2. Marines
Je me suis pris à caresser
La mer qui hume les orages
Paul Eluard
3. Bleus
La mer est comme un ciel bleu bleu bleu
Par au-dessus le ciel est comme le Lac Léman
Bleu-tendre
Blaise Cendrars
4. L'Equateur
L'océan est d'un bleu noir et le ciel bleu est pâle à coté
La mer se renfle tout autour de l'horizon
On dirait que l'Atlantique va déborder sur le ciel
Tout autour du paquebot c'est une cuve d'outremer pur
Blaise Cendrars, Au coeur du monde.
5. Marine
L'océan sonore
Palpite sous l'oeil
De la lune en deuil
Et palpite encore,
Tandis qu'un éclair
Brutal et sinistre
Fend le ciel de bistre
D'un long zigzag clair,
Et que chaque lame
En bonds convulsifs
Le long des récifs
Va, vient, luit et clame
Et qu'au firmament,
Où l'ouragan erre,
Rugit le tonnerre
Formidablement.
Paul Verlaine
6. Poisson
Les poissons, les nageurs, les bateaux
Transforment l'eau.
L'eau est douce et ne bouge
Que pour ce qui la touche.
Le poisson avance
Comme un doigt dans un gant,
Le nageur danse lentement
Et la voile respire.
Mais l’eau douce bouge
Pour ce qui la touche,
Pour le poisson, pour le nageur, pour le bateau
Qu'elle porte
Et qu’elle emporte. P a u l Eluard
7. Dans un petit bateau
Dans un petit bateau
Une petite dame
Un petit matelot
Tient les petites rames
Ils s’en vont voyager
Sur un ruisseau tranquille
Sous un ciel passager
Et dormir dans une île
C’est aujourd’hui Dimanche
Il fait bon s’amuser
Se tenir par la hanche
Échanger des baisers
C’est ça la belle vie
Dimanche au bord de l’eau
Heureux ceux qui envient
Le petit matelot
Robert Desnos
8. Le printemps au fond de la mer
Le fond de la mer a ses saisons. Comme sur
la terre, le printemps est une des plus belles.
Le corail bourgeonne et les éponges
respirent l’eau bleue à pleins poumons. Une
forêt de cerfs rouges écoute un bruit d’hélice.
Il arrive de très haut dans les cieux de la mer.
Quelquefois, un aéronaute tombe des cieux
de la mer. Il tombe lentement et se roule
dans le sable. Les fleurs dorment debout et il
y en a une foule qui disent adieu. Les
poissons manchots se posent dessus. Ils
donnent de gros baisers à la mer. A cause
de l’éclairage et du décor on se croirait
souvent chez le photographe. Un panache de
globules gazouille dans le coin. Il s’échappe
du petit robinet qui change l’eau salée.
Jean Cocteau
9. Iles
Iles
Iles
lles où l’on ne prendra jamais terre
Iles où l’on ne descendra jamais
Iles couvertes de végétations
Iles tapies comme des jaguars
Iles muettes
Iles immobiles
Iles inoubliables et sans nom
Je lance mes chaussures par-dessus bord car je
voudrais
bien aller jusqu’à vous
Blaise Cendrars, Feuilles de route.
10. Complainte de la mer
Complainte de la mer
dans le fracas du vent
Tout ce qu’elle vocifère
et qu’elle chante en rêvant
dans les sables mouvants
Tout ce qu’elle tait soudain
Silencieuse
étale
et plate calmement.
Jacques Prévert
11. La mer s'est retirée
La mer s’est retirée,
Qui la ramènera ?
La mer s’est démontée,
Qui l’a remontera ?
La mer s’est emportée,
Qui la rapportera ?
La mer est déchaînée,
Qui la rattachera ?
Un enfant qui joue sur la
plage
Avec un collier de
coquillages.
J. Charpentreau
12. Plongée
Au soleil la mer est douce
comme un écran de satin
à sa surface je me pousse
nageant comme un poussin
mais le poussin gagne ses ailes
et le poussin devient poisson
et je m'envole hirondelle
vers les rochers au plus profond
je regarde mes congénères
se déplaçant vifs ou lents
ils sont à l'aise et me tolèrent
à leurs côtés barbotant
des herbes couvrent la rocaille
le paysage est délicieux
mais à la fin vaille que vaille
je dois remonter vers le ciel
Raymond Queneau
13. L'Albatros
Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.
A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d'eux.
Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid !
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime en boitant, l'infirme qui volait !
Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.
Charles Baudelaire