1. LES GENS BIENS PARTENT EN GUERRE
CONTRE LES JOIES VULGAIRES DES PAUVRES ET LEUR MAUVAIS GOÛT
FLEUR À LA BOUTONNIÈRE
LEURS REGARDS NOUS SUGGÈRENT
DE NOUS CACHER SOUS TERRE NOUS N’INSPIRONS QUE LE DÉGOÛT
COMME ÇA, C’EST PAS COMME IL FAUT
COMME CI, QUEL VILAIN DÉFAUT
TOUS NOS TRAVERS
MANQUENT DE MANIÈRES
ET ILS NOUS LE DISENT DE TRÈS HAUT
QUE C’EST BON D’ÊTRE UN BOURGEOIS
BIEN ÉLEVÉ DANS LA SOIE
PORTEUR DE SURCROIT DE TANT DE RICHESSES
SCÈNE 7 - DÎNER CHEZ LES VALENOD
Valenod et les prisonniers
(Décor en fond de prison sombre et crasseuse. On
aperçoit des misérables qui chantent une com-
plainte blues. En total contraste avec cette am-
biance de prison, on installe la luxuriante salle à
manger des Valenod et les invités entrent petit à
petit et s’assoient à table quand la table est instal-
lée. Valenod va faire tomber un rideau luxueux
pour cacher les prisonniers. )On découvre Gero-
nimo parmi les invités. Tout le monde commence à dîner pendant le
choeur blues des prisonniers.
Valenod : Eh bien mon petit Julien, si vous nous ré-
citiez quelques extraits de la Bible ? en latin s’il vous
plait !
Madame Valenod : Oh oui ! Allez !
Julien : Pardonnez moi, mais j’ai mal à la tête.
Cette rumeur sans doute.
Valenod : Quelle rumeur?... Ah, les prison-
niers
Quelle plaie, pas moyen de les faire taire.
Madame Valenod : Même sous la torture.
Valenod : Il n’y a que la guillotine qui y par-
vienne…
Madame Valenod : Que la guillotine…
Valenod : On s’habitue, je ne les entends même
Chanson : Que c'est bon d'être Bourgeois
Geronimo
Mr Valenod (Patrice Maktav) - Mme de Rênal (Elsé Pérusin) - Julien Sorel (Côme)
Geronimo (Yoann Launay) - Mr de Rênal (Philippe Escande) - Louise de Rênal (Haylen)
plus, que voulez vous… Ah je dois en
supporter de la crasse en tant qu’administrateur des
pauvres !
Madame Valenod : Et ils se reproduisent !
Valenod : Mais enfin c’est notre croix.
Geronimo : Vous êtes un saint, Valenod !
Valenod : (ne sachant pas comment le prendre, dé-
cide de le prendre bien)
… Ah Geronimo ! Vous connaissez tous Geronimo
! Nous ferez vous l’honneur d’une
chansonnette pour couvrir cette rumeur qui semble indisposer nos
fragiles invités?
2. Livret : Alexandre Bonstein
Mise en scène : François Chouquet/Laurent Seroussi
Auteurs chansons : Zazie/Vincent Baguian
Musiques : William Rousseau/SorelLivret de l’Opéra Rock Le Rouge et le Noir - Au Palace dès le 29 septembre 2016
LE BONHEUR, LES VRAIES VALEURS
SANS AVOIR PEUR, DES JOURS MEILLEURS
EN ÉLEVANT, DE BEAUX ENFANTS
INTELLIGENTS, TOUT SIMPLEMENT
ASSIS SUR LA MISÈRE
LES RUPINS S’INDIFFÉRENT
DE NOS VIES SI PRÉCAIRES LEURS ENVIES PASSENT AVANT NOUS
TOURNÉS VERS DIEU LE PÈRE
AU NOM DE LEURS AFFAIRES
ILS NE FONT DE PRIÈRES QUE POUR DES JOURS ENCORE PLUS DOUX
POUR EUX, ILS N’ONT JAMAIS TROP
UN GUEUX, MAIS QU’EST CE QUE ÇA VAUT ?
SOYONS SINCÈRES
C’EST SECONDAIRE
ET ILS NOUS LE DISENT DE TRÈS HAUT
QUE C’EST BON D’ÊTRE UN BOURGEOIS
BIEN ÉLEVÉ DANS LA SOIE
PORTEUR DE SURCROIT DE TANT DE RICHESSES
LE BONHEUR, LES VRAIES VALEURS
SANS AVOIR PEUR, DES JOURS MEILLEURS
EN ÉLEVANT, DE BEAUX ENFANTS
INTELLIGENTS, TOUT SIMPLEMENT
VOLER LE PAIN DES GENS BIENS
EN PRÉTENDANT QU’ON A FAIM
QUE C’EST VULGAIRE
QUEL MANQUE DE MANIÈRE
VOLER L’ARGENT DES BOURGEOIS
EN PRÉTENDANT QU’ON A FROID
QUE C’EST VULGAIRE
QUEL MANQUE DE MANIÈRE
Le malaise de Louise
Valenod : Ah Geronimo ! Formidable ! Je ne
connaissais pas cette chanson. C'est tiré de
quoi ?
Geronimo : Oh c'est vieux comme le monde.
Valenod : Geronimo, vous qui êtes reçu dans
tous les salons de la haute, (aux autres): Geroni-
mo est de toutes les soirées mondaines à Paris, un artiste ! Il connaît
tout le monde, tout le beau monde ! Vous pourriez m'introduire dans
le milieu, me présenter à quelque Baron…?
Geronimo : Cher Monsieur Valenod ce serait un plaisir de vous in-
troduire ! J'ai ouï dire que le Marquis de la Mole cherchait un secré-
taire. Cela pourrait il vous intéresser ?
Valenod (d’abord vexé mais le prenant comme une boutade): ...
Hahaha ! Sacré Geronimo ! On parle beaucoup de ces de la Mole,
mais je ne suis pas sûr que leur fortune soit tellement supérieure à la
mienne. Savez vous combien coûte le vin que nous buvons ? Eh bien
mon petit Julien ! Il en fait une tête ! Il n'est pas bavard ce garçon, à
croire qu'il ne parle que latin.
Julien : Je suis muet d'admiration.
Valenod : Ah bon ?
Julien : Cette capacité à vous enrichir tout en gérant le bien des
pauvres.
(Valenod, furieux, n'a pas le temps de répliquer.)
Geronimo (avec rire enthousiaste) : Excellent. Excellent ! (Valenod
puis sa femme se sentent obligé de rire aussi) Valenod, vous avez l'art
de bien vous entourer ! Je lève mon verre à cette belle table ! À l’ami-
tié ! À l'amour ! À l’humour ! (tout le monde lève son verre)
3. Livret : Alexandre Bonstein
Mise en scène : François Chouquet/Laurent Seroussi
Auteurs chansons : Zazie/Vincent Baguian
Musiques : William Rousseau/Sorel
M. de Rênal : À propos ! Est-ce que vous
connaissez l’histoire de la femme qui
trompe son mari avec le 23ème régiment
d’artillerie ? Non ? Alors… Un général
tient tendrement… (il s’interrompt en
voyant Louise se lever de table) Eh bien
Louise, qu’y a-t-il ?
Louise de Rênal : Pardonnez moi, j’ai… la migraine.
Valenod : Oh, allez donc vous rafraichir chère Madame, et si vous
voulez vous reposer quelques instants, il y a le petit salon Pompa-
dour, entièrement reproduit à l’identique… Je vous accompagne…
Louise de Rênal (d’abord sèchement puis poliment) : Non. Merci…
merci (elle sort)
M. de Rênal : Ah les femmes ! enfin…
Où en étais-je ?… Ah oui… (il rit lui
même de sa blague) Alors un général,
qui est en train de mourir… non, c’est
l’inverse, c’est sa femme qui est en train
de mourir… Un général tient tendre-
ment la main de sa femme, vous allez
voir c’est hilarant (il rit)… Un géné-
ral donc… (Il s’interrompt en voyant
Valenod se lever de table à son tour)
Valenod : Je vous prie de m’excuser…
ces maux de tête !…
M. de Rênal : C’est une épidémie !…
(Alors que l’on entend s’estomper la voix de M. de Rênal qui continue
à s’emmêler les pinceaux en racontant sa blague, on suit Valenod qui
change d’espace, et retrouve Louise à l’autre coin de la scène.)
Valenod (sur un ton sincèrement soucieux et amical) : Madame je
vous sens fébrile. J'espère que je n'ai rien dit ou fait ce soir qui pou-
vait vous déplaire, et si c'est le cas je vous demande de me pardonner.
Vous paraissez soucieuse, s'il y a quoi que ce soit que je puisse faire,
sachez que vous trouverez en moi un confident, un ami…
Louise de Rênal (étonnée par la courtoisie de Valenod) : Merci Mon-
sieur. Non non tout va bien, j’avais juste… je crois que c’est mon cor-
set qui est un peu serré. Ça va mieux maintenant. Je retourne à table.
Valenod (la retenant par le bras) : Je puis délacer un peu votre corset,
que vous respiriez mieux.
Louise de Rênal (choquée) : Pardon ?
Valenod : Ah Louise… Vous… vous me rendez fou. Valenod essaie
d’embrasser Louise, qui lui envoie une claque, et sort, le laissant seul
avant scène. (Valenod se masse la joue quelques instants, puis ouvre
le tiroir d’un meuble et en tire une lettre faite de bouts de journaux
collés. Il la lit tout haut avant de la mettre dans une enveloppe.)
Valenod : « Cher monsieur le maire, j’ai la douleur de vous apprendre
que votre épouse entretient une liaison sous votre propre toit avec
le jeune Julien Sorel. Je le sais de source sûre. J’ose espérer que vous
prendrez la chose avec philosophie, malgré le ridicule où cette situa-
tion vous plonge. Un ami qui souffre de vous voir ainsi cocufié. »
(Il ferme l’enveloppe.)
Valenod : Elisa !
(Entre Elisa, qui vient prendre l’enveloppe et sort.)
La lettre de Valenod