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1
Evolutions des relations agriculture élevage en zones de savane africaines et malgaches :
quelques enseignements pour la polyculture élevage en France.
Dugué, P.
1,2
Andrieu N.
1
Blanchard M.
3,4
, Chia E
5
., Havard M.
1 ,4
, Le Gal P.-Y.
1
, Penot E.
1,6
, Salgado
P.
2,7
, Vall E
3
.
1
CIRAD, UMR INNOVATION, F-34398 Montpellier, France
2
ENA Département Ingénierie de développement, Meknès, Maroc
3
CIRAD, UMR Systèmes d’Elevage Méditerranéens et Tropicaux, F-34398 Montpellier, France
4
CIRDES, Bobo-Dioulasso, Burkina Faso
5
INRA UMR INNOVATION, 2 Place Viala, 34060 Montpellier, France
6
ESA, Université d’Antananarivo, Madagascar
7
CIRAD, UMR Systèmes d’Elevage Méditerranéens et Tropicaux, F-97410 Saint-Pierre, La Réunion,
France
Correspondant : patrick.dugue@cirad.fr
Résumé
Les exploitations de polyculture élevage sont largement dominantes dans les agricultures familiales
des pays du sud et plus particulièrement dans les zones de savane africaines et malgaches. L’analyse
des évolutions des relations entre l’agriculture et l’élevage dans ces régions sur un demi-siècle montre
que l’intégration entre ces secteurs est encore limitée pour des raisons culturelles, d’organisation de
filière, d’absence de politiques incitatives et d’explicitations pour les producteurs et décideurs des
intérêts et enjeux liés à cette intégration. Cette situation ne permet pas une bonne valorisation des
complémentarités entre les deux secteurs tant au niveau des exploitations que des territoires. A partir
de cette analyse des enseignements génériques sont proposés et confrontés au contexte de
l’agriculture française afin de mettre en exergue les avantages comparatifs de la polyculture élevage
aujourd’hui et dans le futur.
Mots-clés : agriculture élevage, relation, intégration, conception de système de production, modèle,
Afrique subsaharienne, Madagascar, France.
2
Introduction
La question de l’association de l’élevage aux productions végétales se repose en France et en Europe
dans la continuité du débat sur la multifonctionnalité de l’agriculture et par rapport à de nouvelles
préoccupations comme la réduction des pollutions, le maintien de la biodiversité et le bien-être animal.
Ces préoccupations s’inscrivent progressivement dans les politiques publiques et renvoient à l’objectif
d’écologisation des pratiques agricoles prôné par la plupart des agronomes aujourd’hui. L’intégration
cultures-élevage constitue un des éléments de base possible de la conception de systèmes agricoles
innovants et durables (Meynard et al., 2012). Mais la majorité des recherches dans ce domaine porte
sur les systèmes de culture et les productions végétales (Wezel et al., 2009 ; Lamine et Meynard,
2009). Dans ce cadre la polyculture élevage (PCE) raisonnée tant au niveau de l’exploitation agricole
que des territoires est rarement mis en avant par la profession agricole en France comme en Europe
tant les processus de spécialisation ont marqué ce secteur. Elle est toutefois présentée par les
chercheurs (Lemaire et al., 2003 ; Ryschawy et al., 2012 ; Moraine et al., 2012) comme un des leviers
possibles du développement durable des territoires en mobilisant divers processus : synergie entre les
deux activités principalement par la gestion des effluents d’élevage (fumure, biogaz), recherche de
l’autonomie alimentaire des systèmes d’élevage, amélioration du cycles des nutriments et limitation
des importations d’intrants.
Dans les pays tropicaux et en Afrique sub-saharienne en particulier, l’association agriculture élevage
est à l’agenda des politiques de développement depuis les années 1960 (Lhoste, 2004) et constitue
toujours pour les agronomes travaillant dans ces régions un levier important du développement d’une
agriculture durable. Dans une première partie nous présentons comment les relations entre
l’agriculture et l’élevage et entre agriculteurs et éleveurs ont évolué depuis un demi-siècle dans les
zones de savane africaines et malgaches. Nous ferons ensuite, en tant qu’agronome, zootechnicien et
géographe, une lecture des limites du modèle de polyculture-élevage proposé pour cette région et
dans une dernière partie nous tirerons de ces travaux quelques enseignements utiles au débat sur
l’émergence d’un nouveau modèle de polyculture élevage en France et en Europe.
1. Evolutions des relations agriculture élevage depuis 50 ans
Contexte d’étude : les savanes d’Afrique de l’ouest et du centre et les Hautes Terres de
Madagascar
Les éléments présentés ci-après découlent de travaux de recherche et d’appui au développement
portant sur les relations agriculture élevage, leurs caractéristiques actuelles, leurs évolutions et les
pistes pour une meilleure intégration des deux activités (Blanchard et al., 2013 ; Autfray et al., 2012 ;
Vall et al.,2006 ; Dugué et al., 2004a et b; Dugué et al., 1998). Ils concernent principalement des
régions d’Afrique subsaharienne où les deux activités sont bien présentes, en particulier les zones
de savane d’Afrique de l’ouest et du centre caractérisés par les cultures de coton et d’arachide
comme productions de vente et les céréales comme culture alimentaire. A cela s’ajoute les Hautes-
Terres de Madagascar où la présence de l’élevage bovin intégré aux systèmes rizicoles de bas-fond
est très ancienne et remonte avant la période coloniale (Garin et al., 2011 ; Andriarimalala et al.,
2013). Ces zones d’études sont caractérisées par une pluviométrie relativement abondante (de 700 à
1200 mm/an) qui permet de sécuriser les productions végétales et de dépasser au moins depuis
quelques décennies, le stade de l’agriculture de subsistance. Nous n’aborderons pas le cas des
zones semi-arides (de 300 à 700 mm/an) où l’agriculture et l’élevage cohabitent mais avec une faible
intégration, ni les zones arides (< 300 mm) où l’agriculture est très marginale sauf lorsqu’elle est
irriguée (périmètres modernes et traditionnelles d’oasis).
Quatre périodes successives montrent des processus différents de rapprochement entre l’agriculture
et l’élevage dans ces régions.
1.1 Avant les grands projets de développement rural post-indépendances
Historiquement dans bien des situations d’Afrique subsaharienne et de Madagascar, les productions
végétales et animales étaient assurées par des communautés différentes : les pasteurs ou éleveurs
Peul des zones semi-arides (moins de 700 mm/an) étaient spécialisés dans l’élevage des ruminants
alors que les communautés d’agriculteurs réparties dans toutes les régions à pluviométrie supérieure
3
à 500 mm/an fournissaient les produits amylacés, base de l’alimentation, comme les céréales et plus
au sud le manioc et l’igname. Les échanges entre éleveurs et agriculteurs existaient dans les régions
où les deux systèmes de production cohabitaient (zone entre 300 et 1 000 mm/an) : les éleveurs
achetaient des céréales ou les échangeait contre du lait et les agriculteurs pouvaient acheter des
animaux sur pied pour les cérémonies rituelles. Les contrats de fumure entre ces deux groupes
étaient relativement fréquents et permettaient à l’agriculteur de cultiver plus longtemps sa terre avant
de la mettre en jachère, pratique habituelle de restauration de la fertilité du sol.
Toutefois des systèmes agropastoraux combinant productions végétales et animales de façon
significative existaient dans situations particulières avant les années 1950 :
- Dans le pays Serer (Sénégal) (Pélissier, 1966) et le pays Tupuri (Nord du Cameroun)
(Guillard, 1965), zones densément peuplées
1
(> 50 habitants au km²), l’intégration agriculture
élevage avait pour objectif d’accroitre la productivité des terres par un accroissement de la
charge animale par ha cultivable donc de la production de fumure organique. Cela était rendu
possible par une organisation collective de la jachère de courte durée (selon les saisons,
pâturée le jour, fertilisée la nuit), le recours aux parcs arborés fourragers (Faidherbia albida
2
,
Prosopis jubiflora) associés aux cultures et une gestion optimale de la fumure animale par le
parcage nocturne dans les zones cultivables durant toute l’année. Les systèmes agraires de
ces deux régions ont fonctionné durablement sur cette base jusque dans les années 1960 et
avec des pratiques similaires alors qu’ils se situent à plus de 3000 km de distance.
- L’intégration agriculture élevage de zébus dans les systèmes de production des Hautes-
Terres à Madagascar était aussi justifiée par le besoin de produire de la fumure animale pour
entretenir la fertilité des rizières de bas-fond de superficie très réduite et donc ne pouvant pas
rentrer en rotation avec la jachère (Garin 1998, Rollin 1994). A cela s’ajoute d’autres raisons
agronomiques comme le besoin d’avoir un troupeau pour mettre en boue la rizière par le
piétinement des zébus (avant repiquage du riz) ainsi que des raisons culturelles et religieuses.
Ces deux cas d’études mettent en évidence une relation de cause à effet entre la croissance
démographique et la réduction des surfaces cultivables par habitant d’une part, et le déclin de la
jachère et le besoin de mieux intégrer les productions végétales et élevage d’autre part. Cette
intégration et les fonctions qu’elle assure (entretien de la fertilité, production de ressources
fourragères) constituait déjà à cette époque le début de processus d’intensification de l’agriculture
sensu largo mais limité à de rares régions.
1.2 Le modèle techniciste de l’exploitation de polyculture élevage des années 1960-80
Des agronomes comme G. Curasson (1948) et R. Tourte (2005) et bien d’autres
3
, ont promu à partir
des années 1950-60 un modèle de système de production basé en garde partie sur l’intégration
agriculture élevage. Ce modèle de PCE s’inspire très clairement de celui de l’agriculture française et
européenne du XIX° siècle et de la première moitié du XX° siècle basé sur la révolution fourragère,
l’abandon de la jachère et le début de la mécanisation. Les bases agro-techniques du modèle proposé
pour les producteurs des savanes d’Afrique subsaharienne et malgaches étaient similaires : (i) les
animaux fournissent la fumure organique et l’énergie pour la traction des matériels aratoires et de
transport (ii) et une partie de l’alimentation (lait, viande) et des revenus à la famille ; (iii) les systèmes
de culture apportent au bétail les fourrages grossiers (résidus de culture) et l’alimentation de qualité
(cultures fourragères, compléments) toute l’année (techniques de conservation et de stockage). Ce
modèle visait principalement les agriculteurs ou les rares agroéleveurs car les éleveurs
1
Ce qui était rare à cette époque, l’Afrique sub-saharienne était globalement sous peuplée (majoritairement
moins de 30 hab./km²) mais avec quelques ilots de peuplement plus denses au Nigéria (estuaire du Niger),
Burkina Faso (plateau central), Sénégal (Sine et Saloum), au Cameroun (Extrême-Nord).
2
Le Faidherbia albida peut être considéré comme une culture pérenne associée aux céréales (mil, sorgho, maïs)
et légumineuses (arachide, niébé) dans ces deux régions même s’il n’est pas planté mais issu d’un processus de
domestication et de régénération naturelle que l’on peut qualifier « d’assistée » par le paysan (repérage et
protection des jeunes pousses). En plus de son effet sur la fertilité du sol, il produit des gousses consommés par
le bétail et du fourrage aérien qui nécessite un émondage pour le distribuer aux animaux d’élevage (Peltier,
1996).
3
René Dumont dans la plupart de ces ouvrages parus après 1960 souligne l’intérêt de la polyculture élevage
dans les pays pauvres d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine
4
n’envisageaient pas encore à cette période de se sédentariser et de limiter les déplacements de leur
troupeau (transhumance ou déplacement journalier) base du système d’alimentation du bétail.
Dans les années 1960 à 1980, la vulgarisation et l’adoption à grande échelle de la culture attelée
(bovine, asine et équine selon les situations
4
) a touché la majorité des régions entre 500 et 1200
mm/an
5
en cultures pluviales et dans les périmètres irrigués. En particulier, l’élevage de bovin de trait
a pu rapidement s’intégrer dans des exploitations en mesure de rembourser les crédits d’équipement
et d’entretenir les animaux (santé et alimentation) ce qui explique sa présence dans les bassins de
production des cultures de vente comme le cotonnier et le riz. Ensuite les revenus procurés par ces
cultures ont été investis préférentiellement dans le bétail de ruminants (bovins dans la mesure du
possible) afin de constituer un noyau d’élevage fournissant fumure organique, jeunes animaux de trait,
revenu et constituant un capital
6
facilement mobilisable. La diffusion de la traction animale a été une
véritable succes story à la fois à Madagascar et en Afrique des savanes (surtout dans les bassins
cotonnier, rizicole et arachidier). Elle a surtout eu comme conséquence l’accroissement des surfaces
cultivées par région, par exploitation et par actif et la réduction de la pénibilité du travail. Ceci a eu
comme effet l’accroissement du disponible fourrager non pas par l’adoption des cultures fourragères
(jugées sans intérêt à cette époque par les agriculteurs) mais par l’augmentation de la production de
résidus de culture consécutive à l’augmentation de surface. Deux autres effets attendus n’ont pas été
au rendez-vous de ce début d’intégration agriculture-élevage :
- L’accroissement de revenu issu de l’élevage a été plus modeste que prévu car les agriculteurs
ont surtout visé la constitution d’un capital sur pied négligeant l’exploitation régulière du
troupeau. Cela s’explique par les difficultés ou les réticentes des producteurs a adopté les
programmes de prophylaxie et les techniques d’intensification des systèmes d’élevage
(fourrages, concentrés protéiniques). En cas de crises sanitaires, climatiques et donc
alimentaires, la taille importante du troupeau permettait de faire face au fort taux de mortalité
des jeunes animaux et parfois aussi des adultes.
- Les effets attendus sur la nutrition des familles rurales n’ont pas été observés car la
production laitière
7
a peu augmenté tout comme la consommation de viande, les agriculteurs
ayant opté pour un système d’élevage privilégiant l’accroissement du nombre de têtes, la
constitution d’un capital sur pied pour faire face aux coups durs (santé, pénuries alimentaires
du fait de mauvaises récoltes). Ce choix de stratégie d’élevage s’expliquait aussi par
l’absence de filières organisées de commercialisation des produits animaux et surtout la forte
concurrence sur les marchés locaux des produits issus des élevages très extensifs des
éleveurs transhumants ou nomades.
Ce début d’intégration agriculture élevage a été marqué principalement par le développement de la
traction animale. Si de petits noyaux d’élevage bovin apparaissent chez les agriculteurs ils sont
conduits de façon extensive à l’image des systèmes de conduite des éleveurs à cette période. Il y
avait plutôt juxtaposition de deux activités agriculture et élevage, plutôt qu’intégration. Les éleveurs
quant à eux ont été peu concernés par ces programmes de promotion de cette intégration
8
qui
visaient essentiellement les agricultures en vue d’accroitre en priorité les productions végétales.
4
Les agronomes avaient surtout misé sur la traction bovine considérée comme plus efficace et plus rentable
(embouche des animaux à la réforme avec plus-value, production conséquente de fumier) malgré les coûts
d’investissement et d’entretien élevés. La traction avec des vaches un temps vulgarisée, permettait en plus aux
agriculteurs d’assurer le renouvellement et la constitution d’un noyau d’élevage. Mais dans biens des régions la
traction équine et asine s’est aussi bien développée du fait d’avantages comparatifs pour les exploitations à
faible capital (Lhoste et al., 2010)
5
Les zones à plus forte pluviométrie (> 1200 mm) étaient peu adaptées à l’élevage des bovins pour des raisons
zoo-sanitaires (trypanosomes) sauf sur les hauts plateaux d’altitude (> 1500 m)
6
Cette forme de capitalisation reste très fréquente encore aujourd’hui malgré les difficultés d’alimentation des
bovins dans ces régions qui ont vu leurs populations humaine et animale croitre continuellement. Mais avec
l’urbanisation croissante d’autres formes de capitalisation émergent aujourd’hui : investissement immobilier en
ville, véhicules de transport, …
7
Les populations d’agriculteurs n’avaient pas l’habitude de consommer régulièrement du lait et pendant
longtemps ils n’ont pas cherché à traire leurs quelques vaches (pour ceux qui en possédaient), tout le lait allait au
veau.
8
L’appui aux producteurs ruraux dans ces régions a presque toujours été marqué par une séparation entre les
services agricoles (productions végétales) et les services d’élevage au sein d’administrations différentes et même
de ministères différents, il en était de même pour la recherche. Ce qui ne facilitait pas les efforts d’intégration
entre ces deux activités partageant souvent les mêmes espaces
5
1.3 Les sécheresses en Afrique (1970 à 1990) et le rapprochement des deux secteurs de
production
Les sécheresses au Sahel dans les années 1970 et 1980 poussent les éleveurs de bovins des zones
semi-arides à migrer vers des régions plus pluvieuses (800 – 1 200 mm/an) où l’élevage était peu
pratiqué du fait à la pression parasitaire antérieure
9
. Ces éleveurs progressivement sédentarisent
leurs habitats et une partie de leur troupeau ce qui les amène à s’intéresser de plus en plus aux
productions végétales (céréales) en mobilisant leur importante production de fumure animale
10
.
Rapidement ils deviennent autosuffisants en céréales et vendent leurs surplus. Cette migration a peu
modifié la conduite des troupeaux si ce n’est le recours plus systématique à la prophylaxie en
particulier aux trypanicides. Ces éleveurs s’installaient alors dans des zones auparavant peu peuplées
mais qui vont l’être rapidement du fait du croît démographique naturel mais surtout des flux
migratoires
11
d’agriculteurs quittant aussi les zones semi-arides. Le rapprochement entre agriculteurs
et éleveurs est d’ordre spatial principalement, les échanges restent limités (vente de lait par les
éleveurs en saison des pluies) et pas toujours égalitaires. Ainsi, pour cultiver leurs champs, les
éleveurs embauchent à bas prix les paysans les plus pauvres qui doivent vendre une partie de leur
force de travail pour vivre. Ce rapprochement est aussi la source de nombreuses tensions et parfois
conflits entre ces deux populations pour l’accès aux ressources en terres et parfois en eau
(Kossoumna et al., 2011). Les coopérations sont limitées au confiage des animaux des éleveurs
(bergers) par les agriculteurs et à la vente par les éleveurs d’animaux pour le trait. Les mécanismes
de coordination collective pour la gestion des espaces entre ces deux catégories socio-
professionnelles étaient rares et le sont toujours.
Les agriculteurs durant cette période, continuent à montrer un intérêt grandissant pour les productions
animales. Un agriculteur considère qu’il a réussi dans son métier lorsqu’il a pu s’équiper en traction
animale
12
et constituer un troupeau de ruminants. Le nombre de têtes de bovins est un facteur de
réussite économique et aussi sociale. L’agriculteur montre ainsi qu’il a pu gagner de l’argent en
cultivant, qu’il est à l’abri du besoin en cas de crises, qu’il est en mesure de transmettre un capital à
ses descendants et qu’à l’occasion, il peut rendre service à ses alliés (prêt d’argent, confiage de
bovins de trait). Plus modestement les agriculteurs et en particulier ceux des zones semi-arides
(moins de 600 mm/an) ont vu durant cette période de de sécheresse, l’intérêt de diversifier leurs
sources de revenus en misant sur l’élevage, en particulier des petits ruminants. La conduite de ce type
d’élevage s’améliore avec le début du stockage de grandes quantités de résidus de culture surtout les
plus riches (fanes de légumineuses). L’amélioration de l’habitat, l’usage des déparasitants, la
stabulation semi-permanente et l’embouche ovine deviennent des pratiques courantes avec un effet
non négligeable sur le revenu des ménages agricoles de ces régions (Faye et Landais, 1986)
1.4. L’accroissement démographique et les évolutions de la PCE de 1990 à nos jours
L’accroissement démographique des zones d’étude a été continu et importante depuis les années
1960 du fait de l’amélioration des conditions de vie (services de santé, fourniture d’eau potable par
des puits et forages). Ce processus touche à la fois les villes et les campagnes et a contribué à
modifier la nature des relations agriculture élevage et donc les systèmes de PCE.
Dans la mesure où les populations d’agriculteurs (incluant les agro-éleveurs) sont numériquement
plus importantes que celles d’éleveurs, la croissance démographique en zone rurale s’est
accompagnée inéluctablement d’une augmentation des surfaces cultivées car l’augmentation des
rendements n’a pas été suffisante depuis 50 ans pour assurer la sécurité alimentaire des familles. Ce
processus continue a entrainé une diminution des surfaces pâturables (parcours naturels jamais
9
La réduction de la pression parasitaire est liée à la baisse de la pluviométrie (moins 100 à moins 200 mm/an par
rapport à celle de la période 1950 -70) mais surtout aux défrichements importants réalisés par les agriculteurs
autochtones mais surtout des paysans migrants venus des zones semi-arides touchées par les fortes
sécheresses
10
En faisant parquer les troupeaux dans les champs en saison sèche. Le ratio bovins/ha chez les éleveurs étant
très élevé du fait de la taille importante du troupeau et de la faible surface cultivée en céréales par unité de
production
11
Dans certains fronts pionniers en zone cotonnière au Cameroun, le croît démographique total était de 6% par
an alors que le croît naturel variait entre 2 et 3% par an.
12
En pays Sénoufo au Nord de la Côte d’Ivoire, le chef de famille et chef de l’exploitation « mère » cherche (dans
la mesure de ses moyens) à installer ses fils comme agriculteur (« exploitation « fille ») avec pour chacun une
paire de bœufs de trait et l’équipement de base, la charrue.
6
cultivés) d'une part, et à la diminution du rôle de la jachère comme moyen de restaurer la fertilité des
sols, d'autre part. La culture continue s’est progressivement généralisée et a pu se maintenir grâce à
un investissement plus important dans la fertilisation minérale et le désherbage des cultures
13
.
L’usage de la fumure organique (fumier, compost) a aussi progressé mais concerne qu’une petite part
de l’assolement (généralement <10%), fumure qui est souvent utilisée pour réhabiliter les terres
appauvries. Dans ces conditions de raréfaction des ressources, le maintien de la traction animale et
des noyaux d’élevage intégrés
14
aux exploitations repose de plus en plus sur le stockage et
l’appropriation individuelle des résidus de culture dont la production suit celle des grains. Le recyclage
de ces co-produits est parfois plus poussé lorsque les agriculteurs mobilisent les résidus non
fourragers (tiges de cotonnier, grosses tiges de sorgho) pour en faire du compost ou de la litière (afin
de produire un fumier de qualité) (Blanchard et al., 2013). Traditionnellement l’ensemble des résidus
de culture fourragers étaient abandonnés dans les champs et valorisés par la vaine pâture ouverte à
tous. Les évolutions récentes montrent bien la nature des enjeux autour du contrôle et de
l’appropriation de la biomasse végétale (cultivée ou non) pour l’alimentation du bétail mais aussi la
gestion de la fertilité des sols. L’intérêt des agriculteurs pour l’utilisation de la biomasse (plus ou
moins fourragère) afin d’entretenir la fertilité du sol est récent car traditionnellement tous débris
végétaux étaient soigneusement brulés avant labour et semis. Maintenant le semis direct se propage
et les agriculteurs connaissent l’utilité de laisser sur le sol ces débris voire de les enfouir au labour.
Mais l’on n’est encore loin de l’application des 3 principes de l’agriculture de conservation prônés par
divers organismes de développement (la FAO en particulier)
15
car la biomasse manque cruellement
en fin de saison sèche dans toutes ces régions où les charges en ruminants ont fortement progressé
ces 20 dernières années.
L’augmentation de la population au niveau national entraine aussi mécaniquement un accroissement
des demandes alimentaires. Pour les produits animaux cet accroissement est assez récent et
concerne principalement les villes et les produits laitiers et les viandes de volaille et de porc. Ces
produits peuvent être importés mais les politiques actuelles visent à protéger les filières nationales et
à contingenter les importations (souvent de faible qualité). Ainsi sur les Hautes-Terres à Madagascar
l’élevage laitier s’est rapidement intégré aux exploitations familiales de petites tailles, avec un très petit
effectif (1 à 5 vaches) procurant un revenu régulier pour la famille mais modifiant notablement les
assolements avec l’introduction de cultures fourragères (vesce, avoine, brachiaria, … ) et la
valorisation des graines de soja, de maïs et les restes de racines de manioc pour la complémentation
de cet élevage (Kasprzyk et al., 2008). La révolution fourragère tant espérée par les agronomes des
années 1950-60 est en marche dans cette région des hautes-Terres qualifiée de triangle laitier
(Rabemanambola M. F., 2010). Elle a permis entre autres la stabulation permanente des vaches
laitières et donc l’accroissement de la production de fumier, bénéficiant aussi de la litière de paille de
riz.
Un début d’adoption des cultures fourragères par les agro-éleveurs est aussi observé pour des
systèmes de PCE où l’élevage est encore peu intensifié (bovins de trait, bovin naisseur et troupeau-
capital). Cela s’est rencontré entre autres, dans des zones d’intervention des projets de vulgarisation
de l’agriculture de conservation où les plantes de couverture étaient aussi des plantes fourragères (
Brachiaria ruzizensis, Panicum maximum ou kizozi, Stylosanthes sp., vesce…) (Andriarimalala et al.,
2013 ; Dugué et al., 2013) . Dans ce cas l’usage fourrager de ces nouvelles cultures a été préféré à
celui de restauration de la fertilité et de couverture du sol
16
. L’adoption des cultures fourragères dans
ce cas vise à améliorer la ration et l’état des animaux, et à réduire le temps de travail dans des
parcours naturels ou des zones de coupe de foin naturel de moins en moins productifs. Il s’agit là
moins d’intensifier les systèmes d’élevage orientés vers le marché (comme pour le lait) mais de
sécuriser le maintien d’un troupeau multifonctionnel comme c’est le cas à Madagascar (lac Aloatra)
mais aussi au Cameroun (Pays Tupuri en particulier) : autosuffisance céréalière via la fumure
13
Par le travail manuel d’abord, puis la mécanisation du sarclage grâce à la traction animale et plus récemment
avec les herbicides.
14
Il est aussi possible pour les agro-éleveurs de confier leurs bovins d’élevage à des éleveurs transhumants, une
façon d’externaliser ou de délocaliser l’activité d’élevage, dans ce cas ils perdent la production de fumure animale
une bonne partie de l’année. Cela implique d’avoir des relations de confiance et ne se justifient que pour de gros
effectifs
15
Voir http://www.fao.org/ag/ca/fr/
16
Dans des cas particulier, absence de limitation de l’alimentation hydrique, sols fertiles (bas de pente ou
baiboho à Madagascar) de combiner les deux usages en assurant un prélèvement limité de fourrage à partir sur
la plante de couverture (Andriarimalala et al., 2013)
7
animale, revenu complémentaire, capital, énergie de traction disponible dès le début de la campagne
agricole.
Les éleveurs ont aussi fait évoluer leurs systèmes d’élevage en scindant leur cheptel en un lot de
bovins conduit de façon extensive (maintien de la transhumance) et un lot bénéficiant d’une
complémentation alimentaire et orienté vers la production laitière pour la famille et maintenant pour le
marché urbain (Coulibaly, 2008) et parfois l’embouche. Mais ces éleveurs en Afrique de l’Ouest (Mali,
Sénégal) et du Centre (Cameroun) sédentarisés non loin des villes, ont peu modifié leurs systèmes de
culture céréaliers pour y insérer des cultures fourragères et ont préféré recourir à l’achat d’aliments du
bétail disponibles sur les marchés à base de sous-produits agro-industriels (tourteau et coque de
graine de coton, son de céréales, …). Les flux de biomasses fourragères
17
entre des exploitations
d’agriculteurs et celles d’éleveurs sont limités car tous les producteurs ruraux s’adonnent peu ou prou
à l’élevage et réservent leurs productions fourragères (majoritairement des résidus de culture) à leur
propre bétail. Ainsi progressivement les éleveurs de ces régions perdent un peu de leur autonomie
alimentaire de leur troupeau et deviennent de plus en plus dépendants du marché des concentrés.
2. La faible intégration agriculture élevage caractérise toujours les savanes africaines et
malgaches
Malgré un début de généralisation des systèmes de polyculture élevage (PCE) en zones de savane
africaines et malgaches, le degré d’intégration de l’agriculture et de l’élevage reste le plus souvent
limité. Dans la majorité des cas l’orientation antérieure des unités de production demeure :
- l’activité principale des éleveurs (principalement Peul en Afrique subsaharienne) reste l’élevage
extensif de ruminants avec un début timide d’intensification de la production laitière aux abords des
villes ;
- les agriculteurs les plus aisés (grâce aux revenus du coton et du riz) ont bien intégré un noyau
d’élevage bovin dans leur exploitation et rentrent ainsi dans la catégorie des agro-éleveurs. Mais leurs
troupeaux sont le plus souvent conduits de façon extensive sans lien étroit avec leurs systèmes de
culture (Tableau 1). Ils reprennent ainsi les conduites des éleveurs « extensifs » valorisant les
parcours naturels et parfois pratiquant eux-mêmes la transhumance ou confiant la gestion de leurs
troupeaux à des bergers Peul.
La mobilité du bétail qui reste possible dans ces régions et particulièrement sur les vastes plateaux
malgaches peu peuplés, explique cela. Il est plus rentable pour un éleveur et un agro-éleveur (quand
son troupeau est numériquement important) de rémunérer des bergers, de payer des droits d’accès à
des parcours naturels et même de payer des amendes en cas de dégâts causés aux cultures que
d’alimenter l’ensemble de son bétail avec des fourrages cultivés et des aliments concentrés achetés
ou autoproduits. Le coût d’accès aux ressources naturelles demeure limité. En cas de conflits et de
raréfaction aigüe des ressources fourragères (par exemple par la remise en question du droit de vaine
pâture par les agriculteurs et certains agro-éleveurs), les éleveurs préfèrent migrer vers des régions
peu peuplées plutôt que d’inscrire leur élevage dans un système foncier limité spatialement. Comme
quoi ces régions offrent encore des opportunités pour le pastoralisme.
Les systèmes des agro-éleveurs qualifiés « d’intensif » (Tableau 1) dérogent à la règle et montrent un
processus d’intégration cultures-élevage assez poussé.
17
Seul le Sénégal se caractérise par un flux important de fanes d’arachide produit par des agriculteurs du Sine
Saloum et vendues principalement pour les éleveurs de l’agglomération de Dakar
8
Tableau 1 : Evolutions conjointes des systèmes de culture et d’élevage selon le type de
producteurs en PCE
Type de
producteurs
Type de PCE Evolutions conjointes des
Systèmes d’élevage Systèmes de culture
Éleveur Elevage de ruminants
dominants associés à la
production vivrière pour
les besoins familiaux
(céréales)
.Constitution de deux types de
troupeaux
.Troupeau de brousse avec
pratiques extensives
.Début d’intensification du
« troupeau de village » avec
achats de compléments
.Automédication généralisée et
recours à l’automédication
La fumure est mieux valorisée
sur l’exploitation mais beaucoup
de pertes du fait de la
transhumance
Recours aux herbicides (via le
savoir-faire des paysans
manœuvres)
Pas de modification de
l’assolement (adoption de
cultures fourragères très rare)
Agriculteur Cultures de subsistance
et de vente dominantes,
petits élevages très
fréquents, traction
animale en progression
.Noyau d’élevage réduit 
faible impact sur l’exploitation
(peu de fumure, peu de besoins
fourragers…)
.Intensification du petit élevage
(ovin, volaille)
.Traction parfois limitée à l’âne
ou au cheval car moins couteux
.Peu de prise en compte des
besoins de l’élevage dans le
choix de l’assolement et des
techniques mais :
une exploitation minière de la
fertilité avec 100% d’utilisation
de la biomasse pour le bétail
(dont vaine pâture)
un fort intérêt pour la fumure
organique mais qui nécessiterait
plus de bétail et + de surface
fourragère
augmentation du stockage
des résidus de culture sauf si
pratique de couverture du sol
Agro-éleveur
« Extensif »
.Cultures de vente
dominantes sur de
grandes surfaces,
traction animale
généralisée et parfois
accès à la motorisation,
.Troupeau bovin en
croissance
.L’extensif privilégié
 moins couteux en travail ou
confiage aux éleveurs
Impact négatif sur les
ressources pastorales
communes
.Achat fréquent de
compléments pour l’entretien
des vaches gestantes
Agro-éleveur
« intensif »
.Cultures de vente
dominantes avec début
d’introduction de
cultures fourragères (en
pure ou associées)
.Troupeau a effectif
limité pour le lait ou
l’embouche (bovin,
ovin), plus rarement
élevages à cycle court
.Contrôle des effectifs et
valorisation plus poussée des
troupeaux
Début d’amélioration génétique
Surtout pour le lait
.Diversification des ateliers
d’élevage
Fabrication de provende à la
ferme
Valorisation optimale de la
fumure animale enrichie de
litière et de refus d’alimentation
Modification de l’assolement ou
des pratiques de gestion des
résidus :
insertion de cultures
fourragères ou de cultures à
doubles fin en culture pure ou
en association avec les cultures
de base
récolte précoce des résidus
début de pratique de pâturage
contrôlé de parcelles mixtes ou
fourragères (en pur)
Le modèle (complet) de polyculture élevage promu par les agronomes dès les années 1960 est
presque introuvable dans les campagnes africaines et malgaches. Le cas de la PCE comprenant un
élevage intensif - élevage laitier plus rarement à viande - et des cultures fourragères dans
l’assolement et la rotation, s’y rapproche le plus. Cinq facteurs permettent d’expliquer cette situation :
- Les déterminants culturels sont importants à prendre en considération. Les agriculteurs ne
peuvent pas tous et toujours s’improviser « éleveur » dans la mesure où cette activité nécessite
au-delà des savoirs enseignables, un changement de vie ou de métier avec une relation
particulière à l’animal (comportement et savoir-faire pour les contenir, les garder, les soigner, les
9
élever). De plus les modifications de la répartition du temps de travail dans la journée (charge de
travail journalière, travail d’astreinte) et dans le temps long (constitution d’un troupeau et
amélioration progressive de la génétique) sont difficilement vécues ;
- Les marchés permettent ou non de développer au niveau local des combinaisons agriculture
élevage dans la mesure où le producteur privilégie ses choix d’activités en fonction des critères
de rentabilité économique ou de rémunération de son travail. De ce point de vue, l’existence de
filières lait ou viande organisées et dynamiques représente un des déterminants clés d’une
meilleure intégration. Or les agronomes pour justifier l’intérêt de la PCE ont trop souvent mis en
avant l’objectif de maintien de la fertilité des terres grâce à la gestion optimale des effluents
d’élevage et des autres matières organiques ;
- L’intégration agriculture élevage a été surtout raisonnée au niveau de l’unité de production et
rarement à l’échelle du territoire (Landais et Lhoste, 1990). De plus l’approche spatiale des
combinaisons de productions se résume à la gestion des ressources communes et à la résolution
des conflits entre producteurs. Elle pourrait intégrer aussi les questions de coordination,
d’échange et de complémentarité entre des exploitations gardant leurs spécificités. Il s’agirait
alors de concevoir d’autres modèles d’intégration/association entre différents types de systèmes
de production et non plus au sein de l’exploitation
- Les politiques agricoles africaines en faveur de la PCE depuis deux décennies se sont limitées
au mieux à la vulgarisation des techniques sans chercher à mettre en place des mesures
incitatives comme des crédits d’investissement (comme par le passé
18
) considérant que
l’intégration agriculture élevage allait de soi car elle était une fois pour toute jugée utile aux
exploitations et à la préservation de l’environnement. La faiblesse des soutiens à l’organisation
des filières d’élevage et à l’appui-conseil aux producteurs a freiné le processus d’intégration. De
plus les démarches d’appui-conseil utilisées habituellement sont centrées sur quelques ateliers
ou cultures et rarement sur une base systémique. Plus récemment (2009 à nos jours) les Etats
ont relancé les politiques de soutien aux productions végétales afin de faire face aux pénuries
alimentaires et à la hausse des produits amylacés de base sur le marché mondial (blé, riz,
maïs).Ce soutien a surtout pris la forme de subventions directes pour les engrais minéraux qui
n’amènent pas les producteurs vers l’agroécologie (Dugué et al., 2013).
- L’explicitation des enjeux de l’intégration cultures-élevage en termes d’économie d’azote (fumier,
lisier, légumineuses fourragères), de limitation de pollution, de réduction (éventuelle) d’émissions
de GES, de protection de l’environnement et de la biodiversité ainsi que le partage des
connaissances entre producteurs et agronomes, ont souvent été mis de côté pour se limiter à des
préconisations normatives. Les agriculteurs ont besoin de scénarios pour faire évoluer leur
exploitation avec une quantification minimale des besoins en travail et des effets attendus (Le Gal
et al., 2013).
De ce fait cinquante ans après les premiers programmes visant cette intégration, un écart important
existe entre le modèle proposé et les systèmes mixtes observables sur ces terrains. De plus les
propositions de modèles de PCE été peu renouvelées, les bases techniques sont là mais la
combinaison des ateliers, la gestion des flux (au sein de l’exploitation, entre exploitation) et les bases
économiques associées à des mesures incitatives et à l’organisation des filières sont à améliorer ou
restent à concevoir. L’analyse de cet écart est riche d’enseignements pour les travaux de conception
des systèmes de production innovants et durables basés entre autres sur la polyculture élevage pour
ces régions mais aussi pour l’agriculture française.
3. Quelques enseignements pour l’agriculture française
Dans cette dernière partie nous tentons de tirer les enseignements génériques des travaux présentés
précédemment et de les appliquer aux réalités de l’agriculture française, exercice périlleux dans la
mesure où notre connaissance de l’agriculture française est limitée. De ce fait et par soucis de
simplification, cette partie se focalisera sur le niveau exploitation agricole sans traiter la question de
l’intégration cultures-élevage à l’échelle du territoire. Mais nous sommes bien conscient que cette
échelle doit aussi être prise en compte pour traiter de l’action collective et des coordinations entre
exploitations complémentaires (gestion de flux, aménagement de l’espace, équipement en commun,
18
Dans le passé une politique de crédit volontariste a permis aux agriculteurs de s’équiper en culture attelée
(équipement, plus rarement facilité pour l’acquisition des animaux).
10
organisation de filières) qui sont souhaitables voire indispensables pour une PCE fonctionnelle et
durable.
Un grand nombre de systèmes de production, en particulier dans les pays du Sud, peuvent être
qualifiés de polyculture élevage si on la définit par la présence simultanée sur l’exploitation d’un ou
plusieurs ateliers d’élevage et de diverses productions végétales. En termes de conception de
systèmes agricoles durables, les recherches sur la PCE ont surtout de l’intérêt que si elles
débouchent sur des recommandations permettant de préserver les ressources naturelles et de réduire
les externalités négatives et l’empreinte environnementale des exploitations agricoles et plus
globalement des agricultures régionales. Il n’est pas souhaitable que la PCE devienne un modèle
passe-partout alors que les producteurs ont toute latitude pour choisir leurs activités sauf contraintes
majeures (zones de montagne). Ces considérations nous amènent à considérer que les termes
d’intégration ou de mise en synergie nous semblent plus adéquats que celui d’association qui peut
recouvrir une large gamme de systèmes.
3.1 Analyse comparative des conditions de l’intégration agriculture élevage entre l’Afrique et la
France
Les conditions d’exercice du métier d’agriculteur sont très différentes entre ces deux contextes. Au-
delà des différences socioculturelles et agroclimatiques, il faut considérer que les décideurs
politiques et les sociétés (les consommateurs en particulier) n’ont pas les mêmes attentes vis-à-vis de
l’agriculture. Dans les pays du Sud les priorités pour l’agriculture restent la fourniture d’aliments en
quantités suffisantes et l’amélioration des rendements qui permettraient de baisser le prix des produits
de base surtout pour les ménages pauvres. En France, le modèle productiviste vise à baisser les
coûts de revient pour que les agriculteurs puissent faire face à la concurrence des agricultures des
autres pays mais dans le même temps les consommateurs sont demandeurs de produits sains, de
bonne qualité organoleptique sans vouloir toujours en mettre le prix. Mais la principale revendication
sociétale en Europe porte sur la réduction des nuisances causées par l’agriculture : pollution des
eaux, résidus de pesticides dans les aliments, modification des paysages, bruits et odeurs… L’autre
différence majeure entre les deux contextes est le poids et le type de politiques agricole et
environnementale : quasi-absence de politiques en Afrique subsaharienne ou non-respect des règles
et lois promulgués, agriculture très administrée et surveillée en France (Tableau 2). C’est par rapport à
ces deux cadres d’intervention que la recherche, le développement et les agriculteurs peuvent
réfléchir à différents modèles de PCE.
Toutefois l’analyse comparative montre beaucoup de points communs entre les deux contextes en
termes d’arguments en faveur de la PCE (Tableau 2): fertilité du sol, économie d’intrants et
autonomie des producteurs, valorisation d’espaces à faible productivité. Les divergences proviennent
principalement des différences de sensibilité des différents acteurs pour les questions
environnementales et de durabilité de l’agriculture entre le contexte africain (orientée uniquement sur
la fertilité des sols cultivables) et français (un faisceau d’objectifs combinant biodiversité, paysage,
réduction des pollutions,…).
11
Tableau 2 : Les conditions d’exercice de la PCE en France et dans les savanes africaines et
malgaches
Critères de
comparaison
France Zones de savane africaines et
malgaches
Impacts
environnementaux et
externalités induites
par l’agriculture et
PCE comprise
Négatifs : Pollution par excès
d’effluents d’élevage si mauvais ratio
UGB/Ha
Baisse de biodiversité si
simplification des systèmes (taille
des parcelles, baisse de la diversité
des activités)
Négatifs :
Surpâturage, piétinement et tassement
des sols : risque d’érosion, mauvais
ratio UBT/ressources
Rareté de la biomasse et des
nutriments
Disponibilité en travail
dans les exploitations
Faible : effets variables sur la PCE
selon le type d’activités (type de
conduite d’élevage, niveau de
mécanisation)
Moyenne à forte selon le disponible
foncier
Intérêt de diversifier le revenu par
l’élevage et autres activités en saison
sèche si pas d’irrigation possible
Rôles et effets des
filières sur le
fonctionnement de
l’exploitation
Fort : les filières poussent à la
spécialisation ou à la réduction de la
diversité des activités
Faible : pas de contractualisation,
appui limité des filières
Rôles et effets des
politiques agricoles
sur le fonctionnement
des exploitations de
PCE
Fort : Normes agro-
environnementales, poids des DPU
orientés vers les productions
végétales
Pas de dispositifs spécifiques à la
PCE
Faible
Pas de mesures incitatives pour
l’intégration agriculture élevage
Concurrences avec
les autres systèmes
de production intra
pays
Fort : quels que soit le secteur pour
des productions courantes, de masse
Moyenne : pour une production de
qualité (mais les systèmes
spécialisés peuvent aussi s’orienter
vers la qualité, l’agriculture bio, les
produits AOC)
Faible : pour les productions
végétales, pas ou peu d’exploitations
spécialisées capitalistiques
performantes pour le moment
Fort : pour les productions animales,
élevage extensif basé uniquement sur
les ressources naturelles « gratuites »
(faible coût d’accès)
Arguments mis en
avant par la recherche
pour le
développement et le
maintien de la PCE
- Limitation des pollutions azotées et
phosphatées si bon ratio UGB/ha
- Maintien de la biodiversité et de la
fertilité du sol (rôle des prairies, de
la fumure organique)
- Augmentation de l’autonomie des
exploitations vis-à-vis des intrants
(soja importé, engrais, produits
vétérinaires)
- Valorisation d’espaces difficiles à
cultiver
- Maintien de paysages attractifs :
bocage, mosaïque (économie du
tourisme, qualité de vie)
- Augmentation de l’autonomie des
exploitations vis-à-vis des intrants
(économie d’engrais, d’aliments
concentrés)
- Maintien de la fertilité du sol (rôle de
la fumure organique et des
légumineuses)
- Valorisation du travail en période
creuse (saison sèche)
- Valorisation d’espaces incultes et de
ressources arborés (fourrages
grossiers)
- Economie de combustible par
l’emploi systématique de la traction
animale (transport court, travaux
aratoires)
3.2 Retour sur les objectifs du développement d’une agriculture durable :
Il faut ne pas perdre de vue les objectifs que l’on se fixe avant de promouvoir des modèles
d’agriculture alternative (en rupture avec les modèles conventionnels qui ont montré leurs limites) :
12
Qui fixe ces objectifs et sur quelles bases sont conçues les politiques et les mesures
d’accompagnement ? Comment les agriculteurs sont-ils associés à ces orientations ?
Il est difficile de déconnecter le débat sur les modèles de PCE plus performants (au sens économique
et environnemental) de celui relatif à la durabilité des systèmes de production spécialisés (100%
productions végétales ou 100% productions animales). Les performances économiques des seconds
du fait des économies d’échelle réalisées rendent difficile le développement et la viabilité socio-
économique de la PCE.
Le cœur du débat doit porter sur la durabilité des agricultures sensu largo comprenant d’abord la
durabilité endogène, celle des exploitations car on ne peut pas imaginer une agriculture sans
agriculteurs (ou avec des producteurs fortement subventionnés), et la durabilité exogène, c’est-à-dire
la contribution de l’agriculture au développement durable des territoires (Hubert et Billaud, 2011). Le
choix des modèles d’agricultures importe peu en fait ce sont les performances, les niveaux
d’efficience et les externalités qu’il convient d’évaluer. Les systèmes spécialisés basés sur un seul
type de production (végétale ou animale) sont-ils en mesure d’évoluer dans le sens du développement
durable, avec quelles marges de progrès, à quelles conditions ? (quels niveaux d’acceptation sociale
de la part des communautés d’agriculteurs et de la société).
3.3 L’intégration agriculture élevage et la PCE en 2050
Le rôle de la recherche est d’aider aux changements souhaitables (et acceptables) à court terme
mais aussi d’imaginer le futur et surtout les solutions pour le futur. Par rapport à ce difficile exercice de
prospective appliqué à l’agriculture qu’elles seraient les défis pour lesquels la PCE serait mieux
positionnée que les autres types de systèmes de production.
Défis énergétiques : l’augmentation de l’énergie fossile est inéluctable dans les prochaines décennies
sans que l’on sache aujourd’hui si une énergie de remplacement moins couteux sera disponible. Pour
l’agriculture cela correspond à une hausse des prix de revient si la consommation de carburant
agricole, de fumure minérale et la longueur des transports de matériaux pondéreux sont maintenus
comme aujourd’hui. Des recherches sur les bilans énergétiques ont déjà été initiées et verront leurs
résultats prendre de leur importance si cette augmentation de l’énergie se confirme. Dans ce cas la
PCE présente des avantages comparatifs par rapport aux autres systèmes de production que l’on a
présentés précédemment. Cela implique au moins pour les pays du Sud (mais aussi peut être pour
ceux du Nord) de maintenir des compétences en recherche et développement, en machinisme dans le
secteur de la traction animale et de la culture attelée.
Défis climatiques : Il semble illusoire d’imaginer une agriculture sans élevage, des systèmes de
production spécialisés en élevage resteront indispensable aux communautés et territoires où les
productions végétales sont marginales ou impossibles (montagnes, zones arides et semi-arides). Ces
situations risquent de s’étendre et dans les zones actuellement à fortes potentialités agricoles des
zones marginales pourraient apparaitre si les prévisions de changements climatiques se confirment.
La combinaison cultures dans parties fertiles et élevage dans les zones en voie d’aridification
deviendra préférable au 100% productions végétales souvent recherché par les producteurs
aujourd’hui. Les agriculteurs devront (re)découvrir la polyculture élevage et la considérer comme une
forme d’adaptation à ces changements.
Défis socio-économiques et la question du travail : Il est bien difficile de porter un diagnostic sur
l’emploi en 2050. Si le sous-emploi demeure, l’agriculture pourrait mobiliser une partie des actifs soit à
temps partiel pour subvenir aux besoins de leurs familles (produire pour se nourrir) soit à temps plein
si les conditions de rémunération le permettent. Dans ce contexte la diversité de productions offerte
par la PCE est un atout. L’innovation dans la mécanisation et la robotisation qui s’amplifiera
probablement dans les décennies à venir, peut constituer un atout pour la PCE si elle n’est pas trop
coûteuse car elle réduira la charge de travail permanente qui caractérise ces systèmes. Dans le cas
contraire elle viendra conforter les systèmes hyperspécialisés qui sont déjà rentrés dans l’ère de la
robotique (GPS en grandes cultures, robots de traite et d’alimentation du bétail).
Défis alimentaires : Difficile d’imaginer que pour nourrir 9 milliards d’habitants en 2050 on puisse se
passer des systèmes hyperspécialisés, hautement productifs (en calories par hectare et encore plus
par actif agricole). L’évolution de la consommation de produits animaux va fortement peser sur l’offre
alimentaire par le biais des quantités de produits végétaux disponibles et leurs prix. Si l’on considère
13
que pour des raisons de coût d’énergie (donc de transport) ou de réglementations environnementales,
les systèmes spécialisés et leurs filières de commercialisation ne puissent plus fonctionner comme
aujourd’hui, il sera nécessaire pour assurer une alimentation diversifiée et suffisante, d’imaginer des
agricultures régionales plus autonomes et offrant une large gamme de produits que la PCE pourrait
produire. Dans les pays du Sud où la malnutrition en milieu rural est toujours d’actualité, la PCE peut
être une façon de la réduire, les villageois africains consomment plus de légumes et de fruits qu’ils y
30 ans, demain il pourrait en être de même pour le lait, la viande ou le poisson.
Conclusion
Au Sud comme au Nord, la PCE et l’intégration agriculture élevage peuvent contribuer au
développement durable des territoires dans la mesure où les agriculteurs y voient plus d’intérêts que
de contraintes. Pour cela il conviendrait de mieux faire la preuve des avantages et des contraintes de
cette forme d’agriculture - la polyculture élevage- ou de combinaisons localisées de systèmes de
production relativement spécialisés mais entretenant des flux réguliers entre eux. Si les relations entre
agriculture et élevage au sein des exploitations ou des territoires sont largement documentés dans
différentes situations agraires elles sont souvent mal quantifiées et du point de vue des acteurs
probablement valorisées (importance des pertes de nutriments, de biomasse, de gaz…). Les bases
techniques de l’amélioration de ces systèmes existent en partie, des innovations sont certainement à
venir, mais la question du travail semble sous-évaluée quel que soit le contexte. La spécialisation en
élevage permet de réduire les astreintes, et la charge de travail par actif (création d’emplois
spécialisés, mécanisation poussée) de même pour les productions végétales lorsque les structures
d’exploitation s’y prêtent. La PCE est souvent synonyme pour les agriculteurs d’une surcharge de
travail en France mais d’une meilleure valorisation de la force de travail dans les exploitations des
pays du Sud. Pour traiter du futur de la polyculture élevage il est nécessaire de ne pas se limiter aux
approches technicistes ou mono disciplinaires (les flux de nutriments, l’émission de GES, les bilans de
travail) mais plutôt de favoriser des démarches de conception de systèmes agricoles innovants en
associant étroitement les agriculteurs qui seront les principaux acteurs des changements futurs.
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  • 1. 1 Evolutions des relations agriculture élevage en zones de savane africaines et malgaches : quelques enseignements pour la polyculture élevage en France. Dugué, P. 1,2 Andrieu N. 1 Blanchard M. 3,4 , Chia E 5 ., Havard M. 1 ,4 , Le Gal P.-Y. 1 , Penot E. 1,6 , Salgado P. 2,7 , Vall E 3 . 1 CIRAD, UMR INNOVATION, F-34398 Montpellier, France 2 ENA Département Ingénierie de développement, Meknès, Maroc 3 CIRAD, UMR Systèmes d’Elevage Méditerranéens et Tropicaux, F-34398 Montpellier, France 4 CIRDES, Bobo-Dioulasso, Burkina Faso 5 INRA UMR INNOVATION, 2 Place Viala, 34060 Montpellier, France 6 ESA, Université d’Antananarivo, Madagascar 7 CIRAD, UMR Systèmes d’Elevage Méditerranéens et Tropicaux, F-97410 Saint-Pierre, La Réunion, France Correspondant : patrick.dugue@cirad.fr Résumé Les exploitations de polyculture élevage sont largement dominantes dans les agricultures familiales des pays du sud et plus particulièrement dans les zones de savane africaines et malgaches. L’analyse des évolutions des relations entre l’agriculture et l’élevage dans ces régions sur un demi-siècle montre que l’intégration entre ces secteurs est encore limitée pour des raisons culturelles, d’organisation de filière, d’absence de politiques incitatives et d’explicitations pour les producteurs et décideurs des intérêts et enjeux liés à cette intégration. Cette situation ne permet pas une bonne valorisation des complémentarités entre les deux secteurs tant au niveau des exploitations que des territoires. A partir de cette analyse des enseignements génériques sont proposés et confrontés au contexte de l’agriculture française afin de mettre en exergue les avantages comparatifs de la polyculture élevage aujourd’hui et dans le futur. Mots-clés : agriculture élevage, relation, intégration, conception de système de production, modèle, Afrique subsaharienne, Madagascar, France.
  • 2. 2 Introduction La question de l’association de l’élevage aux productions végétales se repose en France et en Europe dans la continuité du débat sur la multifonctionnalité de l’agriculture et par rapport à de nouvelles préoccupations comme la réduction des pollutions, le maintien de la biodiversité et le bien-être animal. Ces préoccupations s’inscrivent progressivement dans les politiques publiques et renvoient à l’objectif d’écologisation des pratiques agricoles prôné par la plupart des agronomes aujourd’hui. L’intégration cultures-élevage constitue un des éléments de base possible de la conception de systèmes agricoles innovants et durables (Meynard et al., 2012). Mais la majorité des recherches dans ce domaine porte sur les systèmes de culture et les productions végétales (Wezel et al., 2009 ; Lamine et Meynard, 2009). Dans ce cadre la polyculture élevage (PCE) raisonnée tant au niveau de l’exploitation agricole que des territoires est rarement mis en avant par la profession agricole en France comme en Europe tant les processus de spécialisation ont marqué ce secteur. Elle est toutefois présentée par les chercheurs (Lemaire et al., 2003 ; Ryschawy et al., 2012 ; Moraine et al., 2012) comme un des leviers possibles du développement durable des territoires en mobilisant divers processus : synergie entre les deux activités principalement par la gestion des effluents d’élevage (fumure, biogaz), recherche de l’autonomie alimentaire des systèmes d’élevage, amélioration du cycles des nutriments et limitation des importations d’intrants. Dans les pays tropicaux et en Afrique sub-saharienne en particulier, l’association agriculture élevage est à l’agenda des politiques de développement depuis les années 1960 (Lhoste, 2004) et constitue toujours pour les agronomes travaillant dans ces régions un levier important du développement d’une agriculture durable. Dans une première partie nous présentons comment les relations entre l’agriculture et l’élevage et entre agriculteurs et éleveurs ont évolué depuis un demi-siècle dans les zones de savane africaines et malgaches. Nous ferons ensuite, en tant qu’agronome, zootechnicien et géographe, une lecture des limites du modèle de polyculture-élevage proposé pour cette région et dans une dernière partie nous tirerons de ces travaux quelques enseignements utiles au débat sur l’émergence d’un nouveau modèle de polyculture élevage en France et en Europe. 1. Evolutions des relations agriculture élevage depuis 50 ans Contexte d’étude : les savanes d’Afrique de l’ouest et du centre et les Hautes Terres de Madagascar Les éléments présentés ci-après découlent de travaux de recherche et d’appui au développement portant sur les relations agriculture élevage, leurs caractéristiques actuelles, leurs évolutions et les pistes pour une meilleure intégration des deux activités (Blanchard et al., 2013 ; Autfray et al., 2012 ; Vall et al.,2006 ; Dugué et al., 2004a et b; Dugué et al., 1998). Ils concernent principalement des régions d’Afrique subsaharienne où les deux activités sont bien présentes, en particulier les zones de savane d’Afrique de l’ouest et du centre caractérisés par les cultures de coton et d’arachide comme productions de vente et les céréales comme culture alimentaire. A cela s’ajoute les Hautes- Terres de Madagascar où la présence de l’élevage bovin intégré aux systèmes rizicoles de bas-fond est très ancienne et remonte avant la période coloniale (Garin et al., 2011 ; Andriarimalala et al., 2013). Ces zones d’études sont caractérisées par une pluviométrie relativement abondante (de 700 à 1200 mm/an) qui permet de sécuriser les productions végétales et de dépasser au moins depuis quelques décennies, le stade de l’agriculture de subsistance. Nous n’aborderons pas le cas des zones semi-arides (de 300 à 700 mm/an) où l’agriculture et l’élevage cohabitent mais avec une faible intégration, ni les zones arides (< 300 mm) où l’agriculture est très marginale sauf lorsqu’elle est irriguée (périmètres modernes et traditionnelles d’oasis). Quatre périodes successives montrent des processus différents de rapprochement entre l’agriculture et l’élevage dans ces régions. 1.1 Avant les grands projets de développement rural post-indépendances Historiquement dans bien des situations d’Afrique subsaharienne et de Madagascar, les productions végétales et animales étaient assurées par des communautés différentes : les pasteurs ou éleveurs Peul des zones semi-arides (moins de 700 mm/an) étaient spécialisés dans l’élevage des ruminants alors que les communautés d’agriculteurs réparties dans toutes les régions à pluviométrie supérieure
  • 3. 3 à 500 mm/an fournissaient les produits amylacés, base de l’alimentation, comme les céréales et plus au sud le manioc et l’igname. Les échanges entre éleveurs et agriculteurs existaient dans les régions où les deux systèmes de production cohabitaient (zone entre 300 et 1 000 mm/an) : les éleveurs achetaient des céréales ou les échangeait contre du lait et les agriculteurs pouvaient acheter des animaux sur pied pour les cérémonies rituelles. Les contrats de fumure entre ces deux groupes étaient relativement fréquents et permettaient à l’agriculteur de cultiver plus longtemps sa terre avant de la mettre en jachère, pratique habituelle de restauration de la fertilité du sol. Toutefois des systèmes agropastoraux combinant productions végétales et animales de façon significative existaient dans situations particulières avant les années 1950 : - Dans le pays Serer (Sénégal) (Pélissier, 1966) et le pays Tupuri (Nord du Cameroun) (Guillard, 1965), zones densément peuplées 1 (> 50 habitants au km²), l’intégration agriculture élevage avait pour objectif d’accroitre la productivité des terres par un accroissement de la charge animale par ha cultivable donc de la production de fumure organique. Cela était rendu possible par une organisation collective de la jachère de courte durée (selon les saisons, pâturée le jour, fertilisée la nuit), le recours aux parcs arborés fourragers (Faidherbia albida 2 , Prosopis jubiflora) associés aux cultures et une gestion optimale de la fumure animale par le parcage nocturne dans les zones cultivables durant toute l’année. Les systèmes agraires de ces deux régions ont fonctionné durablement sur cette base jusque dans les années 1960 et avec des pratiques similaires alors qu’ils se situent à plus de 3000 km de distance. - L’intégration agriculture élevage de zébus dans les systèmes de production des Hautes- Terres à Madagascar était aussi justifiée par le besoin de produire de la fumure animale pour entretenir la fertilité des rizières de bas-fond de superficie très réduite et donc ne pouvant pas rentrer en rotation avec la jachère (Garin 1998, Rollin 1994). A cela s’ajoute d’autres raisons agronomiques comme le besoin d’avoir un troupeau pour mettre en boue la rizière par le piétinement des zébus (avant repiquage du riz) ainsi que des raisons culturelles et religieuses. Ces deux cas d’études mettent en évidence une relation de cause à effet entre la croissance démographique et la réduction des surfaces cultivables par habitant d’une part, et le déclin de la jachère et le besoin de mieux intégrer les productions végétales et élevage d’autre part. Cette intégration et les fonctions qu’elle assure (entretien de la fertilité, production de ressources fourragères) constituait déjà à cette époque le début de processus d’intensification de l’agriculture sensu largo mais limité à de rares régions. 1.2 Le modèle techniciste de l’exploitation de polyculture élevage des années 1960-80 Des agronomes comme G. Curasson (1948) et R. Tourte (2005) et bien d’autres 3 , ont promu à partir des années 1950-60 un modèle de système de production basé en garde partie sur l’intégration agriculture élevage. Ce modèle de PCE s’inspire très clairement de celui de l’agriculture française et européenne du XIX° siècle et de la première moitié du XX° siècle basé sur la révolution fourragère, l’abandon de la jachère et le début de la mécanisation. Les bases agro-techniques du modèle proposé pour les producteurs des savanes d’Afrique subsaharienne et malgaches étaient similaires : (i) les animaux fournissent la fumure organique et l’énergie pour la traction des matériels aratoires et de transport (ii) et une partie de l’alimentation (lait, viande) et des revenus à la famille ; (iii) les systèmes de culture apportent au bétail les fourrages grossiers (résidus de culture) et l’alimentation de qualité (cultures fourragères, compléments) toute l’année (techniques de conservation et de stockage). Ce modèle visait principalement les agriculteurs ou les rares agroéleveurs car les éleveurs 1 Ce qui était rare à cette époque, l’Afrique sub-saharienne était globalement sous peuplée (majoritairement moins de 30 hab./km²) mais avec quelques ilots de peuplement plus denses au Nigéria (estuaire du Niger), Burkina Faso (plateau central), Sénégal (Sine et Saloum), au Cameroun (Extrême-Nord). 2 Le Faidherbia albida peut être considéré comme une culture pérenne associée aux céréales (mil, sorgho, maïs) et légumineuses (arachide, niébé) dans ces deux régions même s’il n’est pas planté mais issu d’un processus de domestication et de régénération naturelle que l’on peut qualifier « d’assistée » par le paysan (repérage et protection des jeunes pousses). En plus de son effet sur la fertilité du sol, il produit des gousses consommés par le bétail et du fourrage aérien qui nécessite un émondage pour le distribuer aux animaux d’élevage (Peltier, 1996). 3 René Dumont dans la plupart de ces ouvrages parus après 1960 souligne l’intérêt de la polyculture élevage dans les pays pauvres d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine
  • 4. 4 n’envisageaient pas encore à cette période de se sédentariser et de limiter les déplacements de leur troupeau (transhumance ou déplacement journalier) base du système d’alimentation du bétail. Dans les années 1960 à 1980, la vulgarisation et l’adoption à grande échelle de la culture attelée (bovine, asine et équine selon les situations 4 ) a touché la majorité des régions entre 500 et 1200 mm/an 5 en cultures pluviales et dans les périmètres irrigués. En particulier, l’élevage de bovin de trait a pu rapidement s’intégrer dans des exploitations en mesure de rembourser les crédits d’équipement et d’entretenir les animaux (santé et alimentation) ce qui explique sa présence dans les bassins de production des cultures de vente comme le cotonnier et le riz. Ensuite les revenus procurés par ces cultures ont été investis préférentiellement dans le bétail de ruminants (bovins dans la mesure du possible) afin de constituer un noyau d’élevage fournissant fumure organique, jeunes animaux de trait, revenu et constituant un capital 6 facilement mobilisable. La diffusion de la traction animale a été une véritable succes story à la fois à Madagascar et en Afrique des savanes (surtout dans les bassins cotonnier, rizicole et arachidier). Elle a surtout eu comme conséquence l’accroissement des surfaces cultivées par région, par exploitation et par actif et la réduction de la pénibilité du travail. Ceci a eu comme effet l’accroissement du disponible fourrager non pas par l’adoption des cultures fourragères (jugées sans intérêt à cette époque par les agriculteurs) mais par l’augmentation de la production de résidus de culture consécutive à l’augmentation de surface. Deux autres effets attendus n’ont pas été au rendez-vous de ce début d’intégration agriculture-élevage : - L’accroissement de revenu issu de l’élevage a été plus modeste que prévu car les agriculteurs ont surtout visé la constitution d’un capital sur pied négligeant l’exploitation régulière du troupeau. Cela s’explique par les difficultés ou les réticentes des producteurs a adopté les programmes de prophylaxie et les techniques d’intensification des systèmes d’élevage (fourrages, concentrés protéiniques). En cas de crises sanitaires, climatiques et donc alimentaires, la taille importante du troupeau permettait de faire face au fort taux de mortalité des jeunes animaux et parfois aussi des adultes. - Les effets attendus sur la nutrition des familles rurales n’ont pas été observés car la production laitière 7 a peu augmenté tout comme la consommation de viande, les agriculteurs ayant opté pour un système d’élevage privilégiant l’accroissement du nombre de têtes, la constitution d’un capital sur pied pour faire face aux coups durs (santé, pénuries alimentaires du fait de mauvaises récoltes). Ce choix de stratégie d’élevage s’expliquait aussi par l’absence de filières organisées de commercialisation des produits animaux et surtout la forte concurrence sur les marchés locaux des produits issus des élevages très extensifs des éleveurs transhumants ou nomades. Ce début d’intégration agriculture élevage a été marqué principalement par le développement de la traction animale. Si de petits noyaux d’élevage bovin apparaissent chez les agriculteurs ils sont conduits de façon extensive à l’image des systèmes de conduite des éleveurs à cette période. Il y avait plutôt juxtaposition de deux activités agriculture et élevage, plutôt qu’intégration. Les éleveurs quant à eux ont été peu concernés par ces programmes de promotion de cette intégration 8 qui visaient essentiellement les agricultures en vue d’accroitre en priorité les productions végétales. 4 Les agronomes avaient surtout misé sur la traction bovine considérée comme plus efficace et plus rentable (embouche des animaux à la réforme avec plus-value, production conséquente de fumier) malgré les coûts d’investissement et d’entretien élevés. La traction avec des vaches un temps vulgarisée, permettait en plus aux agriculteurs d’assurer le renouvellement et la constitution d’un noyau d’élevage. Mais dans biens des régions la traction équine et asine s’est aussi bien développée du fait d’avantages comparatifs pour les exploitations à faible capital (Lhoste et al., 2010) 5 Les zones à plus forte pluviométrie (> 1200 mm) étaient peu adaptées à l’élevage des bovins pour des raisons zoo-sanitaires (trypanosomes) sauf sur les hauts plateaux d’altitude (> 1500 m) 6 Cette forme de capitalisation reste très fréquente encore aujourd’hui malgré les difficultés d’alimentation des bovins dans ces régions qui ont vu leurs populations humaine et animale croitre continuellement. Mais avec l’urbanisation croissante d’autres formes de capitalisation émergent aujourd’hui : investissement immobilier en ville, véhicules de transport, … 7 Les populations d’agriculteurs n’avaient pas l’habitude de consommer régulièrement du lait et pendant longtemps ils n’ont pas cherché à traire leurs quelques vaches (pour ceux qui en possédaient), tout le lait allait au veau. 8 L’appui aux producteurs ruraux dans ces régions a presque toujours été marqué par une séparation entre les services agricoles (productions végétales) et les services d’élevage au sein d’administrations différentes et même de ministères différents, il en était de même pour la recherche. Ce qui ne facilitait pas les efforts d’intégration entre ces deux activités partageant souvent les mêmes espaces
  • 5. 5 1.3 Les sécheresses en Afrique (1970 à 1990) et le rapprochement des deux secteurs de production Les sécheresses au Sahel dans les années 1970 et 1980 poussent les éleveurs de bovins des zones semi-arides à migrer vers des régions plus pluvieuses (800 – 1 200 mm/an) où l’élevage était peu pratiqué du fait à la pression parasitaire antérieure 9 . Ces éleveurs progressivement sédentarisent leurs habitats et une partie de leur troupeau ce qui les amène à s’intéresser de plus en plus aux productions végétales (céréales) en mobilisant leur importante production de fumure animale 10 . Rapidement ils deviennent autosuffisants en céréales et vendent leurs surplus. Cette migration a peu modifié la conduite des troupeaux si ce n’est le recours plus systématique à la prophylaxie en particulier aux trypanicides. Ces éleveurs s’installaient alors dans des zones auparavant peu peuplées mais qui vont l’être rapidement du fait du croît démographique naturel mais surtout des flux migratoires 11 d’agriculteurs quittant aussi les zones semi-arides. Le rapprochement entre agriculteurs et éleveurs est d’ordre spatial principalement, les échanges restent limités (vente de lait par les éleveurs en saison des pluies) et pas toujours égalitaires. Ainsi, pour cultiver leurs champs, les éleveurs embauchent à bas prix les paysans les plus pauvres qui doivent vendre une partie de leur force de travail pour vivre. Ce rapprochement est aussi la source de nombreuses tensions et parfois conflits entre ces deux populations pour l’accès aux ressources en terres et parfois en eau (Kossoumna et al., 2011). Les coopérations sont limitées au confiage des animaux des éleveurs (bergers) par les agriculteurs et à la vente par les éleveurs d’animaux pour le trait. Les mécanismes de coordination collective pour la gestion des espaces entre ces deux catégories socio- professionnelles étaient rares et le sont toujours. Les agriculteurs durant cette période, continuent à montrer un intérêt grandissant pour les productions animales. Un agriculteur considère qu’il a réussi dans son métier lorsqu’il a pu s’équiper en traction animale 12 et constituer un troupeau de ruminants. Le nombre de têtes de bovins est un facteur de réussite économique et aussi sociale. L’agriculteur montre ainsi qu’il a pu gagner de l’argent en cultivant, qu’il est à l’abri du besoin en cas de crises, qu’il est en mesure de transmettre un capital à ses descendants et qu’à l’occasion, il peut rendre service à ses alliés (prêt d’argent, confiage de bovins de trait). Plus modestement les agriculteurs et en particulier ceux des zones semi-arides (moins de 600 mm/an) ont vu durant cette période de de sécheresse, l’intérêt de diversifier leurs sources de revenus en misant sur l’élevage, en particulier des petits ruminants. La conduite de ce type d’élevage s’améliore avec le début du stockage de grandes quantités de résidus de culture surtout les plus riches (fanes de légumineuses). L’amélioration de l’habitat, l’usage des déparasitants, la stabulation semi-permanente et l’embouche ovine deviennent des pratiques courantes avec un effet non négligeable sur le revenu des ménages agricoles de ces régions (Faye et Landais, 1986) 1.4. L’accroissement démographique et les évolutions de la PCE de 1990 à nos jours L’accroissement démographique des zones d’étude a été continu et importante depuis les années 1960 du fait de l’amélioration des conditions de vie (services de santé, fourniture d’eau potable par des puits et forages). Ce processus touche à la fois les villes et les campagnes et a contribué à modifier la nature des relations agriculture élevage et donc les systèmes de PCE. Dans la mesure où les populations d’agriculteurs (incluant les agro-éleveurs) sont numériquement plus importantes que celles d’éleveurs, la croissance démographique en zone rurale s’est accompagnée inéluctablement d’une augmentation des surfaces cultivées car l’augmentation des rendements n’a pas été suffisante depuis 50 ans pour assurer la sécurité alimentaire des familles. Ce processus continue a entrainé une diminution des surfaces pâturables (parcours naturels jamais 9 La réduction de la pression parasitaire est liée à la baisse de la pluviométrie (moins 100 à moins 200 mm/an par rapport à celle de la période 1950 -70) mais surtout aux défrichements importants réalisés par les agriculteurs autochtones mais surtout des paysans migrants venus des zones semi-arides touchées par les fortes sécheresses 10 En faisant parquer les troupeaux dans les champs en saison sèche. Le ratio bovins/ha chez les éleveurs étant très élevé du fait de la taille importante du troupeau et de la faible surface cultivée en céréales par unité de production 11 Dans certains fronts pionniers en zone cotonnière au Cameroun, le croît démographique total était de 6% par an alors que le croît naturel variait entre 2 et 3% par an. 12 En pays Sénoufo au Nord de la Côte d’Ivoire, le chef de famille et chef de l’exploitation « mère » cherche (dans la mesure de ses moyens) à installer ses fils comme agriculteur (« exploitation « fille ») avec pour chacun une paire de bœufs de trait et l’équipement de base, la charrue.
  • 6. 6 cultivés) d'une part, et à la diminution du rôle de la jachère comme moyen de restaurer la fertilité des sols, d'autre part. La culture continue s’est progressivement généralisée et a pu se maintenir grâce à un investissement plus important dans la fertilisation minérale et le désherbage des cultures 13 . L’usage de la fumure organique (fumier, compost) a aussi progressé mais concerne qu’une petite part de l’assolement (généralement <10%), fumure qui est souvent utilisée pour réhabiliter les terres appauvries. Dans ces conditions de raréfaction des ressources, le maintien de la traction animale et des noyaux d’élevage intégrés 14 aux exploitations repose de plus en plus sur le stockage et l’appropriation individuelle des résidus de culture dont la production suit celle des grains. Le recyclage de ces co-produits est parfois plus poussé lorsque les agriculteurs mobilisent les résidus non fourragers (tiges de cotonnier, grosses tiges de sorgho) pour en faire du compost ou de la litière (afin de produire un fumier de qualité) (Blanchard et al., 2013). Traditionnellement l’ensemble des résidus de culture fourragers étaient abandonnés dans les champs et valorisés par la vaine pâture ouverte à tous. Les évolutions récentes montrent bien la nature des enjeux autour du contrôle et de l’appropriation de la biomasse végétale (cultivée ou non) pour l’alimentation du bétail mais aussi la gestion de la fertilité des sols. L’intérêt des agriculteurs pour l’utilisation de la biomasse (plus ou moins fourragère) afin d’entretenir la fertilité du sol est récent car traditionnellement tous débris végétaux étaient soigneusement brulés avant labour et semis. Maintenant le semis direct se propage et les agriculteurs connaissent l’utilité de laisser sur le sol ces débris voire de les enfouir au labour. Mais l’on n’est encore loin de l’application des 3 principes de l’agriculture de conservation prônés par divers organismes de développement (la FAO en particulier) 15 car la biomasse manque cruellement en fin de saison sèche dans toutes ces régions où les charges en ruminants ont fortement progressé ces 20 dernières années. L’augmentation de la population au niveau national entraine aussi mécaniquement un accroissement des demandes alimentaires. Pour les produits animaux cet accroissement est assez récent et concerne principalement les villes et les produits laitiers et les viandes de volaille et de porc. Ces produits peuvent être importés mais les politiques actuelles visent à protéger les filières nationales et à contingenter les importations (souvent de faible qualité). Ainsi sur les Hautes-Terres à Madagascar l’élevage laitier s’est rapidement intégré aux exploitations familiales de petites tailles, avec un très petit effectif (1 à 5 vaches) procurant un revenu régulier pour la famille mais modifiant notablement les assolements avec l’introduction de cultures fourragères (vesce, avoine, brachiaria, … ) et la valorisation des graines de soja, de maïs et les restes de racines de manioc pour la complémentation de cet élevage (Kasprzyk et al., 2008). La révolution fourragère tant espérée par les agronomes des années 1950-60 est en marche dans cette région des hautes-Terres qualifiée de triangle laitier (Rabemanambola M. F., 2010). Elle a permis entre autres la stabulation permanente des vaches laitières et donc l’accroissement de la production de fumier, bénéficiant aussi de la litière de paille de riz. Un début d’adoption des cultures fourragères par les agro-éleveurs est aussi observé pour des systèmes de PCE où l’élevage est encore peu intensifié (bovins de trait, bovin naisseur et troupeau- capital). Cela s’est rencontré entre autres, dans des zones d’intervention des projets de vulgarisation de l’agriculture de conservation où les plantes de couverture étaient aussi des plantes fourragères ( Brachiaria ruzizensis, Panicum maximum ou kizozi, Stylosanthes sp., vesce…) (Andriarimalala et al., 2013 ; Dugué et al., 2013) . Dans ce cas l’usage fourrager de ces nouvelles cultures a été préféré à celui de restauration de la fertilité et de couverture du sol 16 . L’adoption des cultures fourragères dans ce cas vise à améliorer la ration et l’état des animaux, et à réduire le temps de travail dans des parcours naturels ou des zones de coupe de foin naturel de moins en moins productifs. Il s’agit là moins d’intensifier les systèmes d’élevage orientés vers le marché (comme pour le lait) mais de sécuriser le maintien d’un troupeau multifonctionnel comme c’est le cas à Madagascar (lac Aloatra) mais aussi au Cameroun (Pays Tupuri en particulier) : autosuffisance céréalière via la fumure 13 Par le travail manuel d’abord, puis la mécanisation du sarclage grâce à la traction animale et plus récemment avec les herbicides. 14 Il est aussi possible pour les agro-éleveurs de confier leurs bovins d’élevage à des éleveurs transhumants, une façon d’externaliser ou de délocaliser l’activité d’élevage, dans ce cas ils perdent la production de fumure animale une bonne partie de l’année. Cela implique d’avoir des relations de confiance et ne se justifient que pour de gros effectifs 15 Voir http://www.fao.org/ag/ca/fr/ 16 Dans des cas particulier, absence de limitation de l’alimentation hydrique, sols fertiles (bas de pente ou baiboho à Madagascar) de combiner les deux usages en assurant un prélèvement limité de fourrage à partir sur la plante de couverture (Andriarimalala et al., 2013)
  • 7. 7 animale, revenu complémentaire, capital, énergie de traction disponible dès le début de la campagne agricole. Les éleveurs ont aussi fait évoluer leurs systèmes d’élevage en scindant leur cheptel en un lot de bovins conduit de façon extensive (maintien de la transhumance) et un lot bénéficiant d’une complémentation alimentaire et orienté vers la production laitière pour la famille et maintenant pour le marché urbain (Coulibaly, 2008) et parfois l’embouche. Mais ces éleveurs en Afrique de l’Ouest (Mali, Sénégal) et du Centre (Cameroun) sédentarisés non loin des villes, ont peu modifié leurs systèmes de culture céréaliers pour y insérer des cultures fourragères et ont préféré recourir à l’achat d’aliments du bétail disponibles sur les marchés à base de sous-produits agro-industriels (tourteau et coque de graine de coton, son de céréales, …). Les flux de biomasses fourragères 17 entre des exploitations d’agriculteurs et celles d’éleveurs sont limités car tous les producteurs ruraux s’adonnent peu ou prou à l’élevage et réservent leurs productions fourragères (majoritairement des résidus de culture) à leur propre bétail. Ainsi progressivement les éleveurs de ces régions perdent un peu de leur autonomie alimentaire de leur troupeau et deviennent de plus en plus dépendants du marché des concentrés. 2. La faible intégration agriculture élevage caractérise toujours les savanes africaines et malgaches Malgré un début de généralisation des systèmes de polyculture élevage (PCE) en zones de savane africaines et malgaches, le degré d’intégration de l’agriculture et de l’élevage reste le plus souvent limité. Dans la majorité des cas l’orientation antérieure des unités de production demeure : - l’activité principale des éleveurs (principalement Peul en Afrique subsaharienne) reste l’élevage extensif de ruminants avec un début timide d’intensification de la production laitière aux abords des villes ; - les agriculteurs les plus aisés (grâce aux revenus du coton et du riz) ont bien intégré un noyau d’élevage bovin dans leur exploitation et rentrent ainsi dans la catégorie des agro-éleveurs. Mais leurs troupeaux sont le plus souvent conduits de façon extensive sans lien étroit avec leurs systèmes de culture (Tableau 1). Ils reprennent ainsi les conduites des éleveurs « extensifs » valorisant les parcours naturels et parfois pratiquant eux-mêmes la transhumance ou confiant la gestion de leurs troupeaux à des bergers Peul. La mobilité du bétail qui reste possible dans ces régions et particulièrement sur les vastes plateaux malgaches peu peuplés, explique cela. Il est plus rentable pour un éleveur et un agro-éleveur (quand son troupeau est numériquement important) de rémunérer des bergers, de payer des droits d’accès à des parcours naturels et même de payer des amendes en cas de dégâts causés aux cultures que d’alimenter l’ensemble de son bétail avec des fourrages cultivés et des aliments concentrés achetés ou autoproduits. Le coût d’accès aux ressources naturelles demeure limité. En cas de conflits et de raréfaction aigüe des ressources fourragères (par exemple par la remise en question du droit de vaine pâture par les agriculteurs et certains agro-éleveurs), les éleveurs préfèrent migrer vers des régions peu peuplées plutôt que d’inscrire leur élevage dans un système foncier limité spatialement. Comme quoi ces régions offrent encore des opportunités pour le pastoralisme. Les systèmes des agro-éleveurs qualifiés « d’intensif » (Tableau 1) dérogent à la règle et montrent un processus d’intégration cultures-élevage assez poussé. 17 Seul le Sénégal se caractérise par un flux important de fanes d’arachide produit par des agriculteurs du Sine Saloum et vendues principalement pour les éleveurs de l’agglomération de Dakar
  • 8. 8 Tableau 1 : Evolutions conjointes des systèmes de culture et d’élevage selon le type de producteurs en PCE Type de producteurs Type de PCE Evolutions conjointes des Systèmes d’élevage Systèmes de culture Éleveur Elevage de ruminants dominants associés à la production vivrière pour les besoins familiaux (céréales) .Constitution de deux types de troupeaux .Troupeau de brousse avec pratiques extensives .Début d’intensification du « troupeau de village » avec achats de compléments .Automédication généralisée et recours à l’automédication La fumure est mieux valorisée sur l’exploitation mais beaucoup de pertes du fait de la transhumance Recours aux herbicides (via le savoir-faire des paysans manœuvres) Pas de modification de l’assolement (adoption de cultures fourragères très rare) Agriculteur Cultures de subsistance et de vente dominantes, petits élevages très fréquents, traction animale en progression .Noyau d’élevage réduit  faible impact sur l’exploitation (peu de fumure, peu de besoins fourragers…) .Intensification du petit élevage (ovin, volaille) .Traction parfois limitée à l’âne ou au cheval car moins couteux .Peu de prise en compte des besoins de l’élevage dans le choix de l’assolement et des techniques mais : une exploitation minière de la fertilité avec 100% d’utilisation de la biomasse pour le bétail (dont vaine pâture) un fort intérêt pour la fumure organique mais qui nécessiterait plus de bétail et + de surface fourragère augmentation du stockage des résidus de culture sauf si pratique de couverture du sol Agro-éleveur « Extensif » .Cultures de vente dominantes sur de grandes surfaces, traction animale généralisée et parfois accès à la motorisation, .Troupeau bovin en croissance .L’extensif privilégié  moins couteux en travail ou confiage aux éleveurs Impact négatif sur les ressources pastorales communes .Achat fréquent de compléments pour l’entretien des vaches gestantes Agro-éleveur « intensif » .Cultures de vente dominantes avec début d’introduction de cultures fourragères (en pure ou associées) .Troupeau a effectif limité pour le lait ou l’embouche (bovin, ovin), plus rarement élevages à cycle court .Contrôle des effectifs et valorisation plus poussée des troupeaux Début d’amélioration génétique Surtout pour le lait .Diversification des ateliers d’élevage Fabrication de provende à la ferme Valorisation optimale de la fumure animale enrichie de litière et de refus d’alimentation Modification de l’assolement ou des pratiques de gestion des résidus : insertion de cultures fourragères ou de cultures à doubles fin en culture pure ou en association avec les cultures de base récolte précoce des résidus début de pratique de pâturage contrôlé de parcelles mixtes ou fourragères (en pur) Le modèle (complet) de polyculture élevage promu par les agronomes dès les années 1960 est presque introuvable dans les campagnes africaines et malgaches. Le cas de la PCE comprenant un élevage intensif - élevage laitier plus rarement à viande - et des cultures fourragères dans l’assolement et la rotation, s’y rapproche le plus. Cinq facteurs permettent d’expliquer cette situation : - Les déterminants culturels sont importants à prendre en considération. Les agriculteurs ne peuvent pas tous et toujours s’improviser « éleveur » dans la mesure où cette activité nécessite au-delà des savoirs enseignables, un changement de vie ou de métier avec une relation particulière à l’animal (comportement et savoir-faire pour les contenir, les garder, les soigner, les
  • 9. 9 élever). De plus les modifications de la répartition du temps de travail dans la journée (charge de travail journalière, travail d’astreinte) et dans le temps long (constitution d’un troupeau et amélioration progressive de la génétique) sont difficilement vécues ; - Les marchés permettent ou non de développer au niveau local des combinaisons agriculture élevage dans la mesure où le producteur privilégie ses choix d’activités en fonction des critères de rentabilité économique ou de rémunération de son travail. De ce point de vue, l’existence de filières lait ou viande organisées et dynamiques représente un des déterminants clés d’une meilleure intégration. Or les agronomes pour justifier l’intérêt de la PCE ont trop souvent mis en avant l’objectif de maintien de la fertilité des terres grâce à la gestion optimale des effluents d’élevage et des autres matières organiques ; - L’intégration agriculture élevage a été surtout raisonnée au niveau de l’unité de production et rarement à l’échelle du territoire (Landais et Lhoste, 1990). De plus l’approche spatiale des combinaisons de productions se résume à la gestion des ressources communes et à la résolution des conflits entre producteurs. Elle pourrait intégrer aussi les questions de coordination, d’échange et de complémentarité entre des exploitations gardant leurs spécificités. Il s’agirait alors de concevoir d’autres modèles d’intégration/association entre différents types de systèmes de production et non plus au sein de l’exploitation - Les politiques agricoles africaines en faveur de la PCE depuis deux décennies se sont limitées au mieux à la vulgarisation des techniques sans chercher à mettre en place des mesures incitatives comme des crédits d’investissement (comme par le passé 18 ) considérant que l’intégration agriculture élevage allait de soi car elle était une fois pour toute jugée utile aux exploitations et à la préservation de l’environnement. La faiblesse des soutiens à l’organisation des filières d’élevage et à l’appui-conseil aux producteurs a freiné le processus d’intégration. De plus les démarches d’appui-conseil utilisées habituellement sont centrées sur quelques ateliers ou cultures et rarement sur une base systémique. Plus récemment (2009 à nos jours) les Etats ont relancé les politiques de soutien aux productions végétales afin de faire face aux pénuries alimentaires et à la hausse des produits amylacés de base sur le marché mondial (blé, riz, maïs).Ce soutien a surtout pris la forme de subventions directes pour les engrais minéraux qui n’amènent pas les producteurs vers l’agroécologie (Dugué et al., 2013). - L’explicitation des enjeux de l’intégration cultures-élevage en termes d’économie d’azote (fumier, lisier, légumineuses fourragères), de limitation de pollution, de réduction (éventuelle) d’émissions de GES, de protection de l’environnement et de la biodiversité ainsi que le partage des connaissances entre producteurs et agronomes, ont souvent été mis de côté pour se limiter à des préconisations normatives. Les agriculteurs ont besoin de scénarios pour faire évoluer leur exploitation avec une quantification minimale des besoins en travail et des effets attendus (Le Gal et al., 2013). De ce fait cinquante ans après les premiers programmes visant cette intégration, un écart important existe entre le modèle proposé et les systèmes mixtes observables sur ces terrains. De plus les propositions de modèles de PCE été peu renouvelées, les bases techniques sont là mais la combinaison des ateliers, la gestion des flux (au sein de l’exploitation, entre exploitation) et les bases économiques associées à des mesures incitatives et à l’organisation des filières sont à améliorer ou restent à concevoir. L’analyse de cet écart est riche d’enseignements pour les travaux de conception des systèmes de production innovants et durables basés entre autres sur la polyculture élevage pour ces régions mais aussi pour l’agriculture française. 3. Quelques enseignements pour l’agriculture française Dans cette dernière partie nous tentons de tirer les enseignements génériques des travaux présentés précédemment et de les appliquer aux réalités de l’agriculture française, exercice périlleux dans la mesure où notre connaissance de l’agriculture française est limitée. De ce fait et par soucis de simplification, cette partie se focalisera sur le niveau exploitation agricole sans traiter la question de l’intégration cultures-élevage à l’échelle du territoire. Mais nous sommes bien conscient que cette échelle doit aussi être prise en compte pour traiter de l’action collective et des coordinations entre exploitations complémentaires (gestion de flux, aménagement de l’espace, équipement en commun, 18 Dans le passé une politique de crédit volontariste a permis aux agriculteurs de s’équiper en culture attelée (équipement, plus rarement facilité pour l’acquisition des animaux).
  • 10. 10 organisation de filières) qui sont souhaitables voire indispensables pour une PCE fonctionnelle et durable. Un grand nombre de systèmes de production, en particulier dans les pays du Sud, peuvent être qualifiés de polyculture élevage si on la définit par la présence simultanée sur l’exploitation d’un ou plusieurs ateliers d’élevage et de diverses productions végétales. En termes de conception de systèmes agricoles durables, les recherches sur la PCE ont surtout de l’intérêt que si elles débouchent sur des recommandations permettant de préserver les ressources naturelles et de réduire les externalités négatives et l’empreinte environnementale des exploitations agricoles et plus globalement des agricultures régionales. Il n’est pas souhaitable que la PCE devienne un modèle passe-partout alors que les producteurs ont toute latitude pour choisir leurs activités sauf contraintes majeures (zones de montagne). Ces considérations nous amènent à considérer que les termes d’intégration ou de mise en synergie nous semblent plus adéquats que celui d’association qui peut recouvrir une large gamme de systèmes. 3.1 Analyse comparative des conditions de l’intégration agriculture élevage entre l’Afrique et la France Les conditions d’exercice du métier d’agriculteur sont très différentes entre ces deux contextes. Au- delà des différences socioculturelles et agroclimatiques, il faut considérer que les décideurs politiques et les sociétés (les consommateurs en particulier) n’ont pas les mêmes attentes vis-à-vis de l’agriculture. Dans les pays du Sud les priorités pour l’agriculture restent la fourniture d’aliments en quantités suffisantes et l’amélioration des rendements qui permettraient de baisser le prix des produits de base surtout pour les ménages pauvres. En France, le modèle productiviste vise à baisser les coûts de revient pour que les agriculteurs puissent faire face à la concurrence des agricultures des autres pays mais dans le même temps les consommateurs sont demandeurs de produits sains, de bonne qualité organoleptique sans vouloir toujours en mettre le prix. Mais la principale revendication sociétale en Europe porte sur la réduction des nuisances causées par l’agriculture : pollution des eaux, résidus de pesticides dans les aliments, modification des paysages, bruits et odeurs… L’autre différence majeure entre les deux contextes est le poids et le type de politiques agricole et environnementale : quasi-absence de politiques en Afrique subsaharienne ou non-respect des règles et lois promulgués, agriculture très administrée et surveillée en France (Tableau 2). C’est par rapport à ces deux cadres d’intervention que la recherche, le développement et les agriculteurs peuvent réfléchir à différents modèles de PCE. Toutefois l’analyse comparative montre beaucoup de points communs entre les deux contextes en termes d’arguments en faveur de la PCE (Tableau 2): fertilité du sol, économie d’intrants et autonomie des producteurs, valorisation d’espaces à faible productivité. Les divergences proviennent principalement des différences de sensibilité des différents acteurs pour les questions environnementales et de durabilité de l’agriculture entre le contexte africain (orientée uniquement sur la fertilité des sols cultivables) et français (un faisceau d’objectifs combinant biodiversité, paysage, réduction des pollutions,…).
  • 11. 11 Tableau 2 : Les conditions d’exercice de la PCE en France et dans les savanes africaines et malgaches Critères de comparaison France Zones de savane africaines et malgaches Impacts environnementaux et externalités induites par l’agriculture et PCE comprise Négatifs : Pollution par excès d’effluents d’élevage si mauvais ratio UGB/Ha Baisse de biodiversité si simplification des systèmes (taille des parcelles, baisse de la diversité des activités) Négatifs : Surpâturage, piétinement et tassement des sols : risque d’érosion, mauvais ratio UBT/ressources Rareté de la biomasse et des nutriments Disponibilité en travail dans les exploitations Faible : effets variables sur la PCE selon le type d’activités (type de conduite d’élevage, niveau de mécanisation) Moyenne à forte selon le disponible foncier Intérêt de diversifier le revenu par l’élevage et autres activités en saison sèche si pas d’irrigation possible Rôles et effets des filières sur le fonctionnement de l’exploitation Fort : les filières poussent à la spécialisation ou à la réduction de la diversité des activités Faible : pas de contractualisation, appui limité des filières Rôles et effets des politiques agricoles sur le fonctionnement des exploitations de PCE Fort : Normes agro- environnementales, poids des DPU orientés vers les productions végétales Pas de dispositifs spécifiques à la PCE Faible Pas de mesures incitatives pour l’intégration agriculture élevage Concurrences avec les autres systèmes de production intra pays Fort : quels que soit le secteur pour des productions courantes, de masse Moyenne : pour une production de qualité (mais les systèmes spécialisés peuvent aussi s’orienter vers la qualité, l’agriculture bio, les produits AOC) Faible : pour les productions végétales, pas ou peu d’exploitations spécialisées capitalistiques performantes pour le moment Fort : pour les productions animales, élevage extensif basé uniquement sur les ressources naturelles « gratuites » (faible coût d’accès) Arguments mis en avant par la recherche pour le développement et le maintien de la PCE - Limitation des pollutions azotées et phosphatées si bon ratio UGB/ha - Maintien de la biodiversité et de la fertilité du sol (rôle des prairies, de la fumure organique) - Augmentation de l’autonomie des exploitations vis-à-vis des intrants (soja importé, engrais, produits vétérinaires) - Valorisation d’espaces difficiles à cultiver - Maintien de paysages attractifs : bocage, mosaïque (économie du tourisme, qualité de vie) - Augmentation de l’autonomie des exploitations vis-à-vis des intrants (économie d’engrais, d’aliments concentrés) - Maintien de la fertilité du sol (rôle de la fumure organique et des légumineuses) - Valorisation du travail en période creuse (saison sèche) - Valorisation d’espaces incultes et de ressources arborés (fourrages grossiers) - Economie de combustible par l’emploi systématique de la traction animale (transport court, travaux aratoires) 3.2 Retour sur les objectifs du développement d’une agriculture durable : Il faut ne pas perdre de vue les objectifs que l’on se fixe avant de promouvoir des modèles d’agriculture alternative (en rupture avec les modèles conventionnels qui ont montré leurs limites) :
  • 12. 12 Qui fixe ces objectifs et sur quelles bases sont conçues les politiques et les mesures d’accompagnement ? Comment les agriculteurs sont-ils associés à ces orientations ? Il est difficile de déconnecter le débat sur les modèles de PCE plus performants (au sens économique et environnemental) de celui relatif à la durabilité des systèmes de production spécialisés (100% productions végétales ou 100% productions animales). Les performances économiques des seconds du fait des économies d’échelle réalisées rendent difficile le développement et la viabilité socio- économique de la PCE. Le cœur du débat doit porter sur la durabilité des agricultures sensu largo comprenant d’abord la durabilité endogène, celle des exploitations car on ne peut pas imaginer une agriculture sans agriculteurs (ou avec des producteurs fortement subventionnés), et la durabilité exogène, c’est-à-dire la contribution de l’agriculture au développement durable des territoires (Hubert et Billaud, 2011). Le choix des modèles d’agricultures importe peu en fait ce sont les performances, les niveaux d’efficience et les externalités qu’il convient d’évaluer. Les systèmes spécialisés basés sur un seul type de production (végétale ou animale) sont-ils en mesure d’évoluer dans le sens du développement durable, avec quelles marges de progrès, à quelles conditions ? (quels niveaux d’acceptation sociale de la part des communautés d’agriculteurs et de la société). 3.3 L’intégration agriculture élevage et la PCE en 2050 Le rôle de la recherche est d’aider aux changements souhaitables (et acceptables) à court terme mais aussi d’imaginer le futur et surtout les solutions pour le futur. Par rapport à ce difficile exercice de prospective appliqué à l’agriculture qu’elles seraient les défis pour lesquels la PCE serait mieux positionnée que les autres types de systèmes de production. Défis énergétiques : l’augmentation de l’énergie fossile est inéluctable dans les prochaines décennies sans que l’on sache aujourd’hui si une énergie de remplacement moins couteux sera disponible. Pour l’agriculture cela correspond à une hausse des prix de revient si la consommation de carburant agricole, de fumure minérale et la longueur des transports de matériaux pondéreux sont maintenus comme aujourd’hui. Des recherches sur les bilans énergétiques ont déjà été initiées et verront leurs résultats prendre de leur importance si cette augmentation de l’énergie se confirme. Dans ce cas la PCE présente des avantages comparatifs par rapport aux autres systèmes de production que l’on a présentés précédemment. Cela implique au moins pour les pays du Sud (mais aussi peut être pour ceux du Nord) de maintenir des compétences en recherche et développement, en machinisme dans le secteur de la traction animale et de la culture attelée. Défis climatiques : Il semble illusoire d’imaginer une agriculture sans élevage, des systèmes de production spécialisés en élevage resteront indispensable aux communautés et territoires où les productions végétales sont marginales ou impossibles (montagnes, zones arides et semi-arides). Ces situations risquent de s’étendre et dans les zones actuellement à fortes potentialités agricoles des zones marginales pourraient apparaitre si les prévisions de changements climatiques se confirment. La combinaison cultures dans parties fertiles et élevage dans les zones en voie d’aridification deviendra préférable au 100% productions végétales souvent recherché par les producteurs aujourd’hui. Les agriculteurs devront (re)découvrir la polyculture élevage et la considérer comme une forme d’adaptation à ces changements. Défis socio-économiques et la question du travail : Il est bien difficile de porter un diagnostic sur l’emploi en 2050. Si le sous-emploi demeure, l’agriculture pourrait mobiliser une partie des actifs soit à temps partiel pour subvenir aux besoins de leurs familles (produire pour se nourrir) soit à temps plein si les conditions de rémunération le permettent. Dans ce contexte la diversité de productions offerte par la PCE est un atout. L’innovation dans la mécanisation et la robotisation qui s’amplifiera probablement dans les décennies à venir, peut constituer un atout pour la PCE si elle n’est pas trop coûteuse car elle réduira la charge de travail permanente qui caractérise ces systèmes. Dans le cas contraire elle viendra conforter les systèmes hyperspécialisés qui sont déjà rentrés dans l’ère de la robotique (GPS en grandes cultures, robots de traite et d’alimentation du bétail). Défis alimentaires : Difficile d’imaginer que pour nourrir 9 milliards d’habitants en 2050 on puisse se passer des systèmes hyperspécialisés, hautement productifs (en calories par hectare et encore plus par actif agricole). L’évolution de la consommation de produits animaux va fortement peser sur l’offre alimentaire par le biais des quantités de produits végétaux disponibles et leurs prix. Si l’on considère
  • 13. 13 que pour des raisons de coût d’énergie (donc de transport) ou de réglementations environnementales, les systèmes spécialisés et leurs filières de commercialisation ne puissent plus fonctionner comme aujourd’hui, il sera nécessaire pour assurer une alimentation diversifiée et suffisante, d’imaginer des agricultures régionales plus autonomes et offrant une large gamme de produits que la PCE pourrait produire. Dans les pays du Sud où la malnutrition en milieu rural est toujours d’actualité, la PCE peut être une façon de la réduire, les villageois africains consomment plus de légumes et de fruits qu’ils y 30 ans, demain il pourrait en être de même pour le lait, la viande ou le poisson. Conclusion Au Sud comme au Nord, la PCE et l’intégration agriculture élevage peuvent contribuer au développement durable des territoires dans la mesure où les agriculteurs y voient plus d’intérêts que de contraintes. Pour cela il conviendrait de mieux faire la preuve des avantages et des contraintes de cette forme d’agriculture - la polyculture élevage- ou de combinaisons localisées de systèmes de production relativement spécialisés mais entretenant des flux réguliers entre eux. Si les relations entre agriculture et élevage au sein des exploitations ou des territoires sont largement documentés dans différentes situations agraires elles sont souvent mal quantifiées et du point de vue des acteurs probablement valorisées (importance des pertes de nutriments, de biomasse, de gaz…). Les bases techniques de l’amélioration de ces systèmes existent en partie, des innovations sont certainement à venir, mais la question du travail semble sous-évaluée quel que soit le contexte. La spécialisation en élevage permet de réduire les astreintes, et la charge de travail par actif (création d’emplois spécialisés, mécanisation poussée) de même pour les productions végétales lorsque les structures d’exploitation s’y prêtent. La PCE est souvent synonyme pour les agriculteurs d’une surcharge de travail en France mais d’une meilleure valorisation de la force de travail dans les exploitations des pays du Sud. Pour traiter du futur de la polyculture élevage il est nécessaire de ne pas se limiter aux approches technicistes ou mono disciplinaires (les flux de nutriments, l’émission de GES, les bilans de travail) mais plutôt de favoriser des démarches de conception de systèmes agricoles innovants en associant étroitement les agriculteurs qui seront les principaux acteurs des changements futurs. Références bibliographiques Andriarimalala J., Rakotozandriny J.D.N., Andriamandroso A.L.H., Penot E., Naudin K., Dugué P., Tillard E., Decruyenaere V., Salgado P. 2013. Creating synergies between conservation agriculture and cattle production in crop-livestock farms: A study case in the lake Alaotra region of Madagascar. Experimental agriculture, 49 (3) : 352-365. Autfray P., Sissoko F., Falconnier G., Ba A., Dugué P., 2012. Usages des résidus de récolte et gestion intégrée de la fertilité des sols dans les systèmes de polyculture élevage : étude de cas au Mali-Sud = Crop residue and integrated soil fertility management in mixed crop-livestock systems: A case-study in Southern Mali. Cahiers agricultures, 21 (4) : 225-234. Blanchard M., Vayssières J., Dugué P., Vall E. 2013. Local technical knowledge and efficiency of organic fertilizer production in South Mali: Diversity of practices. Agroecology and Sustainable Food Systems, 37 (6) : 672-699. Bernard H., Billaud J-P. 2011 « Rio + 20 : le développement durable à la croisée du local et du global? », Natures Sciences Sociétés, 2011/4 Vol. 19, p. 329-330. Coulibaly D., 2008. Changements socio-techniques dans les systèmes de production laitière et commercialisation du lait en zone péri-urbaine de Sikasso, Mali. AgroParisTech, Abies, Paris. Thèse de zootechnie. Curasson G., 1948. L’agriculture mixte en régions tropicales. Rev. Elev. Med. Vet. Pays Trop., 2 (3) : 151-163. Dugué P., Le Gal P.Y., Lelandais B., Picard J., Piraux M. 1998. Modalités d'intégration de l'agriculture et de l'élevage et impact sur la gestion de la fertilité du sol en zone soudano-sahélienne. In : Renard G. (ed.), Neef Andreas (ed.), Becker K. (ed.), Von Oppen Matthias (ed.). Gestion de la fertilité des sols dans les systèmes d'exploitation d'Afrique de l'Ouest. Weikersheim : Margraf Publishers, p.369-380. Regional workshop "soil fertility management in West African land use system", 1997-03-04/1997-03- 08, (Niamey, Niger).
  • 14. 14 Dugué P., Koné F.R., Koné G., Akindès F. 2004a. Production agricole et élevage dans le centre du bassin cotonnier de Côte d'Ivoire : développement économique, gestion des ressources naturelles et conflits entre acteurs. Cahiers Agricultures, 13 (6) : 504-509. Dugué P., Vall E., Lecomte P., Klein H.D., Rollin D. 2004b. Evolution des relations entre l'agriculture et l'élevage dans les savanes d'Afrique de l'ouest et du centre : un nouveau cadre d'analyse pour améliorer les modes d'intervention et favoriser les processus d'innovation. OCL. Oléagineux corps gras lipides, 11 (4-5) : 268-276. Dugué P., Balabaré O., Olina J.P., Kossoumna Liba'a N. 2012. ETUDE DE CAS N°8 : Agriculture de conservation, production fourragère et sécurité alimentaire. Le cas de l'introduction de Brachiaria ruziensis dans les systèmes de production de la zone des savanes du Cameroun. [S.l.] : [s.n.], [8] p. http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/enjeux-internationaux/securite-alimentaire-mondiale-et/agriculture-et- changement/article/systemes-de-production-durables-en Dugué P., Kossoumna Liba'a N., Dongmo A.L., Paresys L., Balarabe O. 2013a. Du territoire d'activités au territoire d'acteurs : le cas de l'élevage dans la zone de savane du nord Cameroun. In : Dynamiques rurales dans les pays du Sud : l'enjeu territorial. Toulouse : Edition PUM, p. 77-93. Journées de géographie tropicale. 13, 2011-03-16/2011-03-19, Toulouse, France. Dugué P., Autfray P., Blanchard M., Djamen Nana P., Dongmo A.L., Girard P., Olina Bassala J.-P., Sissoko F., Vall E. 2013b. L'agroécologie pour l'agriculture familiale dans les pays du Sud : impasse ou voie d'avenir ? Le cas des zones de savane cotonnière de l'Afrique de l'Ouest et du Centre. In: Actes du Colloque "René Dumont revisité et les politiques agricoles africaines", 15 et 16 novembre 2012, Nogent-sur-Marne, M. Dufumier, H. Bichat (Eds) ( à paraître.). Faye A, Landais E., 1986. L’embouche bovine paysanne dans le Centre-Nord du bassin arachidier au Sénégal. Les Cahiers de la Recherche-Développement : 113-120 Garin, P. (1998). Dynamiques agraires autour de grands périmètres irrigués : le cas du lac Alaotra à Madagascar, Université de Paris X - Nanterre. Thèse de Géographie: 380p + annexes. Garin P., Penot E. 2011. Charrue et variétés de riz. Maîtrise sociale des savoir-faire techniques au Lac Alaotra, Madagascar. Revue d'anthropologie des connaissances, 5 (3) : 573-598. Guillard J., 1965. Golonpoui : Analyse des conditions de modernisation d'un village du Nord- Cameroun. Éditions de l'École des hautes études en sciences sociales, 504 p Kasprzyk M., Penot E., Dugué P. 2008. Diversité des systèmes d'alimentation des troupeaux bovins laitiers à Betafo, région du Vakinankaratra, Madagascar : Document de travail BV lac.n°10 BVPI/SCRID/FOFIFA/TAFA. . Paris : AFD, 56 p. Kossoumna Liba'a N., Dugué P., Torquebiau E. 2011. Éleveurs et agriculteurs du nord du Cameroun face à la violence et aux insécurités : entre adaptation et impuissance. Cahiers de géographie du Québec, 55 (155) : 175-195. Lamine C., Meynard J-M,. Perrot N., Bellon S., 2009. Analyse des formes de transition vers des agricultures plus écologiques : les cas de l’Agriculture Biologique et de la Protection Intégrée. Innovations Agronomiques (2009) 4, 483-493. Landais E., Lhoste P., (1990). L’association agriculture-élevage en Afrique intertropicale : un mythe techniciste confronté aux réalités de terrain. Cahiers Sciences Humaines, 26 (1-2) : 217-235 Le Gal P-Y, Andrieu N., Cialdella N., Douhard, Dugué P., Monteil C ., C.-H. Moulin C-H, E. Penot E., Ryschawy J., 2013. Accompagner les exploitations de polyculture-élevage dans leurs projets d’évolution. Innovations Agronomiques (publié dans ce même numéro)
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