Bilan publie les résultats d’une étude poussée qui montre un marché suisse très morcelé et tardant à passer à l’ère industrielle. Un appel à une consolidation a été lancé par Helvetia Environnement.
Helvetia Environnement _ Gazette des métiers des hommes
Radiographie exclusive du marché des déchets en Suisse
1. Désormais, l’ère est aux
estimations de l’impact
économique du secteur P30
Le droit suisse va-t-il glisser
vers la polygamie? P25
Sortez vos monnaies
anciennes: c’est un trésor P58
Et si vous partiez en
camping-car cet été? P66
L A R É F É R E N C E S U I S S E D E L ’ É C O N O M I E
2. 16 B I L A N 2 1 J U I N 2 0 1 7
Radiographieexclusive
dumarchédesdéchets
PAR SERGE GUERTCHAKOFF Bilan publie les résultats d’une étude
poussée qui montre un marché suisse très morcelé
et tardant à passer à l’ère industrielle. Un appel à une
consolidation a été lancé par Helvetia Environnement.
R
IEN QUE dans le
segment de la
collecte des
ordures, il existe
plus de 135 ac-
teurs en Suisse. «Il devient
urgent de passer à l’ère indus-
trielle sur le marché suisse du
déchet. Cela passe par une
consolidation pour dégager les
moyens nécessaires pour
pouvoir faire certains inves-
tissements», résume Vincent
Chapel, coactionnaire et
administrateur-délégué du
groupe Helvetia
Environnement, devenu
depuis mars dernier le nou-
veau numéro un des déchets
en Suisse (en termes de
nombre de collaborateurs).
En effet, parmi les dix
acteurs d’importance sur le
marché de la gestion des
déchets suisses (voir ci-contre
notre infographie exclusive),
Helvetia Environnement se
démarque comme le seul
leader généraliste d’envergure
nationale. Il annonce des
effectifs de 500 équivalents
temps plein (ETP) en 2017
et un chiffre d’affaires prévi-
sionnel de 150 millions de
francs cette année (après
intégration de Swiss Recycling
Services, ancienne filiale du
géant français Veolia). Dès
lors, il devance le groupe
Schneider dans le segment
des généralistes d’envergure
nationale. Quant aux groupes
Barec (Abbé, Alpabern,
Datarec, Papirec, Thévenaz-
Leduc) et Thommen (dont
Jaeger & Bosshard), ils réa-
lisent tous deux un chiffre
d’affaires supérieur à 200 mil-
lions de francs, mais dont la
DÉCRYPTAGE SERVICES
PHOTO:DR
DIX ACTEURS SONT LEADERS DU MARCHÉ
DE PAR LEUR PRÉSENCE GÉOGRAPHIQUE ET LEUR POSITION SUR LA CHAÎNE DE VALEUR LEADER
Acteurs Nombre d’emplois (ETP) Chiffre d’affaires Activité Présence
en 2017 en millions principale géographique
Helvetia Environnement 500 120 Services
Groupe Barec 250 200 Métaux, carton, papier
Schneider 236 70 Services
Paprec Group 150 45 Carton, papier
Retripa 120 30 Carton, papier
Liaudet Pial 110 50 Curage
Ruag Environment 100 20 DEEE
Thommen Recycling 80 200 Fers et métaux
Sovag Veolia 60 80 Spéciaux
Häusle 30 88 Services
moitié provient d’activités de
négoce.
Outre le rachat de SRS par
Helvetia en mars dernier, ce
marché encore très fragmenté
avait vu Metallum Group être
absorbé par Thommen (un
groupe suisse actif aussi en
Allemagne, Belgique et Italie)
en septembre 2015 et Häusle
être acquis entièrement par
le géant autrichien Loacker
(578 millions d’euros de
chiffre d’affaires en 2015).
L’évolution appelée de ses
vœux par Vincent Chapel
semble donc en marche.
Les particularités suisses
Cela étant, en comparaison
internationale, la Suisse
souffre encore de la multitude
de ses petits acteurs, rarement
suffisamment armés pour
Source: Roland Berger/ Helvetia Environnement
3. W W W. B I L A N . C H B I L A N 17
effectuer d’importants inves-
tissements. Tel le Centre de tri
haute performance Sortera,
robotisé, qui représente un
investissement de 20 millions
et qui pourrait voir le jour à
Satigny (GE) afin de permettre
de traiter la quasi-totalité des
déchets qui arrivent chez
Sogetri, une des filiales d’Hel-
vetia Environnement. Alors
qu’en France les trois princi-
paux acteurs de la gestion
des déchets (Suez, Veolia et
Paprec) détiennent 63% des
parts de marché, en Suisse les
trois leaders en possèdent
moins de 8%…
Cette spécificité suisse
s’explique par les réglementa-
tions cantonales et munici-
pales. Cependant, ce marché
est régi par quelques principes
de portée générale, dont
l’obligation générale de valo-
riser ou l’obligation du tri à
la source des déchets urbains
et de la collecte séparée de la
fraction valorisable.
Autre particularité suisse:
la production de déchets reste
en croissance. L’étude Roland
Berger, commanditée par
Helvetia Environnement et
dévoilée par Bilan en exclusi-
vité, indique que ce marché,
estimé à 2,7 milliards de
francs en 2016 (dont 47% sont
confiés à des privés), devrait
augmenter d’environ 3% par
an dans les cinq prochaines
années. «Au sein du marché
privé, plusieurs segments
devraient connaître une plus
forte croissance: les terrains
de jeu de l’arc lémanique et du
Valais ainsi que l’axe
Winterthour-Lucerne sont les
plus prometteurs en termes
de croissance, respectivement
de 3,5 et 3,3% par an, tirés par
la croissance démographique.
L’incinération et le recyclage
sont les modes de traitement
à croissance (respectivement
+3,7% et +3,6% par an),
poussés par l’augmentation
de la production de déchets
ménagers et l’attention régle-
mentaire portée au
recyclage.»
Vers de nouveaux
modèles d’affaires
A relever encore le fait que la
nouvelle ordonnance sur la
limitation et l’élimination des
déchets (OLED) introduit un
changement significatif pour
les entreprises de plus de
250 salariés. Plus précisément,
les détenteurs de déchets
provenant d’entreprises
comptant 250 postes à plein
temps ou plus doivent, dans la
mesure de ce qui est possible
et judicieux, collecter séparé-
ment les fractions valorisables
des déchets dont la composi-
tion est analogue à celle des
déchets urbains et en assurer
la valorisation à compter de
2019.
La récente acceptation
par le peuple de la Stratégie
énergétique 2050 aura aussi
un impact sur la gestion des
déchets. En effet, certaines
énergies renouvelables dé-
pendent des déchets (biogaz,
biofuel). Le prix des matières
premières secondaires pour-
rait ainsi augmenter. Et de
nouveaux modèles d’affaires
pour les énergies renouve-
lables dépendantes des dé-
chets pourraient émerger.
Cela, quand bien même le
marché des déchets a toujours
été résiliant aux fluctuations
de l’économie. Pas étonnant
dès lors qu’Helvetia
Environnement voie l’avenir
en rose. «Nous souhaitons
nous développer en poursui-
vant l’amélioration de notre
couverture géographique
et en nous développant dans
la valorisation des matières»,
confie Vincent Chapel.
Le marché suisse des déchets
est estimé à 2,7 milliards
de francs en 2016.
47% sont confiés
à des privés.