
teformes connectées, fondée sur le partage et la "viralité".
L’automatisation trouve ici ses limites. Les grands réseaux sont obligés d’utiliser des filtres
humains, les fact checkers, soutenus bien entendu par les signalements d’autres utilisateurs ou
par ceux des machines. L’intelligence artificielle -IA- prend ainsi part à ce contrôle des in41 -
formations. L’automatisation du contrôle sur la plateformes de médias sociaux n’a pourtant
pas permis de régler les problèmes de contenus faux ou liés à de la cyberpropagande. Face-
book est critiqué pour le manque de transparence sur l’efficacité de son fact checking automa-
tisé et sur le fait que ses algorithmes consistent à la suppression pure et simple de posts . Il a42
aussi été constaté sur Youtube que l’IA chargée de modérer automatiquement aurait pénalisé
Ce terme n’a pas pu être défini clairement ou seulement avec beaucoup de prudence par des spécialistes du domaine de41
l’IA dans les médias -IBM Cloud Video, Trendsboard, FlameFy et L’Antenne Paris- lors d’un colloque au SATIS 2017. Cepen-
dant, l’un d’eux a évoqué « la capacité des machines à créer de l’intelligence ». Wikipédia cite aussi la phrase suivante : l’IA
désigne les « dispositifs imitant ou remplaçant l'humain dans certaines mises en œuvre de ses fonctions cognitives »
https://www.nytimes.com/2017/10/23/upshot/why-the-fact-checking-at-facebook-needs-to-be-checked.html42
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38. des constations de crimes et l’investigation en Syrie par la suppression d’éléments étudiés ou
de comptes de chercheurs .43
Certes, l’IA, s'appuyant sur des paramètres prédéfinis, peut constituer un premier filtre et ai-
der à identifier des "Fake News". Mais quid de son niveau de fiabilité ? Des "vraies" informa-
tions ne risquent-elles pas, en effet, d'être assimilées à de la propagande extrémiste ? C’est
sans doute pour parer à ces risques que Youtube a annoncé le renfort de 10 000 modérateurs
d’ici à 2018 .44
La montée des contenus produits par tout-un-chacun ainsi que la diminution -tempo-
raire?- du statut de référent pour les journalistes, a pour conséquence que certains concepts et
garanties journalistiques -comme la double vérification nécessaire avant publication- dispa-
raissent et laissent l’utilisateur face à un ensemble d’information dont les producteurs et insti-
gateurs ne sont pas du tout garantis.
L’ILLUSTRATION CI-DESSUS REPRÉSENTE LE PARTAGE DES MOTS-CLÉS LIÉS AUX ÉLECTIONS AUX ÉTATS-UNIS
DE 2016. LES POINTS SONT DES COMPTES TWITTER; LES LIGNES SONT LES RETWEETS; LES POINTS LES PLUS
VOLUMINEUX SONT LES PLUS RETWEETÉS. LES POINTS ROUGES SONT À PRIORI DES COMPTES ROBOTISÉS ET
LES POINTS BLEUS DES HUMAINS - CREDIT : CLAYTON DAVIS (CC BY-ND)
http://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/2017/08/15/32001-20170815ARTFIG00005-la-politique-de-moderation-de-youtube-43
s-egare-sur-la-question-syrienne.php
https://youtube.googleblog.com/2017/12/expanding-our-work-against-abuse-of-our.html44
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39. Une équipe de recherche de l’Université de Columbia a travaillé avec son « traqueur de45
rumeurs » -rumor tracker- sur la diffusion électronique des fausses informations lors de cam-
pagnes électorales aux États-Unis en 2014 et en 2016. Elle a notamment conclu que la désin-
formation automatisée est tout autant virale que l’information dite vérifiée. Cette intelligence
artificielle testée pour suivre les rumeurs sur Twitter a montré son fort taux d’apprentissage de
l’information violente ou provocante, sans doute plus virulente et plus présente sur les plate-
formes. Relayée par des comptes robotisés, la désinformation a prospéré de façon exponen-
tielle au sein de l’opinion, qui a elle-même relayée. Devant ces constats, l’équipe universitaire
a décidé de créer un détecteur de « social bots » -dédié à Twitter-.46
Dans la même idée de vérification de l’authenticité des contenus diffusés sur les réseaux,
l’équipe des Décodeurs du journal Le Monde, dirigée par Samuel Laurent, rédacteur en chef
adjoint du quotidien, a également créé un bot sur Messenger où l’on peut faire du fact che-
cking en rentrant des sujets que l’on souhaite vérifier.
Nicolas Papernot, chercheur à l’Université de Pennsylvannie, a de son côté réussi à démon-
trer avec son équipe qu’il est assez simple, dès lors qu’on en a la motivation, de manipuler les
éléments d’une base de données, de façon imperceptible à l’oeil humain. Cela peut corrompre
totalement la perception de l’intelligence artificielle et donc les résultats.
EXPÉRIENCE DE NICOLAS PAPERNOT ET DE SES COLLÈGUES DE L’UNIVERSITÉ DE PENNSYLVANIE SUR LA COR-
RUPTION DE BASES DE DONNÉES D’APPRENTISSAGE MACHINE À L’AIDE D’ALTÉRATIONS QUASI IMPERCEP-
TIBLES47
https://phys.org/news/2016-11-misinformation-social-mediacan-technology.html45
https://botometer.iuni.iu.edu46
Le symbole perçu par l’IA est biaisé en bas. Source : https://arxiv.org/pdf/1602.02697v2.pdf47
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40. Afin d’éviter les risques liés au « biais qui risquent d’être amplifiés par l’utilisation de don-
nées d’entraînement » de l’apprentissage machine, nous devons « apprendre à évaluer ces
biais et à construire des outils pour suivre l’évolution des systèmes avec autant d’efforts que
ceux apportés à construire des modèles ». C’est ce qu’affirment les journalistes Hubert
Guillaud et Rémi Sussan dans leur blog sur Lemonde.fr, spécialisé sur l’impact des technolo-
gies sur la société.
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41. Quel bon mix économique ?
Une étude IPSOS pour l’IAB note en 2016 que 36% des internautes français utilisent
un adblock, un logiciel anti-pub, et que cela représente une progression de 20% par rapport à
janvier de la même année. Un phénomène inquiétant pour le marché publicitaire, qui remet en
cause l’efficacité de la publicité dite display sur ordinateur et qui représenterait une perte
d’environ 1 à 3 millions d’euros pour les plus grandes plateformes de médias en ligne en
France.
Les éditeurs et publicitaires -sous la houlette de la fédération des éditeurs en ligne, le
Geste.fr- avaient mené au printemps 2016 une contre-attaque contre les adblockers.
Les principaux éditeurs de ces applications avaient alors évoqué la possibilité d’une accepta-
tion ou d’un rejet de certaines publicités sur des « critères opaques » selon le GESTE. La dé-
marche de certaines adblockers était déroutante pour les éditeurs car au prétexte de protection
de la vie privée -AdBlock par exemple, participe à des initiatives avec eff.org, une ONG qui
« défend la vie privée numérique, la liberté de parole et l’innovation »- il s’agissait de filtrer
l’affichage des publicités dans les pages des utilisateurs et de décider des publicités qu’ils
vont voir ou pas sur les pages des éditeurs de contenus. Une campagne a suivi pour à la fois
sensibiliser et lutter contre l’installation des adblockers dans les navigateurs.
LES AUTORISATIONS DEMANDÉES PAR LES BLOQUEURS DE PUBLICITÉ SONT-ELLES COHÉRENTES AVEC LES
PRINCIPES AVANCÉS ? - CAPTURE D’ÉCRAN D’UN NAVIGATEUR LORS DE L’INSTALLATION DE ADBLOCK
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42. A l’origine destinés à stopper la publicité intrusive, les applications anti-pubs se sont
avérés très prisées dans les usages pour empêcher l’affichage de tous les fichiers provenant de
serveurs publicitaires.
MESSAGE DE SENSIBILISATION SUR LES ADBLOCKS SUR MADMOIZELLE.COM.
Le site d’information spécialisée Next Impact disait justement à l’époque sur le sujet que cer-
tains éditeurs envisageaient de « limiter la diffusion de publicités intrusives » et d’inciter leurs
lecteurs à « contacter l'équipe avec une capture d’écran » -de la pub intrusive- sur l'adresse
email à cet effet. L’objectif : être à l’écoute des utilisateurs, les placer au coeur d’une offre
diversifiée, sans pour autant pratiquer un nivellement par le bas des contenus, demeure le
meilleur moyen d’attirer les visiteurs et d’augmenter leur nombre.
En outre, les utilisateurs ne se laissent pas faire. Selon developpez.com, ils ont simplement
désinstallé AdBlockPlus, souvent pour installer un autre éditeur de bloqueur de pubs, lorsque
AdBlockPlus s’apprêtait à avancer dans son programme de publicités acceptables, tout en
créant une plateforme d’ad-exchange pour mettre en relation éditeurs et annonceurs .48
Cette année, un coup de tonnerre -parmi d’autres- a eu lieu dans le marché de la publi-
cité. Les investissements publicitaires sur mobile ont dépassé tous les autres supports. Au der-
nier trimestre 2016, ils représentaient 53% du total des investissements. La raison ? Bien en-
tendu parce que le nombre de connexions sur mobile a largement dépassé celles sur ordinateur
-65% contre 35% pour la fin 2016 selon Médiamétrie-. Sans doute également parce que les
adblockers n’y sont pas encore très implantés, avec une exception en Asie, qui concentrerait
94% des adblockers mobiles dans le monde.
Face à la diversité des solutions d’adblocking, face à la surenchère des parades techniques
d’un côté comme de l’autre, les grands éditeurs ont préféré compter sur leurs visiteurs fidèles.
https://www.developpez.com/actu/155459/Adblock-Plus-remporte-une-nouvelle-victoire-contre-les-editeurs-un-tribunal-48
estime-a-nouveau-qu-il-n-est-pas-illegal/
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43. Ils leur proposent ainsi une grande liberté d’achat avec des abonnements sur la base d’un seul
contenu qu’ils peuvent leur proposer sur la base d’un achat ponctuel, payé à l’aide d’un mi-
cro-paiement, ou sur celle d’abonnements à moyen ou long terme. Les rédactions font alors
jouer leurs contenus exclusifs, plus recherchés, plus investigués, pour attirer les abonnés et
cela marche. Un rédacteur en chef explique ainsi que l’interview exclusive du footballeur Ro-
naldo dans ses colonnes a engendré plusieurs centaines d’abonnements supplémentaires pour
l’occasion.
En outre, le blocage des contenus pour les internautes qui disposent d’un bloqueur de publici-
té s’avérait contre-productif pour les éditeurs. Aujourd’hui ceux-ci se sont recentrés sur un
mix entre abonnement et contenus gratuits avec une tendance nette cependant pour un par-
cours utilisateur qui dénombre les contenus gratuits consultés par l’utilisateur. Une méthode
dont le fonctionnement technique laisse d’ailleurs à désirer sur un certain nombre de sites de
grands médias testés. La sensibilisation et les retours utilisateurs sont restés néanmoins une
façon d’informer les visiteurs.
FENÊTRE DE PROPOSITION D’ABONNEMENT SUR LE SITE DU WASHINGTON POST
L’histoire des adblockers rappelle qu’il ne s’agit pas de bloquer à son tour mais de s’adapter :
c’est aussi cela le développement agile dans le monde numérique. L’innovation positive à
l’écoute des utilisateurs reste la seule issue, surtout lorsque ce sont les utilisateurs qui jugent,
directement.
En 2016, la progression de la publicité display s’est réalisée uniquement sur les ré-
seaux sociaux, avec 62% de croissance sur ces supports. Dès lors, les médias traditionnels ou
pure players web sont forcés de considérer très sérieusement les offres de partenariats propo-
sés notamment par Facebook et Snapchat. Sur ce dernier, les revenus publicitaires restent pour
le moment confidentiels pour les grands médias interrogés mais le Directeur du Digital du
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44. journal L’Équipe, Emmanuel Alix, un des quelques médias -privilégiés ?- à se joindre au for-
mat Discover en France, évoque 520 000 lecteurs quotidiens sur le Discover du quotidien
sportif, ce qui prouve que l’audience est bien là. Nous reviendrons sur les spécificités de
Snapchat dans la dernière section de ce chapitre, dédiée aux contenus social native.
Récemment, certains éditeurs ont constaté pour la première fois des marges non négli-
geables sur leurs activités numériques, qui deviennent un complément plus qu’utile à d’autres
de leurs supports de contenus en perte de vitesse. On pense notamment au New York Times,
qui a engrangé, au premier trimestre 2017, une baisse des revenus publicitaires de 18% sur ses
supports papier et une hausse de 19% des revenus sur ses supports numériques. Les grands
titres de presse en ligne doivent cependant s’adapter pour engager leurs mutations technolo-
giques tout en conservant leurs valeurs éditoriales, une plus-value indéniable dans un monde
de Brut .49
Les marque doivent être conscientes du rejet de l’information dite mainstream et de la
publicité numérique, pour les raisons évoquées précédemment. Elles doivent ainsi se diffé-
rencier et adopter d’autres formes pour présenter leurs offres, plus créatives, plus émotion-
nelles et plus folles peut-être mais toujours narratives et transparentes en tout cas.
Brut est un média en ligne français réalisé par des professionnels venus des médias traditionnels et exclusivement diffusé49
sur les réseaux sociaux.
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