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Protection sociale complémentaire
1214 Appréciation du caractère plus favorable d’un régime
de prévoyance d’entreprise
➤ Un régime de prévoyance mis en place par décision
unilatérale de l’employeur peut se substituer à un régime
de branche, sous réserve d’être globalement plus favo-
rable.
➤ La Cour de cassation confirme la jurisprudence anté-
rieure.
➤ L’analyse des faits de l’espèce conduit les Hauts
magistrats à juger, en comparant ensemble les garanties
de prévoyance lourde « incapacité, invalidité, décès », que
certaines garanties plus favorables instituées par décision
unilatérale ne peuvent pas compenser la mise en œuvre
d’un délai de carence non prévu par la branche.
Cass. soc., 13 juin 2019, n° 17-31.711, F-D : JurisData n° 2019-010088
LA COUR – (...)
‰ Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 30 novembre 2017), que la société
Nordcall (la société), gère un centre d’appels ayant pour objet la vente de
prestations externalisées de relation client à destination des professionnels,
activité la faisant entrer dans le champ d’application de la convention collec-
tive nationale des bureaux d’études techniques (du 15 décembre 1987), dite
convention collective Syntec ; qu’elle a mis en place en son sein un régime
complémentaire de prévoyance couvrant les risques incapacité – invalidité –
décès, par décision unilatérale de l’employeur à effet au 1er
février 2008, sur
le fondement des dispositions de l’article L. 911-1 du Code de la sécurité
sociale ; que le syndicat CFTC de Lille métropole l’a fait assigner, le 27 avril
2015, devant le tribunal de grande instance aux fins de la voir contraindre à
appliquer les garanties de la convention collective Syntec aux salariés non
cadres de la société en cas d’arrêt maladie, accident, maternité, en sus des
garanties prévoyance reprises par la société ;
Sur le premier moyen :
‰Attenduqu’iln’yapaslieudestatuerparunedécisionspécialementmotivée
sur le moyen annexé, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la
cassation ;
Sur les deuxième et troisième moyens réunis :
‰ Attendu que la société fait grief à l’arrêt de dire que, jusqu’au 30 juin 2016,
les salariés de la société qui auraient à observer un arrêt maladie ou un arrêt
pouraccidentdoivent,enrelaisdesgarantiesprévuesparlaconventioncollec-
tive Syntec, bénéficier des garanties prévoyance reprises par la société dans
sa décision unilatérale applicable depuis le 1er
janvier 2008 et reprises dans
la notice d’information du 17 août 2012, sans délai de carence pour le main-
tien conventionnel du salaire à la charge de l’employeur, lequel maintien
s’entend dès le premier jour d’absence pour maladie ou accident dûment
constaté par certificat médical au profit des salariés de plus d’un an d’ancien-
neté, de la débouter de sa demande aux fins de voir dire que le régime de
prévoyance mis en place en son sein est globalement plus favorable que celui
résultant de la convention collective Syntec et de dire que, jusqu’au 30 juin
2016, s’agissant des agents de maîtrise, elle doit appliquer la grille de classi-
fication et de rémunération prévue à la convention collective Syntec en son
article 39 et son annexe 1 alors, selon le moyen :
1°/ que des régimes complémentaires d’indemnisation des arrêts maladies
issus de deux normes du statut collectif applicable au sein de l’entreprise ayant
le même objet ou la même cause ne peuvent se cumuler, seul le régime globale-
ment le plus favorable pour l’ensemble des salariés de l’entreprise devant
s’appliquer ; qu’au cas présent, il résulte de la décision unilatérale à effet du
1er
février 2008 que la société a « mis en place au profit des salariés non-cadres
un régime complémentaire de garanties collectives « incapacité – invalidité –
décès » globalement plus favorable que celui résultant de la convention collec-
tivedebrancheappliquéedansl’entreprise »etqu’« encontrepartiedediverses
améliorations de garanties instituées, il est expressément convenu que le main-
tien de salaire conventionnellement mis à la charge de l’employeur ne sera dû
qu’à compter du quatrième jour d’absence pour maladie ou accident constaté
parcertificatmédical » ;quelerégimed’indemnisationdesarrêtsdetravailainsi
mis en place ne pouvait donc se cumuler avec le régime prévu par la convention
collective nationale des bureaux d’études techniques, dite Syntec, applicable à
l’entreprise,seulelaplusfavorabledesdeuxnormesenmatièred’indemnisation
des absences pour maladie ou accident pouvant être appliquée ; qu’il en résulte
que les salariés ne pouvaient bénéficier à la fois du régime mis en place par
l’employeur, dont l’application impliquait nécessairement le respect d’un délai
de carence de trois jours pour bénéficier du maintien de salaire, et des disposi-
tions de la convention de branche permettant le maintien de salaire sans aucun
délai de carence ; qu’en jugeant néanmoins que les garanties en matière d’in-
demnisationpourmaladieetaccidentrésultantdeladécisionunilatéraleàeffet
du1er
juillet2008secumulaientetvenaientenrelaisdesgarantiesprévuespar
la convention Syntec et que les salariés ayant au moins un an d’ancienneté
pouvaient, en vertu de cette convention, être indemnisés sans aucun délai de
carence, la cour d’appel a violé le principe fondamental en droit du travail selon
lequel, en cas de conflit de normes c’est la plus favorable aux salariés qui doit
recevoir application ;
2°/ que l’application du régime d’indemnisation globalement le plus favorable
pourl’ensembledessalariésdel’entrepriseimpliquedeprendreencompte,non
seulement le nombre de salariés concernés par chacune des dispositions, mais
également l’ensemble des avantages accordés par chacun des régimes et leur
ampleur ; qu’au cas présent, le régime d’indemnisation des absences résultant
de la décision unilatérale prévoyant le maintien de salaire dont bénéficient les
salariés ayant un an d’ancienneté en vertu de la convention collective serait
subordonné à un délai de carence de trois jours, cependant que la convention
collective ne prévoit pas un tel délai de carence ; que le régime résultant de la
décision unilatérale prévoit, cependant, qu’en contrepartie de ce délai de ca-
rence réduit, les prises en charge des arrêts de travail supérieurs à quatre-vingt-
dixjoursparlerégimedeprévoyanceseraientouvertesàl’ensembledessalariés
de l’entreprise – au contraire de la convention de branche qui réserve cette
garantie aux salariés ayant plus d’un an d’ancienneté –, que cette prise en
charge a lieu en cas d’arrêts de travail de quatre-vingt-dix jours continus ou
discontinus – au contraire de la convention de branche qui prévoit un seul arrêt
de travail de quatre-vingt-dix jours continus – et les droits à indemnisation
résultantdurégimegarantissentuneindemnisationcorrespondantà90 %dela
rémunération–aulieude80 %danslaconventioncollectivedebranche ;qu’en
estimant que le régime d’indemnisation issue de la décision unilatérale de
l’employeur subordonnant le maintien de salaire à un délai de carence de trois
jours était globalement moins favorable que celui résultant de la convention
JurisprudencePROTECTIONSOCIALE 1214
JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 28. 16 JUILLET 2019 - © LEXISNEXIS SA 1
collectif, au motif que seule une minorité de salariés – ceux victimes des arrêts
maladies supérieurs à un, deux ou trois mois – avaient vocation à bénéficier des
garanties prévues par le régime de prévoyance, sans examiner concrètement
l’amélioration des conditions d’ouverture des droits, de prise en charge et d’in-
demnisationprévuesparcerégimeparrapportàlaconventioncollective,lacour
d’appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fondamental en
droit du travail selon lequel, en cas de conflit de normes c’est la plus favorable
aux salariés qui doit recevoir application ;
3°/ qu’il résulte de la décision unilatérale à effet du 1er
février 2008 et de la
notice d’information du 17 août 2012 instituant un régime de garantie au sein
de la société Nordcall que tous les salariés, quelle que soit leur ancienneté,
bénéficient d’une indemnisation assurée par l’organisme de prévoyance en cas
d’arrêt de travail continu ou discontinu supérieur à quatre-vingt-dix jours ; qu’en
énonçant qu’ « il n’apparaît pas que le régime de prévoyance choisi, couvre
l’ensemble des salariés sans conditions d’ancienneté, puisqu’il est prévu une
franchise de quatre-vingt-dix jours pour le personnel ayant moins d’un an
d’ancienneté », la cour d’appel a dénaturé les termes clairs et précis des deux
documentsdéterminantssusvisés,enviolationduprincipedel’interdictionfaite
au juge de dénaturer les documents produits devant eux ;
4°/ qu’il résulte de l’annexe 1 de la convention collective nationale des bureaux
d’études techniques, dite Syntec, relative à la classification des employés, tech-
niciens et agents de maîtrise (ETAM) que les fonctions ETAM existantes, quelles
qu’ellessoient,sontrépartiesentroistypesdefonctions :desfonctionsd’exécu-
tion, des fonctions d’étude ou de préparation et des fonctions de conception ou
de gestion élargie ; qu’il résulte de la grille de classification que les ETAM exer-
çant des fonctions d’exécution bénéficient de coefficients allant de 200 à 205,
que les ETAM exerçant des fonctions d’étude ou de préparation bénéficient de
coefficient allant de 275 à 355 et que les ETAM exerçant des fonctions de
conceptionoudegestionbénéficientdecoefficientallantde400à500 ;qu’ilen
résultequeseulslesagentsdemaîtriseayantdesfonctionsdeconceptionoude
gestion peuvent bénéficier d’un coefficient supérieur à 400 ; que, pour estimer
que la grille de classification en vigueur au sein de la société n’aurait pas été
conforme à la classification Syntec, la cour d’appel a énoncé que l’annexe 1
prévoit le coefficient minimum de 400 pour les agents de maîtrise et que la
société aurait classé certains salariés agents de maîtrise tout en leur affectant
un coefficient inférieur à 400 ; qu’en statuant de la sorte, cependant que seul
l’exercice de fonctions de conception ou de gestion donne droit à un tel coeffi-
cientetquelaqualificationd’agentdemaîtriseestindifférente,lacourd’appela
violé l’annexe I de l’annexe 1 de la convention collective nationale des bureaux
d’études techniques, dite Syntec, relative à la classification des employés, tech-
niciens et agents de maîtrise (ETAM) ;
‰ Mais attendu qu’ayant, par motifs adoptés, relevé que le régime de pré-
voyance résultant de la décision unilatérale de l’employeur prévoyait l’applica-
tion d’un délai de carence de trois jours en cas de maladie aux salariés non
cadres ayant au moins un an d’ancienneté, tandis que la convention collective
Syntec ne prévoyait pas de délai de carence pour ces salariés, que l’indemni-
sationamélioréeparlerégimeunilatéraldeprévoyancenebénéficiaitqu’àune
minorité de salariés en arrêt maladie supérieur à un, deux ou trois mois ou
susceptibles de relever des garanties invalidité ou décès, et que la circons-
tance que les salariés ayant moins d’un an d’ancienneté bénéficient désor-
mais d’une couverture au bout du quatre-vingt-onzième jour d’arrêt continu
devaitêtreappréciéeauregarddelalongueurdecedélaidepriseencharge,la
cour d’appel, appréciant globalement pour l’ensemble des salariés les dispo-
sitions ayant la même cause ou le même objet, a pu en déduire que le régime
de prévoyance établi unilatéralement par l’employeur n’était pas plus favo-
rable que celui résultant de la convention collective Syntec ; que le moyen,
inopérant en sa quatrième branche, n’est pas fondé pour le surplus ;
Par ces motifs :
‰ Rejette le pourvoi (...)
NOTE
Les arrêts relatifs à la comparaison des normes collectives en pro-
tectionsocialed’entreprisesontsuffisammentrarespourqueladéci-
sion commentée, même non publiée, retienne l’attention. Au cas
particulier,unesociétéentrantdanslechampdelaconventioncollec-
tive Syntec a mis en place un régime de prévoyance (incapacité,inva-
lidité, décès) par décision unilatérale, conformément aux
dispositions de l’article L. 911-1 du Code de la sécurité sociale. Le
régime de l’entreprise améliore les garanties prévues par la branche
sur plusieurs points (plus grand nombre de salariés pris en charge
pour les arrêts de travail d’une durée supérieure à 90 jours,indemni-
sation supérieure à celle prévue par la branche...).En contrepartie de
ces améliorations, la décision unilatérale prévoit que le maintien de
salaire ne sera dû qu’à compter du quatrième jour d’absence pour les
salariés ayant au moins un an d’ancienneté. Une organisation syndi-
cale assigne l’entreprise en méconnaissance de ses obligations
conventionnelles.La cour d’appel rejette l’argumentation de l’entre-
prise selon laquelle son régime est globalement plus favorable que
celui organisé par la convention collective de branche. La Cour de
cassation confirme l’arrêt d’appel et relève,notamment,que :
–lerégimed’entrepriseprévoitl’applicationd’undélaidecarence
detroisjoursencasdemaladieauxsalariésnoncadresayantaumoins
un an d’ancienneté tandis que la convention collective Syntec ne pré-
voit pas de délai de carence pour ces salariés ;
– l’indemnisation améliorée par le régime unilatéral de pré-
voyance ne bénéficie qu’à une minorité de salariés en arrêt maladie
d’une durée supérieure à un, deux ou trois mois ou susceptibles de
relever des garanties invalidité ou décès ;
–lacirconstancequelessalariésayantmoinsd’unand’ancienneté
bénéficient désormais d’une couverture au bout du quatre-vingt-
onzième jour d’arrêt continu doit être appréciée au regard de la lon-
gueur de ce délai de prise en charge.
Si la Cour de cassation affirme la possibilité pour une décision
unilatérale de se substituer à un accord collectif en matière de pré-
voyance (1),ce qui doit être salué,son appréciation du caractère glo-
balement plus favorable appelle un constat plus nuancé (2).
1. Primauté de la décision unilatérale
plus favorable
Un régime d’entreprise de protection sociale complémentaire
(santé,prévoyanceouretraite)peutêtreformaliséparundesactesde
droitdutravailvisésàl’articleL. 911-1duCodedelasécuritésociale :
convention ou accord collectif,accord référendaire et décision unila-
térale de l’employeur constatée par un écrit remis à chaque salarié
intéressé.Ces trois modes de mise en place sont admis sans qu’aucun
n’ait un caractère supplétif. Plus généralement, les couvertures de
protection sociale complémentaire constituent une garantie sociale
régieparleCodedutravailetlesprincipesjurisprudentielsyafférents
(V. CSS, art. L. 911-3 : prévoyant que le droit commun des conven-
tions et accords collectifs s’applique en matière de protection sociale
complémentaire).Or,la Cour de cassation considère,de longue date,
que l’employeur peut améliorer les stipulations conventionnelles et
mettre en œuvre des garanties globalement plus favorables pour les
salariés par décision unilatérale. Dans ce cas, les garanties ayant le
même objet ne peuvent se cumuler. Dès lors qu’elles sont plus favo-
rables aux salariés, seules celles prévues par la décision unilatérale
doivent trouver à s’appliquer. En ce sens, la Cour de cassation a jugé
que « les dispositions d’une convention collective et d’un usage d’en-
treprise qui ont le même objet ou la même cause, ne peuvent, sauf
disposition contraire, se cumuler, la plus favorable d’entre elles, (...)
pouvant seule être accordée » (Cass. soc., 3 avr. 2007, n° 06-41.017).
Ce principe connaît un tempérament au cas particulier d’un accord
collectif postérieur à l’engagement unilatéral. Dans cette hypothèse,
l’accordcollectifpostérieuràl’engagementunilatéralsesubstitueàce
dernier dès lors qu’il porte sur le même objet, quand bien même cet
Jurisprudence PROTECTION SOCIALE1214
2 © LEXISNEXIS SA - JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 28. 16 JUILLET 2019
accord serait moins favorable (Cass. soc., 8 janv. 2002, n° 00-12.252 :
JurisData n° 2002-012492. – Cass. soc., 3 mai 2012, n° 10-20.738 : Ju-
risData n° 2012-009520. – Cass. soc., 20 mai 2014, n° 12-26.322 : Ju-
risData n° 2014-010584 ; JCP S 2014, 1367, note B. Bossu). Ainsi, une
décisionunilatéraleplusfavorableetpostérieureàuneconventionou
un accord collectif prime alors sur cette convention ou cet accord.
L’arrêt commenté fait application de ces règles en matière de pré-
voyance.LaCourdecassationadmetqu’unrégimedeprévoyancemis
en place par une décision unilatérale de l’employeur peut, par prin-
cipe, se substituer à un régime de branche, sous réserve d’être globa-
lement plus favorable.
Cette décision, pour logique qu’elle soit, constitue un rappel op-
portun qui permettra à l’avenir d’écarter certains arguments infon-
dés. En effet, d’aucuns ont pu dénier à la décision unilatérale une
faculté d’amélioration des régimes de branche en soutenant qu’un
respectligneàlignedel’accords’imposait.Enrevanche,ilfautgarder
à l’esprit la spécificité des régimes issus d’accords collectifs d’entre-
prise,qui n’a pas été abordée dans ce litige.
Sur ce point,on rappellera que l’application des accords collectifs
de protection sociale complémentaire est régie par le « droit
commun » des accords collectifs (C. trav., art. L. 2253-1 et s. : sur
l’articulation entre les accords de branche et d’entreprise). Sans en-
trer dans le détail, un accord collectif d’entreprise peut prévaloir sur
unaccorddebranchemêmes’ilestmoinsfavorableou,s’agissantdes
garanties mentionnées à l’article L. 912-1 du Code de la sécurité so-
ciale,s’il assure des garanties au moins équivalentes.
Le renvoi à l’article précité et le principe imposant d’assurer des
garanties au moins équivalentes génèrent un débat résultant de lec-
tures divergentes.
2. Détermination du caractère
globalement plus favorable d’un
régime de prévoyance
Dans l’hypothèse d’un cumul de normes ayant le même objet,
encore faut-il pouvoir déterminer les garanties ayant un caractère
plusfavorable.Surcepoint,laCourdecassationaadoptéunemétho-
dologie en application de laquelle la détermination du régime le plus
favorable doit résulter :
– d’une appréciation globale « tenant compte des intérêts de l’en-
sembledessalariésetnondetelouteld’entreeux »(Cass.soc.,19 févr.
1997,n° 94-45.286 : JurisData n° 1997-000751),
– effectuée « avantage par avantage » ayant le même objet ou la
même cause (Cass. soc., 17 janv. 1996, n° 93-20.066 : JurisData
n° 1996-000129).
Ces deux paramètres ne sont pas aisés à mettre en œuvre, tout
spécialement en matière de protection sociale complémentaire, no-
tamment sur la question de savoir quel est le champ d’application de
la notion « d’avantage ». La première difficulté réside dans la déter-
minationduchampdelacomparaison.Doit-onprendreencomptela
prévoyance entendue au sens le plus large, comprenant les garanties
incapacité, invalidité, décès et frais de santé ? Faut-il effectuer une
distinction entre famille de garanties : prévoyance « lourde », d’une
part, frais de santé, d’autre part ? Ou, de manière encore plus fine,
faut-il effectuer une comparaison entre chaque poste de garanties ?
Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation compare ensemble les
trois postes de garanties « incapacité, invalidité, décès » et applique
une méthode intermédiaire. S’il ne faut pas donner trop d’impor-
tance à cet arrêt factuel et non publié, la solution retenue apporte
cependant un éclairage significatif et bienvenu qui pourra guider les
entreprises dans la mise en place de leurs régimes de prévoyance. La
Cour de cassation a en effet accepté de comparer un régime de pré-
voyance « incapacité, invalidité, décès » en intégrant ces trois postes
prisensemble.C’estuneréponsequasiinéditequ’ilfautrelever,sauf à
considérer que l’arrêt est une solution strictement d’espèce.
La seconde difficulté porte sur le contenu des garanties à compa-
rer. Sauf exception, comme, par exemple, en présence d’un finance-
ment salarial moindre pour des garanties nettement supérieures, la
détermination du régime le plus favorable peut s’avérer particulière-
ment délicate et implique de prendre en compte de nombreux élé-
ments tels que les niveaux de garantie, les stipulations relatives aux
dispenses d’adhésion,à la portabilité conventionnelle...
Or, s’il est concevable de comparer des niveaux de prestations ou
de cotisations dans la mesure où ils sont quantifiables, tel n’est pas
nécessairement le cas des autres paramètres.
Cette question a pourtant une incidence déterminante pour les
entreprisesqui,àdéfautd’appliquerlerégimequiesteffectivementle
plus favorable, peuvent se retrouver en situation d’auto-assurance.
Eneffet,lasouscriptiond’uncontratd’assurancen’estqu’unemoda-
lité d’exécution de leur obligation (Cass. soc., 3 juin 1997, n° 94-
43.880 : JurisData n° 1997-002479 et Cass. soc., 17 avr. 2019, n° 17-
27.096 : JurisData n° 2019-006082 ; JCP S 2019, 1182, note
D. Coudreau et Y.-J. Jeong).Ainsi,en l’espèce,la société aurait pu être
tenued’indemniserlesarrêtsdetravailintervenuspendantlapériode
de franchise de 3 jours.
Dans cet arrêt, la Cour de cassation n’a pas entendu laisser aux
juges du fond l’appréciation du caractère plus favorable.Pourtant,le
régimemisenplaceparl’entrepriseamélioraitsurplusieurspointsles
garanties de la branche ; il prévoyait :
– une prise en charge des arrêts de travail de plus de 90 jours pour
l’ensemble des salariés,et pas uniquement pour ceux ayant plus d’un
an d’ancienneté ;
– la possibilité d’être pris en charge pour plusieurs arrêts continus
ou discontinus ;
– une indemnisation correspondant à 90 % de la rémunération,
contre 80 % par la branche.
La Cour de cassation considère que ces différentes améliorations
nepermettentpasdecompenserlecaractèremoinsfavorabledudélai
de carence de trois jours. Plus précisément, elle retient que
« l’indemnisation améliorée par le régime unilatéral de prévoyance
nebénéficiaitqu’àuneminoritédesalariésenarrêtmaladiesupérieur
à un,deux ou trois mois ou susceptibles de relever des garanties inva-
liditéoudécès,etquelacirconstancequelessalariésayantmoinsd’un
an d’ancienneté bénéficient désormais d’une couverture au bout du
quatre-vingt-onzième jour d’arrêt continu devait être appréciée au
regarddelalongueurdecedélaidepriseencharge ».Enconséquence,
elleconfirmel’analysedelacourd’appelayantjugéque« lerégimede
prévoyance établi unilatéralement par l’employeur n’était pas plus
favorable que celui résultant de la convention collective Syntec ».
Manifestement, le délai de carence est un élément significatif qui
suppose des avantages accrus par ailleurs pour pouvoir être com-
pensé par la décision unilatérale.Pourtant,la sécurité sociale prévoit
un délai de carence de trois jours.On aurait donc pu concevoir que la
Cour de cassation comprenne le principe d’un « calage » sur l’assu-
rance maladie.De ce point de vue,on peut trouver la solution sévère.
Parailleurs,l’arrêtconfirmequelenombredebénéficiairesconsti-
tue un paramètre déterminant dans l’appréciation du caractère plus
favorable du régime.
Cette solution est à rapprocher d’un arrêt rendu en 2018, dans le
cadre duquel la Cour de cassation a eu à juger de la demande d’un
anciensalariéquiconfrontaitlescaractéristiquesd’uneindemnitéde
départàlaretraiteprévue,d’unepart,parunaccordnational,dontles
conditionsd’ouverturedesdroitsétaientpluslarges,d’autrepart,par
une convention collective régionale,dont le montant était plus élevé.
La Cour de cassation avait rejeté le pourvoi formé par le salarié et
Jurisprudence PROTECTION SOCIALE 1214
JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 28. 16 JUILLET 2019 - © LEXISNEXIS SA 3
confirmé que devait primer le dispositif ouvert à un plus grand
nombredesalariésparrapportàceluiplusgénéreuxpourdessalariés
moins nombreux (Cass. soc., 5 avr. 2018, n° 16-26.740 : JurisData
n° 2018-005207).
En pratique, lorsqu’elles souhaitent substituer au régime de
branche un régime mis en place par décision unilatérale, les entre-
prises doivent donc avoir à l’esprit d’en faire bénéficier le plus grand
nombre possible de salariés.
Alexandre de Louvigny,
avocat, Avanty avocats
Mots-Clés : Protection sociale complémentaire - Prévoyance - Régime
de prévoyance d’entreprise - Caractère plus favorable - Appréciation
Textes : CSS, art. L. 911-1
JurisClasseur : Protection sociale Traité, fasc. 820, par Jean de
Calbiac et Frank Wismer
Jurisprudence PROTECTION SOCIALE1214
4 © LEXISNEXIS SA - JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 28. 16 JUILLET 2019

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Appréciation du caractère plus favorable d’un régime de prévoyance d’entreprise

  • 1. Protection sociale complémentaire 1214 Appréciation du caractère plus favorable d’un régime de prévoyance d’entreprise ➤ Un régime de prévoyance mis en place par décision unilatérale de l’employeur peut se substituer à un régime de branche, sous réserve d’être globalement plus favo- rable. ➤ La Cour de cassation confirme la jurisprudence anté- rieure. ➤ L’analyse des faits de l’espèce conduit les Hauts magistrats à juger, en comparant ensemble les garanties de prévoyance lourde « incapacité, invalidité, décès », que certaines garanties plus favorables instituées par décision unilatérale ne peuvent pas compenser la mise en œuvre d’un délai de carence non prévu par la branche. Cass. soc., 13 juin 2019, n° 17-31.711, F-D : JurisData n° 2019-010088 LA COUR – (...) ‰ Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 30 novembre 2017), que la société Nordcall (la société), gère un centre d’appels ayant pour objet la vente de prestations externalisées de relation client à destination des professionnels, activité la faisant entrer dans le champ d’application de la convention collec- tive nationale des bureaux d’études techniques (du 15 décembre 1987), dite convention collective Syntec ; qu’elle a mis en place en son sein un régime complémentaire de prévoyance couvrant les risques incapacité – invalidité – décès, par décision unilatérale de l’employeur à effet au 1er février 2008, sur le fondement des dispositions de l’article L. 911-1 du Code de la sécurité sociale ; que le syndicat CFTC de Lille métropole l’a fait assigner, le 27 avril 2015, devant le tribunal de grande instance aux fins de la voir contraindre à appliquer les garanties de la convention collective Syntec aux salariés non cadres de la société en cas d’arrêt maladie, accident, maternité, en sus des garanties prévoyance reprises par la société ; Sur le premier moyen : ‰Attenduqu’iln’yapaslieudestatuerparunedécisionspécialementmotivée sur le moyen annexé, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Sur les deuxième et troisième moyens réunis : ‰ Attendu que la société fait grief à l’arrêt de dire que, jusqu’au 30 juin 2016, les salariés de la société qui auraient à observer un arrêt maladie ou un arrêt pouraccidentdoivent,enrelaisdesgarantiesprévuesparlaconventioncollec- tive Syntec, bénéficier des garanties prévoyance reprises par la société dans sa décision unilatérale applicable depuis le 1er janvier 2008 et reprises dans la notice d’information du 17 août 2012, sans délai de carence pour le main- tien conventionnel du salaire à la charge de l’employeur, lequel maintien s’entend dès le premier jour d’absence pour maladie ou accident dûment constaté par certificat médical au profit des salariés de plus d’un an d’ancien- neté, de la débouter de sa demande aux fins de voir dire que le régime de prévoyance mis en place en son sein est globalement plus favorable que celui résultant de la convention collective Syntec et de dire que, jusqu’au 30 juin 2016, s’agissant des agents de maîtrise, elle doit appliquer la grille de classi- fication et de rémunération prévue à la convention collective Syntec en son article 39 et son annexe 1 alors, selon le moyen : 1°/ que des régimes complémentaires d’indemnisation des arrêts maladies issus de deux normes du statut collectif applicable au sein de l’entreprise ayant le même objet ou la même cause ne peuvent se cumuler, seul le régime globale- ment le plus favorable pour l’ensemble des salariés de l’entreprise devant s’appliquer ; qu’au cas présent, il résulte de la décision unilatérale à effet du 1er février 2008 que la société a « mis en place au profit des salariés non-cadres un régime complémentaire de garanties collectives « incapacité – invalidité – décès » globalement plus favorable que celui résultant de la convention collec- tivedebrancheappliquéedansl’entreprise »etqu’« encontrepartiedediverses améliorations de garanties instituées, il est expressément convenu que le main- tien de salaire conventionnellement mis à la charge de l’employeur ne sera dû qu’à compter du quatrième jour d’absence pour maladie ou accident constaté parcertificatmédical » ;quelerégimed’indemnisationdesarrêtsdetravailainsi mis en place ne pouvait donc se cumuler avec le régime prévu par la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, dite Syntec, applicable à l’entreprise,seulelaplusfavorabledesdeuxnormesenmatièred’indemnisation des absences pour maladie ou accident pouvant être appliquée ; qu’il en résulte que les salariés ne pouvaient bénéficier à la fois du régime mis en place par l’employeur, dont l’application impliquait nécessairement le respect d’un délai de carence de trois jours pour bénéficier du maintien de salaire, et des disposi- tions de la convention de branche permettant le maintien de salaire sans aucun délai de carence ; qu’en jugeant néanmoins que les garanties en matière d’in- demnisationpourmaladieetaccidentrésultantdeladécisionunilatéraleàeffet du1er juillet2008secumulaientetvenaientenrelaisdesgarantiesprévuespar la convention Syntec et que les salariés ayant au moins un an d’ancienneté pouvaient, en vertu de cette convention, être indemnisés sans aucun délai de carence, la cour d’appel a violé le principe fondamental en droit du travail selon lequel, en cas de conflit de normes c’est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application ; 2°/ que l’application du régime d’indemnisation globalement le plus favorable pourl’ensembledessalariésdel’entrepriseimpliquedeprendreencompte,non seulement le nombre de salariés concernés par chacune des dispositions, mais également l’ensemble des avantages accordés par chacun des régimes et leur ampleur ; qu’au cas présent, le régime d’indemnisation des absences résultant de la décision unilatérale prévoyant le maintien de salaire dont bénéficient les salariés ayant un an d’ancienneté en vertu de la convention collective serait subordonné à un délai de carence de trois jours, cependant que la convention collective ne prévoit pas un tel délai de carence ; que le régime résultant de la décision unilatérale prévoit, cependant, qu’en contrepartie de ce délai de ca- rence réduit, les prises en charge des arrêts de travail supérieurs à quatre-vingt- dixjoursparlerégimedeprévoyanceseraientouvertesàl’ensembledessalariés de l’entreprise – au contraire de la convention de branche qui réserve cette garantie aux salariés ayant plus d’un an d’ancienneté –, que cette prise en charge a lieu en cas d’arrêts de travail de quatre-vingt-dix jours continus ou discontinus – au contraire de la convention de branche qui prévoit un seul arrêt de travail de quatre-vingt-dix jours continus – et les droits à indemnisation résultantdurégimegarantissentuneindemnisationcorrespondantà90 %dela rémunération–aulieude80 %danslaconventioncollectivedebranche ;qu’en estimant que le régime d’indemnisation issue de la décision unilatérale de l’employeur subordonnant le maintien de salaire à un délai de carence de trois jours était globalement moins favorable que celui résultant de la convention JurisprudencePROTECTIONSOCIALE 1214 JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 28. 16 JUILLET 2019 - © LEXISNEXIS SA 1
  • 2. collectif, au motif que seule une minorité de salariés – ceux victimes des arrêts maladies supérieurs à un, deux ou trois mois – avaient vocation à bénéficier des garanties prévues par le régime de prévoyance, sans examiner concrètement l’amélioration des conditions d’ouverture des droits, de prise en charge et d’in- demnisationprévuesparcerégimeparrapportàlaconventioncollective,lacour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fondamental en droit du travail selon lequel, en cas de conflit de normes c’est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application ; 3°/ qu’il résulte de la décision unilatérale à effet du 1er février 2008 et de la notice d’information du 17 août 2012 instituant un régime de garantie au sein de la société Nordcall que tous les salariés, quelle que soit leur ancienneté, bénéficient d’une indemnisation assurée par l’organisme de prévoyance en cas d’arrêt de travail continu ou discontinu supérieur à quatre-vingt-dix jours ; qu’en énonçant qu’ « il n’apparaît pas que le régime de prévoyance choisi, couvre l’ensemble des salariés sans conditions d’ancienneté, puisqu’il est prévu une franchise de quatre-vingt-dix jours pour le personnel ayant moins d’un an d’ancienneté », la cour d’appel a dénaturé les termes clairs et précis des deux documentsdéterminantssusvisés,enviolationduprincipedel’interdictionfaite au juge de dénaturer les documents produits devant eux ; 4°/ qu’il résulte de l’annexe 1 de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, dite Syntec, relative à la classification des employés, tech- niciens et agents de maîtrise (ETAM) que les fonctions ETAM existantes, quelles qu’ellessoient,sontrépartiesentroistypesdefonctions :desfonctionsd’exécu- tion, des fonctions d’étude ou de préparation et des fonctions de conception ou de gestion élargie ; qu’il résulte de la grille de classification que les ETAM exer- çant des fonctions d’exécution bénéficient de coefficients allant de 200 à 205, que les ETAM exerçant des fonctions d’étude ou de préparation bénéficient de coefficient allant de 275 à 355 et que les ETAM exerçant des fonctions de conceptionoudegestionbénéficientdecoefficientallantde400à500 ;qu’ilen résultequeseulslesagentsdemaîtriseayantdesfonctionsdeconceptionoude gestion peuvent bénéficier d’un coefficient supérieur à 400 ; que, pour estimer que la grille de classification en vigueur au sein de la société n’aurait pas été conforme à la classification Syntec, la cour d’appel a énoncé que l’annexe 1 prévoit le coefficient minimum de 400 pour les agents de maîtrise et que la société aurait classé certains salariés agents de maîtrise tout en leur affectant un coefficient inférieur à 400 ; qu’en statuant de la sorte, cependant que seul l’exercice de fonctions de conception ou de gestion donne droit à un tel coeffi- cientetquelaqualificationd’agentdemaîtriseestindifférente,lacourd’appela violé l’annexe I de l’annexe 1 de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, dite Syntec, relative à la classification des employés, tech- niciens et agents de maîtrise (ETAM) ; ‰ Mais attendu qu’ayant, par motifs adoptés, relevé que le régime de pré- voyance résultant de la décision unilatérale de l’employeur prévoyait l’applica- tion d’un délai de carence de trois jours en cas de maladie aux salariés non cadres ayant au moins un an d’ancienneté, tandis que la convention collective Syntec ne prévoyait pas de délai de carence pour ces salariés, que l’indemni- sationamélioréeparlerégimeunilatéraldeprévoyancenebénéficiaitqu’àune minorité de salariés en arrêt maladie supérieur à un, deux ou trois mois ou susceptibles de relever des garanties invalidité ou décès, et que la circons- tance que les salariés ayant moins d’un an d’ancienneté bénéficient désor- mais d’une couverture au bout du quatre-vingt-onzième jour d’arrêt continu devaitêtreappréciéeauregarddelalongueurdecedélaidepriseencharge,la cour d’appel, appréciant globalement pour l’ensemble des salariés les dispo- sitions ayant la même cause ou le même objet, a pu en déduire que le régime de prévoyance établi unilatéralement par l’employeur n’était pas plus favo- rable que celui résultant de la convention collective Syntec ; que le moyen, inopérant en sa quatrième branche, n’est pas fondé pour le surplus ; Par ces motifs : ‰ Rejette le pourvoi (...) NOTE Les arrêts relatifs à la comparaison des normes collectives en pro- tectionsocialed’entreprisesontsuffisammentrarespourqueladéci- sion commentée, même non publiée, retienne l’attention. Au cas particulier,unesociétéentrantdanslechampdelaconventioncollec- tive Syntec a mis en place un régime de prévoyance (incapacité,inva- lidité, décès) par décision unilatérale, conformément aux dispositions de l’article L. 911-1 du Code de la sécurité sociale. Le régime de l’entreprise améliore les garanties prévues par la branche sur plusieurs points (plus grand nombre de salariés pris en charge pour les arrêts de travail d’une durée supérieure à 90 jours,indemni- sation supérieure à celle prévue par la branche...).En contrepartie de ces améliorations, la décision unilatérale prévoit que le maintien de salaire ne sera dû qu’à compter du quatrième jour d’absence pour les salariés ayant au moins un an d’ancienneté. Une organisation syndi- cale assigne l’entreprise en méconnaissance de ses obligations conventionnelles.La cour d’appel rejette l’argumentation de l’entre- prise selon laquelle son régime est globalement plus favorable que celui organisé par la convention collective de branche. La Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel et relève,notamment,que : –lerégimed’entrepriseprévoitl’applicationd’undélaidecarence detroisjoursencasdemaladieauxsalariésnoncadresayantaumoins un an d’ancienneté tandis que la convention collective Syntec ne pré- voit pas de délai de carence pour ces salariés ; – l’indemnisation améliorée par le régime unilatéral de pré- voyance ne bénéficie qu’à une minorité de salariés en arrêt maladie d’une durée supérieure à un, deux ou trois mois ou susceptibles de relever des garanties invalidité ou décès ; –lacirconstancequelessalariésayantmoinsd’unand’ancienneté bénéficient désormais d’une couverture au bout du quatre-vingt- onzième jour d’arrêt continu doit être appréciée au regard de la lon- gueur de ce délai de prise en charge. Si la Cour de cassation affirme la possibilité pour une décision unilatérale de se substituer à un accord collectif en matière de pré- voyance (1),ce qui doit être salué,son appréciation du caractère glo- balement plus favorable appelle un constat plus nuancé (2). 1. Primauté de la décision unilatérale plus favorable Un régime d’entreprise de protection sociale complémentaire (santé,prévoyanceouretraite)peutêtreformaliséparundesactesde droitdutravailvisésàl’articleL. 911-1duCodedelasécuritésociale : convention ou accord collectif,accord référendaire et décision unila- térale de l’employeur constatée par un écrit remis à chaque salarié intéressé.Ces trois modes de mise en place sont admis sans qu’aucun n’ait un caractère supplétif. Plus généralement, les couvertures de protection sociale complémentaire constituent une garantie sociale régieparleCodedutravailetlesprincipesjurisprudentielsyafférents (V. CSS, art. L. 911-3 : prévoyant que le droit commun des conven- tions et accords collectifs s’applique en matière de protection sociale complémentaire).Or,la Cour de cassation considère,de longue date, que l’employeur peut améliorer les stipulations conventionnelles et mettre en œuvre des garanties globalement plus favorables pour les salariés par décision unilatérale. Dans ce cas, les garanties ayant le même objet ne peuvent se cumuler. Dès lors qu’elles sont plus favo- rables aux salariés, seules celles prévues par la décision unilatérale doivent trouver à s’appliquer. En ce sens, la Cour de cassation a jugé que « les dispositions d’une convention collective et d’un usage d’en- treprise qui ont le même objet ou la même cause, ne peuvent, sauf disposition contraire, se cumuler, la plus favorable d’entre elles, (...) pouvant seule être accordée » (Cass. soc., 3 avr. 2007, n° 06-41.017). Ce principe connaît un tempérament au cas particulier d’un accord collectif postérieur à l’engagement unilatéral. Dans cette hypothèse, l’accordcollectifpostérieuràl’engagementunilatéralsesubstitueàce dernier dès lors qu’il porte sur le même objet, quand bien même cet Jurisprudence PROTECTION SOCIALE1214 2 © LEXISNEXIS SA - JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 28. 16 JUILLET 2019
  • 3. accord serait moins favorable (Cass. soc., 8 janv. 2002, n° 00-12.252 : JurisData n° 2002-012492. – Cass. soc., 3 mai 2012, n° 10-20.738 : Ju- risData n° 2012-009520. – Cass. soc., 20 mai 2014, n° 12-26.322 : Ju- risData n° 2014-010584 ; JCP S 2014, 1367, note B. Bossu). Ainsi, une décisionunilatéraleplusfavorableetpostérieureàuneconventionou un accord collectif prime alors sur cette convention ou cet accord. L’arrêt commenté fait application de ces règles en matière de pré- voyance.LaCourdecassationadmetqu’unrégimedeprévoyancemis en place par une décision unilatérale de l’employeur peut, par prin- cipe, se substituer à un régime de branche, sous réserve d’être globa- lement plus favorable. Cette décision, pour logique qu’elle soit, constitue un rappel op- portun qui permettra à l’avenir d’écarter certains arguments infon- dés. En effet, d’aucuns ont pu dénier à la décision unilatérale une faculté d’amélioration des régimes de branche en soutenant qu’un respectligneàlignedel’accords’imposait.Enrevanche,ilfautgarder à l’esprit la spécificité des régimes issus d’accords collectifs d’entre- prise,qui n’a pas été abordée dans ce litige. Sur ce point,on rappellera que l’application des accords collectifs de protection sociale complémentaire est régie par le « droit commun » des accords collectifs (C. trav., art. L. 2253-1 et s. : sur l’articulation entre les accords de branche et d’entreprise). Sans en- trer dans le détail, un accord collectif d’entreprise peut prévaloir sur unaccorddebranchemêmes’ilestmoinsfavorableou,s’agissantdes garanties mentionnées à l’article L. 912-1 du Code de la sécurité so- ciale,s’il assure des garanties au moins équivalentes. Le renvoi à l’article précité et le principe imposant d’assurer des garanties au moins équivalentes génèrent un débat résultant de lec- tures divergentes. 2. Détermination du caractère globalement plus favorable d’un régime de prévoyance Dans l’hypothèse d’un cumul de normes ayant le même objet, encore faut-il pouvoir déterminer les garanties ayant un caractère plusfavorable.Surcepoint,laCourdecassationaadoptéunemétho- dologie en application de laquelle la détermination du régime le plus favorable doit résulter : – d’une appréciation globale « tenant compte des intérêts de l’en- sembledessalariésetnondetelouteld’entreeux »(Cass.soc.,19 févr. 1997,n° 94-45.286 : JurisData n° 1997-000751), – effectuée « avantage par avantage » ayant le même objet ou la même cause (Cass. soc., 17 janv. 1996, n° 93-20.066 : JurisData n° 1996-000129). Ces deux paramètres ne sont pas aisés à mettre en œuvre, tout spécialement en matière de protection sociale complémentaire, no- tamment sur la question de savoir quel est le champ d’application de la notion « d’avantage ». La première difficulté réside dans la déter- minationduchampdelacomparaison.Doit-onprendreencomptela prévoyance entendue au sens le plus large, comprenant les garanties incapacité, invalidité, décès et frais de santé ? Faut-il effectuer une distinction entre famille de garanties : prévoyance « lourde », d’une part, frais de santé, d’autre part ? Ou, de manière encore plus fine, faut-il effectuer une comparaison entre chaque poste de garanties ? Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation compare ensemble les trois postes de garanties « incapacité, invalidité, décès » et applique une méthode intermédiaire. S’il ne faut pas donner trop d’impor- tance à cet arrêt factuel et non publié, la solution retenue apporte cependant un éclairage significatif et bienvenu qui pourra guider les entreprises dans la mise en place de leurs régimes de prévoyance. La Cour de cassation a en effet accepté de comparer un régime de pré- voyance « incapacité, invalidité, décès » en intégrant ces trois postes prisensemble.C’estuneréponsequasiinéditequ’ilfautrelever,sauf à considérer que l’arrêt est une solution strictement d’espèce. La seconde difficulté porte sur le contenu des garanties à compa- rer. Sauf exception, comme, par exemple, en présence d’un finance- ment salarial moindre pour des garanties nettement supérieures, la détermination du régime le plus favorable peut s’avérer particulière- ment délicate et implique de prendre en compte de nombreux élé- ments tels que les niveaux de garantie, les stipulations relatives aux dispenses d’adhésion,à la portabilité conventionnelle... Or, s’il est concevable de comparer des niveaux de prestations ou de cotisations dans la mesure où ils sont quantifiables, tel n’est pas nécessairement le cas des autres paramètres. Cette question a pourtant une incidence déterminante pour les entreprisesqui,àdéfautd’appliquerlerégimequiesteffectivementle plus favorable, peuvent se retrouver en situation d’auto-assurance. Eneffet,lasouscriptiond’uncontratd’assurancen’estqu’unemoda- lité d’exécution de leur obligation (Cass. soc., 3 juin 1997, n° 94- 43.880 : JurisData n° 1997-002479 et Cass. soc., 17 avr. 2019, n° 17- 27.096 : JurisData n° 2019-006082 ; JCP S 2019, 1182, note D. Coudreau et Y.-J. Jeong).Ainsi,en l’espèce,la société aurait pu être tenued’indemniserlesarrêtsdetravailintervenuspendantlapériode de franchise de 3 jours. Dans cet arrêt, la Cour de cassation n’a pas entendu laisser aux juges du fond l’appréciation du caractère plus favorable.Pourtant,le régimemisenplaceparl’entrepriseamélioraitsurplusieurspointsles garanties de la branche ; il prévoyait : – une prise en charge des arrêts de travail de plus de 90 jours pour l’ensemble des salariés,et pas uniquement pour ceux ayant plus d’un an d’ancienneté ; – la possibilité d’être pris en charge pour plusieurs arrêts continus ou discontinus ; – une indemnisation correspondant à 90 % de la rémunération, contre 80 % par la branche. La Cour de cassation considère que ces différentes améliorations nepermettentpasdecompenserlecaractèremoinsfavorabledudélai de carence de trois jours. Plus précisément, elle retient que « l’indemnisation améliorée par le régime unilatéral de prévoyance nebénéficiaitqu’àuneminoritédesalariésenarrêtmaladiesupérieur à un,deux ou trois mois ou susceptibles de relever des garanties inva- liditéoudécès,etquelacirconstancequelessalariésayantmoinsd’un an d’ancienneté bénéficient désormais d’une couverture au bout du quatre-vingt-onzième jour d’arrêt continu devait être appréciée au regarddelalongueurdecedélaidepriseencharge ».Enconséquence, elleconfirmel’analysedelacourd’appelayantjugéque« lerégimede prévoyance établi unilatéralement par l’employeur n’était pas plus favorable que celui résultant de la convention collective Syntec ». Manifestement, le délai de carence est un élément significatif qui suppose des avantages accrus par ailleurs pour pouvoir être com- pensé par la décision unilatérale.Pourtant,la sécurité sociale prévoit un délai de carence de trois jours.On aurait donc pu concevoir que la Cour de cassation comprenne le principe d’un « calage » sur l’assu- rance maladie.De ce point de vue,on peut trouver la solution sévère. Parailleurs,l’arrêtconfirmequelenombredebénéficiairesconsti- tue un paramètre déterminant dans l’appréciation du caractère plus favorable du régime. Cette solution est à rapprocher d’un arrêt rendu en 2018, dans le cadre duquel la Cour de cassation a eu à juger de la demande d’un anciensalariéquiconfrontaitlescaractéristiquesd’uneindemnitéde départàlaretraiteprévue,d’unepart,parunaccordnational,dontles conditionsd’ouverturedesdroitsétaientpluslarges,d’autrepart,par une convention collective régionale,dont le montant était plus élevé. La Cour de cassation avait rejeté le pourvoi formé par le salarié et Jurisprudence PROTECTION SOCIALE 1214 JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 28. 16 JUILLET 2019 - © LEXISNEXIS SA 3
  • 4. confirmé que devait primer le dispositif ouvert à un plus grand nombredesalariésparrapportàceluiplusgénéreuxpourdessalariés moins nombreux (Cass. soc., 5 avr. 2018, n° 16-26.740 : JurisData n° 2018-005207). En pratique, lorsqu’elles souhaitent substituer au régime de branche un régime mis en place par décision unilatérale, les entre- prises doivent donc avoir à l’esprit d’en faire bénéficier le plus grand nombre possible de salariés. Alexandre de Louvigny, avocat, Avanty avocats Mots-Clés : Protection sociale complémentaire - Prévoyance - Régime de prévoyance d’entreprise - Caractère plus favorable - Appréciation Textes : CSS, art. L. 911-1 JurisClasseur : Protection sociale Traité, fasc. 820, par Jean de Calbiac et Frank Wismer Jurisprudence PROTECTION SOCIALE1214 4 © LEXISNEXIS SA - JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 28. 16 JUILLET 2019