9. Avant-propos
Cet ouvrage destiné aux étudiants préparant l’agrégation de Mathématiques
(interne ou externe) n’est pas organisé comme un cours suivant strictement les
programmes. L’ouvrage de Guy Auliac et J. Y. Caby ou celui de Jean-François
Dantzer indiqués en bibliographie répondent tout à fait à cet objectif. Je me suis
efforcé de rédiger les chapitres de ce livre de manière indépendante en me concen-
trant sur les thèmes importants des programmes. Le chapitre 1 peut très bien utili-
ser un résultat classique exposé dans un chapitre suivant. Je pense que cette façon
de procéder peut être utile pour construire des leçons d’oral de l’agrégation. J’ai
également privilégié la recherche d’exemples d’applications et de contre-exemples
illustrant la nécessité de certaines hypothèses dans l’énoncé d’un théorème, c’est
ce travail de synthèse qu’il s’agit de faire dans l’élaboration d’un plan de leçon
d’oral.
Chaque chapitre se termine par une série d’exercices tous corrigés en détails.
On a un total de 166 exercices qui peuvent constituer un bon entraînement pour
les épreuves écrites et fournir du matériel pour la deuxième épreuve orale de l’agré-
gation interne.
Les deux premiers chapitres sont consacrés aux espaces métriques et aux es-
paces normés. On y présente les principaux résultats topologiques en relation avec
l’étude des suites et des fonctions continues. Le cas des espaces vectoriels normés
de dimension fini est particulièrement étudié.
Le cas particulier des espaces préhilbertiens fait l’objet du chapitre 3. Les ré-
sultats de ce chapitre seront utiles pour l’étude des polynômes orthogonaux.
Le chapitre 4 est consacré à l’étude des suites réelles ou complexes et à l’ap-
proximation des nombres réels par des nombres décimaux ou par des fractions
continues régulières limitées à coefficients entiers. On étudie en particulier les dé-
veloppements décimaux des réel, et les nombres rationnels sont caractérisés comme
les réels admettant un développement décimal illimité propre périodique à partir
d’un certain rang. Les fractions continues nous donnent un autre moyen d’appro-
cher les nombres réels par des rationnels et ils permettent également de caractériser
les nombres rationnels comme les réels admettant un développement en fraction
continue régulière limité à coefficients entiers. Dans ce chapitre, on s’intéresse
également aux sous-groupes additifs de R avec pour applications, un important
critère d’irrationalité et l’étude des fonctions continues périodiques. Les théorèmes
de Cesàro y sont étudiés en détails.
Le chapitre 5 complète le précédent par une étude des méthodes d’accélération
de la convergence de Aïtken et de Richardson.
10. viii Avant-propos
Avec le chapitre 6, on s’intéresse aux propriétés des fonctions continues d’une
variable réelle à valeurs réelles. On s’intéresse aux notions propres à la droite
réelle de continuité à gauche et à droite, ce qui permet de distinguer deux types
de discontinuités : les discontinuités de première et de deuxième espèce. Le cas
des fonctions monotones est particulièrement intéressant du fait qu’une fonction
monotone sur un intervalle réel admet des limites à droite et à gauche en tout point,
ce qui entraîne qu’elle ne peut avoir que des discontinuités de première espèce et
que l’ensemble de ses points discontinuités est au plus dénombrable. Toujours dans
le cadre des fonctions d’une variable réelle, le cas des fonctions périodiques est
particulièrement intéressant. L’étude des sous-groupes additifs de R nous permet
de montrer que le groupe des périodes d’une fonction continue périodique non
constante est discret, ce qui permet de définir la plus petite période strictement
positive d’une telle fonction. Quelques conséquences de ce résultat sont proposées
en exercice. L’étude des propriétés globales des fonctions continues a été faite au
premier chapitre. En lien avec la connexité, on montre que les connexes (et les
convexes) de R sont les intervalles et que la continuité conserve la connexité. La
version réelle de ce résultat est le théorème des valeurs intermédiaires. Dans le cadre
des fonctions d’une variable réelle, on montre le résultat suivant : si f : I → R
vérifie la propriété des valeurs intermédiaires, où I est un intervalle réel, alors elle
est continue si, et seulement si, f−1
{y} est un fermé pour tout réel y. Dans le cas
particulier des fonctions monotones, on montre que si f : I → R est monotone et si
f (I) est un intervalle alors f est continue sur l’intervalle I. Ce résultat est utilisé
pour montré le résultat suivant à la base des définitions des fonctions réciproques
usuelles : si f : I → R est continue strictement monotone, elle réalise alors un
homéomorphisme de I sur f (I) , les intervalles I et f (I) étant de même nature.
L’étude de la dérivation des fonctions d’une variable réelle à valeurs réelles ou
complexes arrive naturellement au chapitre 7. Dans un premier temps, on rappelle
les définitions des dérivées d’ordre 1 et d’ordre supérieur. Si une fonction déri-
vable est continue, on peut construire un exemple de fonction continue nulle part
dérivable. J’ai choisi de présenter l’exemple classique de Van der Waerden. Les ré-
sultats usuels concernant les opérations sur les fonctions dérivables sont complétés
par l’énoncé de la formule de Faà di Bruno donnant la dérivée d’ordre n d’une com-
posée de deux fonctions dérivables en renvoyant à [13] pour une démonstration.
La définition de la dérivée logarithmique est suivie d’une application au théorème
de relèvement utilisé pour montrer que l’indice d’un lacet dans le plan complexe
est un entier.
Après avoir étudié le lien entre dérivation et extrema, on s’intéresse au théorème
de Darboux qui nous dit qu’une fonction dérivée vérifie la propriété des valeurs
intermédiaires. Ce théorème est suivi de quelques applications qu’il est bon de
connaître pour des leçons d’oral.
La dérivation est également utilisée pour étudier les positions relatives d’une
courbe par rapport aux sécantes et aux tangentes. L’étude de la position d’une
courbe par rapport aux sécantes nous conduit naturellement à la notion de convexité
qui sera étudiée de manière plus approfondie au chapitre 8.
On s’intéresse également dans ce chapitre au lien entre dérivation et intégration
et aux suites de fonctions dérivables.
11. Avant-propos ix
La condition nécessaire d’extremum, f
(a) = 0 n’est qu’un cas particulier d’un
résultat plus général portant sur les fonctions différentiables définies sur un ouvert
de Rn
et à valeurs réelles.
Le chapitre 8 est consacré à l’étude des fonctions convexes d’une variable réelle.
Après en avoir donné les principales propriétés, on s’intéresse à la régularité de
ces fonctions, à savoir la continuité sur l’intérieur de l’intervalle de définition, la
dérivabilité à droite et à gauche et la monotonie des dérivées. Dans le cas des
fonctions dérivables, la convexité de la fonction f est équivalente à la croissance
de sa dérivée f
. Ce résultat peut se généraliser au cas des fonctions définies sur
un ouvert convexe d’un espace vectoriel normé et à valeurs réelles. L’étude des
fonctions convexes est en particulier intéressant pour l’obtention d’inégalités de
convexité. Ainsi à partir de la convexité de la fonction exp et de la concavité de la
fonction ln, on déduit quelques inégalités classiques dont celle de Hölder. La conca-
vité de la fonction ln peut être utilisée pour comparer les moyennes harmoniques,
arithmétiques et géométriques. Les inégalités de Jensen sont montrées dans le cas
des espaces vectoriels normés.
Le chapitre 9 est consacré au théorèmes de Rolle et des accroissements finis
ainsi qu’aux nombreuses applications de ces théorèmes. Pour l’étude du théorème
de Rolle on se place directement dans le cadre des espaces vectoriels normés dans
la mesure où le raisonnement est identique à celui mené dans le cadre des fonctions
d’une variable réelle. Dans le cadre des fonctions d’une variable réelle ce théorème
est encore valable sur une demi-droite fermée ou sur R. Le théorème de Rolle
sur un intervalle compact de R peut aussi se montrer en utilisant le principe de
dichotomie. Parmi les nombreuses applications du théorème de Rolle, on s’intéresse
au théorème de Darboux, à l’étude des racines des polynômes réels avec comme
cas particulier celui des polynômes orthogonaux, à l’obtention d’une majoration de
l’erreur dans la méthode d’interpolation de Lagrange et à un critère de convexité.
Le théorème des accroissements finis et sa généralisation peuvent se déduire
du théorème de Rolle. Ce théorème n’est pas valable pour les fonctions à valeurs
dans Rp
pour p ≥ 2, mais on dispose toutefois d’une inégalité des accroissements
finis. Parmi les nombreuses applications du théorème des accroissements finis, on
s’intéresse à l’étude du sens de variation des fonctions, au lien entre limite et dé-
rivation, à l’étude de la dérivabilité d’une fonction définie par une intégrale, à la
longueur des arcs géométriques, à l’étude des points fixes attractifs et répulsifs, à
l’obtention d’une majoration de l’erreur dans la méthode de Simpson, aux suites
de fonctions dérivables, au lien entre l’existence de dérivées partielles et la différen-
tiabilité, au théorème de Schwarz sur les dérivées partielles d’ordre 2, au théorème
de Darboux et aux nombre de Liouville qui nous donnent un exemple d’ensemble
infini de nombres transcendants.
Le théorème de Rolle permet également d’aboutir à la formule de Taylor-
Lagrange. Les différentes formules de Taylor sont étudiées au chapitre 10. Dans ce
chapitre on s’intéresse également au cas des fonctions de plusieurs variables avec
pour application l’étude de problèmes d’extrema. Là encore l’accent est mis sur
les applications avec l’introduction des développements limités à une et plusieurs
variables, l’étude de problèmes d’extrema, l’obtention d’inégalités, les développe-
ments en série entière avec en particulier des théorèmes de Bernstein donnant des
conditions suffisantes pour qu’une fonction de classe C∞
soit développable en série
12. x Avant-propos
entière, un théorème de Kolmogorov sur des majorations de dérivées, l’obtention
de majorations d’erreurs dans les méthodes de Lagrange et de Newton ainsi que
dans la méthode des rectangles.
La formule de Taylor-Young nous conduit naturellement à l’étude des dévelop-
pements limités. Cette étude est menée au chapitre 11. Dans ce chapitre on s’inté-
resse tout d’abord aux notions de prépondérance, de domination et d’équivalence
en regroupant dans un premier paragraphe la plupart des résultats importants sur
le sujet. Après avoir présenté les différentes techniques d’obtention des développe-
ments limités, on s’intéresse aux applications avec l’obtention d’équivalents pour
les suites ou les séries, l’obtention de développements asymptotiques, l’étude de la
position d’une courbe par rapport aux tangentes ou aux asymptotes.
Le chapitre 12 qui peut être vu comme une application à l’analyse numérique
des chapitres précédents est consacré à l’étude des suites d’approximations succes-
sives définies par une relation de récurrence xn+1 = f (xn) . Ces suites permettent
d’obtenir des approximations des points fixes de la fonction continue f. Les suites
homographiques représentent un cas intéressant de telles suites, elles sont étu-
diées en détail en s’intéressant à la façon de choisir le terme initial x0 pour que
la suite soit bien définie (cette étude est souvent éludée dans les ouvrages de pre-
mier cycle). Pour f continue sur un intervalle compact, une première condition
nécessaire et suffisante de convergence d’une telle suite est donnée par la condition
lim
n→+∞
(xn+1 − xn) = 0. Le théorème du point fixe, qui nous donne une importante
condition suffisante de convergence, est étudié dans le cadre des espaces métriques
complets. Ce théorème peut être utilisé pour la recherche de solutions approchées
d’une équation numérique f (x) = 0 et nous conduit naturellement aux méthodes
de Lagrange et de Newton. Dans l’étude de ces méthodes on s’intéresse aux ma-
jorations des erreurs d’approximation.
Le chapitre 13 est consacré aux équations fonctionnelles. On étudie les équa-
tions classiques f (x + y) = f (x) + f (y) pour f définie sur R ou C et à valeurs
réelles ou complexes ; f (xy) = f (x) + f (y) sur R+
et f (x + y) = f (x) f (y) sur
R qui nous conduisent aux fonctions logarithmes et exponentielles réelles ou com-
plexes ; f (xy) = f (x) f (y) sur R+,∗
qui nous conduit aux fonctions puissances ;
f (x + y) + f (x − y) = 2f (x) f (y) qui nous conduit aux fonctions cos et ch . Pour
ces études on ne se limite pas seulement au cas des fonctions continues. On s’inté-
resse également à une caractérisation de la fonction Γ d’Euler par sa log-convexité
et l’équation fonctionnelle f (x + 1) = xf (x) . Dans ce chapitre on ne se limite pas
aux fonctions d’une variable réelle ou complexe. On donne une caractérisation des
rotations vectorielles de R3
par l’équation fonctionnelle f (x ∧ y) = f (x) ∧ f (y) ,
où ∧ désigne le produit vectoriel. Les suites définies par une récurrence linéaire
d’ordre n sont également étudiées comme solutions d’équations fonctionnelles.
Le chapitre 14 est consacré à l’étude des équations différentielles linéaires. Dans
un premier temps on étudie les équations différentielles linéaires d’ordre 1, ce qui
permet de motiver l’introduction de l’équation caractéristique lors de l’étude des
équations différentielles linéaires d’ordre 2 à coefficients constants et sans second
membre. Cette étude est généralisée au cas des équations d’ordre n et c’est le
lemme des noyaux qui permet de donner la forme générale des solutions. Le cas
des équations différentielles linéaires d’ordre n à coefficients non constants est
étudié en se ramenant à un système linéaire d’ordre 1 et en utilisant le théorème
13. Avant-propos xi
de Cauchy-Lipschitz linéaire. Ce chapitre se termine par une étude qualitative
des solutions des équations différentielles linéaires d’ordre 2 en s’intéressant aux
racines de ces solutions.
Enfin le chapitre 15 est consacré à une étude des polynômes orthogonaux. On
y présente les principales propriétés (relations de récurrence, racines de ces poly-
nômes, ...). Les polynômes orthogonaux classiques sont présentés comme vecteurs
propres de certains opérateurs différentiels, ce qui nous conduit aux formules de
Rodrigues. Les polynômes de Legendre sont étudiés de façon plus approfondie.
Cette deuxième édition contient pour l’essentiel ce qui était présent dans la pre-
mière avec l’ajout des chapitres sur les espaces métriques, normés, préhilbertiens
et le chapitre sur les polynômes orthogonaux.
Pour conclure, je tiens à remercier les éditions EDP Sciences pour la confiance
qu’ils m’accordent en publiant cette deuxième édition.
15. Chapitre 1
Espaces métriques
Avec ce chapitre, on se contente de donner les définitions et résultats basiques
sur les espaces métriques. Les notions de suites et de continuité dans le cadre des
espaces vectoriels normés et dans le cadre réel seront étudiées plus en détails dans
les chapitres suivants.
1.1 Topologie associée à une distance
Pour ce paragraphe, on se donne un ensemble non vide E.
Définition 1.1. Une distance sur E est une application d : E × E → R
telle que pour tous x, y, z dans E, on ait :
— d (y, x) = d (x, y) ;
— d (x, y) = 0 si, et seulement si, y = x ;
— d (x, z) ≤ d (x, y) + d (y, z) (inégalité triangulaire).
Le couple (E, d) est un espace métrique.
Exemple 1.1 La valeur absolue [resp. le module] sur R [resp. sur C] induit une
distance en posant d (x, y) = |y − x| pour tous x, y dans R [resp. dans C].
On peut remarquer qu’une distance sur E est nécessairement à valeurs positives.
En effet, pour tous x, y dans E, on a :
0 = d (x, x) ≤ d (x, y) + d (y, x) = 2d (x, y)
et nécessairement d (x, y) ≥ 0. Cette condition de positivité est souvent imposée
dans la définition d’une distance, ce qui n’est pas vraiment utile.
Si d est une distance sur E et I une partie non vide de E, la restriction de d à
I × I définit alors une distance sur I (distance induite).
De l’inégalité triangulaire, on déduit que pour tous x, y, z dans E, on a :
|d (x, z) − d (y, z)| ≤ d (x, y)
16. 2 Espaces métriques
(deuxième inégalité triangulaire). Cela résulte de d (x, z) ≤ d (x, y) + d (y, z) et
d (y, z) ≤ d (y, x) + d (x, z) .
Pour la suite de ce paragraphe, (E, d) est un espace métrique.
Pour toute partie non vide A de E et tout élément x de E, on note respec-
tivement δ (A) = sup
(x,y)∈A2
d (x, y) et d (x, A) = inf
a∈A
d (x, a) le diamètre de A et la
distance de x à A. d (x, A) est un élément de R+
(borne inférieure d’une partie
non vide et minorée) et δ (A) est un élément R+ = R+
∪ {+∞} . Dans le cas où
δ (A) est fini, on dit que A est bornée.
On vérifie facilement que pour tous x, y dans E, on a :
|d (x, A) − d (y, A)| ≤ d (x, y)
Pour tout a ∈ E et tout r ∈ R+,∗
, on note B (a, r) = {x ∈ E | d (x, a) r} et
B (a, r) = {x ∈ E | d (x, a) ≤ r} . L’ensemble B (a, r) [resp. B (a, r)] est la boule
ouverte [resp. la boule fermée] de centre a et de rayon r.
Définition 1.2. On appelle voisinage d’un point a de (E, d) toute partie V
de E qui contient une boule ouverte de centre a et de rayon r 0.
Définition 1.3. On dit qu’une partie O de (E, d) est un ouvert si elle est
vide ou si elle est non vide et voisinage de chacun de ses points, ce qui
signifie que pour tout a ∈ O il existe un réel r 0 tel que B (a, r) ⊂ O. On
dit qu’une partie F de (E, d) est un fermé si son complémentaire E F est
un ouvert.
Un ouvert est donc une réunion de boules ouvertes.
Pour toute partie non vide I de E, les ouverts [resp. les fermés] de (I, d) sont
les ensembles de la forme O ∩ I [resp. F ∩ I] où O [resp. F] est un ouvert [resp.
un fermé] de E (ouverts et fermés pour la topologie induite).
Exemples 1.1
1. Une boule ouverte [resp. fermée] de E est un ouvert [resp. un fermé] de (E, d) .
En effet, pour tout x ∈ B (a, r) , on a r
= r −d (a, x) 0 et B (x, r
) ⊂ B (a, r)
(pour y ∈ B (x, r
) on a d (y, a) ≤ d (y, x) + d (x, a) r
+ d (x, a) = r). De
même pour x ∈ E B (a, r) , on a r
= d (a, x)−r 0 et B (x, r
) ⊂ E B (a, r)
(pour y ∈ B (x, r
) on a d (y, a) ≥ d (x, a) − d (x, y) d (a, x) − r
= r).
2. Pour toute partie non vide A de E et tout réel r ∈ R+,∗
, l’ensemble Vr (A) =
{x ∈ E | d (x, A) r} est un ouvert qui contient A. En effet, il est clair que
Vr (A) contient A (on a d (x, A) = 0 pour x ∈ A) et pour tout x ∈ Vr (A) ,
on a r
= r − d (A, x) 0 et B (x, r
) ⊂ Vr (A) (pour y ∈ B (x, r
) on a
d (y, A) ≤ d (y, x) + d (x, A) r
+ d (x, A) = r).
Définition 1.4. Un sous-ensemble non vide C de (E, d) est connexe si la
condition C ⊂ O1 ∪ O2 avec O1, O2 ouverts de E tels que C ∩ O1 ∩ O2 = ∅
17. Topologie associée à une distance 3
entraîne C ∩ O1 = ∅ (et donc C ⊂ O2) ou C ∩ O2 = ∅ (et donc C ⊂ O1),
c’est-à-dire que C ne peut s’écrire comme réunion disjointe de deux ouverts
de C.
Le résultat qui suit nous sera utile pour montrer que les connexes (et convexes)
de R sont les intervalles (corollaire 2.1).
Lemme 1.1 L’intervalle [0, 1] est connexe dans (R, |·|) .
Preuve. Supposons qu’il existe deux ouverts O1, O2 dans R tels que [0, 1] ⊂
O1 ∪ O2 et [0, 1] ∩ O1 ∩ O2 = ∅. On peut supposer que 0 ∈ O1. Il existe alors un
réel ε ∈ ]0, 1[ tel que [−ε, ε] ⊂ O1 et l’ensemble I = {x ∈ ]0, 1] | [0, x] ⊂ O1} est
non vide majoré par 1. On peut donc poser α = sup (I) et on a 0 α ≤ 1. Par
définition de la borne supérieure, pour tout x ∈ ]0, α[ on peut trouver y ∈ ]x, α]∩I
et on a x ∈ [0, y] ⊂ O1. On a donc ainsi montré que ]0, α[ ⊂ O1. Si α ∈ O2, il
existe alors ε ∈ ]0, α[ tel que [α − ε, α + ε] ⊂ O2 et [α − ε, α[ ⊂ [0, 1] ∩ O1 ∩ O2
ce qui est impossible. On a donc α ∈ O1 et [0, α] ⊂ O1. Si α 1, il existe alors
ε ∈ ]0, 1 − α[ tel que [0, α + ε] ⊂ O1 et α+ε ∈ I en contradiction avec α = sup (I) .
On a donc α = 1 et [0, 1] ⊂ O1, ce qui entraîne [0, 1] ∩ O2 = ∅. En conclusion,
[0, 1] est connexe.
Théorème 1.1.
L’ensemble vide, l’ensemble E, une réunion d’ouverts et une intersection
finie d’ouverts sont des ouverts de (E, d) . L’ensemble vide, l’ensemble E,
une réunion finie de fermés et une intersection de fermés sont des fermés
de (E, d) .
Preuve. Il est clair que ∅ et E sont des ouverts.
Si (Oi)i∈I est une famille quelconque d’ouverts non vides (les Oi vides peuvent
être supprimés de la réunion) et x un élément de O =
i∈I
Oi, il existe alors un réel
ri0
0 tel que B (x, ri0
) ⊂ Oi0
⊂ O, donc O est ouvert.
Si (Ok)1≤k≤n est une famille finie d’ouverts non vides (le cas où l’un des Ok
est vide est trivial) et x un élément de O =
n
k=1
Ok, il existe alors des réel rk 0,
tels que B (x, rk) ⊂ Ok pour tout k compris entre 1 et n. Le réel r = min
1≤k≤n
rk est
alors strictement positif et B (x, r) ⊂
n
k=1
B (x, rk) ⊂ O, donc O est ouvert.
Le résultat sur les fermés s’en déduit par passage au complémentaire.
Une intersection infinie d’ouverts n’est pas nécessairement un ouvert comme le
montre l’exemple de
n∈N∗
−
1
n
,
1
n
= {0} dans (R, |·|) .
Une réunion infinie de fermés n’est pas nécessairement un fermé comme le
montre l’exemple de
n∈N∗
1
n
, +∞
= ]0, +∞[ dans (R, |·|) .
18. 4 Espaces métriques
De manière plus générale, un fermé de (E, d) est l’intersection d’une suite dé-
croissante d’ouverts et un ouvert est la réunion d’une suite croissante de fermés
(exercice 1.4).
Définition 1.5. L’intérieur d’une partie A de (E, d) , noté
◦
A, est le plus
grand ouvert de E contenu dans A. L’adhérence d’une partie A de (E, d) ,
notée A, est le plus petit fermé de E contenant A.
On vérifie facilement que l’intérieur de A est aussi la réunion de tous les ouverts
de E contenus dans A et que l’adhérence de A est l’intersection de tous les fermés
de E qui contiennent A.
Théorème 1.2.
Pour tout sous-ensemble A de (E, d) , on a
◦
A ⊂ A [resp. A ⊂ A], l’égalité
étant réalisée si, et seulement si, A est ouvert [resp. fermé].
Preuve. Par définition, on a
◦
A =
i∈I
Oi ⊂ A où (Oi)i∈I est la famille de tous
les ouverts de E contenus dans A. L’égalité A =
◦
A nous dit que A est ouvert
comme réunion d’ouverts. Réciproquement si A est ouvert, c’est alors l’un des Oi
et nécessairement, A ⊂
◦
A, ce qui donne l’égalité A =
◦
A.
De même, on a A ⊂ A =
i∈I
Fi où (Fi)i∈I est la famille de tous les fermés de E
qui contiennent A. L’égalité A = A nous dit que A est fermé comme intersection de
fermés. Réciproquement si A est fermé, c’est alors l’un des Fi et nécessairement,
A =
i∈I
Fi ⊂ A, ce qui donne l’égalité A = A.
Théorème 1.3.
L’adhérence d’une partie A de (E, d) est l’ensemble des éléments x de E
tels que d (x, A) = 0, ce qui revient à dire que x ∈ A si, et seulement si, pour
tout réel ε 0, il existe y ∈ A tel que d (x, y) ε (soit A ∩ B (x, ε)
19. = ∅).
Preuve. Il revient au même de montrer que d (x, A) 0 si, et seulement si,
x ∈ E A.
Si δ = d (x, A) 0, on a alors d (x, y) ≥ δ pour tout y ∈ A et E B (x, δ) est un
fermé qui contient A, donc A ⊂ E B (x, δ) et en conséquence, B (x, δ) ⊂ E A,
donc x ∈ E A. Réciproquement, si x ∈ E A, comme cet ensemble est ouvert, il
existe un réel ε 0 tel que B (x, ε) ⊂ E A, donc A ⊂ A ⊂ E B (x, ε) et on a
d (x, y) ≥ ε pour tout y ∈ A, ce qui implique que d (x, A) ≥ ε 0.
Du théorème précédent, on déduit que A ⊂ E est fermé si, et seulement si,
d (x, A) = 0 pour tout x ∈ A.
20. Suites à valeurs dans un espace métrique 5
Définition 1.6. On dit qu’une partie A de E est dense dans (E, d) si
A = E, ce qui signifie que pour tout x ∈ E et tout ε 0, il existe y ∈ A tel
que d (x, y) ε (soit A ∩ B (x, ε)
21. = ∅).
Définition 1.7. On dit que l’espace métrique (E, d)est séparable s’il existe
dans E une partie dense dénombrable.
Exemples 1.2
1. De la densité de Q dans R (corollaire 4.2 ou exercice 4.1), on déduit que (R, |·|)
est séparable.
2. Un espace métrique compact est séparable (exercice 1.6).
1.2 Suites à valeurs dans un espace métrique
Pour ce paragraphe, (E, d) est un espace métrique et les résultats de base sur
les suites réelles sont supposés connus. Ces suites sont étudiées au chapitre 4.
Définition 1.8. On dit qu’une suite (xn)n∈N d’éléments de (E, d) est
convergente s’il existe un élément de E tel que lim
n→+∞
d (xn, ) = 0. Une
suite non convergente est dite divergente.
La convergence de (xn)n∈N vers se traduit par :
∀ε 0, ∃n0 ∈ N | ∀n ≥ n0, d (xn, ) ε (1.1)
Dans l’assertion (1.1) , les deux dernières inégalités peuvent être strictes ou
larges et il est parfois commode de se limiter à ε ∈ ]0, 1[ sans que cela ne soit
restrictif.
Cette notion de convergence dépend de la distance choisie sur E (exercice 1.2
et le paragraphe 2.1).
En utilisant l’inégalité triangulaire, on vérifie facilement que si une suite (xn)n∈N
d’éléments de (E, d) est convergente, sa limite est alors unique, ce qui nous permet
de noter = lim
n→+∞
xn ou xn →
n→+∞
.
Une suite convergente est bornée. En effet, si lim
n→+∞
xn = , il existe alors un
entier n0 tel que d (xn, xm) ≤ d (xn, ) + d (xm, ) 2 pour tout n n0 et tout
m n0, donc sup
(n,m)∈N2
d (xn, xm) ≤ max
max
0≤n,m≤n0
d (xn, xm) , 2
, ce qui signifie
que (xn)n∈N est bornée.
22. 6 Espaces métriques
Définition 1.9. On dit qu’une suite (xn)n∈N d’éléments de (E, d) est de
Cauchy si :
∀ε 0, ∃n0 ∈ N | ∀n ≥ n0, ∀m ≥ n0, d (xn, xm) ε
Les entiers m et n jouant des rôles symétriques, on peut se limiter à m n ≥ n0
dans la définition précédente.
Le résultat suivant est souvent utilisé pour montrer qu’une suite est de Cauchy.
Théorème 1.4.
Si (xn)n∈N est une suite d’éléments de (E, d) pour laquelle il existe une
suite (εn)n≥n0
de réels positifs et un entier n0 vérifiant :
∀m n ≥ n0, d (xm, xn) ≤ εn
lim
n→+∞
(εn) = 0
elle est alors de Cauchy.
Preuve. De lim
n→+∞
(εn) = 0, on déduit que pour tout réel ε 0 on peut trouver
un entier n1 ≥ n0 tel que εn ε pour tout n ≥ n1, ce qui entraîne d (xm, xn) ε
pour m n ≥ n1.
Théorème 1.5.
Toute suite de Cauchy dans (E, d) est bornée et toute suite convergente
est de Cauchy.
Preuve. La première affirmation est une conséquence directe de la définition et
la deuxième se déduit de l’inégalité triangulaire.
Dans le cas où toute suite de Cauchy dans (E, d) est convergente, on dit que
l’espace métrique (E, d) est complet.
Les notions d’intérieur et d’adhérence peuvent se définir de façon séquentielle.
Théorème 1.6.
Soit A une partie non vide de (E, d) . L’intérieur de A est l’ensemble
des points x de E tels que pour toute suite (xn)n∈N d’éléments de E qui
converge vers x, il existe un entier n0 tel que xn ∈ A pour tout n ≥ n0.
L’adhérence de A est l’ensemble des points x de E qui sont limites d’une
suite de points de A.
Preuve. Si x ∈
◦
A, il existe alors un réel ε 0 tel que B (x, ε) ⊂ A et pour toute
suite (xn)n∈N d’éléments de E qui converge vers x, il existe un entier n0 tel que
d (xn, x) ε pour tout n ≥ n0, ce qui implique que xn ∈ A. Si x /
∈
◦
A, alors pour
tout entier n ≥ 1, la boule B
x,
1
n
n’est pas contenue dans A (comme B
x,
1
n
23. Suites à valeurs dans un espace métrique 7
est ouverte, si elle est contenue dans A, elle est aussi contenue dans
◦
A et x ∈
◦
A),
donc il existe xn ∈ B
x,
1
n
A, ce qui nous donne une suite qui converge vers x
avec tous ses termes en dehors de A. D’où la définition séquentielle de l’intérieur.
L’adhérence de A est A = {x ∈ E | d (x, A) = 0} (théorème 1.3), donc pour tout
x ∈ A et tout entier n ≥ 1, il existe xn ∈ A tel que d (xn, x)
1
n
, ce qui nous donne
une suite de points de A qui converge vers x. Réciproquement si x est la limite
d’une suite (xn)n∈N d’éléments de A, des encadrements 0 ≤ d (x, A) ≤ d (xn, x) ,
on déduit que d (x, A) = 0, soit que x ∈ A.
De ce théorème, on peut déduire des définitions séquentielles des notions d’ou-
verts et de fermés. Un ensemble O est ouvert dans (E, d) si, et seulement si, pour
toute suite (xn)n∈N d’éléments de E qui converge vers x ∈ O, il existe un entier
n0 tel que xn ∈ O pour tout n ≥ n0 (cela résulte de O =
◦
O). Un ensemble F est
fermé dans (E, d) si, et seulement si, toute suite convergente d’éléments de F a sa
la limite dans F (cela résulte de F = F).
On en déduit aussi qu’une partie A de E est dense dans (E, d) si, et seulement
si, tout x ∈ E est la limite d’une suite de points de A.
Définition 1.10. Soit (xn)n∈N une suite d’éléments de (E, d) . On dit qu’un
élément a de E est valeur d’adhérence de (xn)n∈N s’il est limite d’une suite
extraite, ce qui signifie qu’il existe une application ϕ : N → N strictement
croissante telle que a = lim
n→+∞
xϕ(n).
On vérifie facilement par récurrence sur n ≥ 0 que si ϕ : N → N est une fonction
strictement croissante, on a alors ϕ (n) ≥ n pour tout n ∈ N.
Théorème 1.7.
Un élément a de (E, d) est valeur d’adhérence d’une suite (xn)n∈N si :
∀ε 0, ∀n ∈ N, ∃m ≥ n | d (xm, a) ε (1.2)
Preuve. Si a = lim
n→+∞
xϕ(n) est une valeur d’adhérence de (xn)n∈N , pour tout
réel ε 0, il existe alors un entier n0 tel que d
xϕ(n), a
ε pour tout n ≥ n0.
Pour n ∈ N et p = max (n0, n) , on a m = ϕ (p) ≥ p, donc m ≥ n, p ≥ n0 et
d (xm, a) = d
xϕ(p), a
ε. Réciproquement si a ∈ E vérifie (1.2) , on construit
alors par récurrence une suite extraite
xϕ(n)
n∈N
telle que d
xϕ(n), a
1
n + 1
pour tout n ∈ N. Pour initialisation, on part de m = ϕ (0) ≥ 0 tel que d (xm, a) 1.
Supposant obtenus, pour n ≥ 0, une suite d’entiers ϕ (0) · · · ϕ (n) tels que
d
xϕ(k), a
1
k + 1
pour tout k compris entre 0 et n, il existe un entier m =
ϕ (n + 1) ≥ ϕ (n) + 1 tel que d (xm, a)
1
n + 2
. On a alors lim
n→+∞
d
xϕ(n), a
= 0,
ce qui signifie que a est une valeur d’adhérence de (xn)n∈N .
24. 8 Espaces métriques
Une suite peut être sans valeur d’adhérence comme le montre l’exemple de la
suite réelle (n)n∈N . De manière plus générale, si (xn)n∈N est une suite d’éléments
de (E, d) pour laquelle il existe un réel r 0 tel d (xi, xj) ≥ r pour tous i
25. = j
dans N, il est alors impossible d’en extraire une suite convergente.
Théorème 1.8.
Une suite convergente a pour unique valeur d’adhérence sa limite.
Preuve. Soit (xn)n∈N suite d’éléments de (E, d) convergente vers . Pour tout réel
ε 0, il existe n0 ∈ N tel que d (xn, ) pour tout n ≥ n0 et pour toute application
ϕ : N → N strictement croissante, on a ϕ (n) ≥ n ≥ n0 pour tout n ≥ n0, ce qui
entraîne que d
xϕ(n),
ε. La suite
xϕ(n)
n∈N
est donc convergente vers .
La réciproque du théorème précédent est fausse comme le montre l’exemple de
la suite réelle (xn)n∈N définie par x2n = n et x2n+1 = 0 (elle est divergente avec 0
pour unique valeur d’adhérence), mais elle vraie pour une suite à valeurs dans un
compact (théorème 1.11).
Étant donnée une suite (xn)n∈N d’éléments de (E, d) , on note V l’ensemble de
ses valeurs d’adhérence et pour tout n ∈ N, Rn = {xk | k ≥ n} l’ensemble des
valeurs de la suite (xk)k≥n .
Théorème 1.9.
Soit (xn)n∈N une suite d’éléments de (E, d) . On a Rn = Rn ∪ V pour
tout n ∈ N et V =
n∈N
Rn.
Preuve. Pour toute valeur d’adhérence a = lim
k→+∞
xϕ(k) de (xn)n∈N et tout k ∈ N,
on a ϕ (k) ≥ k, donc pour tout n ∈ N, la suite
xϕ(k)
k≥n
est à valeurs dans Rn
et en conséquence sa limite a est dans Rn. On a donc V ⊂ Rn pour tout n ∈ N et
comme Rn ⊂ Rn, on a Rn ∪ V ⊂ Rn. Tout a ∈ Rn est limite d’une suite de points
(yk)k∈N de Rn. Si a est dans Rn, il est alors dans Rn ∪ V, sinon pour tout ε 0, il
existe un entier k0 tel que 0 d (yk, a) ε pour tout k ≥ k0. En écrivant chaque
yk sous la forme yk = xψ(k), on peut trouver pour tout n ∈ N un entier k ≥ k0
tel que m = ψ (k) n (s’il existe n ∈ N tel que ψ (k) ≤ n pour tout k ≥ k0, la
suite (yk)k≥k0
ne prend qu’un nombre fini de valeurs et sa limite est l’une de
ces valeurs, donc dans Rn contrairement à notre hypothèse) ce qui nous donne
d (xm, a) = d (yk, a) ε. Du théorème (1.7) , on déduit alors que a est valeur
d’adhérence de (xn)n∈N , soit a ∈ V ⊂ Rn ∪ V. D’où l’égalité Rn = Rn ∪ V pour
tout n ∈ N.
On en déduit que l’ensemble V est contenu dans tous les Rn, donc dans
n∈N
Rn.
Du théorème (1.7) , on déduit que pour tout a ∈ E V il existe un réel ε 0 et un
entier n ∈ N tels que d (xm, a) ≥ ε pour tout m ≥ n, ce qui implique que a n’est
pas dans Rn et en conséquence, a /
∈
n∈N
Rn. D’où l’égalité V =
n∈N
Rn.
Du théorème précédent, on déduit que l’ensemble des valeurs d’adhérence de la
suite (xn)n∈N est fermé dans E comme intersection de fermés.
26. Suites à valeurs dans un espace métrique 9
Définition 1.11. On dit qu’une partie K de (E, d) est compacte si de toute
suite de points de A, on peut extraire une sous-suite qui converge dans K
(propriété de Bolzano-Weierstrass ).
Lemme 1.2 Soit K un compact de (E, d) . Pour tout réel r 0, il existe une suite
finie (ak)1≤k≤n d’éléments de K telle que K ⊂
n
k=1
B (ak, r) .
Preuve. Supposons qu’il existe r 0 tel que K ne puisse être recouvert par un
nombre fini de boules ouvertes de rayon r et centrée en a ∈ K. Partant de x0 ∈ K,
il existe x1 ∈ K B (x0, r) (puisque K n’est pas contenu dans B (x0, r)), donc
d (x0, x1) ≥ r. Supposant obtenus x0, · · · , xn dans K tels que d (xi, xj) ≥ r pour
tous i
27. = j compris entre 1 et n, comme K n’est pas contenu dans
n
k=1
B (xk, r) ,
il existe xn+1 ∈ K tel que d (xn+1, xk) ≥ r pour tout k compris entre 1 et r. On
construit donc ainsi une suite (xn)n∈N d’éléments de K telle que d (xi, xj) ≥ r
pour tous i
28. = j dans N et d’une telle suite il est impossible d’extraire une suite
convergente, ce qui n’est pas possible pour K compact.
Théorème 1.10.
Un compact dans un espace métrique est fermé et borné.
Preuve. Soit K un compact de (E, d) . Pour toute suite (xn)n∈N d’éléments de K
qui converge vers ∈ E, on peut extraire une suite qui converge vers un élément
de K, donc ∈ K. L’ensemble K est donc fermé. Le lemme précédent nous dit
qu’il existe une suite finie (ak)1≤k≤n d’éléments de K telle que K ⊂
n
k=1
B (ak, 1) ,
donc pour tous x, y dans K il existe j, k compris entre 1 et n tels que (x, y) ∈
B (aj, 1) ∩ B (ak, 1) et en conséquence :
d (x, y) ≤ d (x, aj) + d (aj, ak) + d (ak, y) 2 + d (aj, ak)
ce qui nous donne δ (K) ≤ 2 + max
1≤j,k≤n
d (aj, ak) et signifie que K est borné.
La réciproque du théorème précédent est fausse en général, mais elle est vraie
dans le cas des espaces vectoriels normés de dimension finie (théorème 2.9).
Théorème 1.11.
Soient K un compact de (E, d) et (xn)n∈N une suite d’éléments de K.
1. Si (xn)n∈N a un nombre fini a1, · · · , ar de valeurs d’adhérences, alors
pour tout réel ε 0, il existe un entier n0 tel que xn ∈
r
k=0
B (ak, ε) pour
tout n ≥ n0.
2. La suite (xn)n∈N est convergente si, et seulement si, elle a un unique
valeur d’adhérence.
29. 10 Espaces métriques
Preuve. Comme K est compact, (xn)n∈N a au moins une valeur d’adhérence.
1. En notant V l’ensemble des valeurs d’adhérence de (xn)n∈N , on suppose que
V = {a1, · · · , ar} . S’il existe ε 0 tel que pour tout entier n ∈ N, il existe
un entier pn ≥ n tel que xpn
/
∈
r
k=0
B (ak, ε) , soit d (xpn
, ak) ≥ ε pour tout k
compris entre 1 et r, on peut alors construire par récurrence une suite (ϕ (n))n∈N
strictement croissante d’entiers telle que d
xϕ(n), ak
≥ ε pour tout k compris
entre 1 et r et de cette suite dans le compact K, on peut extraire une sous suite
xψ(n)
n∈N
qui converge vers a ∈ K tel que d (a, ak) ≥ ε 0, donc a est une
valeur d’adhérence de (xn)n∈N qui n’est pas dans V, c’est impossible. D’où le
résultat annoncé.
2. On sait déjà que si (xn)n∈N converge, elle a alors une unique valeur d’adhérence
(que cette suite soit à valeurs dans un compact ou pas). Réciproquement, si
V = {} , on déduit alors du premier point que pour tout ε 0, il existe
n0 ∈ N tel que xn ∈ B (, ε) pour tout n ≥ n0, ce qui revient à dire que (xn)n∈N
converge vers .
Lemme 1.3 (Lebesgue) Soient K un compact de (E, d) et (Oi)i∈I une famille
d’ouverts de E telle que K ⊂
i∈I
Oi (on dit qu’on a un recouvrement ouvert de K).
Il existe un réel r 0 tel que toute boule ouverte de centre x ∈ K et de rayon r
soit contenue dans l’un des Oi.
Preuve. Supposons que pour tout réel r 0, il existe une boule ouverte de
centre x ∈ K et de rayon r qui ne soit contenue dans aucun des Oi. On peut
alors trouver, pour tout entier n ∈ N∗
, une boule B
xn,
1
n
centrée en xn ∈ K
qui ne soit contenue dans aucun des Oi. De la suite (xn)n∈N∗ d’éléments de K,
on peut extraire une suite
xϕ(n)
n∈N∗ qui converge vers x ∈ K ⊂
i∈I
Oi. Cette
limite étant dans l’un des ouverts Oi, il existe r 0 tel que B (x, r) ⊂ Oi. Comme
lim
n→+∞
1
ϕ (n)
= 0 et lim
n→+∞
xϕ(n) = x, il existe un entier n0 tel que
1
ϕ (n)
ε
2
et
d
xϕ(n), x
ε
2
pour tout n ≥ n0, donc B
xϕ(n),
1
ϕ (n)
⊂ B (x, r) ⊂ Oi (pour
y ∈ B
xϕ(n),
1
ϕ (n)
, on a d (x, y) ≤ d
x, xϕ(n)
+ d
xϕ(n), y
ε
2
+
1
ϕ (n)
ε),
contrairement à l’hypothèse de départ.
Théorème 1.12.
Un sous-ensemble K de (E, d) est compact si, et seulement si, de tout
recouvrement ouvert de K, on peut extraire un sous-recouvrement fini.
Preuve. Soient K un compact de (E, d) et (Oi)i∈I une famille d’ouverts de E
telle que K ⊂
i∈I
Oi. Le lemme de Lebesgue nous dit qu’il existe r 0 tel que
30. Limites et continuité 11
toute boule ouverte de rayon r et de centre x ∈ K soit contenue dans l’un des Oi
et le lemme 1.2 qu’il existe une suite finie (ak)1≤k≤n d’éléments de K telle que
K ⊂
n
k=1
B (ak, r) . Chaque boule B (ak, r) étant contenue dans un ouvert Oik
, on
en déduit que K ⊂
n
k=1
Oik
.
Réciproquement, soit K tel que de tout recouvrement ouvert de K, on puisse
extraire un sous-recouvrement fini. S’il existe une suite (xn)n∈N d’éléments de K
sans valeur d’adhérence dans K, on peut alors trouver pour tout x ∈ K, un réel
rx 0 tel que B (x, rx) ne contienne qu’un nombre fini de valeurs de la suite
(xn)n∈N . Mais du recouvrement ouvert K ⊂
x∈K
B (x, rx) , on peut extraire un
recouvrement fini K ⊂
p
k=1
B
aj, raj
et la suite (xn)n∈N ne peut prendre qu’un
nombre fini de valeurs qui en sont des valeurs d’adhérence, ce qui est contraire à
l’hypothèse de départ. L’ensemble K est donc compact.
1.3 Limites et continuité
Pour ce paragraphe, R est muni de la distance définie par la valeur absolue,
(E, d) , (F, d
) sont deux espaces métriques, I est une partie non vide de E non
réduite à un point et f est une fonction de I dans F.
Définition 1.12. Soit α un point dans l’adhérence de I. On dit que f
admet une limite quand x tend vers α dans I, s’il existe ∈ F tel que :
∀ε 0, ∃η 0 | (x ∈ I {α} , d (x, α) η) ⇒ (d
(f (x) , ) ε)
Comme pour les suites, on peut vérifier en utilisant l’inégalité triangulaire que
si la fonction f admet une limite en α ∈ I, cette dernière est alors unique et on
peut la noter = lim
x→α
f (x) .
Le théorème qui suit nous donne une caractérisation séquentielle de la notion
de limite.
Théorème 1.13.
La fonction f : I → F admet une limite en α ∈ I si, et seulement si,
pour toute suite de points (xn)n∈N de points de I {α} qui converge vers
α, la suite (f (xn))n∈N est convergente.
Preuve. Si f admet une limite en α, alors pour tout ε 0 il existe η 0
tel que d (x, α) η dans I {α} entraîne d
(f (x) , ) ε et si (xn)n∈N est une
suite de points de I {α} qui converge vers α, il existe alors un entier n0 tel que
0 d (xn, α) η pour tout n ≥ n0, ce qui implique d
(f (xn) , ) ε. On a donc
lim
n→+∞
f (xn) = .
31. 12 Espaces métriques
Réciproquement, on suppose que f transforme toute suite d’éléments de I {α}
qui converge vers α en une suite convergente. Soient (xn)n∈N , (yn)n∈N deux suite
de points de I {α} qui convergent vers α. Les suite (f (xn))n∈N et (f (yn))n∈N
convergent respectivement vers et
. On définit la suite (zn)n∈N de points de
I {α} par z2n = x2n, z2n+1 = y2n+1. Cette suite (zn)n∈N converge vers α, donc
(f (zn))n∈N converge et on a :
= lim
n→+∞
f (x2n) = lim
n→+∞
f (z2n) = lim
n→+∞
f (z2n+1) = lim
n→+∞
f (y2n+1) =
Donc toute suite (xn)n∈N de points de I {α} convergente vers α est transformée
en une suite (f (xn))n∈N qui converge vers un même élément de F. Si f n’admet
pas pour limite en α, il existe alors un réel ε 0 tel que pour tout entier n ≥ 1
on peut trouver xn ∈ I {α} tel que d (xn, α)
1
n
et d
(f (xn) , ) ≥ ε. On a donc
ainsi une suite (xn)n∈N de points de I {α} qui converge vers α pour laquelle la
suite (f (xn))n∈N ne converge pas vers , ce qui est une contradiction d’après ce
qui précède.
D’un point de vue pratique, le théorème précédent s’exprime aussi en disant
que lim
x→α
f (x) = si, et seulement si, on a lim
n→+∞
f (xn) = pour toute suite de
points (xn)n∈N de points de I {α} qui converge vers α.
Définition 1.13. On dit qu’une fonction f : I → F est continue en α ∈ I
si lim
x→α
f (x) = f (α) . Dans le cas où f est continue en tout point de I, on
dit qu’elle est continue sur I.
Considérant que pour x = α, on a d (x, α) = d
(f (x) , f (α)) = 0, la continuité
de f en α se traduit par :
∀ε 0, ∃η 0 | (x ∈ I, d (x, α) η) ⇒ (d
(f (x) , f (α)) ε)
Du théorème 1.13, on déduit la caractérisation séquentielle suivante de la notion
de continuité en un point.
Théorème 1.14.
La fonction f : I → F est continue en α ∈ I si, et seulement si, toute
suite (xn)n∈N de points de I qui converge vers α est transformée par f en
une suite convergente dans F.
D’un point de vue pratique, le théorème précédent s’exprime aussi en disant
que f est continue en α si, et seulement si, on a lim
n→+∞
f (xn) = f (α) pour toute
suite de points (xn)n∈N de points de I qui converge vers α.
Théorème 1.15.
La composée de deux fonctions continues f : I → J ⊂ F et g : J → G
(où (G, d
) est un espace métrique) est continue.
32. Propriétés globales des fonctions continues 13
Preuve. Soit α ∈ I. Pour ε 0, il existe η
0 tel que d
(g (y) , g (f (α))) ε
pour y dans J tel que d
(y, f (α)) η
et il existe η 0 tel que d
(f (x) , f (α)) η
pour x dans I tel que d (x, α) η, ce qui nous donne d
(g (f (x)) , g (f (α))) ε
pour x dans I tels que d (x, α) η.
1.4 Propriétés globales des fonctions continues
Le théorème qui suit nous donne une caractérisations topologique de la notion
de continuité sur I.
Théorème 1.16.
La fonction f : I → F est continue sur I si, et seulement si, l’image
réciproque par f de tout ouvert [resp. fermé] de F est un ouvert [resp.
fermé] de I.
Preuve. On rappelle qu’une partie J de I est ouverte [resp. fermée] dans I si
elle s’écrit J = I ∩ O où O est un ouvert [resp. fermé] de E.
Soient f : I → F une fonction continue et O
un ouvert de F. Pour tout α dans
f−1
(O
) , on a f (α) ∈ O
, donc il existe un réel ε 0 tel que la boule ouverte
B
(f (α) , ε) soit contenue dans O
et avec la continuité de f, on peut trouver un
réel η 0 tel que pour tout x ∈ B (α, η) ∩ I on ait f (x) ∈ B
(f (α) , ε) ⊂ O
.
On a donc B (α, η) ∩ I⊂f−1
(O
) et en posant O =
α∈f−1(O)
B (α, η) , on définit
un ouvert de E tel que f−1
(O
) = I ∩ O, ce qui prouve que f−1
(O
) est ouvert
dans I. Réciproquement, supposons que l’image réciproque par f de tout ouvert
de F est un ouvert de I. Pour α ∈ I et ε 0, f−1
(B
(f (α) , ε)) est un ouvert
de I, il existe donc un réel η 0 tel que B (α, η) ∩ I ⊂ f−1
(B
(f (α) , ε)) , ce qui
signifie que d
(f (x) , f (α)) ε pour tout x ∈ B (α, η) ∩ I. La fonction f est donc
continue en tout point de I.
Pour ce qui est de l’image réciproque des fermés, on utilise le fait qu’un fermé
est le complémentaire d’un ouvert et l’image réciproque du complémentaire est le
complémentaire de l’image réciproque.
Définition 1.14. On dit que f : I → F est uniformément continue sur I
si :
∀ε 0, ∃η 0 |
(x, y) ∈ I2
, d (x, y) η
⇒ d
(f (x) , f (y)) ε
Une fonction uniformément continue sur I est évidemment continue en tout
point de I, la nuance étant qu’un réel η associé à ε ne dépend que de f, I et ε.
La notion de continuité est une notion ponctuelle alors que celle de continuité
uniforme est globale. On peut aussi remarquer que cette notion de continuité
uniforme est une notion métrique alors que celle de continuité est topologique.
33. 14 Espaces métriques
Théorème 1.17.
La composée de deux fonctions uniformément continues f : I → J ⊂ F et
g : J → G (où (G, d
) est un espace métrique) est uniformément continue.
Preuve. Pour tout ε 0, il existe η
0 tel que d
(g (u) , g (v)) ε pour u, v
dans J tels que d
(u, v) η
et il existe η 0 tel que d
(f (x) , f (y)) η
pour
x, y dans I tels que d (x, y) η, ce qui nous donne d
(g (f (x)) , g (f (y))) ε
pour x, y dans I tels que d (x, y) η.
Exemples 1.3
1. La fonction x →
√
x est uniformément continue sur R+
. Cela se déduit de :
∀ (x, y) ∈ R2
,
√
x −
√
y
≤
34. |x − y|
Cette inégalité est triviale pour x = y et pour y x ≥ 0 (x, y jouent des rôles
symétriques), on a
√
x −
√
y
2
= y − 2
√
xy + x y − x.
2. Une fonction f : I → F lipschitzienne (ce qui signifie qu’il existe λ ≥ 0 tel que
d
(f (x) , f (y)) ≤ λd (x, y) pour tous x, y dans I) est uniformément continue
sur I.
3. Si f est une fonction à valeurs réelles et dérivable sur un intervalle réel I avec
f
bornée, le théorème des accroissements finis (chapitre 9) nous dit que cette
fonction est lipschitzienne et en conséquence uniformément continue sur I.
Une fonction f : I ⊂ R → R peut très bien être uniformément continue sur tout
intervalle strictement contenu dans I sans être uniformément continue sur I tout
entier. C’est le cas, par exemple, pour la fonction f : x →
1
x
sur I = ]0, 1] . Elle est
lipschitzienne sur tout [a, 1] où 0 a 1 (conséquence des accroissements finis),
donc uniformément continue sur ces intervalles. Mais pour tout réel η ∈
0,
1
2
,
x = η, y = x +
η
2
, on a |y − x| η avec
1
x
−
1
y
=
1
3η
2
3
.
Le théorème qui suit nous donne une caractérisation séquentielle de l’uniforme
continuité.
Théorème 1.18.
Une fonction f : I → F est uniformément continue si, et seule-
ment si, pour toutes suites (xn)n∈N et (yn)n∈N d’éléments de I telles que
lim
n→+∞
d (xn, yn) = 0, on a lim
n→+∞
d
(f (xn) , f (yn)) = 0.
Preuve. Soit f : I → F uniformément continue. Pour tout ε 0, il existe η 0
tel que d
(f (x) , f (y)) ε pour tous x, y dans I vérifiant d (x, y) η. Si (xn)n∈N
et (yn)n∈N sont deux suites d’éléments de I telles que lim
n→+∞
d (xn, yn) = 0, il existe
alors un entier n0 ∈ N tel que d (xn, yn) η pour tout n ≥ n0, ce qui entraîne que
d
(f (xn) , f (yn)) ε. On a donc lim
n→+∞
d
(f (yn) , f (xn)) = 0.
35. Propriétés globales des fonctions continues 15
Réciproquement, supposons que lim
n→+∞
d
(f (xn) , f (yn)) = 0 pour toutes suites
(xn)n∈N , (yn)n∈N d’éléments de I telles que lim
n→+∞
d (xn, yn) = 0. Si f n’est pas
uniformément continue, il existe alors ε 0 tel que pour tout entier n ≥ 1 on peut
trouver xn, yn dans I tel que d (xn, yn)
1
n
et d
f (xn) , f (yn) ≥ ε, ce qui nous
donne deux suites (xn)n∈N et (yn)n∈N de points de I telles que lim
n→+∞
d (xn, yn) = 0
et (d
(f (xn) , f (yn)))n∈N ne converge pas vers 0, ce qui n’est pas possible.
Ce résultat peut être utilisé pour montrer qu’une fonction n’est pas uniformé-
ment continue sur I.
Par exemple pour la fonction f : x → x2
, en considérant les suites (xn)n∈N
et (yn)n∈N définies par xn =
√
n + 1, yn =
√
n, on a xn − yn =
1
√
n +
√
n + 1
,
ce qui donne lim
n→+∞
(xn − yn) = 0 avec lim
n→+∞
(f (xn) − f (yn)) = 1
36. = 0, donc
cette fonction n’est pas uniformément continue sur R. Une démonstration directe
de cette non uniforme continuité peut se faire comme suit : pour η 0, x =
2
η
,
y = x +
η
2
, on a |x − y| η et
y2
− x2
= 1 +
η2
4
1.
On montre de manière analogue que la fonction f : x → sin
x2
n’est pas
uniformément continue sur R. En considérant les mêmes suites, on a :
f (xn) − f (yn) = sin (n + 1) − sin (n) = 2 cos
n +
1
2
sin
1
2
et cette suite est divergente.
Définition 1.15. Soit J une partie non vide de F. On dit que f : I → J est
est un homéomorphisme si elle est continue bijective d’inverse f−1
continue.
1.4.1 Continuité et compacité
Une fonction continue n’est pas nécessairement uniformément continue, mais
pour les fonctions définies sur un compact, on a le résultat suivant.
Théorème 1.19. Heine
Si K est un compact de (E, d) , alors toute fonction continue f : K → F
est uniformément continue sur K.
Preuve. Si f : K → F n’est pas uniformément continue, il existe ε 0 et deux
suites (xn)n∈N∗ , (yn)n∈N∗ dans K tels que d (xn, yn)
1
n
et d
f (xn) , f (yn) ≥ ε
pour tout n ∈ N∗
. K étant compact, on peut extraire deux suites
xϕ(n)
n∈N∗
et
yϕ(n)
n∈N∗ qui convergent respectivement vers x et y dans K. Mais avec
d (xn, yn)
1
ϕ (n)
≤
1
n
, on déduit que d (x, y) = lim
n→+∞
d
xϕ(n), yϕ(n)
= 0,
37. 16 Espaces métriques
soit x = y, puis avec la continuité de f on a lim
n→+∞
d
f
xϕ(n)
, f
yϕ(n)
= 0 en
contradiction avec d
f
xϕ(n)
, f
yϕ(n)
≥ ε pour tout n ≥ 1.
Théorème 1.20.
L’image d’un compact par une application continue est un compact, ce
qui signifie que si K est un compact de (E, d) et f : K → F une fonction
continue, alors f (K) est un compact de (F, d
) .
Preuve. Soit (yn)n∈N une suite dans f (K) avec yn = f (xn) pour tout n ∈ N.
De la suite (xn)n∈N dans le compact K on peut extraire une suite
xϕ(n)
n∈N
qui converge vers un élément x de K et avec la continuité de f on déduit que
lim
n→+∞
yϕ(n) = lim
n→+∞
f
xϕ(n)
= f (x) ∈ f (K) , donc f (K) est compact.
Théorème 1.21.
Soient K un compact de (E, d) et f : K → R une fonction continue.
Cette fonction est bornée et atteint ses bornes, ce qui signifie qu’il existe
α, β dans K tels que f (α) = inf
x∈K
f (x) et f (β) = sup
x∈K
f (x) .
Preuve. Comme f (K) est compact, il est en particulier borné dans R et étant
non vide, il admet une borne inférieure et une borne supérieure :
m = inf
x∈K
f (x) , M = sup
x∈K
f (x)
Par définition de la borne inférieure m, pour tout entier n 0 on peut trouver
xn dans K tel que m ≤ f (xn) m +
1
n
et de la suite (xn)n∈N ainsi définie dans le
compact K on peut extraire une sous-suite
xϕ(n)
n∈N
qui converge vers α ∈ K.
On a donc pour tout n 0, m ≤ f
xϕ(n)
m+
1
ϕ (n)
avec lim
n→+∞
ϕ (n) = +∞, ce
qui nous donne avec la continuité de f, f (α) = lim
n→+∞
f
xϕ(n)
= m. On procède
de manière analogue pour la borne supérieure.
1.4.2 Continuité et connexité
Le résultat qui suit ainsi que son corollaire sont souvent utiles pour montrer
qu’un ensemble est connexe.
Théorème 1.22.
Si f est une fonction continue de (E, d) dans (F, d
) , alors pour tout
connexe A de E l’image f (A) est connexe dans F.
Preuve. Soit A une partie connexe de E et A
= f (A) . Supposons qu’il existe
deux ouverts de F, O1, O2, tels que A
⊂ O1 ∪O2 et A
∩O1 ∩O2 = ∅. On a alors :
A ⊂ f−1
(A
) ⊂ f−1
(O1) ∪ f−1
(O2)
38. Propriétés globales des fonctions continues 17
avec f−1
(O1) , f−1
(O2) ouverts dans E et A ∩ f−1
(O1) ∩ f−1
(O2) = ∅, ce qui
entraîne A∩f−1
(O1) = ∅ ou A∩f−1
(O2) = ∅ et donc A
∩O1 = ∅ ou A
∩O2 = ∅.
L’ensemble A
est donc connexe dans F.
Corollaire 1.1. Une partie A de (E, d) est connexe si, et seulement si,
toute application continue de A dans {0, 1} est constante.
Preuve. Soient A connexe dans (E, d) et f : A → {0, 1} continue. L’ensemble
f (A) est connexe dans R contenu dans {0, 1} et c’est nécessairement {0} ou {1}
puisque {0, 1} n’est pas connexe (en effet {0, 1} ⊂
−1,
1
2
∪
1
2
,
3
2
) ce qui signifie
que f est constante. Réciproquement si A n’est pas connexe il existe deux ouverts
O1, O2 de E tels que A ⊂ O1 ∪O2 avec A∩O1 ∩O2 = ∅, A∩O1
40. = ∅.
La fonction caractéristique de O1, définie par f (x) = 1 si x ∈ O1 et f (x) = 0
sinon est alors continue de E dans R à valeurs dans {0, 1} (si O est un ouvert de
R, on a f−1
(O) = O1 si 1 ∈ O et f−1
(O) = ∅ ou f−1
(O) = O2 sinon) et non
constante sur A (pour x ∈ A ∩ O1
42. = ∅ on
a f (x) = 0).
Corollaire 1.2. Si A est une partie connexe de E, son adhérence A est
alors connexe.
Preuve. Si f est une application continue de A dans {0, 1} , sa restriction au
connexe A est alors constante (puisque également continue) et par densité la fonc-
tion f est également constante sur A.
L’intérieur d’un connexe n’est pas nécessairement connexe. Par exemple, dans
l’espace euclidien R2
, l’ensemble A =
(x, y) ∈ R2
| x
43. = 0
∪ {(0, 0)} est connexe
(il est connexe par arcs, donc connexe d’après le théorème 2.3) et son intérieur
◦
A =
(x, y) ∈ R2
| x
44. = 0
est non connexe .
Théorème 1.23.
Une réunion de connexes de E d’intersection non vide est connexe.
Preuve. Soit (Ai)i∈I une famille de connexes de E et A =
i∈I
Ai. Si f : A → R est
une application continue à valeurs dans {0, 1} , alors pour tout i ∈ I la restriction
de f à Ai qui est également continue est constante égale à γi puisque Ai est
connexe. Pour x ∈
i∈I
Ai on a f (x) = γi pour tout i ∈ I, les γi sont donc tous
égaux et f est constante sur A. L’ensemble A est donc connexe.
45. 18 Espaces métriques
1.5 Exercices
Exercice 1.1. Donner une condition nécessaire et suffisante sur une
fonction f : R → R, pour que l’application df : (x, y) → |f (y) − f (x)|
définisse une distance sur R.
Solution. La propriété de symétrie et l’inégalité triangulaire sont clairement
satisfaites. L’égalité df (x, y) = 0 équivaut à f (x) = f (y) qui implique x = y si,
et seulement si, f est injective. En conclusion, df est une distance si, et seulement
si, f est injective.
Exercice 1.2. Pour tous polynômes P, Q dans R [X] , on note :
d1 (P, Q) = sup
[0, 1
2 ]
|Q (t) − P (t)| , d2 (P, Q) =
0 si P = Q
deg (P − Q) + 1 si P
46. = Q
1. Montrer que d1 et d2 définissent des distances sur R [X] .
2. Étudier la convergence de la suite (Xn
)n∈N dans (R [X] , d1) et dans
(R [X] , d2) .
Solution. Les applications d1 et d2 sont à valeurs positives ou nulles.
1. La propriété de symétrie se vérifie aisément pour les deux normes. Par construc-
tion, on a d2 (P, Q) = 0 si, et seulement si P = Q (puisque deg (A) ≥ 0 pour
A ∈ R [X] {0}). L’égalité d1 (P, Q) = 0 équivaut à P (t) = Q (t) pour tout
t ∈
0,
1
2
, ou encore à P = Q (le polynôme P − Q a une infinité de racines).
Pour P, Q, R dans R [X] , on a |Q (t) − P (t)| ≤ |Q (t) − R (t)| + |R (t) − P (t)|
pour tout t ∈
0,
1
2
, donc d1 (P, Q) ≤ d1 (P, R) + d1 (R, Q) . Pour P = Q, on
a d2 (P, Q) = 0 ≤ d2 (P, R) + d2 (R, Q) . Pour P
47. = Q et P = R on a :
d2 (P, Q) = d2 (R, Q) = deg (R − Q) + 1 = d2 (P, R) + d2 (R, Q)
et pareil pour Q = R. Pour P
50. = R on a :
d2 (P, Q) = deg (P − R + R − Q) + 1
≤ deg (P − R) + deg (R − Q) + 2 = d2 (P, R) + d2 (R, Q)
En conclusion, d1, d2 sont des distances sur R [X] .
2. Avec lim
n→+∞
d1 (Xn
, 0) = lim
n→+∞
1
2n
= 0, on déduit que (Xn
)n∈N converge vers
0 dans (R [X] , d1) et avec lim
n→+∞
d2
Xn+1
, Xn
= lim
n→+∞
(n + 1) = +∞, on
déduit que (Xn
)n∈N diverge dans (R [X] , d2) .
51. Exercices 19
Exercice 1.3. Soit d une distance sur E.
1. Soit ϕ : R+
→ R une fonction croissante non identiquement nulle telle
que ϕ (0) = 0 et ϕ (t + t
) ≤ ϕ (t)+ϕ (t
) pour tous t, t
dans R+
. Montrer
que ϕ (t) 0 pour tout t 0 et que l’application dϕ = ϕ ◦ d définit une
distance sur E.
2. Soit ϕ : R+
→ R une fonction non identiquement nulle, croissante,
continue sur R+
, dérivable sur R+,∗
de dérivée décroissante et telle que
ϕ (0) = 0. Montrer que l’application ϕ ◦ d définit une distance sur E.
3. Montrer que les applications 1R+,∗ ◦ d, min (d, 1) ,
d
1 + d
et dα
ou α est
dans ]0, 1[ définissent des distances sur E.
4. On suppose que ϕ est continue en 0. En notant, pour x ∈ E et
r ∈ R+,∗
, Bϕ (x, r) la boule de centre x et de rayon r dans (E, dϕ) ,
montrer que Bϕ (x, ϕ (r)) ⊂ B (x, r) et qu’il existe r
∈ R+,∗
tel que
B (x, r
) ⊂ Bϕ (x, r) . En déduire que les ouverts de (E, d) sont les ou-
verts de (E, dϕ) .
Solution.
1.
(a) La fonction ϕ est à valeurs positives puisque croissante avec ϕ (0) = 0.
Comme ϕ n’est pas identiquement nulle avec ϕ (0) = 0, il existe t0 0 tel
que ϕ (t0) 0. De la croissance de ϕ, on déduit que ϕ (t) 0 pour tout
t ≥ t0. S’il existe t ∈ ]0, t0[ tel que ϕ (t) = 0, on a alors ϕ (nt) = 0 pour
tout n ∈ N. En effet, c’est vrai pour n ∈ {0, 1} et si c’est vrai pour n ≥ 1,
de 0 ≤ ϕ ((n + 1) t) ≤ ϕ (nt) + ϕ (t) , on déduit que ϕ ((n + 1) t) = 0. Mais
prenant n ∈ N∗
tel que nt t0, on aboutit à une contradiction. On a donc
ϕ (t) 0 pour tout t 0.
(b) Pour tous x, y, z dans E, on a dϕ (y, x) = ϕ (d (y, x)) = ϕ (d (x, y)) =
dϕ (x, y) ; l’égalité dϕ (x, y) = ϕ (d (x, y)) = 0 est réalisée si, et seulement
si, d (x, y) = 0 d’après la question précédente, ce qui équivaut à x = y ;
dϕ (x, z) = ϕ (d (x, z)) avec d (x, z) ≤ d (x, y) + d (y, z) , donc dϕ (x, z) ≤
dϕ (x, y) + dϕ (y, z) .
2. Pour tout réel t
fixé dans R+
, la fonction γ : t → ϕ (t + t
) − ϕ (t) − ϕ (t
) est
dérivable sur R+,∗
avec γ
(t) = ϕ
(t + t
)−ϕ
(t) ≤ 0 (ϕ
est décroissante), donc
γ est décroissante sur R+
(elle est continue en 0) et on a γ (t) ≤ γ (0) = 0, soit
ϕ (t + t
) ≤ ϕ (t) + ϕ (t
) . De la question précédente, on déduit que dϕ = ϕ ◦ d
est une distance.
3. Les fonctions 1R+,∗ et t → min (t, 1) vérifiant les hypothèses de la première
question, on en déduit que :
1R+,∗ ◦d : (x, y) →
0 si y = x
1 si y
52. = x
et min (d, 1) : (x, y) →
1 si d (x, y) 1
d (x, y) si d (x, y) ≤ 1
53. 20 Espaces métriques
sont des distances. Les fonctions t →
t
1 + t
et t → tα
pour α ∈ ]0, 1[ vérifiant
les hypothèses de la deuxième question, on en déduit que
d
1 + d
et dα
sont des
distances.
4.
(a) Pour tout y ∈ Bϕ (x, ϕ (r)) , on a dϕ (y, x) = ϕ (d (y, x)) ϕ (r) , ce qui
implique que d (y, x) r puisque ϕ est croissante (si d (y, x) ≥ r, on a alors
ϕ (d (y, x)) ≥ ϕ (r)), soit y ∈ B (x, r) . On a donc Bϕ (x, ϕ (r)) ⊂ B (x, r)
que ϕ soit continue ou pas en 0.
(b) Dans le cas où ϕ est continue en 0, pour r 0 donné il existe r
0
tel que |ϕ (t)| = |ϕ (t) − ϕ (0)| r pour tout réel t tel que |t| r
, donc
pour tout y ∈ B (x, r
) , la condition d (y, x) r
entraîne que dϕ (y, x) =
ϕ (d (y, x)) r, soit y ∈ Bϕ (x, r) . On a donc B (x, r
) ⊂ Bϕ (x, r) .
(c) Si O ⊂ E est ouvert non vide dans (E, d) et x ∈ O, il existe alors r 0 tel
que B (x, r) ⊂ O, donc Bϕ (x, ϕ (r)) ⊂ O avec ϕ (r) 0 et O est ouvert
dans (E, dϕ) . Réciproquement si O est ouvert dans (E, dϕ) et x ∈ O, il
existe alors r 0 tel que Bϕ (x, r) ⊂ O et pour r
0 tel que B (x, r
) ⊂
Bϕ (x, r) , on a B (x, r
) ⊂ O et O est ouvert dans (E, d) . Les distances d
et dϕ définissent donc la même topologie sur E.
Exercice 1.4. Montrer que tout fermé d’un espace métrique (E, d) peut
s’écrire comme l’intersection d’une suite décroissante d’ouverts et que tout
ouvert peut s’écrire comme la réunion d’une suite croissante de fermés.
Solution. Soit F un fermé dans E. Pour tout entier n ∈ N∗
l’ensemble V 1
n
(F) =
x ∈ E | d (x, F)
1
n
est un ouvert qui contient F (exemples 1.1) et on a F =
n∈N∗
V 1
n
(F) . En effet, comme F est contenu dans tous les V 1
n
(F) , il est contenu
dans l’intersection et pour tout x ∈
n∈N∗
V 1
n
(F) , on a d (x, F) = 0, ce qui équivaut
à dire que x ∈ F car F est fermé. De plus pour tout n ∈ N∗
, on a V 1
n+1
(F) ⊂
V 1
n
(F) . Par passage au complémentaire, on a le résultat sur les ouverts.
Exercice 1.5. Soient (E, d) , (F, d
) deux espaces métriques, I une partie
non vide de E et Cb (I, F) l’ensemble des fonctions continues et bornées de
I dans F.
1. Montrer que l’application d∞ définie par :
∀ (f, g) ∈ (Cb (I, F))
2
, d∞ (f, g) = sup
x∈I2
d
(f (x) , g (x))
est une distance sur Cb (I, F) .
2. Dans le cas où (F, d
) est complet, montrer que (Cb (I, F) , d∞) est com-
plet.
54. Exercices 21
Solution. Dire qu’une fonction f : I → F est bornée signifie que :
δ (f (I)) = sup
(x,y)∈I2
d
(f (x) , f (y)) +∞
1. En se fixant x0 dans I, on a pour toutes fonctions f, g dans Cb (I, F) et tout
x ∈ I :
d
(f (x) , g (x)) ≤ d
(f (x) , f (x0)) + d
(f (x0) , g (x0)) + d
(g (x0) , g (x))
≤ δ (f (I)) + d
(f (x0) , g (x0)) + δ (g (I))
donc le réel d∞ (f, g) est bien défini. Il est clair que pour toutes fonctions f, g, h
dans Cb (I, F) , on a d∞ (f, g) = d∞ (g, f) , d∞ (f, h) ≤ d∞ (f, g) + d∞ (g, h)
et l’égalité d∞ (f, g) = 0 équivaut à d
(f (x) , g (x)) pour tout x ∈ I, soit à
f (x) = g (x) pour tout x ∈ I, ou encore à f = g. L’application d∞ est donc
bien une distance sur Cb (I, F) .
2. Soient (fn)n∈N une suite de Cauchy dans l’espace métrique (Cb (I, F) , d∞) et ε
un réel strictement positif. Il existe un entier n0 tel que :
∀m n ≥ n0, ∀x ∈ I, d
(fn (x) , fm (x)) ε (1.3)
donc pour x fixé dans I, la suite (fn (x))n∈N est de Cauchy dans (F, d
) et en
conséquence converge vers un élément f (x) de F. Faisant tendre m vers l’infini
dans (1.3) , on en déduit que :
∀n ≥ n0, ∀x ∈ I, d
(fn (x) , f (x)) ≤ ε (1.4)
En effet, pour x ∈ I, n ≥ n0 fixés, on a :
d
(fn (x) , f (x)) ≤ d
(fn (x) , fm (x))+d
(fm (x) , f (x)) ≤ ε+d
(fm (x) , f (x))
pour tout m n avec lim
m→+∞
d
(fm (x) , f (x)) = 0, ce qui donne en faisant
tendre m vers l’infini, d
(fn (x) , f (x)) ≤ ε. Il en résulte que pour tous x, y
dans I, on a :
d
(f (x) , f (y)) ≤ d
(f (x) , fn0
(x)) + d
(fn0
(x) , fn0
(y)) + d
(fn0
(y) , f (y))
2ε + δ (fn0
(I)) +∞
ce qui signifie que f est bornée. Puis avec :
d (f (x) , f (y)) ≤ d (f (x) , fn0
(x)) + d (fn0
(x) , fn0
(y)) + d (fn0
(y) , f (y))
2ε + d (fn0
(x) , fn0
(y))
pour tous x, y dans I, on déduit que f est continue sur I. En définitive, f est
dans Cb (I) et de (1.4) , on déduit que d∞ (fn, f) ≤ ε pour tout n ≥ n0, ce qui
achève de prouver que (Cb (I, F) , d∞) est complet.
Exercice 1.6. Montrer qu’un espace métrique compact est séparable.
55. 22 Espaces métriques
Solution. Soit (E, d) un espace métrique compact. Pour tout entier n ∈ N∗
, on
peut extraire du recouvrement ouvert E =
x∈E
B
x,
1
n
un sous recouvrement
fini E =
x∈Dn
B
x,
1
n
, où Dn est une partie finie de E. On vérifie alors que
l’ensemble dénombrable D =
n∈N∗
Dn est dense dans E. Pour a ∈ E et ε 0,
prenant n ∈ N∗
tel que
1
n
ε, il existe x ∈ Dn tel que a ∈ B
x,
1
n
, donc
d (x, a)
1
n
ε et x ∈ B (a, ε) ∩ D. On a donc D ∩ B (a, ε)
56. = ∅ pour tout a ∈ E
et tout ε 0, ce qui signifie que D est dense dans E. En conclusion, (E, d) est
séparable.
Exercice 1.7. Soit (un)n∈N une suite dans un espace métrique (E, d) .
1. Montrer que la suite (un)n∈N est convergente si, et seulement si, les
suites extraites (u2n)n∈N et (u2n+1)n∈N convergent vers une même li-
mite.
2. Montrer que la suite (un)n∈N est convergente si, et seulement si, les
suites extraites (u2n)n∈N et (u2n+1)n∈N et (u3n)n∈N convergent.
3. Dans le cas où (un)n∈N est une suite périodique, montrer qu’elle converge
si, et seulement si, elle est constante.
Solution.
1. Supposons que (u2k)k∈N et (u2k+1)k∈N convergent respectivement vers et
.
Si
57. =
, alors (un)n∈N a au moins deux valeurs d’adhérence distinctes et en
conséquence ne peut converger. Si =
, il existe alors, pour tout réel ε 0,
des entiers k1 et k2 tels que :
∀k ≥ k1, d (u2k, ) ε et ∀k ≥ k2, d (u2k+1,
) ε
et en notant n0 = max (2k1, 2k2 + 1) , on a pour tout n ≥ n0, d (un, ) ε,
donc (un)n∈N converge vers . La réciproque est évidente.
2. Supposons que (u2k)k∈N , (u2k+1)k∈N et (u3k)k∈N convergent respectivement
vers ,
et
. La suite (u6k)k∈N qui est extraite de (u2k)k∈N et (u3k)k∈N
converge vers et
, ce qui impose =
du fait de l’unicité de la limite. De
même en remarquant que (u6k+3)k∈N est extraite de (u2k+1)k∈N et (u3k)k∈N ,
on déduit que
=
et =
, donc (u2k)k∈N et (u2k+1)k∈N convergent vers la
même limite, ce qui équivaut à la convergence de la suite (un)n∈N . La réciproque
est évidente.
3. Soit (un)n∈N une suite convergente vers et périodique de période p où p
est un entier strictement positif. Pour tout entier naturel k, la suite extraite
(upn+k)n∈N est constante de valeur commune uk et convergente vers . On a
donc uk = pour tout k ∈ N. La réciproque est évidente.
58. Exercices 23
Exercice 1.8. Soit (un)n∈N une suite dans un espace métrique (E, d) .
1. Montrer que si lim
n→+∞
(un) = , on a alors lim
n→+∞
d (un+1, un) = 0. La
réciproque est-elle vraie ?
2. Montrer que si lim
n→+∞
(un) = , on a alors pour toute application stric-
tement croissante ϕ : N → N, lim
n→+∞
d
uϕ(n), un
= 0.
3. Montrer que, dans (R, |·|) , les suites ((−1)
n
)n∈N ,
n
k=1
1
k
n∈N∗
et
(ln (n))n≥1 sont divergentes.
4. Montrer que, dans (R, |·|) , la suite réelle (ln (ln (n)))n≥2 est telle que
lim
n→+∞
(u2n − un) = 0 et divergente.
Solution.
1. Si lim
n→+∞
(un) = , on peut alors trouver, pour tout réel ε 0, un entier n0 tel
que :
∀n n0, d (un+1, un) ≤ d (un+1, ) + d (, un) ε
ce qui signifie que lim
n→+∞
d (un+1, un) = 0. La réciproque est fausse comme le
montre l’exemple de la suite (
√
n)n∈N dans (R, |·|) . Cette suite est divergente
puisque non bornée et pour n ≥ 1, on a :
lim
n→+∞
√
n + 1 −
√
n
= lim
n→+∞
1
√
n + 1 +
√
n
= 0
On peut aussi considérer, plus généralement, la suite réelle (nα
)n∈N avec α dans
]0, 1[ . Cette suite est divergente puisque non bornée et pour n ≥ 1, on a :
(n + 1)
α
− nα
= [tα
]
n+1
n =
n+1
n
α
t1−α
dt ≤
α
n1−α
→
n→+∞
0
puisque 1 − α 0. On peut aussi utiliser le théorème des accroissements finis
pour écrire que (n + 1)
α
− nα
= αξα−1
n avec ξn compris entre n et n + 1, ce qui
donne αξα−1
n =
α
ξ1−α
n
≤
α
n1−α
. Ou encore écrire que :
0 (n + 1)
α
− nα
= nα
1 +
1
n
α
− 1
≤ nα
1 +
1
n
− 1
=
1
n1−α
2. L’application ϕ étant strictement croissante, on a ϕ(n) ≥ n pour tout entier n
et en conséquence, pour tout réel ε 0, on peut trouver un entier n0 tel que :
∀n n0, d
uϕ(n), un
≤ d
uϕ(n),
+ d (, un) ε
ce qui signifie que lim
n→+∞
d
uϕ(n), un
= 0.
59. 24 Espaces métriques
3. Résulte de |un+1 − un| = 2, |v2n − vn| =
n
k=1
1
n + k
≥
n
2n
=
1
2
et |w2n − wn| =
ln (2) , les notations étant évidentes. On peut remarquer que la deuxième suite
est telle que pour tout p ≥ 1, lim
n→+∞
(vn+p − vn) = lim
n→+∞
p
k=1
1
n + k
= 0.
4. On a :
u2n − un = ln (ln (2n)) − ln (ln (n)) = ln
ln (n) + ln (2)
ln (n)
= ln
1 +
ln (2)
ln (n)
et comme
ln (2)
ln (n)
n≥2
tend vers 0 lorsque n tend vers l’infini, il en est de même
pour la suite (u2n − un)n≥2 =
ln
1 +
ln (2)
ln (n)
n≥2
. Comme :
un2 − un = ln
(ln n2
)
− ln(ln (n)) = ln
2 ln (n)
ln (n)
= ln 2
la suite réelle (ln (ln (n)))n≥2 est divergente.
Exercice 1.9. Soient (E, d) un espace métrique complet et (Bn)n∈N =
B (xn, rn)
n∈N
une suite de boules fermées dans E telle que :
∀n ∈ N, rn 0, Bn+1 ⊂ Bn
lim
n→+∞
rn = 0
Dans ces conditions l’intersection de toutes les boules Bn est non vide ré-
duite à un point.
Solution. Étant donné un réel ε 0, il existe un entier n0 tel que 0 rn ε
pour tout n ≥ n0. Du fait que pour m ≥ n, on a xm ∈ Bm ⊂ Bn, on déduit que :
∀m n ≥ n0, d (xm, xn) ≤ rn ε
ce qui signifie que la suite (xn)n∈N est de Cauchy dans (E, d) . Cet espace métrique
étant complet, la suite (xn)n∈N est convergente dans E. On note x sa limite. Pour
tout entier naturel n et tout entier m ≥ n, on a xm ∈ Bn, la boule Bn étant fermée,
il en résulte que x = lim
m→+∞
m≥n
xm ∈ Bn. Donc x ∈
n∈N
Bn et cette intersection est
non vide. Si y ∈
n∈N
Bn, on a alors d (y, xn) ≤ rn pour tout entier naturel n et
y = lim
n→+∞
xn = x, cette intersection est donc réduite au point x.
60. Chapitre 2
Espaces normés
Pour ce chapitre, E est un espace vectoriel (de dimension finie ou infinie) sur
le corps K des réels ou des complexes.
2.1 Semi-normes et normes
Définition 2.1. Une semi-norme sur E est une application p : E → R
telle que pour tout scalaire λ et tous vecteurs x, y dans E, on ait :
— p (λx) = |λ| p (x) ;
— p (x + y) ≤ p (x) + p (y) (inégalité triangulaire.).
Le résultat qui suit nous dit qu’une semi-norme est nécessairement à valeurs
positives ou nulles et nous donne une formulation équivalente de l’inégalité trian-
gulaire souvent utile.
Lemme 2.1 Soit p une semi-norme sur E.
1. Pour tout x dans E, on a p (x) ≥ 0 ;
2. l’ensemble p−1
{0} = {x ∈ E | p (x) = 0} est un sous-espace vectoriel de E ;
3. pour tous x, y dans E, on a |p (x) − p (y)| ≤ p (x − y) .
Preuve.
1. Pour tout x ∈ E, on a p (0) = p (0 · x) = 0 · p (x) = 0 et 0 = p (x − x) ≤ 2p (x) ,
donc p (x) ≥ 0.
2. L’ensemble p−1
{0} est non vide puisqu’il contient 0 et avec les propriétés d’une
semi-norme, on déduit facilement que c’est un sous-espace vectoriel de E.
3. Cette inégalité se déduit de p (x) = p (x − y + y) ≤ p (x − y) + p (y) et de
p (y) = p (y − x + x) ≤ p (x − y) + p (x) .
On vérifie facilement que l’inégalité 3. du théorème précédent est équivalente à
l’inégalité triangulaire.
Le sous-espace vectoriel p−1
{0} est le noyau de la semi-norme p.
61. 26 Espaces normés
Définition 2.2. Une norme sur E est une semi-norme dont le noyau est
réduit à {0} .
Une norme sur E est notée x → x et le couple (E, ·) est un espace normé.
Exemples 2.1
1. Sur R, une norme est de la forme Nα : x → α |x| , où α est un réel strictement
positif. En effet il est clair que chaque Nα est une norme. Si N est une norme
sur R, on a alors α = N (1) 0 et pour tout x ∈ R, N (x) = N (x · 1) =
|x| N (1) = α |x| .
2. Pour toute forme linéaire non nulle ϕ sur un R-espace vectoriel E, l’application
x → |ϕ (x)| définit une semi-norme sur E et c’est une norme si, et seulement
si, ker (ϕ) = {0} , ce qui équivaut à dire, en dimension finie, que E est de
dimension 1.
3. Pour toute forme bilinéaire symétrique positive ϕ sur un R-espace vectoriel
E, l’application p définie par p (x) =
62. ϕ (x, x) pour tout x ∈ E définit une
semi-norme sur E et c’est une norme si, et seulement si, ϕ est définie positive
(i. e. est un produit scalaire). Cela résulte de l’inégalité de Cauchy-Schwarz,
|ϕ (x, y)| ≤ p (x) p (y) pour tous x, y dans E (voir le paragraphe 3.1).
4. Soient E un R-espace vectoriel de dimension finie et B = (ei)1≤i≤n une base
de E. Les applications définies par :
x∞ = max
1≤i≤n
|xi| , x1 =
n
i=1
|xi| , x2 =
n
i=1
x2
i
pour tout x =
n
i=1
xiei ∈ E, définissent des normes sur E (l’exercice 3.3).
5. Pour toute partie non vide I d’un espace normé E, en notant Fb (I) l’espace
des fonctions bornées de I dans R ou C, l’application f → f∞ = sup
x∈I
|f (x)|
définit une norme sur Fb (I) .
6. Sur l’espace vectoriel E = C0
([a, b] , K) des applications continues de [a, b] (pour
a b) dans K = R ou C, les applications définies par :
f∞ = sup
x∈I
|f (x)| , f1 =
b
a
|f (t)| dt, f2 =
b
a
f2 (t) dt
pour tout f ∈ E, définissent des normes sur E.
On vérifie facilement qu’à partir d’une norme · sur E, on définit une distance
en posant d (x, y) = y − x pour tous x, y dans E.
Un espace vectoriel normé est naturellement muni d’une structure d’espace
vectoriel topologique, ce qui signifie que l’on peut associer à une norme sur E une
topologie (i. e. une famille d’ouverts) telle que les applications d’addition interne
et de multiplication externe soient continues.
63. Semi-normes et normes 27
Nous rappelons brièvement ce que deviennent les notions étudiées dans le cadre
des espaces métriques (chapitre 1), en désignant par (E, ·) et
F, ·
deux
espaces vectoriels normés.
— Pour tout a ∈ E et tout r ∈ R+,∗
, B (a, r) = {x ∈ E | x − a r} [resp.
B (a, r) = {x ∈ E | x − a ≤ r}] désigne la boule ouverte [resp. la boule
fermée] de centre a et de rayon r. En particulier, B (0, 1) est la boule unité
et S (0, 1) = {x ∈ E | x = 1} est la sphère unité.
— Une partie non vide A de (E, ·) est bornée s’il existe une constante λ 0
telle que x ≤ λ pour tout x dans A, ce qui revient à dire qu’elle est
contenue dans une boule fermée centrée en 0.
— Un sous-ensemble O de (E, ·) est un ouvert s’il est vide ou s’il est non vide
et pour tout a dans O il existe un réel r 0 tel que B (a, r) ⊂ O.
— L’intérieur d’une partie A de (E, ·) est le plus grand ouvert
◦
A de E contenu
dans A.
— Un sous-ensemble F de (E, ·) est un fermé si son complémentaire dans E
est un ouvert de E.
— L’adhérence d’une partie A de (E, ·) est le plus petit fermé A de E conte-
nant A.
— Une suite (xn)n∈N d’éléments de (E, ·) est convergente s’il existe un élé-
ment de E tel que lim
n→+∞
xn − = 0, un tel est unique. La convergence
de (xn)n∈N vers se traduit par :
∀ε 0, ∃n0 ∈ N | ∀n ≥ n0, xn − ε
De l’inégalité |x − y| ≤ x − y valable pour tous x, y dans E, on déduit
que si lim
n→+∞
(un) = dans E, on a alors lim
n→+∞
un = dans R.
— La divergence d’une suite (xn)n∈N d’éléments de (E, ·) peut se traduire
par :
∀ ∈ E, ∃ε 0, ∀n0 ∈ N, ∃n ≥ n0 | un − ≥ ε
— Une partie A de (E, ·) est dense dans E si A = E, ce qui revient à dire
que tout élément de E est limite d’une suite de points de A.
— Une suite (xn)n∈N d’éléments de (E, ·) est une suite de Cauchy si pour
tout réel ε 0 on peut trouver un entier n0 tel que pour tous entiers n, m
on a :
n ≥ n0, m ≥ n0, ⇒ xn − xm ε
Une suite de Cauchy est bornée. Une suite convergente est de Cauchy (donc
bornée). Une suite non bornée est divergente.
— Une partie F de (E, ·) est fermée si, et seulement si, pour toute suite
d’éléments de F qui converge vers x dans E on a, x ∈ F.
— Une partie non vide K de (E, ·) est compacte si de toute suite de points
de K on peut extraire une sous-suite qui converge vers un élément de K, ce
qui équivaut à dire que de tout recouvrement ouvert de K on peut extraire
un sous-recouvrement fini. Un compact est fermé et borné.
64. 28 Espaces normés
— Soient I une partie non vide de (E, ·) et f une fonction définie sur I à
valeurs dans
F, ·
. La fonction f est continue en α ∈ I si :
∀ε 0, ∃η 0 | (x ∈ I, x − α ≤ η) ⇒
f (x) − f (α)
≤ ε
Elle est continue sur I si elle est continue en tout point de I, ce qui équivaut
à dire que l’image réciproque par f de tout ouvert [resp. fermé] de F est
un ouvert [resp. fermé] de I ou encore que toute suite de points convergente
dans I est transformée par f en une suite convergente dans F.
— Si J est une partie non vide de F, on dit alors que f : I → J est est un
homéomorphisme si elle est continue bijective d’inverse f−1
continue.
— Une fonction f : I → F est uniformément continue sur I si :
∀ε 0, ∃η 0 |
(x, y) ∈ I2
, x − y ≤ η
⇒ f (x) − f (y)
≤ ε
ce qui équivaut à dire que pour toutes suites (xn)n∈N et (yn)n∈N d’éléments
de I telles que lim
n→+∞
xn − yn = 0, on a lim
n→+∞
f (xn) − f (yn)
= 0.
— Dans le cas où I est compact, toute fonction continue sur I est uniformément
continue (théorème 1.19), f (I) est un compact de
F, ·
(théorème 1.20)
et f, à valeurs réelles, est bornée et atteint ses bornes (théorème 1.21).
La notion de convergence d’une suite dépend a priori de la norme choisie sur
E. Considérons par exemple, dans C0
([0, 1] , R) muni des normes ·∞ et ·1 , la
suite de fonctions (fn)n∈N∗ définie sur [0, 1] par :
fn (x) =
⎧
⎪
⎪
⎪
⎨
⎪
⎪
⎪
⎩
n
1 − n2
x
si x ∈
0,
1
n2
0 si x ∈
1
n2
, 1
Pour tout n ∈ N∗
, on a fn1 = n
1
n2
0
1 − n2
t
dt =
1
2n
et fn∞ = n, donc
lim
n→+∞
fn1 = 0 et lim
n→+∞
fn∞ = +∞, c’est-à-dire que cette suite converge vers
la fonction nulle pour la norme ·1 et diverge pour la norme ·∞ .
La notion de continuité dépend aussi du choix des normes sur E et F. Par
exemple, la fonction f → f (0) est continue de C0
([0, 1] , R) muni de ·∞ dans
(R, |·|) , mais non continue sur C0
([0, 1] , R) muni de ·1 . La continuité de cette
application linéaire, pour la norme ·∞ , résulte de l’inégalité |f (0)| ≤ f∞
vérifiée par toute fonction f dans C0
([0, 1] , R) . En considérant la suite de fonctions
(fn)n≥1 définie sur [0, 1] par :
fn (x) =
⎧
⎪
⎨
⎪
⎩
−nx + 1 si 0 ≤ x ≤
1
n
0 si
1
n
≤ x ≤ 1
on vérifie que lim
n→+∞
fn1 = 0 et lim
n→+∞
fn (0) = 1. L’application f → f (0) n’est
pas continue pour ·1 .
65. Semi-normes et normes 29
Définition 2.3. On dit qu’un espace vectoriel normé (E, ·) est complet,
ou que c’est un espace de Banach, si toute suite de Cauchy dans E est
convergente.
On admet le résultat suivant, où |·| désigne la valeur absolue sur R ou le module
sur C.
Théorème 2.1.
L’espace (K, |·|) est complet.
De ce résultat on déduit que tout espace vectoriel normé de dimension finie est
complet (corollaire 2.5).
On rappelle qu’une partie A d’un espace vectoriel réel E est convexe, si pour
tout couple (a, b) d’éléments de A, le segment [a, b] = {(1 − λ) a + λb | 0 ≤ λ ≤ 1}
est contenu dans A.
Théorème 2.2.
Un convexe dans un espace vectoriel normé est connexe.
Preuve. Si A est convexe dans E, pour a fixé dans A, il s’écrit A =
b∈A
[a, b] , avec
[a, b] connexe, pour tout b ∈ A, comme image du connexe [0, 1] par l’application
continue t → (1 − t) a + tb (lemme 1.1 et théorème 1.22). L’ensemble A est donc
connexe comme réunion de connexes d’intersection non vide.
On peut aussi utiliser le corollaire 1.1. Si f : A → {0, 1} est continue, pour tous
x
66. = y dans A la fonction ϕ : t → f ((1 − t) x + ty) est continue du connexe [0, 1]
dans {0, 1} , donc constante et f (x) = ϕ (0) = ϕ (1) = f (y) , donc f est constante
et A est connexe.
Corollaire 2.1. Les connexes (et convexes) de R sont les intervalles.
Preuve. Soit I un connexe de R non réduit à un point. Si I n’est pas un intervalle,
il alors existe a b dans I et c ∈ ]a, b[ tel que c /
∈ I et l’application f définie sur
I par f (x) = 1 si x c dans I, f (x) = 0 si x c dans I est continue (l’image
réciproque par f d’un ouvert de R est ]−∞, c[∩I, ]c, +∞[∩I ou ∅) non constante,
ce qui contredit la connexité de I. L’ensemble I est donc un intervalle, il est donc
convexe. Si I est un intervalle, il est convexe, donc connexe.
Les convexes sont des cas particuliers d’ensembles connexes par arcs.
Définition 2.4. On dit qu’une partie A de E est connexe par arcs, si pour
tout couple (a, b) d’éléments de A il existe une application continue γ de
[0, 1] dans A telle que γ (0) = a et γ (1) = b (deux points quelconques de A
peuvent être joints par un arc continu dans A).
67. 30 Espaces normés
Théorème 2.3.
Un ensemble connexe par arcs dans E est connexe.
Preuve. Si A est connexe par arcs dans E, pour a fixé dans A en désignant
pour tout x ∈ A par γx un arc continu joignant a et x dans A, on a alors A =
x∈A
γx ([0, 1]) , avec γx ([0, 1]) connexe pour tout x ∈ A, comme image du connexe
[0, 1] par l’application continue γx. L’ensemble A est donc connexe comme réunion
de connexes ayant tous en commun le point a = γx (0) (théorème 1.23).
2.2 Applications linéaires continues
L’étude de la continuité est simplifiée dans le cas particulier des applications
linéaires.
(E, ·) ,
F, ·
sont des espaces vectoriels normés, S (0, 1) [resp. B (0, 1)] est
la sphère unité [resp. la boule unité] de (E, ·) et u est une application linéaire
de (E, ·) dans
F, ·
.
Théorème 2.4.
Les assertions suivantes sont équivalentes :
1. u est continue en 0 ;
2. u est uniformément continue sur E ;
3. u est continue sur E ;
4. u est bornée sur S (0, 1) [resp. sur B (0, 1)] ;
5. il existe une constante réelle positive λ telle que u (x)
≤ λ x pour
tout x ∈ E.
Preuve. (1) ⇒ (2) Si u est continue en 0, il existe alors, pour tout ε 0, un réel
η 0 tel que :
(x ∈ E, x ≤ η) ⇒
u (x)
≤ ε
Utilisant la linéarité de u on déduit que pour x, y dans E tels que x − y ≤ η on
a u (x) − u (y)
≤ ε, ce qui prouve l’uniforme continuité de f sur E.
(2) ⇒ (3) est évidente.
(3) ⇒ (4) Si u est continue sur E elle est en particulier continue en 0 et il existe
un réel η 0 tel que :
(x ∈ E, x ≤ η) ⇒
u (x)
≤ 1
Pour tout x ∈ S (0, 1) [resp. tout x ∈ B (0, 1)], on a ηx = η [resp. ηx ≤ η] et
avec la linéarité de u on déduit que u (x)
≤
1
η
, ce qui signifie que u est bornée
sur S (0, 1) [resp. sur B (0, 1)].
(4) ⇒ (5) Si u est bornée sur S (0, 1) [resp. sur B (0, 1)], il existe alors un réel
λ 0 tel que u (x)
≤ λ pour tout x ∈ E tel que x = 1 [resp. x ≤ 1]. En
68. Applications linéaires continues 31
remarquant que pour tout vecteur x non nul dans E le vecteur
1
x
x est dans la
sphère (et la boule) unité de (E, ·) et en utilisant la linéarité de u on déduit que
u (x)
≤ λ x , cette inégalité étant aussi vérifiée pour x = 0.
(5) ⇒ (1) est évidente.
Une application linéaire continue est donc caractérisée par le fait d’être bornée
sur la sphère unité. Pour cette raison une telle application est également appelée
opérateur borné et la norme d’un tel opérateur borné est définie par N (u) =
sup
x∈S(0,1)
u (x)
.
Corollaire 2.2. Pour u surjective, les assertions suivantes sont équiva-
lentes :
1. u est un homéomorphisme ;
2. il existe des constantes réelles strictement positives α et β telles que :
∀x ∈ E, α x ≤ u (x)
≤ β x
3. il existe des constantes réelles strictement positives α et β telles que :
(x ∈ E, x = 1) ⇒
α ≤ u (x)
≤ β
Preuve. (1) ⇒ (2) Si u est un homéomorphisme de E sur F, les applications u
et u−1
sont alors continues et il existe deux constantes β 0 et γ 0 telles que :
∀x ∈ E, u (x)
≤ β x et ∀y ∈ F,
u−1
(y)
≤ γ y
Comme tout vecteur x de E s’écrit de manière unique x = u−1
(y) avec y dans F,
on déduit des inégalités précédentes que :
∀x ∈ E,
1
γ
x ≤ u (x)
≤ β x
(2) ⇒ (3) Cette implication est évidente.
(3) ⇒ (1) Les inégalités u (x)
≤ β pour tout x ∈ S (0, 1) signifient que
l’application linéaire u est continue. En remarquant que pour tout vecteur x non
nul dans E le vecteur
1
x
x est dans la sphère unité S (0, 1) et en utilisant la
linéarité de u on déduit de l’assertion 3. que :
∀x ∈ E {0} , α x ≤ u (x)
≤ β x
ces encadrements étant encore valables pour x = 0. Si u (x) = 0 on a alors né-
cessairement x = 0, (α 0), c’est-à-dire que l’application linéaire u est injective.
Cette application étant supposée surjective, on déduit que c’est un isomorphisme
de E sur F. Tout vecteur x de E s’écrivant de manière unique x = u−1
(y) avec
y dans F, les inégalités α x ≤ u (x)
pour tout x dans E sont équivalentes à
u−1
(y)
≤
1
α
y
pour tout y dans F, ce qui équivaut à la continuité de u−1
.
Le lemme qui suit nous est utile pour donner une caractérisation des formes
linéaires continues sur (E, ·) .
69. 32 Espaces normés
Lemme 2.2 Si ϕ est une forme linéaire non nulle sur E, il existe alors un vecteur
non nul a dans E tel que E = ker (ϕ) ⊕ Ka.
Preuve. La forme linéaire ϕ étant non nulle, il existe a ∈ E{0} tel que ϕ (a)
70. = 0.
Pour tout vecteur x ∈ E, le vecteur h = x −
ϕ (x)
ϕ (a)
a, est dans le noyau de ϕ et
en écrivant que x = h +
ϕ (x)
ϕ (a)
a on déduit que E = ker (ϕ) + Ka. Si x est dans
ker (ϕ) ∩ Ka, on a alors x = λa et λϕ (a) = ϕ (x) = 0 avec ϕ (a)
71. = 0, ce qui
entraîne λ = 0 et x = 0. On a donc ker (ϕ) ∩ Ka = {0} et E = ker (ϕ) ⊕ Ka.
Théorème 2.5.
Une forme linéaire ϕ sur E est continue si, et seulement si, son noyau
ker (ϕ) est fermé dans (E, ·) .
Preuve. Le résultat étant évident pour ϕ = 0, on suppose que ϕ est non nulle.
Si ϕ est une forme linéaire continue sur E, son noyau ker (ϕ) est alors fermé
comme image réciproque du fermé {0} par l’application continue ϕ. Supposons
réciproquement que ker (ϕ) soit fermé dans (E, ·) . Dire que ϕ est non continue
équivaut à dire qu’elle n’est pas bornée sur la sphère unité S (0, 1) de (E, ·)
(théorème 2.4). Dans ce cas on peut trouver une suite (xn)n∈N d’éléments de
S (0, 1) telle que |ϕ (xn)| ≥ n pour tout n ∈ N. En utilisant une décomposition
E = ker (ϕ) ⊕ Ka où ϕ (a)