Revue "What's Up Doc" n°26 - Mai Juin 2016
What’s up Doc a décidé de suivre 4 jeunes médecins sur la route du développement d’applis e-santé avec le programme HealthShapr, qui aide les porteurs de projets pendant la phase de développement. Nous les avions laissés en train de défi nir les grandes lignes de leur projet (WUD#25), et pensions les retrouver en pleine recherche de fonds. Hélas, les projets e-santé passent par de multiples détours, et nos startuppers en sont encore, pour la plupart, aux préliminaires.
HENRI À L’ÉCOLE DE LA PATIENCE
Henri travaille sur un outil de compagnonnage numérique pour les étudiants en médecine. Il souhaite développer une appli qui sonnerait à n’importe quelle heure du jour (ou de la nuit pour les plus motivés, en mode « garde ») pour leur présenter des cas cliniques d’avis à donner. « Comme à l’hôpital, c’est dans ta poche et ça sonne quand ca veut », résume-t-il. Ce jeune gastroentérologue universitaire veut absolument mener ce projet avec sa fac, ce qui complique un peu les choses. « Je suis en train d’essayer de faire fonctionner ensemble deux univers qui ne vont pas à la même vitesse », regrette-t-il. Henri a présenté le projet au conseil pédagogique de la fac. « La majorité des personnes sont enthousiastes, et il y a quelques sceptiques », explique-t-il. Sa principale préoccupation : la responsabilité fi nancière du projet. « La grande question qu’ils se posent, c’est : "s’il y a une levée de fonds, où vont atterrir les sous ?"… » Malgré ses tracas administratifs Henri reste optimiste… et patiente : « L’idée est bonne, on va peut-être prendre notre temps, mais on y arrivera ».
GUILLAUME RESET
Guillaume, généraliste nordiste, est lui aussi passé par quelques chemins de traverse. Sa première idée, une appli utilisable dans le cadre des premiers secours pour venir en aide aux victimes, était déjà développée par une autre start-up. Il bosse donc désormais sur un deuxième projet : la dématérialisation des ordonnances. L’idée est ambitieuse : au lieu de recevoir une ordonnance papier, le patient pourrait la consulter directement sur son smartphone et les médicaments seraient préparés dans la pharmacie de son choix avant même son arrivée. Guillaume est donc reparti à zéro. « J’ai fait une petite étude dans ma région », raconte-t-il. « Je suis allé voir les professionnels de santé et ils sont tous enthousiastes ». Le coût du développement de la première version de l’appli a été chiffré, et il reste à faire le plus dur : le développement et la communication. « Je pense que nous, les médecins, sommes généralement assez mauvais pour cela, nous ne sommes pas formés à la communication grand public », constate Guillaume. « C’est là que le partenariat avec HealthShapr est intéressant. »
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www.reseauprosante.fr
1. ADRIEN RENAUD
What’s up Doc a décidé de suivre 4 jeunes médecins sur la route du développement d’applis e-santé
avec le programme HealthShapr, qui aide les porteurs de projets pendant la phase de développement.
Nous les avions laissés en train de définir les grandes lignes de leur projet (WUD#25), et pensions
les retrouver en pleine recherche de fonds. Hélas, les projets e-santé passent par de multiples détours,
et nos startuppers en sont encore, pour la plupart, aux préliminaires.
HENRI À L’ÉCOLE DE LA PATIENCE
Henri travaille sur un outil de compagnonnage
numérique pour les étudiants en médecine.
Il souhaite développer une appli qui sonnerait
à n’importe quelle heure du jour (ou de la nuit pour
les plus motivés, en mode « garde ») pour leur
présenter des cas cliniques d’avis à donner.
« Comme à l’hôpital, c’est dans ta poche
et ça sonne quand ca veut », résume-t-il.
Ce jeune gastroentérologue universitaire veut
absolument mener ce projet avec sa fac, ce qui
complique un peu les choses. « Je suis en train
d’essayer de faire fonctionner ensemble deux univers
qui ne vont pas à la même vitesse », regrette-t-il.
Henri a présenté le projet au conseil pédagogique
de la fac. « La majorité des personnes sont
enthousiastes, et il y a quelques sceptiques »,
explique-t-il. Sa principale préoccupation :
la responsabilité financière du projet.
« La grande question qu’ils se posent, c’est :
"s’il y a une levée de fonds, où vont atterrir les
sous?"… » Malgré ses tracas administratifs Henri
reste optimiste… et patiente : « L’idée est bonne, on
va peut-être prendre notre temps, mais on y arrivera ».
GUILLAUME RESET
Guillaume, généraliste nordiste, est lui aussi passé
par quelques chemins de traverse. Sa première idée,
une appli utilisable dans le cadre des premiers secours
pour venir en aide aux victimes, était déjà développée
par une autre start-up. Il bosse donc désormais
sur un deuxième projet : la dématérialisation
des ordonnances. L’idée est ambitieuse : au lieu
de recevoir une ordonnance papier, le patient pourrait
la consulter directement sur son smartphone et les
médicaments seraient préparés dans la pharmacie
de son choix avant même son arrivée. Guillaume
est donc reparti à zéro. « J’ai fait une petite étude
dans ma région », raconte-t-il. « Je suis allé voir les
professionnels de santé et ils sont tous enthousiastes ».
MÉDECIN
STARTUPPER
LE TEMPS DES AJUSTEMENTS
What’s Up Doc? 26 mai-juin 201632
PROJETS E-SANTÉe-SANTÉ
2. Le coût du développement de la première
version de l’appli a été chiffré, et il reste
à faire le plus dur : le développement
et la communication. « Je pense
que nous, les médecins, sommes
généralement assez mauvais pour cela,
nous ne sommes pas formés à la
communication grand public », constate
Guillaume. « C’est là que le partenariat
avec HealthShapr est intéressant.»
AMIR ET ROMAIN
PASSENT LA CINQUIÈME
Des questions qui ne tourmentent pas
Amir et Romain, deux internes qui sont
en train de développer MedicEasy
Leur idée? Une appli d’aide à la
préparation de la consultation, notamment
fondée sur des outils d’autoquestionnaire.
Contrairement à Henri et Guillaume, qui
travaillaient toujours avec le programme
HealthShapr, Amir et Romain ont décidé
de voler de leurs propres ailes.
« On a envie de mettre davantage
la main à la pâte, alors que HealthShapr
propose un service clés en main »,
explique Romain. Les deux internes
désirent notamment se servir de
leurs connaissances en informatique
et mobiliser leur réseau personnel
pour le financement.
Résultat : MedicEasy avance à vitesse
grand V, et Romain espère qu’une
première version sera en ligne sur les
stores d’ici l’été. « On a quasiment fini
la maquette » annonce Romain, « et
on a déjà commencé à travailler avec
un développeur auquel on peut faire
des remarques très précises sur la
manière dont doit être conçue l’appli ».
MORALITÉ
ATTENDRE QU’UN PARTENAIRE SE
METTE EN ROUTE, REPRENDRE DEPUIS
LE DÉBUT OU CHANGER SON FUSIL
D’ÉPAULE, LE DÉVELOPPEMENT
DES PROJETS E-SANTÉ EST TOUT
SAUF UN LONG FLEUVE TRANQUILLE!
L’AVIS DE L’EXPERT:
JUAN SEBASTIÁN
SUÁREZ VALENCIA
LE DR JUAN SEBASTIÁN SUÁREZ VALENCIA EST
PRÉSIDENT DE LA COMMISSION R&D DE FRANCE
EHEALTH TECH, UNE ASSOCIATION QUI REGROUPE
LES ENTREPRISES FRANÇAISES DE LA E-SANTÉ.
LE MESSAGE DE CE JEUNE MÉDECIN À SES
HOMOLOGUES STARTUPPERS : ADAPTEZ-VOUS!
WHAT’S UP DOC EST-CE QU’UNE FOIS TERMINÉ,
UN PROJET E-SANTÉ DOIT FORCÉMENT
RESSEMBLER À L’IDÉE QUE L’ON
S’EN FAISAIT EN DÉMARRANT?
DR JUAN SUÁREZ Absolument pas! Entre l’idée et le produit
final, il y a toute une évolution. Le produit que l’on conçoit
à l’origine n’est pas forcément en accord avec les besoins
de l’utilisateur final, et il faut savoir s’adapter avec
différentes itérations.
WUD DU COUP, QUELLES SONT LES MÉTHODES
POUR ADAPTER SON PROJET EN COURS DE ROUTE?
J.S. Il faut mettre le produit dès que possible entre les mains
des utilisateurs, pour obtenir un retour au plus vite. Il est
également important de comprendre un certain nombre
d’éléments comme le contexte d’utilisation ou la psychologie
des personnes auxquelles on s’adresse. On peut imaginer
au départ une appli mobile, et se rendre compte en cours
de route que les utilisateurs ont besoin d’un site web
exclusif, ou même de fiches d’information papier.
WUD LES CONTRAINTES DE FAISABILITÉ
SONT-ELLES ÉGALEMENT À PRENDRE EN COMPTE?
J.S. Dans une moindre mesure. Quand on donne un projet
à un technicien, il répond la plupart du temps que tout
est faisable, mais que tout dépend du budget. Il peut
cependant y avoir certaines limites techniques.
C’est notamment le cas dans les projets liés au Big Data,
car les données sont souvent organisées en silo.
WUD QUELS CONSEILS PEUT-ON DONNER
AUX STARTUPPERS POUR BIEN S’ADAPTER?
J.S. Il faut savoir s’entourer des bonnes personnes dans
des groupes pluridisciplinaires : développeurs, designers…
Mais l’essentiel, c’est d’être à l’écoute des utilisateurs
et d’avoir une méthodologie pour savoir ce qu’ils pensent.
Ce n’est pas parce qu’on est médecin que l’on sait
comment réfléchissent tous nos confrères, y compris
dans la même spécialité.
mai-juin 2016 What’s Up Doc? 26 33
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