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Très souvent, les outils digitaux sont
considérés comme les “joujoux” du
marketing, décorrélés des objectifs
de l’entreprise et des autres services.
Chez TopSolid, Hubspot a été mis au
service du commerce et drivé avec les
équipes commerciales. Quels objectifs
étaient visés ?
Sandie Ohayon (directrice marketing
et digitale, TopSolid Corporate) :
“L’objectif était d’aligner Sales et
Marketing, ce qui peut relever de la
gageure. Or, les deux entités visent la
croissance de l’entreprise et il était
très important d’arriver à embarquer
tout le monde et faire en sorte que les
commerciaux trouvent un sens à cette
digitalisation. Hubspot, en matière
d’automation, sert à la génération de
leads, à aller chercher des prospects
chauds, tièdes ou froids, à les alimenter,
les “nurturer”, à mettre en œuvre un
workflow au service du commercial.
Les investissements sont de plus en plus
consentis à cette “acquisition digitale”
C’est sur ces objectifs qu’on peut
donc aligner commerce et marketing,
auxquels chacun va contribuer”.
Pour Market Maker en quoi le choix
d’un outil digital répondait vraiment à
la stratégie ?
Gael Séguillon (head of E-commerce,
Market Maker) : “L’ERP était le seul outil
mis en place. Jusque-là, on envoyait
des fichiers Excel avec des produits à
commercialiser à une soixantaine de
clients. Or nous avions une stratégie
de déploiement plus important avec
les market places, ce qui implique
des transferts de données automatisé.
Il y avait un gros travail à faire de
rationalisation de la donnée, et surtout
le besoin de connecter la source des
données dans l’ERP vers des canaux
de vente pour automatiser les flux
d’informations. Nous avons donc choisi
le connecteur Achats de Prestashop.
Après avoir normalisé la donnée et
toutes les caractéristiques des produits
puis on a utilisé un agrégateur de flux
pour répondre à chaque spécification
de notre marketplace. Offre et prix se
mettent à jour directement dans l’ERP.
Le projet a été assez rapide à mettre en
œuvre, en quelques mois, avec un peu
de paramétrage”.
Une fois que les objectifs ont été
définis, que les services impliqués et
les impacts sont identifiés, comment
est-ce qu’on développe une stratégie
de gestion de projet ? Comment
s’organise la gouvernance ? Quels
profils interviennent ? Quel temps
octroyer (car l’entreprise continue de
tourner !) ?
Marie-Eve Saint-Cierge Lovy (directrice
Relation client, Groupe Apicil) a piloté
la mise en œuvre de Salesforce, un
gros projet IT concernant la plupart des
entités du groupe et tous les processus
clients : “Nous avons choisi d’en faire un
projet métier. Le sponsor était le DG de
l’entité et la direction marketing assurait
le pilotage du projet. Un binôme s’est
constitué avec le responsable IT. C’est
un point crucial car souvent, les projets
d’implémentation d’outils sont gérés
directement par l’informatique alors
que les métiers sont au cœur de la
démarche. L‘équipe projet comprenait
une soixantaine de collaborateurs
permanents issus du Sales, du Marketing
et du Service Client, avec un “Product
Owner” (PO) métier pour chaque
brique. Pas de consultant externe,
car la connaissance est perdue à son
départ et cela déresponsabilise les
métiers. Il était aussi important que
des ambassadeurs parlent du projet
dans leurs directions, d’autant que
nous voulions faire monter nos équipes
en compétences à travers un projet
interne fort. Des collaborateurs ont été
formés aux missions de PO. Personne
n’a été accaparé à 100% au projet et
chacun a conservé une activité dans
sa direction de départ”.
Penser la stratégie en amont est
primordial pour bien conduire le
changement. Par-delà l’outil, les
équipes sont impactées dans leur
quotidien. Les fédérer permet de mettre
de l’huile dans les rouages du projet
pour que tous se l’approprient. Il peut
y avoir des frustrations, du malaise, de
la résistance et parfois des départs.
Comment susciter l’envie dès le début
du projet ?
Marie-Eve (Apicil) a choisi l’outil avec
les équipes : “La demande initiale
consistait à monter de version un outil
en place depuis longtemps. Or, le coût
aurait été plus important que de repartir
de zéro. Nous avons benchmarké le
marché et retenu le leader après avoir
initialement fait un POC sur deux outils.
Les métiers ont choisi d’eux-mêmes
l’outil en liaison avec l’IT. Nous avons
ensuite beaucoup capitalisé sur le fait
d’avoir choisi le leader du marché, et
en alignant un budget conséquent”.
Pour Sandie (TopSolid) : “Nos key
users sont nos 25 téléprospectrices
hexagonales qui prennent 80% des
démos. L’arrivée d’un outil digital
leur amène forcément une crainte,
d’autant qu’elles ne sont pas
commissionnées sur la prise de leads.
Notre challenge : alimenter leurs
prospects avec de l’info pertinente
>>
De g. à d. et de haut en bas - Sandie Ohayon (TopSolid), Gael Seguillon (Market Maker),
Marie-Eve Saint-Cierge Lovy (Groupe APICIL), Murielle Zel Boch (Méristème, animatrice).			 Un reportage proposé par Patrick DUCHER
La conférence du 23 février dernier, co-organisée par ADETEM Rhône-Alpes et La Cuisine du Web,
avait pour thème « Digitaliser son marketing, pourquoi les outils ne servent à rien ! En réalité ils ne sont
rien …sans une stratégie et des objectifs clairs, une méthodologie rigoureuse de gestion de projet
et d’accompagnement au changement. Les trois témoins de la table ronde ont partagé des retours
d’expérience concrets sur leurs projets respectifs :
• la mise en place d’un CRM
• La digitalisation de la prospection commerciale
• la mise en place d’un outil d’échange avec les market places
Ils sont surtout partagé de précieux conseils sur les méthodes qui fonctionnent et les erreurs à éviter.
Morceaux choisis..
envoyée au bon moment pour qu’à
la fin, elles n’aient plus qu’à caler une
démo... et gagner leur prime ! Prendre
une solution connue fluidifie la mise en
œuvre en interne et l’engagement. Il
s’agit de bien comprendre comment
l’outil s’intègre dans l’écosystème car
chaque société est différente. Cette
phase n’est pas forcément très longue
si elle est bien préparée en embarquant
les bonnes personnes au bon moment,
en anticipant les besoins pour ne plus
avoir qu’à appuyer sur le bouton pour
que ça marche le jour J !”.
Comment priorise-t-on ce projet ?
Comment s’assurer que les équipes
peuvent lui consacrer du temps en
adéquation avec les objectifs de
l’entreprise ?
Chez Apicil : “Personne n’était dédié
au projet à 100% de son temps.
Chacun a continué les activités de sa
fonction. On a laissé 0,5j/semaine aux
équipes du marketing pour monter en
compétences en toute autonomie.
Salesforce dispose à cet égard d’un
outil dédié. Les collaborateurs ont
choisi d’eux-mêmes de travailler en
petits groupes. Dès le début, on a fait
un focus sur la vision, les valeurs du
projet et les critères de sélection pour
bien embarquer tous les participants.
Les contributeurs les plus assidus
avaient parfaitement compris l’intérêt.
Nous avons aussi beaucoup valorisé
l’employabilité que les compétences
acquises leur donneraient”.
Après avoir choisi l’outil, il faut
identifier les freins et les réfractaires au
changement. Sachant que la mise en
œuvre d’un outil de marketing digital
peut aussi créer du lien, une cohésion
interne qui casse les silos, avec des
ambassadeurs qui jouent un rôle clé.
Selon Gaël (Market Maker), les
stratégies sont adaptées au type de
projet : “Sur des projets très IT, le projet
se résume à des temps/homme et à
des compétences. Le focus se fera
sur la préparation, la roadmap, le
déroulé des tâches, la définition d’un
budget. Tout se joue avant même
le démarrage. Sur les projets avec
des équipes métiers impactées, qui
touchent à la relation humaine, un
travail additionnel intervient en plus de
la planification afin de bien identifier les
moteurs, les contributeurs, les passifs et
les réfractaires. Les passifs vont prendre
l’information, sans vraiment s’impliquer.
Les moteurs travailleront avec eux au
quotidien car il ne faut laisser personne
de côté. Les détracteurs sont utiles,
car ils challengent le projet. Le livre
La stratégie du projet latéral (Olivier
d’Herbemont et Bruno César, Dunod
2023) explique comment préparer les
choses en amont, notamment pour des
projets techniquement et humainement
complexes. Il faut définir la façon de
s’adresser à chaque personne, ne pas
l’abreuver de statistiques. Pour des
CRM à visée commerciale, le principal
levier est la rémunération, le variable,
la capacité de transformer plus
rapidement des leads, de récupérer de
l’information, de prioriser les activités du
quotidien, d’avoir un meilleur confort
de travail. Pour certains projets que j’ai
rencontrés es leads qui ne passaient pas
par le CRM n’étaient pas rémunérés.
Cela a obligé tout le monde à mettre la
main à la pâte. Ce n’est pas forcément
la meilleure manière, mais il faut trouver
le bon levier. On peut s’appuyer aussi
sur les ambassadeurs pour remonter des
infos”.
Trouver des éléments fédérateurs en
définissant les valeurs en commun.
Marie-Eve (Apicil) avait organisé un
meeting en amont du projet qui fut
un moment fort : “Nous avons choisi
des collaborateurs issus de directions
différentes en leur demandant de
travailler aussi avec l’intégrateur. Il
leur a fallu faire connaissance, car ils
n’avaient pas forcément le même
cadre de référence. Pour travailler
efficacement ensemble pendant 18
mois, il est important de définir un mode
de fonctionnement fédérateur. Nous
avons donc travaillé tout de suite sur
le sens. Par ailleurs, nous avons créé
un buzz en interne autour du projet via
une com marketée jusqu’à la veille
de la mise en production, au moment
où nous avons envoyé le faire-part de
naissance de “Ness” - le petit nom au
projet - à chaque collaborateur”.
Une démo oriente souvent le choix
d’une solution. Or, une fois qu’on a
l’outil en main, on peut être déçus,
car on s’aperçoit que ce n’est pas
d’une Porsche dont on avait besoin,
mais simplement d’une Clio. Comment
grandir avec l’outil et l’adapter à nos
besoins ?
Sandie (TopSolid) estime que dans 90%
des cas, les démos sont un moment
magique : “Tout marche bien, tout
est bien paramétré. Mais le chef de
projet se retrouve tout seul au moment
de l’onboarding. En matière de lead
generation, le workflow doit apporter
le bon contact à la bonne personne
et au bon moment. Le paramétrage
représente un boulot énorme pour une
entité de 400 personnes, 80 revendeurs,
80paysavec80mails.Ilestindispensable
d’être autonome - si la cheffe sait faire,
il y a un effet d’entraînement ! - surtout
en cas d’indisponibilité du support.
Attention à ne pas ouvrir une boîte de
Pandore, car l’outil peut évidemment
faire une multitude de choses. Mieux
vaut rester modeste, car il doit être au
service de tous, pas que du marketing,
et répondre aux enjeux définis en
amont”.
Quand le projet prend forme en
parallèle des activités de l’entreprise,
comment garantir une certaine
souplesse d’usage car des aléas
surviennent nécessairement, de même
que des évolutions ?
Marie-Eve (Apicil) raconte que le Covid
est arrivé deux mois après le début du
projet sans qu’il soit possible de décaler
la date de mise en production : “60
personnes ont travaillé en full-distanciel,
en mélangeant mode agile, sprints
et méthode en V. Les recettes avec
les futurs utilisateurs permettaient de
faire des corrections au fil de l’eau.
Le covid aurait pu être fatal, car nous
avions prévu que les développeurs
soient formés par l’intégrateur pendant
cette période-là. Garder 60 personnes
alignées à distance, c’est compliqué !
Or, le covid fut finalement salvateur,
car l’équipe s’est vraiment soudée et
le confinement est passé très vite. Nous
avions un appel à 20 heures chaque
soir. Ce fut épuisant pour les pilotes du
projet, qui ont animé des reviews de 80
participants à distance sur une journée
entière. C’est quand on passe en “run”
que les vraies choses commencent “!
Comment adapter le projet au fur et à
mesure ?
Gaël (Market Maker) a généré des
releases régulières. Il a un correspondant
par métier (marketing, commerce,
ADV...) pour avoir des remontées
d’infos sur l’utilisation de l’outil et les
difficultés rencontrés afin de l’améliorer
l’outil et d’ajouter des features : “Il y a
eu beaucoup d’évolution au départ et
petit à petit, les gens se sont habitués à
l’outil”.
Comment communiquer tout au long
du projet ?
Topsolid a régulièrement mis en avant
les bénéfices et les KPI : “Hubspot
permet de générer des tableaux
de bord limpides sur de nombreux
indicateurs. L’outil permet de travailler
une feuille de route en adéquation
avec les enjeux des directions. La
gestion des données est plutôt facile
à appréhender : on décide sur quels
critères fixer les objectifs (qualit/quanti,
...). Un chiffre d’affaires doit pouvoir
se mesurer. Tout est pluggé donc on
peut analyser toutes les actions. On
démontre ainsi que le marketing n’est
>>
10 TIPS POUR MENER A BIEN UN PROJET DIGITAL
1. Un outil au service d’une stratégie
2. Des objectifs collectifs clairs, des gains valorisés et
partagés
3. Avoir un sponsor interne
4. Créer une équipe projet transverse et structurée
avec du temps dédié
5. Identifier les freins internes
6. Informer sans cesse l’ensemble de l’entreprise de
l’avancée du projet
7. Rester souple !
8. Penser aux utilisateurs
9. Suivre les résultats et les communiquer
10. Capitaliser pour faire grandir l’entreprise
pas qu’un centre de coût, mais peut aussi rapporter de
l’argent”.
Que se passe-t-il après le projet ? Comment revenir à sa vie
d’avant ? Comment a-t-il contribué à nourrir et faire grandir
l’entreprise ?
Marie-Eve (Apicil) a ressenti un “baby blues” après l’envoi du
faire-part de naissance de “Ness” et de la mise en production :
“La bascule a eu lieu pendant les 4 jours du long week-end de
l’Ascension qui marquait la fin du confinement. Toute l’équipe
est restée mobilisée pour s’assurer que les 1500 collaborateurs
auraient accès à l’outil dès leur retour. On a été presque
déçu que tout marche ! Il faut vraiment soigner l’après-projet
pour nourrir l’envie. Il a fallu se mettre tout de suite en monde
“run”, car le projet a continué pendant encore quelques
mois. La phase d’excitation est lentement retombée. Certains
collaborateurs se sont formés pour obtenir des certifications à
titre personnel, changer de fonction et évoluer en interne. Et
en faisant le bilan à froid au bout d’un an, sur un budget de
plusieurs millions d’euros pour un projet livré dans les temps,
nous tombons à 3000 euros près !”.
Quels process avez-vous conservés ? Quelles leçons retenir ?
Pour Marie-Eve (Apicil), l’IT ne pourra plus mener de projets
comme avant : “L’image du marketing a vraiment changé.
Ils ont compris l’intérêt de la communication et ils y ont pris
plaisir. La scission outils vs. métiers a été gommée”.
Sandie (TopSolid) estime que l’entreprise a évolué : “On s’est
rendu compte que nos geeks n’étaient pas les meilleurs pour
développer des solutions internes et accepté de faire appel
des développements extérieurs. Nous avons modifié le mode
de fonctionnement des Sales, du Service sur 8 filiales et 85
resellers. Ce sont des personnes qu’il s’agit d’embarquer, pas
forcément une question de technologie hyper pointue, ni de
croissance”.
Pour Gaël (Market Maker), la mise en œuvre du projet a
été un choc de culture : “Le projet digital a mis l’accent
sur la satisfaction client, notamment en transverse, qui est
maintenant au centre de l’entreprise avec la mise en place
d’un CRM pour être à l’écoute et produire de la qualité. Il est
important de ne pas se couper des utilisateurs car nous avions
sous-évalué notre maturité digitale. Parfois, on crée une
cellule projet dissociée des équipes transverses qui évolue
en mode start-up. C’est difficile ensuite de “raccrocher les
wagons” car le projet n’a pas rempli son rôle de team-building.
Inversement, associer les équipes au choix de l’intégrateur a
été bien perçu”.
Sandie (TopSolid) trouve le rôle de cheffe d’orchestre
éreintant : “C’est à la fois merveilleux - parce qu’on ne le
vit qu’une fois – et douloureux, car on n’arrive parfois pas à
embarquer tout le monde, surtout dans le secteur industriel
où il faut prouver son utilité à tous. Le point positif c’est la
valorisation du service marketing, qui apporte une véritable
valeur ajoutée à l’équipe commerciale, à la stratégie de
groupe, qui se mesure ! C’est la première fois où l’on peut
quantifier les actions, analyser un ROI et viser d’autres
objectifs. Ça permet d’obtenir d’autres budgets aussi”.
Marie-Eve (Apicil) précise qu’il ne faut pas sous-estimer le
temps de montée en compétences pour l’administration de
l’outil, car pour les administrateurs il y a beaucoup de choses
à maitriser. Par ailleurs : “Ce fut très bénéfique de construire le
“run” / les opérations courantes, dès la phase de projet, dès
la constitution de la gouvernance de l’outil. En insistant sur le
fait que les métiers doivent respecter le standard de l’outil, et
ne pas réclamer du spécifique, pour que le projet soit viable
économiquement” 
Ce compte-rendu vous est proposé par Patrick Ducher,
journaliste d’entreprise B2B. Patrick propose aux entreprises
et associations professionnelles le compte-rendu/reportage
de leurs événements.
www.patrickducher.com |
QUESTIONS-REPONSES en page suivante >>>
QUESTIONS / REPONSES
Comment l’entreprise gère deux gros projets en même
temps ?
Marie-Eve (Apicil) raconte que la mise en œuvre de
SalesForce a été couplée avec la montée de version
d’un outil de gestion, qui a suivi un cycle de projet “en
V” classique : “Nous avions un challenge, car les deux
projets ont été mis en “live” au même moment. Comme il
fallait qu’ils puissent dialoguer l’un vers l’autre, un groupe
de travail parallèle avait été créé à cet effet. Cela crée
parfois des tensions quand les projets n’avancent pas au
même rythme, mais toutes les équipes se sont retrouvées
au moment de la bascule”.
Quel rôle pour les services Achats d’Apicil sur un projet
de cette envergure ?
Marie-Eve (Apicil) explique que le projet a duré 12
mois en conception, en déploiement et en mise en
production, précédés de 6 mois de cadrage : “Nous
avons pris un avocat en amont pour bien relire le contrat
et anticiper toutes les configurations potentielles, car
souvent beaucoup de lignes sont “à l’usage”, avec
des coûts incrémentaux pour le développement de
fonctionnalités. Nous avons impliqué l’éditeur pour
bien cadrer les choses. Les relations ont été totalement
sereines par la suite car tout était contractualisé. Notre
clé de succès : notre intégrateur était l’éditeur et avait
donc tout intérêt à ce que le projet se déroule bien”.
Au-delà de l’accompagnement humain, avez-
vous fait appel à d’autres outils que ceux évoqués
précédemment ?
Gaël (Market Maker) et Sandie (TopSolid) ont utilisé
Jira (gestion des bugs), Asana et Monday (gestion de
projet).
L’analyse des besoins des téléprospectrices TOPSOLID
a été cruciale pour les onboarder. Quelques exemples
concrets ont permis d’orienter le projet ?
Topsolid a développé une riche production de contenus
(350 articles de blog/an) qui attirent des leads : “C’est
le prospect qui vient à nous. On travaille le nurturing et
l’automation. Les assistantes visualisent le cycle de vie
du prospect et l’outil leur permet d’appeler la personne
au bon moment pour livrer le bon discours. Elles étaient
originellement réfractaires au digital, alors qu’elles
consomment de l’automation sur plein d’autres choses.
Il a juste fallu expliquer qu’on n’allait pas importuner leurs
clients, mais leur apporter une information opportune
pour convertir plus facilement. La plateforme Efficy leur
permet de visualiser le résultat des emailings. Nous avons
tout intérêt à les choyer, car c’est un métier en tension !”.
Est-ce qu’il y a eu de bonnes surprises en termes de gains
? Des déceptions ?
Gaël (Market Maker) : “On a fait 40 millions de CA en
deux ans en partant de zéro , et créé un nouveau
business. » Soit l’inverse d’un exemple vécu dans une
vie professionnelle antérieure, où un projet mené par
la Finance sans concertation avec le marketing ni le
commerce et qui n’avait pas suscité d’adhésion car les
métiers n’avaient pas su s’approprier l’outil qui nécessitait
d’importer des données dans de la BI”.
Marie-Eve (Apicil) estime que pour faire un beau projet,
il faut intégrer les bons KPI d’entrée de jeu… qui ne sont
pas forcément les plus commerciaux : “Il faut parfois
inventer des éléments pour remplir les cases du contrat
projet comme “augmenter les leads de x %” ou “faire
croître le taux de conversion de x%“. Mais bien malin celui
qui sait pourquoi le nombre de leads a augmenté ! Est-
ce dû à une nouvelle offre bien positionnée ? L’essentiel
concerne plutôt le taux d’adoption de l’outil, le coût
du « run », et des mises en production des releases sans
charge supplémentaire ni régression”.
Sandie (TopSolid) estime que la conduite du changement
a ses limites quand le soutien post-lancement n’est pas
toujours suffisant : “En mode SaaS, on n’a pas forcément
de support, et il faut parfois faire face à des monceaux
d’informations avant d’identifier la bonne ressource”.

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Digitaliser son marketing : pourquoi les outils ne servent à rien ?

  • 1. Très souvent, les outils digitaux sont considérés comme les “joujoux” du marketing, décorrélés des objectifs de l’entreprise et des autres services. Chez TopSolid, Hubspot a été mis au service du commerce et drivé avec les équipes commerciales. Quels objectifs étaient visés ? Sandie Ohayon (directrice marketing et digitale, TopSolid Corporate) : “L’objectif était d’aligner Sales et Marketing, ce qui peut relever de la gageure. Or, les deux entités visent la croissance de l’entreprise et il était très important d’arriver à embarquer tout le monde et faire en sorte que les commerciaux trouvent un sens à cette digitalisation. Hubspot, en matière d’automation, sert à la génération de leads, à aller chercher des prospects chauds, tièdes ou froids, à les alimenter, les “nurturer”, à mettre en œuvre un workflow au service du commercial. Les investissements sont de plus en plus consentis à cette “acquisition digitale” C’est sur ces objectifs qu’on peut donc aligner commerce et marketing, auxquels chacun va contribuer”. Pour Market Maker en quoi le choix d’un outil digital répondait vraiment à la stratégie ? Gael Séguillon (head of E-commerce, Market Maker) : “L’ERP était le seul outil mis en place. Jusque-là, on envoyait des fichiers Excel avec des produits à commercialiser à une soixantaine de clients. Or nous avions une stratégie de déploiement plus important avec les market places, ce qui implique des transferts de données automatisé. Il y avait un gros travail à faire de rationalisation de la donnée, et surtout le besoin de connecter la source des données dans l’ERP vers des canaux de vente pour automatiser les flux d’informations. Nous avons donc choisi le connecteur Achats de Prestashop. Après avoir normalisé la donnée et toutes les caractéristiques des produits puis on a utilisé un agrégateur de flux pour répondre à chaque spécification de notre marketplace. Offre et prix se mettent à jour directement dans l’ERP. Le projet a été assez rapide à mettre en œuvre, en quelques mois, avec un peu de paramétrage”. Une fois que les objectifs ont été définis, que les services impliqués et les impacts sont identifiés, comment est-ce qu’on développe une stratégie de gestion de projet ? Comment s’organise la gouvernance ? Quels profils interviennent ? Quel temps octroyer (car l’entreprise continue de tourner !) ? Marie-Eve Saint-Cierge Lovy (directrice Relation client, Groupe Apicil) a piloté la mise en œuvre de Salesforce, un gros projet IT concernant la plupart des entités du groupe et tous les processus clients : “Nous avons choisi d’en faire un projet métier. Le sponsor était le DG de l’entité et la direction marketing assurait le pilotage du projet. Un binôme s’est constitué avec le responsable IT. C’est un point crucial car souvent, les projets d’implémentation d’outils sont gérés directement par l’informatique alors que les métiers sont au cœur de la démarche. L‘équipe projet comprenait une soixantaine de collaborateurs permanents issus du Sales, du Marketing et du Service Client, avec un “Product Owner” (PO) métier pour chaque brique. Pas de consultant externe, car la connaissance est perdue à son départ et cela déresponsabilise les métiers. Il était aussi important que des ambassadeurs parlent du projet dans leurs directions, d’autant que nous voulions faire monter nos équipes en compétences à travers un projet interne fort. Des collaborateurs ont été formés aux missions de PO. Personne n’a été accaparé à 100% au projet et chacun a conservé une activité dans sa direction de départ”. Penser la stratégie en amont est primordial pour bien conduire le changement. Par-delà l’outil, les équipes sont impactées dans leur quotidien. Les fédérer permet de mettre de l’huile dans les rouages du projet pour que tous se l’approprient. Il peut y avoir des frustrations, du malaise, de la résistance et parfois des départs. Comment susciter l’envie dès le début du projet ? Marie-Eve (Apicil) a choisi l’outil avec les équipes : “La demande initiale consistait à monter de version un outil en place depuis longtemps. Or, le coût aurait été plus important que de repartir de zéro. Nous avons benchmarké le marché et retenu le leader après avoir initialement fait un POC sur deux outils. Les métiers ont choisi d’eux-mêmes l’outil en liaison avec l’IT. Nous avons ensuite beaucoup capitalisé sur le fait d’avoir choisi le leader du marché, et en alignant un budget conséquent”. Pour Sandie (TopSolid) : “Nos key users sont nos 25 téléprospectrices hexagonales qui prennent 80% des démos. L’arrivée d’un outil digital leur amène forcément une crainte, d’autant qu’elles ne sont pas commissionnées sur la prise de leads. Notre challenge : alimenter leurs prospects avec de l’info pertinente >> De g. à d. et de haut en bas - Sandie Ohayon (TopSolid), Gael Seguillon (Market Maker), Marie-Eve Saint-Cierge Lovy (Groupe APICIL), Murielle Zel Boch (Méristème, animatrice). Un reportage proposé par Patrick DUCHER La conférence du 23 février dernier, co-organisée par ADETEM Rhône-Alpes et La Cuisine du Web, avait pour thème « Digitaliser son marketing, pourquoi les outils ne servent à rien ! En réalité ils ne sont rien …sans une stratégie et des objectifs clairs, une méthodologie rigoureuse de gestion de projet et d’accompagnement au changement. Les trois témoins de la table ronde ont partagé des retours d’expérience concrets sur leurs projets respectifs : • la mise en place d’un CRM • La digitalisation de la prospection commerciale • la mise en place d’un outil d’échange avec les market places Ils sont surtout partagé de précieux conseils sur les méthodes qui fonctionnent et les erreurs à éviter. Morceaux choisis..
  • 2. envoyée au bon moment pour qu’à la fin, elles n’aient plus qu’à caler une démo... et gagner leur prime ! Prendre une solution connue fluidifie la mise en œuvre en interne et l’engagement. Il s’agit de bien comprendre comment l’outil s’intègre dans l’écosystème car chaque société est différente. Cette phase n’est pas forcément très longue si elle est bien préparée en embarquant les bonnes personnes au bon moment, en anticipant les besoins pour ne plus avoir qu’à appuyer sur le bouton pour que ça marche le jour J !”. Comment priorise-t-on ce projet ? Comment s’assurer que les équipes peuvent lui consacrer du temps en adéquation avec les objectifs de l’entreprise ? Chez Apicil : “Personne n’était dédié au projet à 100% de son temps. Chacun a continué les activités de sa fonction. On a laissé 0,5j/semaine aux équipes du marketing pour monter en compétences en toute autonomie. Salesforce dispose à cet égard d’un outil dédié. Les collaborateurs ont choisi d’eux-mêmes de travailler en petits groupes. Dès le début, on a fait un focus sur la vision, les valeurs du projet et les critères de sélection pour bien embarquer tous les participants. Les contributeurs les plus assidus avaient parfaitement compris l’intérêt. Nous avons aussi beaucoup valorisé l’employabilité que les compétences acquises leur donneraient”. Après avoir choisi l’outil, il faut identifier les freins et les réfractaires au changement. Sachant que la mise en œuvre d’un outil de marketing digital peut aussi créer du lien, une cohésion interne qui casse les silos, avec des ambassadeurs qui jouent un rôle clé. Selon Gaël (Market Maker), les stratégies sont adaptées au type de projet : “Sur des projets très IT, le projet se résume à des temps/homme et à des compétences. Le focus se fera sur la préparation, la roadmap, le déroulé des tâches, la définition d’un budget. Tout se joue avant même le démarrage. Sur les projets avec des équipes métiers impactées, qui touchent à la relation humaine, un travail additionnel intervient en plus de la planification afin de bien identifier les moteurs, les contributeurs, les passifs et les réfractaires. Les passifs vont prendre l’information, sans vraiment s’impliquer. Les moteurs travailleront avec eux au quotidien car il ne faut laisser personne de côté. Les détracteurs sont utiles, car ils challengent le projet. Le livre La stratégie du projet latéral (Olivier d’Herbemont et Bruno César, Dunod 2023) explique comment préparer les choses en amont, notamment pour des projets techniquement et humainement complexes. Il faut définir la façon de s’adresser à chaque personne, ne pas l’abreuver de statistiques. Pour des CRM à visée commerciale, le principal levier est la rémunération, le variable, la capacité de transformer plus rapidement des leads, de récupérer de l’information, de prioriser les activités du quotidien, d’avoir un meilleur confort de travail. Pour certains projets que j’ai rencontrés es leads qui ne passaient pas par le CRM n’étaient pas rémunérés. Cela a obligé tout le monde à mettre la main à la pâte. Ce n’est pas forcément la meilleure manière, mais il faut trouver le bon levier. On peut s’appuyer aussi sur les ambassadeurs pour remonter des infos”. Trouver des éléments fédérateurs en définissant les valeurs en commun. Marie-Eve (Apicil) avait organisé un meeting en amont du projet qui fut un moment fort : “Nous avons choisi des collaborateurs issus de directions différentes en leur demandant de travailler aussi avec l’intégrateur. Il leur a fallu faire connaissance, car ils n’avaient pas forcément le même cadre de référence. Pour travailler efficacement ensemble pendant 18 mois, il est important de définir un mode de fonctionnement fédérateur. Nous avons donc travaillé tout de suite sur le sens. Par ailleurs, nous avons créé un buzz en interne autour du projet via une com marketée jusqu’à la veille de la mise en production, au moment où nous avons envoyé le faire-part de naissance de “Ness” - le petit nom au projet - à chaque collaborateur”. Une démo oriente souvent le choix d’une solution. Or, une fois qu’on a l’outil en main, on peut être déçus, car on s’aperçoit que ce n’est pas d’une Porsche dont on avait besoin, mais simplement d’une Clio. Comment grandir avec l’outil et l’adapter à nos besoins ? Sandie (TopSolid) estime que dans 90% des cas, les démos sont un moment magique : “Tout marche bien, tout est bien paramétré. Mais le chef de projet se retrouve tout seul au moment de l’onboarding. En matière de lead generation, le workflow doit apporter le bon contact à la bonne personne et au bon moment. Le paramétrage représente un boulot énorme pour une entité de 400 personnes, 80 revendeurs, 80paysavec80mails.Ilestindispensable d’être autonome - si la cheffe sait faire, il y a un effet d’entraînement ! - surtout en cas d’indisponibilité du support. Attention à ne pas ouvrir une boîte de Pandore, car l’outil peut évidemment faire une multitude de choses. Mieux vaut rester modeste, car il doit être au service de tous, pas que du marketing, et répondre aux enjeux définis en amont”. Quand le projet prend forme en parallèle des activités de l’entreprise, comment garantir une certaine souplesse d’usage car des aléas surviennent nécessairement, de même que des évolutions ? Marie-Eve (Apicil) raconte que le Covid est arrivé deux mois après le début du projet sans qu’il soit possible de décaler la date de mise en production : “60 personnes ont travaillé en full-distanciel, en mélangeant mode agile, sprints et méthode en V. Les recettes avec les futurs utilisateurs permettaient de faire des corrections au fil de l’eau. Le covid aurait pu être fatal, car nous avions prévu que les développeurs soient formés par l’intégrateur pendant cette période-là. Garder 60 personnes alignées à distance, c’est compliqué ! Or, le covid fut finalement salvateur, car l’équipe s’est vraiment soudée et le confinement est passé très vite. Nous avions un appel à 20 heures chaque soir. Ce fut épuisant pour les pilotes du projet, qui ont animé des reviews de 80 participants à distance sur une journée entière. C’est quand on passe en “run” que les vraies choses commencent “! Comment adapter le projet au fur et à mesure ? Gaël (Market Maker) a généré des releases régulières. Il a un correspondant par métier (marketing, commerce, ADV...) pour avoir des remontées d’infos sur l’utilisation de l’outil et les difficultés rencontrés afin de l’améliorer l’outil et d’ajouter des features : “Il y a eu beaucoup d’évolution au départ et petit à petit, les gens se sont habitués à l’outil”. Comment communiquer tout au long du projet ? Topsolid a régulièrement mis en avant les bénéfices et les KPI : “Hubspot permet de générer des tableaux de bord limpides sur de nombreux indicateurs. L’outil permet de travailler une feuille de route en adéquation avec les enjeux des directions. La gestion des données est plutôt facile à appréhender : on décide sur quels critères fixer les objectifs (qualit/quanti, ...). Un chiffre d’affaires doit pouvoir se mesurer. Tout est pluggé donc on peut analyser toutes les actions. On démontre ainsi que le marketing n’est >>
  • 3. 10 TIPS POUR MENER A BIEN UN PROJET DIGITAL 1. Un outil au service d’une stratégie 2. Des objectifs collectifs clairs, des gains valorisés et partagés 3. Avoir un sponsor interne 4. Créer une équipe projet transverse et structurée avec du temps dédié 5. Identifier les freins internes 6. Informer sans cesse l’ensemble de l’entreprise de l’avancée du projet 7. Rester souple ! 8. Penser aux utilisateurs 9. Suivre les résultats et les communiquer 10. Capitaliser pour faire grandir l’entreprise pas qu’un centre de coût, mais peut aussi rapporter de l’argent”. Que se passe-t-il après le projet ? Comment revenir à sa vie d’avant ? Comment a-t-il contribué à nourrir et faire grandir l’entreprise ? Marie-Eve (Apicil) a ressenti un “baby blues” après l’envoi du faire-part de naissance de “Ness” et de la mise en production : “La bascule a eu lieu pendant les 4 jours du long week-end de l’Ascension qui marquait la fin du confinement. Toute l’équipe est restée mobilisée pour s’assurer que les 1500 collaborateurs auraient accès à l’outil dès leur retour. On a été presque déçu que tout marche ! Il faut vraiment soigner l’après-projet pour nourrir l’envie. Il a fallu se mettre tout de suite en monde “run”, car le projet a continué pendant encore quelques mois. La phase d’excitation est lentement retombée. Certains collaborateurs se sont formés pour obtenir des certifications à titre personnel, changer de fonction et évoluer en interne. Et en faisant le bilan à froid au bout d’un an, sur un budget de plusieurs millions d’euros pour un projet livré dans les temps, nous tombons à 3000 euros près !”. Quels process avez-vous conservés ? Quelles leçons retenir ? Pour Marie-Eve (Apicil), l’IT ne pourra plus mener de projets comme avant : “L’image du marketing a vraiment changé. Ils ont compris l’intérêt de la communication et ils y ont pris plaisir. La scission outils vs. métiers a été gommée”. Sandie (TopSolid) estime que l’entreprise a évolué : “On s’est rendu compte que nos geeks n’étaient pas les meilleurs pour développer des solutions internes et accepté de faire appel des développements extérieurs. Nous avons modifié le mode de fonctionnement des Sales, du Service sur 8 filiales et 85 resellers. Ce sont des personnes qu’il s’agit d’embarquer, pas forcément une question de technologie hyper pointue, ni de croissance”. Pour Gaël (Market Maker), la mise en œuvre du projet a été un choc de culture : “Le projet digital a mis l’accent sur la satisfaction client, notamment en transverse, qui est maintenant au centre de l’entreprise avec la mise en place d’un CRM pour être à l’écoute et produire de la qualité. Il est important de ne pas se couper des utilisateurs car nous avions sous-évalué notre maturité digitale. Parfois, on crée une cellule projet dissociée des équipes transverses qui évolue en mode start-up. C’est difficile ensuite de “raccrocher les wagons” car le projet n’a pas rempli son rôle de team-building. Inversement, associer les équipes au choix de l’intégrateur a été bien perçu”. Sandie (TopSolid) trouve le rôle de cheffe d’orchestre éreintant : “C’est à la fois merveilleux - parce qu’on ne le vit qu’une fois – et douloureux, car on n’arrive parfois pas à embarquer tout le monde, surtout dans le secteur industriel où il faut prouver son utilité à tous. Le point positif c’est la valorisation du service marketing, qui apporte une véritable valeur ajoutée à l’équipe commerciale, à la stratégie de groupe, qui se mesure ! C’est la première fois où l’on peut quantifier les actions, analyser un ROI et viser d’autres objectifs. Ça permet d’obtenir d’autres budgets aussi”. Marie-Eve (Apicil) précise qu’il ne faut pas sous-estimer le temps de montée en compétences pour l’administration de l’outil, car pour les administrateurs il y a beaucoup de choses à maitriser. Par ailleurs : “Ce fut très bénéfique de construire le “run” / les opérations courantes, dès la phase de projet, dès la constitution de la gouvernance de l’outil. En insistant sur le fait que les métiers doivent respecter le standard de l’outil, et ne pas réclamer du spécifique, pour que le projet soit viable économiquement”  Ce compte-rendu vous est proposé par Patrick Ducher, journaliste d’entreprise B2B. Patrick propose aux entreprises et associations professionnelles le compte-rendu/reportage de leurs événements. www.patrickducher.com | QUESTIONS-REPONSES en page suivante >>>
  • 4. QUESTIONS / REPONSES Comment l’entreprise gère deux gros projets en même temps ? Marie-Eve (Apicil) raconte que la mise en œuvre de SalesForce a été couplée avec la montée de version d’un outil de gestion, qui a suivi un cycle de projet “en V” classique : “Nous avions un challenge, car les deux projets ont été mis en “live” au même moment. Comme il fallait qu’ils puissent dialoguer l’un vers l’autre, un groupe de travail parallèle avait été créé à cet effet. Cela crée parfois des tensions quand les projets n’avancent pas au même rythme, mais toutes les équipes se sont retrouvées au moment de la bascule”. Quel rôle pour les services Achats d’Apicil sur un projet de cette envergure ? Marie-Eve (Apicil) explique que le projet a duré 12 mois en conception, en déploiement et en mise en production, précédés de 6 mois de cadrage : “Nous avons pris un avocat en amont pour bien relire le contrat et anticiper toutes les configurations potentielles, car souvent beaucoup de lignes sont “à l’usage”, avec des coûts incrémentaux pour le développement de fonctionnalités. Nous avons impliqué l’éditeur pour bien cadrer les choses. Les relations ont été totalement sereines par la suite car tout était contractualisé. Notre clé de succès : notre intégrateur était l’éditeur et avait donc tout intérêt à ce que le projet se déroule bien”. Au-delà de l’accompagnement humain, avez- vous fait appel à d’autres outils que ceux évoqués précédemment ? Gaël (Market Maker) et Sandie (TopSolid) ont utilisé Jira (gestion des bugs), Asana et Monday (gestion de projet). L’analyse des besoins des téléprospectrices TOPSOLID a été cruciale pour les onboarder. Quelques exemples concrets ont permis d’orienter le projet ? Topsolid a développé une riche production de contenus (350 articles de blog/an) qui attirent des leads : “C’est le prospect qui vient à nous. On travaille le nurturing et l’automation. Les assistantes visualisent le cycle de vie du prospect et l’outil leur permet d’appeler la personne au bon moment pour livrer le bon discours. Elles étaient originellement réfractaires au digital, alors qu’elles consomment de l’automation sur plein d’autres choses. Il a juste fallu expliquer qu’on n’allait pas importuner leurs clients, mais leur apporter une information opportune pour convertir plus facilement. La plateforme Efficy leur permet de visualiser le résultat des emailings. Nous avons tout intérêt à les choyer, car c’est un métier en tension !”. Est-ce qu’il y a eu de bonnes surprises en termes de gains ? Des déceptions ? Gaël (Market Maker) : “On a fait 40 millions de CA en deux ans en partant de zéro , et créé un nouveau business. » Soit l’inverse d’un exemple vécu dans une vie professionnelle antérieure, où un projet mené par la Finance sans concertation avec le marketing ni le commerce et qui n’avait pas suscité d’adhésion car les métiers n’avaient pas su s’approprier l’outil qui nécessitait d’importer des données dans de la BI”. Marie-Eve (Apicil) estime que pour faire un beau projet, il faut intégrer les bons KPI d’entrée de jeu… qui ne sont pas forcément les plus commerciaux : “Il faut parfois inventer des éléments pour remplir les cases du contrat projet comme “augmenter les leads de x %” ou “faire croître le taux de conversion de x%“. Mais bien malin celui qui sait pourquoi le nombre de leads a augmenté ! Est- ce dû à une nouvelle offre bien positionnée ? L’essentiel concerne plutôt le taux d’adoption de l’outil, le coût du « run », et des mises en production des releases sans charge supplémentaire ni régression”. Sandie (TopSolid) estime que la conduite du changement a ses limites quand le soutien post-lancement n’est pas toujours suffisant : “En mode SaaS, on n’a pas forcément de support, et il faut parfois faire face à des monceaux d’informations avant d’identifier la bonne ressource”.