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La Note d’analyse
est publiée sous la
responsabilité éditoriale
du commissaire général
de France Stratégie.
Les opinions exprimées
engagent leurs auteurs
et n’ont pas vocation
à refléter la position
du gouvernement.
Depuis 2000, les créations d’entreprise ont fortement progressé en France, passant de 200 000
par an environ à plus de 800 000 en 2019, avec une accélération depuis deux ans. Cette progres-
sion n’est due qu’en partie au développement des microentreprises : sur les seules entreprises
individuelles et les sociétés, les créations doublent sur la période.
Malgré ce dynamisme, selon l’enquête internationale Global Entrepreneurship Monitor (GEM), la pro-
portion de nouveaux entrepreneurs se situerait en France en dessous de la moyenne de l’OCDE ; au
même niveau qu’en Allemagne mais en retrait par rapport au Royaume-Uni et aux États-Unis. Para-
doxalement, la volonté d’entreprendre en France atteindrait un très haut niveau, supérieur même à
celui des États-Unis : en 2018, elle animerait 18,6 % des personnes âgées de 18 à 64 ans, contre
12,1 % outre-Atlantique. Il y aurait donc une importante réserve latente d’entrepreneurs en France.
Comment alors expliquer dans notre pays l’écart très élevé entre d’une part la volonté de créer
une entreprise et l’acte de créer une entreprise ? Cette note tente de répondre à la question à
partir des données individuelles disponibles les plus récentes de l’enquête GEM (2014 lors de la
rédaction de cette note), en modélisant la probabilité de devenir entrepreneur et en décomposant
la transition vers l’entrepreneuriat en deux étapes : la volonté d’entreprendre et le passage à l’acte.
Plusieurs résultats peuvent être mis en évidence. À volonté d’entreprendre donnée, la France
tend à sous-performer dans la création d’entreprise et ce même en contrôlant par un ensemble de
caractéristiques individuelles. Ce moindre passage à l’acte ne s’explique pas par un effet de struc-
ture de la population mais plutôt par un « effet pays », qui comprend un ensemble de facteurs ins-
titutionnels, réglementaires, économiques et culturels. La loi Pacte promulguée en mai 2019, dont
les effets seront appréciés sur la durée, et une fois la crise du Covid derrière nous, pourrait réduire
cet effet pays en améliorant les conditions de création et de développement de l’entreprise.
AVRIL
2020
n°87
LANOTED’ANALYSE
Christel Gilles
Antoine Baena
Département Économie
Alain Trannoy
Conseiller scientifique, EHESS
Création d’entreprise :
de la volonté au passage à l’acte
5
10
15
2005 2010 2015
%Volonté
Allemagne États-Unis France OCDE Royaume-Uni
Part (en %) des personnes
ayant la volonté d’entreprendre
20
Lecture : en 2005 en France, 14 % des individus de 18 à 64 ans souhaitaient créer une entreprise dans les trois prochaines
années (graphique de gauche). En 2010, en France, 2 % de la population âgée de 18-64 ans étaient de nouveaux entrepreneurs
(graphique de droite).
Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie (courbes lissées)
1
2
3
2005 2010 2015
4
Part (en %)
des nouveaux entrepreneurs
5
%Nouveauxentrepreneurs
2002 2018 2001 2018
INTRODUCTION
Depuis Schumpeter, de nombreux travaux ont mis en évi-
dence le rôle positif de l’entrepreneuriat sur la croissance
économique. Ils ont également souligné l’importance de la
création d’entreprise dans la dynamique de l’innovation1
.
Mieux comprendre les ressorts de l’entrepreneuriat et la
démographie des entreprises, c’est donc déjà en partie
éclairer les différentiels de croissance entre pays. C’est
aussi apporter une contribution aux réformes visant à
encourager la création d’entreprise, dans le sillage de la loi
Pacte promulguée en mai 20192
.
Le dynamisme entrepreneurial d’un pays ne se mesure
pas seulement à son taux de création d’entreprise. Il se
caractérise aussi par les attitudes et les aspirations de la
population vis-à-vis de l’entrepreneuriat. Or c’est précisé-
ment ce que permet d’étudier le Global Monitoring Entrepre-
neurship (GEM), la plus ancienne et la plus importante base
de données internationale sur l’entrepreneuriat, qui procède
d’une enquête annuelle réalisée auprès de plus de 200 000
personnes dans les pays de l’OCDE depuis 1999 (voir enca-
dré méthodologique). Cette enquête permet notamment
d’identifier les individus et leurs caractéristiques aux phases
successives de l’entrepreneuriat. Pour cette note, trois
modèles économétriques relatifs à chacune des étapes — la
volonté de créer, le passage à l’acte et la création d’entre-
prise — sont estimés sur les 29 pays de l’OCDE au cours de
deux périodes, 2002-2004 et 2012-2014. Le principal
apport de la méthodologie employée est d’estimer la proba-
bilité pour un individu de concrétiser sa volonté de créer une
entreprise — inobservée dans l’enquête GEM —, en s’appuyant
sur trois catégories de caractéristiques individuelles : les
variables sociodémographiques, les variables psychologiques
et les variables de perception. Pour ce faire, on a construit
un pseudo-panel d’individus ayant créé une entreprise et
ayant eu la volonté de le faire deux ans auparavant3
. Au
final, les modèles estimés pour l’OCDE permettent d’appré-
hender le rôle des effets de structure de la population dans
la moindre performance de la France en matière de créa-
tions d’entreprise, par comparaison avec trois pays, les États-
Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne.
La note s’efforce d’abord de cerner la relation qu’entre-
tiennent les Français avec l’entrepreneuriat, le dynamisme
récent cachant mal un fort hiatus entre volonté d’entre-
prendre et entrepreneuriat effectif (partie 1). Il s’agit ensuite
d’expliquer cet atypisme français en termes de passage à
l’acte en étudiant les caractéristiques individuelles des
entrepreneurs (partie 2). On tente enfin de faire la part
des facteurs liés à la composition de la population de ceux
liés au contexte national (éducatif, institutionnel, régle-
mentaire, etc.) (partie 3).
FRANCE STRATÉGIE
www.strategie.gouv.fr
2
1. Voir par exemple Aghion P. (2015), « Les énigmes de la croissance », Leçon inaugurale au Collège de France, octobre ; et Aghion P. (2016), Repenser la croissance
économique, Paris, Fayard.
2. Voir France Stratégie/Comité de suivi et d’évaluation de la loi PACTE (2019), Rapport méthodologique, décembre.
3. Voir encadré 1 et l'annexe technique disponible sur le site de France Stratégie.
4. Prêtée à George Bush Jr, la citation est peut-être apocryphe.
LA NOTE D’ANALYSE
AVRIL 2020 - N°87
LES FRANÇAIS
ET LA CRÉATION D’ENTREPRISE
Il est loin le temps — début des années 2000 — où un pré-
sident américain pouvait dire4
: « The problem with the
French is that they don’t have a word for “entrepreneur”».
Vingt ans plus tard, l’esprit d’entreprise a fait du chemin.
Un boom entrepreneurial ?
Selon l’Insee, le nombre de créations d’entreprise en France
a bondi de 200 000 à 815 000 entre 2000 et 2019 (gra-
phique 1). La progression irrégulière rend compte de
chocs à la fois conjoncturels et structurels, aux effets com-
plexes à identifier : après un pic à 622 000 en 2010, le
nombre de créations atteint un point bas à 525 000 en
2015, avant de remonter vers la barre des 800 000. Ces
chiffres impressionnants témoignent d’un rattrapage, ali-
menté par des changements institutionnels en faveur de la
création d’entreprise, notamment l’adoption de la loi Dutreil
pour l’initiative économique en 2003 et l’instauration du
statut d’autoentrepreneur en 2009. De fait, ce régime sim-
plifié — transformé depuis en micro-entrepreneur — explique
à lui seul une bonne partie du nouveau dynamisme français :
presque la moitié des entreprises créées en 2019 le sont
sous cette forme juridique. Il n’en demeure pas moins que,
même en excluant les microentreprises, le nombre de créa-
tions d’entreprises double de 2000 à 2019.
Une nouvelle culture entrepreneuriale ?
Au-delà des chiffres de créations d’entreprise, l’enquête
GEM révèle à quel point l’image que les Français se font de
l’entrepreneuriat s’est améliorée au cours des deux der-
nières décennies. La France rejoint ainsi la moyenne des
pays de l’OCDE. Sur la période 2012-2014, 61 % environ
des Français âgés de 18 à 64 ans déclarent que l’entre-
preneuriat est perçu dans la société comme un choix de
Graphique 1 — Créations brutes d’entreprises
0
100
200
300
400
500
600
700
800
900
2001-T1
2002-T1
2003-T1
2004-T1
2005-T1
2006-T1
2007-T1
2008-T1
2009-T1
2010-T1
2011-T1
2012-T1
2013-T1
2014-T1
2015-T1
2016-T1
2017-T1
2018-T1
2019-T1
Enmilliers,glissementssur4trimestres
Nombre de créations brutes d'entreprises
Ensemble Hors micro-entreprises Micro-entreprises
Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles.
Source : Insee, Sirène, Répertoire des entreprises et des établissements
T4-2008
T1-2013 T2-2017
T2-2017
T4-2015
T1-2010
FRANCE STRATÉGIE
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3
carrière désirable, contre 56 % en moyenne dans l’OCDE,
54 % au Royaume-Uni, 50 % en Allemagne et 65 % aux
États-Unis. Près des trois quarts des Français considèrent
que l’entrepreneuriat est associé à un statut social élevé,
plus que dans l’OCDE en moyenne mais autant qu’aux
États-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne. L’entrepre-
neuriat est néanmoins perçu comme moins valorisé par
les médias en France, et cette opinion évolue peu depuis
2000. De manière agrégée, c’est en France que la vision
de l’entrepreneuriat a le plus progressé entre 2002-2004
et 2012-2014 : la moyenne de réponses positives aux
trois questions ci-dessus y a augmenté de 15 %, contre
10 % aux États-Unis. L’OCDE, le Royaume-Uni et l’Allemagne
n’ont pas connu quant à eux de modification significative.
Si le regard porté sur l’entreprise a résolument changé, les
progrès sont plus modestes s’agissant de la perception
qu’ont les Français de leur potentiel entrepreneurial. À la
question « Déclarez-vous avoir le savoir, les compétences
et l’expérience nécessaires pour démarrer une affaire ? »,
seul un tiers d’entre eux répond positivement. C’est autant
qu’en Allemagne mais 10 points de moins qu’au Royaume-
Uni et dans l’OCDE en moyenne, et 20 points de moins
qu’aux États-Unis. L’écart est moindre pour l’aversion au
risque : à la question « La peur de l’échec vous empêche-t-elle
de créer une entreprise ? », 46 % des Français répondent
par l’affirmative, soit autant qu’en moyenne dans les pays
de l’OCDE et 10 points de plus qu’aux États-Unis.
En ce qui concerne leur perception des opportunités entre-
preneuriales, le bilan est mitigé. Seulement un Français sur
trois environ répond positivement à la question « Jugez-vous
qu’il y aura de bonnes opportunités pour démarrer une affaire
là où vous vivez dans les six prochains mois ? », contre
près d’un sur deux aux États-Unis. En revanche, plus d’un
Français sur trois connaît un entrepreneur, ce qui consti-
tue un début de capital social : c’est plus que dans les trois
autres pays étudiés et qu’en moyenne dans l’OCDE.
Volonté d’entreprendre… ou velléité ?
Sur un point précis, la France a accompli un bond specta-
culaire. En 2018, selon les données agrégées les plus récentes,
18,6 % des Français souhaitaient devenir entrepreneur, soit
sixfoisplusqu’en2000.C’estmieuxqu’auxÉtats-Unis(12,1%),
trois fois plus qu’en Allemagne et deux fois et demie plus
qu’au Royaume-Uni (graphique de gauche, page 1). La France
est de fait le pays où cette volonté d’entreprendre a le plus
progressé depuis 2000. Il faut sans doute y voir la traduction
des changements structurels qu’a connus la société française
sur la période, notamment sa nouvelle perception de l’entre-
preneuriat et l’impact positif de certains textes législatifs
qui ont abaissé les barrières à l’entrée pour devenir entre-
preneur (loi Dutreil et statut d’autoentrepreneur).
Cependant, la réalité des chiffres est moins flatteuse. De
fait, malgré cet appétit louable, les Français entreprennent
moins. Entre 2012 et 2014, seulement 1,6 % des Français
en âge de travailler avaient créé une entreprise dans les
trois années précédentes, contre 4 % environ aux États-Unis
et au Royaume-Uni, 3,4 % dans l’OCDE et 2,1 % en Allemagne
(graphique de droite, page 1). Selon les données de la base
GEM, la probabilité d’être un nouvel entrepreneur en France
est de moitié égale à celle calculée aux États-Unis et plus
faible également qu’au Royaume-Uni ; en revanche, depuis
une dizaine d’années, la France fait jeu égal avec l’Alle-
magne. Les chiffres ne sont guère meilleurs si on élargit
aux entrepreneurs établis depuis plus de trois ans : ils ne
sont que 3,3 % en France, contre 7,8 % aux États-Unis, 7,1 %
dans l’OCDE, 6,6 % au Royaume-Uni et 5 % en Allemagne.
Comme l’indique le graphique de droite, page 1, les écarts
entre la France et les autres pays, très importants jusqu’en
2005 font place malgré tout à un phénomène de rattra-
page entre 2005 et 2012. Ce mouvement peut s’expli-
quer par les effets conjugués des réformes précitées et de
la crise financière de 2009 qui joue ailleurs un rôle de
frein, en particulier aux États-Unis. Les données GEM qui
s’arrêtent en 20185
ne permettent pas de rendre justice
au sursaut des années 2018 et 2019 qui indiqueraient
que la France fait désormais mieux que l’Allemagne.
De fait, les Français concrétisent moins qu’ailleurs leur
volonté en acte. Entre 2012 et 2014, moins d’un individu
sur dix ayant l’envie d’entreprendre a finalement créé son
entreprise, contre un sur quatre en moyenne dans les
pays de l’OCDE et près d’un sur deux au Royaume-Uni (ta-
bleau 1). Les Britanniques sont ainsi cinq fois plus nom-
breux que les Français à réaliser leur ambition… Et le fait
n’a rien de nouveau : en 2012-2014, le nombre de nou-
veaux entrepreneurs rapporté à celui des personnes
ayant la volonté d’entreprendre était de 9,4 % en France
contre 24,5 % dans l’OCDE (tableau 1) ; dix ans plus tôt,
ces chiffres étaient de 13,3 % et 28,6 %. Comment expli-
quer l’existence en France d’un tel écart entre la volonté
de créer son entreprise et le passage à l’acte ?
2002-2004 2012-2014 2002-2004 2012-2014 2002-2004 2012-2014 2002-2004 2012-2014 2002-2004 2012-2014
28,60 % 24,5 % 13,3 % 9,4 % 31,6 % 24,2 % 38,3 % 45,8 % 27,6 % 23,6 %
OCDE France États-Unis Royaume-Uni Allemagne
Tableau 1 — Nombre de nouveaux entrepreneurs rapporté à celui des individus ayant la volonté d’entreprendre, en %
Champ : individus âgés de 18 à 64 ans. - Lecture : en France, le nombre de nouveaux entrepreneurs représente 9,4 % des individus ayant la volonté de créer une
entreprise, contre 24,2 % aux États-Unis, pour la période 2012-2014. - Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie
5. La méthode de lissage utilisée dans le graphique de droite, page 1, masque la vigueur du redressement amorcé en 2018
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4
LA NOTE D’ANALYSE
AVRIL 2020 - N°87
Encadré 1 — Méthode
I. Les quatre stades de l’entrepreneuriat selon le
Global Entrepreneurship Monitor6
1 - La volonté d’entreprendre : l’individu a répondu positive-
ment à la question « avez-vous comme projet, seul ou avec
d’autres personnes, de démarrer une nouvelle entreprise dans
les trois années à venir ou d’obtenir le statut d’indépendant ? ».
2 - L’entrepreneur émergent : l’individu est en train de lancer
une entreprise dont il serait le propriétaire mais qui n’a pas
encore versé de rémunérations, salaires, profits ni paiements
en nature. L’entrepreneur émergent est en train de créer son
entreprise mais celle-ci n’existe pas encore légalement.
3 - Le nouvel entrepreneur : l’individu a créé une entre-
prise depuis au plus 42 mois et s’est versé depuis moins
de 3 mois une rémunération.
4 - L’entrepreneur établi : l’individu a créé une entreprise
depuis au moins 42 mois et s’est versé depuis plus de
3 ans une rémunération.
II. Les transitions de l’entrepreneuriat dans l’étude
L’étude s’intéresse à trois transitions : celle qui conduit à
avoir la volonté d’entreprendre ; celle qui mène de cette
volonté au stade de nouvel entrepreneur, que l’on nomme
« passage à l’acte » ; enfin une troisième transition qui
étudie la création d’entreprise en population générale.
Chacune est étudiée à partir d’un modèle différent.
III. Les données : L’analyse est réalisée à partir des
données du Global Entrepreneurship Monitor (GEM)
issues de l’enquête annuelle harmonisée dans un ensem-
ble de pays (dix en 1999, plus de cent aujourd’hui) et réal-
isée auprès de la population en âge de travailler.
L’échantillon sélectionné comporte l’ensemble des pays de
l’OCDE présents dans la base GEM soit 29 pays sur 35 sur la
dernière période d’étude disponible pour les données indivi-
duelles, 2012-2014. L’analyse porte ainsi sur deux sous-péri-
odes, 2002-2004 et 2012-2014, afin d’étudier l’évolution des
caractéristiques des entrepreneurs sur une période de dix ans
en moyennant les chocs conjoncturels. La base du sondage est
le recensement de la population adulte de chaque pays.
L’échantillon de l’étude se compose de 230 000 individus
en 2002-2004 et de 264 000 individus en 2012-2014
pour l’ensemble des 29 pays de l’OCDE, dont respective-
ment 8 800 et 6 400 en France.
Les variables utilisées dans l’étude : le questionnaire (2010)
de l’enquête GEM réalisée auprès de la population adulte7
comprend 100 questions. Les données individuelles qui en
sont issues peuvent être regroupées en trois catégories.
• Les variables sociodémographiques : le pays, le sexe, l’âge
et le niveau d’éducation.
• Les variables psychologiques et sociales : l’auto-percep-
tion des compétences (« déclarez-vous avoir le savoir, les
compétences et l’expérience nécessaires pour démarrer
une affaire ? »), la perception d’opportunités entrepreneuri-
ales (« Jugez-vous qu’il y aura de bonnes opportunités pour
démarrer une affaire là où vous vivez dans les six prochains
mois ? ») ; l’aversion au risque (« La peur de l’échec vous
empêche-t-elle de démarrer une affaire ? ») et la connais-
sance dans l’entourage d’au moins un entrepreneur, ce qui
peut se rapprocher d’un capital social entrepreneurial.
• Les variables de perception de l’entrepreneuriat : l’entre-
preneuriat est perçu dans la société comme un choix de
carrière désirable ou non ; l’entrepreneuriat est associé à un
statut social élevé et respecté dans la société ou non ; et
les médias publics relaient régulièrement l’histoire de succès
de startups ou non.
IV. Les modèles estimés pour l’OCDE
avec des effets fixes pays : Trois modèles logistiques
sont développés dans l’étude pour estimer les trois
probabilités8
décrites précédemment (voir annexe tech-
nique). Le premier modèle estime la probabilité « d’avoir
la volonté d’entreprendre » à partir des caractéristiques
individuelles détaillées ci-avant. Le deuxième estime la
probabilité de « passer à l’acte », que l’on définit comme
la probabilité de réussir à créer une entreprise (ou
d’être un « nouvel entrepreneur ») l’année n sachant
que l’individu avait la volonté d’entreprendre l’année
n-2. Ce modèle a conduit à créer un pseudo-panel sur
une période de 3 ans. Le troisième modèle « être un
nouvel entrepreneur » permet quant à lui d’évaluer
l’impact des caractéristiques individuelles sur la proba-
bilité d’avoir créé et de gérer une nouvelle entreprise
depuis moins de trois ans et demi (« être un nouvel
entrepreneur »).
2002-2004 2012-2014
Total Volonté Nouveaux
entrepreneurs
Entrepreneurs
établis
Total Volonté Nouveaux
entrepreneurs
Entrepreneurs
établis
OCDE 230 167 20 166 (9,8 %) 6 101 (2,8 %) 12 654 (5,6 %) 264 139 33 912 (13,9 %) 8 599 (3,4 %) 19 677 (7,1 %)
France 8 817 382 (8,3 %) 46 (1,1 %) 63 (1,5 %) 6 437 919 (17 %) 102 (1,6 %) 204 (3,4 %)
Champ : individus âgés de 18 à 64 ans. - Lecture : les données sont cumulées sur 3 ans. Sur les 264 139 individus enquêtés dans l’OCDE en 2012, 2013 et 2014,
8 599 étaient des nouveaux entrepreneurs, soit 1,6 % de la population âgée de 18 à 64 ans, en prenant en compte les poids associés à chaque individu pour s’assu-
rer de la représentativité de l’échantillon. - Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie
6. Pour les concepts et définitions retenus par l’enquête, se reporter au site de GEM. Voir aussi Bosma N., Reynolds P., Lopez-Garcia P., Autio E. et al. (2005), « Global
Entrepreneurship Monitor: Data collection design and implementation 1998-2003 », Small Business Economics, 24, p. 205-231 ; Torres O. et Eminet A. (2005), Global
Entrepreneurship Monitor: rapport 2003-2004 sur l’entrepreneuriat en France et dans le monde, EMLyon Business School.
7. Voir sur le site de GEM
8. Quand nous employons le terme de probabilité, nous nous référons aux résultats des modèles. Dans le cas contraire, il s’agit de statistiques descriptives.
0,0
0,1
0,2
0,3
20 30 40 50 60
Graphique 2 — Probabilité selon l'âge de vouloir
créer une entreprise en 2012-2014
20 30 40 50 60
0,00
0,05
0,10
0,15
0,20
Graphique 3 — Probabilité selon l’âge d’être aux différents
stades de l’entrepreneuriat dans l'OCDE, en 2012-2014
Âge
Probabilité
Âge
Probabilité
Champ : individus âgés de 18 à 64 ans, 2012-2014. - Lecture : à 25 ans, la probabilité de vouloir entreprendre dans les trois prochaines années en France est égale
à 27 %, contre 22 % aux États-Unis (graphique 2). À 25 ans, en moyenne dans l'OCDE, la probabilité d’avoir la volonté de créer une entreprise est de 25 % (gra-
phique 3). - Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie (courbes lissées)
Allemagne
États-Unis
France
Royaume-Uni
Émergent
Établi
Nouveau
Volonté
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5
Encadré 2 — Données GEM et données
de la statistique publique
Global Entrepreneurship Monitor a pour objet premier d’élabo-
rer un cadre homogène permettant de comparer entre pays la
dynamique entrepreneuriale et d’en identifier les principaux
facteurs explicatifs. Les concepts retenus visent donc à lisser
les différences institutionnelles entre pays. Une première
différence avec la statistique publique provient du fait que
GEM étudie le dynamisme entrepreneurial d’un pays via le
nombre de créateurs d’entreprise rapporté à la population
adulte et non via le nombre de créations d’entreprise rapporté
au stock d’entreprises. Si on regarde les chiffres bruts, la
différence semble considérable : sur la période 2012-2014,
par an en moyenne, 205 000 « nouveaux entrepreneurs »
sont identifiés dans GEM, pour 545 000 créations d’entre-
prise selon les données publiques de l’Insee. On peut repérer
trois sources de biais : le pourcentage élevé de microentre-
prises recensées dans le Répertoire des entreprises et des
établissements mais n’ayant jamais démarré (38 % selon
l'enquête SINE de l'Insee) ; la pérennité des entreprises sur la
période, sachant que la moitié des microentreprises dispa-
raissent au bout de 3 ans ; enfin le pourcentage élevé d’entre-
preneurs ayant recréé une entreprise après une cessation (ils
apparaissent dans les statistiques de l’Insee mais non dans
GEM qui ne suit que les personnes physiques). Après correc-
tion de ces trois effets, l’écart relevé entre créations brutes
d’entreprise et nouveaux entrepreneurs est divisé environ
par 3. Ce rapprochement est également réalisé pour l’année
2018 à partir de l’indicateur agrégé. Concernant les évolu-
tions récentes de 2012 à 2017 constatées dans GEM, elles
sont globalement comparables à celles décrites par les données
OCDE sur les créations brutes d’entreprises pour la France,
l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis.
CARACTÉRISTIQUES INDIVIDUELLES
ET CRÉATION D’ENTREPRISE
Les différences de résultats entre la France et la moyenne
des pays de l’OCDE ne peuvent s’expliquer que par deux
éléments. Ou bien la population française est atypique en
termes de variables observables individuelles corrélées
avec les différentes phases de l’entrepreneuriat. Ou bien
la France — en tant que modèle économique, social, régle-
mentaire, fiscal et financier — apparaît globalement comme
un handicap en matière de création d’entreprise. On tente
dans cette partie de repérer l’atypisme de la France sur les
variables individuelles.
Pour créer une entreprise, il faut en avoir la volonté puis
passer à l’acte. On considère ici qu’un individu est passé à
l’acte lorsqu’il réussit à créer son entreprise sous les deux ans
qui suivent la volonté d’entreprendre. À l’aide de trois modèles
logistiques estimés pour l’OCDE (voir encadré méthodolo-
gique), il est possible d’identifier les caractéristiques indi-
viduelles — âge, sexe, niveau d’éducation, etc. — qui influent
en moyenne sur la volonté d’entreprendre, sur le passage
à l’acte et sur la probabilité d’être un nouvel entrepreneur.
L’âge a un effet très négatif sur la création d’entreprise
De manière générale, la volonté d’entreprendre diminue
avec l’âge (graphique 2). Toutefois, la pente apparaît plus
marquée en France. Les jeunes français âgés de 18 à 24 ans
affichent un grand appétit pour la création d’entreprise ;
en revanche, les seniors français sont moins enclins que
les américains à vouloir entreprendre — mais autant que
les seniors britanniques et allemands.
L’âge a un effet négatif presque linéaire sur la volonté
d’entreprendre : une personne ayant entre 55 et 64 ans a
une probabilité de vouloir créer une entreprise trois fois
inférieure à celle d’une personne entre 18 et 24 ans, et
plus de deux fois inférieure à celle d’une personne âgée
de 35 à 44 ans. Quant à la probabilité de passer à l’acte,
elle atteint son niveau maximal à 45 ans, avant de décroître
(graphique 3). La probabilité de devenir un nouvel entre-
preneur augmente jusqu’à 30 ans et diminue ensuite : à
55 ans, on a environ deux fois moins de chances de créer
une entreprise qu’à 30 ans. L’âge a également un impact sur
la probabilité d’être un entrepreneur établi, qui augmente
jusqu’à environ 50 ans pour diminuer progressivement
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6
LA NOTE D’ANALYSE
AVRIL 2020 - N°87
au-delà : à 18-24 ans, on a une probabilité 9 fois plus
faible d’être un entrepreneur établi qu’à 45-54 ans.
L’enquête GEM distingue par ailleurs les motivations des
créateurs d’entreprise : un entrepreneur par opportunité
crée son entreprise parce que l’occasion commerciale s’en
présente, un entrepreneur par nécessité n’a lui pas d’autre
option pour trouver du travail. Cette motivation a un impact
attesté sur le succès à terme (probabilité de survie, chiffre
d’affaires de l’entreprise)9
: elle peut aussi impacter la ges-
tion de l’entreprise, sa stratégie d’entrée sur le marché, ses
performances, ses chances de survie. Or on constate que les
jeunes créent plus souvent des entreprises par opportunité
et moins par nécessité10
: avoir entre 18 et 24 ans accroît
de 56 % la probabilité de créer une entreprise par opportu-
nité par rapport à la classe d’âge de référence (35-44 ans).
Au final, la France présente une structure de population
plus jeune et donc plus favorable à l’entrepreneuriat —
notamment d’opportunité — que celle de l’Allemagne, mais
moins favorable que celle des États-Unis, et du Royaume-
Uni dans une moindre mesure.
Être une femme réduit la volonté
d’entreprendre mais pas le passage à l’acte
Sur la période 2012-2014, les femmes représentent 50 %
des 18-64 ans mais 42 % des personnes ayant la volonté
de créer une entreprise et 38 % des nouveaux entrepre-
neurs. Ces parts évoluent peu avec le temps. Ces constats
sont affinés par l’estimation des modèles qui indiquent
que les femmes ont une probabilité de créer une entre-
prise inférieure d’environ 20 % à celle des hommes. Cela
s’explique par une moindre volonté d’entreprendre et non
par un moindre passage à l’acte, ce dernier étant iden-
tique à celui des hommes. Ces résultats peuvent notam-
ment traduire une forme d’autocensure liée aux normes
sociales et aux stéréotypes de genre11
.
En France12
, depuis 1990, l’augmentation de l’emploi féminin
ne se traduit pas par une progression de même ampleur de
l’entrepreneuriat féminin, bien moins fréquent qu’aux
États-Unis et dans une moindre mesure qu’en Allemagne.
Toutefois, selon les données de la base GEM, l’année 2018
marque une nette rupture à la hausse de l’entrepreneuriat
féminin, qui rejoint les niveaux américains : il s’agira de vérifier
cette tendance dans le temps pour conclure à un changement
structurel. Enfin, l’âge accroît l’écart entre hommes et femmes
puisqu’une femme entre 55 et 64 ans a 34 % de chances en
moins de créer une entreprise qu’un homme du même âge.
Le niveau d’éducation joue positivement
sur la création d’entreprise
La probabilité de créer son entreprise augmente avec le
niveau d’éducation. À niveau bac + 5, une personne a deux
fois plus de chances d’entreprendre qu’une personne non
diplômée. Cet écart provient de la volonté de créer qui est
croissante avec le niveau d’éducation et non du passage à
l’acte qui n’est pas influencé par cette variable.
Par ailleurs, cet effet diplôme est plus important chez les
seniors que chez les jeunes. Cela peut rendre compte de la
structure de la population par niveau de diplôme, avec
d’une part un nivellement de la valeur relative du diplôme
et d’autre part un écart de compétences pour créer une
entreprise13
qui se creuse avec l’âge. Quoi qu’il en soit, un
senior détenteur d’un master a une probabilité de vouloir
créer une entreprise supérieure de presque 40 % à celle
d’un jeune de même niveau d’éducation. Cet écart ne se
retrouve pas dans le passage à l’acte mais dans la proba-
bilité de devenir un nouvel entrepreneur.
Selon l’OCDE, en France en 2018, 47 % environ des 25-34 ans
sont diplômés de l’enseignement supérieur, soit un peu
plus que la moyenne des pays de l’OCDE. Mais la France se
distingue surtout par un écart de niveau d’éducation très
élevé entre générations : moins d’un quart des 55-64 ans
sont diplômés du supérieur. Cela rend compte d’un phéno-
mène de massification de l’enseignement qui pourrait se
révéler globalement favorable à un rattrapage en matière
de dynamisme entrepreneurial dans les années à venir.
Les demandeurs d’emploi
plus enclins à créer leur entreprise
La situation professionnelle apparaît comme un facteur
majeur. Environ 12 % des personnes travaillant à temps
plein ont la volonté d’entreprendre, contre 9 % de ceux à
temps partiel, 3 % des retraités, 8 % des inactifs, 14 % des
étudiants et 19 % des chômeurs. Toutes choses égales
par ailleurs, les chômeurs ont donc une probabilité de vou-
loir entreprendre 2,2 fois supérieure à celle des individus
travaillant à plein temps. Avec un taux de chômage au
sens du BIT de 8,2 % (contre 5 % en moyenne dans l’OCDE
fin 2019) et des réformes successives favorisant la créa-
tion d’entreprise pour les demandeurs d’emploi, la France
présente les conditions d’un développement de l’entre-
preneuriat par nécessité14
. Ce fait est vérifié par la très
forte hausse du nombre d’autoentreprises — puis de micro-
entreprises — depuis leur création en 2009.
9. Caliendo M. et Kritikos A. S. (2019), « “I want to, but I also need to”: Start-ups resulting from opportunity and necessity », in Lehmann E. et Keilbach M. (eds), From
Industrial Organization to Entrepreneurship, Springer, Cham, p. 247-265.
10. Un travail en cours à partir de l’enquête SINE (« Système d’information sur les nouvelles entreprises », Insee) permettra d’approfondir l’étude des profils et des motivations
des créateurs d’entreprise selon l’âge : Flamand L., Gilles C. et Trannoy A. (2019), « Profils des créateurs d’entreprises seniors et performances des entreprises », mimeo.
11. Voir Akerlof G. A. et Kranton R.E. (2000), « Economics and identity », Quarterly Journal of Economics, vol. 115(3), août, p. 715-753 ; Bertrand M. (2011), « New perspectives
on gender », chapitre 17 du Handbook of Labor Economics ; Croson R. et Gneezy U. (2009), « Gender differences in preferences », Journal of Economic Literature, vol.
47(2), juin, p. 448-474.9.
12. Voir « Mind the 100 year gap » sur le site du World Economic Forum.
13. Voir notamment Flamand L., Gilles C. et Trannoy A. (2018), « Les salaires augmentent-ils vraiment avec l’âge ? », La Note d’analyse, n° 72, France Stratégie, novembre.
14. Laffineur C., Barbosa S. D., Fayolle A. et Nziali E. (2017), « Active labour market programs’ effects on entrepreneurship and unemployment », Small Business
Economics, vol. 49(4), Springer, décembre, p. 889-918.
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7
-8
-6
-4
-2
0
2
4
6
8
10
12
États-Unis
Royaume-Uni
Allemagne
Résidu
Variable psychologique
et sociale
Éducation
Âge
Genre
Effet fixe pays
-25
-20
-15
-10
-5
0
5
États-Unis
Royaume-Uni
Allemagne
États-Unis
Royaume-Uni
Allemagne
-3
-2,5
-2
-1,5
-1
-0,5
0
0,5
1
Graphique 4 — Contributions (en %) aux écarts de probabilité entre la France et les trois pays de référence
Volonté - Décomposition
de la différence de probabilité
Passer à l'acte - Décomposition
de la différence de probabilité
Être un nouvel entrepreneur - Décomposition
de la différence de probabilité
Champ : individus âgés de 18 à 64 ans, 2012-2014. - Lecture : 6 points de % de la différence de volonté d'entreprendre entre la France et les Etats-Unis sont
expliqués par l'effet pays. Les variables psychologiques et sociales de la population française abaissent la probabilité de vouloir entreprendre de 4 points par
rapport à la population américaine. Le niveau d’éducation et l’âge de la population française par rapport à la population américaine jouent très légèrement négative-
ment. - Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie
Facteurs psychologiques
Enfin, les facteurs psychologiques évoqués plus haut jouent
aussi fortement sur la probabilité de créer une entreprise. Par
exemple, lorsqu’un individu se perçoit comme « compétent »,
cette probabilité se trouve multipliée par cinq. À l’inverse, la
peur de l’échec réduit de 40 % la probabilité de créer une
entreprise, provenant d’une moindre volonté d’entreprendre
et d’un passage à l’acte plus faible. Penser que l’environne-
ment offre des opportunités commerciales à saisir accroît la
probabilité de créer une entreprise de 40 % environ, toutes
choseségalesparailleurs.Or,commeonl’avu,laFrancesedis-
tingue en comparaison internationale par une population qui
affiche une moindre confiance en ses capacités, ce qui contri-
bue à expliquer la plus faible proportion d’entrepreneurs.
Les variables de perception ont quant à elles un effet uni-
quement sur la volonté d’entreprendre, sans influencer la
probabilité globale de créer une entreprise. Ainsi, le fait de
penser que la société considère l’entrepreneuriat comme
un choix de carrière désirable accroît de 21 % la probabi-
lité qu’une personne souhaite devenir entrepreneur. Consi-
dérer que les médias renvoient une image positive de l’en-
trepreneuriat accroît cette probabilité de 9 %, contre 6 %
pour le fait de penser que l’entrepreneuriat est associé à
un statut social élevé. La bonne perception qu’ont les
Français de l’entrepreneuriat — à la fois élevée en niveau
et positive en tendance — est sans conteste un facteur qui
alimente leur désir entrepreneurial.
CONTEXTE NATIONAL
ET CRÉATION D’ENTREPRISE
La moindre création d’entreprise en France peut s’expli-
quer par deux catégories de facteurs. La première tient à
la composition ou à la structure de la population, qui pour-
rait être moins favorable à la création d’entreprise (avec
par exemple plus de seniors, de femmes, de peu diplômés,
d’individus ayant peur de l’échec). La seconde catégorie a
trait à l’environnement économique, réglementaire et
culturel d’un pays, qui pourrait être moins propice à l’en-
trepreneuriat.
La question posée est ici la suivante : les différences entre les
caractéristiques des Français (socio-démographiques, psy-
chologiques et sociales et de perception) et celles des Améri-
cains, Britanniques et Allemands expliquent-elles les écarts
dans la volonté d’entreprendre, le fait de passer à l’acte ou
d’être un nouvel entrepreneur ? Il ressort que les caractéris-
tiques des populations expliquent une partie minoritaire des
écarts de probabilité pour ce qui est de la volonté d’entre-
prendre et d’être un nouvel entrepreneur, et quasi nulle pour
ce qui est du passage à l’acte (sauf avec les États-Unis) (voir
encadré méthodologique). Le graphique 4 permet de visuali-
ser les principales caractéristiques qui jouent un rôle dans cet
effet de composition. Plus précisément, il permet d’expliquer
les écarts de probabilité pour les différentes transitions entre
la France et les trois pays de comparaison.
D’après la décomposition réalisée (graphique 3), la France
a une meilleure volonté d’entreprendre que les trois pays
de comparaison (écarts de probabilité positifs), principale-
ment en raison d’un effet pays très favorable (6 points de
pourcentage pour l’écart entre la France et les États-Unis
par exemple), en dépit d’une composition de la population
défavorable face aux États-Unis et au Royaume-Uni, et
neutre face à l’Allemagne.
Conformément au modèle réalisé, on observe que l’effet
de composition n’explique quasiment rien des différences
de passage à l’acte. L’écart est en fait totalement expli-
qué par l’effet fixe pays. Quand on analyse l’effet total
« être un nouvel entrepreneur », on constate que l’effet
France est négatif, car l’effet négatif sur le passage à l’acte
l’emporte sur celui positif sur la volonté d’entreprendre.
Il est possible de mobiliser ici l’enquête National Expert Survey
du Global Entrepreneurship Monitor15
. Cette enquête a recueilli
les perceptions d’un panel d’experts sur neuf domaines16
15. La méthode de lissage utilisée dans le graphique de droite, page 1, masque la vigueur du redressement amorcé en 2018.
16. Les neuf domaines comprennent notamment le financement de l’entrepreneuriat, les dispositifs d’aide aux entreprises, les infrastructures, le cadre réglementaire, la
formation à l’entrepreneuriat, etc.
CONCLUSION
La France affiche une sous-performance en matière de création d’entreprise, qui provient d’un moindre passage à
l’acte et non d’une moindre volonté de la part de la population. Le fait que la France soit moins bien positionnée
que les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne pour le passage à l’acte n’est pas lié à un effet de composition
de la population mais bien entièrement à un « effet pays ». Cet effet pays rend compte d’un ensemble de facteurs
institutionnels, réglementaires, économiques et culturels, qui nécessiteraient de plus amples travaux d’approfon-
dissement.
Les données récentes sur la création d’entreprise pour la période 2016-2019 indiquent toutefois des évolutions
positives. L’adoption de la Loi Pacte pourrait amplifier cette tendance. Si la crise du coronavirus vient lui imposer
un coup d’arrêt brutal, elle ne devrait cependant pas enrayer sur la durée une amélioration structurelle nourrie par
un fort désir d’entrepreneuriat dans une large fraction de la population française.
Mots clés : création d’entreprise, Global Entrepreneurship Monitor, aides à la création d’entreprise, comparaison internationale
Directeur de la publication : Gilles de Margerie, commissaire général ; directeur de la rédaction : Cédric Audenis, commissaire général adjoint
secrétaires de rédaction : Olivier de Broca, Sylvie Chasseloup ; dépôt légal : avril 2020 - N° ISSN 2556-6059 ;
contact presse : Matthias Le Fur, directeur du service Édition-Communication-Événements, 01 42 75 61 37, matthias.lefur@strategie.gouv.fr
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à la société civile et aux citoyens
www.strategie.gouv.fr @Strategie_Gouv france-strategie
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17. Eurydice (2016), Entrepreneurship Education at School in Europe: Eurydice Report, Publications office of the European Union.
18. Wilson K. E. (2008), « Entrepreneurship education in Europe », in Potter J. (ed.), Entrepreneurship and Higher Education, OECD Publishing, janvier, chap. 5
19. Il y en avait 400 aux États-Unis en 2004. Voir Katz J. A. (2004), Survey of Endowed Positions in Entrepreneurship and Related Fields in the United States, Ewing Marion
Kauffman Foundation, Kansas City, MO.
20. Voir Crofils C., Roussel C. et Vermandel (2019), « Améliorer la réglementation peut-il réduire le chômage structurel ? », Document de travail, n° 2019-05, FranceStratégie, novembre.
21. Cet indicateur est la moyenne d’un ensemble de sous-indicateurs tels que la complexité des procédures réglementaires, l’existence d’un système de licences et
permis, le poids des charges administratives pour les entreprises en phase de démarrage, la présence de coûts d’entrée dans certains marchés, la protection
réglementaire d’opérateurs historiques et l’existence de lois antitrust.
22. La variable « getting credit » de la base Doing Business de la Banque mondiale couvre deux aspects de l’accès au financement : la solidité des systèmes d’information
sur le crédit et l’efficacité des lois sur les garanties et la faillite pour faciliter les prêts.
23. La variable « paying taxes » de la base Doing Business de la Banque mondiale recense les impôts et les cotisations obligatoires qu’une entreprise doit payer au cours
d’une année donnée, ainsi que la charge administrative liée au paiement des impôts et des cotisations.
FRANCE STRATÉGIE – 20, AVENUE DE SÉGUR – TSA 90725 – 75334 PARIS CEDEX 07 TÉL. +(33)1 42 75 60 00
institutionnels qui encadrent le comportement entrepre-
neurial. Il en ressort que la France offre un environne-
ment moins adapté à l’entrepreneuriat. Ainsi, dans la
catégorie « Formation à l’entrepreneuriat en primaire et
secondaire », la France reçoit une note médiocre. Il sem-
blerait que les Français souhaitent fortement entre-
prendre mais ne savent pas comment s’y prendre,
ignorent les procédures ou n’aient pas les bases néces-
saires en gestion d’entreprise.
Le rapport Eurydice17
de la Commission européenne sur l’édu-
cation entrepreneuriale publié en 2014 tend à confirmer ces
résultats. Une comparaison internationale, du primaire au
lycée, montre que la France est un des pays les moins bien
classés, sans cours de sensibilisation ou de découverte de
l’entrepreneuriat. Plus globalement, la Fondation européenne
pour la recherche entrepreneuriale18
soulignait en 2008 le
retard pris sur les États-Unis, en relevant l’absence en Europe
de diplôme, de formation ou de statut étudiant spécifique à
l’entrepreneuriat. En France, par exemple, le statut d’« étu-
diant entrepreneur » a été créé seulement en 2014, quand
l’équivalent américain existait avant les années 1990. Il y
aurait quatre fois moins de chaires entrepreneuriales dans
les universités européennes qu’aux États-Unis19
.
Les bases de données PMR (Product Market Regulation)
de l’OCDE et Doing Business de la Banque mondiale
apportent un éclairage complémentaire20
. Si on en croit
l’indicateur de charges administratives pour les entre-
prises en phase de démarrage21
de la base PMR, il serait
plus compliqué de créer une nouvelle entreprise en
France qu’en moyenne dans les pays de l’OCDE. La base
Doing Business de la Banque mondiale fournit quant à elle
des informations sur la facilité d’accès au crédit22
, sur le
taux d’imposition des entreprises et sur la charge adminis-
trative liée aux paiements23
. Sur ces deux indicateurs, la
France est encore une fois mal placée parmi les pays de
l’OCDE à hauts revenus : 104e
sur 190 pour l’accès au
crédit, 61e
sur 190 pour le taux d’imposition des nouvelles
entreprises et la facilité à payer les impôts. Au total, le
niveau de réglementation, d’imposition et la difficulté
d’accès au crédit sont autant d’éléments qui s’ajoutent au
reste pour expliquer le relatif faible pourcentage de nou-
veaux entrepreneurs en France.

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Note d'analyse - Création d'entreprise : de la volonté au passage à l'acte

  • 1. www.strategie.gouv.fr La Note d’analyse est publiée sous la responsabilité éditoriale du commissaire général de France Stratégie. Les opinions exprimées engagent leurs auteurs et n’ont pas vocation à refléter la position du gouvernement. Depuis 2000, les créations d’entreprise ont fortement progressé en France, passant de 200 000 par an environ à plus de 800 000 en 2019, avec une accélération depuis deux ans. Cette progres- sion n’est due qu’en partie au développement des microentreprises : sur les seules entreprises individuelles et les sociétés, les créations doublent sur la période. Malgré ce dynamisme, selon l’enquête internationale Global Entrepreneurship Monitor (GEM), la pro- portion de nouveaux entrepreneurs se situerait en France en dessous de la moyenne de l’OCDE ; au même niveau qu’en Allemagne mais en retrait par rapport au Royaume-Uni et aux États-Unis. Para- doxalement, la volonté d’entreprendre en France atteindrait un très haut niveau, supérieur même à celui des États-Unis : en 2018, elle animerait 18,6 % des personnes âgées de 18 à 64 ans, contre 12,1 % outre-Atlantique. Il y aurait donc une importante réserve latente d’entrepreneurs en France. Comment alors expliquer dans notre pays l’écart très élevé entre d’une part la volonté de créer une entreprise et l’acte de créer une entreprise ? Cette note tente de répondre à la question à partir des données individuelles disponibles les plus récentes de l’enquête GEM (2014 lors de la rédaction de cette note), en modélisant la probabilité de devenir entrepreneur et en décomposant la transition vers l’entrepreneuriat en deux étapes : la volonté d’entreprendre et le passage à l’acte. Plusieurs résultats peuvent être mis en évidence. À volonté d’entreprendre donnée, la France tend à sous-performer dans la création d’entreprise et ce même en contrôlant par un ensemble de caractéristiques individuelles. Ce moindre passage à l’acte ne s’explique pas par un effet de struc- ture de la population mais plutôt par un « effet pays », qui comprend un ensemble de facteurs ins- titutionnels, réglementaires, économiques et culturels. La loi Pacte promulguée en mai 2019, dont les effets seront appréciés sur la durée, et une fois la crise du Covid derrière nous, pourrait réduire cet effet pays en améliorant les conditions de création et de développement de l’entreprise. AVRIL 2020 n°87 LANOTED’ANALYSE Christel Gilles Antoine Baena Département Économie Alain Trannoy Conseiller scientifique, EHESS Création d’entreprise : de la volonté au passage à l’acte 5 10 15 2005 2010 2015 %Volonté Allemagne États-Unis France OCDE Royaume-Uni Part (en %) des personnes ayant la volonté d’entreprendre 20 Lecture : en 2005 en France, 14 % des individus de 18 à 64 ans souhaitaient créer une entreprise dans les trois prochaines années (graphique de gauche). En 2010, en France, 2 % de la population âgée de 18-64 ans étaient de nouveaux entrepreneurs (graphique de droite). Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie (courbes lissées) 1 2 3 2005 2010 2015 4 Part (en %) des nouveaux entrepreneurs 5 %Nouveauxentrepreneurs 2002 2018 2001 2018
  • 2. INTRODUCTION Depuis Schumpeter, de nombreux travaux ont mis en évi- dence le rôle positif de l’entrepreneuriat sur la croissance économique. Ils ont également souligné l’importance de la création d’entreprise dans la dynamique de l’innovation1 . Mieux comprendre les ressorts de l’entrepreneuriat et la démographie des entreprises, c’est donc déjà en partie éclairer les différentiels de croissance entre pays. C’est aussi apporter une contribution aux réformes visant à encourager la création d’entreprise, dans le sillage de la loi Pacte promulguée en mai 20192 . Le dynamisme entrepreneurial d’un pays ne se mesure pas seulement à son taux de création d’entreprise. Il se caractérise aussi par les attitudes et les aspirations de la population vis-à-vis de l’entrepreneuriat. Or c’est précisé- ment ce que permet d’étudier le Global Monitoring Entrepre- neurship (GEM), la plus ancienne et la plus importante base de données internationale sur l’entrepreneuriat, qui procède d’une enquête annuelle réalisée auprès de plus de 200 000 personnes dans les pays de l’OCDE depuis 1999 (voir enca- dré méthodologique). Cette enquête permet notamment d’identifier les individus et leurs caractéristiques aux phases successives de l’entrepreneuriat. Pour cette note, trois modèles économétriques relatifs à chacune des étapes — la volonté de créer, le passage à l’acte et la création d’entre- prise — sont estimés sur les 29 pays de l’OCDE au cours de deux périodes, 2002-2004 et 2012-2014. Le principal apport de la méthodologie employée est d’estimer la proba- bilité pour un individu de concrétiser sa volonté de créer une entreprise — inobservée dans l’enquête GEM —, en s’appuyant sur trois catégories de caractéristiques individuelles : les variables sociodémographiques, les variables psychologiques et les variables de perception. Pour ce faire, on a construit un pseudo-panel d’individus ayant créé une entreprise et ayant eu la volonté de le faire deux ans auparavant3 . Au final, les modèles estimés pour l’OCDE permettent d’appré- hender le rôle des effets de structure de la population dans la moindre performance de la France en matière de créa- tions d’entreprise, par comparaison avec trois pays, les États- Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne. La note s’efforce d’abord de cerner la relation qu’entre- tiennent les Français avec l’entrepreneuriat, le dynamisme récent cachant mal un fort hiatus entre volonté d’entre- prendre et entrepreneuriat effectif (partie 1). Il s’agit ensuite d’expliquer cet atypisme français en termes de passage à l’acte en étudiant les caractéristiques individuelles des entrepreneurs (partie 2). On tente enfin de faire la part des facteurs liés à la composition de la population de ceux liés au contexte national (éducatif, institutionnel, régle- mentaire, etc.) (partie 3). FRANCE STRATÉGIE www.strategie.gouv.fr 2 1. Voir par exemple Aghion P. (2015), « Les énigmes de la croissance », Leçon inaugurale au Collège de France, octobre ; et Aghion P. (2016), Repenser la croissance économique, Paris, Fayard. 2. Voir France Stratégie/Comité de suivi et d’évaluation de la loi PACTE (2019), Rapport méthodologique, décembre. 3. Voir encadré 1 et l'annexe technique disponible sur le site de France Stratégie. 4. Prêtée à George Bush Jr, la citation est peut-être apocryphe. LA NOTE D’ANALYSE AVRIL 2020 - N°87 LES FRANÇAIS ET LA CRÉATION D’ENTREPRISE Il est loin le temps — début des années 2000 — où un pré- sident américain pouvait dire4 : « The problem with the French is that they don’t have a word for “entrepreneur”». Vingt ans plus tard, l’esprit d’entreprise a fait du chemin. Un boom entrepreneurial ? Selon l’Insee, le nombre de créations d’entreprise en France a bondi de 200 000 à 815 000 entre 2000 et 2019 (gra- phique 1). La progression irrégulière rend compte de chocs à la fois conjoncturels et structurels, aux effets com- plexes à identifier : après un pic à 622 000 en 2010, le nombre de créations atteint un point bas à 525 000 en 2015, avant de remonter vers la barre des 800 000. Ces chiffres impressionnants témoignent d’un rattrapage, ali- menté par des changements institutionnels en faveur de la création d’entreprise, notamment l’adoption de la loi Dutreil pour l’initiative économique en 2003 et l’instauration du statut d’autoentrepreneur en 2009. De fait, ce régime sim- plifié — transformé depuis en micro-entrepreneur — explique à lui seul une bonne partie du nouveau dynamisme français : presque la moitié des entreprises créées en 2019 le sont sous cette forme juridique. Il n’en demeure pas moins que, même en excluant les microentreprises, le nombre de créa- tions d’entreprises double de 2000 à 2019. Une nouvelle culture entrepreneuriale ? Au-delà des chiffres de créations d’entreprise, l’enquête GEM révèle à quel point l’image que les Français se font de l’entrepreneuriat s’est améliorée au cours des deux der- nières décennies. La France rejoint ainsi la moyenne des pays de l’OCDE. Sur la période 2012-2014, 61 % environ des Français âgés de 18 à 64 ans déclarent que l’entre- preneuriat est perçu dans la société comme un choix de Graphique 1 — Créations brutes d’entreprises 0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 2001-T1 2002-T1 2003-T1 2004-T1 2005-T1 2006-T1 2007-T1 2008-T1 2009-T1 2010-T1 2011-T1 2012-T1 2013-T1 2014-T1 2015-T1 2016-T1 2017-T1 2018-T1 2019-T1 Enmilliers,glissementssur4trimestres Nombre de créations brutes d'entreprises Ensemble Hors micro-entreprises Micro-entreprises Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles. Source : Insee, Sirène, Répertoire des entreprises et des établissements T4-2008 T1-2013 T2-2017 T2-2017 T4-2015 T1-2010
  • 3. FRANCE STRATÉGIE www.strategie.gouv.fr 3 carrière désirable, contre 56 % en moyenne dans l’OCDE, 54 % au Royaume-Uni, 50 % en Allemagne et 65 % aux États-Unis. Près des trois quarts des Français considèrent que l’entrepreneuriat est associé à un statut social élevé, plus que dans l’OCDE en moyenne mais autant qu’aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne. L’entrepre- neuriat est néanmoins perçu comme moins valorisé par les médias en France, et cette opinion évolue peu depuis 2000. De manière agrégée, c’est en France que la vision de l’entrepreneuriat a le plus progressé entre 2002-2004 et 2012-2014 : la moyenne de réponses positives aux trois questions ci-dessus y a augmenté de 15 %, contre 10 % aux États-Unis. L’OCDE, le Royaume-Uni et l’Allemagne n’ont pas connu quant à eux de modification significative. Si le regard porté sur l’entreprise a résolument changé, les progrès sont plus modestes s’agissant de la perception qu’ont les Français de leur potentiel entrepreneurial. À la question « Déclarez-vous avoir le savoir, les compétences et l’expérience nécessaires pour démarrer une affaire ? », seul un tiers d’entre eux répond positivement. C’est autant qu’en Allemagne mais 10 points de moins qu’au Royaume- Uni et dans l’OCDE en moyenne, et 20 points de moins qu’aux États-Unis. L’écart est moindre pour l’aversion au risque : à la question « La peur de l’échec vous empêche-t-elle de créer une entreprise ? », 46 % des Français répondent par l’affirmative, soit autant qu’en moyenne dans les pays de l’OCDE et 10 points de plus qu’aux États-Unis. En ce qui concerne leur perception des opportunités entre- preneuriales, le bilan est mitigé. Seulement un Français sur trois environ répond positivement à la question « Jugez-vous qu’il y aura de bonnes opportunités pour démarrer une affaire là où vous vivez dans les six prochains mois ? », contre près d’un sur deux aux États-Unis. En revanche, plus d’un Français sur trois connaît un entrepreneur, ce qui consti- tue un début de capital social : c’est plus que dans les trois autres pays étudiés et qu’en moyenne dans l’OCDE. Volonté d’entreprendre… ou velléité ? Sur un point précis, la France a accompli un bond specta- culaire. En 2018, selon les données agrégées les plus récentes, 18,6 % des Français souhaitaient devenir entrepreneur, soit sixfoisplusqu’en2000.C’estmieuxqu’auxÉtats-Unis(12,1%), trois fois plus qu’en Allemagne et deux fois et demie plus qu’au Royaume-Uni (graphique de gauche, page 1). La France est de fait le pays où cette volonté d’entreprendre a le plus progressé depuis 2000. Il faut sans doute y voir la traduction des changements structurels qu’a connus la société française sur la période, notamment sa nouvelle perception de l’entre- preneuriat et l’impact positif de certains textes législatifs qui ont abaissé les barrières à l’entrée pour devenir entre- preneur (loi Dutreil et statut d’autoentrepreneur). Cependant, la réalité des chiffres est moins flatteuse. De fait, malgré cet appétit louable, les Français entreprennent moins. Entre 2012 et 2014, seulement 1,6 % des Français en âge de travailler avaient créé une entreprise dans les trois années précédentes, contre 4 % environ aux États-Unis et au Royaume-Uni, 3,4 % dans l’OCDE et 2,1 % en Allemagne (graphique de droite, page 1). Selon les données de la base GEM, la probabilité d’être un nouvel entrepreneur en France est de moitié égale à celle calculée aux États-Unis et plus faible également qu’au Royaume-Uni ; en revanche, depuis une dizaine d’années, la France fait jeu égal avec l’Alle- magne. Les chiffres ne sont guère meilleurs si on élargit aux entrepreneurs établis depuis plus de trois ans : ils ne sont que 3,3 % en France, contre 7,8 % aux États-Unis, 7,1 % dans l’OCDE, 6,6 % au Royaume-Uni et 5 % en Allemagne. Comme l’indique le graphique de droite, page 1, les écarts entre la France et les autres pays, très importants jusqu’en 2005 font place malgré tout à un phénomène de rattra- page entre 2005 et 2012. Ce mouvement peut s’expli- quer par les effets conjugués des réformes précitées et de la crise financière de 2009 qui joue ailleurs un rôle de frein, en particulier aux États-Unis. Les données GEM qui s’arrêtent en 20185 ne permettent pas de rendre justice au sursaut des années 2018 et 2019 qui indiqueraient que la France fait désormais mieux que l’Allemagne. De fait, les Français concrétisent moins qu’ailleurs leur volonté en acte. Entre 2012 et 2014, moins d’un individu sur dix ayant l’envie d’entreprendre a finalement créé son entreprise, contre un sur quatre en moyenne dans les pays de l’OCDE et près d’un sur deux au Royaume-Uni (ta- bleau 1). Les Britanniques sont ainsi cinq fois plus nom- breux que les Français à réaliser leur ambition… Et le fait n’a rien de nouveau : en 2012-2014, le nombre de nou- veaux entrepreneurs rapporté à celui des personnes ayant la volonté d’entreprendre était de 9,4 % en France contre 24,5 % dans l’OCDE (tableau 1) ; dix ans plus tôt, ces chiffres étaient de 13,3 % et 28,6 %. Comment expli- quer l’existence en France d’un tel écart entre la volonté de créer son entreprise et le passage à l’acte ? 2002-2004 2012-2014 2002-2004 2012-2014 2002-2004 2012-2014 2002-2004 2012-2014 2002-2004 2012-2014 28,60 % 24,5 % 13,3 % 9,4 % 31,6 % 24,2 % 38,3 % 45,8 % 27,6 % 23,6 % OCDE France États-Unis Royaume-Uni Allemagne Tableau 1 — Nombre de nouveaux entrepreneurs rapporté à celui des individus ayant la volonté d’entreprendre, en % Champ : individus âgés de 18 à 64 ans. - Lecture : en France, le nombre de nouveaux entrepreneurs représente 9,4 % des individus ayant la volonté de créer une entreprise, contre 24,2 % aux États-Unis, pour la période 2012-2014. - Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie 5. La méthode de lissage utilisée dans le graphique de droite, page 1, masque la vigueur du redressement amorcé en 2018
  • 4. FRANCE STRATÉGIE www.strategie.gouv.fr 4 LA NOTE D’ANALYSE AVRIL 2020 - N°87 Encadré 1 — Méthode I. Les quatre stades de l’entrepreneuriat selon le Global Entrepreneurship Monitor6 1 - La volonté d’entreprendre : l’individu a répondu positive- ment à la question « avez-vous comme projet, seul ou avec d’autres personnes, de démarrer une nouvelle entreprise dans les trois années à venir ou d’obtenir le statut d’indépendant ? ». 2 - L’entrepreneur émergent : l’individu est en train de lancer une entreprise dont il serait le propriétaire mais qui n’a pas encore versé de rémunérations, salaires, profits ni paiements en nature. L’entrepreneur émergent est en train de créer son entreprise mais celle-ci n’existe pas encore légalement. 3 - Le nouvel entrepreneur : l’individu a créé une entre- prise depuis au plus 42 mois et s’est versé depuis moins de 3 mois une rémunération. 4 - L’entrepreneur établi : l’individu a créé une entreprise depuis au moins 42 mois et s’est versé depuis plus de 3 ans une rémunération. II. Les transitions de l’entrepreneuriat dans l’étude L’étude s’intéresse à trois transitions : celle qui conduit à avoir la volonté d’entreprendre ; celle qui mène de cette volonté au stade de nouvel entrepreneur, que l’on nomme « passage à l’acte » ; enfin une troisième transition qui étudie la création d’entreprise en population générale. Chacune est étudiée à partir d’un modèle différent. III. Les données : L’analyse est réalisée à partir des données du Global Entrepreneurship Monitor (GEM) issues de l’enquête annuelle harmonisée dans un ensem- ble de pays (dix en 1999, plus de cent aujourd’hui) et réal- isée auprès de la population en âge de travailler. L’échantillon sélectionné comporte l’ensemble des pays de l’OCDE présents dans la base GEM soit 29 pays sur 35 sur la dernière période d’étude disponible pour les données indivi- duelles, 2012-2014. L’analyse porte ainsi sur deux sous-péri- odes, 2002-2004 et 2012-2014, afin d’étudier l’évolution des caractéristiques des entrepreneurs sur une période de dix ans en moyennant les chocs conjoncturels. La base du sondage est le recensement de la population adulte de chaque pays. L’échantillon de l’étude se compose de 230 000 individus en 2002-2004 et de 264 000 individus en 2012-2014 pour l’ensemble des 29 pays de l’OCDE, dont respective- ment 8 800 et 6 400 en France. Les variables utilisées dans l’étude : le questionnaire (2010) de l’enquête GEM réalisée auprès de la population adulte7 comprend 100 questions. Les données individuelles qui en sont issues peuvent être regroupées en trois catégories. • Les variables sociodémographiques : le pays, le sexe, l’âge et le niveau d’éducation. • Les variables psychologiques et sociales : l’auto-percep- tion des compétences (« déclarez-vous avoir le savoir, les compétences et l’expérience nécessaires pour démarrer une affaire ? »), la perception d’opportunités entrepreneuri- ales (« Jugez-vous qu’il y aura de bonnes opportunités pour démarrer une affaire là où vous vivez dans les six prochains mois ? ») ; l’aversion au risque (« La peur de l’échec vous empêche-t-elle de démarrer une affaire ? ») et la connais- sance dans l’entourage d’au moins un entrepreneur, ce qui peut se rapprocher d’un capital social entrepreneurial. • Les variables de perception de l’entrepreneuriat : l’entre- preneuriat est perçu dans la société comme un choix de carrière désirable ou non ; l’entrepreneuriat est associé à un statut social élevé et respecté dans la société ou non ; et les médias publics relaient régulièrement l’histoire de succès de startups ou non. IV. Les modèles estimés pour l’OCDE avec des effets fixes pays : Trois modèles logistiques sont développés dans l’étude pour estimer les trois probabilités8 décrites précédemment (voir annexe tech- nique). Le premier modèle estime la probabilité « d’avoir la volonté d’entreprendre » à partir des caractéristiques individuelles détaillées ci-avant. Le deuxième estime la probabilité de « passer à l’acte », que l’on définit comme la probabilité de réussir à créer une entreprise (ou d’être un « nouvel entrepreneur ») l’année n sachant que l’individu avait la volonté d’entreprendre l’année n-2. Ce modèle a conduit à créer un pseudo-panel sur une période de 3 ans. Le troisième modèle « être un nouvel entrepreneur » permet quant à lui d’évaluer l’impact des caractéristiques individuelles sur la proba- bilité d’avoir créé et de gérer une nouvelle entreprise depuis moins de trois ans et demi (« être un nouvel entrepreneur »). 2002-2004 2012-2014 Total Volonté Nouveaux entrepreneurs Entrepreneurs établis Total Volonté Nouveaux entrepreneurs Entrepreneurs établis OCDE 230 167 20 166 (9,8 %) 6 101 (2,8 %) 12 654 (5,6 %) 264 139 33 912 (13,9 %) 8 599 (3,4 %) 19 677 (7,1 %) France 8 817 382 (8,3 %) 46 (1,1 %) 63 (1,5 %) 6 437 919 (17 %) 102 (1,6 %) 204 (3,4 %) Champ : individus âgés de 18 à 64 ans. - Lecture : les données sont cumulées sur 3 ans. Sur les 264 139 individus enquêtés dans l’OCDE en 2012, 2013 et 2014, 8 599 étaient des nouveaux entrepreneurs, soit 1,6 % de la population âgée de 18 à 64 ans, en prenant en compte les poids associés à chaque individu pour s’assu- rer de la représentativité de l’échantillon. - Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie 6. Pour les concepts et définitions retenus par l’enquête, se reporter au site de GEM. Voir aussi Bosma N., Reynolds P., Lopez-Garcia P., Autio E. et al. (2005), « Global Entrepreneurship Monitor: Data collection design and implementation 1998-2003 », Small Business Economics, 24, p. 205-231 ; Torres O. et Eminet A. (2005), Global Entrepreneurship Monitor: rapport 2003-2004 sur l’entrepreneuriat en France et dans le monde, EMLyon Business School. 7. Voir sur le site de GEM 8. Quand nous employons le terme de probabilité, nous nous référons aux résultats des modèles. Dans le cas contraire, il s’agit de statistiques descriptives.
  • 5. 0,0 0,1 0,2 0,3 20 30 40 50 60 Graphique 2 — Probabilité selon l'âge de vouloir créer une entreprise en 2012-2014 20 30 40 50 60 0,00 0,05 0,10 0,15 0,20 Graphique 3 — Probabilité selon l’âge d’être aux différents stades de l’entrepreneuriat dans l'OCDE, en 2012-2014 Âge Probabilité Âge Probabilité Champ : individus âgés de 18 à 64 ans, 2012-2014. - Lecture : à 25 ans, la probabilité de vouloir entreprendre dans les trois prochaines années en France est égale à 27 %, contre 22 % aux États-Unis (graphique 2). À 25 ans, en moyenne dans l'OCDE, la probabilité d’avoir la volonté de créer une entreprise est de 25 % (gra- phique 3). - Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie (courbes lissées) Allemagne États-Unis France Royaume-Uni Émergent Établi Nouveau Volonté FRANCE STRATÉGIE www.strategie.gouv.fr 5 Encadré 2 — Données GEM et données de la statistique publique Global Entrepreneurship Monitor a pour objet premier d’élabo- rer un cadre homogène permettant de comparer entre pays la dynamique entrepreneuriale et d’en identifier les principaux facteurs explicatifs. Les concepts retenus visent donc à lisser les différences institutionnelles entre pays. Une première différence avec la statistique publique provient du fait que GEM étudie le dynamisme entrepreneurial d’un pays via le nombre de créateurs d’entreprise rapporté à la population adulte et non via le nombre de créations d’entreprise rapporté au stock d’entreprises. Si on regarde les chiffres bruts, la différence semble considérable : sur la période 2012-2014, par an en moyenne, 205 000 « nouveaux entrepreneurs » sont identifiés dans GEM, pour 545 000 créations d’entre- prise selon les données publiques de l’Insee. On peut repérer trois sources de biais : le pourcentage élevé de microentre- prises recensées dans le Répertoire des entreprises et des établissements mais n’ayant jamais démarré (38 % selon l'enquête SINE de l'Insee) ; la pérennité des entreprises sur la période, sachant que la moitié des microentreprises dispa- raissent au bout de 3 ans ; enfin le pourcentage élevé d’entre- preneurs ayant recréé une entreprise après une cessation (ils apparaissent dans les statistiques de l’Insee mais non dans GEM qui ne suit que les personnes physiques). Après correc- tion de ces trois effets, l’écart relevé entre créations brutes d’entreprise et nouveaux entrepreneurs est divisé environ par 3. Ce rapprochement est également réalisé pour l’année 2018 à partir de l’indicateur agrégé. Concernant les évolu- tions récentes de 2012 à 2017 constatées dans GEM, elles sont globalement comparables à celles décrites par les données OCDE sur les créations brutes d’entreprises pour la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis. CARACTÉRISTIQUES INDIVIDUELLES ET CRÉATION D’ENTREPRISE Les différences de résultats entre la France et la moyenne des pays de l’OCDE ne peuvent s’expliquer que par deux éléments. Ou bien la population française est atypique en termes de variables observables individuelles corrélées avec les différentes phases de l’entrepreneuriat. Ou bien la France — en tant que modèle économique, social, régle- mentaire, fiscal et financier — apparaît globalement comme un handicap en matière de création d’entreprise. On tente dans cette partie de repérer l’atypisme de la France sur les variables individuelles. Pour créer une entreprise, il faut en avoir la volonté puis passer à l’acte. On considère ici qu’un individu est passé à l’acte lorsqu’il réussit à créer son entreprise sous les deux ans qui suivent la volonté d’entreprendre. À l’aide de trois modèles logistiques estimés pour l’OCDE (voir encadré méthodolo- gique), il est possible d’identifier les caractéristiques indi- viduelles — âge, sexe, niveau d’éducation, etc. — qui influent en moyenne sur la volonté d’entreprendre, sur le passage à l’acte et sur la probabilité d’être un nouvel entrepreneur. L’âge a un effet très négatif sur la création d’entreprise De manière générale, la volonté d’entreprendre diminue avec l’âge (graphique 2). Toutefois, la pente apparaît plus marquée en France. Les jeunes français âgés de 18 à 24 ans affichent un grand appétit pour la création d’entreprise ; en revanche, les seniors français sont moins enclins que les américains à vouloir entreprendre — mais autant que les seniors britanniques et allemands. L’âge a un effet négatif presque linéaire sur la volonté d’entreprendre : une personne ayant entre 55 et 64 ans a une probabilité de vouloir créer une entreprise trois fois inférieure à celle d’une personne entre 18 et 24 ans, et plus de deux fois inférieure à celle d’une personne âgée de 35 à 44 ans. Quant à la probabilité de passer à l’acte, elle atteint son niveau maximal à 45 ans, avant de décroître (graphique 3). La probabilité de devenir un nouvel entre- preneur augmente jusqu’à 30 ans et diminue ensuite : à 55 ans, on a environ deux fois moins de chances de créer une entreprise qu’à 30 ans. L’âge a également un impact sur la probabilité d’être un entrepreneur établi, qui augmente jusqu’à environ 50 ans pour diminuer progressivement
  • 6. FRANCE STRATÉGIE www.strategie.gouv.fr 6 LA NOTE D’ANALYSE AVRIL 2020 - N°87 au-delà : à 18-24 ans, on a une probabilité 9 fois plus faible d’être un entrepreneur établi qu’à 45-54 ans. L’enquête GEM distingue par ailleurs les motivations des créateurs d’entreprise : un entrepreneur par opportunité crée son entreprise parce que l’occasion commerciale s’en présente, un entrepreneur par nécessité n’a lui pas d’autre option pour trouver du travail. Cette motivation a un impact attesté sur le succès à terme (probabilité de survie, chiffre d’affaires de l’entreprise)9 : elle peut aussi impacter la ges- tion de l’entreprise, sa stratégie d’entrée sur le marché, ses performances, ses chances de survie. Or on constate que les jeunes créent plus souvent des entreprises par opportunité et moins par nécessité10 : avoir entre 18 et 24 ans accroît de 56 % la probabilité de créer une entreprise par opportu- nité par rapport à la classe d’âge de référence (35-44 ans). Au final, la France présente une structure de population plus jeune et donc plus favorable à l’entrepreneuriat — notamment d’opportunité — que celle de l’Allemagne, mais moins favorable que celle des États-Unis, et du Royaume- Uni dans une moindre mesure. Être une femme réduit la volonté d’entreprendre mais pas le passage à l’acte Sur la période 2012-2014, les femmes représentent 50 % des 18-64 ans mais 42 % des personnes ayant la volonté de créer une entreprise et 38 % des nouveaux entrepre- neurs. Ces parts évoluent peu avec le temps. Ces constats sont affinés par l’estimation des modèles qui indiquent que les femmes ont une probabilité de créer une entre- prise inférieure d’environ 20 % à celle des hommes. Cela s’explique par une moindre volonté d’entreprendre et non par un moindre passage à l’acte, ce dernier étant iden- tique à celui des hommes. Ces résultats peuvent notam- ment traduire une forme d’autocensure liée aux normes sociales et aux stéréotypes de genre11 . En France12 , depuis 1990, l’augmentation de l’emploi féminin ne se traduit pas par une progression de même ampleur de l’entrepreneuriat féminin, bien moins fréquent qu’aux États-Unis et dans une moindre mesure qu’en Allemagne. Toutefois, selon les données de la base GEM, l’année 2018 marque une nette rupture à la hausse de l’entrepreneuriat féminin, qui rejoint les niveaux américains : il s’agira de vérifier cette tendance dans le temps pour conclure à un changement structurel. Enfin, l’âge accroît l’écart entre hommes et femmes puisqu’une femme entre 55 et 64 ans a 34 % de chances en moins de créer une entreprise qu’un homme du même âge. Le niveau d’éducation joue positivement sur la création d’entreprise La probabilité de créer son entreprise augmente avec le niveau d’éducation. À niveau bac + 5, une personne a deux fois plus de chances d’entreprendre qu’une personne non diplômée. Cet écart provient de la volonté de créer qui est croissante avec le niveau d’éducation et non du passage à l’acte qui n’est pas influencé par cette variable. Par ailleurs, cet effet diplôme est plus important chez les seniors que chez les jeunes. Cela peut rendre compte de la structure de la population par niveau de diplôme, avec d’une part un nivellement de la valeur relative du diplôme et d’autre part un écart de compétences pour créer une entreprise13 qui se creuse avec l’âge. Quoi qu’il en soit, un senior détenteur d’un master a une probabilité de vouloir créer une entreprise supérieure de presque 40 % à celle d’un jeune de même niveau d’éducation. Cet écart ne se retrouve pas dans le passage à l’acte mais dans la proba- bilité de devenir un nouvel entrepreneur. Selon l’OCDE, en France en 2018, 47 % environ des 25-34 ans sont diplômés de l’enseignement supérieur, soit un peu plus que la moyenne des pays de l’OCDE. Mais la France se distingue surtout par un écart de niveau d’éducation très élevé entre générations : moins d’un quart des 55-64 ans sont diplômés du supérieur. Cela rend compte d’un phéno- mène de massification de l’enseignement qui pourrait se révéler globalement favorable à un rattrapage en matière de dynamisme entrepreneurial dans les années à venir. Les demandeurs d’emploi plus enclins à créer leur entreprise La situation professionnelle apparaît comme un facteur majeur. Environ 12 % des personnes travaillant à temps plein ont la volonté d’entreprendre, contre 9 % de ceux à temps partiel, 3 % des retraités, 8 % des inactifs, 14 % des étudiants et 19 % des chômeurs. Toutes choses égales par ailleurs, les chômeurs ont donc une probabilité de vou- loir entreprendre 2,2 fois supérieure à celle des individus travaillant à plein temps. Avec un taux de chômage au sens du BIT de 8,2 % (contre 5 % en moyenne dans l’OCDE fin 2019) et des réformes successives favorisant la créa- tion d’entreprise pour les demandeurs d’emploi, la France présente les conditions d’un développement de l’entre- preneuriat par nécessité14 . Ce fait est vérifié par la très forte hausse du nombre d’autoentreprises — puis de micro- entreprises — depuis leur création en 2009. 9. Caliendo M. et Kritikos A. S. (2019), « “I want to, but I also need to”: Start-ups resulting from opportunity and necessity », in Lehmann E. et Keilbach M. (eds), From Industrial Organization to Entrepreneurship, Springer, Cham, p. 247-265. 10. Un travail en cours à partir de l’enquête SINE (« Système d’information sur les nouvelles entreprises », Insee) permettra d’approfondir l’étude des profils et des motivations des créateurs d’entreprise selon l’âge : Flamand L., Gilles C. et Trannoy A. (2019), « Profils des créateurs d’entreprises seniors et performances des entreprises », mimeo. 11. Voir Akerlof G. A. et Kranton R.E. (2000), « Economics and identity », Quarterly Journal of Economics, vol. 115(3), août, p. 715-753 ; Bertrand M. (2011), « New perspectives on gender », chapitre 17 du Handbook of Labor Economics ; Croson R. et Gneezy U. (2009), « Gender differences in preferences », Journal of Economic Literature, vol. 47(2), juin, p. 448-474.9. 12. Voir « Mind the 100 year gap » sur le site du World Economic Forum. 13. Voir notamment Flamand L., Gilles C. et Trannoy A. (2018), « Les salaires augmentent-ils vraiment avec l’âge ? », La Note d’analyse, n° 72, France Stratégie, novembre. 14. Laffineur C., Barbosa S. D., Fayolle A. et Nziali E. (2017), « Active labour market programs’ effects on entrepreneurship and unemployment », Small Business Economics, vol. 49(4), Springer, décembre, p. 889-918.
  • 7. FRANCE STRATÉGIE www.strategie.gouv.fr 7 -8 -6 -4 -2 0 2 4 6 8 10 12 États-Unis Royaume-Uni Allemagne Résidu Variable psychologique et sociale Éducation Âge Genre Effet fixe pays -25 -20 -15 -10 -5 0 5 États-Unis Royaume-Uni Allemagne États-Unis Royaume-Uni Allemagne -3 -2,5 -2 -1,5 -1 -0,5 0 0,5 1 Graphique 4 — Contributions (en %) aux écarts de probabilité entre la France et les trois pays de référence Volonté - Décomposition de la différence de probabilité Passer à l'acte - Décomposition de la différence de probabilité Être un nouvel entrepreneur - Décomposition de la différence de probabilité Champ : individus âgés de 18 à 64 ans, 2012-2014. - Lecture : 6 points de % de la différence de volonté d'entreprendre entre la France et les Etats-Unis sont expliqués par l'effet pays. Les variables psychologiques et sociales de la population française abaissent la probabilité de vouloir entreprendre de 4 points par rapport à la population américaine. Le niveau d’éducation et l’âge de la population française par rapport à la population américaine jouent très légèrement négative- ment. - Source : Global Entrepreneurship Monitor, calculs France Stratégie Facteurs psychologiques Enfin, les facteurs psychologiques évoqués plus haut jouent aussi fortement sur la probabilité de créer une entreprise. Par exemple, lorsqu’un individu se perçoit comme « compétent », cette probabilité se trouve multipliée par cinq. À l’inverse, la peur de l’échec réduit de 40 % la probabilité de créer une entreprise, provenant d’une moindre volonté d’entreprendre et d’un passage à l’acte plus faible. Penser que l’environne- ment offre des opportunités commerciales à saisir accroît la probabilité de créer une entreprise de 40 % environ, toutes choseségalesparailleurs.Or,commeonl’avu,laFrancesedis- tingue en comparaison internationale par une population qui affiche une moindre confiance en ses capacités, ce qui contri- bue à expliquer la plus faible proportion d’entrepreneurs. Les variables de perception ont quant à elles un effet uni- quement sur la volonté d’entreprendre, sans influencer la probabilité globale de créer une entreprise. Ainsi, le fait de penser que la société considère l’entrepreneuriat comme un choix de carrière désirable accroît de 21 % la probabi- lité qu’une personne souhaite devenir entrepreneur. Consi- dérer que les médias renvoient une image positive de l’en- trepreneuriat accroît cette probabilité de 9 %, contre 6 % pour le fait de penser que l’entrepreneuriat est associé à un statut social élevé. La bonne perception qu’ont les Français de l’entrepreneuriat — à la fois élevée en niveau et positive en tendance — est sans conteste un facteur qui alimente leur désir entrepreneurial. CONTEXTE NATIONAL ET CRÉATION D’ENTREPRISE La moindre création d’entreprise en France peut s’expli- quer par deux catégories de facteurs. La première tient à la composition ou à la structure de la population, qui pour- rait être moins favorable à la création d’entreprise (avec par exemple plus de seniors, de femmes, de peu diplômés, d’individus ayant peur de l’échec). La seconde catégorie a trait à l’environnement économique, réglementaire et culturel d’un pays, qui pourrait être moins propice à l’en- trepreneuriat. La question posée est ici la suivante : les différences entre les caractéristiques des Français (socio-démographiques, psy- chologiques et sociales et de perception) et celles des Améri- cains, Britanniques et Allemands expliquent-elles les écarts dans la volonté d’entreprendre, le fait de passer à l’acte ou d’être un nouvel entrepreneur ? Il ressort que les caractéris- tiques des populations expliquent une partie minoritaire des écarts de probabilité pour ce qui est de la volonté d’entre- prendre et d’être un nouvel entrepreneur, et quasi nulle pour ce qui est du passage à l’acte (sauf avec les États-Unis) (voir encadré méthodologique). Le graphique 4 permet de visuali- ser les principales caractéristiques qui jouent un rôle dans cet effet de composition. Plus précisément, il permet d’expliquer les écarts de probabilité pour les différentes transitions entre la France et les trois pays de comparaison. D’après la décomposition réalisée (graphique 3), la France a une meilleure volonté d’entreprendre que les trois pays de comparaison (écarts de probabilité positifs), principale- ment en raison d’un effet pays très favorable (6 points de pourcentage pour l’écart entre la France et les États-Unis par exemple), en dépit d’une composition de la population défavorable face aux États-Unis et au Royaume-Uni, et neutre face à l’Allemagne. Conformément au modèle réalisé, on observe que l’effet de composition n’explique quasiment rien des différences de passage à l’acte. L’écart est en fait totalement expli- qué par l’effet fixe pays. Quand on analyse l’effet total « être un nouvel entrepreneur », on constate que l’effet France est négatif, car l’effet négatif sur le passage à l’acte l’emporte sur celui positif sur la volonté d’entreprendre. Il est possible de mobiliser ici l’enquête National Expert Survey du Global Entrepreneurship Monitor15 . Cette enquête a recueilli les perceptions d’un panel d’experts sur neuf domaines16 15. La méthode de lissage utilisée dans le graphique de droite, page 1, masque la vigueur du redressement amorcé en 2018. 16. Les neuf domaines comprennent notamment le financement de l’entrepreneuriat, les dispositifs d’aide aux entreprises, les infrastructures, le cadre réglementaire, la formation à l’entrepreneuriat, etc.
  • 8. CONCLUSION La France affiche une sous-performance en matière de création d’entreprise, qui provient d’un moindre passage à l’acte et non d’une moindre volonté de la part de la population. Le fait que la France soit moins bien positionnée que les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne pour le passage à l’acte n’est pas lié à un effet de composition de la population mais bien entièrement à un « effet pays ». Cet effet pays rend compte d’un ensemble de facteurs institutionnels, réglementaires, économiques et culturels, qui nécessiteraient de plus amples travaux d’approfon- dissement. Les données récentes sur la création d’entreprise pour la période 2016-2019 indiquent toutefois des évolutions positives. L’adoption de la Loi Pacte pourrait amplifier cette tendance. Si la crise du coronavirus vient lui imposer un coup d’arrêt brutal, elle ne devrait cependant pas enrayer sur la durée une amélioration structurelle nourrie par un fort désir d’entrepreneuriat dans une large fraction de la population française. Mots clés : création d’entreprise, Global Entrepreneurship Monitor, aides à la création d’entreprise, comparaison internationale Directeur de la publication : Gilles de Margerie, commissaire général ; directeur de la rédaction : Cédric Audenis, commissaire général adjoint secrétaires de rédaction : Olivier de Broca, Sylvie Chasseloup ; dépôt légal : avril 2020 - N° ISSN 2556-6059 ; contact presse : Matthias Le Fur, directeur du service Édition-Communication-Événements, 01 42 75 61 37, matthias.lefur@strategie.gouv.fr RETROUVEZ LES DERNIÈRES ACTUALITÉS DE FRANCE STRATÉGIE SUR : Institution autonome placée auprès du Premier ministre, France Stratégie contribue à l’action publique par ses analyses et ses propositions. Elle anime le débat public et éclaire les choix collectifs sur les enjeux sociaux, économiques et environnementaux. Elle produit également des évaluations de politiques publiques à la demande du gouvernement. Les résultats de ses travaux s’adressent aux pouvoirs publics, à la société civile et aux citoyens www.strategie.gouv.fr @Strategie_Gouv france-strategie @FranceStrategie_ FranceStrategie StrategieGouv 17. Eurydice (2016), Entrepreneurship Education at School in Europe: Eurydice Report, Publications office of the European Union. 18. Wilson K. E. (2008), « Entrepreneurship education in Europe », in Potter J. (ed.), Entrepreneurship and Higher Education, OECD Publishing, janvier, chap. 5 19. Il y en avait 400 aux États-Unis en 2004. Voir Katz J. A. (2004), Survey of Endowed Positions in Entrepreneurship and Related Fields in the United States, Ewing Marion Kauffman Foundation, Kansas City, MO. 20. Voir Crofils C., Roussel C. et Vermandel (2019), « Améliorer la réglementation peut-il réduire le chômage structurel ? », Document de travail, n° 2019-05, FranceStratégie, novembre. 21. Cet indicateur est la moyenne d’un ensemble de sous-indicateurs tels que la complexité des procédures réglementaires, l’existence d’un système de licences et permis, le poids des charges administratives pour les entreprises en phase de démarrage, la présence de coûts d’entrée dans certains marchés, la protection réglementaire d’opérateurs historiques et l’existence de lois antitrust. 22. La variable « getting credit » de la base Doing Business de la Banque mondiale couvre deux aspects de l’accès au financement : la solidité des systèmes d’information sur le crédit et l’efficacité des lois sur les garanties et la faillite pour faciliter les prêts. 23. La variable « paying taxes » de la base Doing Business de la Banque mondiale recense les impôts et les cotisations obligatoires qu’une entreprise doit payer au cours d’une année donnée, ainsi que la charge administrative liée au paiement des impôts et des cotisations. FRANCE STRATÉGIE – 20, AVENUE DE SÉGUR – TSA 90725 – 75334 PARIS CEDEX 07 TÉL. +(33)1 42 75 60 00 institutionnels qui encadrent le comportement entrepre- neurial. Il en ressort que la France offre un environne- ment moins adapté à l’entrepreneuriat. Ainsi, dans la catégorie « Formation à l’entrepreneuriat en primaire et secondaire », la France reçoit une note médiocre. Il sem- blerait que les Français souhaitent fortement entre- prendre mais ne savent pas comment s’y prendre, ignorent les procédures ou n’aient pas les bases néces- saires en gestion d’entreprise. Le rapport Eurydice17 de la Commission européenne sur l’édu- cation entrepreneuriale publié en 2014 tend à confirmer ces résultats. Une comparaison internationale, du primaire au lycée, montre que la France est un des pays les moins bien classés, sans cours de sensibilisation ou de découverte de l’entrepreneuriat. Plus globalement, la Fondation européenne pour la recherche entrepreneuriale18 soulignait en 2008 le retard pris sur les États-Unis, en relevant l’absence en Europe de diplôme, de formation ou de statut étudiant spécifique à l’entrepreneuriat. En France, par exemple, le statut d’« étu- diant entrepreneur » a été créé seulement en 2014, quand l’équivalent américain existait avant les années 1990. Il y aurait quatre fois moins de chaires entrepreneuriales dans les universités européennes qu’aux États-Unis19 . Les bases de données PMR (Product Market Regulation) de l’OCDE et Doing Business de la Banque mondiale apportent un éclairage complémentaire20 . Si on en croit l’indicateur de charges administratives pour les entre- prises en phase de démarrage21 de la base PMR, il serait plus compliqué de créer une nouvelle entreprise en France qu’en moyenne dans les pays de l’OCDE. La base Doing Business de la Banque mondiale fournit quant à elle des informations sur la facilité d’accès au crédit22 , sur le taux d’imposition des entreprises et sur la charge adminis- trative liée aux paiements23 . Sur ces deux indicateurs, la France est encore une fois mal placée parmi les pays de l’OCDE à hauts revenus : 104e sur 190 pour l’accès au crédit, 61e sur 190 pour le taux d’imposition des nouvelles entreprises et la facilité à payer les impôts. Au total, le niveau de réglementation, d’imposition et la difficulté d’accès au crédit sont autant d’éléments qui s’ajoutent au reste pour expliquer le relatif faible pourcentage de nou- veaux entrepreneurs en France.