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Baptiste Mondéhard
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Le rôle des réhausseurs de crédit dans la crise des subprimes
La crise des subprimes qui a secoué la planète finance en 2008, puis l'économie réelle, a
révélé la défaillance de nombreux acteurs. Les banques ont été largement montrées du doigt,
puisque ce sont elles qui ont massivement émis des crédits dits subprimes via leurs organismes de
crédit ou SPV (special purpose vehicule). Les banques centrales ont lancé une course effrénée à
l'émission de crédit après le 11 septembre 2001 craignant une possible récession économique. Les
cadres légaux dont les ratios prudentiels, ont eu pour effet d'accroître le recours aux produits dérivés
complexes. Enfin les réhausseurs de crédit ont été pris dans la chute des dominos de la finance
internationale. Ces acteurs restent peu connus, et leur activité obscure, d'autant plus qu'ils n'ont été
que les derniers touchés vers la vague de la crise et donc que l'intérêt médiatique qui leur a été porté
fut plus faible que pour les autres acteurs.
Il faut d'abord rappeler ce qu'est un crédit subprime. Alors même qu'entre 2002 et 2005 la FED a
mené une politique laxiste concernant l'émission de crédit, avec pour le principal taux d'intérêts, une
oscillation entre 1 et 2%, les banques ont largement pu profiter des ces facilitées pour écouler des
crédits aux ménages américains. Cependant, les classes moyennes supérieures et classes supérieures
n'étaient pas visées par ce crédit puisqu'elle n'avait pas un besoin réel d'accès au crédit. Les banques
ont trouvé le moyen d'émettre plus de crédit en visant les ménages pauvres, en leur proposant des
crédits avantageux les premières années, avec des taux d'intérêt très bas, voire sans remboursement
les deux premières années, mais qui s'envolent ensuite et progressivement. Ou encore des crédits à
taux variables qui ont eu les conséquences que l'on connaît avec la décision de la banque centrale
américaine de remonter brutalement les taux de 2,25 % à 5,25 % entre janvier 2005 et juillet 2006.
Ces crédits étaient garantis par hypothèque sur les biens immobiliers achetés avec ces crédits. Le
système a bien fonctionné tant que le marché de l'immobilier s'enflammait sous l'effet notamment
des ces crédits subprime. Cependant, cette bulle a fini par éclater quand la Federal Reserve a décidé
de fermer peu à peu le robinet du crédit. Les ménages ont commencé à montrer des difficultés à
rembourser, et les prix de l'immobilier se sont peu à peu effondrés.
Mais que viennent faire les réhausseurs de crédit dans cette histoire ? Elles interviennent sur
le deuxième visage de la crise. En effet, les banques auraient pu encaisser les pertes liés au défaut
des emprunteurs, faire faillite, ou être renflouées par l'Etat, mais elles ont cherché à se départir du
risque que portait les titres de créance subprime, en les sortant de leur bilan comptable. Et ce, tout
en continuant à émettre du crédit puisque c'était une activité très rentable à l'époque. Ainsi, elles ont
massivement eu recours à la titrisation de ces créances. Mais ne pouvant les vendre comme telles,
car personne n'aurait voulu les acheter, elles ont savamment introduit des parts de produit subprime
au milieu de produit obligataires composites, basés sur des titres sûrs tels que des titres de dettes d'
Etat. Et pour vendre encore plus facilement ces titres, les banques ont fait appel aux réhausseurs ou
monoliners. Ces institutions sont des assureurs, qui exercent l'activité bien spécifique, d'assurer des
titres obligataires. A l'origine, les réhausseurs sont apparus pour répondre aux besoins des
municipalités américaines de se financer à moindre coût directement sur les marchés financiers. Les
réhausseurs de crédits intervenaient et interviennent toujours comme garant du remboursement des
municipal bond émis par les municipalité, en cas de défaut de celles-ci. Ce qui permet au titre émis
par la municipalité d'obtenir la note maximale AAA par les agences de notation. Et comme le taux
d'intérêts est fonction de cette note, plus la note est élevée plus le taux d'intérêts est bas.
Cependant les réhausseurs de crédits se sont mis à effectuer le même type d'activité pour les
banques. Et ont ainsi participé à la diffusion des titres subprimes via les produits dérivés qu'ils
assuraient. Cependant la part de subprime était minime au sein de ces produits appelés asset backed
securities. Ainsi les réhausseurs n'ont-ils pas imaginé que cette tranche négligeable des titres puisse
avoir des conséquences si catastrophique, ou alors l'ont-ils imaginé, mais ils ont quand même pris le
risque tant l'activité était rentable.
Dès lors les réhausseurs sont-elles les victimes averties de la crise des subprimes ? Nous tenterons
tout d'abord d'étudier en quoi l'activité des monoliners a participé à l'opaciter autour du risque des
produits subprimes, puis en quoi la crise des subprimes a mis en danger les monoliners au point de
faire craindre au déclenchement d'une crise systémique plus globale.
I- Les monoliners principaux vecteurs de l'opacité des produits dérivés subprimes
A- De l'assurance des municipal bonds à la garantie des CBO d'ABS
Comme nous l'avons vu en introduction, les réhausseurs de crédit ont à l'origine été créés
dans le but de faciliter le financement des collectivités locales américaines à moindre coût. Ainsi
AMBAC est le premier à investir ce marché en 1971, suivi par MBIA en en 1974, FGIC en 1983 et
FSA en en 1985.
Le taux de défaut des municipalités étaient inférieur à 1 %, ainsi l'activité des monoliners était
certes rentable et peu risquée, mais ils ont cherché à diversifier leur gamme d'assurance à partir du
milieu des années 1990. 40 % des municipal bonds étaient assurés en 2002. Ainsi deux stratégies
étaient possibles pour les monoliners : conquérir les 60 % restants, sachant que les collectivités avec
une bonne gestion financière et une réputation conforme à celle-ci, n'avaient aucun besoin de
recourir aux services des réhausseurs de crédit ; ou alors continuer l'assurance obligataire mais sur
une gamme de produit différente, en l'occurrence les produits dérivés d'obligations, les CDO
(collaterized debt obligation) ou les RMBS (residential mortgage backed securities).
Ces produits créés par les banques n'étaient pas très différents des bons obligataires des
municipalités américaines, le principe était le même : les banques ont cherché à se séparer du risque
lié à l'émission de crédit, elles ont ainsi créé des produits dérivés avec des tranches de RMBS au
sein de CDO d'ABS (Asset Backed Securities). Or ces produits étaient autrement plus sophistiqués
et compliqués que les simples obligations municipales. Ceci pose un problème notamment dans la
gestion des risques et le calcul des primes, les fameux CDS (credit default swaps) qui sont vendues
aux investisseurs qui se portent acquéreur de ce type de titre.
Cependant les monoliners, ont dans la plupart des cas utilisé les mêmes modèles de gestion des
risques et de calcul des primes d'assurance que pour les municipal bonds. Autre problème, ces
modèles mathématiques sont basés sur des probabilités de défaut de l'émetteur d'obligations, qui
utilisent des données passées. Mais les réhausseurs de crédit n'avaient pas de recul sur la tranche
risquée (ou equity), et les tranches dites séniors, c'est à dire les moins risquées affichaient des
performances constantes liées à la qualité de l'émetteur, le plus souvent des États. D'autre part il
était difficile pour les analystes des monoliners d'élaborer un modèle de risque qui prenait en
compte tous les risques de chaque tranche d'un produit dérivé, d'autant plus que la tranche subprime
était souvent très minoritaire et ne représentait rarement plus de 5 % de l'ensemble du CDO. Dès
lors le risque lié à ces 5 % a été le plus souvent complétement négligé.
Les primes de risque ont ainsi été sous-évaluées par les réhausseurs de crédit alors même qu'ils ont
assurer des produits dérivés à grande échelle. Les monoliners ont pu pensé que leur signature seule
suffirait à maintenir un prix constant des CDO et que même si la tranche la plus risquée faisait
défaut elle ne mettrait pas en danger les fonds propres des réhausseurs, les primes de risque, c'est à
dire le montant des CDS a été lui-même sous évalué ne permettant de couvrir qu'une très faible
partie des dettes des émetteurs d'obligation. D'un autre côté les investisseurs, ont acheté les yeux
fermés les produits dérivés assurés par les monoliners, pensant que s'il y avait un risque de défaut,
celui-ci serait couvert par les réhausseurs. Ainsi l'illusion d'une disparition du risque s'est
généralisée et propagée entre les banques, les réhausseurs et les investisseurs, mais aussi les
réassureurs dans la mesure où les réhausseurs se réassurent eux-mêmes auprès de ces « super-
assureurs ».
Enfin les réhausseurs de crédit avant 1990 étaient peu exposés au risque dans la mesure où leur
action s'exerçait quasi-exclusivement sur les municipal bonds et sur les dérivés de première
génération. Si bien que ceux-ci ont progressivement réduit le montant de leur « claims paying
ressources » (fond de garantie de remboursement) entre les années 1970 et le début des années
1990, jouant ainsi sur un fort effet de levier entre les fonds propres et les garanties accordées. Cet
effet de levier ne présentait alors pas de risque important. Mais le problème est qu'avec le passage
au réhaussement de titres plus complexes à la fin des années 1990, les réhausseurs de crédit n'ont
pas revu le montant de leur « claims paying ressources » alors même que leur exposition au risque
augmentait d'où la potentialité d'une catastrophe financière pour les réhausseurs les plus exposés au
risque du subprime, tel AMBAC.
Si bien que l'action des réhausseurs a permis de diffuser l'opacité autour de ces produits dérivés,
brouillant un peu plus encore l'évaluation des risques par les investisseurs et le marché. De plus il
n'est pas certain que les réhausseurs de crédit, eux-mêmes, aient eu pleine conscience du risque
qu'ils prenaient en assurant ces produits. On peut comparer l'évolution de l'activité des réhausseurs
de crédit, à celle d'un épicier de quartier qui voudrait se lancer dans l'import-export à l'échelle
internationale. Finalement les réhausseurs sont passés du métier du réhaussement pure, c'est-à-dire
la valorisation d'actif peu risqués de la note B par exemple à la note triple AAA, au métier de garant
pour des clients à qui l'on ne demandait même pas un bulletin de paye.
B- Les Credit Default Swaps : une bombe à retardement à l'heure de la crise.
Il est important de nous focaliser sur les caractéristiques des produits assurés par les
monoliners et de montrer à quel point l'outil utilisé par les réhausseurs pour assurer ces produits
comportait en creux la source de leur faillite ou de leurs pertes financières pour certains.
En décembre 2007, les monoliners assuraient pour environ 2400 milliards de dollars de titres
dont 60 % étaient constitués de municipal bonds et les 40 % restants, de produits dérivés
synthétiques dits de deuxième génération.
Pour bien comprendre la complexité des produits assurés et approcher la question de la
responsabilité des réhausseurs dans la crise, il nous fait nous pencher sur la structure même des
produits dérivés.
En effet, les produits dérivés découlent de la titrisation, qui consiste à transformer par exemple une
créance, c'est-à-dire un actif illiquide, en un revenu liquide au passif des banques. Ainsi, la banque
reste l'interlocuteur de l'emprunteur, mais elle transforme sa créance en un titre qu'elle va vendre à
un investisseur, dans le but d'obtenir immédiatement une entrée d'argent, plutôt qu'au terme du prêt.
Elle fait un ainsi d'une pierre deux coups puisqu'elle garantie une entrée d'argent immédiate en se
prémunissant du risque de crédit, de plus elle respecte les ratios prudentiels de Bâle II et peut
produire à nouveau plus de crédit.
L'idée est que tout est titrisable, un prêt à des particuliers, à une entreprise, est ensuite transformable
en titre négociable sur les marchés financiers. Les produits dérivés de première génération était
relativement simple : une banque émettait des crédits hypothécaires pour des ménages, avec ces
crédits elles constituait des titres obligataires et les vendaient à des investisseurs. Ainsi la banque
touchait immédiatement le remboursement du prêt et les intérêts et s'engager à rembourser
l'investisseur sur le long terme avec un certain taux d'intérêts. Finalement l'opération consiste à
transformer du temps long en temps court pour la banque.
Mais les choses se sont compliquées lorsque les banques ont commencé à créer des produits
synthétiques, c'est -à-dire qu'elles ont introduit des parts de créances diverses, vers les entreprises,
les ménages, à risque ou pas, et y on introduit des parts de bons du Trésor traditionnellement peu
risquées... Et les choses se sont encore aggravées avec les subprimes.
Ainsi le problème est que pour un même produit dérivé, le risque interne entre la tranche equity et
la tranche la moins risquée (appelée super-senior), varie de 30 à 1.
Ainsi les CDS était censés refléter le niveau de risque du produit, par son prix mais il était
très difficile d'estimer le juste prix d'un tel actif dans la mesure où il est composite, et que le risque
de défaut n'est qu'une probabilité difficile à évaluer. De plus, le prix du CDS émis par les
réhausseurs ne doit pas être trop élevé, sinon les investisseurs ne sont pas tentés d'acquérir l'actif qui
y est adossé, estimant que le risque est trop élevé.
Les CDS étaient en effet très appropriés dans le cadre du réhaussement des émissions obligataires
des collectivités territoriales. Ils pouvaient être négociés sur un marché, qui devait refléter le juste
prix et le juste risque des produits dérivés adossés.
Mais cette idée était basée sur l'efficience des marchés. Celle-ci n'avait pas lieu d'être et était
faussée dès le départ par l'intervention même des réhausseurs, qui provoquait chez les agents un
sentiment de confiance exagérée dans ces actifs, dans la mesure où les monoliners bénéficiaient
d'une bonne image en terme de gestion des risques et qu'ils pouvaient toujours intervenir comme
contrepartie en cas de défaut... dans la limite de leurs fonds propres.
D'autre part si l'évaluation des réhausseurs intervenait sur l'ensemble des tranches d'un même
produit, lorsque le marché de l'immobilier s'est retourné, que les ménages américains ont commencé
à montrer des signes de difficulté de remboursement voire ont commencé à faire défaut, l'attention
des investisseurs s'est focalisée exclusivement sur cette tranche, ainsi les primes de risque
représentées par le prix de cotation des CDS s'est fortement apprécié, la valeur de ces actifs a
dégringolé alors même que la part de crédit subprime était largement minoritaire. Enfin, les
réhausseurs ont émis beaucoup plus de CDS et donc d'engagement de garantie que ce qu'ils étaient
effectivement capables de rembourser, ce qui les a mis en difficulté lorsqu'il s'est agit d'honorer
leurs engagements.
II- De la crise des monoliners au danger du risque systémique.
A- Faut-il sauver le soldat monoline ?
Les monoliners ont été les derniers touchés par la crise des subprimes. Cela s'explique par le
fait que lorsque qu'un débiteur fait défaut, le réhausseur ne doit pas rembourser l'investisseur
immédiatement de l'intégralité de la somme prêtée mais il se substitue simplement au débiteur, et
honore ainsi les échéances de ce dernier.
Ainsi prenons pour exemple un CDO d'une valeur de 1000 à échéance de 10 ans avec un taux
d'intérêt de 3,5 % et un remboursement annuel. Ainsi la banque doit rembourser 1035. Le CDO est
assuré par une prime de 100 par le réhausseur. Au bout de 5 ans la banque qui a émis le CDO fait
défaut, elle a ainsi remboursé 517, 5. Le réhausseur ne versera pas 517,5 d'un seul coup, mais
versera chaque année au créancier 103,5.
Ainsi les difficultés liées à la crise financière se sont reportées avec décalage sur les réhausseurs de
crédit. Les réhausseurs de crédit ont dû assumer les risques produit par les banques.
Comme dans le cas des banques, la question s'est posée de sauver ou non ces réhausseurs qui
avaient adopté des comportements déraisonnables, en menant une expertise lacunaire des produits
dérivés qu'on leur demandait d'assurer, et en ne se couvrant pas, par une augmentation de leur fonds
de garantie, du risque de défaut généralisé, qui est finalement survenu pendant la crise financière.
D'autre part ces intervenants, ne semblent pas essentiels au bon fonctionnement de l'économie dans
son ensemble, contrairement aux banques qui distribuent du crédit et donc alimentent en monnaie
l'économie mondiale.
C'est encore une fois la question de l'aléa moral qui s'est posée pour les banques centrales et les
États, essentiellement aux Etats-Unis, mais également en Europe.
En effet, si la majeure partie de l'activité des réhausseurs de crédit s'effectuait aux Etats-Unis, des
banques européennes ont monté leur propre agence de réhaussement de crédit. Ainsi les réhausseurs
cités précédemment que sont AMBAC, MBIA, FGIC sont exclusivement américains, mais CIFG
est une filiale de la Caisse d'Epargne et du groupe Banques Populaires et FSA une filiale de Dexia.
L'exposition aux CDO la plus forte revenait à AMBAC qui a d'ailleurs fait faillite et s'élevait à 29,2
milliards de dollars, celle MBIA à 17, 3 milliards de dollars, tandis que FGIC et FSA avaient une
exposition respective de 9,3 et 0,4 milliards de dollars. Certains ont donc, su gérer le risque, avec
une faible exposition aux CDO en se concentrant sur leur cœur de métier, et d'autres ont joué aux
pompiers pyromanes en jouant à fond la carte de l'effet levier.
Cependant, la faute n'est pas totalement imputable aux réhausseurs de crédit seuls dans la mesure où
leur activité est rendue possible quasi exclusivement grâce à leur fameuse note AAA donnée par les
agences de notation. Ces dernières, n'ont pas joué leur rôle en amont de la crise puisqu'elle se sont
basées sur l'idée que les réhausseurs de crédit ne prendraient pas le risque d'assurer des produits
risqués en trop grande quantité, car cela remettrait en cause leur activité et leur existence même.
Elles n'ont pas assez examiné les risques sous-jacents aux CDO eux-mêmes, et n'ont pas alerté les
réhausseurs de crédit assez tôt quant à une possible dégradation de leur note s'ils ne renforçaient pas
leurs fonds propres ou ne réduisaient pas leur exposition aux CDO.
D'autre part le dilemme pour les réhausseurs de crédit, dans l'engouement des marchés entre 2002 et
2007, était de profiter des profits générés par ces marchés et de tenter de se séparer de ce risque au
bon moment, ou alors de ne pas investir sur le réhaussement des CDO et prendre ainsi le risque de
perdre du terrain face aux concurrents. La plupart ont suivi l'option numéro un, or il est très difficile
de sortir d'un marché au bon moment, on en sort soit trop tôt, soit trop tard, d'autant plus que les
échéances des CDO assurés par les réhausseurs étaient sur le temps long. Ainsi ils ne pouvaient que
sortir trop tard, et n'en sont d'ailleurs toujours pas sortis.
Enfin, prendre le risque de mettre en faillite les réhausseurs de crédit, c'est prendre le risque
d'aggraver la crise systémique. En effet, les réhausseurs étaient la clé de voûte d'un système à
fabriquer du papier. Les dommages collatéraux auraient pu être très importants en cas de faillite
généralisée des réhausseurs. Premièrement, les municipalités s'endettent souvent à taux variable, or
une faillite des réhausseurs ou une dégradation de leur note par les agences de notation, aurait
impliqué une dégradation de la note du titre de créance municipal et une hausse des taux des intérêts
pour les collectivités. Bien que la plupart des réhausseurs aient survécu, il a quand même été
constaté une hausse des taux d'intérêts sur le marché obligataire municipal. Mais les réhausseurs
dans leur activité orientée vers les municipalités restent pertinents et utiles. Deuxièmement, on l'a
vu précédemment, les actionnaires des réhausseurs étaient des banques et des sociétés d'assurances.
La mise en faillite des réhausseurs aurait eu une répercussion importante sur leur bilan, déjà mal en
point après la dévalorisation massive des produits dérivés. La plupart ont ainsi choisit de
recapitaliser les réhausseurs de crédit, sauf lorsque cela n'était pas possible aux vues des montants
de garantie accordés comme pour AMBAC, ou dans le cas ou l'actionnaire lui-même était en grande
difficulté, comme dans le cas de FSA qui était une filiale de Dexia, vendu en hâte à la BNP-Paribas.
Enfin les réhausseurs de crédit sont eux-mêmes assurés chez des réassureurs, si la faillite des
réhausseurs avait été totale et générale alors le coût pour les réassureurs auraient pu être
dramatique. Etant donné que les assureurs multi-risques ont également été touchés par la crise des
subprimes, c'est une chute en cascade qu'aurait pu entraîner la faillite des réhausseurs, jusqu'à
atteindre les réassureurs et dans ce cas c'est tout le marché de l'assurance qui risquait de disparaître.
B- Comment réguler et réglementer l'activité des monoliners ?
Si l'on ne peut se séparer des monoliners dans le système financier international, dès lors il
paraît nécessaire de réguler leur activité.
Le gouverneur de la Banque Fédérale de New York a largement dénoncé en 2008 les dérives des
réhausseurs de crédit en plaidant pour une séparation stricte entre leur activité tournée vers les
municipalités et celle tournée vers l'assurance des dérivés. Il envisageait même un « plan de
sauvetage » basé sur la scission des réhausseurs en deux compagnies correspondant à cette
séparation. Cependant créer deux structures distinctes gérées par une Holding ne tient pas debout,
puisque celle qui gère les produits municipaux aurait conservée sa note triple A sans problème,
tandis que l'autre n'aurait jamais pu obtenir une note lui permettant d'exercer son activité, sans être
au préalable recapitalisée.
Les deux activités sont finalement assez peu dissociables, dans la mesure où la garantie apportée à
des produits dérivés risqués était basée sur l'assurance d'obligation peu risquée, qui en fait constitue
l'essentiel de l'attribution de la note triple A par les agences de notation, en dehors du fait de
disposer de fonds propres particulièrement importants.
Finalement la recapitalisation est la solution qui a été choisit dans la plupart des cas, pour les
monoliners les moins touchés, et dont les actionnaires étaient prêts à remettre la main à la poche.
Les autres ont été mis en faillite, face au montant colossal de leurs engagements auxquels ils ne
pouvaient faire face.
Cependant à terme lorsque ces CDO arriveront à échéance et que les réhausseurs auront réussit peu
à peu à se débarasser des CDS sur les produits pourris. Il serait envisageable d'interdire
formellement à ces organismes d'assurer d'autres titres que les municipal bonds. Cela aurait deux
effets bénéfiques, d'une part le financement des collectivités ne serait pas compromis à long terme
par les stratégies des réhausseurs, d'autre part les investisseurs y regarderont à deux fois avant
d'acheter des produits dérivés, ne se reposant plus sur la garantie exclusive du réhausseur et des
agences de notation.
Autre solution envisageable : l'augmentation de la solvabilité des réhausseurs de crédit. C'est-à-dire
l'augmentation de leurs fonds garantis leur permettant de faire face à leurs engagements. C'est ce
que vise le programme Solvency II, dans la lignée de Bâle III. L'objectif est de mieux ajuster les
fonds propres des compagnies d'assurance, dont les réhausseurs font partie, en fonction des risques
encourus par celles-ci. En effet, les normes comptables IFRS et US GAAP, ont pour effet d'obliger
les compagnies a enregistré la valorisation ou la dévalorisation de leur actif quasiment en temps
réel, c'est le fameux. Ainsi elles ne peuvent plus jouer sur un effet temps et un espoir de
révalorisation de la valeur de leurs actifs à moyen terme dans le cas notamment d'une dévalorisation
massive et subite. Ce système de comptabilité peut mener les compagnies d'assurances beaucoup
plus rapidement à la faillite qu'auparavant, sans chance d'améliorer le bilan comptable dans la
durée. C'est le fameux « mark to market », censé refléter au jour le jour la santé financière d'une
entreprise en fonction du marché, mais qui peut avoir des effets dévastateurs lorsque le marché
s'emballe et plonge comme ce fut le cas pour les banques, les compagnies d'assurance, les
réhausseurs de crédit, pendant la crise des subprimes.
Augmenter les fonds propres est en effet pertinent dans le cas des réhausseurs, plus que dans celui
des banques, puisque que ces dernières ont la capacité de titriser des produits financiers pour sortir
certains actifs de leur bilan. Or les monoliners n'ont pas le droit de procéder ainsi. Le seul titre émis
par les réhausseurs est le CDS, qui est certes négociable, mais représente un contrat d'assurance plus
qu'un transfert de risque et dont la valeur peut être bénéfique puisqu'elle reflète le niveau de risque
de la créance assurée par le CDS.
Conclusion
Le rôle des monoliners dans la crise des subprimes est difficile a cerné. En effet, les
monoliners ont été imprudents en changeant de métier assez brutalement, passant d'une activité très
peu risquée de l'assurance contre le défaut de paiement des collectivités locales américaines, à celle
autrement plus risquée de l'assurance des produits dérivés en partie basés sur les crédits
hypothécaires dits subprimes. De plus, les monoliners ont utilisé la plupart du temps les mêmes
outils de calcul de la probabilité des événements de crédit pour les deux activités, ce qui les a amené
à sous-estimer et sous-évaluer le montant des primes de CDS. En voulant jouer sur un effet levier
maximum et assurer toujours plus de titres sans augmenter leurs fonds propres. Plusieurs
monoliners ont fait faillite à l'heure de l'effondrement du cours des dérivés et donc du
remboursement des investisseurs qui avaient acheté des CDS pour se couvrir.
Cependant les monoliners restent des acteurs secondaires dans cette crise, puisqu'ils se trouvent en
aval des banques qui ont produit ces titres dérivés, mais en amont des agences de notations qui
auraient dû tirer plus tôt la sonnette d'alarme sur les engagements des monoliners et les risques que
ceux-ci encouraient, et qui n'auraient pas dû donner systématiquement la note triple AAA aux
différentes gammes de CDO, simplement parce qu'ils étaient assurés par des monoliners. En effet si
les monoliners font faillite, il n' y a plus d'assurance. Or le risque était élevé que ceux-ci se
retrouvent dans une telle situation.
Enfin face à la complexité des produits dérivés, les monoliners comme d'autres acteurs de la finance
international ont fait face à leurs limites de compréhension et d'estimation du risque, et dans un
marché porteur qui affichait avant 2007 des performances plus que satisfaisantes, on comprend
qu'ils aient voulu saisir une part du gâteau qui allait cependant leur exploser à la figure le jour d'un
anniversaire raté. Dès c'est le comportement mimétique, et grégaire, si bien montré par Keynes qu'il
faut dénoncer et combattre.
Ainsi les réhausseurs ont été beaucoup montré du doigt pendant la crise des subprimes mais leur
responsabilité n'est pas particulièrement plus importante que celle des banques ou des agences de
notation. Tout le monde a joué à fond la procyclicité sans se préoccuper des conséquences pour le
future.
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Le rôle des réhausseurs de crédit (Monoliners) dans la crise des subprimes

  • 1. Baptiste Mondéhard GEA 4A Le rôle des réhausseurs de crédit dans la crise des subprimes La crise des subprimes qui a secoué la planète finance en 2008, puis l'économie réelle, a révélé la défaillance de nombreux acteurs. Les banques ont été largement montrées du doigt, puisque ce sont elles qui ont massivement émis des crédits dits subprimes via leurs organismes de crédit ou SPV (special purpose vehicule). Les banques centrales ont lancé une course effrénée à l'émission de crédit après le 11 septembre 2001 craignant une possible récession économique. Les cadres légaux dont les ratios prudentiels, ont eu pour effet d'accroître le recours aux produits dérivés complexes. Enfin les réhausseurs de crédit ont été pris dans la chute des dominos de la finance internationale. Ces acteurs restent peu connus, et leur activité obscure, d'autant plus qu'ils n'ont été que les derniers touchés vers la vague de la crise et donc que l'intérêt médiatique qui leur a été porté fut plus faible que pour les autres acteurs. Il faut d'abord rappeler ce qu'est un crédit subprime. Alors même qu'entre 2002 et 2005 la FED a mené une politique laxiste concernant l'émission de crédit, avec pour le principal taux d'intérêts, une oscillation entre 1 et 2%, les banques ont largement pu profiter des ces facilitées pour écouler des crédits aux ménages américains. Cependant, les classes moyennes supérieures et classes supérieures n'étaient pas visées par ce crédit puisqu'elle n'avait pas un besoin réel d'accès au crédit. Les banques ont trouvé le moyen d'émettre plus de crédit en visant les ménages pauvres, en leur proposant des crédits avantageux les premières années, avec des taux d'intérêt très bas, voire sans remboursement les deux premières années, mais qui s'envolent ensuite et progressivement. Ou encore des crédits à taux variables qui ont eu les conséquences que l'on connaît avec la décision de la banque centrale américaine de remonter brutalement les taux de 2,25 % à 5,25 % entre janvier 2005 et juillet 2006. Ces crédits étaient garantis par hypothèque sur les biens immobiliers achetés avec ces crédits. Le système a bien fonctionné tant que le marché de l'immobilier s'enflammait sous l'effet notamment des ces crédits subprime. Cependant, cette bulle a fini par éclater quand la Federal Reserve a décidé de fermer peu à peu le robinet du crédit. Les ménages ont commencé à montrer des difficultés à rembourser, et les prix de l'immobilier se sont peu à peu effondrés.
  • 2. Mais que viennent faire les réhausseurs de crédit dans cette histoire ? Elles interviennent sur le deuxième visage de la crise. En effet, les banques auraient pu encaisser les pertes liés au défaut des emprunteurs, faire faillite, ou être renflouées par l'Etat, mais elles ont cherché à se départir du risque que portait les titres de créance subprime, en les sortant de leur bilan comptable. Et ce, tout en continuant à émettre du crédit puisque c'était une activité très rentable à l'époque. Ainsi, elles ont massivement eu recours à la titrisation de ces créances. Mais ne pouvant les vendre comme telles, car personne n'aurait voulu les acheter, elles ont savamment introduit des parts de produit subprime au milieu de produit obligataires composites, basés sur des titres sûrs tels que des titres de dettes d' Etat. Et pour vendre encore plus facilement ces titres, les banques ont fait appel aux réhausseurs ou monoliners. Ces institutions sont des assureurs, qui exercent l'activité bien spécifique, d'assurer des titres obligataires. A l'origine, les réhausseurs sont apparus pour répondre aux besoins des municipalités américaines de se financer à moindre coût directement sur les marchés financiers. Les réhausseurs de crédits intervenaient et interviennent toujours comme garant du remboursement des municipal bond émis par les municipalité, en cas de défaut de celles-ci. Ce qui permet au titre émis par la municipalité d'obtenir la note maximale AAA par les agences de notation. Et comme le taux d'intérêts est fonction de cette note, plus la note est élevée plus le taux d'intérêts est bas. Cependant les réhausseurs de crédits se sont mis à effectuer le même type d'activité pour les banques. Et ont ainsi participé à la diffusion des titres subprimes via les produits dérivés qu'ils assuraient. Cependant la part de subprime était minime au sein de ces produits appelés asset backed securities. Ainsi les réhausseurs n'ont-ils pas imaginé que cette tranche négligeable des titres puisse avoir des conséquences si catastrophique, ou alors l'ont-ils imaginé, mais ils ont quand même pris le risque tant l'activité était rentable. Dès lors les réhausseurs sont-elles les victimes averties de la crise des subprimes ? Nous tenterons tout d'abord d'étudier en quoi l'activité des monoliners a participé à l'opaciter autour du risque des produits subprimes, puis en quoi la crise des subprimes a mis en danger les monoliners au point de faire craindre au déclenchement d'une crise systémique plus globale. I- Les monoliners principaux vecteurs de l'opacité des produits dérivés subprimes A- De l'assurance des municipal bonds à la garantie des CBO d'ABS Comme nous l'avons vu en introduction, les réhausseurs de crédit ont à l'origine été créés dans le but de faciliter le financement des collectivités locales américaines à moindre coût. Ainsi AMBAC est le premier à investir ce marché en 1971, suivi par MBIA en en 1974, FGIC en 1983 et FSA en en 1985. Le taux de défaut des municipalités étaient inférieur à 1 %, ainsi l'activité des monoliners était
  • 3. certes rentable et peu risquée, mais ils ont cherché à diversifier leur gamme d'assurance à partir du milieu des années 1990. 40 % des municipal bonds étaient assurés en 2002. Ainsi deux stratégies étaient possibles pour les monoliners : conquérir les 60 % restants, sachant que les collectivités avec une bonne gestion financière et une réputation conforme à celle-ci, n'avaient aucun besoin de recourir aux services des réhausseurs de crédit ; ou alors continuer l'assurance obligataire mais sur une gamme de produit différente, en l'occurrence les produits dérivés d'obligations, les CDO (collaterized debt obligation) ou les RMBS (residential mortgage backed securities). Ces produits créés par les banques n'étaient pas très différents des bons obligataires des municipalités américaines, le principe était le même : les banques ont cherché à se séparer du risque lié à l'émission de crédit, elles ont ainsi créé des produits dérivés avec des tranches de RMBS au sein de CDO d'ABS (Asset Backed Securities). Or ces produits étaient autrement plus sophistiqués et compliqués que les simples obligations municipales. Ceci pose un problème notamment dans la gestion des risques et le calcul des primes, les fameux CDS (credit default swaps) qui sont vendues aux investisseurs qui se portent acquéreur de ce type de titre. Cependant les monoliners, ont dans la plupart des cas utilisé les mêmes modèles de gestion des risques et de calcul des primes d'assurance que pour les municipal bonds. Autre problème, ces modèles mathématiques sont basés sur des probabilités de défaut de l'émetteur d'obligations, qui utilisent des données passées. Mais les réhausseurs de crédit n'avaient pas de recul sur la tranche risquée (ou equity), et les tranches dites séniors, c'est à dire les moins risquées affichaient des performances constantes liées à la qualité de l'émetteur, le plus souvent des États. D'autre part il était difficile pour les analystes des monoliners d'élaborer un modèle de risque qui prenait en compte tous les risques de chaque tranche d'un produit dérivé, d'autant plus que la tranche subprime était souvent très minoritaire et ne représentait rarement plus de 5 % de l'ensemble du CDO. Dès lors le risque lié à ces 5 % a été le plus souvent complétement négligé. Les primes de risque ont ainsi été sous-évaluées par les réhausseurs de crédit alors même qu'ils ont assurer des produits dérivés à grande échelle. Les monoliners ont pu pensé que leur signature seule suffirait à maintenir un prix constant des CDO et que même si la tranche la plus risquée faisait défaut elle ne mettrait pas en danger les fonds propres des réhausseurs, les primes de risque, c'est à dire le montant des CDS a été lui-même sous évalué ne permettant de couvrir qu'une très faible partie des dettes des émetteurs d'obligation. D'un autre côté les investisseurs, ont acheté les yeux fermés les produits dérivés assurés par les monoliners, pensant que s'il y avait un risque de défaut, celui-ci serait couvert par les réhausseurs. Ainsi l'illusion d'une disparition du risque s'est généralisée et propagée entre les banques, les réhausseurs et les investisseurs, mais aussi les réassureurs dans la mesure où les réhausseurs se réassurent eux-mêmes auprès de ces « super- assureurs ». Enfin les réhausseurs de crédit avant 1990 étaient peu exposés au risque dans la mesure où leur action s'exerçait quasi-exclusivement sur les municipal bonds et sur les dérivés de première
  • 4. génération. Si bien que ceux-ci ont progressivement réduit le montant de leur « claims paying ressources » (fond de garantie de remboursement) entre les années 1970 et le début des années 1990, jouant ainsi sur un fort effet de levier entre les fonds propres et les garanties accordées. Cet effet de levier ne présentait alors pas de risque important. Mais le problème est qu'avec le passage au réhaussement de titres plus complexes à la fin des années 1990, les réhausseurs de crédit n'ont pas revu le montant de leur « claims paying ressources » alors même que leur exposition au risque augmentait d'où la potentialité d'une catastrophe financière pour les réhausseurs les plus exposés au risque du subprime, tel AMBAC. Si bien que l'action des réhausseurs a permis de diffuser l'opacité autour de ces produits dérivés, brouillant un peu plus encore l'évaluation des risques par les investisseurs et le marché. De plus il n'est pas certain que les réhausseurs de crédit, eux-mêmes, aient eu pleine conscience du risque qu'ils prenaient en assurant ces produits. On peut comparer l'évolution de l'activité des réhausseurs de crédit, à celle d'un épicier de quartier qui voudrait se lancer dans l'import-export à l'échelle internationale. Finalement les réhausseurs sont passés du métier du réhaussement pure, c'est-à-dire la valorisation d'actif peu risqués de la note B par exemple à la note triple AAA, au métier de garant pour des clients à qui l'on ne demandait même pas un bulletin de paye. B- Les Credit Default Swaps : une bombe à retardement à l'heure de la crise. Il est important de nous focaliser sur les caractéristiques des produits assurés par les monoliners et de montrer à quel point l'outil utilisé par les réhausseurs pour assurer ces produits comportait en creux la source de leur faillite ou de leurs pertes financières pour certains. En décembre 2007, les monoliners assuraient pour environ 2400 milliards de dollars de titres dont 60 % étaient constitués de municipal bonds et les 40 % restants, de produits dérivés synthétiques dits de deuxième génération. Pour bien comprendre la complexité des produits assurés et approcher la question de la responsabilité des réhausseurs dans la crise, il nous fait nous pencher sur la structure même des produits dérivés. En effet, les produits dérivés découlent de la titrisation, qui consiste à transformer par exemple une créance, c'est-à-dire un actif illiquide, en un revenu liquide au passif des banques. Ainsi, la banque reste l'interlocuteur de l'emprunteur, mais elle transforme sa créance en un titre qu'elle va vendre à un investisseur, dans le but d'obtenir immédiatement une entrée d'argent, plutôt qu'au terme du prêt. Elle fait un ainsi d'une pierre deux coups puisqu'elle garantie une entrée d'argent immédiate en se prémunissant du risque de crédit, de plus elle respecte les ratios prudentiels de Bâle II et peut produire à nouveau plus de crédit. L'idée est que tout est titrisable, un prêt à des particuliers, à une entreprise, est ensuite transformable en titre négociable sur les marchés financiers. Les produits dérivés de première génération était
  • 5. relativement simple : une banque émettait des crédits hypothécaires pour des ménages, avec ces crédits elles constituait des titres obligataires et les vendaient à des investisseurs. Ainsi la banque touchait immédiatement le remboursement du prêt et les intérêts et s'engager à rembourser l'investisseur sur le long terme avec un certain taux d'intérêts. Finalement l'opération consiste à transformer du temps long en temps court pour la banque. Mais les choses se sont compliquées lorsque les banques ont commencé à créer des produits synthétiques, c'est -à-dire qu'elles ont introduit des parts de créances diverses, vers les entreprises, les ménages, à risque ou pas, et y on introduit des parts de bons du Trésor traditionnellement peu risquées... Et les choses se sont encore aggravées avec les subprimes. Ainsi le problème est que pour un même produit dérivé, le risque interne entre la tranche equity et la tranche la moins risquée (appelée super-senior), varie de 30 à 1. Ainsi les CDS était censés refléter le niveau de risque du produit, par son prix mais il était très difficile d'estimer le juste prix d'un tel actif dans la mesure où il est composite, et que le risque de défaut n'est qu'une probabilité difficile à évaluer. De plus, le prix du CDS émis par les réhausseurs ne doit pas être trop élevé, sinon les investisseurs ne sont pas tentés d'acquérir l'actif qui y est adossé, estimant que le risque est trop élevé. Les CDS étaient en effet très appropriés dans le cadre du réhaussement des émissions obligataires des collectivités territoriales. Ils pouvaient être négociés sur un marché, qui devait refléter le juste prix et le juste risque des produits dérivés adossés. Mais cette idée était basée sur l'efficience des marchés. Celle-ci n'avait pas lieu d'être et était faussée dès le départ par l'intervention même des réhausseurs, qui provoquait chez les agents un sentiment de confiance exagérée dans ces actifs, dans la mesure où les monoliners bénéficiaient d'une bonne image en terme de gestion des risques et qu'ils pouvaient toujours intervenir comme contrepartie en cas de défaut... dans la limite de leurs fonds propres. D'autre part si l'évaluation des réhausseurs intervenait sur l'ensemble des tranches d'un même produit, lorsque le marché de l'immobilier s'est retourné, que les ménages américains ont commencé à montrer des signes de difficulté de remboursement voire ont commencé à faire défaut, l'attention des investisseurs s'est focalisée exclusivement sur cette tranche, ainsi les primes de risque représentées par le prix de cotation des CDS s'est fortement apprécié, la valeur de ces actifs a dégringolé alors même que la part de crédit subprime était largement minoritaire. Enfin, les réhausseurs ont émis beaucoup plus de CDS et donc d'engagement de garantie que ce qu'ils étaient effectivement capables de rembourser, ce qui les a mis en difficulté lorsqu'il s'est agit d'honorer leurs engagements. II- De la crise des monoliners au danger du risque systémique. A- Faut-il sauver le soldat monoline ?
  • 6. Les monoliners ont été les derniers touchés par la crise des subprimes. Cela s'explique par le fait que lorsque qu'un débiteur fait défaut, le réhausseur ne doit pas rembourser l'investisseur immédiatement de l'intégralité de la somme prêtée mais il se substitue simplement au débiteur, et honore ainsi les échéances de ce dernier. Ainsi prenons pour exemple un CDO d'une valeur de 1000 à échéance de 10 ans avec un taux d'intérêt de 3,5 % et un remboursement annuel. Ainsi la banque doit rembourser 1035. Le CDO est assuré par une prime de 100 par le réhausseur. Au bout de 5 ans la banque qui a émis le CDO fait défaut, elle a ainsi remboursé 517, 5. Le réhausseur ne versera pas 517,5 d'un seul coup, mais versera chaque année au créancier 103,5. Ainsi les difficultés liées à la crise financière se sont reportées avec décalage sur les réhausseurs de crédit. Les réhausseurs de crédit ont dû assumer les risques produit par les banques. Comme dans le cas des banques, la question s'est posée de sauver ou non ces réhausseurs qui avaient adopté des comportements déraisonnables, en menant une expertise lacunaire des produits dérivés qu'on leur demandait d'assurer, et en ne se couvrant pas, par une augmentation de leur fonds de garantie, du risque de défaut généralisé, qui est finalement survenu pendant la crise financière. D'autre part ces intervenants, ne semblent pas essentiels au bon fonctionnement de l'économie dans son ensemble, contrairement aux banques qui distribuent du crédit et donc alimentent en monnaie l'économie mondiale. C'est encore une fois la question de l'aléa moral qui s'est posée pour les banques centrales et les États, essentiellement aux Etats-Unis, mais également en Europe. En effet, si la majeure partie de l'activité des réhausseurs de crédit s'effectuait aux Etats-Unis, des banques européennes ont monté leur propre agence de réhaussement de crédit. Ainsi les réhausseurs cités précédemment que sont AMBAC, MBIA, FGIC sont exclusivement américains, mais CIFG est une filiale de la Caisse d'Epargne et du groupe Banques Populaires et FSA une filiale de Dexia. L'exposition aux CDO la plus forte revenait à AMBAC qui a d'ailleurs fait faillite et s'élevait à 29,2 milliards de dollars, celle MBIA à 17, 3 milliards de dollars, tandis que FGIC et FSA avaient une exposition respective de 9,3 et 0,4 milliards de dollars. Certains ont donc, su gérer le risque, avec une faible exposition aux CDO en se concentrant sur leur cœur de métier, et d'autres ont joué aux pompiers pyromanes en jouant à fond la carte de l'effet levier. Cependant, la faute n'est pas totalement imputable aux réhausseurs de crédit seuls dans la mesure où leur activité est rendue possible quasi exclusivement grâce à leur fameuse note AAA donnée par les agences de notation. Ces dernières, n'ont pas joué leur rôle en amont de la crise puisqu'elle se sont basées sur l'idée que les réhausseurs de crédit ne prendraient pas le risque d'assurer des produits risqués en trop grande quantité, car cela remettrait en cause leur activité et leur existence même. Elles n'ont pas assez examiné les risques sous-jacents aux CDO eux-mêmes, et n'ont pas alerté les réhausseurs de crédit assez tôt quant à une possible dégradation de leur note s'ils ne renforçaient pas leurs fonds propres ou ne réduisaient pas leur exposition aux CDO.
  • 7. D'autre part le dilemme pour les réhausseurs de crédit, dans l'engouement des marchés entre 2002 et 2007, était de profiter des profits générés par ces marchés et de tenter de se séparer de ce risque au bon moment, ou alors de ne pas investir sur le réhaussement des CDO et prendre ainsi le risque de perdre du terrain face aux concurrents. La plupart ont suivi l'option numéro un, or il est très difficile de sortir d'un marché au bon moment, on en sort soit trop tôt, soit trop tard, d'autant plus que les échéances des CDO assurés par les réhausseurs étaient sur le temps long. Ainsi ils ne pouvaient que sortir trop tard, et n'en sont d'ailleurs toujours pas sortis. Enfin, prendre le risque de mettre en faillite les réhausseurs de crédit, c'est prendre le risque d'aggraver la crise systémique. En effet, les réhausseurs étaient la clé de voûte d'un système à fabriquer du papier. Les dommages collatéraux auraient pu être très importants en cas de faillite généralisée des réhausseurs. Premièrement, les municipalités s'endettent souvent à taux variable, or une faillite des réhausseurs ou une dégradation de leur note par les agences de notation, aurait impliqué une dégradation de la note du titre de créance municipal et une hausse des taux des intérêts pour les collectivités. Bien que la plupart des réhausseurs aient survécu, il a quand même été constaté une hausse des taux d'intérêts sur le marché obligataire municipal. Mais les réhausseurs dans leur activité orientée vers les municipalités restent pertinents et utiles. Deuxièmement, on l'a vu précédemment, les actionnaires des réhausseurs étaient des banques et des sociétés d'assurances. La mise en faillite des réhausseurs aurait eu une répercussion importante sur leur bilan, déjà mal en point après la dévalorisation massive des produits dérivés. La plupart ont ainsi choisit de recapitaliser les réhausseurs de crédit, sauf lorsque cela n'était pas possible aux vues des montants de garantie accordés comme pour AMBAC, ou dans le cas ou l'actionnaire lui-même était en grande difficulté, comme dans le cas de FSA qui était une filiale de Dexia, vendu en hâte à la BNP-Paribas. Enfin les réhausseurs de crédit sont eux-mêmes assurés chez des réassureurs, si la faillite des réhausseurs avait été totale et générale alors le coût pour les réassureurs auraient pu être dramatique. Etant donné que les assureurs multi-risques ont également été touchés par la crise des subprimes, c'est une chute en cascade qu'aurait pu entraîner la faillite des réhausseurs, jusqu'à atteindre les réassureurs et dans ce cas c'est tout le marché de l'assurance qui risquait de disparaître. B- Comment réguler et réglementer l'activité des monoliners ? Si l'on ne peut se séparer des monoliners dans le système financier international, dès lors il paraît nécessaire de réguler leur activité. Le gouverneur de la Banque Fédérale de New York a largement dénoncé en 2008 les dérives des réhausseurs de crédit en plaidant pour une séparation stricte entre leur activité tournée vers les municipalités et celle tournée vers l'assurance des dérivés. Il envisageait même un « plan de sauvetage » basé sur la scission des réhausseurs en deux compagnies correspondant à cette
  • 8. séparation. Cependant créer deux structures distinctes gérées par une Holding ne tient pas debout, puisque celle qui gère les produits municipaux aurait conservée sa note triple A sans problème, tandis que l'autre n'aurait jamais pu obtenir une note lui permettant d'exercer son activité, sans être au préalable recapitalisée. Les deux activités sont finalement assez peu dissociables, dans la mesure où la garantie apportée à des produits dérivés risqués était basée sur l'assurance d'obligation peu risquée, qui en fait constitue l'essentiel de l'attribution de la note triple A par les agences de notation, en dehors du fait de disposer de fonds propres particulièrement importants. Finalement la recapitalisation est la solution qui a été choisit dans la plupart des cas, pour les monoliners les moins touchés, et dont les actionnaires étaient prêts à remettre la main à la poche. Les autres ont été mis en faillite, face au montant colossal de leurs engagements auxquels ils ne pouvaient faire face. Cependant à terme lorsque ces CDO arriveront à échéance et que les réhausseurs auront réussit peu à peu à se débarasser des CDS sur les produits pourris. Il serait envisageable d'interdire formellement à ces organismes d'assurer d'autres titres que les municipal bonds. Cela aurait deux effets bénéfiques, d'une part le financement des collectivités ne serait pas compromis à long terme par les stratégies des réhausseurs, d'autre part les investisseurs y regarderont à deux fois avant d'acheter des produits dérivés, ne se reposant plus sur la garantie exclusive du réhausseur et des agences de notation. Autre solution envisageable : l'augmentation de la solvabilité des réhausseurs de crédit. C'est-à-dire l'augmentation de leurs fonds garantis leur permettant de faire face à leurs engagements. C'est ce que vise le programme Solvency II, dans la lignée de Bâle III. L'objectif est de mieux ajuster les fonds propres des compagnies d'assurance, dont les réhausseurs font partie, en fonction des risques encourus par celles-ci. En effet, les normes comptables IFRS et US GAAP, ont pour effet d'obliger les compagnies a enregistré la valorisation ou la dévalorisation de leur actif quasiment en temps réel, c'est le fameux. Ainsi elles ne peuvent plus jouer sur un effet temps et un espoir de révalorisation de la valeur de leurs actifs à moyen terme dans le cas notamment d'une dévalorisation massive et subite. Ce système de comptabilité peut mener les compagnies d'assurances beaucoup plus rapidement à la faillite qu'auparavant, sans chance d'améliorer le bilan comptable dans la durée. C'est le fameux « mark to market », censé refléter au jour le jour la santé financière d'une entreprise en fonction du marché, mais qui peut avoir des effets dévastateurs lorsque le marché s'emballe et plonge comme ce fut le cas pour les banques, les compagnies d'assurance, les réhausseurs de crédit, pendant la crise des subprimes. Augmenter les fonds propres est en effet pertinent dans le cas des réhausseurs, plus que dans celui des banques, puisque que ces dernières ont la capacité de titriser des produits financiers pour sortir certains actifs de leur bilan. Or les monoliners n'ont pas le droit de procéder ainsi. Le seul titre émis par les réhausseurs est le CDS, qui est certes négociable, mais représente un contrat d'assurance plus
  • 9. qu'un transfert de risque et dont la valeur peut être bénéfique puisqu'elle reflète le niveau de risque de la créance assurée par le CDS. Conclusion Le rôle des monoliners dans la crise des subprimes est difficile a cerné. En effet, les monoliners ont été imprudents en changeant de métier assez brutalement, passant d'une activité très peu risquée de l'assurance contre le défaut de paiement des collectivités locales américaines, à celle autrement plus risquée de l'assurance des produits dérivés en partie basés sur les crédits hypothécaires dits subprimes. De plus, les monoliners ont utilisé la plupart du temps les mêmes outils de calcul de la probabilité des événements de crédit pour les deux activités, ce qui les a amené à sous-estimer et sous-évaluer le montant des primes de CDS. En voulant jouer sur un effet levier maximum et assurer toujours plus de titres sans augmenter leurs fonds propres. Plusieurs monoliners ont fait faillite à l'heure de l'effondrement du cours des dérivés et donc du remboursement des investisseurs qui avaient acheté des CDS pour se couvrir. Cependant les monoliners restent des acteurs secondaires dans cette crise, puisqu'ils se trouvent en aval des banques qui ont produit ces titres dérivés, mais en amont des agences de notations qui auraient dû tirer plus tôt la sonnette d'alarme sur les engagements des monoliners et les risques que ceux-ci encouraient, et qui n'auraient pas dû donner systématiquement la note triple AAA aux différentes gammes de CDO, simplement parce qu'ils étaient assurés par des monoliners. En effet si les monoliners font faillite, il n' y a plus d'assurance. Or le risque était élevé que ceux-ci se retrouvent dans une telle situation. Enfin face à la complexité des produits dérivés, les monoliners comme d'autres acteurs de la finance international ont fait face à leurs limites de compréhension et d'estimation du risque, et dans un marché porteur qui affichait avant 2007 des performances plus que satisfaisantes, on comprend qu'ils aient voulu saisir une part du gâteau qui allait cependant leur exploser à la figure le jour d'un anniversaire raté. Dès c'est le comportement mimétique, et grégaire, si bien montré par Keynes qu'il faut dénoncer et combattre. Ainsi les réhausseurs ont été beaucoup montré du doigt pendant la crise des subprimes mais leur responsabilité n'est pas particulièrement plus importante que celle des banques ou des agences de notation. Tout le monde a joué à fond la procyclicité sans se préoccuper des conséquences pour le future.
  • 10. Bibliographie : − V. Brunel, Gestion des risques et risque de crédit, Université d' Evry, janvier 2009 − M. K. Brunnermeier, Deciphering the 2007-08 Liquidity and Credit Crunch, Journal of economic perspectives, mai 2008 − O. Cousseran, I. Rahmouni, Le marché des CDO, modalités de fonctionnement et implications en terme de stabilité financière, Revue de la stabilité financière, Banque de France, N°6, juin 2005 − S. Donnely, The financial crisis of 2008: paradigm shifts on risk management and changes in financial services regulation, University of Twente, juin 2010 − B. Eichengreen, Origins and Responses to the Crisis, University of California, Berkeley, octobre 2008 − M. A. Ekhaus, Collateralized Debt Obligations : Reducing loss or market risk via mortgage assistance, Society of Actuaries, 2010 − R. J Herring, The Darker Side of Securitization : How Subprime Lending Led to a Systemic Crisis, University of Pennsylvania, avril 2008 − L. Katzovitz, M. Sumerlin, Collateralized Debt Obligations, Who's to blame when the
  • 11. market blows up ?, Magazine of international economic policy, été 2007 − D. Lautier, Y. Simon, Les rehausseurs de crédit : anatomie d’une crise, Université Paris- Dauphine, mai 2008 − E. Lombard, M. Mucherie, La crise financière, les assureurs et l'économie de l'information, Risques, n°73-74, juin 2008 − C. Lubochinsky, Transfert du risque de crédit : de l'ingéniosité bancaire à l'instabilité financière, Risques, n° 73-74, Juin 2008 − C. Noyer, Some thoughts on the crisis, Address to the Congress of the National Federation of the Crédit Agricole, Nice, 21 October 2008 − S. M Sherlund, The Past, the Present and Future of Subprime Mortgages, Finance and Economics Discussion Series, Federal Reserve Board, Washington, D.C., Novembre 2008 − D. K. Tarullo, Comments on “Regulating the Shadow Banking System”, Brookings Panel on Economic Activity Washington, D.C., 17 septembre 2010 − P. Thourot, La régulation de la (ré)assurance, Risques, n° 73-74, juin 2008 − D. W Wilcox, Speech on municipal finance, U.S. House of representatives, 20/05/2009 − Revue du système financier, Banque du Canada, Juin 2010