1. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
ESPRIT GENERAL
Cette épreuve vise à vérifier que les candidats disposent des repères nécessaires à la
compréhension du monde dans lequel ils devront agir. L'étendue de l'étude, aussi bien
dans l'espace que dans le temps, indique que le programme doit être abordé à partir
d'une vision plus synthétique qu'analytique.
Des sujets vastes, précis dans leur formulation, privilégiant la réflexion seront propo-
sés aux candidats.
EVALUATION
Elle prendra en compte :
- la capacité du candidat à définir le sujet, à le délimiter et à en dégager une
problématique pertinente.
- l'organisation des idées selon une démarche logique (plan). Il n'existe pas de
plan préétabli, mais des plans plus ou moins efficaces, plus ou moins difficiles
à mettre en œuvre pour répondre à la question posée.
- l'aptitude des candidats à sélectionner des exemples concrets, significatifs,
démonstratifs.
- les qualités d'exposition (syntaxe et orthographe).
ESPRIT DE L’EPREUVE
Nouveau : évolution de l’épreuve d’HGGMC pour le concours 2010.
L’épreuve d’Histoire, Géographie et Géopolitique du monde contemporain comprendra
toujours deux sujets au choix des candidats, dont un sujet sans carte.
Pour le sujet avec carte obligatoire, l’épreuve actuelle sera remplacée par un commen-
taire de carte (s) qui comptera pour un quart de la note finale.
Les cartes qui seront proposées pourront être en couleur. La carte aura un rapport
avec la dissertation. Tout type de carte est susceptible d’être présenté : cartes
géoéconomiques, géopolitiques, historiques, mise en cartographie de données
quantitatives… Les cartes à très grande échelle sur des lieux géopolitiques majeurs
permettront aux candidats de saisir des enjeux locaux, nationaux et internationaux,
avec si c’est utile quelques rapides jalons historiques. On pourra proposer deux cartes
(au maximum) dont la comparaison invitera le candidat à saisir des évolutions, des
redistributions de rapports de force.
Le titre problématisé dans l’intitulé du sujet de la carte donnera l’indication du thème
à privilégier dans le commentaire. Des questions accompagnant la ou les cartes
proposée(s) pourraient être envisagées mais pas obligatoirement.
EPREUVES SPECIFIQUES
216 annales officielles
2. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
Le commentaire de carte ne doit pas être une nouvelle dissertation. Il doit demeurer
un exercice court (pas plus d’une page et demie) et être entièrement rédigé. On appré-
ciera ici les qualités rédactionnelles, la pertinence de la réflexion, la capacité du
candidat à dégager quelques idées forces bien distinctes.
Les candidats doivent démontrer qu’ils savent lire, analyser, décrypter les enjeux géo-
politiques des cartes, pour une meilleure compréhension de la complexité du monde
actuel.
ÉPREUVE 2009
Durée : 4 heures
Aucun document n'est autorisé.
Le candidat traitera au choix l'un des deux sujets suivants.
SUJET 1
(sujet avec croquis et documents)
Les dynamiques démographiques et leurs incidences économiques, sociales et
géopolitiques dans le monde d’aujourd’hui (15 points).
Croquis obligatoire (se situe en pages 8 et 9 de votre copie) :
les migrations internationales de population au début du XXIe siècle (5 points).
Document n°1 : Fécondité et espérance de vie Femmes / Hommes en 2006-2007
Source : Images économiques du monde 2008 et 2009
Fécondité (1) Espérance de vie (2)
Afrique 5,1 53/51
Amérique du Nord 2,0 81/75
Amérique Centrale, Caraïbes 2,7 75/69
Amérique du Sud 2,4 76/69
Asie 2,4 70/66
Europe 1,4 79/71
France 2,0 84/77
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 217
3. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
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Fécondité (1) Espérance de vie (2)
Allemagne 1,3 82/76
Russie 1,3 72/59
Océanie 2,1 77/73
Monde 2,7 69/65
(1) Nombre moyen d’enfants par femme en âge de procréer.
(2) Espérance de vie à la naissance (nombre d’années : femmes / hommes).
Document n°2 : Vieillissement et compétitivité.
“(…) Alors qu’aujourd’hui, les Européens représentent 11% de la population mondiale,
ils ne seront plus que 7% en 2050. Le poids économique de l’Europe diminuera en
conséquence, sous le double effet des mutations démographiques et de la montée en
puissance des économies émergentes (…) Selon diverses prévisions, sans modifica-
tion des systèmes européens de protection sociale, le vieillissement démographique
se soldera d’ici 2050 par une hausse de près de 8 points de pourcentage du PIB des
seules dépenses de santé et de protection vieillesse. La solidarité générationnelle
constituera alors une charge très lourde pour les futurs actifs.”
Stefanie WAHL, Regards sur l’économie allemande, démographie et compétitivité, dans
Problèmes économiques n°2925, La documentation Française, 6 juin 2007-11-02
Document n°4 : démographie et puissance.
“Le retour de la puissance russe, c’est une Russie qui va mieux, mais surtout qui se
relève de l’humiliation. (…) Tout ceci donne-t-il une nouvelle grande puissance ? Sans
doute pas à court terme, en raison de la limitation des moyens, ni à moyen terme, du
fait des faiblesses structurelles de l’économie et de la démographie”.
Rapport annuel de l’Institut français des relations internationales 2009, p.278
“Un autre atout qui sera décisif pour les Etats-Unis est le formidable dynamisme
démographique. Selon l’American Enterprise Institute, la population américaine
augmentera de 65 millions d’ici 2030, tandis que le nombre d’Européens, lui stagnera.
L’Europe sera à cet horizon un continent vieillissant dont le nombre des plus de 65 ans
sera le double de celui des moins de 15 ans (… )
De façon surprenante, de nombreux pays d’Asie (hormis l’Inde) sont dans une
situation démographique comparable à celle de l’Europe. (…). Les étudiants étrangers
et immigrés représentent aux Etats-Unis 50% des chercheurs en sciences, et, en 2006,
40% des docteurs en sciences et en ingénierie et 65% en informatique.”
Problèmes économiques n° 2954 septembre 2008
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218 annales officielles
4. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
SUJET 2
(sujet sans croquis, sans documents)
Les Etats-Unis d’Amérique: la fin de “l’Empire” ? (20 points).
CORRIGE
SUJET 1
Analyse du sujet
Les candidats doivent d’abord bien lire le sujet et le définir pour éviter toute
dérive. Tous les mots comptent. Il faut donc envisager les dynamiques démogra-
phiques et pas la démographie en général. Une confusion fréquente a été faite
entre “dynamisme” et “dynamiques”. La dynamique doit être définie comme un
processus qui marque une évolution.
En géographie, l’analyse dynamique est celle qui introduit le temps dans une analyse
géographique et s’oppose à l’analyse statique (J. Lévy, M. Lussault, Dictionnaire de
la Géographie). Un système dynamique est implicitement considéré comme animé de
mouvements internes. La notion de mouvement, de changement est centrale ici, on
doit cependant se garder d’un jugement de valeur qui serait positif sur ce qui bouge
et négatif sur ce qui est immobile. L’analyse dynamique concerne aussi bien l’idée
développementaliste de croissance que de déclin.
Il sera difficile d’être exhaustif sur un tel sujet qui fait appel à la capacité de syn-
thèse des candidats. Le sujet fait référence au programme de première année qui
aborde le thème principal du sujet et au programme de deuxième année qui met
l’accent sur les dynamiques géographiques de chaque continent, ce dernier point
sera particulièrement utile pour illustrer le devoir d’exemples concrets indispensables
à la démonstration.
Plan proposé
Les dynamiques caractérisant la démographie dans la mondialisation (solde naturel,
âge des populations, migrations diverses…) sont complexes, elles diffèrent grandement
sur la planète et reflètent le plus souvent des différences de conditions de vie. Il y a
donc un rapport étroit entre la diversité des dynamiques démographiques d’un côté et
la diversité des faits économiques, sociaux et géopolitiques. Le sujet doit être envisagé
à l’échelle des pays, des continents ou du monde.
Les dynamiques démographiques expriment avec force la fracture entre le Nord et le
Sud, elles soulignent les divergences entre les pays, mais elles nous rappellent aussi
l’unicité de la mondialisation.
Les enjeux économiques, sociaux, géopolitiques, seront évalués et spécifiés en
fonction de leur importance à partir de trois thèmes majeurs :
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 219
5. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
- La croissance démographique et le vieillissement de la population du monde.
- Les dynamiques migratoires internationales.
- Les dynamiques internes.
I. LA CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE ET LE VIEILLISSEMENT DU MONDE
A. Un accroissement spectaculaire mais inégal
- La croissance de la population : 6.5, bientôt 9 milliards ?
Il aura fallu attendre les années 1800 pour atteindre le 1er milliard d’habitants sur
la planète, en revanche en 130 ans, de 1800 à 1930 la population a doublé pour
atteindre 2 milliards. Depuis le rythme d’accroissement s’est accéléré : 3 milliards en
1960, 4 en 1974, 5 en 1987, 6,5 aujourd’hui, probablement 7 en 2013 et 9 en 2054.
La population mondiale se stabilisera-t-elle ensuite autour de 10 milliards ?
- Des rythmes différents selon les pays
Derrière cette montée vertigineuse s’opère une révolution silencieuse qui est celle de
la transition démographique, c'est-à-dire le processus par lequel une société passe d’un
régime démographique où forte natalité et forte mortalité s’équilibrent, à un régime
marqué par une faible natalité et une faible mortalité elles aussi approximativement
équilibrées. Des différences existent dans les soldes naturels. L’accroissement de la
population est essentiellement fortement localisé en Afrique, au Moyen Orient et en
Inde. La hausse est plus modérée en Amérique du Sud, et globalement en Asie (Chine).
Les soldes naturels sont par ailleurs négatifs dans certains pays : Allemagne, PECO,
Russie. Ces soldes naturels peuvent provoquer une baisse de la population (Russie)
s’ils ne sont pas compensés par des flux migratoires (Allemagne), avec des incidences
économiques et politiques.
- Cette diversité des dynamiques démographiques est en rapport avec : le niveau de vie
(relation entre l’indice synthétique de fécondité et l’espérance de vie à la naissance),
l’efficacité plus ou moins grande des politiques de limitation des naissances (rôle
des gouvernements, résistances religieuses, culturelles…) avec parfois des effets
secondaires importants (déséquilibres H/F dans plusieurs pays d’Asie). Les migrations
de population peuvent modifier ces rapports (différences entre les EUA, l’Europe occi-
dentale et le Japon).
B. Un phénomène massif, le vieillissement de la population mondiale
- Un processus quasi universel
Trois phénomènes successifs touchent progressivement tous les pays du monde : la
baisse de la mortalité infantile, la baisse de la fécondité et l’augmentation de l’espé-
rance de vie modifient l’équilibre des groupes d’âges et entraînent un vieillissement
quasi universel de la population mondiale. Selon les statistiques centralisées par l’ONU
EPREUVES SPECIFIQUES
220 annales officielles
6. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
(rapport « Vieillissement de la population mondiale : 1950-2050 »), il y a aujourd’hui
650 millions d’êtres humains de plus de 60 ans dans le monde. Ils seront trois fois plus
nombreux en 2050 : 2 milliards. Les seniors représentaient 8 % de la population mon-
diale en 1950, 10 % en 2000. Ils formeront 21 % de l’humanité en 2050. La popula-
tion des plus de 60 ans s’accroît de 2 % chaque année, beaucoup plus rapidement que
la population dans son ensemble. En 2050, les sexagénaires pourraient, dans le
monde, être plus nombreux que les moins de 15 ans.
Il est aujourd’hui de 26 ans, en 2050, selon les projections de l’ONU, l’âge moyen de
la population mondiale sera de 36 ans.
Depuis 1950, l’espérance de vie a gagné 20 ans, passant de 46 à 66 ans. La moyenne
planétaire masque évidemment des disparités régionales considérables et croissantes.
- Les diversités du vieillissement
Le Nord : le vieillissement n'est pas nouveau en soi, mais il est appelé à s'accélérer.
Des pays développés, comme les Etats-Unis, ont “vieilli” d'une année en moyenne par
décennie au siècle dernier, nous sommes actuellement sur un régime de deux années
par décennie. L'Europe des 27 comptera plus de 120 millions de personnes âgées de
plus de 65 ans en 2030 contre 85 millions aujourd'hui. Grâce à l'apport migratoire,
l'Union européenne dans son ensemble évitera le déclin démographique, mais pas
l'accentuation de son vieillissement. La France connaîtra une augmentation de sa
population par le haut de la pyramide des âges, avec un vieillissement lié aux classes
d'âge surnuméraires du baby-boom.
Le Sud : l’ONU insiste également avec raison sur le fait que le vieillissement de la
population est encore perçu à tort comme un phénomène propre aux pays industria-
lisés. Or, en 2050, 80 % des plus de 60 ans vivront dans les pays en développement.
En Chine la part des personnes âgées (65 ans et plus) est passée de 3.6% en 1964, à
10.5% en 2000. Non seulement le phénomène ne ralentit pas, mais il surprend les
spécialistes par son intensité et son accélération : exemple des villes du Maghreb.
On observe une grande diversité entre villes et campagnes, entre les grands domaines
religieux et culturels. Le cas de l’Afrique montre de grandes différences entre les caté-
gories socio-professionnelles.
C. Les conséquences économiques, sociales et géopolitiques du vieillissement et
de la croissance démographique
- L’impact économique : une crise économique mondiale de la vieillesse ?
On montrera ici les incidences sur la croissance économique, l’épargne, l’investissement,
la consommation, le marché du travail, le financement des retraites, la prise en charge
des maladies liées à l’âge et des personnes dépendantes (Alzheimer).
Le rapport : actifs/inactifs. De 1950 à 2000, le nombre de personnes âgées de 15 à
64 ans pour une personne âgée de plus de 65 ans est passé de 12 à 9. En 2050, ce
chiffre devrait passer à 4 en moyenne dans le monde. L’évolution de ce rapport
aura une incidence majeure sur les systèmes de sécurité sociale s’ils existent, ou
sur leur mise en place s’ils n’existent pas. Comment assurer un niveau de santé élevé
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 221
7. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
aux populations vieillissantes, dans un contexte de mise sous tension des finances
publiques ?
- L’impact sur les solidarités sociales
Comment éviter les conflits entre les générations dus aux inégalités de revenu et
de patrimoine. Le coefficient de charge parentale : en 1950, on dénombrait deux
personnes de plus de 85 ans pour cent personnes âgées de 50 à 64 ans. En 2000,
ce rapport est de 4 %. Il passera à 11 % en 2050. L’espérance de vie supérieure
des femmes (à 80 ans, 4 femmes pour un homme) fait que le vieillissement s’accom-
pagne d’une féminisation de la population mondiale.
- Des problèmes géopolitiques majeurs : gérer l’explosion démographique du Sud et le
péril gris au Nord
Les rapports Nord-Sud. La population des pays du Sud progressera plus longtemps en
effectifs. Six pays du Sud contribuent à la moitié de l’accroissement annuel mondial :
l’Inde pour 21%, la Chine pour 12%, le Pakistan pour 5%, le Bangladesh pour 4% et
l’Indonésie pour 3%. On peut mesurer ici le poids respectif des grands ensembles
démographiques avec un renforcement du Sud. Les pays du Sud seront cependant
confrontés à des difficultés spécifiques. Une prise de conscience et une véritable
coopération sur le plan international seront indispensables (G20). La directrice de
l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), résume bien la situation : “Les pays
développés sont devenus riches avant de devenir vieux, les pays en développement
seront vieux avant de devenir riches”.
Sur les rapports Nord-Nord. Modification des rapports de force au sein de la triade :
un renforcement des USA par rapport à l’UE “vieux continent de vieux” ou le “qua-
trième âge” comprenant les personnes âgées de plus de 80 ans sera trois fois plus
important qu’aujourd’hui et du Japon qui est déjà le pays le plus vieux du monde avec
un âge moyen de 41 ans. La France est en meilleure posture du fait d’un indice de
fécondité (2) élevé pour l’Europe.
Sur les rapports Sud-Sud : rapports de force Chine/Inde ? La Chine et l’Inde repré-
sentent déjà plus de la moitié de l’humanité avec des populations plus jeunes
aussi, malgré le vieillissement. La population indienne dépassera la population
chinoise du fait d’une natalité bien supérieure ? Qu’adviendra-t-il de l’Afrique
noire (800 millions d’habitants en 2009 et 2 milliards en 2050 ?) confrontée à une
croissance démographique supérieure à la croissance économique. Quelle sera
l’incidence du Sida en Afrique ?
II. LES DYNAMIQUES MIGRATOIRES INTERNATIONALES
A. Les migrations “économiques”
- mondialisation et mouvements de population
La mondialisation économique a fait reculer la pauvreté et le sous développement dans
EPREUVES SPECIFIQUES
222 annales officielles
8. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
certaines parties du monde. Elle renforce aussi les écarts de revenus entre les pôles de
richesses et les espaces périphériques, facilite les transports, les informations (TIC),
renouvelle les imaginaires. La constante augmentation du nombre de migrants est un
bon révélateur du processus de mondialisation. Certains auteurs ont parlé de “réponse
migratoire” pour qualifier les mouvements de population qui sont guidés par la volonté
d’accéder à une vie meilleure. Le nombre de migrants (personnes ayant quitté leur pays
pour vivre et se fixer dans un autre pays pour au moins un an) dans le monde est estimé
200 millions de personnes soit environ 3% de la population mondiale. L’arrivée de
migrants est-elle une solution pour compenser le vieillissement des populations du
Nord ?
- les flux de main d’œuvre des régions jeunes et pauvres vers les régions vieilles et riches
Il existe de grandes disparités entre les pays : 63% des migrants résident dans les
pays développés et 34% dans les pays en développement. Dans certains pays, les
migrants représentent plus de 60% de la population (Emirats arabes). Les femmes
représentent 48% de la population migrante. La migration est concentrée sur un
nombre restreint de pôles récepteurs tels que l’Europe, les Etats-Unis, le Moyen Orient
pétrolier. Parmi les principaux pays d'origine des migrants on trouve désormais la Chine
et l'Inde. On estime que l'argent injecté dans les pays d'origine en provenance des pays
d'accueil (“remises”) est au moins égal si ce n'est très supérieur à la quantité d'aides
financières apportées par les pays dits “riches” aux pays plus pauvres. Les migrations
seront une importante variable d'ajustement d'ici 2050, échéance à laquelle 2 ou 3
milliards d'individus supplémentaires sont attendus sur la planète, alors que les effets
des modifications climatiques se feront probablement déjà sentir et que certaines zones
ne pourront plus nourrir une population supplémentaire.
- Les migrations de compétences
La fuite des cerveaux, c'est-à-dire des travailleurs qualifiés, a un impact négatif sur le
pays de départ: baisse du potentiel de production, perte de l'investissement de forma-
tion. Elle pose un véritable problème en Afrique. Cependant, il semble que l'émigration
favoriserait l'éducation dans les pays d'origine. En effet, la perspective de pouvoir
migrer inciterait les populations à étudier même si elles n'ont pas la certitude de pou-
voir partir.
La mobilité étudiante s’accélère. Pour la période 1960-2000, les effectifs d'étudiants
expatriés ont crû de 7 % annuellement. Il ya 2.5 millions d’étudiants étrangers dans le
monde. Une immense majorité est issue du Sud, à destination du Nord et principale-
ment des Etats-Unis.
B. Les migrations politiques : réfugiés, déplacés et demandeurs d’asile
- Les réfugiés ou déplacés fuient les persécutions
Le Haut commissariat aux réfugiés des Nations unies estime à 33 millions le nombre
de personnes relevant de son mandat. Les personnes réfugiées, c'est-à-dire qui
trouvent refuge au-delà des frontières nationales sont au nombre de 10 millions. Les
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 223
9. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
personnes déplacées qui fuient les persécutions à l’intérieur de leur propre pays sont
au nombre de 20 millions. Dans certains cas, la situation est plus complexe : les réfu-
giés se mêlant aux déplacés. C’est le cas du Soudan, de la République démocratique
du Congo, de l’Ouganda ou de la Serbie (Gildas Simon). Les chiffres varient d’une
année à l’autre en fonction des conflits.
- “Une géographie des guerres et des conflits”
Faire la cartographie des réfugiés c’est dresser la carte des principaux pays en conflit.
Deux principaux foyers apparaissent. Le Moyen-Orient, avec la persistance du conflit
Afghan et de la guerre en Irak. L’Afrique avec les conflits du Darfour, de Somalie, de
la guerre civile en RDC et en Côte d’Ivoire. Les flux se dirigent la plupart du temps
vers des pays proches : Iran et Pakistan pour l’Afghanistan, Syrie et Jordanie pour les
Irakiens, Tchad pour le Darfour, Kenya pour la Somalie, Equateur et Venezuela pour
les populations fuyant les FARC en Colombie, Thaïlande pour le Myanmar, Inde pour le
Sri Lanka.
- Le statut de réfugié est défini par la Convention de Genève de 1951.
Une partie des réfugiés cherche asile au Nord où le statut de réfugié défini par la
convention de Genève est difficile à obtenir. Il est de plus, malaisé pour de nombreux
Etats de faire la différence entre les réfugiés “politiques” menacés dans les pays d’ori-
gine et les personnes principalement motivées par des raisons économiques. Les pays
du Nord accueillent des réfugiés et demandeurs d’asile (environ 1 million aux EUA,
700.000 en Allemagne, 300.000 au Royaume-Uni, 200.000 en France) et ne comptent
pas de déplacés internes.
La plupart des réfugiés viennent ou se dirigent vers des pays pauvres qui doivent faire
face, pour les uns à des déperditions importantes en adultes et, pour les autres à des
dépenses insurmontables (pays d’Afrique subsaharienne). L’aide internationale est
alors indispensable.
Les camps de réfugiés, sortes de “ghettos urbains” en milieu rural, évoluent en
fonction de la situation politique dans le pays d’origine. On estime à plusieurs
millions le nombre de réfugiés qui sont rentrés chez eux ces dix dernières années.
C. Un monde en réseaux : diasporas et mobilités choisies
- Les diasporas, issues de la mobilité des hommes
Le mot est d’origine grecque et il signifie disperser. Historiquement le mot a été
appliqué à la diaspora juive, aujourd’hui il est utilisé pour désigner des communautés
dispersées dans le monde et partageant une même identité. Les diasporas sont orga-
nisées en réseaux qui continuent à générer des déplacements de populations.
La diaspora juive joue un rôle primordial dans les relations entre les Etats-Unis et
Israël qui a accueilli une bonne partie des 3 millions de juifs vivant dans l’ex-URSS.
La diaspora chinoise reste la plus importante numériquement (40 millions). Ancienne,
elle a repris depuis la fin de la guerre du Vietnam et la fin de l’ère maoïste. Cette
diaspora constitue un facteur important du décollage de la Chine.
EPREUVES SPECIFIQUES
224 annales officielles
10. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
La diaspora libanaise est constituée de départs qui n’ont pas cessé depuis deux
siècles, mais la guerre du Liban (1975-1990) a accéléré les migrations de population
qui concernent désormais toutes la “mosaïque” libanaise. Elle assure la survie des
communautés locales et contribue à entretenir la guerre en armant les milices qui
dévastent le pays.
La diaspora turque parfois qualifiée de “nouvelle diaspora” est constituée de plus de
6 millions de personnes vivant essentiellement en Europe (2.5 millions en Allemagne)
entretient des relations étroites avec la Turquie.
- “La planète nomade”
Alors que les flux de populations du Sud vers le Nord connaissent de nombreuses
restrictions, les mobilités du Nord vers le Sud explosent. On comptait environ
170 millions de touristes internationaux en 1970, on en compte près de 900 millions
aujourd’hui. C’est un secteur en pleine croissance (5% par an) surtout vers l’Asie et
l’Afrique. Le tourisme contribue à la mise en réseau du monde.
Si les pays du Nord restent les grands pourvoyeurs de touristes, certains pays du Sud
comme la Chine, l’Inde, le Mexique, le Brésil sont appelés à jouer un rôle de plus en
plus important. Les échanges sont essentiellement intra-régionaux : entre pays
européens, entre pays asiatiques et dans le continent américain entre l’Amérique du
Nord et les caraïbes. Les flux sont sujets à de grands changements annuels liés
aux difficultés économiques dans les pays du Nord (crise, chômage), aux tensions
géopolitiques (attentats, conflits armés) et aux risques (SRAS, tsunamis).
Le tourisme représente près de 10% du PIB mondial et emploie 8% de la population
mondiale. Les grands acteurs économiques du Nord accaparent les transports, les
chaînes hôtelières (Holidays Inn, Accor). Le tourisme est néanmoins une source de
devises inestimable pour un certain nombre de pays en développement (Maroc,
Tunisie, Egypte, Kenya, Île Maurice, Jordanie…). Les recettes touristiques sont loin
d’être négligeables pour ces pays, mais le tourisme apporte aussi des déséquilibres
(nouveaux modes de vie, destruction de sites, exploitation sexuelle des enfants). Un
éco-tourisme, plus respectueux des cultures des pays d’accueil est aujourd’hui prôné
par certaines ONG.
III. LES DYNAMIQUES INTERNES
A. Un phénomène planétaire: la métropolisation du monde
- L’urbanisation est un aspect majeur des évolutions du monde contemporain
Le monde comptait 276 agglomérations de plus de 1 million d’habitants en 1990,
il y en avait 400 en 2000 et il y en aura sans doute 550 en 2015. La moitié de
la population mondiale est urbaine, les deux tiers en 2030. L’époque actuelle se
caractérise par une métropolisation accrue. A côté des grandes villes des pays
occidentaux surgissent des très grandes villes dans les pays en développement. La
moitié des villes millionnaires sont en Asie, en Amérique latine et en Afrique qui
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 225
11. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
comptent aussi la majorité des grandes métropoles mondiales. La poussée urbaine
est ralentie au Nord, elle est très forte au Sud. L’Asie est en cours d’urbanisation
accélérée et, en 2020 une dizaine de mégapoles avoisineront les 20 millions d’ha-
bitants. En Afrique d’énormes agglomérations se forment comme Lagos qui avait
2 millions d’habitants en 1975 et plus de 11 millions aujourd’hui. On estime que
la population urbaine pourrait y doubler dans les vingt prochaines années, cela
s’explique en grande partie par un fort exode rural.
- Les transformations des espaces urbains
L’urbanisation est une concentration de population qui se mesure quantitativement
mais elle transforme les territoires et les individus. Les métropoles drainent les
populations rurales, organisent, dominent. On assiste à un renforcement des méga-
poles comme celle qui s’étend de Boston à Washington, celle qui va de Tokyo à
Hiroshima ou de la mégapole d’Europe occidentale moins continue.
Développement des façades maritimes.
Les bidonvilles (slums, favelas, kampongs) abritent déjà plus d’un citadin sur trois.
Ils coexistent avec les “enclaves résidentielles” des “gated communities”. Les villes
connaissent une évolution vers une urbanité discriminante et un repli identitaire.
Défi écologique avec la généralisation de la voiture.
- Dynamiques urbaines et tensions ethniques
Les communautés ethniques qui se constituent dans les grandes métropoles
s’affrontent parfois comme ce fut le cas au Royaume-Uni. L’exemple de Los Angeles
fournit un bon exemple des recompositions ethniques où les “Blancs” qui la
peuplaient à 92% sont minoritaires dès 1990. La proportion des Hispaniques est
passée en 30 ans de 2% à 33%, celle des Asiatiques de 2% à 10% (C. Manzagol).
Ces changements révèlent la nature des tensions inter-raciales. Le ghetto noir se
sent menacé et cerné par les quartiers hispaniques. Hispaniques et Asiatiques
réclament au conseil municipal une représentation plus conforme à leur nombre.
B. Les diversités des dynamiques démographiques à l’échelle des pays esquissent
de nouveaux rapports de force
- La situation dans les pays de la Triade
Le vieillissement de la population européenne du fait de l’effondrement de la
fécondité est entrain de provoquer un véritable choc démographique. L’UE
doit trouver une réponse au financement des retraites (augmentation des cotisations,
allongement de la durée du temps de travail, réduction des prestations,
développement des fonds de pension), et trouver un financement pour les nouvelles
dépenses de santé. Les défis sont multiples : vieillissement, tensions sur les systèmes
de protection sociale, diversité des marchés intérieurs, modèle de consommation inex-
tensible à l’ensemble de la planète. Les réponses lorsqu’elles existent restent souvent
nationales.
EPREUVES SPECIFIQUES
226 annales officielles
12. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
Au Japon le vieillissement de la population risque de lui faire perdre sa puissance
économique. Les retraites sont menacées mais également toute la hiérarchie de la
société (salaires au mérite, fin des trois générations vivant dans le même foyer,
nécessité d’augmenter le taux d’activité des femmes et recul de l’âge de la retraite).
Aux Etats-Unis le vieillissement est moins important du fait d’une politique d’immi-
gration active qui renoue avec les grandes périodes du passé mais l’avenir des
différents régimes de retraite est d’autant plus menacé qu’il est largement financé
par la capitalisation.
- Dans les pays émergents : le poids du nombre
La relation entre la maîtrise de la croissance démographique et la croissance éco-
nomique est ici capitale (différence Chine / Inde). Le rôle des gouvernements et les
politiques mises en place sont donc essentiels. On retrouve encore la problématique
du développement/sous-développement. A terme le poids de la population chinoise
est un atout fort face aux EUA à niveau de développement égal (idem pour l’Inde).
La jeunesse de la population et la faible mortalité nécessitent de forts besoins édu-
catifs et sanitaires. La question du vieillissement va néanmoins se poser très vite
alors que les systèmes de protection sociale (systèmes de retraites) sont faibles.
- Dans les PMA : l’accroissement naturel handicape encore le développement
Pays où la croissance démographique (même si le nombre de pays d’Afrique noire
connaissent désormais un ralentissement de l’accroissement naturel) handicape
encore largement le développement, pérennisant les plus mauvais indicateurs
(mortalité infantile, IDH…) mais la situation s’améliore hors des zones de conflit,
sauf dans les pays où l’incurie de l’Etat favorise l’extension du SIDA.
Difficultés à financer les besoins en “investissements démographiques” Les campagnes
.
du continent le plus rural de la planète se vident dans des mégapoles. Les zones
d’habitations informelles se développent et c’est ici que se préparent d’après l’ONU,
“les conflits du futur”. La tentation de l’émigration en Afrique prive les Etats de leurs
forces vives.
C. Quelles politiques de la population ?
- L’impact des politiques démographiques sur l’avenir des populations
Il reste des populations encore jeunes mais comme on l’a vu le vieillissement des
populations est une tendance lourde. Les populations qui connaissent une politique
efficace de limitation des naissances vieillissent plus vite : c’est le cas de la Chine
dans un terme assez proche. La politique drastique de l’enfant unique a aussi
des effets “collatéraux” comme la forte masculinisation de la population qui va
provoquer un problème de célibat pour des millions de jeunes. La chute de la fécon-
dité fait que le renouvellement des populations n’est plus assuré.
Deux facteurs peuvent freiner le vieillissement au niveau des Etats : les migrations
de populations qui permettent, à travers un dynamisme démographique accru un
rajeunissement (différence entre les EUA, l’Europe occidentale et le Japon), ou bien
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 227
13. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
des politiques de soutien à la natalité (France tout au long du XX ème siècle).
- Statut et identité du “migrant”
Un premier exemple peut être pris à partir de l’intégration des étrangers dans l’UE.
L’UE compte environ 25 millions d’étrangers essentiellement concentrés dans quatre
pays : Allemagne, France, Espagne, Royaume-Uni. La convention de Schengen
règlementer la circulation des personnes qui n’est pas totale dans l’UE. La question
de l’intégration des étrangers reste le fait de politiques et de traditions nationales.
On oppose généralement de modèle républicain français d’assimilation, aujourd’hui
en crise, au modèle de la société multiethnique du Royaume-Uni. L’Allemagne a
modifié son Code de la nationalité pour tenir compte du droit du sol et se rappro-
cher de la législation des autres pays de l’UE.
Aux Etats-Unis le nombre de personnes d’origine hispanique atteint désormais
le chiffre de 45 millions. Ce chiffre pourrait doubler d’ici 2050. Les hispaniques
représentent le tiers de la population de la Californie et du Texas, plus de 40%
au Nouveau Mexique. Défi hispanique, voire “cauchemar hispanique” pour S.
Huntington. Le pays est-il en passe d’évoluer vers deux peuples dotés de deux
cultures ?
- Les problématiques induites par les dynamiques démographiques. Comment gérer
l’explosion démographique et le développement durable ? On retrouve la relations
entre le nombre et le niveau de vie (Malthus, Meadows, Brundtland). D’ici 2050 les
besoins alimentaires devraient doubler. Comment nourrir les hommes ? Avec quel
productivisme, quel mode de vie, quel “impact écologique” ? La crise écologique
(sols pollués, épuisés, eau gaspillée, réchauffement de la planète) s’ajoute à la
crise sociale (émeutes de la faim). Les défis pour les Etats sont multiples, leurs
résolutions dépendront de réponses globales mais aussi locales.
Conclusion
Les dynamiques démographiques et leurs incidences économiques, sociales, géopo-
litiques témoignent des niveaux de développement comme de la plus ou moins
grande efficacité des politiques publiques.
Mais, et c’est un des atouts de la démographie, ces dynamiques permettent de
dresser l’esquisse d’un tableau des populations d’ici quelques temps à l’échelle du
monde (9 milliards d’habitants vers 2050 ?) ou des pays (rapidité du vieillissement,
besoin de migrants, système éducatif) et de définir des mesures aptes à répondre
aux problèmes qui s’annoncent. En “signant l’état du monde” elles posent
clairement la question du devenir de notre planète dans la mondialisation.
Croquis
Les migrations internationales de population au début du XXIème siècle.
EPREUVES SPECIFIQUES
228 annales officielles
14. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
Principaux points à cartographier :
Représenter et hiérarchiser les principaux flux de migrants par des flèches
Les migrations économiques
. pays de départ
. pays d’arrivée
. Corridors migratoires et zones de tension migratoire (Méditerranée, frontière
Mexique / EUA)
. pays de transit : Mexique, Maroc, Libye, Turquie…
. espace Schengen
. envoi des “remises”
Les migrations politiques
. zones de troubles fuies par les populations
. principales zones de réfugiés
Les migrations climatiques
. avancées des déserts et déplacement des populations (Sahel)
. régions à risques pour les populations (littoraux très bas… Pays-Bas,
Maldives)
SUJET 2
Analyse du sujet
Le thème proposé à la réflexion des candidats n’est pas déroutant mais la crise éco-
nomique qui frappe les Etats-Unis actualise et renouvelle le questionnement sur un
sujet en apparence classique. Les candidats ne pouvant pas ignorer les aspects récents
de la question, doivent néanmoins les replacer dans un contexte historique plus vaste
dans le seul but d’apporter une réponse à la question posée.
L’analyse du libellé doit permettre d’éviter toute confusion avec des problématiques
proches. Il faut d’abord préciser ce qu’il faut entendre par le mot empire qui désigne
traditionnellement un ensemble de territoires sous l’autorité ou la dépendance
d’un pouvoir. L’empire américain qualifie la domination, voire l’influence exercée par
les Etats-Unis au plan mondial. L’originalité est ici, que contrairement aux autres
empires qui se sont succédés dans l’histoire, les Etats-Unis ne cherchent pas à annexer
des territoires mais à les contrôler.
Les Etats-Unis première puissance économique, militaire, de la planète ont pour
ambition déclarée de faire triompher, y compris par les armes, les valeurs de la démo-
cratie et du libéralisme partout dans le monde. Ils se déclarent “l’empire du bien”.
Le sujet est posé sous une forme interrogative ce qui doit amener les candidats à
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 229
15. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
apporter des réponses qui peuvent différer d’un devoir à l’autre sur “la fin de l’empire“.
L’évaluation ne se fera pas à partir d’une réponse attendue, mais de la capacité des
candidats à faire un devoir démonstratif à partir de faits signifiants couvrant tout le
champ du sujet (aspects géoéconomiques, géopolitiques, culturels).
Plan proposé
L’effondrement de l’URSS, la fin de la Guerre froide et le triomphe de l’économie de
marché en République populaire de Chine ont fait des Etats-Unis d’Amérique “l’hyper-
puissance” (H. Védrine) de la fin du XXe siècle. La domination américaine semble sans
partage, assiste-t-on alors à “la fin de l’Histoire” ? (Francis Fukuyama). L’extraordinaire
rebond économique des années 1990, le recul du chômage, le succès des “start-up”
américaines, faisait que l’on parlait de New-Age. Le XXIe siècle serait américain.
Les attentats du 11 septembre 2001 sur le World Trade Center de New York montraient
de manière singulière et symbolique (c’est la première fois que les Etats-Unis sont tou-
chés sur leur territoire) la vulnérabilité d’une hégémonie contestée par une partie du
monde. En réalité la décomposition du système américain avait fait l’objet de nom-
breuses analyses dès les années 1980. Depuis lors, les difficultés liées à l’enlisement
militaire en Irak, puis à la crise des “subprimes” n’ont fait qu’accélérer le processus
de décomposition, annonçant la fin de l’hégémonie américaine.
Mais le déclin américain n’est-il pas relatif et grandement lié à un phénomène de
rattrapage des autres puissances ? Les Etats-Unis ne sont-ils plus que la première
puissance d’un monde multipolaire et multiculturel ? La récente élection de Barack
Obama ne montre-elle pas aussi, l’extraordinaire capacité de rebond des Etats-
Unis en préfigurant une “nouvelle donne” pour l’Amérique et pour les relations
internationales ?
I. UN EMPIRE ÉBRANLÉ
A. La décomposition du système américain
- La puissance américaine peut-elle soutenir un empire global ? L’ouvrage d’Emmanuel
Todd, Après l’empire, paru en 2002, analyse la décomposition du système américain
qui n’est plus capable selon lui de dominer seul le nouveau siècle. Les Etats-Unis
jusqu’à une période récente étaient facteur d’ordre mondial, ils apparaissent de plus
en plus comme facteur de désordre. L’Amérique en serait réduite à attaquer des adver-
saires insignifiants, ce qui n’est pas une manière de se définir de façon convaincante
comme fort, pour prétendre rester la puissance indispensable au monde. E. Todd
reprend la thèse du “micromilitarisme théâtral”, en fait c’est l’Amérique qui ne peut
plus se passer du monde, projetant son désordre interne sur la planète. Dès lors
l’Amérique maintien son activité guerrière au sein de l’Eurasie pour maintenir sa “cen-
tralité” financière.
EPREUVES SPECIFIQUES
230 annales officielles
16. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
- Le déficit du commerce extérieur est “un gouffre sans fond”. Le creusement du défi-
cit résulte des effets de la concurrence asiatique dans les industries traditionnelles
mais il concerne aussi structurellement la haute technologie. Pour enrayer cette
dégradation les Etats-Unis manipulent le dollar, multiplient les barrières non
tarifaires et les subventions. Le crédit et la surconsommation des ménages favorisent
une bulle spéculative génératrice de désordres planétaires.
- L’ampleur du déficit budgétaire, dopé après le 11 septembre par l’exercice de la
puissance militaire. A cela s’ajoute les déficits des Etats et des collectivités territoriales.
- “L’Amérique en faillite ?” L’ampleur de l’endettement américain (dette publique, dette
des ménages, dette des entreprises) atteint des proportions abyssales et pèse sur les
grands équilibres mondiaux. Les Etats-Unis sont en position de débiteur net vis-à-vis
du reste du monde, mais la dette étant libellée en dollars, ce sont les prêteurs qui
assument les risques de change.
B. L’empire défié : le choc du 11 septembre 2001
- Depuis la fin de la guerre froide, les Etats-Unis “gendarmes du monde”, agissent par-
tout dans le monde au nom des valeurs de la démocratie libérale visant à instaurer un
“nouvel ordre mondial” Ils interviennent dans le conflit Yougoslave, en Afrique (Zaïre,
.
Somalie, Libéria), en Afghanistan, mènent la guerre du golfe en 1991 pour chasser
Saddam Hussein du Koweït. Les attentats du 11 septembre 2001 entraînent un
changement profond. Les Etats-Unis touchés sur leur propre territoire par les atten-
tats menés par AL-Qaïda semblent vulnérables face au terrorisme. Ils lancent alors
une véritable croisade contre les “Etats voyous” et interviennent en Irak en mars
2003, contre l’avis des Nation-Unies, en violation du droit international. La perte de
légitimité est flagrante.
- Les actions menées en Afghanistan (2001) et en Irak (2003) par la première
puissance militaire du monde s’enlisent dans une guerre sans front faite de guérilla et
d’attentats. L’image des Etats-Unis est ternie, les intérêts américains et ceux de leurs
alliés sont partout menacés dans le monde comme le montrent les attentats d’Aden,
de Djedda, de Riyad, du Sinaï, de Sharm el-Sheik, de Karachi, de Casablanca, des
Philippines, de Madrid et de Londres.
- Les Etats-Unis ont multiplié, sans grand succès, les sanctions contre les pays
ennemis. Elles vont de l’embargo général, à des mesures spécifiques telles que
le blocage des avoirs dans les banques aux Etats-Unis. Elles nourrissent partout
l’anti-américanisme qui se manifeste lors des réunions de l’OMC ou du G8.
- Les Etats-Unis sont pris dans le piège de jeux contradictoires : ils soutiennent les
monarchies pétrolières du golfe et défendent leur allié Israélien, ils tentent de se
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 231
17. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
rapprocher des anciennes républiques d’Asie centrale au risque de mécontenter la
Russie qui se sent encerclée. Leur intervention en Irak semble contre productive dans
la mesure où elle fait le jeu de l’Iran chiite. Barack Obama, nouvellement élu, vient de
décider le retrait des troupes de l’Irak.
C. La crise des subprimes : la fin de l’hégémonie américaine ?
- La crise des subprimes porte-t-elle en germe la fin de l’hégémonie américaine ? Pour
Laurent Carroué (Images Economiques du Monde 2009) il faut réinscrire cette crise
dans toutes ses dimensions sociales, territoriales et géopolitiques. La crise interroge
sur le devenir de la puissance des Etats-Unis car elle “apparaît bien comme une
crise systémique qui s’inscrit dans un cadre plus large avec la chute du dollar, la crise
énergétique et l’impasse stratégique des bourbiers Irakiens et Afghan. Elle signe une
fin de cycle historique du fait des contradictions accumulées en interrogeant le cœur
même du modèle de développement états-unien”.
- La crise qui secoue l’économie mondiale est la plus grave que le monde ait connue
depuis 1929. Elle est née aux Etats-Unis à l’été 2007 sur le marché des crédits hypo-
thécaires à risques, les subprimes. L’augmentation des taux de remboursement ruine
5 millions de ménages américains et fait peser des risques d’implosion sociale. La
crise immobilière devient financière entraînant la nationalisation des deux agences
de crédits hypothécaires Fannie Mae et Freddie Mac. A l’automne 2007 elle se géné-
ralise au cœur du système financier américain pour s’étendre du fait des liens
financiers transcontinentaux tissés entre les pôles dominants (début de l’année 2008)
à l’ensemble des places financières, notamment européennes.
- La faillite de la banque Lehman Brothers le 15 septembre 2008 peut être comparée
pour son importance au jeudi noir de 1929, elle clôt le cycle dominé par l’ouverture
des frontières et la dérégulation, mais aussi la suprématie absolue des Etats-Unis et
de l’Occident dans le pilotage de l’économie de marché (N. Baverez). La crise menace
toute l’économie du capitalisme mondialisé. Des secteurs clés comme celui de l’auto-
mobile sont particulièrement touchés. L’Europe et le Japon sont plongés dans la
récession. La crise s’étend aussi aux pays émergents. Le taux de chômage s’envole ;
Les Etats sont appelés au secours, aux Etats-Unis Citigroup et Bank of América sont
de facto nationalisés. Le sommet du G20 à Londres en appelle au moins verbalement,
à l’esquisse d’une gouvernance mondiale légitime et donne plus de moyens au FMI.
Est-ce la fin du mythe de l’autorégulation et de l’hyperpuisssance américaine ?
II. LA RÉSISTANCE DE LA RÉPUBLIQUE IMPÉRIALE
Le déclin des Etats-Unis d’Amérique est souvent présenté comme irrémédiable, il
préfigurerait la fin de l’empire. Force est de constater que par bien des aspects la
EPREUVES SPECIFIQUES
232 annales officielles
18. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
puissance américaine se manifeste plus que jamais sur l’ensemble de la planète.
A. Une hégémonie économique confortée par la mondialisation
- Avec seulement 5 % de la population mondiale les Etats-Unis disposent de près du
tiers de la richesse mondiale.
- La domination américaine est particulièrement forte dans le secteur des hautes
technologies. Les Etats-Unis sont passés maîtres dans le processus qui mène de
l’innovation à la production et à la diffusion de nouveaux produits à l’échelle mon-
diale. Ils sont à la pointe dans les technologies de l’information, des nanotechnolo-
gies, du génie biologique, des machines outils, de l’avionique, des moteurs (G. Dorel).
- Les FMN américaines exercent un pouvoir économique mondial, elles représentent le
tiers des sociétés du top 100. Parmi les firmes multinationales on citera : Général
Motors, Ford, Général Electric, Exxon, Chevron, IBM, Texas Instruments, Dell, HP, Intel.
- L’industrie aéronautique (Boeing, Lookheed et Raytheon) malgré la concurrence
d’Airbus reste la première du monde.
- Microsoft, Cisco, Google règnent sur la cyberplanète.
- Wal-Mart est le premier groupe mondial de la grande distribution.
- Les IDE américains dans le monde se sont considérablement développés avec la mon-
dialisation. Les implantations sur le marché européen, les délocalisations des indus-
tries de main d’oeuvre vers les pays émergents (Chine) ou l’Amérique latine (Mexique)
participent à la mise en place de la nouvelle DIT.
- La puissance de l’agro industrie et l’arme alimentaire. La diffusion des OGM dans le
monde (Monsanto).
- Le choix du libre échange généralisé que le gouvernement essaie d’imposer (négo-
ciations au sein de l’OMC) et la suprématie du dollar principale monnaie de réserve des
banques centrales et monnaie des échanges internationaux.
- Le rôle du NYSE (40% de la capitalisation boursière mondiale) et du Nasdaq. Les
fonds de pension.
B. Une puissance militaire globale
- Le budget américain de la défense représente à lui seul près de la moitié des
dépenses militaires de la planète. Les commandes de l’Etat fédéral font vivre un gig a n-
tesque complexe militaro-industriel (Lookheed Martin, Boeing, Raytheon, General
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 233
19. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
Dynamics) qui mobilise les hautes technologies et accorde une part importante à
la recherche donnant à l’armée américaine un avantage technologique. Le système
échelon constitué entre autres par un réseau de satellites permet d’intercepter les
télécopies, les communications téléphoniques ou les courriels sur toute la planète.
- La dissuasion nucléaire, le “bouclier antimissile” qui sanctuarise le territoire, la lutte
antiterroriste et la capacité de déploiement de forces partout dans le monde consti-
tuent les piliers de la stratégie américaine de défense.
- Le dispositif d’emploi des forces armées américaines est mondial. Il repose sur une
structure d’états-majors dont cinq sont à vocation géographique et quatre à vocation
fonctionnelle. Les Etats-Unis peuvent ainsi déployer 400 000 soldats sur des terrains
d’opérations lointains, contre 60 000 pour la Russie.
- La puissance militaire américaine s’appuie sur un réseau d’alliances mis en place
durant la guerre froide. L’OTAN créée en 1949 pour faire face à l’URSS en est l’exemple
le plus achevé. L’OTAN s’est continuellement élargie : à la Grèce, à la Turquie, à la RFA,
à l’Espagne puis après la chute du mur de Berlin aux pays d’Europe centrale et orien-
tale (Pologne, Tchéquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Slovaquie, pays Baltes).
L’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie ont fait leur demande pour intégrer l’OTAN. La
récente intervention Russe en Géorgie est à replacer dans ce contexte. Les Etats-Unis
recherchent aussi des coalitions limitées pour la phase militaire des guerres (guerre
du Golfe, Afghanistan, Irak).
C. . Hard power et soft power
- Dans les années 1990, le secrétaire adjoint à la défense Joseph S. Nye propose une
nouvelle définition de la puissance américaine. Si le “hard power” utilise les moyens
politiques, militaires, économiques pour imposer par la coercition voire par la force sa
puissance au reste du monde, le soft power au contraire met l’accent sur la capacité
de séduction du modèle américain. C’est par la puissance douce, c'est-à-dire la capa-
cité de convaincre autant que de vaincre, que les Etats-Unis imposent au reste du
monde leurs normes, leurs valeurs (démocratie, libéralisme économique…), notam-
ment par des produits culturels comme le cinéma d’Hollywood. L’American way of life,
l’américanisation du monde, tant décriée par ailleurs, se diffuse dans le monde en
utilisant le levier de la mondialisation.
- Pour Joseph S. Nye le cinéma américain apparaît comme un élément fondamental du
soft power. Le monde entier est inondé de films américains (85% du marché mondial)
qui diffusent le bonheur consumériste des Etats-Unis. Les accords Blum-Byrnes (1946)
ouvraient déjà les écrans français au cinéma américain contre une annulation partielle
de la dette de guerre. Aujourd’hui, les séries télévisées, les blockbusters, la musique,
les parcs de loisirs (Disneyland) diffusent une culture de masse américaine.
EPREUVES SPECIFIQUES
234 annales officielles
20. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
- Pour les Etats-Unis les produits culturels étant considérés comme une marchandise,
doivent être soumis à la libre concurrence (cycle de Doha ouvert en 2001). La France
essaie de s’y opposer en mettant en avant l’exception culturelle.
- Le soft power s’exprime à travers les produits et les “marques” comme Coca-Cola, Mc
Donald’s, Levis Strauss, American Express, Microsoft, You Tube, Intel, Disney…
- Le pouvoir attractif des Etats-Unis se mesure enfin au nombre d’étudiants étrangers
présents sur le territoire national (plus du tiers des 3 millions d’étudiants à l’étranger
dans le monde). Ceux-ci, une fois les diplômes acquis, diffusent aussi le modèle
américain partout dans le monde et notamment en Asie.
Cette puissance américaine sans rivale, qui combine aussi bien le hard power que le
soft power doit être nuancée.
III LA FIN DES ILLUSIONS : LEADERSHIP PLUS QU’EMPIRE
A. L’érosion de la superpuissance américaine dans la phase actuelle de la
mondialisation
- Les déficits américains “jumeaux” sont “surfinancés” par l’étranger. Certes la
machine américaine “recycle” cet apport extérieur, soit aux USA, soit en réintégrant
une partie des bons du trésor financés par la Chine ou le Japon vers des IDE. On parle
d’un “équilibre des déséquilibres”. En valeur, les exportations de marchandises améri-
caines sont au 3e rang mondial. Les Etats-Unis ont été dépassés par l’Allemagne en
2003, puis par la Chine en 2007. La puissance financière vient d’être considérablement
affaiblie par la crise actuelle. La surconsommation économique comme substitut de
puissance ne peut se poursuivre éternellement.
- Plusieurs débats importants peuvent contribuer à fragiliser dans un premier temps
les Etats-Unis : les inégalités et la redistribution interne de la richesse (40 millions
d’américains sans protection sociale), une certaine perte de confiance dans la dette
américaine, la tournure des évènements en Afghanistan et en Irak faisant peser des
doutes sur la supériorité stratégique absolue.
- Un risque de repli sur l’Etat-Nation : c’est ce dernier qui démontre pour l’instant la
solidité de ses structures si l’on ne parvenait pas à consolider les instances de régu-
lation supranationales et que l’espace économique mondial se fragmentait. Les “Big
Three” menacés de disparition font appel à l’intervention publique pour éviter le
naufrage. La crise pose à la nouvelle administration américaine des défis de politique
publique et industrielle inédits.
>>
EPREUVES SPECIFIQUES
annales officielles 235
21. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
- Indice ambigu : l’entreprise. Si l’on prend en considération le classement des 500
premières entreprises mondiales par leur capitalisation depuis 1998 on constate que
la part des Etats-Unis est passée de 58% à 41%, celle de l’Europe est restée stable
(1/3 du total), tandis que la part du capital des pays émergents est passée de 2% à
20%. Cependant, en comparant les entreprises européennes et américaines dans le
top 500, on se rend compte que les européennes sont bien plus vieilles. En Europe,
3 ont été créées après 1975, contre 26 aux Etats-Unis. Ceci montre l’importance de
l’innovation technologique, la force du lien entre les entreprises et les meilleures uni-
versités, le rôle aussi du brain drain. Le tout aboutissant à une économie américaine
toujours plus schumpétérienne où la “destruction créatrice” semble plus opérante
qu’en Europe, donc mieux à même de relever les défis.
B. L’évolution de la posture internationale des Etats-Unis
- L’essor économique des années 1990 avait nourri aux USA un “complexe du
vainqueur”, et une tendance à l’unilatéralisme. Cependant l’administration Clinton
promouvait encore l’idée assez positive que la mondialisation (globalisation) et la
démocratisation marchaient de concert, même si les salariés étaient inquiets pour
leurs emplois, que les inégalités ne régressaient guère, et que le terrorisme se
montrait de plus en plus menaçant.
- L’administration Bush a rompu avec l’idée d’une “approche coopérative” de la globa-
lisation. Les attentats du 11 septembre lui font désigner un nouvel ennemi, elle
estime avoir droit à la guerre préventive, le tout avec l’intériorisation du concept de
“choc des civilisations”. Les Etats-Unis pensent être en droit d’exporter la démocratie
(et le marché) par la force.
- Le nouveau pouvoir, celui d’Obama, même s’il manifeste la plus grande prudence et
un vrai souci de continuité, est également soucieux d’une meilleure image extérieure
des Etats-Unis, et va sans doute faire preuve d’une bien meilleure capacité d’écoute
et de dialogue. Cependant la gravité de la crise économique est un élément dont il
faut aussi tenir le plus grand compte : il n’est pas exclu que dans le but de protéger
les secteurs économiques menacés, la nouvelle administration fasse preuve d’unilaté-
ralisme, voire de protectionnisme ou de nationalisme.
- En participant au sommet du G 20 à Londres le 2 avril 2009 les Etats-Unis d’Obama
ont accepté l’idée d’une gouvernance mondiale légitime et partagée. Américains,
Russes, Chinois, Brésiliens, Européens se sont accordés sur une lecture commune de
la crise et ont décidé d’injecter jusqu’à 1350 milliards de dollars pour relancer l’éco-
nomie mondiale. L’accord reste flou sur le financement mais il montre bien que les
Etats-Unis ne sont plus les seuls maîtres à bord. Le “grand gagnant” a été le Fonds
monétaire international dont les ressources vont tripler.
- Les désordres financiers, la crise alimentaire, l’inégal développement, le réchauffement
EPREUVES SPECIFIQUES
236 annales officielles
22. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
climatique, les conflits régionaux, la prolifération nucléaire, l’aggravation des tensions
Nord-Sud appellent des normes et des régulations communes. L’action américaine sera
décisive mais elle nécessitera plus de multilatéralisme.
C. La première puissance parmi d’autres
Le nouveau positionnement américain est le résultat d’une évolution due à plusieurs
causes. Pierre Hassner, directeur de recherches au CERI résume bien la situation.
- D’abord le bilan désastreux de George W. Bush, notamment en Irak, ce qui à entraîné
la chute de popularité des Etats-Unis chez leurs alliés traditionnels (Allemagne,
Turquie) et la méfiance chez les autres.
- De façon plus structurelle la montée en puissance de pays émergents et le partage
de la puissance notamment avec la Chine et la Russie qui annoncent la fin du “pré-
tendu moment unipolaire”. La Chine est le “grand challenger” tandis que la proliféra-
tion nucléaire désigne de nouveaux pôles de puissance, tel l’Iran.
- Le changement même de la nature de la puissance dans les relations internationales.
La première puissance militaire du monde à du mal à triompher des forces de guérilla,
de terroristes nationalistes ou religieux. Il faut aussi gagner la bataille de l’opinion
(Guantanamo) et financer la reconstruction (Irak) pour exercer toutes les formes de la
puissance. Ce qui paraît de plus en plus irréalisable comme le montre la permanence
de l’opposition altermondialiste dans le monde qui exprime aussi le rejet de la “culture
américaine”.
- Le dernier facteur qui contribue à dissiper l’illusion de la toute puissance américaine
est celui de la crise économique, écologique et sociale. Les Etats-Unis absorbent à eux
seuls 20% de la consommation énergétique mondiale et sont les principaux pollueurs.
Ils font figure d’accusés et jusqu’ici l’administration Bush s’est montrée dépassée ou
peu coopérative.
- Il reste pourtant aux Etats-Unis le capital humain. Celui d’une population relativement
jeune et qui profite du brain drain.
Conclusion
Les Etats-Unis n’ont pas été dévorés par le Japon comme on le croyait dans les années
1980. Seront-ils demain dépassés par la Chine ? Le pays a choisi un modèle de
croissance qui vient de s’effondrer. Leur rôle dans la mondialisation reste ambigu. Le
leadership américain demeure dans bien des domaines ; mais les Etats-Unis devront
partager leur puissance dans un monde désormais multipolaire. Ils devront accepter que
des intérêts différents des leurs soient satisfaits et faire évoluer leur mode de vie vers
un développement plus durable. Ici on peut considérer que “l’Empire” américain a vécu.
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annales officielles 237
23. Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
>> ESPRIT DE L’EPREUVE SUJET CORRIGE RAPPORT
RAPPORT
COMMENTAIRES
La moyenne générale est de 10.30 et l’écart type de 3.39. Plus des deux tiers des can-
didats ont choisi le sujet sur la fin de l’empire américain qui a été mieux traité que le
sujet 1 portant sur la démographie.
Synthèse des principales remarques faites par les correcteurs.
SUJET 1
Le sujet a semble-t-il été choisi par des candidats qui ont voulu se rassurer avec
les documents fournis et la carte à réaliser. C’est ici que l’on trouve les moins
bonnes copies, avec des candidats se contentant d’une paraphrase servile des tex-
tes sans définir convenablement les termes du sujet et ne connaissant pas les
notions démographiques élémentaires. Ce n’est que très rarement que les copies
abordent l’ensemble des problématiques : l’inégale croissance démographique
et ses implications, le vieillissement, les migrations, l’urbanisation, leurs consé-
quences de toute nature... Trop de plans ressemblent à des catalogues de remarques,
décalquant littéralement le libellé du sujet. Des compositions parfois très courtes
et incomplètes. Le sujet s’est révélé difficile. Nous avons trouvé ici un lot de copies
particulièrement faibles.
Les notes n’ont pas été relevées par les croquis jugés insuffisants, incomplets,
imprécis, s’éloignant du thème proposé. De nombreux candidats ont tenté de
compenser leurs faiblesses par des légendes inutilement bavardes (les cartes sont
parfois réduites à des légendes). De nombreuses localisations d’Etats sont sans
rapport avec le sujet, les flux pas hiérarchisés, les bassins émetteurs et récepteurs
sont souvent ignorés, les mouvements de réfugiés absents…
Les croquis réalisés ne sont la plupart du temps que la simple duplication, plus ou
moins réussie d’une carte apprise en cours. Ce type d’exercice sera abandonné par
ECRICOME pour le prochain concours et remplacé par un commentaire de carte.
SUJET 2
Sujet plébiscité par la majorité des candidats avec un niveau plus relevé. L’impression
prévaut que les meilleurs candidats ont plutôt choisi ce sujet. Quelques défauts
récurrents : la notion d’empire n’est pas définie, ni interrogée, des problématiques
sont détournées et traitent du modèle américain, du capitalisme américain ou de la
place des Etats-Unis dans le monde. La formation de l’empire américain est souvent
développée, alors que sa remise en cause qui est le cœur du sujet est envisagée
brièvement. Les correcteurs ont été frappés par le bon niveau des connaissances
laissant apparaître l’intérêt des étudiants pour ce thème. Certains correcteurs
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24. ain Histoire, géographie et géopolitique du monde contemporain
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signalent le plaisir qu’ils ont eu à corriger le sujet. Un sujet qui finalement a été
sélectif au niveau de l’actualité certains ont fait l’impasse sur la crise actuelle et de
ses enchaînements. La dimension géopolitique a été bien traitée dans les très bonnes
copies.
Au total l’impression générale qui prédomine est que les candidats ont beaucoup
appris mais qu’ils doivent aussi mieux valoriser leurs savoirs.
Des corrigés sont présentés à titre d’exemples, nous souhaitons qu’ils puissent aider
les futurs candidats dans leur préparation.
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