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Vous le voyez tous les jours. Le matin en vous maquillant ou en sortant de la douche. Le soir
en vous brossant les dents. Mais le regardez-vous ? Votre reflet dans le miroir. Est-ce bien
vous ou juste une image de vous-même ? Et les autres, comment vous voient-ils ? Toutes ces
images, tous ces reflets correspondent-ils ? Dans son livre Les Faux-Monnayeurs, qui raconte
l’histoire de plusieurs personnages, chacun jouant plus ou moins un rôle, André Gide estime
que tous ces reflets ne sont qu’une façade que l’homme se construit pour se permettre de
briller. En effet, il fait dire à Bernard, un jeune homme qui a encore toute sa vie devant lui et
qui cherche qui il veut devenir : « Presque tous les gens que j’ai connus sonnent faux. Valoir
exactement ce qu’on paraît ; ne pas chercher à paraître davantage qu’on ne vaut… On veut
donner le change, et l’on s’occupe tant de paraître, qu’on finit par ne plus savoir qui l’on
est… ». Ce qu’il veut dire par là c’est que la plupart des gens jouent un rôle et qu’à force de ne
pas être sincère avec soi-même et avec les autres, celui-ci prend le dessus et il y a une perte
de sa propre personnalité. Tout cela dans le seul souci de son apparence et de se faire bien
voir des autres. Mais alors comment ce concept de rôle apparaît-il à travers l’œuvre ? Quels
sont les différents rapports des personnages à la sincérité ? Et finalement, en quoi Les Faux-
Monnayeurs constituent-ils une leçon concernant le fait de paraître ?
Le concept de rôle et d’apparence est abordé à travers plusieurs aspects. Premièrement, Gide
emploie à répétition le champ lexical du théâtre. Cela montre bien que les personnages du
livre ne sont pas eux-mêmes mais qu’ils sont des acteurs jouant une pièce adoptant une
gestuelle et des répliques capables de plaire. Il y a tout d’abord le jeune Georges, qui, à deux
reprises, fait preuve de ses talents pour le théâtre. La première fois, il se sait observé alors
qu’il commet un vol. Il tente donc une petite mise en scène d’innocence, feinte jugée comme
« un peu exagéré, un peu gros, comme un acteur qui a peur de ne pas se faire entendre »
(page 91). La deuxième fois c’est lorsqu’il décide avec ses deux amis d’intégrer à leur groupe
le petit Boris qu’ils avaient délibérément exclu. Pour l’approcher, une fois de plus, Georges
met en scène une petite mascarade visant à séduire sa victime : « cette comédie d’amitié que
Georges consentit à jouer » (page 367). À travers ces deux citations employant toutes deux le
vocabulaire théâtral, il est démontré que Georges joue un rôle à plusieurs reprises avec une
facilité déconcertante et surtout que cela paraît inné pour lui. C’est le premier réflexe qu’il a
lorsqu’il faut se sortir d’une situation scabreuse ou lorsqu’il faut aborder quelqu’un. C’est donc
tellement naturel pour lui qu’il ne s’interroge même plus sur le bien-fondé de ce rôle qu’il
interprète. Mais ce ne sont pas les seules fois où le vocabulaire du théâtre est mobilisé.
Édouard, écrivain, oncle du jeune Georges, y fait aussi référence à la page 122 : « la lueur du
réverbère qui nous éclairait fantastiquement de bas en haut à la manière d’une rampe de
théâtre », décrivant ainsi les lieux mêmes comme décors. Cependant, quand il est question de
rôle, personne n’arrive à la cheville du rival d’Édouard, le comte de Passavant. C’est le
personnage le plus faux du livre, « jouant au parfait naturel », (page 153), n’attachant de
l’importance qu’aux apparences, notamment à travers l’habillement, aimant montrer qu’il a
de l’argent. Il n’est capable d’aucune réflexion profonde, tirant ses répliques du monde
l’entourant, plagiant sans aucune culpabilité : « Tout ce qui n’était pas imprimé, était pour
Passavant de bonne prise ; ce qu’il appelait “les idées en l’air” c’est-à-dire : celles d’autrui »
(p.255). Ce vol est “justifié” pour qu’il brille devant les autres. Et c’est là que le choix du
vocabulaire de Gide, allant jusque dans le choix des noms, est révélateur. Pour que le comte
passe avant tout le monde alors qu’il n’est pas savant, il joue un personnage inspiré de
personnes plus intellectuelles que lui en volant leurs propos. Alors que lui joue un rôle pour
se faire mousser, Armand, jeune homme pessimiste, joue le rôle inverse. Il se rabaisse
constamment, afin que son image extérieure atteigne celle qu’il a de lui-même. Cette sous-
estimation transparaît dans les propos suivants : « Je sais qu’on n’y voit pas très bien ici pour
se regarder dans la glace ; mais quand je m’y contemple, tel Narcisse, je n’y vois qu’une tête
de raté » (p.276). Armand, contrairement aux autres personnages, ne joue pas un rôle pour
s’élever. Mais ce rôle qu’il interprète a tout de même été décelé par son ami Olivier, qui est le
frère de Georges et donc lui aussi le neveu d’Édouard. Olivier dit à Édouard : « Il ne faut pas
non plus que vous jugiez Armand d’après ce qu’il a pu vous dire aujourd’hui, reprit-il. C’est
une espèce de rôle qu’il joue… » (p.115). La comédie qu’Armand met en place est donc visible
mais il continue quand même car il se rend compte que le monde autour de lui n’est pas
sincère. Il le dit explicitement à Olivier à la page 356 : « La vie, mon vieux, n’est qu’une
comédie. Mais la différence entre toi et moi, c’est que moi je sais que je joue (…) Quand on
est divisé, comment veux-tu qu’on soit sincère ? J’en viens à ne même plus comprendre ce
que peut bien vouloir dire ce mot. ». Non seulement le rôle qu’il compose est joué
consciemment mais en plus il admet s’être perdu, de ne plus savoir être honnête et vrai.
Ce rapport ambigu à la sincérité et aux faux-semblants se retrouve chez plusieurs personnages
et à plusieurs niveaux. Édouard, par exemple, semble de prime abord être un homme droit,
juste et généreux qui déteste l’hypocrisie. Mais pourtant son rapport à la sincérité n’est pas si
lucide. L’écrivain n’arrive pas à être honnête avec lui-même, que ce soit lorsqu’il est question
de prise de décisions ou d’éprouver des sentiments. Le narrateur en fait un commentaire irrité
à la page 216 : « Mentir aux autres, passe encore ; mais à soi-même ! » lorsqu’Édouard se
convainc lui-même qu’envoyer Boris à la pension est la meilleure chose à faire. Mais là où
Édouard fait preuve d’une perte de sa personnalité réside dans le domaine des sentiments.
Son rôle lui permet de changer : « Il n’est jamais longtemps le même. » (p.198). Et selon lui,
page 102 : « La singulière faculté de dépersonnalisation qui me permet d’éprouver comme
mienne l’émotion d’autrui. ». Le personnage qu’il incarne l’a dépouillé de sentiments propres
et il ne vit qu’à travers ce que ressentent les autres. Cette incapacité à être sincère avec lui-
même et s’avouer avoir des sentiments propres influencent sa relation aux autres
personnages comme avec Olivier. Lorsque tous deux se retrouvent à la gare, aucun n’arrive à
exprimer ce qu’ils ressentent, n’arrivant pas à franchir le mur de la vérité sous risque de
tomber de l’autre côté. Ce n’est pas le seul moment où Olivier est entravé par des chaînes
d’illusions sociales et sentimentales. Quand il retrouve son ami Bernard, après avoir passé
l’été avec Passavant, un gouffre s’est formé entre eux. Olivier, influencé par le comte, ne sait
plus comment se comporter normalement. Tout ce qu’il veut, c’est fanfaronner et susciter
l’admiration de Bernard alors que leur amitié reposait sur une complicité très forte grâce à
l’honnêteté. Mais Olivier, « Qui dira s’il n’est pas encore plus pressé de se montrer à lui que
de le revoir ? » (page 254) fait fi de ces principes et suit la voie de Passavant sur l’apparence.
Tout cela parce qu’il n’a pas pu résister à sa faible nature d’humain sensible qui le poussait à
l’orgueil : « Il avait cédé au besoin de briller » (page 257). C’est l’illustration parfaite de
l’énoncé. Olivier a abandonné sa nature pour une facette qui lui donnait un maigre espoir de
gloire. Schéma comportemental tout à fait contraire à celui de Bernard qui se distingue par sa
recherche d’honnêteté.
Il est donc possible de ne pas se soumettre à la pulsion de paraître. André Gide nous montre
dans son livre qu’il est même préférable d’y résister. Non seulement à travers l’exemple
d’Armand, conscient de jouer un rôle et malheureux ; à travers l’exemple de Passavant,
personnage exécrable et foncièrement mauvais qui fait de sa vie un jeu ; mais aussi à travers
Olivier et Bernard, les deux jeunes hommes qui doivent choisir quelle voie suivre et qui
devenir. Nous avons pu voir qu’Olivier a été perverti par Passavant, perdant son amitié avec
Bernard. Le mal qui a été inoculé en lui par le comte le ronge jusqu’à le pousser au suicide.
C’est le seul moyen qu’a trouvé Olivier pour éliminer cette comédie et cette fausse sincérité.
Heureusement, Édouard l’a sauvé à temps. Et grâce à son soutien et celui de Bernard, il se
remet. Il le pense ainsi, page 289, : « Auprès d’Édouard, ce qu’il avait de meilleur en lui
s’exaltait. Auprès de Passavant, c’était le pire ; il se l’avouait à présent. ». Ces jeunes hommes
en apprentissage, en quête de qui ils sont, sont donc influencés par leur entourage, en bien
ou en mal. Bernard lui n’a pas eu besoin de tomber au plus bas pour remonter. En compagnie
d’Édouard, il a librement pu se chercher. En effet, l’écrivain, au lieu d’imposer ses idées et sa
manière de faire, encourage l’indépendance et la liberté de penser comme nous pouvons le
voir à la page 239 : « La réponse me paraît simple ; c’est de trouver cette règle en soi-même ;
d’avoir pour but le développement de soi. ». Bernard a donc eu un environnement sain, entre
les conseils d’Édouard et son amour platonique pour Laura, qui lui a permis d’évoluer sans
avoir à jouer une comédie lui permettant d’afficher une fausse supériorité quelconque. Pour
s’affirmer, il ne lui restait plus qu’une épreuve : sa lutte avec l’ange. En suivant l’ange, Bernard
a été soumis à une tentation : celle de céder au conformisme religieux ou politique, délaissant
ainsi le conseil d’Édouard. Mais Bernard a bravement résisté. Pour finir, il s’est battu avec
l’ange durant la nuit, ce qui a eu pour conséquence de le faire grandir encore : « Sa lutte avec
l’ange l’avait mûri. » (page 337). Ce qu’André Gide nous enseigne donc à travers Les Faux-
Monnayeurs et l’exemple de Bernard, c’est que pour ne pas tomber dans l’hypocrisie et se
perdre, il ne faut pas suivre ces exemples là mais se faire sa propre opinion en refusant tout
dogme idéologique et ainsi rester fidèle à soi-même.
La comédie humaine et les faux-semblants sont donc des enjeux majeurs dans l’œuvre de
Gide. Ils se manifestent à travers le vocabulaire, les personnages et les relations
interpersonnelles. Les faux-monnayeurs du titre ne sont donc pas de vrais faussaires mais tous
les personnages étant faux, jouant un rôle, dissimulant leur vraie personnalité. Dans son but
d’authenticité, Gide n’a rien laissé au hasard, du titre aux personnages, du début à la fin. Il est
l’exception à la règle qu’énonce Édouard à la page 268 : « Les romanciers nous abusent
lorsqu’ils développent l’individu sans tenir compte des compressions d’alentour. La forêt
façonne l’arbre. » car il a pris en compte les influences de Passavant et Édouard sur Olivier et
Bernard. Alors quand vous vous regardez dans le miroir, laisser tomber l’épais feuillage.

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Dissertation d'Isabelle Saugy

  • 1. Vous le voyez tous les jours. Le matin en vous maquillant ou en sortant de la douche. Le soir en vous brossant les dents. Mais le regardez-vous ? Votre reflet dans le miroir. Est-ce bien vous ou juste une image de vous-même ? Et les autres, comment vous voient-ils ? Toutes ces images, tous ces reflets correspondent-ils ? Dans son livre Les Faux-Monnayeurs, qui raconte l’histoire de plusieurs personnages, chacun jouant plus ou moins un rôle, André Gide estime que tous ces reflets ne sont qu’une façade que l’homme se construit pour se permettre de briller. En effet, il fait dire à Bernard, un jeune homme qui a encore toute sa vie devant lui et qui cherche qui il veut devenir : « Presque tous les gens que j’ai connus sonnent faux. Valoir exactement ce qu’on paraît ; ne pas chercher à paraître davantage qu’on ne vaut… On veut donner le change, et l’on s’occupe tant de paraître, qu’on finit par ne plus savoir qui l’on est… ». Ce qu’il veut dire par là c’est que la plupart des gens jouent un rôle et qu’à force de ne pas être sincère avec soi-même et avec les autres, celui-ci prend le dessus et il y a une perte de sa propre personnalité. Tout cela dans le seul souci de son apparence et de se faire bien voir des autres. Mais alors comment ce concept de rôle apparaît-il à travers l’œuvre ? Quels sont les différents rapports des personnages à la sincérité ? Et finalement, en quoi Les Faux- Monnayeurs constituent-ils une leçon concernant le fait de paraître ? Le concept de rôle et d’apparence est abordé à travers plusieurs aspects. Premièrement, Gide emploie à répétition le champ lexical du théâtre. Cela montre bien que les personnages du livre ne sont pas eux-mêmes mais qu’ils sont des acteurs jouant une pièce adoptant une gestuelle et des répliques capables de plaire. Il y a tout d’abord le jeune Georges, qui, à deux reprises, fait preuve de ses talents pour le théâtre. La première fois, il se sait observé alors qu’il commet un vol. Il tente donc une petite mise en scène d’innocence, feinte jugée comme « un peu exagéré, un peu gros, comme un acteur qui a peur de ne pas se faire entendre » (page 91). La deuxième fois c’est lorsqu’il décide avec ses deux amis d’intégrer à leur groupe le petit Boris qu’ils avaient délibérément exclu. Pour l’approcher, une fois de plus, Georges met en scène une petite mascarade visant à séduire sa victime : « cette comédie d’amitié que Georges consentit à jouer » (page 367). À travers ces deux citations employant toutes deux le vocabulaire théâtral, il est démontré que Georges joue un rôle à plusieurs reprises avec une facilité déconcertante et surtout que cela paraît inné pour lui. C’est le premier réflexe qu’il a lorsqu’il faut se sortir d’une situation scabreuse ou lorsqu’il faut aborder quelqu’un. C’est donc tellement naturel pour lui qu’il ne s’interroge même plus sur le bien-fondé de ce rôle qu’il interprète. Mais ce ne sont pas les seules fois où le vocabulaire du théâtre est mobilisé. Édouard, écrivain, oncle du jeune Georges, y fait aussi référence à la page 122 : « la lueur du réverbère qui nous éclairait fantastiquement de bas en haut à la manière d’une rampe de théâtre », décrivant ainsi les lieux mêmes comme décors. Cependant, quand il est question de rôle, personne n’arrive à la cheville du rival d’Édouard, le comte de Passavant. C’est le personnage le plus faux du livre, « jouant au parfait naturel », (page 153), n’attachant de l’importance qu’aux apparences, notamment à travers l’habillement, aimant montrer qu’il a de l’argent. Il n’est capable d’aucune réflexion profonde, tirant ses répliques du monde l’entourant, plagiant sans aucune culpabilité : « Tout ce qui n’était pas imprimé, était pour Passavant de bonne prise ; ce qu’il appelait “les idées en l’air” c’est-à-dire : celles d’autrui » (p.255). Ce vol est “justifié” pour qu’il brille devant les autres. Et c’est là que le choix du vocabulaire de Gide, allant jusque dans le choix des noms, est révélateur. Pour que le comte
  • 2. passe avant tout le monde alors qu’il n’est pas savant, il joue un personnage inspiré de personnes plus intellectuelles que lui en volant leurs propos. Alors que lui joue un rôle pour se faire mousser, Armand, jeune homme pessimiste, joue le rôle inverse. Il se rabaisse constamment, afin que son image extérieure atteigne celle qu’il a de lui-même. Cette sous- estimation transparaît dans les propos suivants : « Je sais qu’on n’y voit pas très bien ici pour se regarder dans la glace ; mais quand je m’y contemple, tel Narcisse, je n’y vois qu’une tête de raté » (p.276). Armand, contrairement aux autres personnages, ne joue pas un rôle pour s’élever. Mais ce rôle qu’il interprète a tout de même été décelé par son ami Olivier, qui est le frère de Georges et donc lui aussi le neveu d’Édouard. Olivier dit à Édouard : « Il ne faut pas non plus que vous jugiez Armand d’après ce qu’il a pu vous dire aujourd’hui, reprit-il. C’est une espèce de rôle qu’il joue… » (p.115). La comédie qu’Armand met en place est donc visible mais il continue quand même car il se rend compte que le monde autour de lui n’est pas sincère. Il le dit explicitement à Olivier à la page 356 : « La vie, mon vieux, n’est qu’une comédie. Mais la différence entre toi et moi, c’est que moi je sais que je joue (…) Quand on est divisé, comment veux-tu qu’on soit sincère ? J’en viens à ne même plus comprendre ce que peut bien vouloir dire ce mot. ». Non seulement le rôle qu’il compose est joué consciemment mais en plus il admet s’être perdu, de ne plus savoir être honnête et vrai. Ce rapport ambigu à la sincérité et aux faux-semblants se retrouve chez plusieurs personnages et à plusieurs niveaux. Édouard, par exemple, semble de prime abord être un homme droit, juste et généreux qui déteste l’hypocrisie. Mais pourtant son rapport à la sincérité n’est pas si lucide. L’écrivain n’arrive pas à être honnête avec lui-même, que ce soit lorsqu’il est question de prise de décisions ou d’éprouver des sentiments. Le narrateur en fait un commentaire irrité à la page 216 : « Mentir aux autres, passe encore ; mais à soi-même ! » lorsqu’Édouard se convainc lui-même qu’envoyer Boris à la pension est la meilleure chose à faire. Mais là où Édouard fait preuve d’une perte de sa personnalité réside dans le domaine des sentiments. Son rôle lui permet de changer : « Il n’est jamais longtemps le même. » (p.198). Et selon lui, page 102 : « La singulière faculté de dépersonnalisation qui me permet d’éprouver comme mienne l’émotion d’autrui. ». Le personnage qu’il incarne l’a dépouillé de sentiments propres et il ne vit qu’à travers ce que ressentent les autres. Cette incapacité à être sincère avec lui- même et s’avouer avoir des sentiments propres influencent sa relation aux autres personnages comme avec Olivier. Lorsque tous deux se retrouvent à la gare, aucun n’arrive à exprimer ce qu’ils ressentent, n’arrivant pas à franchir le mur de la vérité sous risque de tomber de l’autre côté. Ce n’est pas le seul moment où Olivier est entravé par des chaînes d’illusions sociales et sentimentales. Quand il retrouve son ami Bernard, après avoir passé l’été avec Passavant, un gouffre s’est formé entre eux. Olivier, influencé par le comte, ne sait plus comment se comporter normalement. Tout ce qu’il veut, c’est fanfaronner et susciter l’admiration de Bernard alors que leur amitié reposait sur une complicité très forte grâce à l’honnêteté. Mais Olivier, « Qui dira s’il n’est pas encore plus pressé de se montrer à lui que de le revoir ? » (page 254) fait fi de ces principes et suit la voie de Passavant sur l’apparence. Tout cela parce qu’il n’a pas pu résister à sa faible nature d’humain sensible qui le poussait à l’orgueil : « Il avait cédé au besoin de briller » (page 257). C’est l’illustration parfaite de l’énoncé. Olivier a abandonné sa nature pour une facette qui lui donnait un maigre espoir de
  • 3. gloire. Schéma comportemental tout à fait contraire à celui de Bernard qui se distingue par sa recherche d’honnêteté. Il est donc possible de ne pas se soumettre à la pulsion de paraître. André Gide nous montre dans son livre qu’il est même préférable d’y résister. Non seulement à travers l’exemple d’Armand, conscient de jouer un rôle et malheureux ; à travers l’exemple de Passavant, personnage exécrable et foncièrement mauvais qui fait de sa vie un jeu ; mais aussi à travers Olivier et Bernard, les deux jeunes hommes qui doivent choisir quelle voie suivre et qui devenir. Nous avons pu voir qu’Olivier a été perverti par Passavant, perdant son amitié avec Bernard. Le mal qui a été inoculé en lui par le comte le ronge jusqu’à le pousser au suicide. C’est le seul moyen qu’a trouvé Olivier pour éliminer cette comédie et cette fausse sincérité. Heureusement, Édouard l’a sauvé à temps. Et grâce à son soutien et celui de Bernard, il se remet. Il le pense ainsi, page 289, : « Auprès d’Édouard, ce qu’il avait de meilleur en lui s’exaltait. Auprès de Passavant, c’était le pire ; il se l’avouait à présent. ». Ces jeunes hommes en apprentissage, en quête de qui ils sont, sont donc influencés par leur entourage, en bien ou en mal. Bernard lui n’a pas eu besoin de tomber au plus bas pour remonter. En compagnie d’Édouard, il a librement pu se chercher. En effet, l’écrivain, au lieu d’imposer ses idées et sa manière de faire, encourage l’indépendance et la liberté de penser comme nous pouvons le voir à la page 239 : « La réponse me paraît simple ; c’est de trouver cette règle en soi-même ; d’avoir pour but le développement de soi. ». Bernard a donc eu un environnement sain, entre les conseils d’Édouard et son amour platonique pour Laura, qui lui a permis d’évoluer sans avoir à jouer une comédie lui permettant d’afficher une fausse supériorité quelconque. Pour s’affirmer, il ne lui restait plus qu’une épreuve : sa lutte avec l’ange. En suivant l’ange, Bernard a été soumis à une tentation : celle de céder au conformisme religieux ou politique, délaissant ainsi le conseil d’Édouard. Mais Bernard a bravement résisté. Pour finir, il s’est battu avec l’ange durant la nuit, ce qui a eu pour conséquence de le faire grandir encore : « Sa lutte avec l’ange l’avait mûri. » (page 337). Ce qu’André Gide nous enseigne donc à travers Les Faux- Monnayeurs et l’exemple de Bernard, c’est que pour ne pas tomber dans l’hypocrisie et se perdre, il ne faut pas suivre ces exemples là mais se faire sa propre opinion en refusant tout dogme idéologique et ainsi rester fidèle à soi-même. La comédie humaine et les faux-semblants sont donc des enjeux majeurs dans l’œuvre de Gide. Ils se manifestent à travers le vocabulaire, les personnages et les relations interpersonnelles. Les faux-monnayeurs du titre ne sont donc pas de vrais faussaires mais tous les personnages étant faux, jouant un rôle, dissimulant leur vraie personnalité. Dans son but d’authenticité, Gide n’a rien laissé au hasard, du titre aux personnages, du début à la fin. Il est l’exception à la règle qu’énonce Édouard à la page 268 : « Les romanciers nous abusent lorsqu’ils développent l’individu sans tenir compte des compressions d’alentour. La forêt façonne l’arbre. » car il a pris en compte les influences de Passavant et Édouard sur Olivier et Bernard. Alors quand vous vous regardez dans le miroir, laisser tomber l’épais feuillage.