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LA DIFFÉRENCIATION
PÉDAGOGIQUE : UNE VOIE
VERS LA RÉUSSITE ?
Comparaison de la France et l’Australie
Master 2 Linguistique & Didactique
Parcours Didactique en Contextes Spécifiques
Voie professionnelle
2017 – 2018
FAVARO Aurélie
Page | 2
1. Il n’y a pas deux apprenants qui progressent à la même vitesse.
2. Il n’y a pas deux apprenants qui utilisent les mêmes techniques
d’étude.
3. Il n’y a pas deux apprenants qui résolvent les problèmes
exactement de la même manière.
4. Il n’y a pas deux apprenants qui se comportent de la même
façon.
5. Il n’y a pas deux apprenants qui possèdent le même profil
d’intérêts.
6. Il n’y a pas deux apprenants qui soient motivés au même point.
7. Il n’y a pas deux apprenants qui soient motivés pour atteindre
les mêmes buts.
8. Il n’y a pas deux apprenants qui soient prêts à apprendre en
même temps.
9. Il n’y a pas deux apprenants qui aient les mêmes capacités
d’apprentissage
Richard Burns1
1 Burns, R. (1973). « Methods for individualizing instruction ». The Educational Technology
Review Series, n°5, p.45
Page | 3
Résumé :
Bien que la différenciation pédagogique existe depuis plus d’un siècle, les
chercheurs et pédagogues du monde entier s’y intéressent tout
particulièrement depuis quelques années. Alors que celle-ci était, dans un
premier temps, réservée aux enfants présentant un handicap et nécessitant
des cours adaptés, elle s’est étendue au fur et à mesure à un plus large
panel d’apprenants. La pédagogie différenciée a alors commencé à être
utilisée avec les étudiants présentant des troubles du langage ou encore
intellectuellement précoces. Aujourd’hui, nous nous rendons compte que
chaque personne est unique et présente donc des capacités toutes plus
différentes des unes des autres, ainsi que des centres d’intérêt divers. Dans
ce mémoire, mon but est de décrire les études réalisées depuis l’apparition
de la différenciation pédagogique et l’impact que celles-ci ont eu sur
l’enseignement moderne dans le monde entier, notamment en Australie et
en France.
Mots-clés :
Australie, France, différenciation pédagogique, individualisation,
apprentissage adapté
Page | 4
Abstract :
Although pedagogical differentiation has been around for more than a
century, researchers and educators around the world have been particularly
interested in it for a few years. While this was initially reserved for children
with disabilities and required adapted courses, it has gradually spread to a
wider range of learners. Differentiated instruction then began to be used
with students with language disorders and those who are recognised as
Expert Learners. Today, we realize that each person is unique and therefore
has different abilities, as well as having different interests. In this thesis, my
aim is to describe the studies carried out since the emergence of
educational differentiation and the impact they have had on modern
education throughout the world, particularly in Australia and France.
Keywords :
Australia, France, differentiated instruction, individualization, adapted
learning
Page | 5
Remerciements
Je souhaite tout d’abord remercier l’ensemble des professeurs du Master
Linguistique et Didactique pour leurs enseignements théoriques et le
partage de leur savoir-faire. Toutes ces connaissances sont venues
s’ajouter à celles acquises au fil de ma scolarité et m’ont ainsi confortée
dans mon projet professionnel. Je remercie particulièrement Mme Skrovec
d'avoir accepté d’être ma directrice de mémoire et ainsi suivre mon
évolution dans le domaine professionnel pour ce deuxième stage à
l’étranger.
Je remercie aussi toute l’équipe du lycée de Frankston, les professeurs
comme l’équipe administrative de m’avoir merveilleusement bien accueillie
et intégrée si rapidement ; en particulier ma tutrice Bibi et les autres
professeurs de français Chris, Joshua, Judith, Kate, Danielle et Ben pour
avoir été présents tout au long de mon stage ainsi que les professeurs de
japonais Tonia, Yuka, Lian, Seona et Rena pour leur soutien et leur bonne
humeur.
Merci également à mes deux familles d’accueil australiennes, qui ont fait de
ces 7 mois une expérience inoubliable.
Enfin, je remercie ma famille et mes amis qui m’ont apporté une aide
précieuse tout au long de cette période.
Merci à tous.
Page | 6
Avant-propos
J’ai réalisé ce stage dans le cadre de ma deuxième année de Master
Linguistique et Didactique, parcours Didactique en Contextes Spécifiques,
voie professionnelle à l’Université d’Orléans. Cette expérience, bien plus
longue que celle effectuée en première année de Master, avait pour but de
mettre en pratique les connaissances acquises lors des enseignements
théoriques.
Après ma première expérience comme professeure de FLE (français langue
étrangère) à San Francisco, j’ai souhaité rester dans l’enseignement à
l’étranger et en pays anglophone, chérissant particulièrement cette langue.
Lors de mon stage de licence, j’ai eu l’occasion de travailler avec des
classes de petite et moyenne sections de maternelle, puis avec des adultes
aux États-Unis. Je suis ravie d’avoir pu découvrir un nouveau public en
Australie : les adolescents.
Je suis donc partie 7 mois à Frankston et ai ainsi eu la chance d’enseigner
à « Frankston High School », appelé également « Frankston High » ou
encore FHS.
Je me suis posée beaucoup de questions avant mon départ, notamment
concernant les missions qui me seraient demandées, mais aussi les
méthodes d’enseignement adoptées étant dans un établissement public.
Page | 7
Sommaire
Remerciements................................................................................................................................ 5
Avant-propos................................................................................................................................... 6
Liste des abréviations et sigles utilisés............................................................................................. 9
Introduction....................................................................................................................................11
1. Les politiques linguistiques et pédagogiques de l’Australie ............................................................ 15
1.1. Le contexte linguistique en Australie et la situation du français......................................... 15
1.2. Les langues étrangères dans le contexte scolaire................................................................ 17
1.3. Devenir professeur de FLE en Australie............................................................................... 20
2. Présentation de l’établissement...................................................................................................... 22
2.1. La structure.......................................................................................................................... 22
2.2. Le public visé........................................................................................................................ 24
2.3. L’équipe pédagogique ......................................................................................................... 24
2.4. L’apprentissage des langues étrangères à Frankston High School ...................................... 25
3. Le déroulé du stage......................................................................................................................... 28
3.1. Les missions ......................................................................................................................... 28
3.2. Les cours en classe entière .................................................................................................. 28
3.3. Les cours en groupe............................................................................................................. 31
3.4. Les cours individuels............................................................................................................ 31
4. Vers une pédagogie différenciée..................................................................................................... 33
4.1. Les origines de la pédagogie différenciée............................................................................ 33
4.1.1. Le plan Dalton .......................................................................................................... 33
4.1.2. La méthode Winnetka.............................................................................................. 35
4.1.3. L’école expérimentale du Mail................................................................................. 36
4.1.4. Les recherches de Freinet ........................................................................................ 37
4.1.5. De ces premières expériences à aujourd’hui........................................................... 40
4.2. Une différenciation pédagogique accompagnée d’une individualisation ........................... 51
4.3. L’importance de la personnalisation ................................................................................... 54
4.4. Les difficultés d’un parcours différencié.............................................................................. 56
4.5. Comparaison des systèmes français et australien............................................................... 57
5. Bilan du stage.................................................................................................................................. 64
5.1. Mes attentes........................................................................................................................ 64
Page | 8
5.2. Les difficultés rencontrées................................................................................................... 64
Conclusion ......................................................................................................................................66
Références......................................................................................................................................68
Ouvrages généraux : ....................................................................................................................... 68
Articles & publications : .................................................................................................................. 68
Autres documents :......................................................................................................................... 72
Sitographie :.................................................................................................................................... 73
Annexes..........................................................................................................................................76
Annexe 1 : Niveau de français attendu en fonction des classes ........................................................ I
Annexe 2 : Niveaux communs de référence pour les langues .........................................................IV
Annexe 3 : Syllabus des années 10 de Frankston High School........................................................VII
Annexe 4 : Exemple sujet de l’épreuve de français pour le VCE....................................................XIV
Annexe 5 : Exemple d’exercice proposé pour un cours d’anglais langue seconde (ESL) ............XXVII
Annexe 6 : Universal Design for Learning Guidelines ..................................................................XXIX
Annexe 7 : Liste des cours proposés à Frankston High School pour le VCE ..................................XXX
Annexe 8 : Exemple de description et critères d’évaluation lors des devoirs réalisés en classeXXXIII
Annexe 9 : Rapport semestriel d’un élève d’année 9 ..............................................................XXXVIII
Page | 9
Liste des abréviations et sigles utilisés
CAST Center for Applied Special Technology (centre de technologie spéciale
appliquée)
CECRL Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues
CEPE Certificat d’Études Primaires Elémentaires
CNESCO Conseil National d’Évaluation du système Scolaire
DELF Diplôme Élémentaire de Langue Française
ESL English as a Second Language (anglais langue seconde)
ESPE Écoles Supérieures du Professorat et de l’Éducation
FHS Frankston High School
FLE Français Langue Étrangère
IFE Institut Français de l’Éducation
IUFM Instituts Universitaires de Formation des Maîtres
LOTE Language Other Than English (langue autre que l’anglais)
LV1 Langue Vivante 1
MAFPEN Missions Académiques à la Formation des Personnels de l'Éducation
Nationale
Page | 10
OCDE Organisation de Coopération et de Développement Économiques
PCE Programme Commun Européen
PISA Programme for International Student Assessment (programme
d'évaluation internationale des étudiants)
SAC School Assessed Coursework (cours évalué par l’école)
TICE Technologies de l’Information et de la Communication pour
l’Enseignement
UDL Universal Design for Learning (plan universel pour l’apprentissage)
UPE2A Unité Pédagogique pour Élèves Allophones Arrivants
VET Vocational Education and Training (enseignement et formation
professionnels)
VIT Victorian Institute of Teaching (institut d’éducation de Victoria)
VCE Victorian Certificate of Education (certificat d’éducation de Victoria –
équivalent du baccalauréat français)
QCM Questionnaire à Choix Multiples
Page | 11
Introduction
Le nombre d’enfants scolarisés dans le monde augmente chaque année et,
avec lui, la diversité des profils. La différenciation pédagogique devient alors
un point qu’il semble important d’aborder au sein de chaque classe afin de
pouvoir adapter au mieux les leçons et trouver des solutions qui
correspondent à chacun.
Les premières tentatives apparaissent au début du XXème siècle au travers
d’expériences menées dans différents établissements à travers le monde,
mais le besoin de diversifier les apprentissages se fait de plus en plus
ressentir aujourd’hui.
Encore récemment, l’idée commune que ces méthodes étaient réservées
aux élèves jugés « différents » (situation de handicap, troubles du langage,
intellectuellement précoce…) subsistait. Pourtant, celles-ci permettent à
chacun d’étudier en fonction de ses capacités et de son rythme.
En effet, Howard Gardner, psychologue du développement américain, a
développé la théorie selon laquelle il existe des intelligences multiples. Il les
a divisées en neuf groupes :
 l’intelligence linguistique : c’est la capacité à utiliser et comprendre
les mots et les nuances de sens pour exprimer ses émotions et
décrire le monde qui nous entoure. Elle est utilisée dès que les
compétences écrites et orales sont réquisitionnées ;
 l’intelligence logico-mathématique : c’est la capacité de penser de
façon abstraite et logique qui permet d’analyser les causes et
conséquences d’actions réalisées. Elle est utilisée dans la
compréhension de problèmes mathématiques par exemple. Avec
l’intelligence linguistique, c’est la plus présente dans les salles de
classe ;
Page | 12
 l’intelligence spatiale : c’est la capacité à mettre en relation des
objets qui nous entourent afin de se repérer dans un environnement
donné. Elle est utilisée pour visualiser un objet, concevoir un plan,
une carte mentale ;
 l’intelligence musicale : c’est la capacité de percevoir des rythmes
et mélodies dans le but de les interpréter et d’en créer de nouveaux.
Elle est utilisée dès lors qu’une mélodie est entendue ;
 l’intelligence corporelle-kinesthésique : c’est la capacité de
retenir via des mouvements réalisés. Elle est utilisée dès lors qu’un
mouvement est associé à une idée ;
 l’intelligence interpersonnelle : c’est la capacité de communiquer
avec ses pairs, de les comprendre et ainsi anticiper certains
comportements. Elle est utilisée lors d’interactions et permet
d’ajuster son comportement en fonction des personnes qui nous font
face ;
 l’intelligence intrapersonnelle : c’est la capacité de se former une
représentation de soi en connaissant ses forces et faiblesses. Elle
est utilisée dès qu’un individu se retrouve seul et doit faire face à ses
sentiments, ses émotions ;
 l’intelligence naturaliste : c’est la capacité d’interpréter et classifier
le monde qui nous entoure afin d’être sensible à notre
environnement. Elle est utilisée dès qu’on cherche à catégoriser les
choses pour en avoir une meilleure représentation ;
 l’intelligence existentielle : c’est la capacité à s'interroger sur le
sens et l’origine des choses. Elle est utilisée dès qu’on se questionne
sur des caractéristiques existentielles de la condition humaine et
permet de se situer dans l’espace-temps en prenant conscience des
limites cosmiques. Cette dernière n’est pas considérée comme un
type d’intelligence à part entière par Gardner, mais plus comme une
aide à la réflexion sur notre existence en fonction de nos
expériences.
Page | 13
Chacune de ces formes d’intelligence est utilisée par un individu, mais il y
en a toujours une qui prime sur les autres et c’est celle-ci qui nous permet
d’apprendre et de retenir efficacement. Grâce à cela, il est facile de
comprendre que l’instruction doit être adaptée pour répondre aux besoins
exprimés par les apprenants.
En France, l’idée de pédagogie différenciée est de plus en plus évoquée
afin de trouver des solutions qui sauront combiner programmes scolaires et
éducation ajustée. Mais qu’en est-il à l’autre bout du monde ? Certaines
méthodes tendent à être appliquées en Australie dans le but de former les
élèves du mieux possible. Je me suis donc focalisée sur ce qui est déjà mis
en place, principalement dans l’État de Victoria, afin de voir ce qui
fonctionne, mais également les limites de ces programmes dans un
contexte linguistique particulier.
Afin de clarifier la suite de mes propos, voici un tableau récapitulatif des
équivalences des classes françaises et australiennes :
Classes françaises Classes australiennes
CP Année 1
CE1 Année 2
CE2 Année 3
CM1 Année 4
CM2 Année 5
Sixième Année 6
Cinquième Année 7
Quatrième Année 8
Troisième Année 9
Seconde Année 10
Première Année 11
Terminale Année 12
Page | 14
Les Australiens combinent le collège et le lycée en une seule école appelée
« High School » qu’ils divisent ensuite en « Junior School » de l’année 7 à
l’année 10, puis en « Senior School » pour les années 11 et 12.
Page | 15
1. Les politiques linguistiques et pédagogiques de
l’Australie
1.1. Le contexte linguistique en Australie et la situation du
français
L’Australie n’a pas de langue officielle juridiquement déclarée, mais l’anglais
étant la langue la plus parlée, elle a obtenu le statut de facto. Plus de 200
langues sont parlées sur la plus grande île du monde dont plusieurs
dialectes aborigènes et des langues issues de l’immigration. En effet, de
nombreuses personnes venues principalement d’Europe et d’Asie ont afflué
vers l’Australie pendant la ruée vers l’or dès les années 1850.
Aujourd’hui, le pays reste le quatrième au monde en termes d’immigration,
attirant de plus en plus d’étrangers et notamment des Français convoitant
« l’Australian dream » avec de nombreuses opportunités d’emplois et
accords liant la France à l’Australie. On observe par ailleurs une
augmentation de 86% des foyers parlant français depuis 1996, et de 64%
seulement sur les dix dernières années.
Source : Australian Bureau of Statistics & Australian Government Department of Home Affairs
Page | 16
Le français est donc de plus en plus présent sur le territoire et les cours se
développent afin de répondre aux besoins et demandes des résidents. Cela
est dû en partie à la politique linguistique du pays qui se veut multiculturel
et encourage ses habitants à apprendre une langue étrangère. Depuis
1996, le programme LOTE (language other than English) oblige chaque
élève à étudier une langue vivante étrangère à partir de la septième année,
et ce jusqu’à la fin de la neuvième année ; cela devient par la suite une
option. Dans certains États comme l’Australie-Occidentale, l’apprentissage
d’une langue vivante a même été rendu obligatoire dès l’année 3. Les
langues les plus enseignées sont le français, l’allemand, l’indonésien et le
japonais.
La présence du français est due principalement à l’immigration. Ces
mouvements de population encouragent également la formation de couples
binationaux qui vont s’établir en Australie et qui utiliseront le français à la
maison au même titre que l’anglais. Mais au-delà des francophones venus
d’Europe, on retrouve beaucoup de personnes venant de l’île Maurice et
encore plus de la Polynésie française. En effet, grâce à cette proximité, des
accords spécifiques se sont créés entre les pays de l’Océanie avec la
possibilité de voyager facilement, sans visa, entre les îles françaises et
l’Australie. De plus, les Polynésiens peuvent bénéficier de bourses
particulières pour étudier en études supérieures sur le continent australien.
La Polynésie représente un marché commercial important pour l’Australie,
ce qui explique également l’influence de la langue française. Mais ces
relations économiques sont aussi très présentes avec la Métropole. Plus de
500 entreprises françaises sont présentes sur place, dont de grands
groupes comme Total, Suez, Areva ou encore Thales, prodiguant ainsi de
l’emploi aux francophones. En 2009, un accord a été conclu entre la France
et l’Australie permettant la reconnaissance mutuelle des diplômes et
également la mise en place de doubles-diplômes entre les deux pays pour
la majorité des écoles.
Page | 17
À tout cela s’ajoute la popularité mondiale du français. En effet, la langue
de Molière est la cinquième langue la plus parlée au monde, la deuxième
apprise comme langue étrangère après l’anglais, la troisième langue des
affaires dans le monde et la quatrième langue d’internet. Cette popularité
est entretenue par la reconnaissance mondiale de la culture française
(gastronomie, littérature…) qui attise la curiosité de tous et l’envie de parler
la langue acceptée comme l’une des plus romantiques du monde.
Les médias francophones sont également nombreux en Australie, autant
dans la presse écrite et en ligne (Le courrier australien, Le Petit Journal…),
qu’à la radio et la télévision (SBS, TV5, Radio France Internationale…).
1.2. Les langues étrangères dans le contexte scolaire
Dans les années soixante, le curriculum australien était basé sur celui de la
Grande-Bretagne. L’étude de deux langues étrangères était alors
obligatoire et extrêmement valorisée pour l’entrée à l’université. Les élèves
avaient le choix entre le latin, le grec, l’allemand et le français. Cependant,
cet engouement pour les langues chuta lorsque le gouvernement adopta un
curriculum similaire à celui des États-Unis en abandonnant les langues au
profit des mathématiques et des sciences. En 1990, seulement 12% des
élèves d’année 12 étudiaient alors une langue étrangère contre 40% dans
les années soixante. Depuis les années soixante-dix, de nombreuses
langues sont venues s’ajouter aux quatre initiales, notamment des langues
asiatiques et aborigènes, les premières en vue de l’évolution du contexte
socio-économique mondial, les deuxièmes pour l’adaptation des
populations indigènes et une conservation de leur culture. Aujourd’hui, les
étudiants peuvent choisir parmi quasiment 50 langues pour l’examen final
de leurs études secondaires. Pourtant, en 2014, seulement 11% des jeunes
australiens choisissaient de poursuivre l’apprentissage d’une langue
étrangère jusqu’en année 12.
Page | 18
Afin de combler les lacunes linguistiques, le gouvernement australien a créé
le programme LOTE en 1996. Celui-ci fait partie des huit « clés
d’apprentissage » fondamentales, les sept autres étant : l’anglais, les
mathématiques, les sciences, les sciences humaines et sociales, les arts,
les nouvelles technologies et enfin la santé & éducation physique.
Malheureusement, même avec cet encouragement du gouvernement,
beaucoup d’élèves arrêtent à la fin de l’année 9 au profit de matières
scientifiques. Depuis la création du programme LOTE, l’étude d’une langue
étrangère est obligatoire dans l’enseignement secondaire et le français se
place en deuxième position des langues choisies après le japonais. Le
cadre d’apprentissage des langues étrangères est assez similaire pour
chacune, je me suis donc concentrée sur celui du français (voir annexe 1 :
Niveau de français attendu en fonction des classes, p. I).
Auparavant, il existait un programme national pour toute l’Australie puis,
pour faciliter la mise en place des cours de langue, chaque État est devenu
indépendant dans l’écriture de son syllabus. Cependant, les programmes
restent similaires, car l’objectif est que tous les apprenants australiens
abordent les mêmes sujets et acquièrent les mêmes compétences à la fin
du lycée. Dans le curriculum de l’État de Victoria, les cours sont abordés
sous trois thèmes découpés en neuf sous-thèmes pour l’examen final :
 l’individu :
 l’environnement personnel ;
 l’éducation et les aspirations futures ;
 les opinions et valeurs personnelles.
 les communautés francophones :
 les modes de vie ;
 les perspectives historiques ;
 les arts et les divertissements.
Page | 19
 le monde qui change :
 les problèmes sociaux ;
 le monde du travail ;
 les sciences et technologies.
À travers ces sujets, chaque professeur doit amener ses étudiants à
réfléchir sur la langue, autant d’un point de vue grammatical que
sociologique.
Cette façon de procéder est assez semblable à la France. En effet, si nous
regardons l’enseignement d’une LV1 (langue vivante 1) dans les
établissements français (pour se retrouver dans un contexte
d’apprentissage comparable au FLE en Australie), les cours se découpent
sous quatre thèmes :
 mythes et héros ;
 espaces et échanges ;
 lieux et formes de pouvoir ;
 l’idée de progrès.
À travers ces unités, les apprenants doivent alors évoluer dans les quatre
compétences suivantes : la compréhension écrite, la compréhension orale,
l’expression écrite et l’expression orale. Les lycées français se basent alors
sur le CECRL (cadre européen commun de référence pour les langues)
pour établir leur programme (voir annexe 2 : Niveaux communs de
référence pour les langues, p. IV). Pour le baccalauréat, un niveau B2 est
attendu de la part des élèves français. Même si les Australiens ne
s’appuient pas sur le CECRL pour construire leur curriculum, en comparant
les deux, nous nous rendons compte que le niveau attendu en année 12
est similaire, soit un niveau B2.
De l’année 7 à l’année 11, les professeurs suivent le curriculum construit
par l’établissement. Il n’y a pas de programme officiel, mais les enseignants
travaillent toujours dans l’optique de préparer les élèves au VCE (Victorian
certificate of education). Le syllabus du lycée est alors créé dans cet
objectif, notamment à partir de l’année 10, année où les élèves choisissent
Page | 20
de continuer ou non l’apprentissage d’une langue étrangère (voir annexe
3 : Syllabus des années 10 de Frankston High School, p.VII).
1.3. Devenir professeur de FLE en Australie
Pour devenir professeur de FLE en Australie, il n’est pas nécessaire
d’effectuer sa formation sur le territoire. Si le diplôme est issu d’un autre
pays, il faudra alors obtenir une équivalence de l’État dans lequel on
souhaite enseigner. En fonction de la région, le système peut être un peu
différent. Alors qu’en Victoria il y aura une simple équivalence de diplômes,
en Nouvelles-Galles-du-Sud, par exemple, il faudra réaliser un entretien et
expliquer sa vision de l’enseignement, sa façon d’enseigner… pour obtenir
l’approbation du ministère de l’Éducation.
Pour faire sa formation en Australie, il faut, au minimum, faire une licence
d’éducation qui dure 4 ans ou étudier une autre licence et faire un master
d’éducation par la suite. Pendant leur formation, les étudiants suivent des
cours spécifiques concernant la discipline qu’ils souhaitent enseigner. Ils
sont par ailleurs encouragés à faire un double cursus pour être habilités à
enseigner deux matières. Contrairement à la France, il n’y a pas de longues
périodes de stage pour se préparer au métier, seulement 60 jours de
formation dans différents établissements scolaires répartis sur toute la
durée de leur cursus d’études.
La plupart des personnes souhaitant enseigner une langue étrangère
choisissent un diplôme d’éducation en études secondaires. En effet, en
Australie, il est possible d’enseigner en école primaire avec un diplôme
d’enseignement en collège-lycée, mais l’inverse n’est pas possible.
Après avoir fini leurs études, les jeunes diplômés sont en inscription
provisoire. C’est-à-dire qu’ils enseignent à plein temps, mais doivent
également réaliser différentes tâches pour être totalement qualifiés. Un
mentor leur est alors attribué et celui-ci aidera le nouveau professeur
Page | 21
jusqu’à ce qu’il soit accrédité. Cette situation dure au minimum un an et peut
aller jusqu’à trois ans.
Pour recevoir la certification finale, il faut tout d’abord passer un test de
littérature et mathématiques. Celui-ci est un QCM (questionnaire à choix
multiples) comparable au niveau du brevet des collèges afin de prouver que
les futurs professeurs ont un niveau personnel équivalent aux 30%
supérieurs de la population australienne. Ensuite, ils doivent construire et
présenter un projet en lien avec leur enseignement. Le but est d’apporter
une réflexion sur leur façon de faire, voir ce qui fonctionne ou non et
comment ils pourraient s’améliorer. Ils doivent également choisir trois
étudiants d’une même classe, mais de niveaux différents afin d’expliquer
comment ils gèrent l’hétérogénéité, comment ils s’adressent et s’adaptent
à ces apprenants pour pouvoir appliquer le programme scolaire et que les
activités correspondent à chacun.
Le mentor sera là pour aider l’enseignant tout du long avec son projet et
également le conseiller, répondre à ses questions, le soutenir. Pour obtenir
la qualification définitive, le projet sera présenté et discuté avec différents
membres de l’école qui décideront du moment le plus adéquat pour le
soumettre au VIT (Victorian institute of teaching), institution attribuant le
droit d’exercer pleinement ses fonctions.
Page | 22
2. Présentation de l’établissement
2.1. La structure
Le lycée de Frankston se situe dans l’État de Victoria, à une quarantaine de
kilomètres au sud de Melbourne. Étant un établissement public, il est régi
par la région et accueille les élèves dépendant géographiquement de ce
lycée. Cependant, il est possible pour les étudiants internationaux d’étudier
là-bas en payant leurs études.
L’école a été fondée en 1924 lorsque la péninsule
commença à attirer de plus en plus de monde.
Frankston devenait alors un point central entre
Melbourne et la péninsule de Mornington. Pour
répondre à la demande croissante des familles, le
Conseil de la ville demanda alors l’installation
d’une école secondaire.
L’établissement a pour devise « Optima Semper »
qui signifie « Toujours mieux ». En effet, l’école
pousse ses élèves à donner le meilleur d’eux-
mêmes et évolue continuellement en installant de nouvelles infrastructures
pour permettre à ses étudiants d’étudier dans les meilleures conditions
possible. Comme dans toutes les écoles du pays, Frankston High School
requiert le port de l’uniforme aux couleurs de l’école (bleu et doré) et
arborant l’emblème : un poisson. Ce dernier représentait, au début, un
dauphin pour symboliser l’amour, le courage, la courtoisie et le leadership.
Il évolua en poisson lorsqu’on se rendit compte que, lors des rencontres
sportives, Frankston High était raillé par les spectateurs qui scandaient
« Fish! Fish! Fish! ».
L’institution a une vision précise de son éducation : « Together we become
purposeful learners » (« Ensemble, nous devenons des apprenants
déterminés »). Le but n’est pas de réussir chacun de son côté, l’entraide a
Source : visitfrankston.com
Page | 23
une place très importante, autant entre les élèves qu’entre le personnel.
Cette vision est d’ailleurs inscrite dans chaque salle de cours,
accompagnée des valeurs de l’école : respect, responsabilité, intégrité,
empathie, optimisme et persévérance ; mais aussi des missions
d’enseignement, à savoir la déclaration suivante :
Le lycée se compose de deux sites : « junior campus » et « senior
campus » sur lesquels se divisent les salles de classe, l’administration, mais
également de nombreuses structures sportives comme une piscine, des
terrains de basketball, tennis, cricket…
Les cours se découpent en six périodes de 45 minutes par jour avec les
premiers cours à 8h10 pour les années 11 et 12, 9h pour les autres, puis
les derniers cours se terminent à 15h15. Finir plus tôt permet aux élèves de
s’investir dans certaines des nombreuses activités extrascolaires
proposées (sports, musique, arts plastiques, conseil des élèves…).
Dans la culture anglo-saxonne, on apporte une grande importance aux
activités en dehors de l’école et Frankston High School y apporte une
attention toute particulière. En plus des activités citées ci-dessus, l’école
organise différents camps tout au long de l’année (sport, musique,
leadership…). En année 7, tous les enfants partent pour trois jours de
camping dans le but de créer des liens entre les élèves, mais aussi avec
leurs professeurs pour faciliter leur entrée au collège.
Le but de FHS est de soutenir le développement intellectuel
continu de nos étudiants et de les préparer à comprendre et à
pratiquer :
 l'apprentissage indépendant ;
 la pensée critique et créative ;
 des comportements qui contribuent de manière productive
à la société ;
 la communication efficace ;
 une conduite physique, émotionnelle et sociale saine.
Page | 24
2.2. Le public visé
Frankston High School accueille des élèves de l’année 7 à l’année 12. C’est
près de 1600 jeunes qui viennent y étudier chaque jour. L’établissement
étant public, il faut en dépendre géographiquement. L’école jouit d’une
réputation internationale pour sa qualité d’enseignement et ses excellents
résultats aux VCE, équivalent du baccalauréat français. En effet, le lycée
se place à la 26ème place sur les 270 écoles secondaires publiques de l’État
de Victoria. Cette notoriété attire beaucoup de familles dans le secteur, mais
aussi beaucoup d’étudiants internationaux, chinois pour la plupart, qui
n’hésitent pas à payer pour suivre une éducation australienne de qualité.
D’un point de vue sociologique, les étudiants australiens ne viennent pas
d’un milieu favorisé. En effet, malgré la bonne réputation de l’école, la
situation de la ville est plutôt précaire avec de nombreuses familles en
difficulté. On retrouve donc une grande mixité parmi les élèves.
2.3. L’équipe pédagogique
Il y a environ 160 professeurs à Frankston High School et 3 assistants : un
pour le japonais, un pour le français et un pour les cours « d’activités
extérieures ». Tout le monde travaille en open space afin de faciliter les
échanges et favoriser les relations entre les professeurs des différentes
composantes.
Dans le département de langues, il y a quatre professeurs de français et
quatre professeurs de japonais. L’organisation des bureaux permet de tous
les regrouper avec les deux assistants pour pouvoir communiquer et
aborder divers sujets facilement regardant une classe, une méthode
d’enseignement, une traduction…
Concernant les assistants de langue, ce sont toujours des locuteurs natifs
qui interviennent en priorité avec les années 12 pour les préparer au VCE.
Cependant, ils peuvent intervenir à d’autres niveaux, notamment pour parler
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de la culture de leur pays. Pour les langues, il faut d’abord enseigner aux
années 7 à 10 pendant quelques années afin de pouvoir enseigner aux
années 11 et 12 par la suite.
Des réunions sont organisées toutes les semaines entre les professeurs
d’un même département afin de discuter des programmes, de leurs
techniques d’enseignement et ainsi partager leur ressenti. Cela leur permet
de s’améliorer en s’inspirant de ce que chacun fait, discuter des problèmes
rencontrés et prévoir ensemble ce qui est possible par la suite.
2.4. L’apprentissage des langues étrangères à Frankston
High School
Deux langues étrangères sont proposées à Frankston High School : le
japonais et le français. Le japonais est enseigné depuis 1991, mais le
français l’est depuis 1927. Par ailleurs, entre 1950 et 1957, le français était
obligatoire et les élèves étaient encouragés à passer des certifications de
langue auprès de l’Alliance Française.
Aujourd’hui, les élèves d’années 7 doivent choisir une des deux langues et
environ 60% d’entre eux choisissent le français. Cependant, il y a plus
d’étudiants en japonais qui poursuivent jusqu’en année 12.
Le nombre d’heures de cours de langue par année se répartit comme suit :
 années 7 et 8 : 3 périodes, soit 2h15 ;
 années 9 et 10 : 4 périodes, soit 3h ;
 années 11 et 12 : 5 périodes, soit 3h45.
Pour les années 12, on ajoute au minimum une sixième période qui se
déroule en session individuelle avec l’assistant de langue. Il peut y avoir
une deuxième session en groupe de 2 ou 3 en fonction du nombre d’élèves
par classe.
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En effet, le lycée accueille un assistant japonais et un français tous les ans
afin de préparer les élèves d’années 12 au VCE. L’épreuve de LOTE se
déroule en deux parties : la première regroupe les compétences de
compréhension orale, compréhension écrite et expression écrite (voir
annexe 4 : Exemple sujet de l’épreuve de français pour le VCE, p.XIV). La
deuxième est un oral divisé en deux phases.
Dans un premier temps, il s’agit d’une conversation entre les examinateurs
et l’élève. Les questions tournent autour de cinq sujets :
 la famille ;
 l’école ;
 le travail ;
 les loisirs ;
 les aspirations futures.
Dans un deuxième temps, l’élève présente son étude détaillée sur laquelle
il a travaillé tout au long de l’année et répond aux questions qui lui sont
posées. Cette étude porte sur un sujet choisi par l’étudiant qu’il devra
présenter et argumenter en fonction des interrogations des examinateurs.
En ce qui concerne les méthodologies utilisées, la méthode mixte est
privilégiée. En effet, l’entraînement scolaire est mis en avant et tout est
décontextualisé. L’écrit occupe une place importante et l’oral est très peu
abordé. Pourtant, les élèves sont censés travailler les 4 objectifs, soit : la
compréhension écrite, l’expression écrite, la compréhension orale et
l’expression orale. Aucun des documents utilisés n’est authentique, même
lorsque nous arrivons en année 12. Cela fut, par ailleurs, un vrai obstacle
lorsque les étudiants ont fait face à des supports audio extraits de situations
réelles pour la première fois dans mes cours.
Tout cela entraine des lacunes notamment à l’oral, mais aussi à l’écrit.
Effectivement, l’apprentissage de règles hors contexte est dépourvu de
sens pour les apprenants et, par la suite, ils ont plus de mal à former un
discours à l’écrit comme à l’oral.
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De plus, les cours se font majoritairement en anglais et la langue cible est
très peu utilisée hors des exercices du livre. Même en évaluation, les
questions sont en anglais et les élèves doivent répondre en anglais. En
année 12, nous pourrions nous attendre à ce que les élèves doivent tout
faire dans la langue cible, comme pour l’épreuve de LV1 au baccalauréat
français. Pourtant, toutes les questions du sujet sont en anglais et ils doivent
répondre dans la langue cible seulement pour 50% de l’examen. De
surcroît, l’utilisation du dictionnaire bilingue est autorisée pendant toute la
durée de l’interrogation.
Concernant l’enseignement du français, ce qui m’a le plus surprise à mon
arrivée était l’utilisation d’un français très formel. On sait qu’il existe une
grande différence entre le français écrit et oral, mais à l’école, les étudiants
devaient s’exprimer comme ils écrivent. Après en avoir discuté avec les
autres professeurs, ils m’ont expliqué que ce sont les attentes des
examinateurs et qu’ils n’ont également pas le droit d’utiliser les nombreux
anglicismes adoptés par les francophones (par exemple, ils n’ont pas le
droit d’utiliser le mot « bacon », ils doivent automatiquement le traduire par
« jambon »).
Depuis 2015, il est obligatoire pour les apprenants d’acheter une tablette
avant leur rentrée en année 7 et les professeurs doivent l’intégrer dans leurs
cours.
En cours de langue, celle-ci est utilisée principalement pour des exposés et
pour que les élèves enrichissent leur vocabulaire, notamment grâce au site
« Language Perfect ». C’est une plateforme énormément utilisée en
Australie et les professeurs s’en servent également pour contrôler les
connaissances. Le principe est simple, le professeur rentre une liste de
vocabulaire sur un thème spécifique et les élèves doivent traduire tous les
termes.
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3. Le déroulé du stage
3.1. Les missions
En tant qu’assistante de français, j’ai eu pour mission de préparer les
années 12 pour le VCE. Je les voyais deux fois par semaine : une fois en
session individuelle et une fois par groupe de deux. Les objectifs différaient
en fonction des leçons et des élèves. J’ai également travaillé en mi-temps
à l’école et enseigné aux années 8, 9 et 10 en classe entière. J’étais libre
d’organiser mes cours individuels et en petits groupes afin de les préparer
au mieux. Pour les cours en classe entière, je travaillais en équipe avec
l’autre professeur qui partageait mes classes.
3.2. Les cours en classe entière
Pendant le trimestre où j’ai travaillé avec les années 8, 9 et 10, les cours
suivaient le programme du manuel utilisé pour chaque niveau.
En année 8, nous utilisions les manuels « Touché 3 & 4 ». Ceux-ci se
divisent chacun en 4 unités qui comprennent chacune :
 une situation : une bande dessinée qui suit l’histoire d’un garçon
nommé Nick ;
 un point de prononciation ;
 une liste de vocabulaire sur le thème de l’unité ;
 un document sur lequel travailler (par exemple : une affiche
d’annonce immobilière lorsque le thème de l’unité est « notre
maison » afin d’apprendre les pièces) ;
 un point de conjugaison avec des verbes à apprendre ;
 un point de langue pour travailler sur des éléments spécifiques
(possessifs, adjectifs, féminin/masculin…) ;
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 un dialogue à pratiquer en groupe ;
 un point culturel pour en apprendre davantage sur la culture
francophone ;
 un jeu de rôle ;
 une partie « à faire » avec différents sujets que le professeur peut
choisir (par exemple : dessiner le plan de sa maison idéale, écrire
une annonce immobilière).
En année 9, nous utilisions le manuel « Touché 5/6 ». Celui-ci se divise en
6 unités qui comprennent chacune :
 un dialogue ;
 une liste de vocabulaire sur le thème de l’unité ;
 un point de langue pour travailler sur des éléments spécifiques
(COD, pronoms, temps…) ;
 un point de conjugaison avec des verbes à apprendre ;
 une section « mot de passe » qui explique des utilisations
spécifiques de la langue (argot, expressions…) ;
 des documents à lire et une liste de vocabulaire associée ;
 un deuxième point de langue ;
 un dialogue à pratiquer en groupe ;
 un point culturel pour en apprendre davantage sur la culture
francophone ;
 un jeu de rôle ;
 un sujet de discussion pour pratiquer l’oral.
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En année 10, nous utilisions le manuel « Ça y est ! » Celui-ci se divise en 6
unités qui comprennent chacune :
 une liste de vocabulaire sur le thème de l’unité ;
 des compréhensions écrites ;
 un point culturel pour en apprendre davantage sur la culture
francophone (sous forme de documents, de bande dessinée…) ;
 des jeux de rôle ;
 un extrait littéraire (poème, bande dessinée…) ;
 un point de grammaire.
Chaque manuel est accompagné d’un workbook comprenant des exercices
d’application sur les différents points abordés.
Les manuels datant du début des années 2000, certaines activités n’étaient
pas forcément appropriées. Par exemple, dans « les expressions utilisées
par les jeunes », nous nous retrouvions confrontés à des actes de parole
qui ne reflètent pas la situation actuelle.
Les années 10 se destinent généralement à poursuivre jusqu’en année 12
et ils sont donc impliqués dans les cours. De plus, le français étant une
option, la classe se compose seulement d’une dizaine d’étudiants.
En années 8 et 9, le français est encore obligatoire, les classes regroupent
donc 25 élèves en moyenne. En Australie, il n’est pas rare d’observer une
« standard class ». Celle-ci réunit les élèves perturbateurs et n’ayant pas le
niveau requis afin qu’ils ne dérangent pas les autres cours. Enseigner à
cette classe fut un vrai challenge, car les apprenants ont conscience de la
situation et ne produisent donc aucun effort.
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3.3. Les cours en groupe
Les cours en groupe étaient propices à l’utilisation d’une pédagogie
différenciée. Mon but du premier trimestre était de travailler avec les élèves
sur la compréhension orale. En effet, ils m’ont tous fait part de leurs
difficultés à comprendre les documents audio. J’ai choisi de les faire
travailler à chaque fois sur des documents authentiques provenant de
différentes régions francophones dans le monde. Chaque session se
déroulait en deux parties : l’écoute du document et répondre aux questions
puis, un sujet de discussion autour du thème abordé dans l’audio ou la
vidéo. Mes étudiants d’année 12 avaient des niveaux très disparates, allant
du bilingue aux élèves en grande difficulté. J’ai fait le choix de présenter les
mêmes documents à tous, mais d’adapter les questions pour que chacun
se prépare au mieux à l’examen. À partir du deuxième trimestre, j’ai
commencé à travailler avec eux sur l’examen du DELF (diplôme
élémentaire de langue française) B1 et B2 en fonction des niveaux des
élèves. En effet, une majorité d’entre eux souhaite passer cette certification
dans le futur et travailler tous les aspects de cet examen les préparait
également au VCE.
3.4. Les cours individuels
Les cours particuliers permettaient une individualisation totale. Les
premières semaines, mes cours s’organisaient de la même façon : cinq
questions auxquelles les apprenants devaient répondre et portant sur
chacun des thèmes abordés à l’examen puis, travailler sur leur étude
détaillée.
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Voici par ailleurs les sujets choisis par mes élèves d’année 12 :
 la laïcité en France ;
 le dopage dans le Tour de France ;
 le rap francophone ;
 le féminisme : Olympe de Gouges et Simone Veil ;
 le sabotage du Rainbow Warrior ;
 reporters sans frontières ;
 médecins sans frontières ;
 les HLM.
L’objectif était principalement de les aider à formuler et à corriger leurs
réponses aux questions envisagées. Après trois mois, les études
approfondies étant terminées, je les interrogeais sur leur sujet afin qu’ils
pratiquent et retiennent bien les informations. Pendant le temps restant,
nous travaillions sur les difficultés présentées par l’élève. Cette partie était
donc « à la carte » et je m’adaptais aux besoins et difficultés de chacun.
Certains souhaitaient améliorer leur conversation et nous parlions donc de
sujets du quotidien, faisions des débats… pendant que d’autres désiraient
revoir les bases de la grammaire française et le vocabulaire important.
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4. Vers une pédagogie différenciée
Selon Louis Legrand, pédagogue et universitaire français, le terme de
pédagogie différenciée veut désigner « un effort de diversification
méthodologique susceptible de répondre à la diversité des élèves.2 »
Cette définition sera par la suite complétée par Philippe Meirieu, chercheur
en sciences de l’éducation et de la pédagogie, comme suit : « Différencier,
c'est avoir le souci de la personne sans renoncer à celui de la collectivité.3 »
En effet, chaque apprenant est différent et le cheminement qui le guidera à
l’acquisition des savoirs en sera, par conséquent, hétéroclite. Cependant, il
faut respecter les programmes instaurés par les institutions. La pédagogie
différenciée a donc pour but de varier les méthodes d’apprentissage afin de
mener les apprenants aux mêmes connaissances.
4.1. Les origines de la pédagogie différenciée
4.1.1. Le plan Dalton
La première tentative de différenciation pédagogique apparait au début du
XXème siècle aux États-Unis avec Helen Parkhurst. Cette pédagogue est à
l’origine du « Plan Dalton ». Ce dernier a été mis en place par la professeure
dans le but de répondre aux besoins de la classe. En effet, la petite ville de
Dalton dans le Massachusetts ne proposait qu’une classe unique et
l’institutrice se retrouva donc face à 40 élèves d’âges et niveaux différents.
Pour répondre à cette situation, elle dut trouver une méthode afin de
s’adapter et pouvoir enseigner.
2 Legrand, L. (1986). « La différenciation pédagogique ». Scarabée, CEMEA.
3 Meirieu, P. (1989). « Enseigner, scénario pour un métier nouveau ». ESF.
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Après avoir travaillé auprès de Maria Montessori (fondatrice des célèbres
écoles portant son nom) en Italie, elle s’inspire de sa méthode qui place
l’enfant au cœur de son apprentissage afin de développer la confiance en
soi et l’autonomie grâce à l’expérience, tout en respectant le rythme et les
demandes de l’enfant. Helen Parkhurst met alors en place des plans de
travail afin d’individualiser les activités des apprenants. Le plan Dalton est
appliqué dès le plus jeune âge et se décompose en trois parties.
Premièrement, « la maison ». Le but est que l’enfant appartienne à une
communauté plus petite que celle de l’école tout entière. C’est donc un
groupe d’environ huit enfants supervisé par un professeur-référent. Le rôle
de ce dernier est de guider, coacher et aider les étudiants à développer
leurs compétences. Une relation peut alors s’établir entre les élèves et le
professeur, mais également avec les parents qui ont un rôle important au
sein des écoles Dalton.
Deuxièmement, « le contrat ». Un contrat d’apprentissage est conclu entre
l’enseignant et l’étudiant qui définissent ensemble le temps nécessaire à ce
dernier pour accomplir une tâche précise. Le contrat est structuré de la
façon suivante :
 expliquer à l’élève le travail global et l’objectif de celui-ci ;
 l’encourager à utiliser toutes ses connaissances afin de relier entre
elles les différentes matières et ne pas voir chaque connaissance
comme appartenant seulement à une discipline ;
 fournir un soutien suffisant en termes de questions d’orientation, de
suggestions ;
 bien définir les étapes et les échéances ;
 permettre l’adaptation des intérêts, forces et besoins individuels ;
 promouvoir les échanges internes entre individus d’un même groupe
et perfectionner les compétences d’organisation et de gestion du
temps.
L’instituteur prend alors le temps pour chaque élève afin d’adapter au mieux
le travail demandé.
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Troisièmement, « le laboratoire ». C’est le moment dans l’emploi du temps
ou les élèves vont pouvoir travailler individuellement avec leur superviseur
ou en petits groupes. Cette occasion permet alors d’expérimenter, enquêter
et collaborer. Les élèves sont libres de poursuivre la tâche qui leur a été
confiée ou de faire des recherches sur des sujets qui les intéressent. Ce
moment a pour vocation de laisser les enfants en autonomie afin qu’ils
prennent leurs responsabilités et qu’ils travaillent pour eux-mêmes et non
pour l’école.
4.1.2. La méthode Winnetka
À partir de 1915, Carl Washburne, inspecteur et administrateur des écoles
publiques, mène une deuxième expérience en Angleterre et aux États-Unis.
Celle-ci propose des plans de travail tels que Parkhurst l’avait préconisé et
y ajoute un programme d’entraide invitant les élèves plus âgés à s’occuper
des plus jeunes. Lorsqu’il émigre aux États-Unis dans la ville de Winnetka,
il développe des manuels et fiches de travail dans l’optique de développer
le travail autonome. Sa méthode consiste à créer un plan autocorrectif
complet pour le calcul et ainsi rendre chaque élève autonome et
gestionnaire de son rythme de travail. Néanmoins, il ne se concentre pas
sur les besoins indépendants de chaque enfant, mais établit différents
profils en fonction de leurs âges et d’une enquête réalisée pour déterminer
les capacités au fur et à mesure de leur développement. À vouloir être trop
efficace, son programme se rapproche du taylorisme, méthode utilisée dans
les usines afin d’augmenter les rendements tout en optimisant la gestion du
temps, au profit de la motivation et de la prise en compte de l’individu en
lui-même.
Le plan Dalton tout comme la méthode Winnetka sont les premiers à
s’intéresser aux différences entre individus et reconnaissent que tout le
monde ne peut apprendre de la même façon. Cependant, alors que le
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premier se penche sur l’humain d’un point de vue sociologique, la deuxième
privilégie les capacités cognitives d’un point de vue physiologique. Cette
opposition sera vue par Philippe Meirieu comme une démarche de prise en
compte de l’être et de ses apprentissages dans son ensemble. Il l’analysera
de la façon suivante : « L'une qui s'effectue à partir des capacités mentales
et du niveau de développement cognitif de l'enfant... et qui laisse entendre,
ou suppose par posture, que tout apprentissage accessible à un enfant peut
être effectué par lui sans que se pose la question de la motivation - ou bien
parce que le niveau d'accessibilité résout en lui-même la question de la
motivation. Une autre qui considère que la question de la motivation est
première et détermine l'accès à tout apprentissage... en laissant même
entendre que le niveau d'accessibilité est secondaire dans la mesure où un
enfant motivé parviendra à surmonter des obstacles intellectuels qui vont
bien au-delà de ses possibilités attestées.4 »
Jusqu’à présent, les expériences menées ne prenaient donc pas en compte
l’enfant sous tous ses aspects (sociologique, physiologique,
psychologique…), mais ne ciblaient qu’un seul de ces domaines.
4.1.3. L’école expérimentale du Mail
En 1927, c’est un pédagogue suisse, Robert Dottrens, qui décide de mener
sa propre expérience en ouvrant l’école du Mail à Genève. Il s’inspire du
plan Dalton et de la méthode Winnetka pour tirer le meilleur de chaque.
Pour cela, il va garder le principe des fiches de travail établies en fonction
du profil des élèves. Il va alors s’intéresser au niveau de chacun en réalisant
des évaluations, mais également organiser des entretiens afin de recueillir
des informations utiles d’un point de vue sociologique. Il élimine également
la notion d’autocorrection afin d’enrichir la relation professeur/élève qui avait
4 Meirieu, P. (1996). « La pédagogie différenciée : enfermement ou ouverture ? » dans
L'école : diversités et cohérence, Les entretiens Nathan - Actes VI, p.113
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quasiment disparu avec l’utilisation de ces fiches. Son objectif est de
confronter ses étudiants à un travail adapté à leurs capacités, mais qui ne
soit pas trop simple pour entretenir la motivation, la notion de challenge.
Pour cela, sur chaque carte individuelle, il rédige une seule et unique
question susceptible d’éveiller l’intérêt personnel dans une perspective
d’évolution didactique.
La prise en considération des différentes dimensions permet de créer une
véritable progression et un engouement de la part de l’enfant qui pourra
s’autonomiser peu à peu. De cette façon, il y a une réelle évolution dans
l’individualisation du travail qui suit le processus de développement cognitif
tout en considérant son environnement.
4.1.4. Les recherches de Freinet
Célestin Freinet, considéré comme l’un des plus grands pédagogues
français de son époque, a donné naissance au mouvement qui porte son
nom. Freinet croit en la refondation d’une école nouvelle et moderne où le
savoir ne se transmettrait plus via le « par cœur » et les études de textes,
mais par la prise en considération de l’individu, de ses besoins et de ses
attentes. Il est l’un des premiers à encourager la classe hors des murs. Il
comprend que les élèves viennent à l’école dans le but de comprendre le
monde qui les entoure et Freinet met en place une diversité
d’enseignements, premièrement en classe, avec le choix des écrits sur
lesquels travailler, mais aussi à l’extérieur en organisant des visites, des
enquêtes, des correspondances ou encore des voyages. Freinet veut que
les savoirs prennent sens afin d’être mieux intégrés. L’objectif est de
pouvoir mettre en relation les apprentissages scolaires et les
connaissances sociales. Pour cela il s’inspire de Parkhurst, Washburne,
Dottrens et d’autres professeurs qu’il a eu l’occasion de rencontrer lors de
ses voyages. Du plan Dalton il conservera l’idée de contrat passé entre
l’élève et le maître, la liberté de travailler à son rythme. De la méthode
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Winnetka il gardera l’entraide et la coopération entre les apprenants et la
prise en compte de la dimension psychologique du développement de
l’enfant. De Dottrens il retiendra l’importance de la motivation en stimulant
l’intérêt, la curiosité et la notion de défi. Freinet met alors en place des
activités du type : réaliser un album à la suite d’une sortie, écrire un journal
coopératif grâce aux différents genres d’écrits. La visée de ces travaux est
de faire prendre conscience aux apprenants que ces tâches ne pourront
être correctement accomplies sans les savoirs scolaires.
Pourtant, de cette méthode émerge un problème : « si les activités
proposées par Freinet font apparaître la nécessité de savoir, elles ne font
pas apparaître la nécessité d’apprendre.5 »
Il doit donc trouver un moyen de remédier à cette situation pour éviter que
les apprenants négligent l’acquisition des connaissances fondamentales.
La première chose à faire sera alors d’effectuer des rotations au sein des
groupes afin que chacun accomplisse différentes tâches et ne se conforte
pas seulement dans ce qu’il sait faire. Deuxièmement, Freinet met en place
ce qu’il appelle les « brevets ». En effet, il trouve le CEPE (Certificat
d’Études Primaires Elémentaires) trop traditionnel et non objectif. De plus,
celui-ci favorise les résultats plutôt que le cheminement de l’acquisition des
apprentissages et va donc encourager les élèves au bachotage, ce que
Freinet trouve contre-productif et inadapté au bon développement des
savoirs. Les brevets s’accoutument donc aux besoins et désirs de chacun.
L’apprenant devra choisir au moins trois brevets obligatoires parmi treize
proposés dans différentes disciplines du français, des sciences et d’histoire-
géographie. Il pourra également choisir des brevets facultatifs parmi
cinquante-quatre divisés en cinq domaines : écriture, art, sport, artisanat et
comportement. Chaque brevet est choisi avec le professeur pour s’assurer
que le projet est réalisable.
5 Robbes, B. (2009). « La pédagogie différenciée : historique, problématique, cadre
conceptuel et méthodologie de mise en œuvre. », conférence sur la pédagogie
différenciée, p.3
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Chaque diplôme se décompose en un certain nombre d’épreuves
standardisées, un chef-d’œuvre à réaliser et un compte-rendu détaillant les
différentes étapes de la réalisation du brevet. Il existe deux séries qui
correspondent à deux niveaux de difficulté.
Exemple du Brevet de Lecture
Pour valider un brevet, cela peut être à la demande de l’enfant quand il
pense avoir assez d’entrainement ou simplement lorsqu’il a réalisé un
travail que le professeur juge méritant.
Cette procédure comporte de nombreux avantages. Tout d’abord, l’élève
n’éprouve pas de pression sur les savoirs qui lui sont demandés et cela
augmente sa motivation de réussite. Ensuite, on l’encourage à s’épanouir
dans un domaine qui lui correspond et de développer ses compétences.
Enfin, on prend en compte les capacités de chacun et toutes ces disciplines
rendent l’école plus proche de la vie.
La mise en place de ce système est une vraie révolution dans les écoles
françaises et ne tarde pas à se faire connaitre dans le monde entier dès les
années trente. Aujourd’hui encore, des centaines d’établissements
appliquent le mouvement Freinet qui marquera un tournant dans le
développement de la différenciation pédagogique.
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4.1.5. De ces premières expériences à aujourd’hui
Le nombre d’enfants scolarisés à travers le monde augmente chaque année
et, avec lui, le taux d’hétérogénéité au sein des établissements scolaires. Il
devient donc quasiment inévitable de ne pas se poser la question d’une
mise en place d’une pédagogie différenciée dans chaque classe. Les
expériences citées précédemment n’étant présentes que dans des écoles
expérimentales, il fallut trouver une solution pour parer à ce besoin
grandissant d’adaptation. Le premier obstacle était de réussir à sensibiliser
les enseignants en leur proposant un accompagnement. En effet, ceux-ci
transmettaient leurs savoirs d’une certaine manière avec un objectif précis :
terminer le programme imposé par les institutions sans forcément avoir reçu
une formation adaptée. Ils ne faisaient aucune différence entre les
apprenants et les difficultés rencontrées.
En France, c’est en 1982 qu’on observe un changement avec André de
Peretti, ancien directeur du département de psychosociologie de l'éducation
à l'Institut National de Recherche pédagogique, qui va présenter son projet
des MAFPEN (missions académiques à la formation des personnels de
l'éducation nationale) qui laisseront place par la suite aux IUFM (instituts
universitaires de formation des maîtres), puis aux ESPE (écoles
supérieures du professorat et de l’éducation). Son défi sera de former des
professeurs capables de s’adapter à une nouvelle façon d’enseigner, à de
nouvelles modalités et que chacun reçoive une formation complète en
cumulant enseignements théoriques et périodes de stage. L’objectif n’est
plus d’avoir seulement un professeur faisant cours à une classe, mais une
multitude d’enseignements divers pour conduire les élèves aux
apprentissages requis. Au début des années 2000, Christian Puren,
didacticien des langues-cultures, a dirigé un programme commun européen
(PCE) en collaboration avec six autres experts afin de définir neuf domaines
de différenciation.
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On retrouve la différenciation :
 des objectifs : prendre en compte les compétences et besoins de
l’apprenant afin d’adapter les objectifs de la leçon à son profil ;
 des dispositifs : varier le matériel avec l’utilisation des TICE
(technologies de l’information et de la communication pour
l’enseignement), jeux, ardoises, papiers… et les méthodes utilisées
(travaux individuels ou en groupes, utilisation de l’espace de classe,
temps imparti…) ;
 des contenus : privilégier certains aspects de la séquence
didactique (culturel, lexical…) afin de mener à bien les objectifs tout
en prenant en compte les besoins de l’élève ;
 des supports : utiliser différents documents tant dans le contenu que
sur la charge cognitive que celui-ci va demander, mais qui iront dans
le même sens et permettront aux apprenants de mettre en commun
les informations qu’ils auront récupérées.
 des tâches : réquisitionner diverses compétences afin de mobiliser
les savoirs de chacun en proposant des consignes et une charge de
travail adaptées ;
 des aides et guidages : recevoir un appui écrit ou oral de la part du
professeur ou de ses camarades en fonction de ses besoins ;
 des méthodes : prendre en compte les différents types de mémoire
(visuelle, auditive et kinesthésique) pour proposer des approches
diverses qui permettront à chacun de choisir la méthodologie qui lui
convient ;
 de l’évaluation : utiliser l’évaluation diagnostique qui permettra,
dans un premier temps, de définir les compétences à approfondir.
Dans un deuxième temps, on utilisera les trois autres types de
contrôle des connaissances, à savoir : l’auto-évaluation, les
évaluations formative et sommative6 ;
6 L’évaluation formative se fait en cours d’apprentissage afin de voir où l’élève se situe et
quelles sont les compétences qu’il doit encore travailler. L’évaluation sommative est
réalisée à la fin d’un processus d’enseignement pour contrôler les acquis et certifier ou non
une compétence.
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 de la remédiation : faire une rétroaction sur chaque travail afin de
voir avec l’apprenant ce qu’il a compris ou non et voir ce qui est
envisageable pour remédier aux lacunes de celui-ci.
Aujourd’hui, nous prenons de plus en plus conscience qu’il n’y a pas une
façon d’enseigner, mais des façons d’enseigner et que l’adaptation est la
clé de la réussite. Nous voyons apparaitre dans le monde et notamment
dans le système anglo-saxon des méthodes qui essayent de s’imposer.
C’est le cas de la méthode UDL (universal design for learning) inventée aux
États-Unis au début des années 1990 et qui a été publiée pour la première
fois en 2002 par CAST (center for applied special technology). Leurs
premières recherches consistaient à trouver un moyen d’utiliser les
nouvelles technologies pour prodiguer une meilleure expérience en classe
aux enfants en situation de handicap. Au fur et à mesure des années, ils se
sont rendu compte que les méthodes et ressources nécessitaient d’être
améliorées afin d’offrir une éducation adaptée à tous. En effet, les
curriculums proposés par les écoles sont créés pour ce que CAST appelle
« l’étudiant typique ». Pourtant, ce dernier n’est qu’illusion. En effet, de
nombreuses études ont été menées afin de récupérer des données et
établir un profil moyen. Cependant, celui-ci ne correspondra surement qu’à
peu d’élèves dans la classe voire aucun et c’est pour cela qu’il faut trouver
des moyens d’adapter sa façon d’enseigner.
Afin d’apporter une solution à ce problème, les chercheurs ont mis en place
différentes aides dont « CAST UDL Exchange7 », une plateforme de
création, de partage de leçons et de ressources. Les professeurs qui
partagent leurs cours remplissent différentes informations et proposent
diverses approches pour, qu’une fois en classe, les élèves puissent choisir
la méthode d’apprentissage qui leur convient le plus (voir annexe 5 :
Exemple d’exercice proposé pour un cours d’anglais langue seconde (ESL),
p. XXVII).
7 À retrouver sur : http://udlexchange.cast.org/home
Page | 43
Cette méthode repose donc sur trois fondements (voir annexe 6 : Universal
Design for Learning Guidelines, p.XXIX) :
 l’engagement : pourquoi est-ce que j’apprends ?
 la représentation : qu’est-ce que j’apprends ?
 l’action et l’expression : comment est-ce que j’apprends ?
L’engagement représente la motivation fournie par chaque apprenant.
Celle-ci va dépendre de plusieurs facteurs personnels comme la culture, la
neurologie, les connaissances déjà acquises… mais aussi collectifs comme
la société, l’envie de travailler en groupe ou non. Il n’existe pas de moyen
idéal pour mobiliser chaque étudiant dans une tâche à réaliser.
L’engagement se décompose en trois grandes idées :
 l’intérêt de recrutement : le désir d’apprendre de nouvelles
connaissances dépend de celles déjà acquises. En effet, il sera
quasiment impossible d’attirer l’attention d’un apprenant si celui-ci ne
peut pas déceler la pertinence des informations face à lui. Il est
évident que chacun a des centres d’intérêt différents et il est donc
impossible de proposer un seul projet qui motivera tout le monde. Il
faut donc rendre l’élève actif en optimisant les choix individuels et
l’autonomie pour les mener vers l’objectif d’apprentissage. Il faut que
chacun se sente inclus, challengé et acteur de son apprentissage.
Une des pistes principales est de valoriser la pertinence et
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l’authenticité des données fournies. Il faut pouvoir se sentir connecté
à ces idées, c’est-à-dire pouvoir les appliquer à une situation
familière. Moins le modèle sera abstrait, plus l’étudiant se sentira
concerné. De plus, en minimisant les distractions et menaces qui
l’entourent, il pourra s’aventurer plus facilement. Un climat favorable
et rassurant lui permettra de prendre des risques concernant ses
apprentissages sans se sentir effrayé des conséquences que ses
erreurs pourraient attirer ;
 le soutien dans l’effort et la persistance : bien que certaines
personnes puissent réguler leur attention par elle-même et que ce
contrôle s’apprenne au fur et à mesure du temps, l’apport d’un
soutien extérieur est indispensable pour maintenir les efforts fournis.
Rappeler les objectifs régulièrement est important pour que les
apprenants ne perdent pas de vue le but premier des tâches à
réaliser. Proposer différentes pistes de travail et ressources permet
à chacun de choisir un parcours le mettant au défi, mais sans que
celui-là soit impossible à réaliser. Chaque élément mis à disposition
doit être une béquille pédagogique qui aidera les étudiants dans
l’accomplissement de leurs tâches, mais en aucun cas elle ne doit
donner la réponse. Elle est là pour aider et entretenir la motivation.
On encouragera aussi l’entraide entre les pairs. En effet, chacun
ayant ses forces et faiblesses, la collaboration est un excellent
moyen de garder la dynamique de classe. De plus, cela favorisera
l’esprit d’équipe et un soutien considérable intrinsèque au groupe.
Enfin, un point important pour soutenir l’engagement est la qualité
des rétroactions portée sur les travaux réalisés. Plus l’analyse sera
pertinente, constructive et accessible, plus celle-ci aura un impact
positif. Le but est qu’elle encourage la persévérance, qu’elle amène
l’apprenant à se questionner sur ce qu’il doit changer, quelles sont
les compétences qu’il doit améliorer pour éviter de commettre les
mêmes erreurs dans le futur ;
 l’autorégulation : même si l’environnement immédiat doit soutenir
l’apprenant pour que ce dernier continue de fournir des efforts et
montre de l’intérêt, il est important qu’il apprenne également à
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réguler son attention par lui-même. Cette capacité dépend de la
motivation initiale et des individus. Certains auront plus de facilité dès
le plus jeune âge, d’autres devront apprendre cette compétence.
Celle-ci est souvent très implicite dans le contexte scolaire. C’est
pour cela qu’il faut l’aborder comme une difficulté à part entière et la
prendre en considération afin qu’elle se développe tout au long de la
réalisation des objectifs. La confiance a un rôle essentiel dans ce
processus. On rend l’élève responsable et on augmente petit à petit
la fréquence des séances d’autoréflexion et d’autorenforcement pour
qu’il apprenne à porter un regard critique sur ce qu’il produit. Il faudra
pour cela lui fournir des guides, des pistes d’introspection. En
proposant différentes stratégies, il pourra alors choisir celles qui lui
conviennent le mieux. Celles-ci ne sont pas seulement valables pour
le travail accompli en classe, mais peuvent aussi être appliquées au
quotidien pour apprendre à gérer une situation anxiogène. Cela aura
comme répercussion d’apprendre la gestion du stress et de la
frustration et encourager l’étudiant à se battre plutôt que
d’abandonner devant un dessein qui lui semble impossible à réaliser.
En apprenant à gérer ses émotions, il apprendra plus facilement de
ses erreurs et progressera de façon significative dans ses projets.
La représentation indique que les apprenants diffèrent dans la façon dont
ils perçoivent et comprennent l’information qui leur est présentée. C’est pour
cela qu’il faut leur proposer différents supports afin que chacun puisse
sélectionner celui de son choix. Cela se fait au travers de trois lignes
directrices :
 la perception : elle cherche à proposer des moyens, des
alternatives à la personnalisation de l’affichage des informations
(auditif, visuel…). Le but est que chaque format soit flexible, qu’on
puisse modifier, sa taille, sa couleur, sa vitesse… et qu’il ne dépende
pas que d’un seul des cinq sens. Pour les documents auditifs, les
professeurs doivent pouvoir fournir des équivalents textuels
(transcription, synthèse, utilisation de symboles et émoticônes…). À
l’inverse, les documents visuels doivent être accompagnés de
Page | 46
descriptions, d’équivalents tactiles comme des objets se référant aux
concepts clés… ;
 la langue et les symboles : le but est de clarifier le vocabulaire, la
syntaxe, la structure… et de prendre en compte les différents
systèmes de langues afin d’en faciliter la compréhension (symboles,
notions mathématiques…). Pour cela, les concepts plus difficiles
doivent être abordés de plusieurs manières (donner des définitions,
des descriptions) et le lien entre chaque doit être explicité. De plus,
on autorisera l’utilisation de logiciels tels que « Text-to-Speech » qui
permettent de convertir un texte écrit en audio grâce à une voix de
synthèse. Enfin, la prise en compte de la langue dominante de l’élève
est une part importante de l’enseignement. On doit pouvoir fournir
des ressources permettant à chacun de comprendre. Il ne s’agit pas
là de tout traduire, mais de proposer des alternatives telles que
l’intégration de supports non linguistiques (photos, vidéos…) ;
 la compréhension : ici on cherchera à construire du sens et générer
de nouvelles compréhensions. C’est-à-dire, qu’on prendra en
compte les compétences que les élèves possèdent déjà afin qu’ils
les réutilisent. On favorisera alors les liens interdisciplinaires, les
cartes heuristiques… pour que les étudiants puissent exploiter un
maximum de leurs connaissances. On mettra également en
évidence les éléments clés tout en aidant l’apprenant à discerner ce
qui est pertinent ou non. Pour cela, on évitera donc tout élément
parasite qui pourrait l’induire en erreur. Enfin, on cherchera à stimuler
ces nouvelles aptitudes en y faisant référence au fil du temps et en
demandant à chacun de les réutiliser dans différentes situations.
L’action et l’expression requièrent de mettre en relation différentes
stratégies d’organisation et de pratique. Les compétences orales et écrites
sont propres à chacun et plus ou moins faciles d’accès en fonction des
difficultés auxquelles les personnes doivent faire face. Parmi les trois points
essentiels, on retrouve :
 l’action physique : elle regroupe les facultés motrices qu’un
apprenant doit mobiliser pour s’exprimer. On doit être capable de
Page | 47
présenter différentes méthodes de réponse et de navigation aux
apprenants comme, par exemple, interagir physiquement avec les
matériaux à la main, à la voix, au clavier, avec un joystick…
L’apprenant ne doit pas se sentir brimé et la façon de s’exprimer ne
doit pas être une barrière à la démonstration de ses connaissances.
Un excellent exemple de cette situation a été donné par Todd Rose,
directeur du programme « Mind, Brain and Education » à l’université
d’Harvard, lors de la conférence TEDx de Sonoma County en 2013.8
Il a présenté le cas du jeune Billy, élève de CM1 aux États-Unis.
L’institutrice affirmait qu’il avait un esprit scientifique, mais, à cause
de ses lacunes en lecture, il était incapable d’exprimer correctement
sa pensée et obtenait de mauvais résultats. La classe a donc
participé à une expérience où des chercheurs ont mis en place un
curriculum d’informatique. Après seulement quelques mois, Billy
avait totalement adopté cette nouvelle technologie qui
l’accompagnait dans ses apprentissages et l’avait fait progresser
considérablement. Dans le cas présent, le fait de changer le moyen
d’expression, le support, cela avait permis à l’apprenant d’être
capable de manifester correctement sa pensée ;
 l’expression et la communication : lié au premier point exprimé, il
faut être en mesure de proposer différents médias de communication
pour atteindre l’objectif. Par exemple, si l’objectif est « raconter une
histoire », on peut proposer aux apprenants de l’écrire, de la dessiner
ou de la raconter à l’oral. En effet, un enfant dyslexique aura du mal
à écrire un texte, mais pourrait être à l’aise à l’oral et ainsi s’exprimer
via ce moyen. A contrario, un élève timide se plaira surement plus à
écrire qu’à parler. Au final, l’objectif est atteint, seul le moyen d’y
accéder diffère. Plus il y aura d’outils et de supports proposés, plus
il y aura de chance que chacun y trouve les méthodes qui lui
conviennent le mieux ;
8 À regarder sur : https://www.youtube.com/watch?v=4eBmyttcfU4&feature=youtu.be
Page | 48
 les fonctions exécutives : les fonctions exécutives sont définies
« comme l’ensemble des processus permettant à un individu de
réguler de façon intentionnelle sa pensée et ses actions afin
d’atteindre des buts9 ». C’est-à-dire qu’elles permettent d’analyser
l’environnement proche pour prendre des décisions adaptées aux
différentes situations. Les professeurs vont alors enseigner aux
élèves comment se fixer des objectifs appropriés plutôt que de leur
donner directement la solution. Chacun doit trouver ce qui est
efficace ou non et doit créer son propre cheminement. Bien
évidemment, il faudra les guider petit à petit en établissant des
stratégies pour les mener à prendre des décisions pertinentes par
eux-mêmes dans le futur. Pour cela, il faut leur apprendre comment
focaliser leur attention sur ce qui est utile, établir des priorités pour
accélérer les processus de réalisation. On va alors chercher à
renforcer la mémoire de travail qui, bien souvent, est la cause d’une
activité désorganisée. En effet, cette mémoire permet de retenir les
informations seulement dans un court laps de temps, il faut donc
trouver des techniques pour maximiser la mémorisation. Par
exemple, on peut donner aux apprenants des listes à compléter ou
faire de la prise de notes. Ici encore, les rétroactions auront un rôle
important dans l’établissement des connaissances. Grâce à des
remarques construites, l’étudiant prendra conscience de ce qu’il doit
changer ou non et les méthodes apprises pourront s’installer dans
les fonctions exécutives afin que certaines deviennent automatiques.
À Frankston High School, certains points de l’UDL sont mis en place en
classes de langues, mais également dans les autres matières et hors de
l’école. Au niveau de l’engagement, de nombreuses actions sont mises en
place.
9 Chevalier, N. (2010). « Les fonctions exécutives chez l’enfant : Concepts et
développement ». Canadian Psychology, volume 51, n°3, p.149
Page | 49
Tout d’abord, concernant l’intérêt de recrutement, cela est flagrant grâce au
choix des matières. Dès l’année 10, les lycéens choisissent les cours qu’ils
souhaitent suivre et peuvent changer d’une année sur l’autre. Au final, ils
doivent passer au minimum quatre épreuves, mais sont libres d’en choisir
autant qu’ils le souhaitent. On gardera alors leurs quatre meilleures notes
et à celles-ci peuvent s’ajouter deux autres matières comptant pour 10% de
la note (fonctionnement similaire au choix d’une option pour le baccalauréat
français).
En tout, c’est plus de 150 matières qui sont proposées et 70 d’entre elles
sont enseignées à FHS (voir annexe 7 : Liste des cours proposés à
Frankston High School pour le VCE, p.XXX). Seul l’anglais est obligatoire,
les autres sont au choix des élèves. Pour choisir, les lycéens se renseignent
sur les prérequis demandés par les universités qu’ils souhaitent
potentiellement intégrer. Aujourd’hui, il y en a de moins en moins qui sont
imposés, car il est très difficile de demander à des élèves d’année 10 de
faire un choix de parcours aussi tôt dans leur cursus. On les encouragera
donc à faire une sélection logique en fonction de leurs aptitudes et envies,
mais cela ne les pénalisera pas pour la suite.
On retrouve également des enseignements VET (vocational education and
training) qui se focalisent sur l’acquisition de compétences pratiques dans
des domaines spécifiques. Elles sont l’équivalent des enseignements
français dans les baccalauréats professionnels et technologiques.
L’avantage de réunir ces enseignements et les généraux est que chacun
peut choisir de les introduire dans son cursus et il n’y a pas de préjugés sur
les cours que chaque personne sélectionne. En effet, malheureusement, en
France, les filières professionnelles et technologiques reflètent une image
plutôt négative et ne sont donc pas encouragées, elles sont surtout vues
comme un second choix.
Par ailleurs, l’Australie met un point d’honneur à l’égalité des chances.
Chaque étudiant doit se sentir libre d’étudier ce qu’il souhaite, peu importe
ses origines ou son appartenance sociale. Grâce à ce large éventail de
possibilités, les élèves sont assurés de suivre des cours qui leur plaisent et
cela se ressent en classe.
Page | 50
Ensuite, relativement au soutien apporté, les professeurs sont très présents
pour les élèves. C’est par ailleurs la première chose que les étudiants
français en échange ont mentionnée en arrivant à Frankston High. Ils
étaient impressionnés par la relation professeur-élève assez typique des
pays anglo-saxons et encore plus de l’Australie. En effet, l’accent est porté
sur l’humain plus que sur les études et la compétition n’a pas sa place dans
les salles de cours. Cela est d’autant plus vrai dans les classes de langues.
L’école fait appel à des assistants ayant le français et le japonais comme
langue maternelle dans le but de soutenir ses étudiants ayant choisi une
langue étrangère. En français, la professeure propose même des cours
supplémentaires sur son temps libre afin de faire progresser ses élèves.
Alors qu’officiellement ceux-ci sont censés avoir cinq cours de français par
semaine, ils en ont trois supplémentaires, deux avec l’assistant et un autre
avec leur professeure. De plus, les élèves s’entraident énormément. Ils sont
libres de se déplacer pendant les cours pour demander de l’aide à leurs
camarades.
Enfin, concernant l’autorégulation, les élèves sont rendus responsables dès
le plus jeune âge. Cela commence hors de la classe notamment avec
l’aménagement des établissements scolaires. Aucun n’est fermé par des
barrières. Les élèves doivent prendre conscience que les enseignements
dispensés sont pour eux, pour les aider à grandir et devenir citoyens. À
partir de là, la mentalité change et venir à l’école apparait moins comme
une contrainte et obligation. Cependant, comme dans la majorité des
écoles, l’autorégulation n’est pas vraiment abordée en classe.
Même si le lycée tend à trouver des solutions pour s’adapter (avec
l’utilisation des tablettes en classe par exemple ou les cours d’anglais
langue seconde), les cours restent assez classiques. C’est-à-dire que les
professeurs dispensent leurs enseignements d’une certaine façon, sans
proposer différents moyens de parvenir aux objectifs fixés.
Page | 51
4.2. Une différenciation pédagogique accompagnée d’une
individualisation
Il faut tout d’abord donner une définition claire des termes employés dans
ce contexte d’éducation. Nous retiendrons quatre concepts à mettre en
opposition pour bien comprendre les différentes subtilités :
personnalisation, individuation, différenciation et individualisation.
La personnalisation est considérée comme un processus qui prend en
compte chaque apprenant en tant que personne à travers des procédés qui
contribuent à l’éducation de chacun dans le but de se forger une
personnalité, une identité. Différents facteurs sont alors pris en
considération tels que l’expérience, les aptitudes, les acquis, les manières
d’agir, les besoins ou encore les aspirations. On cherche à amener l’élève
à une certaine autonomie afin qu’il puisse, par la suite, évoluer dans
diverses situations et s’adapter efficacement. La personnalisation s’établit
dans un cadre où l’enfant se construit comme membre d’une collectivité.
Cette personnalisation s’installe au cœur d’un processus dit d’individuation.
Ce dernier permet de donner accès à l’élève à une plus grande
indépendance en le menant à se responsabiliser, s’assumer et enrichir ses
savoirs et compétences pour se différencier de ses homologues, exister
comme individu.
Quant à la différenciation et l’individualisation, le contraste se fera dans le
domaine scolaire. Ce sont des modes d’organisation pédagogiques qui
s’inscrivent dans le processus de personnalisation. La différenciation
pédagogique vise à assouplir son cadre d’éducation afin que les étudiants
puissent apprendre en fonction de leurs besoins, qu’ils soient amenés à
réfléchir en fonction de leurs méthodes d’appropriation autour d’un même
objectif. Cette différenciation pourra porter sur la gestion du temps de travail
en classe (classe entière, groupes…) et sur la manière d’aborder les
ressources exploitées (utilisation d’un même document, mais avec des
Page | 52
exercices différents pour mener à des connaissances similaires par
exemple). En revanche, l’individualisation est une approche où l’apprenant
travaille de manière individualisée au regard de ses acquis et de ses
besoins. Avec les consignes et conseils du professeur, il va effectuer les
tâches demandées en autonomie grâce aux documents qui lui seront
fournis ou qu’il cherchera par lui-même. L’individualisation peut donc être
vue comme une partie d’une pédagogie différenciée, les deux se
complétant, mais ne dépendant pas l’une de l’autre.
En résumé, nous pouvons hiérarchiser les quatre dénominations sous la
forme suivante :
Lors d’une mise en place de différenciation pédagogique, les apprenants se
rassembleront autour de mêmes objectifs alors que l’individualisation
permettra à chacun d’avoir ses propres aspirations.
À Frankston High, cela est instauré dans les classes de langues et
notamment en cours de français pour les années 12. Pour rappel, les
lycéens doivent préparer une étude approfondie sur le sujet de leur choix.
Ils doivent alors faire des recherches sur ce thème et envisager les
questions qui pourraient leur être posées. Même s’ils sont censés choisir ce
Individuation
Personnalisation
Différenciation
Individualisation
Page | 53
sur quoi ils souhaitent travailler, beaucoup de professeurs choisissent un
unique sujet pour tous les élèves. Cela résulte d’un manque de motivation
certain de leur part. Au lycée de Frankston, chaque étudiant a choisi son
sujet et ils sont donc plus enclins à faire des recherches dessus. Pour leur
présentation, ils sélectionnent trois documents de leur choix. Cela peut être
un article, une interview, un livre, un reportage, un film… Ils ont donc une
trame commune à suivre, mais le reste ne dépend que d’eux.
Aussi, en vue des évaluations (appelées outcome ou SAC (school assessed
coursework)), chaque professeur se doit de fournir à ses étudiants une
description de la tâche qui va leur être demandée, ainsi que les critères de
notation (voir annexe 8 : Exemple de description et critères d’évaluation lors
des devoirs réalisés en classe, p.XXXIII). Cela est une obligation en
Australie afin que les élèves se préparent au mieux. On veut les rendre
actifs de leurs apprentissages et qu’ils trouvent un sens à ceux-ci.
Pendant les cours en groupe, les objectifs étaient les mêmes pour tous,
nous travaillions sur une ou deux compétences en particulier (souvent la
compréhension écrite ou orale et l’expression orale), mais à plusieurs
niveaux de difficulté. Par exemple, j’ai travaillé avec eux la compréhension
et la synthèse d’un article. Pour cela, j’ai sélectionné diverses chroniques
et chaque étudiant en avait une différente. Ils avaient environ une demi-
heure pour lire et préparer ce qu’ils allaient dire. Le but était de présenter le
texte, le sujet et de l’expliquer à leur camarade. Les articles les plus simples
faisaient une page et comportaient un vocabulaire facilement
compréhensible. Les plus compliqués portaient sur des sujets plus
inhabituels, étaient plus longs et avec un vocabulaire plus complexe. Je
m’adaptais donc aux capacités de mes élèves et leur donnais la possibilité
de travailler sur un document les mettant au défi, mais avec une tâche
réalisable. Les objectifs parallèles étaient de développer leur lexique, leur
spontanéité, mais également la prononciation et l’articulation qui leur font
souvent défaut par manque de pratique.
L’individualisation était réalisée lors des sessions individuelles. En effet, en
plus de travailler sur leur étude approfondie, il était possible de cibler les
Page | 54
besoins de l’apprenant et de s’adapter à leur méthode d’appropriation. Le
travail pouvait être autonome (je leur laissais du temps pour se pencher sur
une tâche et ensuite nous corrigions et en discutions ensemble) ou
directement avec le professeur. Le but était de cibler les besoins de chaque
élève pour approfondir les points qui nécessitaient des explications.
L’avantage premier était que le cours était totalement mis en place pour
réfléchir sur leurs lacunes. De plus, cela pouvait être abordé grâce à
différents sujets en fonction des intérêts de chacun.
4.3. L’importance de la personnalisation
Comme nous l’avons déjà mentionné plusieurs fois auparavant, chaque
apprenant est unique, cela implique donc qu’ils ont des capacités de
penser, réfléchir, différentes les uns des autres. En plus des facteurs
intrapersonnels, l’environnement joue un rôle important dans la motivation
et l’implication des apprenants. Une personnalisation des apprentissages
est donc nécessaire si l’on veut être capable de susciter l’intérêt.
Cela ne se voit pas seulement dans le domaine de l’éducation, mais
également dans tout autre secteur impliquant des relations entre pairs.
Depuis de nombreuses années, on s’efforce de s’adapter à notre
interlocuteur afin de lui fournir le service le plus juste possible, mais
l’enseignement avait été délaissé sur ce plan. Dans le but de prodiguer une
pédagogie égalitaire, il était préférable d’enseigner la même chose, de la
même façon à tous. Seulement, égalité ne veut pas forcément dire équité.
Pour cela, il faut proposer des formations permettant à chacun de réussir
en fonction de ses besoins et facultés.
Mais au-delà de la réussite sur le plan scolaire, il faut aussi regarder ce que
la personnalisation va apporter à l’individu. En effet, particulariser un cours
va avoir des répercussions sur l’apprenant en tant que personne. Les
conséquences peuvent être les suivantes :
Page | 55
 amélioration des performances : comme dit ci-dessus, la
personnalisation des apprentissages va, tout d’abord, permettre
d’améliorer les résultats scolaires. En se focalisant sur les besoins
de l’apprenant, on cible ses acquis et lacunes dans le but de
renforcer ces dernières. L’évaluation joue un rôle important
également, elle doit être adaptée. En effet, changer ses méthodes
d’enseignement implique forcément de fournir des évaluations non
traditionnelles. Pour cela, on doit penser à différentes façons de
contrôler les compétences et ne pas seulement donner une
évaluation sommative en fin de chapitre. En proposant divers
modèles, chacun pourra montrer de quoi il est capable. De plus, un
suivi régulier afin d’attester des progressions des élèves est
nécessaire ;
 augmentation de la confiance en soi : le fait de recevoir un
enseignement personnalisé permet à l’étudiant de se sentir valorisé.
Le professeur s’intéresse à lui en tant qu’individu et pas seulement
comme un quelconque élève de la classe. Cette reconnaissance lui
donne alors envie de réussir afin de rendre fier l’enseignant. Cela a
pour conséquence d’augmenter la motivation et l’implication dans le
travail fourni. Plus l’élève sera engagé dans ses productions, plus il
se sentira sûr de lui et prendra des risques dans ses apprentissages
qui le mèneront à de nouvelles connaissances ;
 bonification de la relation élève-professeur : en plus de prendre
confiance en lui, l’apprenant fera confiance à son enseignant. On sait
que la relation entre les deux parties peut parfois être conflictuelle
due à la distance instaurée. En s’intéressant particulièrement à ses
élèves, l’enseignant apprendra à les connaitre un peu plus sur le plan
personnel. L’écart entre les deux se resserre alors et permet de créer
une ambiance profitable à tous où chacun se sent plus libre de
s’exprimer ;
 développement de l’autonomie et de l’entraide : en prenant en
compte les sujets qui intéressent les apprenants, on les motive à
travailler et s’impliquer dans leur travail. Ceux-ci seront alors plus
enclins à effectuer des recherches qui pourraient leur être utiles. Ils
Page | 56
ne se sentiront plus passifs et contraints d’être là, mais se rendront
actifs. De plus, ils aideront volontiers leurs camarades. Il est plus
facile de parler de quelque chose qui nous passionne et donc que
l’on maîtrise ;
 élargissement des centres d’intérêt : effectuer de nouvelles
recherches et parler avec ses pairs entrainent obligatoirement une
ouverture d’esprit et de nouveaux horizons. En plus d’approfondir les
connaissances déjà acquises, les étudiants porteront leur regard sur
de nouveaux sujets qu’ils n’avaient peut-être jamais considérés
auparavant.
D’autre part, cette personnalisation va avoir des répercussions sur
l’enseignant. Sa façon de faire cours en sera impactée. Celui-ci élargira
également ses compétences et connaissances en s’impliquant auprès
de chaque élève. Il trouvera de nouvelles méthodes et idées au fur et à
mesure qu’il rencontrera divers profils. Plus il verra ses apprenants
investis, plus il aura envie d’en faire de même.
La personnalisation entraîne donc un cercle d’actions positives et
produit un climat d’apprentissage favorable permettant à chacun de
réaliser son travail en toute sérénité.
4.4. Les difficultés d’un parcours différencié
Même si en théorie cela semble être la solution idéale, en pratique, elle est
beaucoup plus difficile à mettre en place.
Tout d’abord, il faut faire face à l’hétérogénéité des élèves dans des classes
assez nombreuses. En France comme en Australie (et également dans
beaucoup d’autres pays), le nombre d’élèves oscille régulièrement entre 25
et 30 par classe. Il est donc très difficile de mettre en place un programme
personnalisé tout en respectant les exigences des systèmes éducatifs.
Page | 57
Ensuite, les professeurs sont rarement préparés à faire face à ce genre de
situation. Bien qu’aujourd’hui on tende à les former dans le but d’instaurer
un certain niveau de personnalisation, dans la réalité, il est assez compliqué
de mettre ces apprentissages à profit. En effet, cela demande beaucoup
d’énergie, d’investissement et de ressources qui ne sont souvent pas
fournies. Les enseignants se sentent alors dépassés et n’obtiennent pas
toujours le soutien espéré, tout particulièrement quand l’école et les autres
professeurs ne se sentent pas concernés et s’en tiennent à la méthode
traditionnelle.
Certains établissements tentent de différencier les niveaux pour essayer
d’obtenir des classes plus homogènes, mais, là encore, cela n’a pas
toujours l’effet escompté. En général, les élèves se retrouvant dans la
classe des plus « faibles » (exemple de la standard class à FHS) ont
conscience de la situation et ne produisent plus aucun effort. Puisqu’ils ont
été catégorisés ainsi, ils ne voient pas l’intérêt de fournir le moindre travail.
À l’inverse, les étudiants dans les classes de niveau avancé savent qu’ils
sont considérés comme « bons élèves ». On observe alors deux réactions
possibles à cela. D’un côté, il y aura les étudiants qui poursuivront leurs
efforts pour maintenir un certain niveau d’exigence imposé par la société et
donc à eux-mêmes. De l’autre côté, il y aura ceux qui pensent que tout est
acquis et qu’ils n’ont plus besoin de travailler autant qu’avant.
Une autre question qu’on peut se poser est celle de l’adaptabilité dans le
futur. Si une pédagogie différenciée était totalement mise en place, les
étudiants pourraient avoir plus de difficultés à surmonter des événements
et situations par la suite qui ne pourraient s’adapter à eux.
4.5. Comparaison des systèmes français et australien
Le but de la différenciation pédagogique est de lutter contre le décrochage
scolaire et les inégalités tout en poussant chaque apprenant à donner le
meilleur de lui-même. L’organisme PISA (programme for international
La différenciation pédagogique : une voie vers la réussite ?
La différenciation pédagogique : une voie vers la réussite ?
La différenciation pédagogique : une voie vers la réussite ?
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La différenciation pédagogique : une voie vers la réussite ?

  • 1. LA DIFFÉRENCIATION PÉDAGOGIQUE : UNE VOIE VERS LA RÉUSSITE ? Comparaison de la France et l’Australie Master 2 Linguistique & Didactique Parcours Didactique en Contextes Spécifiques Voie professionnelle 2017 – 2018 FAVARO Aurélie
  • 2. Page | 2 1. Il n’y a pas deux apprenants qui progressent à la même vitesse. 2. Il n’y a pas deux apprenants qui utilisent les mêmes techniques d’étude. 3. Il n’y a pas deux apprenants qui résolvent les problèmes exactement de la même manière. 4. Il n’y a pas deux apprenants qui se comportent de la même façon. 5. Il n’y a pas deux apprenants qui possèdent le même profil d’intérêts. 6. Il n’y a pas deux apprenants qui soient motivés au même point. 7. Il n’y a pas deux apprenants qui soient motivés pour atteindre les mêmes buts. 8. Il n’y a pas deux apprenants qui soient prêts à apprendre en même temps. 9. Il n’y a pas deux apprenants qui aient les mêmes capacités d’apprentissage Richard Burns1 1 Burns, R. (1973). « Methods for individualizing instruction ». The Educational Technology Review Series, n°5, p.45
  • 3. Page | 3 Résumé : Bien que la différenciation pédagogique existe depuis plus d’un siècle, les chercheurs et pédagogues du monde entier s’y intéressent tout particulièrement depuis quelques années. Alors que celle-ci était, dans un premier temps, réservée aux enfants présentant un handicap et nécessitant des cours adaptés, elle s’est étendue au fur et à mesure à un plus large panel d’apprenants. La pédagogie différenciée a alors commencé à être utilisée avec les étudiants présentant des troubles du langage ou encore intellectuellement précoces. Aujourd’hui, nous nous rendons compte que chaque personne est unique et présente donc des capacités toutes plus différentes des unes des autres, ainsi que des centres d’intérêt divers. Dans ce mémoire, mon but est de décrire les études réalisées depuis l’apparition de la différenciation pédagogique et l’impact que celles-ci ont eu sur l’enseignement moderne dans le monde entier, notamment en Australie et en France. Mots-clés : Australie, France, différenciation pédagogique, individualisation, apprentissage adapté
  • 4. Page | 4 Abstract : Although pedagogical differentiation has been around for more than a century, researchers and educators around the world have been particularly interested in it for a few years. While this was initially reserved for children with disabilities and required adapted courses, it has gradually spread to a wider range of learners. Differentiated instruction then began to be used with students with language disorders and those who are recognised as Expert Learners. Today, we realize that each person is unique and therefore has different abilities, as well as having different interests. In this thesis, my aim is to describe the studies carried out since the emergence of educational differentiation and the impact they have had on modern education throughout the world, particularly in Australia and France. Keywords : Australia, France, differentiated instruction, individualization, adapted learning
  • 5. Page | 5 Remerciements Je souhaite tout d’abord remercier l’ensemble des professeurs du Master Linguistique et Didactique pour leurs enseignements théoriques et le partage de leur savoir-faire. Toutes ces connaissances sont venues s’ajouter à celles acquises au fil de ma scolarité et m’ont ainsi confortée dans mon projet professionnel. Je remercie particulièrement Mme Skrovec d'avoir accepté d’être ma directrice de mémoire et ainsi suivre mon évolution dans le domaine professionnel pour ce deuxième stage à l’étranger. Je remercie aussi toute l’équipe du lycée de Frankston, les professeurs comme l’équipe administrative de m’avoir merveilleusement bien accueillie et intégrée si rapidement ; en particulier ma tutrice Bibi et les autres professeurs de français Chris, Joshua, Judith, Kate, Danielle et Ben pour avoir été présents tout au long de mon stage ainsi que les professeurs de japonais Tonia, Yuka, Lian, Seona et Rena pour leur soutien et leur bonne humeur. Merci également à mes deux familles d’accueil australiennes, qui ont fait de ces 7 mois une expérience inoubliable. Enfin, je remercie ma famille et mes amis qui m’ont apporté une aide précieuse tout au long de cette période. Merci à tous.
  • 6. Page | 6 Avant-propos J’ai réalisé ce stage dans le cadre de ma deuxième année de Master Linguistique et Didactique, parcours Didactique en Contextes Spécifiques, voie professionnelle à l’Université d’Orléans. Cette expérience, bien plus longue que celle effectuée en première année de Master, avait pour but de mettre en pratique les connaissances acquises lors des enseignements théoriques. Après ma première expérience comme professeure de FLE (français langue étrangère) à San Francisco, j’ai souhaité rester dans l’enseignement à l’étranger et en pays anglophone, chérissant particulièrement cette langue. Lors de mon stage de licence, j’ai eu l’occasion de travailler avec des classes de petite et moyenne sections de maternelle, puis avec des adultes aux États-Unis. Je suis ravie d’avoir pu découvrir un nouveau public en Australie : les adolescents. Je suis donc partie 7 mois à Frankston et ai ainsi eu la chance d’enseigner à « Frankston High School », appelé également « Frankston High » ou encore FHS. Je me suis posée beaucoup de questions avant mon départ, notamment concernant les missions qui me seraient demandées, mais aussi les méthodes d’enseignement adoptées étant dans un établissement public.
  • 7. Page | 7 Sommaire Remerciements................................................................................................................................ 5 Avant-propos................................................................................................................................... 6 Liste des abréviations et sigles utilisés............................................................................................. 9 Introduction....................................................................................................................................11 1. Les politiques linguistiques et pédagogiques de l’Australie ............................................................ 15 1.1. Le contexte linguistique en Australie et la situation du français......................................... 15 1.2. Les langues étrangères dans le contexte scolaire................................................................ 17 1.3. Devenir professeur de FLE en Australie............................................................................... 20 2. Présentation de l’établissement...................................................................................................... 22 2.1. La structure.......................................................................................................................... 22 2.2. Le public visé........................................................................................................................ 24 2.3. L’équipe pédagogique ......................................................................................................... 24 2.4. L’apprentissage des langues étrangères à Frankston High School ...................................... 25 3. Le déroulé du stage......................................................................................................................... 28 3.1. Les missions ......................................................................................................................... 28 3.2. Les cours en classe entière .................................................................................................. 28 3.3. Les cours en groupe............................................................................................................. 31 3.4. Les cours individuels............................................................................................................ 31 4. Vers une pédagogie différenciée..................................................................................................... 33 4.1. Les origines de la pédagogie différenciée............................................................................ 33 4.1.1. Le plan Dalton .......................................................................................................... 33 4.1.2. La méthode Winnetka.............................................................................................. 35 4.1.3. L’école expérimentale du Mail................................................................................. 36 4.1.4. Les recherches de Freinet ........................................................................................ 37 4.1.5. De ces premières expériences à aujourd’hui........................................................... 40 4.2. Une différenciation pédagogique accompagnée d’une individualisation ........................... 51 4.3. L’importance de la personnalisation ................................................................................... 54 4.4. Les difficultés d’un parcours différencié.............................................................................. 56 4.5. Comparaison des systèmes français et australien............................................................... 57 5. Bilan du stage.................................................................................................................................. 64 5.1. Mes attentes........................................................................................................................ 64
  • 8. Page | 8 5.2. Les difficultés rencontrées................................................................................................... 64 Conclusion ......................................................................................................................................66 Références......................................................................................................................................68 Ouvrages généraux : ....................................................................................................................... 68 Articles & publications : .................................................................................................................. 68 Autres documents :......................................................................................................................... 72 Sitographie :.................................................................................................................................... 73 Annexes..........................................................................................................................................76 Annexe 1 : Niveau de français attendu en fonction des classes ........................................................ I Annexe 2 : Niveaux communs de référence pour les langues .........................................................IV Annexe 3 : Syllabus des années 10 de Frankston High School........................................................VII Annexe 4 : Exemple sujet de l’épreuve de français pour le VCE....................................................XIV Annexe 5 : Exemple d’exercice proposé pour un cours d’anglais langue seconde (ESL) ............XXVII Annexe 6 : Universal Design for Learning Guidelines ..................................................................XXIX Annexe 7 : Liste des cours proposés à Frankston High School pour le VCE ..................................XXX Annexe 8 : Exemple de description et critères d’évaluation lors des devoirs réalisés en classeXXXIII Annexe 9 : Rapport semestriel d’un élève d’année 9 ..............................................................XXXVIII
  • 9. Page | 9 Liste des abréviations et sigles utilisés CAST Center for Applied Special Technology (centre de technologie spéciale appliquée) CECRL Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues CEPE Certificat d’Études Primaires Elémentaires CNESCO Conseil National d’Évaluation du système Scolaire DELF Diplôme Élémentaire de Langue Française ESL English as a Second Language (anglais langue seconde) ESPE Écoles Supérieures du Professorat et de l’Éducation FHS Frankston High School FLE Français Langue Étrangère IFE Institut Français de l’Éducation IUFM Instituts Universitaires de Formation des Maîtres LOTE Language Other Than English (langue autre que l’anglais) LV1 Langue Vivante 1 MAFPEN Missions Académiques à la Formation des Personnels de l'Éducation Nationale
  • 10. Page | 10 OCDE Organisation de Coopération et de Développement Économiques PCE Programme Commun Européen PISA Programme for International Student Assessment (programme d'évaluation internationale des étudiants) SAC School Assessed Coursework (cours évalué par l’école) TICE Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement UDL Universal Design for Learning (plan universel pour l’apprentissage) UPE2A Unité Pédagogique pour Élèves Allophones Arrivants VET Vocational Education and Training (enseignement et formation professionnels) VIT Victorian Institute of Teaching (institut d’éducation de Victoria) VCE Victorian Certificate of Education (certificat d’éducation de Victoria – équivalent du baccalauréat français) QCM Questionnaire à Choix Multiples
  • 11. Page | 11 Introduction Le nombre d’enfants scolarisés dans le monde augmente chaque année et, avec lui, la diversité des profils. La différenciation pédagogique devient alors un point qu’il semble important d’aborder au sein de chaque classe afin de pouvoir adapter au mieux les leçons et trouver des solutions qui correspondent à chacun. Les premières tentatives apparaissent au début du XXème siècle au travers d’expériences menées dans différents établissements à travers le monde, mais le besoin de diversifier les apprentissages se fait de plus en plus ressentir aujourd’hui. Encore récemment, l’idée commune que ces méthodes étaient réservées aux élèves jugés « différents » (situation de handicap, troubles du langage, intellectuellement précoce…) subsistait. Pourtant, celles-ci permettent à chacun d’étudier en fonction de ses capacités et de son rythme. En effet, Howard Gardner, psychologue du développement américain, a développé la théorie selon laquelle il existe des intelligences multiples. Il les a divisées en neuf groupes :  l’intelligence linguistique : c’est la capacité à utiliser et comprendre les mots et les nuances de sens pour exprimer ses émotions et décrire le monde qui nous entoure. Elle est utilisée dès que les compétences écrites et orales sont réquisitionnées ;  l’intelligence logico-mathématique : c’est la capacité de penser de façon abstraite et logique qui permet d’analyser les causes et conséquences d’actions réalisées. Elle est utilisée dans la compréhension de problèmes mathématiques par exemple. Avec l’intelligence linguistique, c’est la plus présente dans les salles de classe ;
  • 12. Page | 12  l’intelligence spatiale : c’est la capacité à mettre en relation des objets qui nous entourent afin de se repérer dans un environnement donné. Elle est utilisée pour visualiser un objet, concevoir un plan, une carte mentale ;  l’intelligence musicale : c’est la capacité de percevoir des rythmes et mélodies dans le but de les interpréter et d’en créer de nouveaux. Elle est utilisée dès lors qu’une mélodie est entendue ;  l’intelligence corporelle-kinesthésique : c’est la capacité de retenir via des mouvements réalisés. Elle est utilisée dès lors qu’un mouvement est associé à une idée ;  l’intelligence interpersonnelle : c’est la capacité de communiquer avec ses pairs, de les comprendre et ainsi anticiper certains comportements. Elle est utilisée lors d’interactions et permet d’ajuster son comportement en fonction des personnes qui nous font face ;  l’intelligence intrapersonnelle : c’est la capacité de se former une représentation de soi en connaissant ses forces et faiblesses. Elle est utilisée dès qu’un individu se retrouve seul et doit faire face à ses sentiments, ses émotions ;  l’intelligence naturaliste : c’est la capacité d’interpréter et classifier le monde qui nous entoure afin d’être sensible à notre environnement. Elle est utilisée dès qu’on cherche à catégoriser les choses pour en avoir une meilleure représentation ;  l’intelligence existentielle : c’est la capacité à s'interroger sur le sens et l’origine des choses. Elle est utilisée dès qu’on se questionne sur des caractéristiques existentielles de la condition humaine et permet de se situer dans l’espace-temps en prenant conscience des limites cosmiques. Cette dernière n’est pas considérée comme un type d’intelligence à part entière par Gardner, mais plus comme une aide à la réflexion sur notre existence en fonction de nos expériences.
  • 13. Page | 13 Chacune de ces formes d’intelligence est utilisée par un individu, mais il y en a toujours une qui prime sur les autres et c’est celle-ci qui nous permet d’apprendre et de retenir efficacement. Grâce à cela, il est facile de comprendre que l’instruction doit être adaptée pour répondre aux besoins exprimés par les apprenants. En France, l’idée de pédagogie différenciée est de plus en plus évoquée afin de trouver des solutions qui sauront combiner programmes scolaires et éducation ajustée. Mais qu’en est-il à l’autre bout du monde ? Certaines méthodes tendent à être appliquées en Australie dans le but de former les élèves du mieux possible. Je me suis donc focalisée sur ce qui est déjà mis en place, principalement dans l’État de Victoria, afin de voir ce qui fonctionne, mais également les limites de ces programmes dans un contexte linguistique particulier. Afin de clarifier la suite de mes propos, voici un tableau récapitulatif des équivalences des classes françaises et australiennes : Classes françaises Classes australiennes CP Année 1 CE1 Année 2 CE2 Année 3 CM1 Année 4 CM2 Année 5 Sixième Année 6 Cinquième Année 7 Quatrième Année 8 Troisième Année 9 Seconde Année 10 Première Année 11 Terminale Année 12
  • 14. Page | 14 Les Australiens combinent le collège et le lycée en une seule école appelée « High School » qu’ils divisent ensuite en « Junior School » de l’année 7 à l’année 10, puis en « Senior School » pour les années 11 et 12.
  • 15. Page | 15 1. Les politiques linguistiques et pédagogiques de l’Australie 1.1. Le contexte linguistique en Australie et la situation du français L’Australie n’a pas de langue officielle juridiquement déclarée, mais l’anglais étant la langue la plus parlée, elle a obtenu le statut de facto. Plus de 200 langues sont parlées sur la plus grande île du monde dont plusieurs dialectes aborigènes et des langues issues de l’immigration. En effet, de nombreuses personnes venues principalement d’Europe et d’Asie ont afflué vers l’Australie pendant la ruée vers l’or dès les années 1850. Aujourd’hui, le pays reste le quatrième au monde en termes d’immigration, attirant de plus en plus d’étrangers et notamment des Français convoitant « l’Australian dream » avec de nombreuses opportunités d’emplois et accords liant la France à l’Australie. On observe par ailleurs une augmentation de 86% des foyers parlant français depuis 1996, et de 64% seulement sur les dix dernières années. Source : Australian Bureau of Statistics & Australian Government Department of Home Affairs
  • 16. Page | 16 Le français est donc de plus en plus présent sur le territoire et les cours se développent afin de répondre aux besoins et demandes des résidents. Cela est dû en partie à la politique linguistique du pays qui se veut multiculturel et encourage ses habitants à apprendre une langue étrangère. Depuis 1996, le programme LOTE (language other than English) oblige chaque élève à étudier une langue vivante étrangère à partir de la septième année, et ce jusqu’à la fin de la neuvième année ; cela devient par la suite une option. Dans certains États comme l’Australie-Occidentale, l’apprentissage d’une langue vivante a même été rendu obligatoire dès l’année 3. Les langues les plus enseignées sont le français, l’allemand, l’indonésien et le japonais. La présence du français est due principalement à l’immigration. Ces mouvements de population encouragent également la formation de couples binationaux qui vont s’établir en Australie et qui utiliseront le français à la maison au même titre que l’anglais. Mais au-delà des francophones venus d’Europe, on retrouve beaucoup de personnes venant de l’île Maurice et encore plus de la Polynésie française. En effet, grâce à cette proximité, des accords spécifiques se sont créés entre les pays de l’Océanie avec la possibilité de voyager facilement, sans visa, entre les îles françaises et l’Australie. De plus, les Polynésiens peuvent bénéficier de bourses particulières pour étudier en études supérieures sur le continent australien. La Polynésie représente un marché commercial important pour l’Australie, ce qui explique également l’influence de la langue française. Mais ces relations économiques sont aussi très présentes avec la Métropole. Plus de 500 entreprises françaises sont présentes sur place, dont de grands groupes comme Total, Suez, Areva ou encore Thales, prodiguant ainsi de l’emploi aux francophones. En 2009, un accord a été conclu entre la France et l’Australie permettant la reconnaissance mutuelle des diplômes et également la mise en place de doubles-diplômes entre les deux pays pour la majorité des écoles.
  • 17. Page | 17 À tout cela s’ajoute la popularité mondiale du français. En effet, la langue de Molière est la cinquième langue la plus parlée au monde, la deuxième apprise comme langue étrangère après l’anglais, la troisième langue des affaires dans le monde et la quatrième langue d’internet. Cette popularité est entretenue par la reconnaissance mondiale de la culture française (gastronomie, littérature…) qui attise la curiosité de tous et l’envie de parler la langue acceptée comme l’une des plus romantiques du monde. Les médias francophones sont également nombreux en Australie, autant dans la presse écrite et en ligne (Le courrier australien, Le Petit Journal…), qu’à la radio et la télévision (SBS, TV5, Radio France Internationale…). 1.2. Les langues étrangères dans le contexte scolaire Dans les années soixante, le curriculum australien était basé sur celui de la Grande-Bretagne. L’étude de deux langues étrangères était alors obligatoire et extrêmement valorisée pour l’entrée à l’université. Les élèves avaient le choix entre le latin, le grec, l’allemand et le français. Cependant, cet engouement pour les langues chuta lorsque le gouvernement adopta un curriculum similaire à celui des États-Unis en abandonnant les langues au profit des mathématiques et des sciences. En 1990, seulement 12% des élèves d’année 12 étudiaient alors une langue étrangère contre 40% dans les années soixante. Depuis les années soixante-dix, de nombreuses langues sont venues s’ajouter aux quatre initiales, notamment des langues asiatiques et aborigènes, les premières en vue de l’évolution du contexte socio-économique mondial, les deuxièmes pour l’adaptation des populations indigènes et une conservation de leur culture. Aujourd’hui, les étudiants peuvent choisir parmi quasiment 50 langues pour l’examen final de leurs études secondaires. Pourtant, en 2014, seulement 11% des jeunes australiens choisissaient de poursuivre l’apprentissage d’une langue étrangère jusqu’en année 12.
  • 18. Page | 18 Afin de combler les lacunes linguistiques, le gouvernement australien a créé le programme LOTE en 1996. Celui-ci fait partie des huit « clés d’apprentissage » fondamentales, les sept autres étant : l’anglais, les mathématiques, les sciences, les sciences humaines et sociales, les arts, les nouvelles technologies et enfin la santé & éducation physique. Malheureusement, même avec cet encouragement du gouvernement, beaucoup d’élèves arrêtent à la fin de l’année 9 au profit de matières scientifiques. Depuis la création du programme LOTE, l’étude d’une langue étrangère est obligatoire dans l’enseignement secondaire et le français se place en deuxième position des langues choisies après le japonais. Le cadre d’apprentissage des langues étrangères est assez similaire pour chacune, je me suis donc concentrée sur celui du français (voir annexe 1 : Niveau de français attendu en fonction des classes, p. I). Auparavant, il existait un programme national pour toute l’Australie puis, pour faciliter la mise en place des cours de langue, chaque État est devenu indépendant dans l’écriture de son syllabus. Cependant, les programmes restent similaires, car l’objectif est que tous les apprenants australiens abordent les mêmes sujets et acquièrent les mêmes compétences à la fin du lycée. Dans le curriculum de l’État de Victoria, les cours sont abordés sous trois thèmes découpés en neuf sous-thèmes pour l’examen final :  l’individu :  l’environnement personnel ;  l’éducation et les aspirations futures ;  les opinions et valeurs personnelles.  les communautés francophones :  les modes de vie ;  les perspectives historiques ;  les arts et les divertissements.
  • 19. Page | 19  le monde qui change :  les problèmes sociaux ;  le monde du travail ;  les sciences et technologies. À travers ces sujets, chaque professeur doit amener ses étudiants à réfléchir sur la langue, autant d’un point de vue grammatical que sociologique. Cette façon de procéder est assez semblable à la France. En effet, si nous regardons l’enseignement d’une LV1 (langue vivante 1) dans les établissements français (pour se retrouver dans un contexte d’apprentissage comparable au FLE en Australie), les cours se découpent sous quatre thèmes :  mythes et héros ;  espaces et échanges ;  lieux et formes de pouvoir ;  l’idée de progrès. À travers ces unités, les apprenants doivent alors évoluer dans les quatre compétences suivantes : la compréhension écrite, la compréhension orale, l’expression écrite et l’expression orale. Les lycées français se basent alors sur le CECRL (cadre européen commun de référence pour les langues) pour établir leur programme (voir annexe 2 : Niveaux communs de référence pour les langues, p. IV). Pour le baccalauréat, un niveau B2 est attendu de la part des élèves français. Même si les Australiens ne s’appuient pas sur le CECRL pour construire leur curriculum, en comparant les deux, nous nous rendons compte que le niveau attendu en année 12 est similaire, soit un niveau B2. De l’année 7 à l’année 11, les professeurs suivent le curriculum construit par l’établissement. Il n’y a pas de programme officiel, mais les enseignants travaillent toujours dans l’optique de préparer les élèves au VCE (Victorian certificate of education). Le syllabus du lycée est alors créé dans cet objectif, notamment à partir de l’année 10, année où les élèves choisissent
  • 20. Page | 20 de continuer ou non l’apprentissage d’une langue étrangère (voir annexe 3 : Syllabus des années 10 de Frankston High School, p.VII). 1.3. Devenir professeur de FLE en Australie Pour devenir professeur de FLE en Australie, il n’est pas nécessaire d’effectuer sa formation sur le territoire. Si le diplôme est issu d’un autre pays, il faudra alors obtenir une équivalence de l’État dans lequel on souhaite enseigner. En fonction de la région, le système peut être un peu différent. Alors qu’en Victoria il y aura une simple équivalence de diplômes, en Nouvelles-Galles-du-Sud, par exemple, il faudra réaliser un entretien et expliquer sa vision de l’enseignement, sa façon d’enseigner… pour obtenir l’approbation du ministère de l’Éducation. Pour faire sa formation en Australie, il faut, au minimum, faire une licence d’éducation qui dure 4 ans ou étudier une autre licence et faire un master d’éducation par la suite. Pendant leur formation, les étudiants suivent des cours spécifiques concernant la discipline qu’ils souhaitent enseigner. Ils sont par ailleurs encouragés à faire un double cursus pour être habilités à enseigner deux matières. Contrairement à la France, il n’y a pas de longues périodes de stage pour se préparer au métier, seulement 60 jours de formation dans différents établissements scolaires répartis sur toute la durée de leur cursus d’études. La plupart des personnes souhaitant enseigner une langue étrangère choisissent un diplôme d’éducation en études secondaires. En effet, en Australie, il est possible d’enseigner en école primaire avec un diplôme d’enseignement en collège-lycée, mais l’inverse n’est pas possible. Après avoir fini leurs études, les jeunes diplômés sont en inscription provisoire. C’est-à-dire qu’ils enseignent à plein temps, mais doivent également réaliser différentes tâches pour être totalement qualifiés. Un mentor leur est alors attribué et celui-ci aidera le nouveau professeur
  • 21. Page | 21 jusqu’à ce qu’il soit accrédité. Cette situation dure au minimum un an et peut aller jusqu’à trois ans. Pour recevoir la certification finale, il faut tout d’abord passer un test de littérature et mathématiques. Celui-ci est un QCM (questionnaire à choix multiples) comparable au niveau du brevet des collèges afin de prouver que les futurs professeurs ont un niveau personnel équivalent aux 30% supérieurs de la population australienne. Ensuite, ils doivent construire et présenter un projet en lien avec leur enseignement. Le but est d’apporter une réflexion sur leur façon de faire, voir ce qui fonctionne ou non et comment ils pourraient s’améliorer. Ils doivent également choisir trois étudiants d’une même classe, mais de niveaux différents afin d’expliquer comment ils gèrent l’hétérogénéité, comment ils s’adressent et s’adaptent à ces apprenants pour pouvoir appliquer le programme scolaire et que les activités correspondent à chacun. Le mentor sera là pour aider l’enseignant tout du long avec son projet et également le conseiller, répondre à ses questions, le soutenir. Pour obtenir la qualification définitive, le projet sera présenté et discuté avec différents membres de l’école qui décideront du moment le plus adéquat pour le soumettre au VIT (Victorian institute of teaching), institution attribuant le droit d’exercer pleinement ses fonctions.
  • 22. Page | 22 2. Présentation de l’établissement 2.1. La structure Le lycée de Frankston se situe dans l’État de Victoria, à une quarantaine de kilomètres au sud de Melbourne. Étant un établissement public, il est régi par la région et accueille les élèves dépendant géographiquement de ce lycée. Cependant, il est possible pour les étudiants internationaux d’étudier là-bas en payant leurs études. L’école a été fondée en 1924 lorsque la péninsule commença à attirer de plus en plus de monde. Frankston devenait alors un point central entre Melbourne et la péninsule de Mornington. Pour répondre à la demande croissante des familles, le Conseil de la ville demanda alors l’installation d’une école secondaire. L’établissement a pour devise « Optima Semper » qui signifie « Toujours mieux ». En effet, l’école pousse ses élèves à donner le meilleur d’eux- mêmes et évolue continuellement en installant de nouvelles infrastructures pour permettre à ses étudiants d’étudier dans les meilleures conditions possible. Comme dans toutes les écoles du pays, Frankston High School requiert le port de l’uniforme aux couleurs de l’école (bleu et doré) et arborant l’emblème : un poisson. Ce dernier représentait, au début, un dauphin pour symboliser l’amour, le courage, la courtoisie et le leadership. Il évolua en poisson lorsqu’on se rendit compte que, lors des rencontres sportives, Frankston High était raillé par les spectateurs qui scandaient « Fish! Fish! Fish! ». L’institution a une vision précise de son éducation : « Together we become purposeful learners » (« Ensemble, nous devenons des apprenants déterminés »). Le but n’est pas de réussir chacun de son côté, l’entraide a Source : visitfrankston.com
  • 23. Page | 23 une place très importante, autant entre les élèves qu’entre le personnel. Cette vision est d’ailleurs inscrite dans chaque salle de cours, accompagnée des valeurs de l’école : respect, responsabilité, intégrité, empathie, optimisme et persévérance ; mais aussi des missions d’enseignement, à savoir la déclaration suivante : Le lycée se compose de deux sites : « junior campus » et « senior campus » sur lesquels se divisent les salles de classe, l’administration, mais également de nombreuses structures sportives comme une piscine, des terrains de basketball, tennis, cricket… Les cours se découpent en six périodes de 45 minutes par jour avec les premiers cours à 8h10 pour les années 11 et 12, 9h pour les autres, puis les derniers cours se terminent à 15h15. Finir plus tôt permet aux élèves de s’investir dans certaines des nombreuses activités extrascolaires proposées (sports, musique, arts plastiques, conseil des élèves…). Dans la culture anglo-saxonne, on apporte une grande importance aux activités en dehors de l’école et Frankston High School y apporte une attention toute particulière. En plus des activités citées ci-dessus, l’école organise différents camps tout au long de l’année (sport, musique, leadership…). En année 7, tous les enfants partent pour trois jours de camping dans le but de créer des liens entre les élèves, mais aussi avec leurs professeurs pour faciliter leur entrée au collège. Le but de FHS est de soutenir le développement intellectuel continu de nos étudiants et de les préparer à comprendre et à pratiquer :  l'apprentissage indépendant ;  la pensée critique et créative ;  des comportements qui contribuent de manière productive à la société ;  la communication efficace ;  une conduite physique, émotionnelle et sociale saine.
  • 24. Page | 24 2.2. Le public visé Frankston High School accueille des élèves de l’année 7 à l’année 12. C’est près de 1600 jeunes qui viennent y étudier chaque jour. L’établissement étant public, il faut en dépendre géographiquement. L’école jouit d’une réputation internationale pour sa qualité d’enseignement et ses excellents résultats aux VCE, équivalent du baccalauréat français. En effet, le lycée se place à la 26ème place sur les 270 écoles secondaires publiques de l’État de Victoria. Cette notoriété attire beaucoup de familles dans le secteur, mais aussi beaucoup d’étudiants internationaux, chinois pour la plupart, qui n’hésitent pas à payer pour suivre une éducation australienne de qualité. D’un point de vue sociologique, les étudiants australiens ne viennent pas d’un milieu favorisé. En effet, malgré la bonne réputation de l’école, la situation de la ville est plutôt précaire avec de nombreuses familles en difficulté. On retrouve donc une grande mixité parmi les élèves. 2.3. L’équipe pédagogique Il y a environ 160 professeurs à Frankston High School et 3 assistants : un pour le japonais, un pour le français et un pour les cours « d’activités extérieures ». Tout le monde travaille en open space afin de faciliter les échanges et favoriser les relations entre les professeurs des différentes composantes. Dans le département de langues, il y a quatre professeurs de français et quatre professeurs de japonais. L’organisation des bureaux permet de tous les regrouper avec les deux assistants pour pouvoir communiquer et aborder divers sujets facilement regardant une classe, une méthode d’enseignement, une traduction… Concernant les assistants de langue, ce sont toujours des locuteurs natifs qui interviennent en priorité avec les années 12 pour les préparer au VCE. Cependant, ils peuvent intervenir à d’autres niveaux, notamment pour parler
  • 25. Page | 25 de la culture de leur pays. Pour les langues, il faut d’abord enseigner aux années 7 à 10 pendant quelques années afin de pouvoir enseigner aux années 11 et 12 par la suite. Des réunions sont organisées toutes les semaines entre les professeurs d’un même département afin de discuter des programmes, de leurs techniques d’enseignement et ainsi partager leur ressenti. Cela leur permet de s’améliorer en s’inspirant de ce que chacun fait, discuter des problèmes rencontrés et prévoir ensemble ce qui est possible par la suite. 2.4. L’apprentissage des langues étrangères à Frankston High School Deux langues étrangères sont proposées à Frankston High School : le japonais et le français. Le japonais est enseigné depuis 1991, mais le français l’est depuis 1927. Par ailleurs, entre 1950 et 1957, le français était obligatoire et les élèves étaient encouragés à passer des certifications de langue auprès de l’Alliance Française. Aujourd’hui, les élèves d’années 7 doivent choisir une des deux langues et environ 60% d’entre eux choisissent le français. Cependant, il y a plus d’étudiants en japonais qui poursuivent jusqu’en année 12. Le nombre d’heures de cours de langue par année se répartit comme suit :  années 7 et 8 : 3 périodes, soit 2h15 ;  années 9 et 10 : 4 périodes, soit 3h ;  années 11 et 12 : 5 périodes, soit 3h45. Pour les années 12, on ajoute au minimum une sixième période qui se déroule en session individuelle avec l’assistant de langue. Il peut y avoir une deuxième session en groupe de 2 ou 3 en fonction du nombre d’élèves par classe.
  • 26. Page | 26 En effet, le lycée accueille un assistant japonais et un français tous les ans afin de préparer les élèves d’années 12 au VCE. L’épreuve de LOTE se déroule en deux parties : la première regroupe les compétences de compréhension orale, compréhension écrite et expression écrite (voir annexe 4 : Exemple sujet de l’épreuve de français pour le VCE, p.XIV). La deuxième est un oral divisé en deux phases. Dans un premier temps, il s’agit d’une conversation entre les examinateurs et l’élève. Les questions tournent autour de cinq sujets :  la famille ;  l’école ;  le travail ;  les loisirs ;  les aspirations futures. Dans un deuxième temps, l’élève présente son étude détaillée sur laquelle il a travaillé tout au long de l’année et répond aux questions qui lui sont posées. Cette étude porte sur un sujet choisi par l’étudiant qu’il devra présenter et argumenter en fonction des interrogations des examinateurs. En ce qui concerne les méthodologies utilisées, la méthode mixte est privilégiée. En effet, l’entraînement scolaire est mis en avant et tout est décontextualisé. L’écrit occupe une place importante et l’oral est très peu abordé. Pourtant, les élèves sont censés travailler les 4 objectifs, soit : la compréhension écrite, l’expression écrite, la compréhension orale et l’expression orale. Aucun des documents utilisés n’est authentique, même lorsque nous arrivons en année 12. Cela fut, par ailleurs, un vrai obstacle lorsque les étudiants ont fait face à des supports audio extraits de situations réelles pour la première fois dans mes cours. Tout cela entraine des lacunes notamment à l’oral, mais aussi à l’écrit. Effectivement, l’apprentissage de règles hors contexte est dépourvu de sens pour les apprenants et, par la suite, ils ont plus de mal à former un discours à l’écrit comme à l’oral.
  • 27. Page | 27 De plus, les cours se font majoritairement en anglais et la langue cible est très peu utilisée hors des exercices du livre. Même en évaluation, les questions sont en anglais et les élèves doivent répondre en anglais. En année 12, nous pourrions nous attendre à ce que les élèves doivent tout faire dans la langue cible, comme pour l’épreuve de LV1 au baccalauréat français. Pourtant, toutes les questions du sujet sont en anglais et ils doivent répondre dans la langue cible seulement pour 50% de l’examen. De surcroît, l’utilisation du dictionnaire bilingue est autorisée pendant toute la durée de l’interrogation. Concernant l’enseignement du français, ce qui m’a le plus surprise à mon arrivée était l’utilisation d’un français très formel. On sait qu’il existe une grande différence entre le français écrit et oral, mais à l’école, les étudiants devaient s’exprimer comme ils écrivent. Après en avoir discuté avec les autres professeurs, ils m’ont expliqué que ce sont les attentes des examinateurs et qu’ils n’ont également pas le droit d’utiliser les nombreux anglicismes adoptés par les francophones (par exemple, ils n’ont pas le droit d’utiliser le mot « bacon », ils doivent automatiquement le traduire par « jambon »). Depuis 2015, il est obligatoire pour les apprenants d’acheter une tablette avant leur rentrée en année 7 et les professeurs doivent l’intégrer dans leurs cours. En cours de langue, celle-ci est utilisée principalement pour des exposés et pour que les élèves enrichissent leur vocabulaire, notamment grâce au site « Language Perfect ». C’est une plateforme énormément utilisée en Australie et les professeurs s’en servent également pour contrôler les connaissances. Le principe est simple, le professeur rentre une liste de vocabulaire sur un thème spécifique et les élèves doivent traduire tous les termes.
  • 28. Page | 28 3. Le déroulé du stage 3.1. Les missions En tant qu’assistante de français, j’ai eu pour mission de préparer les années 12 pour le VCE. Je les voyais deux fois par semaine : une fois en session individuelle et une fois par groupe de deux. Les objectifs différaient en fonction des leçons et des élèves. J’ai également travaillé en mi-temps à l’école et enseigné aux années 8, 9 et 10 en classe entière. J’étais libre d’organiser mes cours individuels et en petits groupes afin de les préparer au mieux. Pour les cours en classe entière, je travaillais en équipe avec l’autre professeur qui partageait mes classes. 3.2. Les cours en classe entière Pendant le trimestre où j’ai travaillé avec les années 8, 9 et 10, les cours suivaient le programme du manuel utilisé pour chaque niveau. En année 8, nous utilisions les manuels « Touché 3 & 4 ». Ceux-ci se divisent chacun en 4 unités qui comprennent chacune :  une situation : une bande dessinée qui suit l’histoire d’un garçon nommé Nick ;  un point de prononciation ;  une liste de vocabulaire sur le thème de l’unité ;  un document sur lequel travailler (par exemple : une affiche d’annonce immobilière lorsque le thème de l’unité est « notre maison » afin d’apprendre les pièces) ;  un point de conjugaison avec des verbes à apprendre ;  un point de langue pour travailler sur des éléments spécifiques (possessifs, adjectifs, féminin/masculin…) ;
  • 29. Page | 29  un dialogue à pratiquer en groupe ;  un point culturel pour en apprendre davantage sur la culture francophone ;  un jeu de rôle ;  une partie « à faire » avec différents sujets que le professeur peut choisir (par exemple : dessiner le plan de sa maison idéale, écrire une annonce immobilière). En année 9, nous utilisions le manuel « Touché 5/6 ». Celui-ci se divise en 6 unités qui comprennent chacune :  un dialogue ;  une liste de vocabulaire sur le thème de l’unité ;  un point de langue pour travailler sur des éléments spécifiques (COD, pronoms, temps…) ;  un point de conjugaison avec des verbes à apprendre ;  une section « mot de passe » qui explique des utilisations spécifiques de la langue (argot, expressions…) ;  des documents à lire et une liste de vocabulaire associée ;  un deuxième point de langue ;  un dialogue à pratiquer en groupe ;  un point culturel pour en apprendre davantage sur la culture francophone ;  un jeu de rôle ;  un sujet de discussion pour pratiquer l’oral.
  • 30. Page | 30 En année 10, nous utilisions le manuel « Ça y est ! » Celui-ci se divise en 6 unités qui comprennent chacune :  une liste de vocabulaire sur le thème de l’unité ;  des compréhensions écrites ;  un point culturel pour en apprendre davantage sur la culture francophone (sous forme de documents, de bande dessinée…) ;  des jeux de rôle ;  un extrait littéraire (poème, bande dessinée…) ;  un point de grammaire. Chaque manuel est accompagné d’un workbook comprenant des exercices d’application sur les différents points abordés. Les manuels datant du début des années 2000, certaines activités n’étaient pas forcément appropriées. Par exemple, dans « les expressions utilisées par les jeunes », nous nous retrouvions confrontés à des actes de parole qui ne reflètent pas la situation actuelle. Les années 10 se destinent généralement à poursuivre jusqu’en année 12 et ils sont donc impliqués dans les cours. De plus, le français étant une option, la classe se compose seulement d’une dizaine d’étudiants. En années 8 et 9, le français est encore obligatoire, les classes regroupent donc 25 élèves en moyenne. En Australie, il n’est pas rare d’observer une « standard class ». Celle-ci réunit les élèves perturbateurs et n’ayant pas le niveau requis afin qu’ils ne dérangent pas les autres cours. Enseigner à cette classe fut un vrai challenge, car les apprenants ont conscience de la situation et ne produisent donc aucun effort.
  • 31. Page | 31 3.3. Les cours en groupe Les cours en groupe étaient propices à l’utilisation d’une pédagogie différenciée. Mon but du premier trimestre était de travailler avec les élèves sur la compréhension orale. En effet, ils m’ont tous fait part de leurs difficultés à comprendre les documents audio. J’ai choisi de les faire travailler à chaque fois sur des documents authentiques provenant de différentes régions francophones dans le monde. Chaque session se déroulait en deux parties : l’écoute du document et répondre aux questions puis, un sujet de discussion autour du thème abordé dans l’audio ou la vidéo. Mes étudiants d’année 12 avaient des niveaux très disparates, allant du bilingue aux élèves en grande difficulté. J’ai fait le choix de présenter les mêmes documents à tous, mais d’adapter les questions pour que chacun se prépare au mieux à l’examen. À partir du deuxième trimestre, j’ai commencé à travailler avec eux sur l’examen du DELF (diplôme élémentaire de langue française) B1 et B2 en fonction des niveaux des élèves. En effet, une majorité d’entre eux souhaite passer cette certification dans le futur et travailler tous les aspects de cet examen les préparait également au VCE. 3.4. Les cours individuels Les cours particuliers permettaient une individualisation totale. Les premières semaines, mes cours s’organisaient de la même façon : cinq questions auxquelles les apprenants devaient répondre et portant sur chacun des thèmes abordés à l’examen puis, travailler sur leur étude détaillée.
  • 32. Page | 32 Voici par ailleurs les sujets choisis par mes élèves d’année 12 :  la laïcité en France ;  le dopage dans le Tour de France ;  le rap francophone ;  le féminisme : Olympe de Gouges et Simone Veil ;  le sabotage du Rainbow Warrior ;  reporters sans frontières ;  médecins sans frontières ;  les HLM. L’objectif était principalement de les aider à formuler et à corriger leurs réponses aux questions envisagées. Après trois mois, les études approfondies étant terminées, je les interrogeais sur leur sujet afin qu’ils pratiquent et retiennent bien les informations. Pendant le temps restant, nous travaillions sur les difficultés présentées par l’élève. Cette partie était donc « à la carte » et je m’adaptais aux besoins et difficultés de chacun. Certains souhaitaient améliorer leur conversation et nous parlions donc de sujets du quotidien, faisions des débats… pendant que d’autres désiraient revoir les bases de la grammaire française et le vocabulaire important.
  • 33. Page | 33 4. Vers une pédagogie différenciée Selon Louis Legrand, pédagogue et universitaire français, le terme de pédagogie différenciée veut désigner « un effort de diversification méthodologique susceptible de répondre à la diversité des élèves.2 » Cette définition sera par la suite complétée par Philippe Meirieu, chercheur en sciences de l’éducation et de la pédagogie, comme suit : « Différencier, c'est avoir le souci de la personne sans renoncer à celui de la collectivité.3 » En effet, chaque apprenant est différent et le cheminement qui le guidera à l’acquisition des savoirs en sera, par conséquent, hétéroclite. Cependant, il faut respecter les programmes instaurés par les institutions. La pédagogie différenciée a donc pour but de varier les méthodes d’apprentissage afin de mener les apprenants aux mêmes connaissances. 4.1. Les origines de la pédagogie différenciée 4.1.1. Le plan Dalton La première tentative de différenciation pédagogique apparait au début du XXème siècle aux États-Unis avec Helen Parkhurst. Cette pédagogue est à l’origine du « Plan Dalton ». Ce dernier a été mis en place par la professeure dans le but de répondre aux besoins de la classe. En effet, la petite ville de Dalton dans le Massachusetts ne proposait qu’une classe unique et l’institutrice se retrouva donc face à 40 élèves d’âges et niveaux différents. Pour répondre à cette situation, elle dut trouver une méthode afin de s’adapter et pouvoir enseigner. 2 Legrand, L. (1986). « La différenciation pédagogique ». Scarabée, CEMEA. 3 Meirieu, P. (1989). « Enseigner, scénario pour un métier nouveau ». ESF.
  • 34. Page | 34 Après avoir travaillé auprès de Maria Montessori (fondatrice des célèbres écoles portant son nom) en Italie, elle s’inspire de sa méthode qui place l’enfant au cœur de son apprentissage afin de développer la confiance en soi et l’autonomie grâce à l’expérience, tout en respectant le rythme et les demandes de l’enfant. Helen Parkhurst met alors en place des plans de travail afin d’individualiser les activités des apprenants. Le plan Dalton est appliqué dès le plus jeune âge et se décompose en trois parties. Premièrement, « la maison ». Le but est que l’enfant appartienne à une communauté plus petite que celle de l’école tout entière. C’est donc un groupe d’environ huit enfants supervisé par un professeur-référent. Le rôle de ce dernier est de guider, coacher et aider les étudiants à développer leurs compétences. Une relation peut alors s’établir entre les élèves et le professeur, mais également avec les parents qui ont un rôle important au sein des écoles Dalton. Deuxièmement, « le contrat ». Un contrat d’apprentissage est conclu entre l’enseignant et l’étudiant qui définissent ensemble le temps nécessaire à ce dernier pour accomplir une tâche précise. Le contrat est structuré de la façon suivante :  expliquer à l’élève le travail global et l’objectif de celui-ci ;  l’encourager à utiliser toutes ses connaissances afin de relier entre elles les différentes matières et ne pas voir chaque connaissance comme appartenant seulement à une discipline ;  fournir un soutien suffisant en termes de questions d’orientation, de suggestions ;  bien définir les étapes et les échéances ;  permettre l’adaptation des intérêts, forces et besoins individuels ;  promouvoir les échanges internes entre individus d’un même groupe et perfectionner les compétences d’organisation et de gestion du temps. L’instituteur prend alors le temps pour chaque élève afin d’adapter au mieux le travail demandé.
  • 35. Page | 35 Troisièmement, « le laboratoire ». C’est le moment dans l’emploi du temps ou les élèves vont pouvoir travailler individuellement avec leur superviseur ou en petits groupes. Cette occasion permet alors d’expérimenter, enquêter et collaborer. Les élèves sont libres de poursuivre la tâche qui leur a été confiée ou de faire des recherches sur des sujets qui les intéressent. Ce moment a pour vocation de laisser les enfants en autonomie afin qu’ils prennent leurs responsabilités et qu’ils travaillent pour eux-mêmes et non pour l’école. 4.1.2. La méthode Winnetka À partir de 1915, Carl Washburne, inspecteur et administrateur des écoles publiques, mène une deuxième expérience en Angleterre et aux États-Unis. Celle-ci propose des plans de travail tels que Parkhurst l’avait préconisé et y ajoute un programme d’entraide invitant les élèves plus âgés à s’occuper des plus jeunes. Lorsqu’il émigre aux États-Unis dans la ville de Winnetka, il développe des manuels et fiches de travail dans l’optique de développer le travail autonome. Sa méthode consiste à créer un plan autocorrectif complet pour le calcul et ainsi rendre chaque élève autonome et gestionnaire de son rythme de travail. Néanmoins, il ne se concentre pas sur les besoins indépendants de chaque enfant, mais établit différents profils en fonction de leurs âges et d’une enquête réalisée pour déterminer les capacités au fur et à mesure de leur développement. À vouloir être trop efficace, son programme se rapproche du taylorisme, méthode utilisée dans les usines afin d’augmenter les rendements tout en optimisant la gestion du temps, au profit de la motivation et de la prise en compte de l’individu en lui-même. Le plan Dalton tout comme la méthode Winnetka sont les premiers à s’intéresser aux différences entre individus et reconnaissent que tout le monde ne peut apprendre de la même façon. Cependant, alors que le
  • 36. Page | 36 premier se penche sur l’humain d’un point de vue sociologique, la deuxième privilégie les capacités cognitives d’un point de vue physiologique. Cette opposition sera vue par Philippe Meirieu comme une démarche de prise en compte de l’être et de ses apprentissages dans son ensemble. Il l’analysera de la façon suivante : « L'une qui s'effectue à partir des capacités mentales et du niveau de développement cognitif de l'enfant... et qui laisse entendre, ou suppose par posture, que tout apprentissage accessible à un enfant peut être effectué par lui sans que se pose la question de la motivation - ou bien parce que le niveau d'accessibilité résout en lui-même la question de la motivation. Une autre qui considère que la question de la motivation est première et détermine l'accès à tout apprentissage... en laissant même entendre que le niveau d'accessibilité est secondaire dans la mesure où un enfant motivé parviendra à surmonter des obstacles intellectuels qui vont bien au-delà de ses possibilités attestées.4 » Jusqu’à présent, les expériences menées ne prenaient donc pas en compte l’enfant sous tous ses aspects (sociologique, physiologique, psychologique…), mais ne ciblaient qu’un seul de ces domaines. 4.1.3. L’école expérimentale du Mail En 1927, c’est un pédagogue suisse, Robert Dottrens, qui décide de mener sa propre expérience en ouvrant l’école du Mail à Genève. Il s’inspire du plan Dalton et de la méthode Winnetka pour tirer le meilleur de chaque. Pour cela, il va garder le principe des fiches de travail établies en fonction du profil des élèves. Il va alors s’intéresser au niveau de chacun en réalisant des évaluations, mais également organiser des entretiens afin de recueillir des informations utiles d’un point de vue sociologique. Il élimine également la notion d’autocorrection afin d’enrichir la relation professeur/élève qui avait 4 Meirieu, P. (1996). « La pédagogie différenciée : enfermement ou ouverture ? » dans L'école : diversités et cohérence, Les entretiens Nathan - Actes VI, p.113
  • 37. Page | 37 quasiment disparu avec l’utilisation de ces fiches. Son objectif est de confronter ses étudiants à un travail adapté à leurs capacités, mais qui ne soit pas trop simple pour entretenir la motivation, la notion de challenge. Pour cela, sur chaque carte individuelle, il rédige une seule et unique question susceptible d’éveiller l’intérêt personnel dans une perspective d’évolution didactique. La prise en considération des différentes dimensions permet de créer une véritable progression et un engouement de la part de l’enfant qui pourra s’autonomiser peu à peu. De cette façon, il y a une réelle évolution dans l’individualisation du travail qui suit le processus de développement cognitif tout en considérant son environnement. 4.1.4. Les recherches de Freinet Célestin Freinet, considéré comme l’un des plus grands pédagogues français de son époque, a donné naissance au mouvement qui porte son nom. Freinet croit en la refondation d’une école nouvelle et moderne où le savoir ne se transmettrait plus via le « par cœur » et les études de textes, mais par la prise en considération de l’individu, de ses besoins et de ses attentes. Il est l’un des premiers à encourager la classe hors des murs. Il comprend que les élèves viennent à l’école dans le but de comprendre le monde qui les entoure et Freinet met en place une diversité d’enseignements, premièrement en classe, avec le choix des écrits sur lesquels travailler, mais aussi à l’extérieur en organisant des visites, des enquêtes, des correspondances ou encore des voyages. Freinet veut que les savoirs prennent sens afin d’être mieux intégrés. L’objectif est de pouvoir mettre en relation les apprentissages scolaires et les connaissances sociales. Pour cela il s’inspire de Parkhurst, Washburne, Dottrens et d’autres professeurs qu’il a eu l’occasion de rencontrer lors de ses voyages. Du plan Dalton il conservera l’idée de contrat passé entre l’élève et le maître, la liberté de travailler à son rythme. De la méthode
  • 38. Page | 38 Winnetka il gardera l’entraide et la coopération entre les apprenants et la prise en compte de la dimension psychologique du développement de l’enfant. De Dottrens il retiendra l’importance de la motivation en stimulant l’intérêt, la curiosité et la notion de défi. Freinet met alors en place des activités du type : réaliser un album à la suite d’une sortie, écrire un journal coopératif grâce aux différents genres d’écrits. La visée de ces travaux est de faire prendre conscience aux apprenants que ces tâches ne pourront être correctement accomplies sans les savoirs scolaires. Pourtant, de cette méthode émerge un problème : « si les activités proposées par Freinet font apparaître la nécessité de savoir, elles ne font pas apparaître la nécessité d’apprendre.5 » Il doit donc trouver un moyen de remédier à cette situation pour éviter que les apprenants négligent l’acquisition des connaissances fondamentales. La première chose à faire sera alors d’effectuer des rotations au sein des groupes afin que chacun accomplisse différentes tâches et ne se conforte pas seulement dans ce qu’il sait faire. Deuxièmement, Freinet met en place ce qu’il appelle les « brevets ». En effet, il trouve le CEPE (Certificat d’Études Primaires Elémentaires) trop traditionnel et non objectif. De plus, celui-ci favorise les résultats plutôt que le cheminement de l’acquisition des apprentissages et va donc encourager les élèves au bachotage, ce que Freinet trouve contre-productif et inadapté au bon développement des savoirs. Les brevets s’accoutument donc aux besoins et désirs de chacun. L’apprenant devra choisir au moins trois brevets obligatoires parmi treize proposés dans différentes disciplines du français, des sciences et d’histoire- géographie. Il pourra également choisir des brevets facultatifs parmi cinquante-quatre divisés en cinq domaines : écriture, art, sport, artisanat et comportement. Chaque brevet est choisi avec le professeur pour s’assurer que le projet est réalisable. 5 Robbes, B. (2009). « La pédagogie différenciée : historique, problématique, cadre conceptuel et méthodologie de mise en œuvre. », conférence sur la pédagogie différenciée, p.3
  • 39. Page | 39 Chaque diplôme se décompose en un certain nombre d’épreuves standardisées, un chef-d’œuvre à réaliser et un compte-rendu détaillant les différentes étapes de la réalisation du brevet. Il existe deux séries qui correspondent à deux niveaux de difficulté. Exemple du Brevet de Lecture Pour valider un brevet, cela peut être à la demande de l’enfant quand il pense avoir assez d’entrainement ou simplement lorsqu’il a réalisé un travail que le professeur juge méritant. Cette procédure comporte de nombreux avantages. Tout d’abord, l’élève n’éprouve pas de pression sur les savoirs qui lui sont demandés et cela augmente sa motivation de réussite. Ensuite, on l’encourage à s’épanouir dans un domaine qui lui correspond et de développer ses compétences. Enfin, on prend en compte les capacités de chacun et toutes ces disciplines rendent l’école plus proche de la vie. La mise en place de ce système est une vraie révolution dans les écoles françaises et ne tarde pas à se faire connaitre dans le monde entier dès les années trente. Aujourd’hui encore, des centaines d’établissements appliquent le mouvement Freinet qui marquera un tournant dans le développement de la différenciation pédagogique.
  • 40. Page | 40 4.1.5. De ces premières expériences à aujourd’hui Le nombre d’enfants scolarisés à travers le monde augmente chaque année et, avec lui, le taux d’hétérogénéité au sein des établissements scolaires. Il devient donc quasiment inévitable de ne pas se poser la question d’une mise en place d’une pédagogie différenciée dans chaque classe. Les expériences citées précédemment n’étant présentes que dans des écoles expérimentales, il fallut trouver une solution pour parer à ce besoin grandissant d’adaptation. Le premier obstacle était de réussir à sensibiliser les enseignants en leur proposant un accompagnement. En effet, ceux-ci transmettaient leurs savoirs d’une certaine manière avec un objectif précis : terminer le programme imposé par les institutions sans forcément avoir reçu une formation adaptée. Ils ne faisaient aucune différence entre les apprenants et les difficultés rencontrées. En France, c’est en 1982 qu’on observe un changement avec André de Peretti, ancien directeur du département de psychosociologie de l'éducation à l'Institut National de Recherche pédagogique, qui va présenter son projet des MAFPEN (missions académiques à la formation des personnels de l'éducation nationale) qui laisseront place par la suite aux IUFM (instituts universitaires de formation des maîtres), puis aux ESPE (écoles supérieures du professorat et de l’éducation). Son défi sera de former des professeurs capables de s’adapter à une nouvelle façon d’enseigner, à de nouvelles modalités et que chacun reçoive une formation complète en cumulant enseignements théoriques et périodes de stage. L’objectif n’est plus d’avoir seulement un professeur faisant cours à une classe, mais une multitude d’enseignements divers pour conduire les élèves aux apprentissages requis. Au début des années 2000, Christian Puren, didacticien des langues-cultures, a dirigé un programme commun européen (PCE) en collaboration avec six autres experts afin de définir neuf domaines de différenciation.
  • 41. Page | 41 On retrouve la différenciation :  des objectifs : prendre en compte les compétences et besoins de l’apprenant afin d’adapter les objectifs de la leçon à son profil ;  des dispositifs : varier le matériel avec l’utilisation des TICE (technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement), jeux, ardoises, papiers… et les méthodes utilisées (travaux individuels ou en groupes, utilisation de l’espace de classe, temps imparti…) ;  des contenus : privilégier certains aspects de la séquence didactique (culturel, lexical…) afin de mener à bien les objectifs tout en prenant en compte les besoins de l’élève ;  des supports : utiliser différents documents tant dans le contenu que sur la charge cognitive que celui-ci va demander, mais qui iront dans le même sens et permettront aux apprenants de mettre en commun les informations qu’ils auront récupérées.  des tâches : réquisitionner diverses compétences afin de mobiliser les savoirs de chacun en proposant des consignes et une charge de travail adaptées ;  des aides et guidages : recevoir un appui écrit ou oral de la part du professeur ou de ses camarades en fonction de ses besoins ;  des méthodes : prendre en compte les différents types de mémoire (visuelle, auditive et kinesthésique) pour proposer des approches diverses qui permettront à chacun de choisir la méthodologie qui lui convient ;  de l’évaluation : utiliser l’évaluation diagnostique qui permettra, dans un premier temps, de définir les compétences à approfondir. Dans un deuxième temps, on utilisera les trois autres types de contrôle des connaissances, à savoir : l’auto-évaluation, les évaluations formative et sommative6 ; 6 L’évaluation formative se fait en cours d’apprentissage afin de voir où l’élève se situe et quelles sont les compétences qu’il doit encore travailler. L’évaluation sommative est réalisée à la fin d’un processus d’enseignement pour contrôler les acquis et certifier ou non une compétence.
  • 42. Page | 42  de la remédiation : faire une rétroaction sur chaque travail afin de voir avec l’apprenant ce qu’il a compris ou non et voir ce qui est envisageable pour remédier aux lacunes de celui-ci. Aujourd’hui, nous prenons de plus en plus conscience qu’il n’y a pas une façon d’enseigner, mais des façons d’enseigner et que l’adaptation est la clé de la réussite. Nous voyons apparaitre dans le monde et notamment dans le système anglo-saxon des méthodes qui essayent de s’imposer. C’est le cas de la méthode UDL (universal design for learning) inventée aux États-Unis au début des années 1990 et qui a été publiée pour la première fois en 2002 par CAST (center for applied special technology). Leurs premières recherches consistaient à trouver un moyen d’utiliser les nouvelles technologies pour prodiguer une meilleure expérience en classe aux enfants en situation de handicap. Au fur et à mesure des années, ils se sont rendu compte que les méthodes et ressources nécessitaient d’être améliorées afin d’offrir une éducation adaptée à tous. En effet, les curriculums proposés par les écoles sont créés pour ce que CAST appelle « l’étudiant typique ». Pourtant, ce dernier n’est qu’illusion. En effet, de nombreuses études ont été menées afin de récupérer des données et établir un profil moyen. Cependant, celui-ci ne correspondra surement qu’à peu d’élèves dans la classe voire aucun et c’est pour cela qu’il faut trouver des moyens d’adapter sa façon d’enseigner. Afin d’apporter une solution à ce problème, les chercheurs ont mis en place différentes aides dont « CAST UDL Exchange7 », une plateforme de création, de partage de leçons et de ressources. Les professeurs qui partagent leurs cours remplissent différentes informations et proposent diverses approches pour, qu’une fois en classe, les élèves puissent choisir la méthode d’apprentissage qui leur convient le plus (voir annexe 5 : Exemple d’exercice proposé pour un cours d’anglais langue seconde (ESL), p. XXVII). 7 À retrouver sur : http://udlexchange.cast.org/home
  • 43. Page | 43 Cette méthode repose donc sur trois fondements (voir annexe 6 : Universal Design for Learning Guidelines, p.XXIX) :  l’engagement : pourquoi est-ce que j’apprends ?  la représentation : qu’est-ce que j’apprends ?  l’action et l’expression : comment est-ce que j’apprends ? L’engagement représente la motivation fournie par chaque apprenant. Celle-ci va dépendre de plusieurs facteurs personnels comme la culture, la neurologie, les connaissances déjà acquises… mais aussi collectifs comme la société, l’envie de travailler en groupe ou non. Il n’existe pas de moyen idéal pour mobiliser chaque étudiant dans une tâche à réaliser. L’engagement se décompose en trois grandes idées :  l’intérêt de recrutement : le désir d’apprendre de nouvelles connaissances dépend de celles déjà acquises. En effet, il sera quasiment impossible d’attirer l’attention d’un apprenant si celui-ci ne peut pas déceler la pertinence des informations face à lui. Il est évident que chacun a des centres d’intérêt différents et il est donc impossible de proposer un seul projet qui motivera tout le monde. Il faut donc rendre l’élève actif en optimisant les choix individuels et l’autonomie pour les mener vers l’objectif d’apprentissage. Il faut que chacun se sente inclus, challengé et acteur de son apprentissage. Une des pistes principales est de valoriser la pertinence et
  • 44. Page | 44 l’authenticité des données fournies. Il faut pouvoir se sentir connecté à ces idées, c’est-à-dire pouvoir les appliquer à une situation familière. Moins le modèle sera abstrait, plus l’étudiant se sentira concerné. De plus, en minimisant les distractions et menaces qui l’entourent, il pourra s’aventurer plus facilement. Un climat favorable et rassurant lui permettra de prendre des risques concernant ses apprentissages sans se sentir effrayé des conséquences que ses erreurs pourraient attirer ;  le soutien dans l’effort et la persistance : bien que certaines personnes puissent réguler leur attention par elle-même et que ce contrôle s’apprenne au fur et à mesure du temps, l’apport d’un soutien extérieur est indispensable pour maintenir les efforts fournis. Rappeler les objectifs régulièrement est important pour que les apprenants ne perdent pas de vue le but premier des tâches à réaliser. Proposer différentes pistes de travail et ressources permet à chacun de choisir un parcours le mettant au défi, mais sans que celui-là soit impossible à réaliser. Chaque élément mis à disposition doit être une béquille pédagogique qui aidera les étudiants dans l’accomplissement de leurs tâches, mais en aucun cas elle ne doit donner la réponse. Elle est là pour aider et entretenir la motivation. On encouragera aussi l’entraide entre les pairs. En effet, chacun ayant ses forces et faiblesses, la collaboration est un excellent moyen de garder la dynamique de classe. De plus, cela favorisera l’esprit d’équipe et un soutien considérable intrinsèque au groupe. Enfin, un point important pour soutenir l’engagement est la qualité des rétroactions portée sur les travaux réalisés. Plus l’analyse sera pertinente, constructive et accessible, plus celle-ci aura un impact positif. Le but est qu’elle encourage la persévérance, qu’elle amène l’apprenant à se questionner sur ce qu’il doit changer, quelles sont les compétences qu’il doit améliorer pour éviter de commettre les mêmes erreurs dans le futur ;  l’autorégulation : même si l’environnement immédiat doit soutenir l’apprenant pour que ce dernier continue de fournir des efforts et montre de l’intérêt, il est important qu’il apprenne également à
  • 45. Page | 45 réguler son attention par lui-même. Cette capacité dépend de la motivation initiale et des individus. Certains auront plus de facilité dès le plus jeune âge, d’autres devront apprendre cette compétence. Celle-ci est souvent très implicite dans le contexte scolaire. C’est pour cela qu’il faut l’aborder comme une difficulté à part entière et la prendre en considération afin qu’elle se développe tout au long de la réalisation des objectifs. La confiance a un rôle essentiel dans ce processus. On rend l’élève responsable et on augmente petit à petit la fréquence des séances d’autoréflexion et d’autorenforcement pour qu’il apprenne à porter un regard critique sur ce qu’il produit. Il faudra pour cela lui fournir des guides, des pistes d’introspection. En proposant différentes stratégies, il pourra alors choisir celles qui lui conviennent le mieux. Celles-ci ne sont pas seulement valables pour le travail accompli en classe, mais peuvent aussi être appliquées au quotidien pour apprendre à gérer une situation anxiogène. Cela aura comme répercussion d’apprendre la gestion du stress et de la frustration et encourager l’étudiant à se battre plutôt que d’abandonner devant un dessein qui lui semble impossible à réaliser. En apprenant à gérer ses émotions, il apprendra plus facilement de ses erreurs et progressera de façon significative dans ses projets. La représentation indique que les apprenants diffèrent dans la façon dont ils perçoivent et comprennent l’information qui leur est présentée. C’est pour cela qu’il faut leur proposer différents supports afin que chacun puisse sélectionner celui de son choix. Cela se fait au travers de trois lignes directrices :  la perception : elle cherche à proposer des moyens, des alternatives à la personnalisation de l’affichage des informations (auditif, visuel…). Le but est que chaque format soit flexible, qu’on puisse modifier, sa taille, sa couleur, sa vitesse… et qu’il ne dépende pas que d’un seul des cinq sens. Pour les documents auditifs, les professeurs doivent pouvoir fournir des équivalents textuels (transcription, synthèse, utilisation de symboles et émoticônes…). À l’inverse, les documents visuels doivent être accompagnés de
  • 46. Page | 46 descriptions, d’équivalents tactiles comme des objets se référant aux concepts clés… ;  la langue et les symboles : le but est de clarifier le vocabulaire, la syntaxe, la structure… et de prendre en compte les différents systèmes de langues afin d’en faciliter la compréhension (symboles, notions mathématiques…). Pour cela, les concepts plus difficiles doivent être abordés de plusieurs manières (donner des définitions, des descriptions) et le lien entre chaque doit être explicité. De plus, on autorisera l’utilisation de logiciels tels que « Text-to-Speech » qui permettent de convertir un texte écrit en audio grâce à une voix de synthèse. Enfin, la prise en compte de la langue dominante de l’élève est une part importante de l’enseignement. On doit pouvoir fournir des ressources permettant à chacun de comprendre. Il ne s’agit pas là de tout traduire, mais de proposer des alternatives telles que l’intégration de supports non linguistiques (photos, vidéos…) ;  la compréhension : ici on cherchera à construire du sens et générer de nouvelles compréhensions. C’est-à-dire, qu’on prendra en compte les compétences que les élèves possèdent déjà afin qu’ils les réutilisent. On favorisera alors les liens interdisciplinaires, les cartes heuristiques… pour que les étudiants puissent exploiter un maximum de leurs connaissances. On mettra également en évidence les éléments clés tout en aidant l’apprenant à discerner ce qui est pertinent ou non. Pour cela, on évitera donc tout élément parasite qui pourrait l’induire en erreur. Enfin, on cherchera à stimuler ces nouvelles aptitudes en y faisant référence au fil du temps et en demandant à chacun de les réutiliser dans différentes situations. L’action et l’expression requièrent de mettre en relation différentes stratégies d’organisation et de pratique. Les compétences orales et écrites sont propres à chacun et plus ou moins faciles d’accès en fonction des difficultés auxquelles les personnes doivent faire face. Parmi les trois points essentiels, on retrouve :  l’action physique : elle regroupe les facultés motrices qu’un apprenant doit mobiliser pour s’exprimer. On doit être capable de
  • 47. Page | 47 présenter différentes méthodes de réponse et de navigation aux apprenants comme, par exemple, interagir physiquement avec les matériaux à la main, à la voix, au clavier, avec un joystick… L’apprenant ne doit pas se sentir brimé et la façon de s’exprimer ne doit pas être une barrière à la démonstration de ses connaissances. Un excellent exemple de cette situation a été donné par Todd Rose, directeur du programme « Mind, Brain and Education » à l’université d’Harvard, lors de la conférence TEDx de Sonoma County en 2013.8 Il a présenté le cas du jeune Billy, élève de CM1 aux États-Unis. L’institutrice affirmait qu’il avait un esprit scientifique, mais, à cause de ses lacunes en lecture, il était incapable d’exprimer correctement sa pensée et obtenait de mauvais résultats. La classe a donc participé à une expérience où des chercheurs ont mis en place un curriculum d’informatique. Après seulement quelques mois, Billy avait totalement adopté cette nouvelle technologie qui l’accompagnait dans ses apprentissages et l’avait fait progresser considérablement. Dans le cas présent, le fait de changer le moyen d’expression, le support, cela avait permis à l’apprenant d’être capable de manifester correctement sa pensée ;  l’expression et la communication : lié au premier point exprimé, il faut être en mesure de proposer différents médias de communication pour atteindre l’objectif. Par exemple, si l’objectif est « raconter une histoire », on peut proposer aux apprenants de l’écrire, de la dessiner ou de la raconter à l’oral. En effet, un enfant dyslexique aura du mal à écrire un texte, mais pourrait être à l’aise à l’oral et ainsi s’exprimer via ce moyen. A contrario, un élève timide se plaira surement plus à écrire qu’à parler. Au final, l’objectif est atteint, seul le moyen d’y accéder diffère. Plus il y aura d’outils et de supports proposés, plus il y aura de chance que chacun y trouve les méthodes qui lui conviennent le mieux ; 8 À regarder sur : https://www.youtube.com/watch?v=4eBmyttcfU4&feature=youtu.be
  • 48. Page | 48  les fonctions exécutives : les fonctions exécutives sont définies « comme l’ensemble des processus permettant à un individu de réguler de façon intentionnelle sa pensée et ses actions afin d’atteindre des buts9 ». C’est-à-dire qu’elles permettent d’analyser l’environnement proche pour prendre des décisions adaptées aux différentes situations. Les professeurs vont alors enseigner aux élèves comment se fixer des objectifs appropriés plutôt que de leur donner directement la solution. Chacun doit trouver ce qui est efficace ou non et doit créer son propre cheminement. Bien évidemment, il faudra les guider petit à petit en établissant des stratégies pour les mener à prendre des décisions pertinentes par eux-mêmes dans le futur. Pour cela, il faut leur apprendre comment focaliser leur attention sur ce qui est utile, établir des priorités pour accélérer les processus de réalisation. On va alors chercher à renforcer la mémoire de travail qui, bien souvent, est la cause d’une activité désorganisée. En effet, cette mémoire permet de retenir les informations seulement dans un court laps de temps, il faut donc trouver des techniques pour maximiser la mémorisation. Par exemple, on peut donner aux apprenants des listes à compléter ou faire de la prise de notes. Ici encore, les rétroactions auront un rôle important dans l’établissement des connaissances. Grâce à des remarques construites, l’étudiant prendra conscience de ce qu’il doit changer ou non et les méthodes apprises pourront s’installer dans les fonctions exécutives afin que certaines deviennent automatiques. À Frankston High School, certains points de l’UDL sont mis en place en classes de langues, mais également dans les autres matières et hors de l’école. Au niveau de l’engagement, de nombreuses actions sont mises en place. 9 Chevalier, N. (2010). « Les fonctions exécutives chez l’enfant : Concepts et développement ». Canadian Psychology, volume 51, n°3, p.149
  • 49. Page | 49 Tout d’abord, concernant l’intérêt de recrutement, cela est flagrant grâce au choix des matières. Dès l’année 10, les lycéens choisissent les cours qu’ils souhaitent suivre et peuvent changer d’une année sur l’autre. Au final, ils doivent passer au minimum quatre épreuves, mais sont libres d’en choisir autant qu’ils le souhaitent. On gardera alors leurs quatre meilleures notes et à celles-ci peuvent s’ajouter deux autres matières comptant pour 10% de la note (fonctionnement similaire au choix d’une option pour le baccalauréat français). En tout, c’est plus de 150 matières qui sont proposées et 70 d’entre elles sont enseignées à FHS (voir annexe 7 : Liste des cours proposés à Frankston High School pour le VCE, p.XXX). Seul l’anglais est obligatoire, les autres sont au choix des élèves. Pour choisir, les lycéens se renseignent sur les prérequis demandés par les universités qu’ils souhaitent potentiellement intégrer. Aujourd’hui, il y en a de moins en moins qui sont imposés, car il est très difficile de demander à des élèves d’année 10 de faire un choix de parcours aussi tôt dans leur cursus. On les encouragera donc à faire une sélection logique en fonction de leurs aptitudes et envies, mais cela ne les pénalisera pas pour la suite. On retrouve également des enseignements VET (vocational education and training) qui se focalisent sur l’acquisition de compétences pratiques dans des domaines spécifiques. Elles sont l’équivalent des enseignements français dans les baccalauréats professionnels et technologiques. L’avantage de réunir ces enseignements et les généraux est que chacun peut choisir de les introduire dans son cursus et il n’y a pas de préjugés sur les cours que chaque personne sélectionne. En effet, malheureusement, en France, les filières professionnelles et technologiques reflètent une image plutôt négative et ne sont donc pas encouragées, elles sont surtout vues comme un second choix. Par ailleurs, l’Australie met un point d’honneur à l’égalité des chances. Chaque étudiant doit se sentir libre d’étudier ce qu’il souhaite, peu importe ses origines ou son appartenance sociale. Grâce à ce large éventail de possibilités, les élèves sont assurés de suivre des cours qui leur plaisent et cela se ressent en classe.
  • 50. Page | 50 Ensuite, relativement au soutien apporté, les professeurs sont très présents pour les élèves. C’est par ailleurs la première chose que les étudiants français en échange ont mentionnée en arrivant à Frankston High. Ils étaient impressionnés par la relation professeur-élève assez typique des pays anglo-saxons et encore plus de l’Australie. En effet, l’accent est porté sur l’humain plus que sur les études et la compétition n’a pas sa place dans les salles de cours. Cela est d’autant plus vrai dans les classes de langues. L’école fait appel à des assistants ayant le français et le japonais comme langue maternelle dans le but de soutenir ses étudiants ayant choisi une langue étrangère. En français, la professeure propose même des cours supplémentaires sur son temps libre afin de faire progresser ses élèves. Alors qu’officiellement ceux-ci sont censés avoir cinq cours de français par semaine, ils en ont trois supplémentaires, deux avec l’assistant et un autre avec leur professeure. De plus, les élèves s’entraident énormément. Ils sont libres de se déplacer pendant les cours pour demander de l’aide à leurs camarades. Enfin, concernant l’autorégulation, les élèves sont rendus responsables dès le plus jeune âge. Cela commence hors de la classe notamment avec l’aménagement des établissements scolaires. Aucun n’est fermé par des barrières. Les élèves doivent prendre conscience que les enseignements dispensés sont pour eux, pour les aider à grandir et devenir citoyens. À partir de là, la mentalité change et venir à l’école apparait moins comme une contrainte et obligation. Cependant, comme dans la majorité des écoles, l’autorégulation n’est pas vraiment abordée en classe. Même si le lycée tend à trouver des solutions pour s’adapter (avec l’utilisation des tablettes en classe par exemple ou les cours d’anglais langue seconde), les cours restent assez classiques. C’est-à-dire que les professeurs dispensent leurs enseignements d’une certaine façon, sans proposer différents moyens de parvenir aux objectifs fixés.
  • 51. Page | 51 4.2. Une différenciation pédagogique accompagnée d’une individualisation Il faut tout d’abord donner une définition claire des termes employés dans ce contexte d’éducation. Nous retiendrons quatre concepts à mettre en opposition pour bien comprendre les différentes subtilités : personnalisation, individuation, différenciation et individualisation. La personnalisation est considérée comme un processus qui prend en compte chaque apprenant en tant que personne à travers des procédés qui contribuent à l’éducation de chacun dans le but de se forger une personnalité, une identité. Différents facteurs sont alors pris en considération tels que l’expérience, les aptitudes, les acquis, les manières d’agir, les besoins ou encore les aspirations. On cherche à amener l’élève à une certaine autonomie afin qu’il puisse, par la suite, évoluer dans diverses situations et s’adapter efficacement. La personnalisation s’établit dans un cadre où l’enfant se construit comme membre d’une collectivité. Cette personnalisation s’installe au cœur d’un processus dit d’individuation. Ce dernier permet de donner accès à l’élève à une plus grande indépendance en le menant à se responsabiliser, s’assumer et enrichir ses savoirs et compétences pour se différencier de ses homologues, exister comme individu. Quant à la différenciation et l’individualisation, le contraste se fera dans le domaine scolaire. Ce sont des modes d’organisation pédagogiques qui s’inscrivent dans le processus de personnalisation. La différenciation pédagogique vise à assouplir son cadre d’éducation afin que les étudiants puissent apprendre en fonction de leurs besoins, qu’ils soient amenés à réfléchir en fonction de leurs méthodes d’appropriation autour d’un même objectif. Cette différenciation pourra porter sur la gestion du temps de travail en classe (classe entière, groupes…) et sur la manière d’aborder les ressources exploitées (utilisation d’un même document, mais avec des
  • 52. Page | 52 exercices différents pour mener à des connaissances similaires par exemple). En revanche, l’individualisation est une approche où l’apprenant travaille de manière individualisée au regard de ses acquis et de ses besoins. Avec les consignes et conseils du professeur, il va effectuer les tâches demandées en autonomie grâce aux documents qui lui seront fournis ou qu’il cherchera par lui-même. L’individualisation peut donc être vue comme une partie d’une pédagogie différenciée, les deux se complétant, mais ne dépendant pas l’une de l’autre. En résumé, nous pouvons hiérarchiser les quatre dénominations sous la forme suivante : Lors d’une mise en place de différenciation pédagogique, les apprenants se rassembleront autour de mêmes objectifs alors que l’individualisation permettra à chacun d’avoir ses propres aspirations. À Frankston High, cela est instauré dans les classes de langues et notamment en cours de français pour les années 12. Pour rappel, les lycéens doivent préparer une étude approfondie sur le sujet de leur choix. Ils doivent alors faire des recherches sur ce thème et envisager les questions qui pourraient leur être posées. Même s’ils sont censés choisir ce Individuation Personnalisation Différenciation Individualisation
  • 53. Page | 53 sur quoi ils souhaitent travailler, beaucoup de professeurs choisissent un unique sujet pour tous les élèves. Cela résulte d’un manque de motivation certain de leur part. Au lycée de Frankston, chaque étudiant a choisi son sujet et ils sont donc plus enclins à faire des recherches dessus. Pour leur présentation, ils sélectionnent trois documents de leur choix. Cela peut être un article, une interview, un livre, un reportage, un film… Ils ont donc une trame commune à suivre, mais le reste ne dépend que d’eux. Aussi, en vue des évaluations (appelées outcome ou SAC (school assessed coursework)), chaque professeur se doit de fournir à ses étudiants une description de la tâche qui va leur être demandée, ainsi que les critères de notation (voir annexe 8 : Exemple de description et critères d’évaluation lors des devoirs réalisés en classe, p.XXXIII). Cela est une obligation en Australie afin que les élèves se préparent au mieux. On veut les rendre actifs de leurs apprentissages et qu’ils trouvent un sens à ceux-ci. Pendant les cours en groupe, les objectifs étaient les mêmes pour tous, nous travaillions sur une ou deux compétences en particulier (souvent la compréhension écrite ou orale et l’expression orale), mais à plusieurs niveaux de difficulté. Par exemple, j’ai travaillé avec eux la compréhension et la synthèse d’un article. Pour cela, j’ai sélectionné diverses chroniques et chaque étudiant en avait une différente. Ils avaient environ une demi- heure pour lire et préparer ce qu’ils allaient dire. Le but était de présenter le texte, le sujet et de l’expliquer à leur camarade. Les articles les plus simples faisaient une page et comportaient un vocabulaire facilement compréhensible. Les plus compliqués portaient sur des sujets plus inhabituels, étaient plus longs et avec un vocabulaire plus complexe. Je m’adaptais donc aux capacités de mes élèves et leur donnais la possibilité de travailler sur un document les mettant au défi, mais avec une tâche réalisable. Les objectifs parallèles étaient de développer leur lexique, leur spontanéité, mais également la prononciation et l’articulation qui leur font souvent défaut par manque de pratique. L’individualisation était réalisée lors des sessions individuelles. En effet, en plus de travailler sur leur étude approfondie, il était possible de cibler les
  • 54. Page | 54 besoins de l’apprenant et de s’adapter à leur méthode d’appropriation. Le travail pouvait être autonome (je leur laissais du temps pour se pencher sur une tâche et ensuite nous corrigions et en discutions ensemble) ou directement avec le professeur. Le but était de cibler les besoins de chaque élève pour approfondir les points qui nécessitaient des explications. L’avantage premier était que le cours était totalement mis en place pour réfléchir sur leurs lacunes. De plus, cela pouvait être abordé grâce à différents sujets en fonction des intérêts de chacun. 4.3. L’importance de la personnalisation Comme nous l’avons déjà mentionné plusieurs fois auparavant, chaque apprenant est unique, cela implique donc qu’ils ont des capacités de penser, réfléchir, différentes les uns des autres. En plus des facteurs intrapersonnels, l’environnement joue un rôle important dans la motivation et l’implication des apprenants. Une personnalisation des apprentissages est donc nécessaire si l’on veut être capable de susciter l’intérêt. Cela ne se voit pas seulement dans le domaine de l’éducation, mais également dans tout autre secteur impliquant des relations entre pairs. Depuis de nombreuses années, on s’efforce de s’adapter à notre interlocuteur afin de lui fournir le service le plus juste possible, mais l’enseignement avait été délaissé sur ce plan. Dans le but de prodiguer une pédagogie égalitaire, il était préférable d’enseigner la même chose, de la même façon à tous. Seulement, égalité ne veut pas forcément dire équité. Pour cela, il faut proposer des formations permettant à chacun de réussir en fonction de ses besoins et facultés. Mais au-delà de la réussite sur le plan scolaire, il faut aussi regarder ce que la personnalisation va apporter à l’individu. En effet, particulariser un cours va avoir des répercussions sur l’apprenant en tant que personne. Les conséquences peuvent être les suivantes :
  • 55. Page | 55  amélioration des performances : comme dit ci-dessus, la personnalisation des apprentissages va, tout d’abord, permettre d’améliorer les résultats scolaires. En se focalisant sur les besoins de l’apprenant, on cible ses acquis et lacunes dans le but de renforcer ces dernières. L’évaluation joue un rôle important également, elle doit être adaptée. En effet, changer ses méthodes d’enseignement implique forcément de fournir des évaluations non traditionnelles. Pour cela, on doit penser à différentes façons de contrôler les compétences et ne pas seulement donner une évaluation sommative en fin de chapitre. En proposant divers modèles, chacun pourra montrer de quoi il est capable. De plus, un suivi régulier afin d’attester des progressions des élèves est nécessaire ;  augmentation de la confiance en soi : le fait de recevoir un enseignement personnalisé permet à l’étudiant de se sentir valorisé. Le professeur s’intéresse à lui en tant qu’individu et pas seulement comme un quelconque élève de la classe. Cette reconnaissance lui donne alors envie de réussir afin de rendre fier l’enseignant. Cela a pour conséquence d’augmenter la motivation et l’implication dans le travail fourni. Plus l’élève sera engagé dans ses productions, plus il se sentira sûr de lui et prendra des risques dans ses apprentissages qui le mèneront à de nouvelles connaissances ;  bonification de la relation élève-professeur : en plus de prendre confiance en lui, l’apprenant fera confiance à son enseignant. On sait que la relation entre les deux parties peut parfois être conflictuelle due à la distance instaurée. En s’intéressant particulièrement à ses élèves, l’enseignant apprendra à les connaitre un peu plus sur le plan personnel. L’écart entre les deux se resserre alors et permet de créer une ambiance profitable à tous où chacun se sent plus libre de s’exprimer ;  développement de l’autonomie et de l’entraide : en prenant en compte les sujets qui intéressent les apprenants, on les motive à travailler et s’impliquer dans leur travail. Ceux-ci seront alors plus enclins à effectuer des recherches qui pourraient leur être utiles. Ils
  • 56. Page | 56 ne se sentiront plus passifs et contraints d’être là, mais se rendront actifs. De plus, ils aideront volontiers leurs camarades. Il est plus facile de parler de quelque chose qui nous passionne et donc que l’on maîtrise ;  élargissement des centres d’intérêt : effectuer de nouvelles recherches et parler avec ses pairs entrainent obligatoirement une ouverture d’esprit et de nouveaux horizons. En plus d’approfondir les connaissances déjà acquises, les étudiants porteront leur regard sur de nouveaux sujets qu’ils n’avaient peut-être jamais considérés auparavant. D’autre part, cette personnalisation va avoir des répercussions sur l’enseignant. Sa façon de faire cours en sera impactée. Celui-ci élargira également ses compétences et connaissances en s’impliquant auprès de chaque élève. Il trouvera de nouvelles méthodes et idées au fur et à mesure qu’il rencontrera divers profils. Plus il verra ses apprenants investis, plus il aura envie d’en faire de même. La personnalisation entraîne donc un cercle d’actions positives et produit un climat d’apprentissage favorable permettant à chacun de réaliser son travail en toute sérénité. 4.4. Les difficultés d’un parcours différencié Même si en théorie cela semble être la solution idéale, en pratique, elle est beaucoup plus difficile à mettre en place. Tout d’abord, il faut faire face à l’hétérogénéité des élèves dans des classes assez nombreuses. En France comme en Australie (et également dans beaucoup d’autres pays), le nombre d’élèves oscille régulièrement entre 25 et 30 par classe. Il est donc très difficile de mettre en place un programme personnalisé tout en respectant les exigences des systèmes éducatifs.
  • 57. Page | 57 Ensuite, les professeurs sont rarement préparés à faire face à ce genre de situation. Bien qu’aujourd’hui on tende à les former dans le but d’instaurer un certain niveau de personnalisation, dans la réalité, il est assez compliqué de mettre ces apprentissages à profit. En effet, cela demande beaucoup d’énergie, d’investissement et de ressources qui ne sont souvent pas fournies. Les enseignants se sentent alors dépassés et n’obtiennent pas toujours le soutien espéré, tout particulièrement quand l’école et les autres professeurs ne se sentent pas concernés et s’en tiennent à la méthode traditionnelle. Certains établissements tentent de différencier les niveaux pour essayer d’obtenir des classes plus homogènes, mais, là encore, cela n’a pas toujours l’effet escompté. En général, les élèves se retrouvant dans la classe des plus « faibles » (exemple de la standard class à FHS) ont conscience de la situation et ne produisent plus aucun effort. Puisqu’ils ont été catégorisés ainsi, ils ne voient pas l’intérêt de fournir le moindre travail. À l’inverse, les étudiants dans les classes de niveau avancé savent qu’ils sont considérés comme « bons élèves ». On observe alors deux réactions possibles à cela. D’un côté, il y aura les étudiants qui poursuivront leurs efforts pour maintenir un certain niveau d’exigence imposé par la société et donc à eux-mêmes. De l’autre côté, il y aura ceux qui pensent que tout est acquis et qu’ils n’ont plus besoin de travailler autant qu’avant. Une autre question qu’on peut se poser est celle de l’adaptabilité dans le futur. Si une pédagogie différenciée était totalement mise en place, les étudiants pourraient avoir plus de difficultés à surmonter des événements et situations par la suite qui ne pourraient s’adapter à eux. 4.5. Comparaison des systèmes français et australien Le but de la différenciation pédagogique est de lutter contre le décrochage scolaire et les inégalités tout en poussant chaque apprenant à donner le meilleur de lui-même. L’organisme PISA (programme for international