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Trois questions à…
Boris Diaw, parrain des journées
de l’arbitrage
Avez-vous déjà arbitré un match
officiel ?
Officiel, non. Mais à l’entraînement
oui. J’étais un arbitre plutôt sévère
(rires) ! Parce que je suis assez sûr de
ce que je dis et de ce que je siffle.
Mais je suis dans la communication,
si le joueur me demande, je vais lui
dire pourquoi j’ai sifflé, mais je vais lui
dire « arrête ton char », il y a faute,
reprise, etc.
Avez-vous sympathisé avec des
arbitres dans votre carrière ?
Oui bien sûr, on croise beaucoup
d’arbitres. Après, sur le terrain, on n’a
pas forcément l’occasion de parler
beaucoup mais il y en a avec qui on a
la discussion plus ou moins facile.
Avec le temps, on se connaît par le
prénom. Moi, j’étais plutôt dans la
communication avec eux, ça se pas-
sait bien. J’ai une anecdote avec un
arbitre aux États-Unis. Sur une action,
j’avais l’impression que le joueur
m’avait poussé. Il m’avait répondu : «
Tu n’as qu’à aller à la muscu ». Ça
m’avait fait rire.
Quelles différences voyez-vous
dans l’arbitrage entre la France, la
Boris Diaw.
Fiba et la NBA ?
Déjà, il y a différents niveaux de pro-
fessionnalisme. Tout simplement par-
ce qu’aux États-Unis, c’est leur métier
à part entière. En France, il n’y en a
pas beaucoup dont c’est la seule acti-
vité, donc c’est plus difficile. On prati-
que moins, le fait de faire beaucoup
de matches dans la semaine aux
États-Unis aide aussi. Et puis après,
dans le comportement, les arbitres
sont peut-être différents dans l’appro-
che.
Recueilli par Nicolas MANGEARD.
Boris Diaw : « J’étais un arbitre sévère »
Nicolas Briel est arbitre de foot ama-
teur dans le Morbihan. Comme la plu-
part des arbitres, il était joueur puis a
passé des formations pour devenir
arbitre. « Lors d’une assemblée
générale, j’ai entendu que le foot
recherchait des arbitres. Ce n’est
pas tombé dans l’oreille d’un
sourd... » Thibault Lesieux, 25 ans,
est arbitre de basket en Normandie. «
J’avais 12-13 ans quand les diri-
geants de mon club m’ont proposé
une formation. Devenir arbitre me
permettait de passer encore plus de
temps dans le gymnase… »
Jean Luc Martin, 52 ans, officie en
district de foot depuis huit ans. « J’ai
joué jusqu’à mes 30 ans puis j’ai eu
une blessure. Je suis devenu entraî-
neur, dirigeant. Puis j’ai eu un souci
de santé, et j’ai voulu être arbitre. »
Mathilde Bouche, 24 ans, est une
jeune arbitre de foot du district d’Ille-
et-Vilaine. Elle n’officie que depuis le
début d’année. « Ma formation n’a
duré que trois jours ! » Lucas Robin
est un peu plus jeune encore (20
ans). Il arbitre dans la Sarthe. L’arbi-
trage, dit-il, « m’a aidé à travailler sur
ma personnalité. Avant de me lan-
cer, j’étais un garçon plutôt timide.
Match après match, je pense que je
me suis endurci. » Quel est leur rôle,
selon eux ? «Jenedoispasvenirper-
turber le jeu, mais en même temps,
je dois être capable de faire appli-
quer les règles. Je dois être clair-
voyant dans mes décisions et faire
preuve de discernement et de péda-
gogie », dit Nicolas Briel. La clé, c’est
de savoir ce que l’on siffle : « Les
entraîneurs nous demandent sou-
vent des explications, raconte Thi-
baut Lesieux. Nous avons intérêt à
être bien au courant des règle-
ments, sinon on peut vite se faire
manger. À nous d’être rigoureux… »
Il est question de respect, aussi. «
Même s’ils sont plus jeunes que
moi, je vouvoie les joueurs. Il faut
bien garder cette barrière », confie
Mathilde Bouche. Mais ne pas se
couper de son sport non plus. « Je
travaille dans un club, je continue de
m’y entraîner, j’entraîne également.
C’est important de garder le lien
avec le jeu pour avoir conscience du
ressenti des joueurs », pense Thi-
baut Lesieux. Physiquement, ils se
doivent de demeurer affûtés. « Il faut
s’entraîner deux fois dans la semai-
ne », lâche Nicolas Briel.
« Ce sont des moments
d’échanges »
La préparation n’est pas que physi-
que. Lucas Robin : « On prépare nos
matchs, on regarde les classe-
ments. On est attentifs au nombre
de cartons également. Cela nous
permet d’avoir le contexte du match,
pour savoir comment l’aborder. »
Les rémunérations, elles, varient «
en fonction de la distance du match,
du niveau où vous arbitrez, confie
Nicolas Briel. Mais on ne fait pas ça
pour l’argent. Pour les jeunes, ça
peut être une cerise sur le gâteau… »
ils sont assez respectueux… »
Le plaisir est là, néanmoins. Il se
manifeste sous différentes formes .
Thibault Lesieux, lui, raconte : « Avant
ou après les matches, on échange,
on prend la température de leur
championnat, des problèmes qu’ils
peuvent rencontrer. Ce sont des
moments d’échanges… »
D’émotion, aussi : « Il y a deux ans,
j’ai arbitré un match pour la montée
de N2F à N1F, à Alençon. C’était
dans une salle pleine. Faire partie de
ce moment a été un vrai plaisir. »
« Cela m’a permis
de me canaliser »
Dans une carrière d’arbitre, il arrive
qu’un match vous marque davantage
: « Une finale du district des Côtes-
d’Armor devant 4 000 personnes,
selon Jean-Luc Martin. Ou un match
amical du Genoa, alors qu’ils étaient
en stage à Dinard… »
Il y a le plaisir, enfin, de voir sa per-
sonne évoluer : « Quand tu joues, tu
ne cries plus contre l’arbitre. Cela
m’a permis de me canaliser. Je
m’emporte moins, je suis plus agré-
able aussi avec les joueuses quand
il y a une faute, je ne leur crie pas
dessus », dit Mathilde Bouche.
Guillaume NÉDELEC, Juliette
MICHENAUD, Adrian PRIGENT,
Christophe RICHARD.
Quelques dizaines d’euros par
match, le plus souvent.
Il faut se rendre disponible, aussi,
faire parfois des sacrifices familiaux. «
Je suis sur les terrains tous les
dimanches. Ça a une incidence sur
notre organisation familiale. Il faut
que ma femme accepte, parfois,
c’est un peu trop (rires)… », s’amuse
Nicolas Briel.
En match, la violence existe. Elle
peut-être verbale. Physique. Lucas
Robin témoigne : « J’ai été agressé
sur un terrain en février, sur un
match U18. Le joueur est venu
devant moi, m’a intimidé, m’a insul-
té, puis il m’a donné un coup de
poing à la tempe et m’a donné des
coups de crampons dans les côtes.
» Contrairement à Renaud (lire ci-des-
sous), lui a continué d’exercer. « C’est
ma passion, donc j’ai voulu conti-
nuer. J’ai laissé passer un mois puis
j’ai repris petit à petit… »
La majorité d’entre eux n’a, heureu-
sement, pas subi cela. « Non, jamais,
dit Jean-Luc Martin. Moi, j’ai plus eu
des critiques, comme tous les arbi-
tres. Des gens qui s’énervaient du
style : « Tu es nul ». Le plus dur est de
rester zen et puis, généralement, la
personne se calme toute seule au
bout de deux-trois minutes… »
Mathilde Bouche, elle, estime que« le
ton monte plus vite chez les jeunes.
Les seniors sont plus matures, donc
« Le plus dur quand tu es arbitre, c’est de rester calme, de rester zen »
Dossier. Les Journées de l’arbitrage viennent de se terminer. Ouest-France a souhaité donner la parole
à ces hommes et femmes, essentiels au bon fonctionnement du sport en France.
Qu’est-ce qu’être arbitre amateur en 2020 ?
Omnisports
LES CHIFFRES DE L’ARBITRAGE
en France
0 5000 10000 15000 20000 25000 30000
0 50 100 150 200 250
0 5 10 15 20
Nombre d’arbitres officiels
Nombre d’arbitres Élite
Nombre d’arbitres internationaux
87%
des Français considèrent que le rôle de l'arbitre
dans le sport est de plus en plus difficile.
Football Handball Basket-ball Rugby
24 000 dont 1154
femmes
11 684
15 600
2 915
dont 3 922 femmes
dont
19 femmes
dont 3 950 femmes
dont 170 femmes
98 dont 40 femmes
196
70
36
14 dont 4 femmes
6
13
5
dont 3 922 femmes
Plus d'1 million de matches arbitrés par saison
196 508 matches
360 000 matches
L’évolution de l’arbitrage
Rémy Féménia, ancien arbitre de D1,
ex-président du district des Côtes-
d’Armor.
«Être arbitre, aujourd’hui, à la
Fédération française de football
(FFF), c’est bien plus dur que de mon
temps : ça va beaucoup plus vite,
donc il faut que les arbitres soient des
athlètes, avec une hygiène de vie irré-
prochable. Si tu prends toute la pro-
motion des arbitres de mon époque
et si tu leur demandais de faire les
tests physiques d’aujourd’hui, il n’y en
a pas un qui les ferait...
Et ils ont beaucoup plus de pres-
sion médiatique : aujourd’hui, on voit
tout et on sait tout. À partir de là, un
fait de jeu, qui paraissait anodin à
notre époque, va être monté en épin-
gle et montré partout. Derrière ça,
pour l’arbitre, c’est le début d’une
entreprise de déstabilisation.
Autre point, les joueurs profession-
nels sont beaucoup plus jeunes. On
sait que les catégories les plus diffici-
les à arbitrer en District, et surtout en
Ligue, ce sont les 19-20 ans. À cet
âge-là, ce ne sont pas du tout les
mêmes relations. À partir de là, les
liens qui pouvaient se créer entre
arbitres et joueurs existent moins.
Donc ça laisse plus de place à la con-
testation. Or c’est la contestation qui
tue l’arbitrage.
« C’est bien plus dur d’arbitrer aujourd’hui »
L’arbitrage, c’est un choix de déci-
sion et il y a forcément un peu d’arbi-
traire. Inévitablement. Dans l’arbitra-
ge, il y a la notion de vérité, mais aussi
celle d’erreur. Il faut l’accepter. Or,
dans la vie aujourd’hui, on n’accepte
plus ou difficilement d’être, entre
parenthèses, mené, guidé.
Il faut que l’arbitre ait toujours
l’ascendant. Je me souviens d’une
parole de Jean Tricot (ancien arbitre
international) : « Comme ils feront, je
ferai, toujours un ton au-dessus. » Il
faut que tu saches où tu mets les
pieds et aussi d’où peut venir le dan-
ger.
» Recueilli par
Éric HORRENBERGER.
Rémy Féménia.
Témoignage
Il y a un an, Renaud, 26 ans, arbitre
morbihannais, recevait deux coups
de pied en plein match de D2.
Depuis, le fautif a été condamné à
sept ans de suspension.
Avez-vous continué d’arbitrer ?
Non. J’ai arrêté après mon agression.
Cela m’a découragé. Quand je vais
au stade, que je m’imagine arbitre, j’ai
la boule au ventre. Au tout début,
quand le ton montait sur un terrain,
j’étais terrifié… Maintenant cela va
mieux, mais je n’ai plus envie de res-
sentir tout ça.
Sans revenir sur votre agression,
comment s’est déroulée la période
qui a suivi ?
Je me suis senti comme une « m… »,
au début. Je me demandais sans
cesse si j’avais fait quelque chose de
mal. Je me repassais le match dans
ma tête. Sur les réseaux sociaux, sur
Internet, on en a beaucoup parlé…
J’allais tout voir malheureusement.
Mais au final, avec le temps, j’ai com-
Que diriez-vous aux joueurs qui
s’en prennent aux arbitres ?
De réfléchir avant de parler. Si vous
parlez déjà calmement, l’arbitre vous
expliquera sa décision, ce sera le
début d’un dialogue.
Comment faire face aux critiques ?
Il faut savoir les accepter, ne pas avoir
peur de mal faire. Avec le temps, vous
apprenez à gérer ceux qui dégou-
pillent vite. Vous essayez de ne pas
rentrer dans leur jeu, vous expliquez,
vous parlez… Le carton blanc (expul-
sion 10 minutes) a fait beaucoup de
bien de ce point de vue.
Quel regard porterez-vous sur vos
années d’arbitre ?
Je voulais découvrir une autre facette
du foot, et j’ai aimé ça. J’étais plutôt
râleur, pourtant, comme joueur, mais
ça m’a fait changer. J’ai arbitré pen-
dant trois ans et malgré tout, j’ai con-
nu bien plus de bons moments que
de mauvais. On rigole aussi beau-
coup, parfois…
Recueilli par Gaspard BREMOND.
pris que je n’avais rien à me repro-
cher. J’ai été voir un psy, ma famille
m’a beaucoup aidé, et le confinement
a joué, je crois. Le foot s’est arrêté…
Avez-vous reçu du soutien ?
Des joueurs, oui. J’ai eu beaucoup de
messages sur Facebook. Des arbitres
pros m’ont appelé, aussi, de L1, ils
m’ont parlé de leurs expériences.
Le procès de votre agresseur s’est
tenu récemment. Vous aviez tenu à
être présent…
Oui. J’avais de la colère en moi, je
voulais être là. Il s’est excusé plu-
sieurs fois et j’accepte ses excuses,
mais en même temps, c’est très diffi-
cile de lui pardonner. On a tous fait
des erreurs, bien sûr, mais il m’a
quand même mis un premier coup
au tibia, puis un deuxième un peu
après au thorax. Il aurait pu se rendre
compte de son erreur… Mais bon, le
jugement est passé, c’est derrière
nous maintenant.
Violemment agressé il y a un an, cet arbitre a depuis rangé son sifflet
L’arbitrage au féminin
Mercredi, Stéphanie Frappart est
devenue la première femme à arbitrer
un match de Ligue des champions
masculin, lors de la rencontre Juven-
tus FC - Dynamo Kiev. Avec une telle
figure de proue, Alain Sars, directeur
technique adjoint de l’arbitrage à la
Fédérationfrançaisede football(FFF),
affiche un cap très clair pour les pro-
chaines années. « Nous avons la
chance d’avoir la meilleure arbitre
du monde, selon la Fifa. Mais nous
ne voulons pas qu’elle soit l’arbre
qui cache la forêt. »
La tendance n’est pas là. Les chif-
fres démontrent une vraie progres-
sion au niveau de la féminisation de
l’arbitrage. Entre 2017 et 2020, elles
sont passées de 798 arbitres fémini-
nes à 1 167, soit une hausse de 46 %.
« Nous continuons à vouloir avancer
car, comparativement aux 23 000
arbitres masculins, on est loin du
compte, nuance le dirigeant.
L’objectif est d’augmenter nos
effectifs d’arbitres féminines de
15 % par an environ. »
Cette saison, la FFF s’est montrée à
la hauteur de son ambition, en per-
mettant pour la première fois à huit
arbitres de D1 féminine de bénéficier
d’un plan de professionnalisation.
« On les accompagne financière-
ment, ce qui leur permet de libérer
du temps pour s’améliorer sur le
plan athlétique, technique… Nous
avons aussi un préparateur mental
qui s’occupe d’elles. Elles ont plus
de stages en petit comité dans les-
quels elles peuvent vite progres-
ser », explique Alain Sars.
Meilleure arbitre de D1 en 2019,
Maika Vanderstichel fait partie des
heureuses élues. Employée par une
grande enseigne de commerce en
ligne, l’arbitre de 26 ans, qui officie
également en N3 chez les garçons,
rêve de suivre l’exemple de Stéphanie
Frappart. « Ce plan nous donne de
l’espoir car il va forcément se déve-
lopper dans les prochaines
années », espère-t-elle.
Victor CHINI.
Stéphanie Frappart. | PHOTO : PHILIPPE RENAULT
L’arbitrage féminin se professionnalise
Ouest-France
Vendredi 4 décembre 2020

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  • 1. Trois questions à… Boris Diaw, parrain des journées de l’arbitrage Avez-vous déjà arbitré un match officiel ? Officiel, non. Mais à l’entraînement oui. J’étais un arbitre plutôt sévère (rires) ! Parce que je suis assez sûr de ce que je dis et de ce que je siffle. Mais je suis dans la communication, si le joueur me demande, je vais lui dire pourquoi j’ai sifflé, mais je vais lui dire « arrête ton char », il y a faute, reprise, etc. Avez-vous sympathisé avec des arbitres dans votre carrière ? Oui bien sûr, on croise beaucoup d’arbitres. Après, sur le terrain, on n’a pas forcément l’occasion de parler beaucoup mais il y en a avec qui on a la discussion plus ou moins facile. Avec le temps, on se connaît par le prénom. Moi, j’étais plutôt dans la communication avec eux, ça se pas- sait bien. J’ai une anecdote avec un arbitre aux États-Unis. Sur une action, j’avais l’impression que le joueur m’avait poussé. Il m’avait répondu : « Tu n’as qu’à aller à la muscu ». Ça m’avait fait rire. Quelles différences voyez-vous dans l’arbitrage entre la France, la Boris Diaw. Fiba et la NBA ? Déjà, il y a différents niveaux de pro- fessionnalisme. Tout simplement par- ce qu’aux États-Unis, c’est leur métier à part entière. En France, il n’y en a pas beaucoup dont c’est la seule acti- vité, donc c’est plus difficile. On prati- que moins, le fait de faire beaucoup de matches dans la semaine aux États-Unis aide aussi. Et puis après, dans le comportement, les arbitres sont peut-être différents dans l’appro- che. Recueilli par Nicolas MANGEARD. Boris Diaw : « J’étais un arbitre sévère » Nicolas Briel est arbitre de foot ama- teur dans le Morbihan. Comme la plu- part des arbitres, il était joueur puis a passé des formations pour devenir arbitre. « Lors d’une assemblée générale, j’ai entendu que le foot recherchait des arbitres. Ce n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd... » Thibault Lesieux, 25 ans, est arbitre de basket en Normandie. « J’avais 12-13 ans quand les diri- geants de mon club m’ont proposé une formation. Devenir arbitre me permettait de passer encore plus de temps dans le gymnase… » Jean Luc Martin, 52 ans, officie en district de foot depuis huit ans. « J’ai joué jusqu’à mes 30 ans puis j’ai eu une blessure. Je suis devenu entraî- neur, dirigeant. Puis j’ai eu un souci de santé, et j’ai voulu être arbitre. » Mathilde Bouche, 24 ans, est une jeune arbitre de foot du district d’Ille- et-Vilaine. Elle n’officie que depuis le début d’année. « Ma formation n’a duré que trois jours ! » Lucas Robin est un peu plus jeune encore (20 ans). Il arbitre dans la Sarthe. L’arbi- trage, dit-il, « m’a aidé à travailler sur ma personnalité. Avant de me lan- cer, j’étais un garçon plutôt timide. Match après match, je pense que je me suis endurci. » Quel est leur rôle, selon eux ? «Jenedoispasvenirper- turber le jeu, mais en même temps, je dois être capable de faire appli- quer les règles. Je dois être clair- voyant dans mes décisions et faire preuve de discernement et de péda- gogie », dit Nicolas Briel. La clé, c’est de savoir ce que l’on siffle : « Les entraîneurs nous demandent sou- vent des explications, raconte Thi- baut Lesieux. Nous avons intérêt à être bien au courant des règle- ments, sinon on peut vite se faire manger. À nous d’être rigoureux… » Il est question de respect, aussi. « Même s’ils sont plus jeunes que moi, je vouvoie les joueurs. Il faut bien garder cette barrière », confie Mathilde Bouche. Mais ne pas se couper de son sport non plus. « Je travaille dans un club, je continue de m’y entraîner, j’entraîne également. C’est important de garder le lien avec le jeu pour avoir conscience du ressenti des joueurs », pense Thi- baut Lesieux. Physiquement, ils se doivent de demeurer affûtés. « Il faut s’entraîner deux fois dans la semai- ne », lâche Nicolas Briel. « Ce sont des moments d’échanges » La préparation n’est pas que physi- que. Lucas Robin : « On prépare nos matchs, on regarde les classe- ments. On est attentifs au nombre de cartons également. Cela nous permet d’avoir le contexte du match, pour savoir comment l’aborder. » Les rémunérations, elles, varient « en fonction de la distance du match, du niveau où vous arbitrez, confie Nicolas Briel. Mais on ne fait pas ça pour l’argent. Pour les jeunes, ça peut être une cerise sur le gâteau… » ils sont assez respectueux… » Le plaisir est là, néanmoins. Il se manifeste sous différentes formes . Thibault Lesieux, lui, raconte : « Avant ou après les matches, on échange, on prend la température de leur championnat, des problèmes qu’ils peuvent rencontrer. Ce sont des moments d’échanges… » D’émotion, aussi : « Il y a deux ans, j’ai arbitré un match pour la montée de N2F à N1F, à Alençon. C’était dans une salle pleine. Faire partie de ce moment a été un vrai plaisir. » « Cela m’a permis de me canaliser » Dans une carrière d’arbitre, il arrive qu’un match vous marque davantage : « Une finale du district des Côtes- d’Armor devant 4 000 personnes, selon Jean-Luc Martin. Ou un match amical du Genoa, alors qu’ils étaient en stage à Dinard… » Il y a le plaisir, enfin, de voir sa per- sonne évoluer : « Quand tu joues, tu ne cries plus contre l’arbitre. Cela m’a permis de me canaliser. Je m’emporte moins, je suis plus agré- able aussi avec les joueuses quand il y a une faute, je ne leur crie pas dessus », dit Mathilde Bouche. Guillaume NÉDELEC, Juliette MICHENAUD, Adrian PRIGENT, Christophe RICHARD. Quelques dizaines d’euros par match, le plus souvent. Il faut se rendre disponible, aussi, faire parfois des sacrifices familiaux. « Je suis sur les terrains tous les dimanches. Ça a une incidence sur notre organisation familiale. Il faut que ma femme accepte, parfois, c’est un peu trop (rires)… », s’amuse Nicolas Briel. En match, la violence existe. Elle peut-être verbale. Physique. Lucas Robin témoigne : « J’ai été agressé sur un terrain en février, sur un match U18. Le joueur est venu devant moi, m’a intimidé, m’a insul- té, puis il m’a donné un coup de poing à la tempe et m’a donné des coups de crampons dans les côtes. » Contrairement à Renaud (lire ci-des- sous), lui a continué d’exercer. « C’est ma passion, donc j’ai voulu conti- nuer. J’ai laissé passer un mois puis j’ai repris petit à petit… » La majorité d’entre eux n’a, heureu- sement, pas subi cela. « Non, jamais, dit Jean-Luc Martin. Moi, j’ai plus eu des critiques, comme tous les arbi- tres. Des gens qui s’énervaient du style : « Tu es nul ». Le plus dur est de rester zen et puis, généralement, la personne se calme toute seule au bout de deux-trois minutes… » Mathilde Bouche, elle, estime que« le ton monte plus vite chez les jeunes. Les seniors sont plus matures, donc « Le plus dur quand tu es arbitre, c’est de rester calme, de rester zen » Dossier. Les Journées de l’arbitrage viennent de se terminer. Ouest-France a souhaité donner la parole à ces hommes et femmes, essentiels au bon fonctionnement du sport en France. Qu’est-ce qu’être arbitre amateur en 2020 ? Omnisports LES CHIFFRES DE L’ARBITRAGE en France 0 5000 10000 15000 20000 25000 30000 0 50 100 150 200 250 0 5 10 15 20 Nombre d’arbitres officiels Nombre d’arbitres Élite Nombre d’arbitres internationaux 87% des Français considèrent que le rôle de l'arbitre dans le sport est de plus en plus difficile. Football Handball Basket-ball Rugby 24 000 dont 1154 femmes 11 684 15 600 2 915 dont 3 922 femmes dont 19 femmes dont 3 950 femmes dont 170 femmes 98 dont 40 femmes 196 70 36 14 dont 4 femmes 6 13 5 dont 3 922 femmes Plus d'1 million de matches arbitrés par saison 196 508 matches 360 000 matches L’évolution de l’arbitrage Rémy Féménia, ancien arbitre de D1, ex-président du district des Côtes- d’Armor. «Être arbitre, aujourd’hui, à la Fédération française de football (FFF), c’est bien plus dur que de mon temps : ça va beaucoup plus vite, donc il faut que les arbitres soient des athlètes, avec une hygiène de vie irré- prochable. Si tu prends toute la pro- motion des arbitres de mon époque et si tu leur demandais de faire les tests physiques d’aujourd’hui, il n’y en a pas un qui les ferait... Et ils ont beaucoup plus de pres- sion médiatique : aujourd’hui, on voit tout et on sait tout. À partir de là, un fait de jeu, qui paraissait anodin à notre époque, va être monté en épin- gle et montré partout. Derrière ça, pour l’arbitre, c’est le début d’une entreprise de déstabilisation. Autre point, les joueurs profession- nels sont beaucoup plus jeunes. On sait que les catégories les plus diffici- les à arbitrer en District, et surtout en Ligue, ce sont les 19-20 ans. À cet âge-là, ce ne sont pas du tout les mêmes relations. À partir de là, les liens qui pouvaient se créer entre arbitres et joueurs existent moins. Donc ça laisse plus de place à la con- testation. Or c’est la contestation qui tue l’arbitrage. « C’est bien plus dur d’arbitrer aujourd’hui » L’arbitrage, c’est un choix de déci- sion et il y a forcément un peu d’arbi- traire. Inévitablement. Dans l’arbitra- ge, il y a la notion de vérité, mais aussi celle d’erreur. Il faut l’accepter. Or, dans la vie aujourd’hui, on n’accepte plus ou difficilement d’être, entre parenthèses, mené, guidé. Il faut que l’arbitre ait toujours l’ascendant. Je me souviens d’une parole de Jean Tricot (ancien arbitre international) : « Comme ils feront, je ferai, toujours un ton au-dessus. » Il faut que tu saches où tu mets les pieds et aussi d’où peut venir le dan- ger. » Recueilli par Éric HORRENBERGER. Rémy Féménia. Témoignage Il y a un an, Renaud, 26 ans, arbitre morbihannais, recevait deux coups de pied en plein match de D2. Depuis, le fautif a été condamné à sept ans de suspension. Avez-vous continué d’arbitrer ? Non. J’ai arrêté après mon agression. Cela m’a découragé. Quand je vais au stade, que je m’imagine arbitre, j’ai la boule au ventre. Au tout début, quand le ton montait sur un terrain, j’étais terrifié… Maintenant cela va mieux, mais je n’ai plus envie de res- sentir tout ça. Sans revenir sur votre agression, comment s’est déroulée la période qui a suivi ? Je me suis senti comme une « m… », au début. Je me demandais sans cesse si j’avais fait quelque chose de mal. Je me repassais le match dans ma tête. Sur les réseaux sociaux, sur Internet, on en a beaucoup parlé… J’allais tout voir malheureusement. Mais au final, avec le temps, j’ai com- Que diriez-vous aux joueurs qui s’en prennent aux arbitres ? De réfléchir avant de parler. Si vous parlez déjà calmement, l’arbitre vous expliquera sa décision, ce sera le début d’un dialogue. Comment faire face aux critiques ? Il faut savoir les accepter, ne pas avoir peur de mal faire. Avec le temps, vous apprenez à gérer ceux qui dégou- pillent vite. Vous essayez de ne pas rentrer dans leur jeu, vous expliquez, vous parlez… Le carton blanc (expul- sion 10 minutes) a fait beaucoup de bien de ce point de vue. Quel regard porterez-vous sur vos années d’arbitre ? Je voulais découvrir une autre facette du foot, et j’ai aimé ça. J’étais plutôt râleur, pourtant, comme joueur, mais ça m’a fait changer. J’ai arbitré pen- dant trois ans et malgré tout, j’ai con- nu bien plus de bons moments que de mauvais. On rigole aussi beau- coup, parfois… Recueilli par Gaspard BREMOND. pris que je n’avais rien à me repro- cher. J’ai été voir un psy, ma famille m’a beaucoup aidé, et le confinement a joué, je crois. Le foot s’est arrêté… Avez-vous reçu du soutien ? Des joueurs, oui. J’ai eu beaucoup de messages sur Facebook. Des arbitres pros m’ont appelé, aussi, de L1, ils m’ont parlé de leurs expériences. Le procès de votre agresseur s’est tenu récemment. Vous aviez tenu à être présent… Oui. J’avais de la colère en moi, je voulais être là. Il s’est excusé plu- sieurs fois et j’accepte ses excuses, mais en même temps, c’est très diffi- cile de lui pardonner. On a tous fait des erreurs, bien sûr, mais il m’a quand même mis un premier coup au tibia, puis un deuxième un peu après au thorax. Il aurait pu se rendre compte de son erreur… Mais bon, le jugement est passé, c’est derrière nous maintenant. Violemment agressé il y a un an, cet arbitre a depuis rangé son sifflet L’arbitrage au féminin Mercredi, Stéphanie Frappart est devenue la première femme à arbitrer un match de Ligue des champions masculin, lors de la rencontre Juven- tus FC - Dynamo Kiev. Avec une telle figure de proue, Alain Sars, directeur technique adjoint de l’arbitrage à la Fédérationfrançaisede football(FFF), affiche un cap très clair pour les pro- chaines années. « Nous avons la chance d’avoir la meilleure arbitre du monde, selon la Fifa. Mais nous ne voulons pas qu’elle soit l’arbre qui cache la forêt. » La tendance n’est pas là. Les chif- fres démontrent une vraie progres- sion au niveau de la féminisation de l’arbitrage. Entre 2017 et 2020, elles sont passées de 798 arbitres fémini- nes à 1 167, soit une hausse de 46 %. « Nous continuons à vouloir avancer car, comparativement aux 23 000 arbitres masculins, on est loin du compte, nuance le dirigeant. L’objectif est d’augmenter nos effectifs d’arbitres féminines de 15 % par an environ. » Cette saison, la FFF s’est montrée à la hauteur de son ambition, en per- mettant pour la première fois à huit arbitres de D1 féminine de bénéficier d’un plan de professionnalisation. « On les accompagne financière- ment, ce qui leur permet de libérer du temps pour s’améliorer sur le plan athlétique, technique… Nous avons aussi un préparateur mental qui s’occupe d’elles. Elles ont plus de stages en petit comité dans les- quels elles peuvent vite progres- ser », explique Alain Sars. Meilleure arbitre de D1 en 2019, Maika Vanderstichel fait partie des heureuses élues. Employée par une grande enseigne de commerce en ligne, l’arbitre de 26 ans, qui officie également en N3 chez les garçons, rêve de suivre l’exemple de Stéphanie Frappart. « Ce plan nous donne de l’espoir car il va forcément se déve- lopper dans les prochaines années », espère-t-elle. Victor CHINI. Stéphanie Frappart. | PHOTO : PHILIPPE RENAULT L’arbitrage féminin se professionnalise Ouest-France Vendredi 4 décembre 2020