XebiCon'18 - Structuration du Temps et Dynamique de Groupes, Théorie organisa...
170412 désaccord
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Ceci n’est pas un désaccord.
Il arrive parfois que l’entreprise, au cours de
l’élaboration ou de la mise en œuvre de sa stratégie,
soit confrontée à des blocages : certains, en interne,
doutent, s’interrogent, voire s’opposent…
Dans ces situations le patron peut être tenté de
« passer en force » : « qui m’aime me suive ! » Et que
ceux qui ne sont pas d’accord en tirent toutes les
conséquences…
Après tout, le dirigeant-actionnaire, celui qui investit
son argent dans l’entreprise est le seul légitime pour
décider de son cap à long terme. C’est en effet lui qui
prend les risques. Aux autres de s’intégrer dans ce
cadre… ou de partir.
Cela veut-il pour autant dire qu’il faille
systématiquement imposer son point de vue ?
Certes, il ne faut pas se voiler la face. Les raisons de
ne PAS changer sont souvent plus nombreuses que
celles qui poussent à opérer les ruptures nécessaires à
la pérennité de l’entreprise. Le changement fait peur,
le confort du monde connu rassure. Une forte
détermination est donc indispensable pour atteindre
l’objectif fixé.
De la même façon, il existe fréquemment des
opposants – cachés ou non – qui n’hésiteront pas à
torpiller le projet commun, s’il va à l’encontre de leurs
intérêts. Mieux vaut donc mieux s’en séparer.
Pour autant, tout désaccord est-il interdit, toute
opposition proscrite et toute explication inutile ?
Clairement non !
Pourquoi ?
Parce qu’en entreprise – comme dans nos sociétés
évoluées d’ailleurs – nous passons la majeure partie de
notre temps à manier des concepts abstraits :
performance, stratégie, offre, marché, etc.
Or, ce ne sont que des constructions intellectuelles.
Elles n’ont aucune existence concrète. Nous ne
trouverons pas de « marché » dans la nature. La
« stratégie » n’a pas de réalité physique. Et qu’est-ce
que la « performance » sinon une notion bien
subjective ?
Bref, il en est de ces notions comme de la pipe de
René Magritte : ce n’est pas une pipe mais uniquement
sa représentation – en effet on ne peut ni la prendre
en main ni la fumer –. Elle n'est pas réelle !
Pourtant, à force de manier de telles représentations,
nous en oublions leur nature véritable et les traitons
comme des réalités tangibles : notre représentation
devient LA vérité.
Or, le propre des représentations est, qu’il en existe
une multiplicité… Autant, au moins, que de points de
vue.
Ainsi, notre culture, notre éducation et notre
expérience façonnent la manière dont nous nous
représentons notre environnement et les faits qui s'y
déroulent. Elles agissent comme un prisme, comme
une paire de lunettes déformante – ou devrions nous
dire structurante ? – nous permettant d'interpréter le
réel.
Par conséquent, un DRH émérite, de culture
conservatrice et religieuse – donc volontiers
moralisateur –, et dont la carrière a été marquée par
les jeux d'appareil dans les holdings, n'analysera pas la
vie de l'entreprise de la même façon qu'un jeune
collaborateur à l'éducation libérale et laïque.
Là où le second raisonnera « responsabilité », le
premier lira « pouvoir ». Là où l'un dira « erreur »
l'autre verra « faute ». Là où le vieux exprimera
« expérience », le jeune ne percevra que
« conformisme »...
Mais qui a raison ?
R. Magritte « La trahison des images » D.R.