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Des ressources et des paradoxes inattendus dans le
management et la performance des organisations:
Cas des PME marocaines.
Rapport de thésis dans le cadre de la soutenance du diplôme de
l’Executive Doctorate in Business Adminisration de l’Université Paris Dauphine
27 Février 2009
Rachid Alami
Executive Doctorate in Business Administration
Paris Dauphine University
ralami_aroussi@yahoo.ca
TABLE DES MATIERES
Résumé………………………………………………………………………………………. 2
Abstract ……………………………………………………………………………………… 2
Introduction ………………………………………………………………………………… 3
Partie I
1.1 Théories et concepts managériaux impliqués dans cette recherche ……….. 8
1.2 Culture et management des organisations ………………………………………. 9
1.2.1 La sociologie ………………………………………………………………… 12
1.2.2 La sociologie des organisations et les écoles de pensée …………… 15
1.3 L’école classique ………………………………………………………………………. 15
1.4 L’école des ressources humaines ………………………………………………….. 18
1.5 L’école de la contingence ……………………………………………………………. 22
2. Management, culture et organisation ……………………………………………….. 25
2.1 L’importance de la culture ………………………………………………….. 25
2.2 Approche des différences culturelles ……………………………………… 28
3. La culture intégrée aux organisations et au management ……………………….. 31
3.1 Fonction et enjeux de la culture d’entreprise …………………………….. 32
3.2 Le courant de gestion comparée ……………………………………………. 33
3.2.1 Les résultats des travaux d‘Hofstede ……………………………. 35
3.2.2 Cas du Maroc …………………………………………………………. 42
3.2.3 La relation au temps ………………………………………………… 51
3.2.4 L’influence culturelle selon D’Iribarne …………………………… 53
3.5. Avantages et inconvénients des travaux antérieurs ……………………. 55
3.6 Management et environnement islamique …………………………………. 57
3.7 La particularité de chaque modèle de management ……………………… 60
4. Le management au Maroc ……………………………………………………………….. 63
5. Islam et modernité ………………………………………………………………………… 65
6. L’histoire économique de l’aire musulmane …………………………………………. 68
PARTIE II
1. Méthodologie de recherche, pertinence du sujet et hypothèses ………………… 75
2. Les hypothèses ……………………………………………………………………………. 76
3. La faisabilité ……………………………………………………………………………….. 78
4. Les outils de la recherche ………………………………………………………………. 78
5. Les variables étudiées …………………………………………………………………… 79
6. La méthode de collecte des données …………………………………………………. 84
7. Les problématiques rencontrées ……………………………………………………….. 86
8. Les échelles de mesure ………………………………………………………………….. 88
9. Les techniques statistiques utilisées ………………………………………………..... 89
Partie III
1. Résultats de l’étude ……………………………………………………………………… 90
1.1 Les fréquences des résultats principaux ……………………………………………. 90
1.2 Les analyses statistiques ………………………………………………………………. 93
1.3 La construction des facteurs d’analyse ……………………………………………… 95
2. Analyse explicative des phénomènes étudiés ……………………………………….. 96
3. Les variables explicatives de la performance ……………………………………….. 98
4. Conclusion de la partie analyse des données ……………………………………….. 102
5. Apports managériaux de l’étude ……………………………………………………….. 105
Discussion …………………………………………………………………………………….. 107
Conclusion …………………………………………………………………………………….. 108
References …………………………………………………………………………………….. 109
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Principes de l’école classique ……………………………………………… 16
Tableau 2 : Les différents systèmes de rémunération ……………………………….. 20
Tableau 3 : Principes de l’école de la contingence ……………………………………. 23
Tableau 4 : Approche managériale de la culture ………………………………………. 33
Tableau 5 : Caractéristiques des sociétés communautaires et individualistes….. 41
Table 6: Cultural dimensions variability according to Hofstede ……………………. 43
Tableau 7 : Logiques culturelles comparées……………………………………………. 53
Tableau 8 : Forces et faiblesse des modèles d’Hoftsede et de D’Iribarne ………… 56
Tableau 9 : Comparatif des dimensions managériales……………………………….. 61
Tableau 10 : Caractéristiques et contexte de l’objet de recherche…………………. 77
Tableau 11 : La faisabilité de l’étude et le cadre de travail…………………………… 78
Tableau 12 : Indicateurs de mesure des variables……………………………………… 82
Tableau 13: Avantages et inconvénients du Questionnaire auto-administré …….. 85
Tableau 14 : Avantages et inconvénients des questions fermées………………….. 86
Tableau 15 : Définition des variables indépendantes………………………………… 88
Tableau 16 : Définition des facteurs d’analyse…………………………………………. 95
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Rappel l’évolution de l’histoire du management…………………………….13
Figure 2: Les dimensions de la culture…………………………………………………… 26
Figure 3 : Comparaison des dimensions IDH et ICI……………………………………. 35
Figure 4 : Comparaison des dimensions Masculinité et ICI…………………………. 37
Figure 5 : Comparaison des dimensions Individualisme et IDH…………………….. 40
Figure 6 : Positionnement relatif des pays selon l’indice IDH……………………….. 44
Figure 7 : Positionnement des pays selon l’indice Individualisme/Collectivisme…47
Figure 8 : Positionnement relatif des pays selon l’indice ICI………………………… 49
Figure 9 : Positionnement relatif des pays selon la nature de la communication… 50
Figure 10 : Positionnement relatif des pays selon la relation au temps…………… 52
Figure 11 : Avantages compétitifs liés à l’environnement juridico-économique…. 64
Figure 12 : Evolution de l’effort relationnel du manager……………………………… 102
Figure 13 : Evolution de l’effort d’adaptation du manager…………………………… 106
1
Remerciements
Je tiens à remercier en tout premier lieu Mr Jean-François CHANLAT qui a dirigé
cette thèsis. Tout au long de ces deux années de travail, il a su orienter mes
recherches aux bons moments en me faisant découvrir au travers de son regard
d’anthropologue et de sociologue, toute la richesse scientifique et humaine de
l’histoire des organisations. Mr CHANLAT a toujours été disponible pour d’intenses et
rationnelles discussions. Pour tout cela, sa confiance, son engagement et son
soutien moral, je le remercie vivement.
Je remercie Mr Michel KALIKA qui a su mettre sur pied l’Exécutive DBA, un
programme pertinent et de qualité. Cette formation été une expérience hors du
commun, intense et m’a permis d’ouvrir mon horizon de réflexion et de pensée.
Il y a certainement un « avant l’EDBA » et un « après l’EDBA ».
Je remercie également tous les professeurs, et en particulier Monsieur Eric CAMPOY
et Monsieur Pierre ROMELEAR, de leur contribution dans la qualité, la pertinence et
la profondeur de leur enseignement.
Enfin, ce travail de recherche passionnant n’a pu être possible qu’avec l’aide
soutenue de ma famille dont je ne pourrais jamais les remercier suffisamment pour
tous les sacrifices consenties tout au long de ces années de travail.
Un remerciement tout particulier à ma mère et à mon épouse qui ont continué à
croire en moi, même dans les moments les plus difficiles et qui a toujours apporté
leur soutien et leur amour.
2
Résumé
Comment certaines entreprises marocaines arrivent-elles à être économiquement et
socialement performantes alors que leur propriétaire laissent le plus souvent imposer
une logique managériale basée sur l’émotionnel, les croyances religieuses et le
paternalisme au lieu du rationnel, la logique et de l’autonomie ? Comment, dans ces
conditions, les managers marocains ou étrangers, formés aux concepts classiques
du management occidental, arrivent-ils à gérer les défis managériaux au quotidien et
assurer la stabilité de leur entreprise? Cet article se propose, à travers l’analyse de
cas d’entreprises marocaines d’identifier les facteurs clés de succès et les leviers
inattendus de performance et de stabilité de ces entreprises et d’expliquer comment
les dimensions culturelles et religieuses sont incorporées aux notions telles que
l’amélioration continue, le travail d’équipe, la gestion des ressources humaines ou la
productivité dans un contexte de culture intense.
___________________________________________________________________
Keywords
Culture et management – Performance et productivité – Gestion des ressources
humaines – Religion et management
__________________________________________________________________
Abstract
How could some Moroccan companies be economically and socially efficient when
their owner leaves most often impose a managerial logic based on emotional,
religious beliefs and paternalism instead of rationality, logic and autonomy?
How, then, Moroccan and foreign managers, trained in the concepts of Western
management, come to manage the daily managerial challenges and ensure the
stability of their business? This article attempts, through case analysis of Moroccan
companies to identify key success factors and unexpected leverage that are used to
enhance performance and to maintain stability of these companies and it tries to
explain how cultural and religious dimensions are, in different cultural context,
incorporated into concepts such as continuous improvement, teamwork, human
resource management or productivity.
3
Introduction
"L’Allemand vit en Allemagne, le Parisien vit à Paris, le Turc vit en Turquie, mais
l’Anglais vit chez lui" (Goring, 1909). Cette citation de Goring datant de 1909 nous
rappelle que chacun regarde le monde à travers les fenêtres d’un "chez soi" culturel;
chacun agit comme si ceux qui viennent d’autres pays avaient quelque chose de
spécial (un caractère national), la norme se trouvant chez soi (Bernard, 1994). D’un
autre coté, Fayol (1918) s’exprima ainsi: « si l’on pouvait faire abstraction du facteur
humain, il serait assez facile de constituer un organisme social ».
Serait-il donc impossible de concilier la diversité des cultures avec l’universalité des
valeurs? Le management multiculturel efficace si chère aux organisations serait-il
qu’un mythe auquel les dirigeants d’entreprise veulent nous faire croire pour mieux
nous contrôler et ainsi réduire les risques tout en améliorant la performance ?
Les frontières physiques et institutionnelles ayant tendance à disparaître, il est
normal que les cultures tendent à se rapprocher. On passe donc du domaine de
l’international à celui de la globalité du monde
Cette étude ne prêtant pas apporter des réponses radicales ou définitives aux
difficultés que peuvent rencontrer les entreprises dans un milieu culturel différent.
L’être humain est un ensemble complexe, imprévisible et qui porte en lui un héritage
culturel et social et se construit également à travers ses relations avec son
entourage. Chanlat (2008) nous rappelle à ce titre que « La présence d’autrui joue
également un rôle dans la genèse de l’identité socioculturelle. Tout groupe humain
se différence au contact d’autrui. Ce double rapport (individuel et collectif) à l’altérité
pénètre tous les niveaux de la vie sociale », qui plus est dans la vie des
organisations. Cette recherche veut apporter une lumière sur un phénomène
récurent qui est celui de l’adaptation culturelle des managers qui évoluent dans des
environnements différents de leur origine. La validation des hypothèses est restreinte
à un environnement particulier. Des recherches similaires à plus grande échelle
seront présentées afin de valider ou d’invalider les résultats trouvés.
Dans la littérature sur les organisations, Gouldner (1959) cité dans Maggi (2006)
avait distingué deux modèles principaux d’étude des organisations qui sont le
modèle rationnel et le système naturel (natural-system). Thompson (1967) cité dans
Hafsi (2008) avait ajouté à cette distinction le fait que le modèle rationnel découle
d’une stratégie de système fermé et le modèle de système naturel découle d’une
stratégie de système ouvert.
4
Le premier occulte toute relation de l’organisation avec son environnement, alors que
le second en fait l’aspect principal. La première approche est foncièrement
déterministe alors que la seconde et non déterministe par excellence.
L’approche du modèle rationnel se base sur une stratégie de système fermé mettant
l’accent surtout sur la performance et l’efficacité. Dans un tel contexte l’incertitude est
occultée, toute action est opportune et son résultat est prévisible. L’organisation est
en quelque sorte autonome et indépendante de son environnement.
Dans une telle perspective, l’aspect social et culturel des ressources est occulté mais
toute l’attention est centrée sur l’utilisation et l’optimisation de ces ressources. C’est
le cas des premiers auteurs ou ce que l’on appelle les classiques comme Fayol,
Taylor, Ford ou Weber (le modèle bureaucratique). C’est encore le cas des
théoriciens du comportement comme Mayo, Fayol, Maslow, Herzberg ou McGregor
plus centrés sur des théories portant sur la motivation, le leadership et les
communications interpersonnelles.
Toutes portent sur l’utilisation des ressources, le but étant la maximisation de l’output
à partir des ressources qui sont considérées comme données et sur lesquels
l’environnement n’a aucune influence.
Dans le cadre de ce modèle, tous ces théoriciens des organisations ont abordé la
question du fonctionnement organisationnel à partir d’une multitude de points de vue
qui procèdent d’une approche déterministe où l’environnement culturel est occulté.
En définitive, durant la première moitié du siècle les théoriciens des organisations
dans leur recherche de principes universels relatifs aux structures, au contrôle et à la
performance ont ignoré d’une certaine façon l’environnement culturel. Ainsi dans leur
recherche du « one best way », des théoriciens comme Weber soutenaient que les
structures bureaucratiques étaient valables pour toute organisation et Taylor
considérait ses principes du management scientifique comme universels.
Dans les milieux de culture intense où notre étude se situe, le rôle de
l’environnement, des croyances et des traditions est déterminant. Les milieux de
culture intense dans lesquels opèrent les entreprises marocaines qui sont des
milieux caractérisés par la transcendance et l’omniprésence de la religion islamique
avec tout ce que cela comporte comme contraintes, et la conjoncture sociale et
politique dans laquelle ces organisations progressent, ont rendu complexe la
compréhension de leur fonctionnement, principalement pour des individus formés
dans les universités occidentales.
5
Nous savons que la théorie de la contingence est venue réfuter l’approche du « one
best way » pour ce qui a trait à la structuration des organisations (Chanlat, 2005).
Elle met l’accent, en particulier, sur le fait que la relation organisation -
environnement privilégie le rôle prédominant de l’environnement tel que l’ont exposé
Chanlat (1999) et Thompson (1967).
L’objectif de cette recherche vise à déceler les facteurs clés de succès des
organisations dans un milieu de culture différente, qui sont des milieux caractérisés
par des contraintes majeures et où prédominent de fortes idéologies, religions,
croyances et cultures locales, parfois en opposition aux règles classiques du
management. En particulier, je vais essayer de démontrer comment les entreprises
marocaines arrivent à performer malgré des méthodes de gestion en porte-à-faux par
rapport aux concepts classiques du management et identifier les leviers de
croissance et de performance qui assurent leur pérennité et leur stabilité. Quels sont
les facteurs clés de succès et les leviers inattendues qui résonnent et ont des effets
positifs sur la performance des individus qui sont dirigés par des managers
occidentaux ou nationaux formé dans les écoles occidentales ?
Cette étude essayera de mettre en évidence le fait que les concepts managériaux et
les théories de gouvernance et d’amélioration de la performance et de la productivité
appris tout au long de mes années universitaires n’ont pas engendré les effets
espérés dans un contexte culturel différent comme celui du Maroc. Pourquoi les
méthodes de gestion traditionnellement acceptées et enseignées dans les écoles de
management occidentales et même locales ne fonctionnent pas quand il s’agit de les
appliquer dans un contexte culturel différent ?
Telle est la question à laquelle nous essayerons de répondre. Pour ce faire, ce travail
se divise en trois parties.
La première partie présente les écoles de pensée du management des
organisations et nous conduit à travers le chemin qui nous mène à comprendre
pourquoi les théoriciens en sont arrivés à considérer la dimension humaine (donc
culturelle) comme variable critique de la gestion des organisations. Chacune des
théories (théorie classique, théorie de la contingence et théorie des ressources
humaines) sera analysée selon ses objectifs, ses mécanismes et ses principaux
élements. Chaque théorie est présentée de façon à comprendre quels en étaient les
6
enjeux, les points forts et les points faibles. Pousser par le désir continue d’améliorer
la performance des organisations, chaque théorie prend ses racines dans les
faiblesses de sa précédente pour apporter un nouveau regard sur les relations
travail-performance-individu. Parler de culture d’organisation nous impose de faire
une introduction sur la sociologie des organisations et sur les mécanismes qui
régissent les liens sociaux entre individus et comment les acteurs construisent et
coordonnent des activités organisées. Par la suite, nous essayerons de comprendre
les rapports qui régissent les relations entre gestion et culture et quels sont les
travaux qui ont été menés pour mesurer les écarts culturels entre nations et qui ont
fait naître des mots tels que « différence culturelle » ou « distance physique ». A
chaque étape, un comparatif avec, soit les concepts de l’Islam, soit l’expérience du
terrain, sera présenté afin de comprendre les enjeux de cette étude et la relation qui
peut exister entre religion et management. Différents courants d’analyse des
différences culturels seront présentés pour nous permettre de synthétiser à la fin de
cette première partie les concepts généraux de chaque modèle de management et
de les comparer. Tout au long de cette partie, nous exposerons comme éléments
comparatifs, les méthodes managériales appliquées au Maroc et les contradictions
qui peuvent en être déduites par rapport aux théories occidentales. Nous
présenterons également dans cette partie la question de l’Islam et du management
et de l’émergence d’un nouveau type de managers arabes qui tentent de concilier
valeurs managériales et valeurs éthiques islamiques afin de mieux comprendre le
phénomène nouveau d’incursion de l’Islam dans le management.
La deuxième partie sera consacrée à la présentation du cas de l’entreprise pour
laquelle j’ai travaillé pendant 4 ans laquelle a été le déclencheur du désir de faire ses
recherches sur les différences culturelles et les ressources inattendues à la base de
la performance des PME marocaines. Il sera question dans cette partie de décrire les
faits, les expériences et les anecdotes qui ont jalonnées toutes ces années de
pratique au Maroc. Il s’agit de présenter les difficultés de départ (relation
hiérarchique, difficulté de communication, pouvoir, notions classique de performance,
application des théories et modèles managériaux universels) et de résumer les
expériences locales d’autres managers à partir de questionnaire distribués.
7
Nous établirons les hypothèses de recherche à valider ainsi que la perspective
théorique appliquée tout au long de ces travaux. Nous expliquerons comment les
données ont été établies et quelles sont les variables définies et étudiées.
La troisième partie sera consacrée aux résultats de la recherche et à la validation
ou non des hypothèses de départ. Il sera question de mettre en évidence les
ressources et leviers utilisés pour améliorer la performance dans les organisations
mais également dans la gestion des équipes. Par ailleurs, je vais tenter d’expliquer
comment, grâce à ma double culture, occidentale et arabe, à mon expérience
personnelle et aux études de terrain, les managers de type occidental ont su
adapter les concepts généraux occidentaux de management et de gouvernance aux
subtilités locales. En particulier, l’introduction dans le langage managérial standard
de concepts religieux et culturels tels que des notions d’éthique religieuse, de
récompense divine, de rassemblements familiaux autour d’un repas ou encore de
notion de chef de famille.
On verra enfin que la performance de certaines entreprises marocaines n’est pas
uniquement le résultat d’une stratégie de croissance ou de l’amélioration de la
productivité. Derrière cette performance, se cache en fait un conflit permanent ente
éthique universaliste (croyance religieuse, notion du bien et du mal, droits de
l’homme et de la femme) et éthique individualiste (comportement d’affaires,
corruption, fraudes, opportunisme). Pourquoi ce paradoxe existe-t-il entre sphère
privée et sphère publique et quel est son impact sur les méthodes de gestion?
8
Partie 1
1.1 Théories et concepts managériaux impliqués dans cette recherche
Etudier l’influence de la culture sur la performance des organisations nécessite
d’aborder un ensemble de théories et de concepts managériaux afin de comprendre
pourquoi les chercheurs en sont arrivés à considérer les divergences cultuelles
comme une variable critique des organisations. En effet, aborder la culture induit de
parler de sociologie. Chanlat (2006) nous rappelle que « l’individu se construit par
rapport à l’autre ». Pour comprendre les relations individuelles et communautaires, il
faut comprendre le lien social et les valeurs qui poussent à agir. De là, on est amené
à présenter certaines contributions de la sociologie des organisations si l’on veut
comprendre comment les acteurs construisent et interagissent au sein des
organisations. N’oublions pas que l’objectif avoué des entreprises privées est d’être
rentable et productive. Les managers cherchent donc à maximiser les ressources
pour améliorer la performance de leur entreprise. Ce qui fût déjà le cas au début de
l’ère industrielle et l’invention de la théorie classique de l’organisation scientifique du
travail. Cette théorie est venue répondre, par la mise en place de méthodes
rationnelles de production de masse, à une forte demande. Les ingénieurs ont donc
répondu à leur façon aux contraintes du marché. Leurs réponses ont engendré de
nouvelles questions auxquelles la théorie de la contingence est venue répondre mais
tout en engendrant elle-même de nouvelles questions auxquelles la théorie des
ressources humaines a essayé d’y répondre. Cette spirale sans fin de questions-
réponse nous a mené de nos jours à apporter une petite pierre à l’édifice en
construction des sciences de gestion. Chaque théorie vient répondre aux défis de
son époque tout en se construisant sur les fondements de celles qui l’ont précédé.
Une sorte de fil conducteur nous guide tout au long de cette recherche pour
comprendre pourquoi en est on arrivé à disséquer les différences culturelles et en
faire une autre variable a prendre en considération si l’on veut « comme à
l’accoutumée » améliorer la performance des organisations.
9
1.2 Culture et management des organisations
L’influence de la culture et des traditions sur le management et la performance des
organisations n’a pas été toujours considérée comme un facteur critique. Il a fallu
attendre l’apparition d’auteurs comme Durkheim, Marx, Weber, Mayo ou d’autres
socio-anthropologues pour comprendre les ressorts de l’action humaine, les
motivations qui se cachent derrière toute action individuelle ou encore les luttes de
pouvoir. Les socio-anthropologues ont compris l’importance de l’encastrement
culturel dans les sphères de la vie courante et en particulier dans les organisations et
la manière dont elles sont gérées.
Cependant, le chemin qui a mené à la reconnaissance de la culture comme un
élément clé de la performance des organisations a été long et laborieux. En effet,
plusieurs écoles de pensée ont pris le devant de la scène et ont constitué, chacune à
leur époque, le modèle à suivre comme le modèle du « one best way » très cher à
Ford et Taylor, même si Taylor s’est intéressé aux aspects administratifs et à la
structure organisationnelle comme moyen d’améliorer la performance. . On ne peut
donc pas introduire le management interculturel et l’influence des traditions et de la
culture sans introduire les différents courants de pensée qui se sont succédés depuis
le 18ieme siècle, en commençant par le fameux "Recherche sur la nature et les
causes de la richesse des nations" (Adam Smith, 1776) et qui ont permis
l’émergence de nouvelles idées et théories.
Adam Smith a été le précurseur des théories scientifiques des organisations en
proposant des schémas explicatifs rationnels et en mettant en évidence la possibilité
de réaliser des gains de productivité dans l'industrie grâce à la division du travail. Par
son fameux exemple d'une manufacture d'épingles, Smith montre les avantages de
la division du travail. Il cite entre autre, l’accroissement de l’habilité des ouvriers et
l’économie de temps pour passer d’une tâche à une autre (réduction des temps
morts, meilleure organisation des tâches). Il parle également de l’invention des
machines qui abrègeront le travail et permettront à un seul individu de faire le travail
de plusieurs. Force est de constater que ces principes sont toujours d’actualité.
Productivité, performance, rentabilité, gain de temps ou encore réduction des coûts
sont encore de nos jours les vecteurs de croissance et de gain de part de marché.
Les phénomènes de délocalisation en sont le parfait exemple. En délocalisant leur
10
production, les entreprises occidentales ont considérablement réduit leurs coûts,
parfois de moitié. La réduction de ces coûts s’est faite non seulement par l’utilisation
d’une main d’œuvre moins chère (Inde, Chine, Vietnam, Afrique du Nord) mais
également grâce à l’optimisation des coûts de transport et de techniques de
production comme le Juste à Temps ou encore le fameux « Kaizen » inventé par les
japonais. Le travail en flux tendu, la réduction des stocks, l’informatisation des
processus de production par l’utilisation de logiciels comme les ERP (Entreprise
Resources Planning), les CRM (Customers Relationship Management), l’utilisation
des robots dans la production automobile ou encore l’Internet ont considérablement
participé à l’amélioration de la productivité et réduit de façon sensible les délais de
production. C’est ainsi qu’une entreprise de textile comme ZARA arrive à lancer de
nouveaux modèles sur le marché en 6 semaines là où il en faut plus de 12 pour ses
concurrents comme H&M ou GAP. Le gain de temps (déjà cité par Adam Smith) est
crucial pour attirer aujourd’hui des clients toujours plus avides de nouveauté.
La transformation des sociétés agricoles en société industrielle à travers les deux
siècles précédents et par la suite en multinationales durant notre époque a apporté
avec elles d’autres phénomènes inattendus ou tout au moins mal cernés par les
auteurs de la théorie classique des organisations. De nombreuses questions ont en
effet été soulevées suite à l’apparition de phénomènes sociaux comme la souffrance
au travail, les relations hiérarchiques, la motivation des ouvriers, le stress en milieu
professionnel, les relations de pouvoir et les différences culturelles.
Si les défenseurs de la théorie classique des organisations ont pour leur part
répondu à des questions d’efficacité au travail, de remplacement de l’artisanat par
des principes de gestion rigoureux et adaptés à la production de masse, de
remodelage des rapports sociaux entre direction et travailleurs, ils ont certainement
provoqué d’autres questions non moins importantes sans vraiment le vouloir. En effet
dans les années 60, un nouveau courant de pensée émerge en réaction à
l’apparition de critiques et de mouvements sociaux aux Etats-Unis. Issue des travaux
de Mayo, ce courant se veut être une réponse à la montée du mécontentement des
ouvriers (rappelons à cet effet le drame des usines de Rockefeller au Colorado où 16
personnes décédèrent suite à des manifestations sociales). Les industriels
américains de l’époque vont financer des recherches en diligentant ces travaux à des
11
psychologues qui vont essayer de trouver des solutions afin de canaliser la colère et
les protestations et essayer de trouver les ressorts pour trouver des solutions au
malaise social. Ce qui conduit à l’émergence d’une nouvelle école de pensée
défendue par des auteurs comme Maslow, Herzberg ou McGregor. De cette école
surgira un aspect jusque là négligé : L’aspect social des organisations. Pour ces
auteurs, toute entreprise est constitué d’un double système : technique et social. De
nouvelles notions apparaissent alors comme l’équilibre individu-organisation, les
besoins des individus et des groupes. Autrement dit, l’homme n’est plus une
machine à produire mais une personne animée par une logique de sentiments et
des désirs d’accomplissement. Selon l’école des ressources humaines, la
productivité ne dépend pas uniquement de la division du travail et de l’efficacité des
machines. D’autres facteurs interviennent, comme la dimension humaine donc
psychologique de l’individu. A son tour, cette école de pensée va faire l’objet de
critiques intenses. Comment expliquer que certaines entreprises s'avèrent
incapables de survivre dans certaines circonstances malgré une GRH efficace. Il y
aurai donc d’autres facteurs influents la performance. C’est ainsi que des auteurs
comme Chandler, Minztberg ou encore Woodward postulent que l’efficacité d’une
organisation dépend de son environnement et de ses caractéristiques propres
(stratégie, taille, culture, technologie,..). Cette théorie est celle de la contingence.
Les auteurs appartenant à l’école de la contingence se sont posés un certain nombre
de questions. Comment expliquer la présence d'organisations performantes ne
répondant pas aux principes de Fayol et Taylor qui pourtant entendaient définir le
"one best way"? Comment expliquer que dans certains cas ces entreprises
répondant au "one best way" s'avèrent contre-productives et inefficientes? A partir
des travaux d’auteurs comme Woodward ou Mintzberg, les auteurs de cette théorie
ont montré que la structure d’une organisation est reliée à des facteurs, dis
contingents, contrairement à l’idée de l’école classique qui considère qu’il existe un
structure idéale indépendamment du contexte. Par exemple, Woodward a montré ni
l'histoire de l'entreprise, ni la branche d'industrie n’expliquaient les différences
constatées. Les différences provenaient plutôt essentiellement de la technologie
développée. Le grand intérêt de l’école de la contingence a été de montrer qu'il n'y
avait pas de structure qui soit la meilleure pour toutes les organisations, puisque
12
cette structure dépend de la technologie employée et de l’environnement dans
lequel elle évolue (Woodward, …..)
La théorie de l’école de la contingence à son tour induit un certain nombre de
questions. En effet, jusqu'à présent, les écoles de pensée se sont surtout intéressées
aux aspects techniques et environnementaux des organisations. L’école des
relations humaines défendu par des
Afin de mieux comprendre les différents courants de pensée qui ont jalonné l’étude
des organisations, il serait intéressant de présenter plus en détails les différents
concepts sous-jacent à chaque école de pensée et de faire une analyse comparée
qui met en évidence les points forts et les questions soulevées par chaque théorie.
Cependant, une brève introduction sur la sociologie des organisations peut nous
aider à mieux comprendre ce qui fait le lien social dans une organisation et comment
celui-ci évolue et se transforme.
1.2.1 La sociologie
La sociologie est la science du social qui essaie de comprendre ce qui fait le lien
social. Elle essaie de comprendre les ressorts de l’action humaine et les valeurs qui
motivent l’action. D’une manière générale, la sociologie tente d’apporter des
réponses aux transformations sociales liées à l’apparition de phénomènes
particuliers tels que la souffrance, les relations interpersonnelles, les religions ou
encore l’organisation des individus rassemblés autour d’un objectif commun comme
pourrait l’être les organisations.
La sociologie prend ses racines dans le début de la modernité (Renaissance 15e –
16e siècle). A cette époque, l’homme cherche à se libérer des valeurs féodales du
Moyen-âge et de la pensée dominante de l’Eglise. La remise en question des valeurs
religieuses a permis l’affranchissement des individus. Les croyances séculaires ont
perdu de leur légitimité et l’Eglise a perdu de son pouvoir au profit d’organisations
politiques décentralisées. De ce point de vue, au cours des derniers siècles, l’Islam
comme religion dominante des pays du Maghreb et en particulier le Maroc, est venu
confirmé cette perte de légitimité des pouvoirs des lieux de prière a profit de la
science. En effet, l’Islam insiste sur le rôle des sciences comme moyen de
reconnaissance de Dieu. En découvrant les lois scientifiques qui régissent l’univers,
13
le croyant devrait être amené à la conclusion de l’unicité de Dieu. C’est donc à partir
d’une recherche empirique, individuelle et entièrement basée sur des démonstrations
rationnelles que le croyant dans le monde musulman se libère de toute emprise des
dogmes religieux infondés. Dieu dit dans le Coran : « Seuls les savants me craignent
vraiment ». Newton n’a t’il pas bouleverser son siècle en découvrant la gravitation
universelle ? Si l'humanité était en mesure de révéler les lois de l'Univers, elle
pouvait espérer découvrir les lois propres à la nature et à la société humaine. La
liberté et la démocratie naissent donc avec la science et l’affranchissement de
l’homme du joug de la religion comme elle a été appliquée jusqu’alors. La séparation
de l’Eglise et de l’Etat a véritablement permis à la sociologie de voir le jour. La
naissance de la sociologie au XIXe siècle s'explique par l'ampleur des mutations
sociales et politiques et par la réflexion des fondateurs de la sociologie sur le devenir
de la société industrielle. Les principaux auteurs ayant donné forme à cette nouvelle
discipline sont principalement Auguste Conte, Alexis de Tocqueville et Karl Marx
mais ses véritables fondateurs furent Emile Durkheim et Max Weber ainsi que Marcel
Mauss. Il s'agit donc d'une discipline récente. Durkheim a formulé une célèbre
phrase pour résumer la sociologie : « la sociologie ne vaut pas une heure de peine si
elle ne sert à améliorer le sort des hommes » (Mauss, p.233.)
Figure 1 : Rappel l’évolution de l’histoire du management
Moyen-âge en Occident
Autocratie, féodalisme, poids de l’église, souffrance, privilèges, centralisation
domination des seigneurs, la vie est régie par ordre, liberté limitée
Paysan en tant qu’outil de production
Modernité XVII, XVIII
- Remise en question des
valeurs religieuses
- Liberté et démocratie
- Progrès
- Révolution scientifique
Révolution industrielle XIX, XX
- Capital
- Organisation du travail
- Application de la science à
l’industrie
- Fordisme
Nouvel ordre social, XX, XXI
- Puissance des organisations
- Mondialisation
- Chocs culturels
SOCIOLOGIE DES
ORGANISATIONS
SOCIOLOGIE
Auguste Conte, Marx,
Durkheim, Weber, Pareto
Etzioni, Crozier, Sainsaulieu,
Hofstede, D’Iribarne, Chanlat
14
Ci-dessus, un schéma qui montre l’apparition de la sociologie vers la fin du 19eme et
le début du 20ieme principalement lorsque des auteurs comme Auguste Conte, Max
Weber et Karl Marx étudient les changements profonds que subit la société suite au
effets de la révolution industrielle. Il s’ensuit le courant de la sociologie des
organisations, initié par Crozier qui après une mission d’étude de la productivité aux
Etats-Unis, revient en France pour comprendre les changements que subissent les
organisations après la deuxième guerre mondiale. Crozier s’intéresse à la fonction du
management comme outil de modernité et aux phénomènes d’ajustement des
organisations. Il analyse le fonctionnement des grandes organisations
bureaucratiques en France. Il souhaite montrer que le système bureaucratique
français ne correspond pas au modèle d'organisation rationnelle que Max Weber
avait décrit dans « Economie et société ». D’autres auteurs, comme Ezioni, étudient
les transformations des organisations et de l’influence du management des écoles
américaines. Sortie grand vainqueur de la guerre, les Etats-Unis sont la plus grand
puissance. Des investissements massifs sont réalisés en Europe pour la
reconstruire. C’est le plan Marshall.
Dans les années 70 va apparaître la courant de la diversité culturelle à travers des
auteurs comme Hofstede, D’Iribarne ou Chanlat. Ces auteurs s’intéressent aux
problèmes éthiques et à l'influence des cultures nationales sur le fonctionnement des
organisations. La mondialisation des échanges et les phénomènes d’immigration
vont engendrer des chocs de culture. L’univers de sens est différent selon la culture
des individus.
Des trois niveaux de la sociologie - macrosociologie, méso-sociologie
microsociologie – c’est ce dernier qui nous intéresse pour cette étude. A travers les
comportements, les pratiques, les traditions et les habitudes des individus avec
lesquels ils tissent ou cherchent des liens sociaux, nous allons essayer de
démontrer le rôle important de la culture dans la performance des managers formés
aux écoles occidentales et qui exercent dans un milieu culturel et religieux intense et
différent.
15
1.2.2 La sociologie des organisations et les écoles de pensée
La sociologie des organisations est une branche de la sociologie qui étudie comment
les acteurs différents d’une organisation construisent et coordonnent leurs activités
organisées. Le champ d’application est principalement le lien social qui se divise en
trois catégories :
• La coordination : comment les organisations structurent la cohésion
d’ensemble de leur fonctionnement malgré la complexité des
activités à mener et les contraintes externes qu'elles subissent
• La coopération : comment les acteurs de l’organisation parviennent
à tisser des relations de travail satisfaisantes malgré leurs intérêts
différents voir contradictoires
• L’adhésion : quelles sont les valeurs présentes dans l’organisation
et comment les acteurs s’y adhérent.
L’objectif d’une entreprise est l’optimisation des investissements, qu’ils soient
humains ou matériels afin de maximiser sa rentabilité. Pour arriver à l’optimum de
production, les trois aspects cités plus haut (coordination, coopération, adhésion) ont
tour à tour été exploités, parfois de façon individuelle, parfois en étant combiné,
comme de nos jours, grâce notamment à la sophistication des outils de travail et aux
techniques d’amélioration de la productivité humaine (Techniques de motivation, TIC,
cercle de qualité etc…). Voyons maintenant comment chaque école de pensée a
structuré sa démarche et quels ont été les principaux moteurs de leur
développement.
1.3 L’école classique
L’école classique a de toute évidence basée sa théorie sur une conception la
coordination et la spécialisation. Elle a vu l’organisation comme une machine
transformant les éléments reçus (inputs) en produits finis (outputs) de façon à
améliorer la performance. Toute aspect social ou biologique est secondaire. Le
système fonctionne indépendamment de son environnement. L’apparition de cette
école vient en réalité répondre à des besoins précis. Le contexte industriel du XIXe
siècle est marqué par des innovations technologies majeures comme l’électricité, le
16
chemin de fer ou encore la chimie moderne. Cette révolution industrielle appelle les
organisations à s’adapter et à améliorer leur productivité. Apparais alors des
ingénieurs qui vont essayer de répondre à la question suivante : Comment appliquer
aux organisations la même rigueur scientifique que celle qui gouverne les
machines ?
Les réponses apportées par ces ingénieurs (Fayol, Taylor, Gilbreth) ont été presque
similaires des deux cotés de l’atlantique. Ces deux ingénieurs ont vu l’organisation
comme une totalité, une sorte de boite noire dans laquelle un certain nombre de
principes devront être respectés afin d’assurer une coordination parfaite et continue
des outils de production. Ces principes sont cités dans le tableau suivant :
Tableau 1 : Principes de l’école classique
Ecole classique Principes
Organisation Universalité :
Communauté d’intérêts
entre direction et
travailleur
Souveraineté : Négation
des besoins de l’homme
Science La science au service des
besoins de l’organisation
La science nouvelle base
de légitimité de la direction
La science non
contestable, non réfutable
Démarche Observer
Décomposer/Classer
Formaliser et établir des
principes scientifiques
La science est érigée comme valeur universelle et comme seule référence
légitime. Ce qui est scientifique est par définition irréfutable. On passe donc de la
science personnelle à la science organisationnelle.
17
Fayol, du coté français, et Taylor, du coté américain, ont tous deux constitués les
piliers de l’école classique au même moment de l’histoire des organisations. Pour sa
part, Fayol militait pour remplacer un fonctionnement intuitif et arbitraire par une
mécanique organisationnelle dont chacun des rouages sont spécifiés et coordonnés.
Grâce à un repérage des fonctions clefs de l’organisation (production, recherche,
vente, finance..), Fayol estimait être capable de relier les différentes parties par des
règles de procédure et décomposer les missions en fonctions spécifiques, le tout
gérer par une hiérarchie très bien établie.
Taylor pour sa part a développé l’organisation scientifique du travail (OST). Le
principe de l’OST est de remplacer le savoir-faire et la connaissance personnelle du
travailleur par des principes scientifiques définissant le temps et les mouvements
mécaniques à accomplir le travail. La démarche consistait à observer ce que fait
l’ouvrier (détenteur du savoir-faire), à décomposer le travail en tâche élémentaire et
enfin à attribuer à chaque tâche un temps et un mouvement optimal. La mise en
œuvre d’une telle organisation nécessitait selon Taylor une division verticale du
travail en 3 niveaux qui sont : La conception qui était de la responsabilité des
bureaux des méthodes, le contrôle qui incombait aux contremaîtres et l’exécution qui
revenait à l’ouvrier spécialisé. Toute cette standardisation du travail allait permettre
de produire plus efficacement et de stimuler la consommation en stimulant le pouvoir
d’achat. Ford ira plus loin en mettant en place la chaîne de montage de ses
véhicules pour produire en grande série.
Les principes du management scientifique peuvent être résumés par :
- Utiliser la Science, pas les méthodes empiriques
- Chercher l'harmonie et non la discorde
- Chercher la coopération plutôt que l'individualisme
- Chercher le maximum de productivité
- Promouvoir le développement de chaque employé pour sa plus grande
efficacité et prospérité
- Le prix de revient de fabrication diminuant grâce à une production améliorée,
l'industriel peut réaliser de meilleurs bénéfices.
18
Les principales critiques à mettre sur le compte de la théorie classique des
organisations sont l’annihilation de l’homme en tant qu’être social, doté de
sentiments et interagissant avec d’autres membres de la communauté et la non prise
en compte de facteurs externes à l’entreprise (Chanlat, Séguin, 1983,1987).
L’environnement et l’homme social y sont absents. Fayol (1918) n’a-t-il pas dit : « si
l’on pouvait faire abstraction du facteur humain, il serait assez facile de constituer un
organisme social ». La critique de l’homme en tant qu’être social est venue des
travaux de l’école des ressources humaines. Celle de l’environnement est issue des
travaux de l’école de la contingence.
1.4 L’école des ressources humaines
La remise en cause du paradigme mécanique et du « one best way » est venue
d’auteurs comme Mayo et McGregor. Deux principaux courants ont constitué les
foncements de cette théorie : L’école des relations humaines proprement dit qui
prône de modifier le système social pour l’adapter au système technique (Mayo,
Herzberg) et l’école de la motivation qui insiste plutôt sur la nécessite de modifier le
système technique pour motiver le système social (Maslow). Dans les deux cas,
l’entreprise est vue comme une dualité technique et sociale. Autrement dit, la
ressource humaine doit être gérée au même titre que la ressource technique. Il en
résultera toute une panoplie d’outils de management pour améliorer la performance.
Ces outils toucheront la motivation des travailleurs, la formation des cadres, la GRH
(gestion des ressources humaines) etc… L’homme a donc des motivations
complexes et ne réagit pas uniquement à l’appât du gain et certaines motivations
peuvent conduire aux performances qualitatives et quantitatives supérieures à celles
qu’on obtient par la carotte et le bâton
Le mouvement des Relations Humaines est né des travaux qu'Elton Mayo a entrepris
à l'usine Western Electric de Hawthorne, près de Chicago. Sans rejeter le
Taylorisme, il cherche en effet a améliorer l’efficacité des équipes. Mayo va
complèter l'hypothèse taylorienne selon laquelle les conditions matérielles et
techniques, du travail influencent la productivité en y associant d’autres éléments.
Ceux-ci sont des salaires acceptables, un environnement agréable, des horaires bien
étudiés, une sécurité au poste et une sécurité de l'emploi. De ses expérimentations, il
déduit l'importance du climat psychologique sur le comportement des travailleurs.
19
MAYO et le courant des RH dans son ensemble ont eu la conviction que les "bonnes
relations" horizontales et verticales avaient une influence capitale sur la satisfaction
globale apportée par le travail et sur la productivité personnelle.
Trois idées phares caractérisent la pensée du mouvement :
. Les individus ont naturellement besoin d'appartenir à un groupe. Ils recherchent
l'estime et l'amitié de ceux avec qui ils sont associés dans l'accomplissement de leur
tâche. Ils souhaitent en plus, pouvoir se montrer utiles et apporter une contribution
manifeste. Dans la mesure où ce besoin d'appartenance est satisfait, les individus
arrivent à travailler en coopération et à adhérer aux objectifs de l'entreprise. Il revient
alors à la hiérarchie de montrer au personnel qu'il est utile et joue un rôle non
négligeable dans la bonne marche de l'entreprise. Elle doit encourager ses
subordonnés à prendre des initiatives dans tout ce qui concerne la gestion courante,
en accord avec les objectifs connus et reconnus de tous.
. Un bon environnement et des avantages matériels permettent à un individu de
s'épanouir et de mieux s'intégrer à l'entreprise, d'y avoir une activité plus intense.
On retrouve avec quelques variantes près les besoins de l'homme au travail
identifiés par Maslow : besoins physiologiques, besoin de sécurité, besoin
d'appartenance, besoin d'estime et besoin d'accomplissement personnel. Mayo en
vient à la conclusion que les changements eux-mêmes n’expliquent pas tout. Il met
en évidence l’importance des phénomènes affectifs et surtout des phénomènes de
groupe et des interrelations humaines.
De nos jours, les principes de l’école des relations humaines sont largement connus
et appliqués. A la vue des investissements consentis par les organisations afin
d’améliorer le climat au travail, de gérer efficacement les équipes, de motiver les
troupes, de la gestion efficace des conflits et du stress ou encore de mettre à la
disposition des travailleurs des espaces fumeurs spécialement aménagés, on peut
aisément conclure que certaines idées de l’école des relations humaines ont été
retenues. Il en a même résulté des systèmes de rémunération complexes et adaptés
aux contraintes organisationnelles tant internes qu’externes. Le tableau ci-dessous
résume les différents systèmes existants :
20
Tableau 2 : Les différents systèmes de rémunération
KERR 1995 GOMEZ – MEIJA 1992 SCHUSTER et
ZINGHEIM 1992
LAWLER 2000
Basé sur la
hiérarchie
Basé sur la
performance
- Rémunération
variable basée
sur la
performance
collective et la
position
hiérarchique
- Augmentation
sur
l’ancienneté
- Avantage
associé au
statut
hiérarchique
- Promotion lié
aux objectifs
internes
- Performance
individuelle,
ancienneté et
position
hiérarchique
-
Augmentation,
primes
attribués
objectivement
- Avantages ne
reflètent pas le
statut
- Promotion lié
aux besoins de
l’organisation
Adapté à une
culture de
clan
Adapté à une
culture de
marché
Système
mécaniste
Système
organique
- Salaire fixe +
avantages
sociaux
- Salaire
supérieur au
marché
- Basé sur
poste et
ancienneté
- Politique
salariale
secrète et
centralisée
- Echange de
court terme
- Salaire
variable
- Inférieur au
marché
- Basé sur le
marché du
travail et
compétence
- Politique
communiqué
et
décentralisée
- Echange
long terme
Adapté à une
stratégie de
diversification
reliée
Adapté à
une
stratégie
non reliée
NEW PAY
- Basé sur le
marché du
travail
- Augmentation
sur performance
individuelle
- Rémunération
variable sur
performance
individuelle
- Rémunération
globale basée
sur primes
- Salaire de
base inférieur au
marché
- Echange de
court terme
HIGH
INVOLVMENT
- Salaire total
supérieur au
marché
- Rémunération
variable sur
performance
collective
- Rémunération de
la performance
individuelle
- Basé sur les
compétences
- Echange long
terme
Deux courants principaux résument les systèmes de rémunération:
1- Le courant universaliste qui veut que la rémunération se fasse sur le mérite
individuel, la performance individuelle et collective (Lawler, 2000)
2- Le courant stratégique qui prône une rémunération basée sur la stratégie de
l’entreprise, son mode de management et les attentes des salariés : Efficace
si les salariés sont incités à adopter des comportements qui favorisent la
stratégie de l’entreprise
L’approche "améliorez les relations humaines (et la rémunération) et la productivité
augmente" est un raccourci parfois trop rapide. L'amélioration des relations humaines
est une condition nécessaire mais pas suffisante à l’amélioration de productivité.
Morin (1994) écrit que la variable "relations de pouvoir" a été oubliée. Si l'approche
"Ecole des Relations Humaines" est présentée par la hiérarchie comme un modèle
idéal, la maîtrise peu ne plus oser intervenir de peur de faire chuter la productivité en
dégradant ses relations avec les subordonnés. La maîtrise a besoin de disposer d'un
pouvoir réel, faute de quoi on risque fort d'avoir de bonnes relations et une faible
productivité.
21
L’école des relations humaines, comme toutes les autres écoles, a elle-même
entraîné d’autres questions suite à l’apparition de phénomènes jusque là inattendus
ou complètement nouveau. L’internationalisation des organisations, la migration des
cadres vers des pays de culture et de traditions différentes, le développement des
franchises et des joint-ventures ou les fusions-acquisitions ont amené de nouvelles
difficultés et érigé de nouveau obstacles à l’amélioration de la performance et à
l’atteinte des objectifs stratégiques. Il ne suffit plus de motiver les troupes ou de
mettre en place des systèmes de rémunération attrayants pour améliorer la
productivité et l’adhésion des équipes de travail. D’autres dimensions sont donc
apparues comme étant des variables déterminantes dans le management des
organisations. L’une de ces variables est la différence culturelle. La compréhension
des comportements humains à travers les traditions et la culture prend une
dimension historique. Pour la première fois, les auteurs vont s’intéresser à
comprendre les effets de la culture et donc de l’héritage culturel sur la performance
des organisations. Cette dimension prend une importance soudaine lorsque les
multinationales (principalement américaines) se rendent compte que le modèle de
management américain est difficilement exportable même en Europe. Il en résultera
des recherches approfondies comme celles de Trompenars, D’Iribarne ou d’Hofstede
qui, par leurs travaux, démontreront l’impact de la culture sur la performance et le
management des organisations. Sans remettre en question les écoles précédentes,
dont les principes sont toujours d’actualité, comme nous l’avons vu, ces auteurs vont
définir un nouveau paradigme et remettre au goût du jour l’influence de la culture
dans les organisations. Cette même culture qui a été « chassée » des organisations
et des institutions deux siècles auparavant revient à grands pas aujourd’hui nous
rappeler que l’homme reste fondamentalement un être vivant doué de capacités
sensorielles, sentimentales et émotionnelles et que l‘individu ne peut être en aucun
cas réduit à une simple fonction de production ou un levier d’amélioration de la
performance.
22
1.5 L’école de la contingence
L’efficacité d’une organisation ne dépend pas uniquement de ses ressources
humaines ou de sa division du travail. Henry Mintzberg, Chandler ou encore
Woodward ont montré qu’il existe d'autres formes organisationnelles que celles
définies par Taylor et Fayol. Ces autres formes peuvent se révéler comme des
"better ways" dans certaines circonstances. Les adeptes de ce courant ont au départ,
et comme pour les autres écoles, posé un certain nombre de questions relatives à la
performance des organisations. Comment expliquer que certaines entreprises
répondant aux principes du "one best way" s'avèrent incapables de survivre dans
certaines circonstances? Quels sont les facteurs tant internes qu'externes aux
organisations influençant la forme et le fonctionnement des organisations?
Chandler a pour sa part réalisée une étude sur 4 grands groupes nord-américains
(Du Pont, General Motors, Standard Oil et Sears&Roebuck) et qui montre que les
paramètres de la "prospérité maximale" et de la productivité du travail sont loin d'être
les seules à guider la structuration et le fonctionnement des organisations. Les
paramètres de l’histoire, de "survie", de domination et d'adaptation du marché
apparaissent tout aussi, sinon plus déterminants du comportement organisationnel
des entreprises. La démonstration empirique de Chandler montre l’existence de
nouvelles formes d’organisation d’entreprise, notamment dans des domaines de
pointe. La métaphore la plus utilisée pour décrire l’école de la contingence est
l’évolution d’un organisme vivant dans son milieu naturel. L’interaction entre
l’organisme et son environnement, son adaptation aux conditions de survie,
l’influence de son environnement sur son développement définissent les lois relatives
à la bonne adéquation entre l’organisation et son milieu. De l'organisation comme
système fermé (étude de la mécanique interne et de son arrangement efficient), elle
passe à un système ouvert (étude de l'adaptation de l'organisation à son
environnement)
Il devient donc indispensable de prendre en compte l’environnement pour
comprendre la structure et le fonctionnement d’une organisation. Inversement, une
organisation doit tenir compte de son environnement pour optimiser son rendement.
Il en découle donc de cette théorie de la contingence que l'existence
d'environnements différents conduit à la présence d'espèces d'organisation
23
différentes. Il n'existe plus un "one best way" organisationnel mais des "one best
ways" eu égard au type d'environnement auquel est confrontée l'organisation. La
remise en question du déterminisme mécanique par l’école de la contingence comme
seul moyen d’atteindre les objectifs stratégiques des organisations est certainement
un apport substantiel à la compréhension de l’interaction qu’ont les organisations
avec leur environnement. Voici résumé dans le tableau ci-dessous, les principes
majeurs de cette école énoncés par des auteurs comme Minztberg et Morgan.
Tableau 3 : Principes de l’école de la contingence
Ecole de la contingence Principes
Organisation Influencé par son environnement
Il n'existe pas un « one best way »
mais des « one best ways »
fonction du process et du produit
de l'entreprise
Approche Déterministe : L’environnement est
une réalité objective qui contraint
l’organisation
Trouver par la raison et la
comparaison (entre entreprises
performantes/non performantes)
des lois universelles d’adaptation
du comportement de l’organisation
-> Etudes normative
Raisonnement Constructiviste : l’environnement
n’existe pas en dehors de la
manière dont les décideurs le
perçoivent
Les apports positifs de la théorie de la contingence peuvent se résumer ainsi :
• Ouverture de l’organisation à son contexte environnemental
• Identification des facteurs d’environnement pesant ou
contraignant les organisations et des routines dans l’étude de
ces influences
• Relativisme au niveau de la structuration et du fonctionnement
des organisations : plusieurs marches possibles en selon les
environnements
24
L’innovation apportée par la théorie de la contingence vu par ailleurs entraîne
d’autres réflexions concernant la dynamique organisationnelle. En effet, cette école
présente l’environnement comme un tout où il impossible d’isoler une variable parmi
d’autres (culture, religion, traditions, concurrence,…). Ce qui nous mène à dire que
l’environnement n’est pas une donnée qui échappe à l’action de l’homme et donc
que l’environnement est aussi construit par l’homme. Il en découle donc que la
responsabilité des hommes est largement négligée au profit d’un discours qui met
l’accent sur la contrainte de l’environnement.
25
2. Management, culture et organisation
La littérature sur le management des différences culturelles s’est intéressée depuis
une trentaine d’années à cerner et à comprendre les rapports qui régissent les
relations entre gestion et culture (Hofstede, 2001 ; D’Iribarne, 1989, 1998, Dupuis et
Chanlat, 2008). A travers certains travaux de gestion, on constate que le facteur
culturel semble être le plus souvent comme un problème plutôt que comme un
avantage dans l’entreprise. Il peut être à l’origine de difficultés, de
dysfonctionnements dans les organisations, y compris de conflits, ou encore de non
compréhension et de faible performance (Chanlat 2002).
2.1 L’importance de la culture
Le concept de culture est un concept important pour comprendre le comportement
humain. Les anthropologistes utilisent le mot « culture » dans deux sens différents.
D’un coté, la culture est en général l’ensemble de l‘héritage social d’un groupe
d’individus (héritage national). Ceci peut comprendre le système politique, la religion
ou les croyances. D’un autre coté, la culture est perçue comme un ensemble de
traditions, coutumes, de liens sociaux ou de style de vie partagés entre individus.
L’essence même de ce concept est que la plupart des comportements humains sont
des acquis ou des construits issus de la relation avec les autres individus du groupe.
Le comportement social est considéré comme l’héritage des anciens et non comme
un héritage génétique ou inné (Malefijt, 1968).
La culture est un construit à facettes multiples qui est relié à la religion et à l’éthique
(Hofstede, 2001). Il a été également souligné que la culture est un élément qui
affecte les comportements des individus quand ils doivent, par exemple, établir des
liens sociaux ou gérer des situations de conflit (David, 1991). La culture est vue alors
comme un outil puissant qui aide a former la perception des individus à travers le
prisme des croyances, des traditions et des coutumes (D’Iribarne, 1998).
Les travaux menés pour mesurer les écarts culturels entre nations ont fait naître des
mots tels que « différence culturelle » ou « distance psychique » (Evans, 2000). La
différence culturelle est la distance socioculturelle perçue entre la culture locale et
celle d’un autre pays ou région en terme de langage, de pratiques d’affaires, de
système politique et légale et d’éthique entre autres dimensions (Lee, 1998). Lane
(1996) a suggéré dans ses travaux que plus la distance entre deux nations est
grande, plus les adaptations nécessaires pour conduire les affaires seront également
26
importantes. Ainsi, une compréhension solide de la culture est un pré-requis
indispensable pour comprendre les différences et les similarités qui peuvent amener
à des incompréhensions et des malentendus entre individus de culture différente.
Geoffrey (2002) a donné l’exemple de la signification de certains mots comme
« must » que les personnes de langue française utilisent pour traduire le mot
« devrait » au lieu de « »have to » alors qu’un anglophone comprend plutôt qu’il
s’agit plus d’un ordre que d’une suggestion. Comprendre la culture c’est aussi
connaître ses différentes dimensions. Plusieurs définitions ont été formulées pour
décrire la notion de culture. Ce concept semble peu clair et incertain à cerner. En
effet, il existe d’après Kroeber et Luchon cité dans Usunier (2005) plus de 160
définitions différentes de la culture. La culture est plus un processus que des
habitudes. Elle est composée, selon Usunier (2005), d’un ensemble de dimensions.
L’auteur affirme que la culture est complexe et les éléments qui la constitue sont
inter-reliés tels que la connaissance, la croyance, les valeurs, les arts, la morale ou
encore la religion. Ci-dessous un schéma des dimensions de la culture telles que
définis par Usunier.
Figure 2: Les dimensions de la culture
Source: Marketing across culture Usunier (2005)
27
D’une manière globale, la culture est un outil qui permet de décrire et comprendre le
comportement passé, présent et à venir des populations étudiées (Aktouf, 1990). Elle
constitue la marque distinctive d’un groupe (identité collective). Elle s’acquière et se
transmet par le biais de la socialisation à travers un réseau d’institutions telles que
les écoles, la famille, les associations, la religion (Adler, 1994). Mais la culture peut
également se transformer en subissant soit des contraintes et des confrontations (les
périodes de colonisation en sont une des illustrations soit par l’apport de nouvelles
idées issues de la globalisation et l’intensification des échanges de biens, de
services et de capitaux. Le contact avec des immigrants la plupart expatriés a
également favorisé le brassage culturel. La chute des frontières économiques et
physiques ont permis le brassage de cultures parfois très différentes. Au Maroc par
exemple, les anciennes familles ont conservé des traditions séculaires. Les enfants
vivaient avec leur parents jusqu’au jour de leur mariage et parfois au-delà si la
situation financière ne permettait pas l’indépendance. Vivre en famille était la norme
et une fierté. De nos jours, principalement dans les villes, les jeunes, en contact avec
les influences culturelles occidentales, l’entrée au pays de nouvelles formes
d’organisation issue la plupart du modèle colonial, considèrent que vivre avec les
parents après un certain âge est une preuve d’échec. Gagner un salaire, avoir son
propre toit, être indépendant financièrement sont les signes extérieurs de la réussite,
devenus en quelques décennies plus important que la solidarité familiale. La venue
au Maroc de restaurants comme McDonald’s, Quick, Paul ou encore Pizza Hut, a
profondément bouleversé les habitudes alimentaires des Marocains habitant les
villes. De même que l’ouverture depuis le début des années 2000 de magasins de
mode a permis à une large frange de la classe moyenne de s’habiller selon les
tendances occidentales.
La culture structure la perception du monde et des relations entre individus non sans
excès parfois. Les attentats du 11 septembre ont engendré un malaise durable chez
les musulmans pacifistes. Les stéréotypes comme cadres mentaux utilisés pour juger
les autres, interpréter leurs comportements et programmer nos réactions, sont
parfois la source de conflits et de mauvaise interprétation. Cependant, culture ne
signifie pas automatiquement homogénéité et unité. D’autres facteurs importants
entre en jeu comme les sectes, les castes ou les croyances politiques qui peuvent
différer dans un même milieu culturel (D’Iribarne, 1998).
28
2.2 Approche des différences culturelles
Pour les organisations, la diversité culturelle présente des avantages et des
inconvénients. Parmi les risques encourus par une organisation dans un milieu
culturel différent, on trouve l’ambiguïté et la complexité des échanges verbaux qui
peuvent porter à confusion. Cela rend difficile la convergence des orientations
stratégiques (Duchastel, Kirouac, 2007). Il devient difficile de faire l’unanimité autour
d’un objectif commun (améliorer la productivité par une réduction des temps morts –
le temps étant vu différemment selon la culture). La recherche systématique du juste
milieu peut devenir abusive et conduire à des résultats non espérés (consensus au
détriment du résultat).
D’un autre coté, évoluer dans un contexte culturel différent permet aux entreprises
d’élargir leur orientations et d’être ouverte à la diversification des idées, des
interprétations et des résolutions de problèmes (Duchastel, Kirouac, 2007). Cela
engendre selon les auteurs une meilleure créativité qui peut conduire à l’amélioration
de la productivité et à faciliter les échanges extérieurs ou l’implantation dans des
pays étrangers.
L’analyse des différences culturelles s’est faite selon des approches distinctes et des
niveaux différents. Il existe principalement trois niveaux d’analyse (Aktouf, 1990).
L’approche dite « ethnocentrique » ou esprit de clocher qui consiste à se référer aux
normes du système social auquel on appartient pour comprendre ou expliquer un
système social différent. Cette approche est basée sur l’esprit de supériorité où
l’autre est vu comme différent de ce qu’on est donc forcément inférieur. Les Indiens
de l’Amérique du Nord en sont l’exemple parfait. La Guerre de Sécession aux Etats
Unis et les années de ségrégation en Afrique du Sud témoignent douloureusement
de la forte présence de cette approche ethnocentrique de concevoir les différences
culturelles.
La logique ethnocentrique se retrouve également au niveau des organisations. Dans
cette logique, les différences sont souvent ignorées et l’organisation reste rigide au
niveau de ses processus de gestion et de production, sans effort d’adaptation.
McDonald’s ou encore Disney constituent deux exemples de management
ethnocentrique (Les Echos, 2007). La standardisation de l’offre de ces deux
compagnies présentent dans plusieurs pays constitue certes un capital perception
important vis-à-vis du consommateur mais offre peu de produits adaptés aux
29
coutumes locales. D’autres comme Subway refuse toute adaptation de leur produit
Cette stratégie a conduit Subway à fermer le seul magasin ouvert au Maroc après
seulement 4 années d’activité (La Tribune, 2007)..
La deuxième logique d’approche des différences culturelles est dite
« polycentrique ». Elle consiste à la juxtaposition des différentes cultures sans réel
échange (cloisonnement). Les dernières recherches effectuées sur cette approche
émanent de Gérard Ayache dans son livre « Métaphores du politique » (2008 -
http://www.infometrie.net/fr/polycentrisme.html). Le polycentrisme désigne d’après
l’auteur « les sociétés dans lesquelles différentes sphères fonctionnelles coexistent
de façon autonome comme la politique, le droit, l'économie, l'art, la religion. Toutes
ces sphères sont autant de domaines qui possèdent une logique autonome et qui
préservent jalousement leur intégrité ». Rapporté au niveau des organisations, le
polycentrisme serait une approche plurielle pour s’adapter et tirer parti des
différences sans pour autant mettre en commun les ressources, les systèmes et les
capitaux (Lécrivain, 2008). Au Maroc, Procter&Gamble a parfaitement adopté cette
posture. Présent depuis plus de 30 ans, P&G a su adopter ses produits aux
consommateurs locaux mais l’entreprise reste cloisonnée. Si les middle managers
sont en majorité marocains, les échanges avec d’autres sphères économiques ou
sociales sont rares. Une fois entré dans la boite, les managers marocains doivent
s’adapter à la culture de P&G, aux méthodes de travail et aux processus
décisionnels. Peu de place est laissée aux différences culturelles locales. La seule
adaptation permise a été l’aménagement d’une salle de prière pour les ouvriers. Les
manuels sont en anglais et les distributeurs n’ont que très peu de contact avec
l’entreprise. Les échanges sont donc réduits et la synergie qui pourrait en découler
est faible. La culture P&G modèle les attitudes, renforce les convictions communes
et oriente les comportements. Elle minimise l’apport culturel extérieur et renforce le
sentiment d’appartenance. Mon frère a travaillé pour Procter et on lui a souvent
répété la phrase : « C’est comme ça qu’on fait ici ! ».
La troisième approche des différences culturelles est l’approche multiculturaliste ou
interculturaliste. Celle-ci consiste, dans les organisations, à reconnaître les
divergences culturelles en tant que variable à gérer et d’intégrer ces variables dans
le système de management pour en tirer le maximum de profit (Lécrivain, 2008). Un
30
des multiples effets de la mondialisation tient à l’accroissement des relations entre
personnes ayant des référents culturels différents, dans des organisations, des
entreprises et des administrations. Souvent, des conflits ou des rivalités entre
individus sont interprétés uniquement sous l’angle ethnocentrique alors qu’il s’agit en
faite d’interprétation différente du vécu et du réel. L’approche multiculturaliste vise
justement à penser l’intégration des différences culturelles au sein des organisations
comme une réponse aux sensibilités culturelles. Le multiculturalisme se concrétise
par la reconnaissance des différences et la cohabitation et l’interaction régulière
entre individus de culture distincte.
Après avoir présenté les notions de différences culturelles en générale et les
approches que peuvent adopter les organisations pour les rejeter ou mieux les
appréhender, nous allons à présent présenter les différents composants de la culture
d’entreprise. Cette dernière évolue dans un contexte culturel précis. Elle devient
donc un corps social à part entière (Thévenet, 1991) disposant d’un patrimoine
culturel propre façonné par ses valeurs et ses méthodes de management. Le
chapitre suivant va introduire également la culture en tant que variable d’action et
d’ajustement des stratégies de management. Nous verrons également les limites de
la culture d’entreprise qui peut parfois se transformer et devenir un frein au
changement et à l’adaptation (cas de Subway cité auparavant). Nous présenterons
certains résultats de recherches réalisés sur les différences culturelles et leurs
impacts sur les organisations par des auteurs fondamentaux comme Hofstede et
D’Iribarne.
31
3. La culture intégrée aux organisations et au management
Comme nous l’avons mentionné dans la section précédente, la notion de culture va
évoluer et se définir en intégrant différentes approches. D’un point de vue
anthropologique «La culture est une configuration générale des comportements
appris et de leurs résultats dont les éléments sont adoptés et transmis par les
membres d'une société donnée » (Linton, cité dans Lécrivain, 2008, page 2). D’un
point de vue sociologique, la culture apparaît comme l’ensemble des représentations,
des valeurs et des normes qui sont propres aux groupes sociaux, « tout ce qui n'est
pas la nature, tout ce qui est appris, le savoir, le savoir-faire, les mythes, etc., tout ce
qui est transmis de génération en génération» (Edgar Morin, cité dans Lécrivain,
2008 page 2).
La culture appliquée aux organisations et au management est définie comme «
l’ensemble des valeurs partagées, rites, mythes, symboles et histoire de
l’organisation» (Thévenet cité dans Lécrivain, 2008 page 13). Thévenet divise la
culture organisationnelle en différentes dimensions que nous présentons ci-dessous :
La dimension symbolique : ce sont des signes (logo, style, tenue vestimentaire,…)
chargés d’informations culturelles qui sont liés aux valeurs essentielles. Ils servent
aussi d’éléments de communication tant en interne qu’en externe- ex :
La dimension des valeurs : ce sont les codes comportementaux (valeurs opérantes)
qui ont forgé l’histoire de l’entreprise et ses pratiques de management et les valeurs
déclarées (celles qui transparaissent dans le discours de l’entreprise)- ex : le style
Décathlon avec ses valeurs sportives de jeunesse, de santé – Les valeurs de Toyota
qui sont la qualité, la robustesse et la fiabilité – L’encastrement des croyances
religieuses ou sociales dans les valeurs de l’entreprise (rapport au temps, pouvoir et
hiérarchie,…)
La dimension des mythes : histoires, anecdotes, récits imaginaires ou symboliques
qui circulent dans l’entreprise (ex : le mythe de l’ascension sociale)
Le mythe des héros : il s’agit le plus souvent des fondateurs, de dirigeants
charismatiques qui font partie des mythes de l’entreprise et qui servent de référence
aux salariés
La dimension des rites : comportements spécifiques issus des coutumes et des
pratiques développées dans l’entreprise
32
La dimension des tabous : ce sont les interdits dans une organisation (évènements,
situations qu’il ne faut pas aborder,…).
Bien entendu, cette étude ne prétend pas aborder tous les aspects de la culture
d’entreprise. Un aspect dominant fera l’objet d’analyses approfondis et directement
relié à notre cas : celui des rites et des traditions. Ces deux dimensions regroupent
en elles-mêmes des sous-groupes tels que les croyances, les codes, la religion, le
rapport au temps, le rapport à la hiérarchie, la gestion des zones d’incertitudes ou
encore la relation homme-femme.
Afin de mieux comprendre les enjeux de la culture d’entreprise, nous allons présenter
un aperçu des travaux déjà réalisés résumant ce que les principaux auteurs ont
conclu sur la relation qui peut exister entre culture et management.
3.1 Fonction et enjeux de la culture d’entreprise
La culture d’entreprise présente deux fonctions principales : Les fonctions internes et
les fonctions externes. Cette étude s’intéressera spécifiquement aux fonctions
internes qui regroupent des facteurs sociologiques en rapport avec les individus et
leur socialisation dans les organisations. On trouve parmi ces facteurs (Dupuis,
2007) :
• Le facteur de socialisation : Intégration du personnel
• Le facteur de motivation : Implication individuelle et amélioration de
l’efficience des ressources
A titre d’exemple, il m’est apparu intéressant de parler ici des approches
managériales de la culture entre la vision américaine et française pour aborder la
problématique culturelle.
Aux Etats-Unis, la culture est introduite comme une variable interne à l'entreprise
et a pris les caractéristiques inhérentes du management américain avec tout ce que
cela implique (Nowotny, 1964).
33
Tableau 4 : Approche managériale de la culture
Approche managériale
américaine
Approche managériale
Européenne
le futur
la mobilité,
la vitalité
l'organisation.
L'histoire
L'identité
Conventions
Comportement = effet Comportement = cause
= Culture construite = Culture effective et réelle
Source : Nowotny, American vs. European Management Philosophy, 1964
Aux Etats-Unis, le comportement répond à l'impératif d'avenir, tandis qu'en France, il
résulte de ce qui a été. Le comportement aux USA se fabrique au quotidien, selon
une orientation implicite. Un dysfonctionnement organisationnel sera expliqué par un
problème de coopération entre des acteurs au regard de leurs intérêts , de leurs
valeurs. C’est une vision constructiviste (Weber,…..). En France, la culture est
abordée sous l’angle causal. On construit le quotidien en se basant sur l’héritage
culturel, l’appartenance à un groupe (aristocratie, classe populaire,....).
3.2 Le courant de gestion comparée
Issu du relativisme culturel et orienté vers une sociologie statistique de la culture
(Pesqueux, 2004, p.52), le courant de gestion comparée (Hofstede, 1980) vise à
décrire les pratiques de gestion et les comportements au travail propres à chaque
pays. Hofstede (1980) a conduit un sondage auprès de plus de 116.000 employés
d’IBM répartis sur 72 pays. De par son ampleur, cette étude constitue une référence
en terme de mesure standard de validation des différences culturelles. Elle est
largement utilisée dans les recherches empiriques. Cette recherche a identifié 4
dimensions majeurs de la culture : L’individualisme, la masculinité, la distance au
pouvoir et le contrôle de l’incertitude. Une cinquième dimension qui est la relation au
temps a complété le modèle.
Le concept d’individualisme/Collectivisme renvoie au degré d’individualisme ou de
collectivisme qui caractérise chaque culture. Dans les cultures collectivistes, le
34
groupe est plus important que l’individu. Les sociétés collectivistes mettent l’accent
sur la conformité et l’harmonie pour promouvoir le bien être du groupe. Les liens
familiaux sont plus forts et les obligations envers les plus âgés sont considérées
comme fondamentaux pour préserver l’harmonie. Dans les sociétés asiatiques, par
exemple, l’individualisme est simplement inacceptable en raison des effets néfastes
qu’il pourrait avoir sur l’harmonie du groupe (Hofstede, 1980). Dans des pays comme
les Etats-Unis, les droits individuels sont prééminents. Les liens sociaux entre
groupes sont plus fragiles et les individus tendent à faire passer en premier leurs
intérêts, leurs désirs et leurs motivations. Les enfants sont encouragés dès leur jeune
âge de penser par eux-mêmes. Il en résulte que les individus, issus de culture
individualiste, ont tendance à ne pas appliquer les normes sociales mais plutôt à
prendre des décisions indépendamment des autres membres du groupe
(Steenkamp, 1999).
La masculinité est basée sur les attributs du genre masculin ou féminin (Hofstede,
1980). Au niveau culturel, la masculinité est associée à toute société qui considère
l’ambition, la compétition et le succès matériel. Dans les cultures masculines, la
perception de la réussite sont basés sur le succès financier et matériel alors que les
individus de sexe féminin sont relégués à des tâches dites « secondaires » ou non
matériels comme l’éducation des enfants, la responsabilité du ménage et les tâches
dites « faibles ».
Les sociétés a tendance féminine sont caractérisées par le chevauchement des
tâches et la possibilité qu’un homme ou une femme puissent occuper les mêmes
fonctions. Dans ces sociétés, les individus sont moins intéressés par le succès
matériels et la reconnaissance que celles dites masculines. Hofstede considère que
la culture féminine est plus intéressée par les relations humaines proches que par le
succès matériel.
La distance hiérarchique ou « power distance » est définie comme « le niveau
auquel les individus membres d’institutions ou d’organisations d’un pays sont prêt à
accepter la distribution inégalitaire du pouvoir » (Hofstede, 2001). La distance
hiérarchique peut donc être définie comme le degré d’inégalité attendu et accepté
par les individus. La distance hiérarchique est donc mesurée à partir des systèmes
de valeur de ceux qui ont le moins de pouvoir. La répartition du pouvoir est
35
également expliquée à partir du comportement de ceux qui ont le plus de pouvoir,
des leaders plutôt que des suiveurs. L'autorité ne se maintient que si elle rencontre la
soumission; la fonction d'encadrement n'existe que comme complément à une
situation de subordination (Bernard, 1994).
L’indice de contrôle d’incertitude ou « Uncertainty Avoidance » d’un pays est
l’expression du niveau d’anxiété qui existe dans une société donnée face à un avenir
incertain (Hofstede, 1980). Ce niveau d’anxiété fait partie de la programmation
mentale des membres de cette société appris dans leur famille, à l’école, puis dans
leur vie d’adulte. Le degré de contrôle d’incertitude d’un pays mesure donc le degré
d’inquiétude de ses habitants face aux situations inconnues ou incertaines (Bernard,
1994). Ce sentiment s’exprime, entre autres, par le stress et le besoin de prévisibilité.
3.2.1 Les résultats des travaux d‘Hofstede
Les résultats les plus pertinents de cette étude concernent la position qu’occupent
les pays arabes selon les cinq dimensions par rapport à d’autres pays européens,
américains ou asiatiques. Les graphiques ci-dessous présentent la position des
certains pays comparativement à deux dimensions à chaque fois. La plupart des
managers interrogés ont soit fait leurs études soit en France ou aux Etats-Unis, soit
ont vécu et travaillé dans ces pays. Il serait donc intéressant de comparer les
résultats de ces trois pays par rapport aux dimensions culturelles définis par
Hofstede.
Dans le premier graphique, les dimensions « contrôle de l’incertitude » et « distance
hiérarchique » sont opposés.
Figure 3 : Comparaison des dimensions IDH et ICI
Source : Management interculturel – Dupuis (2005)
Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude
Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique
++Pays ArabesPays Arabes
FranceFrance
EspagneEspagne
ItalieItalie
Pays scandinavesPays scandinaves
USAUSA
GrandeGrande--BretagneBretagne
AllemagneAllemagne
JaponJapon
Contrôle de l’incertitude
+
36
On note dans ce premier graphique que les pays arabes acceptent volontiers une
grande distance hiérarchique et donc intègrent facilement l’existence de niveaux
sociaux différents. L'inégalité dans une société est visible à travers l'existence de
classes sociales : supérieure, moyenne, ouvrière, qui n'ont pas les mêmes facilités
d'accès à certains avantages de la société dont l'éducation (Bernard, 1994). Les
chercheurs constatent que, dans la plupart des sociétés, classe sociale, niveau
d'étude et profession sont étroitement liés (Hofstede, 1980). Ces trois facteurs, cités
comme sources de programmation mentale, sont interdépendants. Hofstede
démontre que dans les pays à fort IDH, cela s'applique à toutes les catégories
d'emplois, quelque soit leur statut.
Dans le cadre de pays à forte distance hiérarchique, les supérieurs et les
subordonnés se considèrent comme inégaux par nature dans un système fondé sur
une inégalité existentielle (Bernard, 1994). Les relations entre subordonnés et
supérieurs sont souvent chargées d'affectivité. Philippe d'Iribarne dans "La logique
de l'honneur" écrit à ce sujet : "Le caractère souvent fortement émotionnel des
relations hiérarchiques en France est étonnant. La diversité des sentiments envers
les supérieurs est extrême : on peut les adorer ou les détester avec la même
intensité". De ce point de vue, France et pays arabes sont proches. Par contre, les
Etats-Unis ont un faible indice de distance hiérarchique, ce qui peut expliquer
pourquoi aux Etats-Unis les hommes politiques et les représentant du peuple sont
plus accessible et beaucoup moins distant. Dans les pays arabes, les
gouvernements entretiennent des relations très distancées avec leur peuple même
dans les pays riches comme les Emirats, l’Arabie Saoudite ou encore le Qatar. Dans
des pays plus pauvres, la distance hiérarchique est forte comme chez les Algériens,
Tunisiens et Marocains. Ce qui tend à contredire une des conclusions des
recherches sur les différences culturelles qui veut que plus un pays est riche plus son
IDH est faible (Bernard, 1994). Les cultures à fort IDH assoient l'autorité d'un patron
tandis que patrons et subordonnés se considèrent comme égaux par nature dans un
contexte à faible IDH où les rôles peuvent être modifiés : un subordonné peut
devenir demain un patron.
Notons par ailleurs que d’un point de vue religieux, l‘Islam reconnaît les classes
sociales et les différences selon la richesse, la connaissance et l’autorité. L’Islam
prône une hiérarchisation de la société et ses les membres sont invités à obéir à
37
leurs supérieurs. Les enfants doivent obéissance quasi-absolue à leurs parents et à
leur professeur. Le châtiment corporel est conseillé, ce qui est une marque de
soumission. Cependant, l’Islam rejette tout intermédiaire pour s’adresser à Dieu et
tout croyant doit se soumettre uniquement à Dieu. Ce qui semble être un paradoxe
est en fait une complémentarité. Le musulman doit certes se soumettre à Dieu (Islam
en arabe veut dire soumission) par la prière, la reconnaissance et la pratique de sa
religion (soumission verticale) mais doit aussi s’astreindre à des règles qui régissent
la vie quotidienne comme la modestie, le respect des autres et de ses parents en
particulier (soumission horizontale). Il doit accepter sa situation comme étant une
décision divine pour autant qu’il ait fait les efforts nécessaires pour progresser
socialement et financièrement.
Dans le deuxième graphique ci-dessous, nous remarquons que la différence dans
l’indice de masculinité est moins marquée que pour celui de la distance hiérarchique
pour les pays étudiés (France, Etats-Unis et pays arabes).
Figure 4 : Comparaison des dimensions Masculinité et ICI
Source : Management interculturel – Dupuis (2005)
Dans les cultures féminines, comme aux Pays Bas, on préfère venir à bout des
conflits par le compromis et la négociation; chaque pays a pour cela des outils
institutionnels différents (Chanlat, 2005). Dans une culture masculine, la famille
apprend aux enfants l’assurance, l’ambition, la compétition et les organisations
mettent l’accent sur les résultats. Dans une société féminine, la famille enseigne aux
enfants la modestie et la solidarité; les organisations préfèrent récompenser sur une
base égalitaire (Bernard, 1994).
Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude
Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude
++
MasculinitMasculinitéé MasculinitMasculinitéé
++
Pays ArabesPays Arabes
FranceFrance
EspagneEspagne
ItalieItalie
Pays scandinavesPays scandinaves
USAUSA
GrandeGrande--BretagneBretagne
AllemagneAllemagne
JaponJapon
38
Les pays arabes ont une valeur médiane de l’indice de masculinité. Ce qui pourrait
s’expliquer par le fait que pour ces pays, l’Islam prône la loi du talion (dent pour dent)
mais suggère fortement dans la mesure du possible et si le croyant en est capable,
de pardonner en cas de conflit, d’agression ou de faute grave. Les procès pour
diffamation, pour non respect des règles de commerce ou pour récupérer son droit
sont rares. Dans ces pays, on fait souvent appel à un intermédiaire où une
connaissance qui pourrait gérer et régler les conflits.
La différence dans l’indice de contrôle de l’incertitude est beaucoup plus marquée
que pour celui de la masculinité. Si aux Etats-Unis, les règles de travail sont moins
rigides qu’en France, c’est que les travailleurs américains sont moins à l’aise avec le
contrôle (Bernard, 1994). Les scandales financiers récents (Worldcom ,Enron) et la
crise des subprimes sont certainement l’expression la plus radicale de cette
propension qu’on les cadres américains à traiter les affaires dans le strict esprit de
liberté. Dans les pays à fort contrôle de l’incertitude, comme les pays latins, c’est
l’absence de règles qui est déstabilisante. En France, les règles de travail font l’objet
de textes de lois nettement plus rigides et plus contraignantes qu’aux Etats-Unis. De
nombreuses lois, formelles et informelles, contrôlent les droits et devoirs des
employeurs et des salariés (Bernard, 1994). De nombreux règlements internes
contrôlent le processus de travail. Les membres de ces sociétés ont été
programmés, depuis leur petite enfance, à se sentir à l’aise dans des
environnements structurés : ce qui se passe réellement est moins important que la
satisfaction de ce besoin. Philippe d’Iribarne remarque, que dans l’usine française il
existe "une règle rigide, une pratique molle". Par contre selon D’Iribarne, les pays à
faible ICI (indice de contrôle de l’incertitude) ont une aversion émotionnelle pour les
règles formelles. Les règlements ne sont établis qu’en cas d’absolue nécessité,
comme par exemple déterminer si on circule à droite ou à gauche de la chaussée. Le
comportement est fondé sur une habitude collective renforcée par le contrôle social.
Dans le monde du travail, le degré d’anxiété conduit à des différences notoires de
comportement. Dans les pays à fort ICI, les gens aiment travailler dur : on se presse
car le temps c’est de l’argent. Dans les pays à faible ICI, les gens sont capables de
travailler dur s’il le faut, mais ils aiment se détendre et le temps est le cadre qui
permet de s’orienter (Bernard, 1994).
39
Dans les pays arabes, la notion de perte ou de gain de temps est toute relative. Pour
ces pays, on ne perd pas de temps mais on le partage. Un proverbe arabe dit que
« celui que veut aller vite prend du retard ». Autrement dit, les gens ne sont pas
pressés. Certes on travaille pour gagner sa vie mais surtout pour plaire à Dieu et à
ses proches. L’anxiété est plutôt faible dans les pays arabes car les musulmans
croient à la destinée. « Si mon avenir est déjà écrit, a quoi bon s’en inquiéter » disent
les Arabes. Ce qui explique la position médiane des pays arabes sur la courbe du
ICI.
Jacques Horovitz cité par Marie-Claude Bernard (1994) dans les fiches de lecture de
la Chaire D.S.O. du CNAM a réalisé une étude sur le contrôle exercé par la direction
générale dans les entreprises françaises, allemandes et britanniques. Les patrons
anglais se préoccupent plus de la stratégie que du fonctionnement quotidien, mais
c’est l’inverse en France et en Allemagne (Horovitz, 1980). Les problèmes
stratégiques, non structurés par définition, demandent une plus grande tolérance de
l’ambiguïté que les problèmes opérationnels. Dans la mesure où ils tolèrent plus
facilement les comportements déviants, les pays à faible ICI (indice de contrôle de
l’incertitude) sont un terrain plus propice aux innovations. Mais, ils semblent perdre
leur avantage lorsqu’il s’agit de développer ces innovations jusqu’à leur complète
réalisation (Bernard, 1994). La Grande-Bretagne a remporté plus de prix Nobel que
le Japon, mais ce dernier a mis plus de nouveaux produits sur le marché (Horovitz,
1980).
L’indice Individualise/Collectivisme est certainement celui où les différences sont le
plus marquées entre pays arabes et l’Occident. Le graphique ci-dessous, issu des
recherches d’Hofstede (1980) illustre bien l’écart entre les pays arabes où l'intérêt du
groupe prime l'intérêt individuel. La solidarité familiale bien connue des pays arabes
en est l’aspect le plus marquant, sachant que le premier groupe auquel nous
appartenons est la famille, ou famille élargie en anthropologie culturelle. Les enfants
restent dépendant de leurs parents jusqu'à un âge avancé et vivre en famille sous le
même toit est une marque de solidarité. Les filles en particulier ne quittent pas la
maison du père avant leur mariage et peuvent dans certains cas rester au-delà. Les
recherches d’Hofstede ont également montré que plus un pays est riche, plus ses
habitants ont tendance à se comporter de façon individualiste. Les cas particulier des
pays du Golf, riche en pétrole, montre bien l’incidence des racines culturelles arabes
40
(Bernard, 1994). Cependant, des nuances doivent être apportés à ses conclusions.
Dans les pays colonisés comme le Maghreb, le brassage des cultures occidentales
et orientales, l’ouverture des frontières et l’augmentation exponentielle des échanges
commerciaux, ainsi que les flux migratoires ont fait, dans certaines couches de
population aisée des pays arabes pauvres, basculé la balance vers un individualisme
plus marquée.
Figure 5 : Comparaison des dimensions Individualisme et IDH
Source : Management interculturel – Dupuis (2005)
Dans une culture collectiviste comme celles des pays arabes, embaucher une
personne de la famille ou qui appartient à un groupe ethnique plus ouvert est
courant, indépendamment des compétences (Bernard, 1994). Le lien familial
subordonne les aptitudes intellectuelles. L’embauche est considérée comme une
relation « familiale ». Souvent, les mauvaises performances d'un salarié ne sont pas
une raison suffisante pour licencier. Il devient alors très difficile dans ces conditions
pour un manager formé aux concepts occidentaux de gestion d’équipes (fixer des
objectifs quantifiables, contrôler l’exécution, évaluer les performances, décider des
sanctions ou des primes) d’établir sa crédibilité et son autorité. Les managers des
pays arabes forment alors un sous-groupe minoritaire emprunt d’une culture
managériale individualiste dans un milieu collectiviste. Dans les pays du Maghreb,
les élites du pays et les managers sont en grande majorité formés dans les pays
européens, aux Etats-Unis et au Canada. Les conflits culturels, les échecs de projet
ainsi que le stress et la souffrance au travail sont alors à craindre. Les techniques de
IndividualismeIndividualisme
IndividualismeIndividualisme
++
Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique
++
JaponJapon
FranceFrance
EspagneEspagne
ItalieItalie
Pays scandinavesPays scandinaves
USAUSA
GrandeGrande--BretagneBretagne
Pays ArabesPays Arabes
AllemagneAllemagne
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  • 1. 1 Des ressources et des paradoxes inattendus dans le management et la performance des organisations: Cas des PME marocaines. Rapport de thésis dans le cadre de la soutenance du diplôme de l’Executive Doctorate in Business Adminisration de l’Université Paris Dauphine 27 Février 2009 Rachid Alami Executive Doctorate in Business Administration Paris Dauphine University ralami_aroussi@yahoo.ca
  • 2. TABLE DES MATIERES Résumé………………………………………………………………………………………. 2 Abstract ……………………………………………………………………………………… 2 Introduction ………………………………………………………………………………… 3 Partie I 1.1 Théories et concepts managériaux impliqués dans cette recherche ……….. 8 1.2 Culture et management des organisations ………………………………………. 9 1.2.1 La sociologie ………………………………………………………………… 12 1.2.2 La sociologie des organisations et les écoles de pensée …………… 15 1.3 L’école classique ………………………………………………………………………. 15 1.4 L’école des ressources humaines ………………………………………………….. 18 1.5 L’école de la contingence ……………………………………………………………. 22 2. Management, culture et organisation ……………………………………………….. 25 2.1 L’importance de la culture ………………………………………………….. 25 2.2 Approche des différences culturelles ……………………………………… 28 3. La culture intégrée aux organisations et au management ……………………….. 31 3.1 Fonction et enjeux de la culture d’entreprise …………………………….. 32 3.2 Le courant de gestion comparée ……………………………………………. 33 3.2.1 Les résultats des travaux d‘Hofstede ……………………………. 35 3.2.2 Cas du Maroc …………………………………………………………. 42 3.2.3 La relation au temps ………………………………………………… 51 3.2.4 L’influence culturelle selon D’Iribarne …………………………… 53 3.5. Avantages et inconvénients des travaux antérieurs ……………………. 55 3.6 Management et environnement islamique …………………………………. 57 3.7 La particularité de chaque modèle de management ……………………… 60 4. Le management au Maroc ……………………………………………………………….. 63 5. Islam et modernité ………………………………………………………………………… 65 6. L’histoire économique de l’aire musulmane …………………………………………. 68
  • 3. PARTIE II 1. Méthodologie de recherche, pertinence du sujet et hypothèses ………………… 75 2. Les hypothèses ……………………………………………………………………………. 76 3. La faisabilité ……………………………………………………………………………….. 78 4. Les outils de la recherche ………………………………………………………………. 78 5. Les variables étudiées …………………………………………………………………… 79 6. La méthode de collecte des données …………………………………………………. 84 7. Les problématiques rencontrées ……………………………………………………….. 86 8. Les échelles de mesure ………………………………………………………………….. 88 9. Les techniques statistiques utilisées ………………………………………………..... 89 Partie III 1. Résultats de l’étude ……………………………………………………………………… 90 1.1 Les fréquences des résultats principaux ……………………………………………. 90 1.2 Les analyses statistiques ………………………………………………………………. 93 1.3 La construction des facteurs d’analyse ……………………………………………… 95 2. Analyse explicative des phénomènes étudiés ……………………………………….. 96 3. Les variables explicatives de la performance ……………………………………….. 98 4. Conclusion de la partie analyse des données ……………………………………….. 102 5. Apports managériaux de l’étude ……………………………………………………….. 105 Discussion …………………………………………………………………………………….. 107 Conclusion …………………………………………………………………………………….. 108 References …………………………………………………………………………………….. 109
  • 4. LISTE DES TABLEAUX Tableau 1 : Principes de l’école classique ……………………………………………… 16 Tableau 2 : Les différents systèmes de rémunération ……………………………….. 20 Tableau 3 : Principes de l’école de la contingence ……………………………………. 23 Tableau 4 : Approche managériale de la culture ………………………………………. 33 Tableau 5 : Caractéristiques des sociétés communautaires et individualistes….. 41 Table 6: Cultural dimensions variability according to Hofstede ……………………. 43 Tableau 7 : Logiques culturelles comparées……………………………………………. 53 Tableau 8 : Forces et faiblesse des modèles d’Hoftsede et de D’Iribarne ………… 56 Tableau 9 : Comparatif des dimensions managériales……………………………….. 61 Tableau 10 : Caractéristiques et contexte de l’objet de recherche…………………. 77 Tableau 11 : La faisabilité de l’étude et le cadre de travail…………………………… 78 Tableau 12 : Indicateurs de mesure des variables……………………………………… 82 Tableau 13: Avantages et inconvénients du Questionnaire auto-administré …….. 85 Tableau 14 : Avantages et inconvénients des questions fermées………………….. 86 Tableau 15 : Définition des variables indépendantes………………………………… 88 Tableau 16 : Définition des facteurs d’analyse…………………………………………. 95 LISTE DES FIGURES Figure 1 : Rappel l’évolution de l’histoire du management…………………………….13 Figure 2: Les dimensions de la culture…………………………………………………… 26 Figure 3 : Comparaison des dimensions IDH et ICI……………………………………. 35 Figure 4 : Comparaison des dimensions Masculinité et ICI…………………………. 37 Figure 5 : Comparaison des dimensions Individualisme et IDH…………………….. 40 Figure 6 : Positionnement relatif des pays selon l’indice IDH……………………….. 44 Figure 7 : Positionnement des pays selon l’indice Individualisme/Collectivisme…47 Figure 8 : Positionnement relatif des pays selon l’indice ICI………………………… 49 Figure 9 : Positionnement relatif des pays selon la nature de la communication… 50 Figure 10 : Positionnement relatif des pays selon la relation au temps…………… 52 Figure 11 : Avantages compétitifs liés à l’environnement juridico-économique…. 64 Figure 12 : Evolution de l’effort relationnel du manager……………………………… 102 Figure 13 : Evolution de l’effort d’adaptation du manager…………………………… 106
  • 5. 1 Remerciements Je tiens à remercier en tout premier lieu Mr Jean-François CHANLAT qui a dirigé cette thèsis. Tout au long de ces deux années de travail, il a su orienter mes recherches aux bons moments en me faisant découvrir au travers de son regard d’anthropologue et de sociologue, toute la richesse scientifique et humaine de l’histoire des organisations. Mr CHANLAT a toujours été disponible pour d’intenses et rationnelles discussions. Pour tout cela, sa confiance, son engagement et son soutien moral, je le remercie vivement. Je remercie Mr Michel KALIKA qui a su mettre sur pied l’Exécutive DBA, un programme pertinent et de qualité. Cette formation été une expérience hors du commun, intense et m’a permis d’ouvrir mon horizon de réflexion et de pensée. Il y a certainement un « avant l’EDBA » et un « après l’EDBA ». Je remercie également tous les professeurs, et en particulier Monsieur Eric CAMPOY et Monsieur Pierre ROMELEAR, de leur contribution dans la qualité, la pertinence et la profondeur de leur enseignement. Enfin, ce travail de recherche passionnant n’a pu être possible qu’avec l’aide soutenue de ma famille dont je ne pourrais jamais les remercier suffisamment pour tous les sacrifices consenties tout au long de ces années de travail. Un remerciement tout particulier à ma mère et à mon épouse qui ont continué à croire en moi, même dans les moments les plus difficiles et qui a toujours apporté leur soutien et leur amour.
  • 6. 2 Résumé Comment certaines entreprises marocaines arrivent-elles à être économiquement et socialement performantes alors que leur propriétaire laissent le plus souvent imposer une logique managériale basée sur l’émotionnel, les croyances religieuses et le paternalisme au lieu du rationnel, la logique et de l’autonomie ? Comment, dans ces conditions, les managers marocains ou étrangers, formés aux concepts classiques du management occidental, arrivent-ils à gérer les défis managériaux au quotidien et assurer la stabilité de leur entreprise? Cet article se propose, à travers l’analyse de cas d’entreprises marocaines d’identifier les facteurs clés de succès et les leviers inattendus de performance et de stabilité de ces entreprises et d’expliquer comment les dimensions culturelles et religieuses sont incorporées aux notions telles que l’amélioration continue, le travail d’équipe, la gestion des ressources humaines ou la productivité dans un contexte de culture intense. ___________________________________________________________________ Keywords Culture et management – Performance et productivité – Gestion des ressources humaines – Religion et management __________________________________________________________________ Abstract How could some Moroccan companies be economically and socially efficient when their owner leaves most often impose a managerial logic based on emotional, religious beliefs and paternalism instead of rationality, logic and autonomy? How, then, Moroccan and foreign managers, trained in the concepts of Western management, come to manage the daily managerial challenges and ensure the stability of their business? This article attempts, through case analysis of Moroccan companies to identify key success factors and unexpected leverage that are used to enhance performance and to maintain stability of these companies and it tries to explain how cultural and religious dimensions are, in different cultural context, incorporated into concepts such as continuous improvement, teamwork, human resource management or productivity.
  • 7. 3 Introduction "L’Allemand vit en Allemagne, le Parisien vit à Paris, le Turc vit en Turquie, mais l’Anglais vit chez lui" (Goring, 1909). Cette citation de Goring datant de 1909 nous rappelle que chacun regarde le monde à travers les fenêtres d’un "chez soi" culturel; chacun agit comme si ceux qui viennent d’autres pays avaient quelque chose de spécial (un caractère national), la norme se trouvant chez soi (Bernard, 1994). D’un autre coté, Fayol (1918) s’exprima ainsi: « si l’on pouvait faire abstraction du facteur humain, il serait assez facile de constituer un organisme social ». Serait-il donc impossible de concilier la diversité des cultures avec l’universalité des valeurs? Le management multiculturel efficace si chère aux organisations serait-il qu’un mythe auquel les dirigeants d’entreprise veulent nous faire croire pour mieux nous contrôler et ainsi réduire les risques tout en améliorant la performance ? Les frontières physiques et institutionnelles ayant tendance à disparaître, il est normal que les cultures tendent à se rapprocher. On passe donc du domaine de l’international à celui de la globalité du monde Cette étude ne prêtant pas apporter des réponses radicales ou définitives aux difficultés que peuvent rencontrer les entreprises dans un milieu culturel différent. L’être humain est un ensemble complexe, imprévisible et qui porte en lui un héritage culturel et social et se construit également à travers ses relations avec son entourage. Chanlat (2008) nous rappelle à ce titre que « La présence d’autrui joue également un rôle dans la genèse de l’identité socioculturelle. Tout groupe humain se différence au contact d’autrui. Ce double rapport (individuel et collectif) à l’altérité pénètre tous les niveaux de la vie sociale », qui plus est dans la vie des organisations. Cette recherche veut apporter une lumière sur un phénomène récurent qui est celui de l’adaptation culturelle des managers qui évoluent dans des environnements différents de leur origine. La validation des hypothèses est restreinte à un environnement particulier. Des recherches similaires à plus grande échelle seront présentées afin de valider ou d’invalider les résultats trouvés. Dans la littérature sur les organisations, Gouldner (1959) cité dans Maggi (2006) avait distingué deux modèles principaux d’étude des organisations qui sont le modèle rationnel et le système naturel (natural-system). Thompson (1967) cité dans Hafsi (2008) avait ajouté à cette distinction le fait que le modèle rationnel découle d’une stratégie de système fermé et le modèle de système naturel découle d’une stratégie de système ouvert.
  • 8. 4 Le premier occulte toute relation de l’organisation avec son environnement, alors que le second en fait l’aspect principal. La première approche est foncièrement déterministe alors que la seconde et non déterministe par excellence. L’approche du modèle rationnel se base sur une stratégie de système fermé mettant l’accent surtout sur la performance et l’efficacité. Dans un tel contexte l’incertitude est occultée, toute action est opportune et son résultat est prévisible. L’organisation est en quelque sorte autonome et indépendante de son environnement. Dans une telle perspective, l’aspect social et culturel des ressources est occulté mais toute l’attention est centrée sur l’utilisation et l’optimisation de ces ressources. C’est le cas des premiers auteurs ou ce que l’on appelle les classiques comme Fayol, Taylor, Ford ou Weber (le modèle bureaucratique). C’est encore le cas des théoriciens du comportement comme Mayo, Fayol, Maslow, Herzberg ou McGregor plus centrés sur des théories portant sur la motivation, le leadership et les communications interpersonnelles. Toutes portent sur l’utilisation des ressources, le but étant la maximisation de l’output à partir des ressources qui sont considérées comme données et sur lesquels l’environnement n’a aucune influence. Dans le cadre de ce modèle, tous ces théoriciens des organisations ont abordé la question du fonctionnement organisationnel à partir d’une multitude de points de vue qui procèdent d’une approche déterministe où l’environnement culturel est occulté. En définitive, durant la première moitié du siècle les théoriciens des organisations dans leur recherche de principes universels relatifs aux structures, au contrôle et à la performance ont ignoré d’une certaine façon l’environnement culturel. Ainsi dans leur recherche du « one best way », des théoriciens comme Weber soutenaient que les structures bureaucratiques étaient valables pour toute organisation et Taylor considérait ses principes du management scientifique comme universels. Dans les milieux de culture intense où notre étude se situe, le rôle de l’environnement, des croyances et des traditions est déterminant. Les milieux de culture intense dans lesquels opèrent les entreprises marocaines qui sont des milieux caractérisés par la transcendance et l’omniprésence de la religion islamique avec tout ce que cela comporte comme contraintes, et la conjoncture sociale et politique dans laquelle ces organisations progressent, ont rendu complexe la compréhension de leur fonctionnement, principalement pour des individus formés dans les universités occidentales.
  • 9. 5 Nous savons que la théorie de la contingence est venue réfuter l’approche du « one best way » pour ce qui a trait à la structuration des organisations (Chanlat, 2005). Elle met l’accent, en particulier, sur le fait que la relation organisation - environnement privilégie le rôle prédominant de l’environnement tel que l’ont exposé Chanlat (1999) et Thompson (1967). L’objectif de cette recherche vise à déceler les facteurs clés de succès des organisations dans un milieu de culture différente, qui sont des milieux caractérisés par des contraintes majeures et où prédominent de fortes idéologies, religions, croyances et cultures locales, parfois en opposition aux règles classiques du management. En particulier, je vais essayer de démontrer comment les entreprises marocaines arrivent à performer malgré des méthodes de gestion en porte-à-faux par rapport aux concepts classiques du management et identifier les leviers de croissance et de performance qui assurent leur pérennité et leur stabilité. Quels sont les facteurs clés de succès et les leviers inattendues qui résonnent et ont des effets positifs sur la performance des individus qui sont dirigés par des managers occidentaux ou nationaux formé dans les écoles occidentales ? Cette étude essayera de mettre en évidence le fait que les concepts managériaux et les théories de gouvernance et d’amélioration de la performance et de la productivité appris tout au long de mes années universitaires n’ont pas engendré les effets espérés dans un contexte culturel différent comme celui du Maroc. Pourquoi les méthodes de gestion traditionnellement acceptées et enseignées dans les écoles de management occidentales et même locales ne fonctionnent pas quand il s’agit de les appliquer dans un contexte culturel différent ? Telle est la question à laquelle nous essayerons de répondre. Pour ce faire, ce travail se divise en trois parties. La première partie présente les écoles de pensée du management des organisations et nous conduit à travers le chemin qui nous mène à comprendre pourquoi les théoriciens en sont arrivés à considérer la dimension humaine (donc culturelle) comme variable critique de la gestion des organisations. Chacune des théories (théorie classique, théorie de la contingence et théorie des ressources humaines) sera analysée selon ses objectifs, ses mécanismes et ses principaux élements. Chaque théorie est présentée de façon à comprendre quels en étaient les
  • 10. 6 enjeux, les points forts et les points faibles. Pousser par le désir continue d’améliorer la performance des organisations, chaque théorie prend ses racines dans les faiblesses de sa précédente pour apporter un nouveau regard sur les relations travail-performance-individu. Parler de culture d’organisation nous impose de faire une introduction sur la sociologie des organisations et sur les mécanismes qui régissent les liens sociaux entre individus et comment les acteurs construisent et coordonnent des activités organisées. Par la suite, nous essayerons de comprendre les rapports qui régissent les relations entre gestion et culture et quels sont les travaux qui ont été menés pour mesurer les écarts culturels entre nations et qui ont fait naître des mots tels que « différence culturelle » ou « distance physique ». A chaque étape, un comparatif avec, soit les concepts de l’Islam, soit l’expérience du terrain, sera présenté afin de comprendre les enjeux de cette étude et la relation qui peut exister entre religion et management. Différents courants d’analyse des différences culturels seront présentés pour nous permettre de synthétiser à la fin de cette première partie les concepts généraux de chaque modèle de management et de les comparer. Tout au long de cette partie, nous exposerons comme éléments comparatifs, les méthodes managériales appliquées au Maroc et les contradictions qui peuvent en être déduites par rapport aux théories occidentales. Nous présenterons également dans cette partie la question de l’Islam et du management et de l’émergence d’un nouveau type de managers arabes qui tentent de concilier valeurs managériales et valeurs éthiques islamiques afin de mieux comprendre le phénomène nouveau d’incursion de l’Islam dans le management. La deuxième partie sera consacrée à la présentation du cas de l’entreprise pour laquelle j’ai travaillé pendant 4 ans laquelle a été le déclencheur du désir de faire ses recherches sur les différences culturelles et les ressources inattendues à la base de la performance des PME marocaines. Il sera question dans cette partie de décrire les faits, les expériences et les anecdotes qui ont jalonnées toutes ces années de pratique au Maroc. Il s’agit de présenter les difficultés de départ (relation hiérarchique, difficulté de communication, pouvoir, notions classique de performance, application des théories et modèles managériaux universels) et de résumer les expériences locales d’autres managers à partir de questionnaire distribués.
  • 11. 7 Nous établirons les hypothèses de recherche à valider ainsi que la perspective théorique appliquée tout au long de ces travaux. Nous expliquerons comment les données ont été établies et quelles sont les variables définies et étudiées. La troisième partie sera consacrée aux résultats de la recherche et à la validation ou non des hypothèses de départ. Il sera question de mettre en évidence les ressources et leviers utilisés pour améliorer la performance dans les organisations mais également dans la gestion des équipes. Par ailleurs, je vais tenter d’expliquer comment, grâce à ma double culture, occidentale et arabe, à mon expérience personnelle et aux études de terrain, les managers de type occidental ont su adapter les concepts généraux occidentaux de management et de gouvernance aux subtilités locales. En particulier, l’introduction dans le langage managérial standard de concepts religieux et culturels tels que des notions d’éthique religieuse, de récompense divine, de rassemblements familiaux autour d’un repas ou encore de notion de chef de famille. On verra enfin que la performance de certaines entreprises marocaines n’est pas uniquement le résultat d’une stratégie de croissance ou de l’amélioration de la productivité. Derrière cette performance, se cache en fait un conflit permanent ente éthique universaliste (croyance religieuse, notion du bien et du mal, droits de l’homme et de la femme) et éthique individualiste (comportement d’affaires, corruption, fraudes, opportunisme). Pourquoi ce paradoxe existe-t-il entre sphère privée et sphère publique et quel est son impact sur les méthodes de gestion?
  • 12. 8 Partie 1 1.1 Théories et concepts managériaux impliqués dans cette recherche Etudier l’influence de la culture sur la performance des organisations nécessite d’aborder un ensemble de théories et de concepts managériaux afin de comprendre pourquoi les chercheurs en sont arrivés à considérer les divergences cultuelles comme une variable critique des organisations. En effet, aborder la culture induit de parler de sociologie. Chanlat (2006) nous rappelle que « l’individu se construit par rapport à l’autre ». Pour comprendre les relations individuelles et communautaires, il faut comprendre le lien social et les valeurs qui poussent à agir. De là, on est amené à présenter certaines contributions de la sociologie des organisations si l’on veut comprendre comment les acteurs construisent et interagissent au sein des organisations. N’oublions pas que l’objectif avoué des entreprises privées est d’être rentable et productive. Les managers cherchent donc à maximiser les ressources pour améliorer la performance de leur entreprise. Ce qui fût déjà le cas au début de l’ère industrielle et l’invention de la théorie classique de l’organisation scientifique du travail. Cette théorie est venue répondre, par la mise en place de méthodes rationnelles de production de masse, à une forte demande. Les ingénieurs ont donc répondu à leur façon aux contraintes du marché. Leurs réponses ont engendré de nouvelles questions auxquelles la théorie de la contingence est venue répondre mais tout en engendrant elle-même de nouvelles questions auxquelles la théorie des ressources humaines a essayé d’y répondre. Cette spirale sans fin de questions- réponse nous a mené de nos jours à apporter une petite pierre à l’édifice en construction des sciences de gestion. Chaque théorie vient répondre aux défis de son époque tout en se construisant sur les fondements de celles qui l’ont précédé. Une sorte de fil conducteur nous guide tout au long de cette recherche pour comprendre pourquoi en est on arrivé à disséquer les différences culturelles et en faire une autre variable a prendre en considération si l’on veut « comme à l’accoutumée » améliorer la performance des organisations.
  • 13. 9 1.2 Culture et management des organisations L’influence de la culture et des traditions sur le management et la performance des organisations n’a pas été toujours considérée comme un facteur critique. Il a fallu attendre l’apparition d’auteurs comme Durkheim, Marx, Weber, Mayo ou d’autres socio-anthropologues pour comprendre les ressorts de l’action humaine, les motivations qui se cachent derrière toute action individuelle ou encore les luttes de pouvoir. Les socio-anthropologues ont compris l’importance de l’encastrement culturel dans les sphères de la vie courante et en particulier dans les organisations et la manière dont elles sont gérées. Cependant, le chemin qui a mené à la reconnaissance de la culture comme un élément clé de la performance des organisations a été long et laborieux. En effet, plusieurs écoles de pensée ont pris le devant de la scène et ont constitué, chacune à leur époque, le modèle à suivre comme le modèle du « one best way » très cher à Ford et Taylor, même si Taylor s’est intéressé aux aspects administratifs et à la structure organisationnelle comme moyen d’améliorer la performance. . On ne peut donc pas introduire le management interculturel et l’influence des traditions et de la culture sans introduire les différents courants de pensée qui se sont succédés depuis le 18ieme siècle, en commençant par le fameux "Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations" (Adam Smith, 1776) et qui ont permis l’émergence de nouvelles idées et théories. Adam Smith a été le précurseur des théories scientifiques des organisations en proposant des schémas explicatifs rationnels et en mettant en évidence la possibilité de réaliser des gains de productivité dans l'industrie grâce à la division du travail. Par son fameux exemple d'une manufacture d'épingles, Smith montre les avantages de la division du travail. Il cite entre autre, l’accroissement de l’habilité des ouvriers et l’économie de temps pour passer d’une tâche à une autre (réduction des temps morts, meilleure organisation des tâches). Il parle également de l’invention des machines qui abrègeront le travail et permettront à un seul individu de faire le travail de plusieurs. Force est de constater que ces principes sont toujours d’actualité. Productivité, performance, rentabilité, gain de temps ou encore réduction des coûts sont encore de nos jours les vecteurs de croissance et de gain de part de marché. Les phénomènes de délocalisation en sont le parfait exemple. En délocalisant leur
  • 14. 10 production, les entreprises occidentales ont considérablement réduit leurs coûts, parfois de moitié. La réduction de ces coûts s’est faite non seulement par l’utilisation d’une main d’œuvre moins chère (Inde, Chine, Vietnam, Afrique du Nord) mais également grâce à l’optimisation des coûts de transport et de techniques de production comme le Juste à Temps ou encore le fameux « Kaizen » inventé par les japonais. Le travail en flux tendu, la réduction des stocks, l’informatisation des processus de production par l’utilisation de logiciels comme les ERP (Entreprise Resources Planning), les CRM (Customers Relationship Management), l’utilisation des robots dans la production automobile ou encore l’Internet ont considérablement participé à l’amélioration de la productivité et réduit de façon sensible les délais de production. C’est ainsi qu’une entreprise de textile comme ZARA arrive à lancer de nouveaux modèles sur le marché en 6 semaines là où il en faut plus de 12 pour ses concurrents comme H&M ou GAP. Le gain de temps (déjà cité par Adam Smith) est crucial pour attirer aujourd’hui des clients toujours plus avides de nouveauté. La transformation des sociétés agricoles en société industrielle à travers les deux siècles précédents et par la suite en multinationales durant notre époque a apporté avec elles d’autres phénomènes inattendus ou tout au moins mal cernés par les auteurs de la théorie classique des organisations. De nombreuses questions ont en effet été soulevées suite à l’apparition de phénomènes sociaux comme la souffrance au travail, les relations hiérarchiques, la motivation des ouvriers, le stress en milieu professionnel, les relations de pouvoir et les différences culturelles. Si les défenseurs de la théorie classique des organisations ont pour leur part répondu à des questions d’efficacité au travail, de remplacement de l’artisanat par des principes de gestion rigoureux et adaptés à la production de masse, de remodelage des rapports sociaux entre direction et travailleurs, ils ont certainement provoqué d’autres questions non moins importantes sans vraiment le vouloir. En effet dans les années 60, un nouveau courant de pensée émerge en réaction à l’apparition de critiques et de mouvements sociaux aux Etats-Unis. Issue des travaux de Mayo, ce courant se veut être une réponse à la montée du mécontentement des ouvriers (rappelons à cet effet le drame des usines de Rockefeller au Colorado où 16 personnes décédèrent suite à des manifestations sociales). Les industriels américains de l’époque vont financer des recherches en diligentant ces travaux à des
  • 15. 11 psychologues qui vont essayer de trouver des solutions afin de canaliser la colère et les protestations et essayer de trouver les ressorts pour trouver des solutions au malaise social. Ce qui conduit à l’émergence d’une nouvelle école de pensée défendue par des auteurs comme Maslow, Herzberg ou McGregor. De cette école surgira un aspect jusque là négligé : L’aspect social des organisations. Pour ces auteurs, toute entreprise est constitué d’un double système : technique et social. De nouvelles notions apparaissent alors comme l’équilibre individu-organisation, les besoins des individus et des groupes. Autrement dit, l’homme n’est plus une machine à produire mais une personne animée par une logique de sentiments et des désirs d’accomplissement. Selon l’école des ressources humaines, la productivité ne dépend pas uniquement de la division du travail et de l’efficacité des machines. D’autres facteurs interviennent, comme la dimension humaine donc psychologique de l’individu. A son tour, cette école de pensée va faire l’objet de critiques intenses. Comment expliquer que certaines entreprises s'avèrent incapables de survivre dans certaines circonstances malgré une GRH efficace. Il y aurai donc d’autres facteurs influents la performance. C’est ainsi que des auteurs comme Chandler, Minztberg ou encore Woodward postulent que l’efficacité d’une organisation dépend de son environnement et de ses caractéristiques propres (stratégie, taille, culture, technologie,..). Cette théorie est celle de la contingence. Les auteurs appartenant à l’école de la contingence se sont posés un certain nombre de questions. Comment expliquer la présence d'organisations performantes ne répondant pas aux principes de Fayol et Taylor qui pourtant entendaient définir le "one best way"? Comment expliquer que dans certains cas ces entreprises répondant au "one best way" s'avèrent contre-productives et inefficientes? A partir des travaux d’auteurs comme Woodward ou Mintzberg, les auteurs de cette théorie ont montré que la structure d’une organisation est reliée à des facteurs, dis contingents, contrairement à l’idée de l’école classique qui considère qu’il existe un structure idéale indépendamment du contexte. Par exemple, Woodward a montré ni l'histoire de l'entreprise, ni la branche d'industrie n’expliquaient les différences constatées. Les différences provenaient plutôt essentiellement de la technologie développée. Le grand intérêt de l’école de la contingence a été de montrer qu'il n'y avait pas de structure qui soit la meilleure pour toutes les organisations, puisque
  • 16. 12 cette structure dépend de la technologie employée et de l’environnement dans lequel elle évolue (Woodward, …..) La théorie de l’école de la contingence à son tour induit un certain nombre de questions. En effet, jusqu'à présent, les écoles de pensée se sont surtout intéressées aux aspects techniques et environnementaux des organisations. L’école des relations humaines défendu par des Afin de mieux comprendre les différents courants de pensée qui ont jalonné l’étude des organisations, il serait intéressant de présenter plus en détails les différents concepts sous-jacent à chaque école de pensée et de faire une analyse comparée qui met en évidence les points forts et les questions soulevées par chaque théorie. Cependant, une brève introduction sur la sociologie des organisations peut nous aider à mieux comprendre ce qui fait le lien social dans une organisation et comment celui-ci évolue et se transforme. 1.2.1 La sociologie La sociologie est la science du social qui essaie de comprendre ce qui fait le lien social. Elle essaie de comprendre les ressorts de l’action humaine et les valeurs qui motivent l’action. D’une manière générale, la sociologie tente d’apporter des réponses aux transformations sociales liées à l’apparition de phénomènes particuliers tels que la souffrance, les relations interpersonnelles, les religions ou encore l’organisation des individus rassemblés autour d’un objectif commun comme pourrait l’être les organisations. La sociologie prend ses racines dans le début de la modernité (Renaissance 15e – 16e siècle). A cette époque, l’homme cherche à se libérer des valeurs féodales du Moyen-âge et de la pensée dominante de l’Eglise. La remise en question des valeurs religieuses a permis l’affranchissement des individus. Les croyances séculaires ont perdu de leur légitimité et l’Eglise a perdu de son pouvoir au profit d’organisations politiques décentralisées. De ce point de vue, au cours des derniers siècles, l’Islam comme religion dominante des pays du Maghreb et en particulier le Maroc, est venu confirmé cette perte de légitimité des pouvoirs des lieux de prière a profit de la science. En effet, l’Islam insiste sur le rôle des sciences comme moyen de reconnaissance de Dieu. En découvrant les lois scientifiques qui régissent l’univers,
  • 17. 13 le croyant devrait être amené à la conclusion de l’unicité de Dieu. C’est donc à partir d’une recherche empirique, individuelle et entièrement basée sur des démonstrations rationnelles que le croyant dans le monde musulman se libère de toute emprise des dogmes religieux infondés. Dieu dit dans le Coran : « Seuls les savants me craignent vraiment ». Newton n’a t’il pas bouleverser son siècle en découvrant la gravitation universelle ? Si l'humanité était en mesure de révéler les lois de l'Univers, elle pouvait espérer découvrir les lois propres à la nature et à la société humaine. La liberté et la démocratie naissent donc avec la science et l’affranchissement de l’homme du joug de la religion comme elle a été appliquée jusqu’alors. La séparation de l’Eglise et de l’Etat a véritablement permis à la sociologie de voir le jour. La naissance de la sociologie au XIXe siècle s'explique par l'ampleur des mutations sociales et politiques et par la réflexion des fondateurs de la sociologie sur le devenir de la société industrielle. Les principaux auteurs ayant donné forme à cette nouvelle discipline sont principalement Auguste Conte, Alexis de Tocqueville et Karl Marx mais ses véritables fondateurs furent Emile Durkheim et Max Weber ainsi que Marcel Mauss. Il s'agit donc d'une discipline récente. Durkheim a formulé une célèbre phrase pour résumer la sociologie : « la sociologie ne vaut pas une heure de peine si elle ne sert à améliorer le sort des hommes » (Mauss, p.233.) Figure 1 : Rappel l’évolution de l’histoire du management Moyen-âge en Occident Autocratie, féodalisme, poids de l’église, souffrance, privilèges, centralisation domination des seigneurs, la vie est régie par ordre, liberté limitée Paysan en tant qu’outil de production Modernité XVII, XVIII - Remise en question des valeurs religieuses - Liberté et démocratie - Progrès - Révolution scientifique Révolution industrielle XIX, XX - Capital - Organisation du travail - Application de la science à l’industrie - Fordisme Nouvel ordre social, XX, XXI - Puissance des organisations - Mondialisation - Chocs culturels SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS SOCIOLOGIE Auguste Conte, Marx, Durkheim, Weber, Pareto Etzioni, Crozier, Sainsaulieu, Hofstede, D’Iribarne, Chanlat
  • 18. 14 Ci-dessus, un schéma qui montre l’apparition de la sociologie vers la fin du 19eme et le début du 20ieme principalement lorsque des auteurs comme Auguste Conte, Max Weber et Karl Marx étudient les changements profonds que subit la société suite au effets de la révolution industrielle. Il s’ensuit le courant de la sociologie des organisations, initié par Crozier qui après une mission d’étude de la productivité aux Etats-Unis, revient en France pour comprendre les changements que subissent les organisations après la deuxième guerre mondiale. Crozier s’intéresse à la fonction du management comme outil de modernité et aux phénomènes d’ajustement des organisations. Il analyse le fonctionnement des grandes organisations bureaucratiques en France. Il souhaite montrer que le système bureaucratique français ne correspond pas au modèle d'organisation rationnelle que Max Weber avait décrit dans « Economie et société ». D’autres auteurs, comme Ezioni, étudient les transformations des organisations et de l’influence du management des écoles américaines. Sortie grand vainqueur de la guerre, les Etats-Unis sont la plus grand puissance. Des investissements massifs sont réalisés en Europe pour la reconstruire. C’est le plan Marshall. Dans les années 70 va apparaître la courant de la diversité culturelle à travers des auteurs comme Hofstede, D’Iribarne ou Chanlat. Ces auteurs s’intéressent aux problèmes éthiques et à l'influence des cultures nationales sur le fonctionnement des organisations. La mondialisation des échanges et les phénomènes d’immigration vont engendrer des chocs de culture. L’univers de sens est différent selon la culture des individus. Des trois niveaux de la sociologie - macrosociologie, méso-sociologie microsociologie – c’est ce dernier qui nous intéresse pour cette étude. A travers les comportements, les pratiques, les traditions et les habitudes des individus avec lesquels ils tissent ou cherchent des liens sociaux, nous allons essayer de démontrer le rôle important de la culture dans la performance des managers formés aux écoles occidentales et qui exercent dans un milieu culturel et religieux intense et différent.
  • 19. 15 1.2.2 La sociologie des organisations et les écoles de pensée La sociologie des organisations est une branche de la sociologie qui étudie comment les acteurs différents d’une organisation construisent et coordonnent leurs activités organisées. Le champ d’application est principalement le lien social qui se divise en trois catégories : • La coordination : comment les organisations structurent la cohésion d’ensemble de leur fonctionnement malgré la complexité des activités à mener et les contraintes externes qu'elles subissent • La coopération : comment les acteurs de l’organisation parviennent à tisser des relations de travail satisfaisantes malgré leurs intérêts différents voir contradictoires • L’adhésion : quelles sont les valeurs présentes dans l’organisation et comment les acteurs s’y adhérent. L’objectif d’une entreprise est l’optimisation des investissements, qu’ils soient humains ou matériels afin de maximiser sa rentabilité. Pour arriver à l’optimum de production, les trois aspects cités plus haut (coordination, coopération, adhésion) ont tour à tour été exploités, parfois de façon individuelle, parfois en étant combiné, comme de nos jours, grâce notamment à la sophistication des outils de travail et aux techniques d’amélioration de la productivité humaine (Techniques de motivation, TIC, cercle de qualité etc…). Voyons maintenant comment chaque école de pensée a structuré sa démarche et quels ont été les principaux moteurs de leur développement. 1.3 L’école classique L’école classique a de toute évidence basée sa théorie sur une conception la coordination et la spécialisation. Elle a vu l’organisation comme une machine transformant les éléments reçus (inputs) en produits finis (outputs) de façon à améliorer la performance. Toute aspect social ou biologique est secondaire. Le système fonctionne indépendamment de son environnement. L’apparition de cette école vient en réalité répondre à des besoins précis. Le contexte industriel du XIXe siècle est marqué par des innovations technologies majeures comme l’électricité, le
  • 20. 16 chemin de fer ou encore la chimie moderne. Cette révolution industrielle appelle les organisations à s’adapter et à améliorer leur productivité. Apparais alors des ingénieurs qui vont essayer de répondre à la question suivante : Comment appliquer aux organisations la même rigueur scientifique que celle qui gouverne les machines ? Les réponses apportées par ces ingénieurs (Fayol, Taylor, Gilbreth) ont été presque similaires des deux cotés de l’atlantique. Ces deux ingénieurs ont vu l’organisation comme une totalité, une sorte de boite noire dans laquelle un certain nombre de principes devront être respectés afin d’assurer une coordination parfaite et continue des outils de production. Ces principes sont cités dans le tableau suivant : Tableau 1 : Principes de l’école classique Ecole classique Principes Organisation Universalité : Communauté d’intérêts entre direction et travailleur Souveraineté : Négation des besoins de l’homme Science La science au service des besoins de l’organisation La science nouvelle base de légitimité de la direction La science non contestable, non réfutable Démarche Observer Décomposer/Classer Formaliser et établir des principes scientifiques La science est érigée comme valeur universelle et comme seule référence légitime. Ce qui est scientifique est par définition irréfutable. On passe donc de la science personnelle à la science organisationnelle.
  • 21. 17 Fayol, du coté français, et Taylor, du coté américain, ont tous deux constitués les piliers de l’école classique au même moment de l’histoire des organisations. Pour sa part, Fayol militait pour remplacer un fonctionnement intuitif et arbitraire par une mécanique organisationnelle dont chacun des rouages sont spécifiés et coordonnés. Grâce à un repérage des fonctions clefs de l’organisation (production, recherche, vente, finance..), Fayol estimait être capable de relier les différentes parties par des règles de procédure et décomposer les missions en fonctions spécifiques, le tout gérer par une hiérarchie très bien établie. Taylor pour sa part a développé l’organisation scientifique du travail (OST). Le principe de l’OST est de remplacer le savoir-faire et la connaissance personnelle du travailleur par des principes scientifiques définissant le temps et les mouvements mécaniques à accomplir le travail. La démarche consistait à observer ce que fait l’ouvrier (détenteur du savoir-faire), à décomposer le travail en tâche élémentaire et enfin à attribuer à chaque tâche un temps et un mouvement optimal. La mise en œuvre d’une telle organisation nécessitait selon Taylor une division verticale du travail en 3 niveaux qui sont : La conception qui était de la responsabilité des bureaux des méthodes, le contrôle qui incombait aux contremaîtres et l’exécution qui revenait à l’ouvrier spécialisé. Toute cette standardisation du travail allait permettre de produire plus efficacement et de stimuler la consommation en stimulant le pouvoir d’achat. Ford ira plus loin en mettant en place la chaîne de montage de ses véhicules pour produire en grande série. Les principes du management scientifique peuvent être résumés par : - Utiliser la Science, pas les méthodes empiriques - Chercher l'harmonie et non la discorde - Chercher la coopération plutôt que l'individualisme - Chercher le maximum de productivité - Promouvoir le développement de chaque employé pour sa plus grande efficacité et prospérité - Le prix de revient de fabrication diminuant grâce à une production améliorée, l'industriel peut réaliser de meilleurs bénéfices.
  • 22. 18 Les principales critiques à mettre sur le compte de la théorie classique des organisations sont l’annihilation de l’homme en tant qu’être social, doté de sentiments et interagissant avec d’autres membres de la communauté et la non prise en compte de facteurs externes à l’entreprise (Chanlat, Séguin, 1983,1987). L’environnement et l’homme social y sont absents. Fayol (1918) n’a-t-il pas dit : « si l’on pouvait faire abstraction du facteur humain, il serait assez facile de constituer un organisme social ». La critique de l’homme en tant qu’être social est venue des travaux de l’école des ressources humaines. Celle de l’environnement est issue des travaux de l’école de la contingence. 1.4 L’école des ressources humaines La remise en cause du paradigme mécanique et du « one best way » est venue d’auteurs comme Mayo et McGregor. Deux principaux courants ont constitué les foncements de cette théorie : L’école des relations humaines proprement dit qui prône de modifier le système social pour l’adapter au système technique (Mayo, Herzberg) et l’école de la motivation qui insiste plutôt sur la nécessite de modifier le système technique pour motiver le système social (Maslow). Dans les deux cas, l’entreprise est vue comme une dualité technique et sociale. Autrement dit, la ressource humaine doit être gérée au même titre que la ressource technique. Il en résultera toute une panoplie d’outils de management pour améliorer la performance. Ces outils toucheront la motivation des travailleurs, la formation des cadres, la GRH (gestion des ressources humaines) etc… L’homme a donc des motivations complexes et ne réagit pas uniquement à l’appât du gain et certaines motivations peuvent conduire aux performances qualitatives et quantitatives supérieures à celles qu’on obtient par la carotte et le bâton Le mouvement des Relations Humaines est né des travaux qu'Elton Mayo a entrepris à l'usine Western Electric de Hawthorne, près de Chicago. Sans rejeter le Taylorisme, il cherche en effet a améliorer l’efficacité des équipes. Mayo va complèter l'hypothèse taylorienne selon laquelle les conditions matérielles et techniques, du travail influencent la productivité en y associant d’autres éléments. Ceux-ci sont des salaires acceptables, un environnement agréable, des horaires bien étudiés, une sécurité au poste et une sécurité de l'emploi. De ses expérimentations, il déduit l'importance du climat psychologique sur le comportement des travailleurs.
  • 23. 19 MAYO et le courant des RH dans son ensemble ont eu la conviction que les "bonnes relations" horizontales et verticales avaient une influence capitale sur la satisfaction globale apportée par le travail et sur la productivité personnelle. Trois idées phares caractérisent la pensée du mouvement : . Les individus ont naturellement besoin d'appartenir à un groupe. Ils recherchent l'estime et l'amitié de ceux avec qui ils sont associés dans l'accomplissement de leur tâche. Ils souhaitent en plus, pouvoir se montrer utiles et apporter une contribution manifeste. Dans la mesure où ce besoin d'appartenance est satisfait, les individus arrivent à travailler en coopération et à adhérer aux objectifs de l'entreprise. Il revient alors à la hiérarchie de montrer au personnel qu'il est utile et joue un rôle non négligeable dans la bonne marche de l'entreprise. Elle doit encourager ses subordonnés à prendre des initiatives dans tout ce qui concerne la gestion courante, en accord avec les objectifs connus et reconnus de tous. . Un bon environnement et des avantages matériels permettent à un individu de s'épanouir et de mieux s'intégrer à l'entreprise, d'y avoir une activité plus intense. On retrouve avec quelques variantes près les besoins de l'homme au travail identifiés par Maslow : besoins physiologiques, besoin de sécurité, besoin d'appartenance, besoin d'estime et besoin d'accomplissement personnel. Mayo en vient à la conclusion que les changements eux-mêmes n’expliquent pas tout. Il met en évidence l’importance des phénomènes affectifs et surtout des phénomènes de groupe et des interrelations humaines. De nos jours, les principes de l’école des relations humaines sont largement connus et appliqués. A la vue des investissements consentis par les organisations afin d’améliorer le climat au travail, de gérer efficacement les équipes, de motiver les troupes, de la gestion efficace des conflits et du stress ou encore de mettre à la disposition des travailleurs des espaces fumeurs spécialement aménagés, on peut aisément conclure que certaines idées de l’école des relations humaines ont été retenues. Il en a même résulté des systèmes de rémunération complexes et adaptés aux contraintes organisationnelles tant internes qu’externes. Le tableau ci-dessous résume les différents systèmes existants :
  • 24. 20 Tableau 2 : Les différents systèmes de rémunération KERR 1995 GOMEZ – MEIJA 1992 SCHUSTER et ZINGHEIM 1992 LAWLER 2000 Basé sur la hiérarchie Basé sur la performance - Rémunération variable basée sur la performance collective et la position hiérarchique - Augmentation sur l’ancienneté - Avantage associé au statut hiérarchique - Promotion lié aux objectifs internes - Performance individuelle, ancienneté et position hiérarchique - Augmentation, primes attribués objectivement - Avantages ne reflètent pas le statut - Promotion lié aux besoins de l’organisation Adapté à une culture de clan Adapté à une culture de marché Système mécaniste Système organique - Salaire fixe + avantages sociaux - Salaire supérieur au marché - Basé sur poste et ancienneté - Politique salariale secrète et centralisée - Echange de court terme - Salaire variable - Inférieur au marché - Basé sur le marché du travail et compétence - Politique communiqué et décentralisée - Echange long terme Adapté à une stratégie de diversification reliée Adapté à une stratégie non reliée NEW PAY - Basé sur le marché du travail - Augmentation sur performance individuelle - Rémunération variable sur performance individuelle - Rémunération globale basée sur primes - Salaire de base inférieur au marché - Echange de court terme HIGH INVOLVMENT - Salaire total supérieur au marché - Rémunération variable sur performance collective - Rémunération de la performance individuelle - Basé sur les compétences - Echange long terme Deux courants principaux résument les systèmes de rémunération: 1- Le courant universaliste qui veut que la rémunération se fasse sur le mérite individuel, la performance individuelle et collective (Lawler, 2000) 2- Le courant stratégique qui prône une rémunération basée sur la stratégie de l’entreprise, son mode de management et les attentes des salariés : Efficace si les salariés sont incités à adopter des comportements qui favorisent la stratégie de l’entreprise L’approche "améliorez les relations humaines (et la rémunération) et la productivité augmente" est un raccourci parfois trop rapide. L'amélioration des relations humaines est une condition nécessaire mais pas suffisante à l’amélioration de productivité. Morin (1994) écrit que la variable "relations de pouvoir" a été oubliée. Si l'approche "Ecole des Relations Humaines" est présentée par la hiérarchie comme un modèle idéal, la maîtrise peu ne plus oser intervenir de peur de faire chuter la productivité en dégradant ses relations avec les subordonnés. La maîtrise a besoin de disposer d'un pouvoir réel, faute de quoi on risque fort d'avoir de bonnes relations et une faible productivité.
  • 25. 21 L’école des relations humaines, comme toutes les autres écoles, a elle-même entraîné d’autres questions suite à l’apparition de phénomènes jusque là inattendus ou complètement nouveau. L’internationalisation des organisations, la migration des cadres vers des pays de culture et de traditions différentes, le développement des franchises et des joint-ventures ou les fusions-acquisitions ont amené de nouvelles difficultés et érigé de nouveau obstacles à l’amélioration de la performance et à l’atteinte des objectifs stratégiques. Il ne suffit plus de motiver les troupes ou de mettre en place des systèmes de rémunération attrayants pour améliorer la productivité et l’adhésion des équipes de travail. D’autres dimensions sont donc apparues comme étant des variables déterminantes dans le management des organisations. L’une de ces variables est la différence culturelle. La compréhension des comportements humains à travers les traditions et la culture prend une dimension historique. Pour la première fois, les auteurs vont s’intéresser à comprendre les effets de la culture et donc de l’héritage culturel sur la performance des organisations. Cette dimension prend une importance soudaine lorsque les multinationales (principalement américaines) se rendent compte que le modèle de management américain est difficilement exportable même en Europe. Il en résultera des recherches approfondies comme celles de Trompenars, D’Iribarne ou d’Hofstede qui, par leurs travaux, démontreront l’impact de la culture sur la performance et le management des organisations. Sans remettre en question les écoles précédentes, dont les principes sont toujours d’actualité, comme nous l’avons vu, ces auteurs vont définir un nouveau paradigme et remettre au goût du jour l’influence de la culture dans les organisations. Cette même culture qui a été « chassée » des organisations et des institutions deux siècles auparavant revient à grands pas aujourd’hui nous rappeler que l’homme reste fondamentalement un être vivant doué de capacités sensorielles, sentimentales et émotionnelles et que l‘individu ne peut être en aucun cas réduit à une simple fonction de production ou un levier d’amélioration de la performance.
  • 26. 22 1.5 L’école de la contingence L’efficacité d’une organisation ne dépend pas uniquement de ses ressources humaines ou de sa division du travail. Henry Mintzberg, Chandler ou encore Woodward ont montré qu’il existe d'autres formes organisationnelles que celles définies par Taylor et Fayol. Ces autres formes peuvent se révéler comme des "better ways" dans certaines circonstances. Les adeptes de ce courant ont au départ, et comme pour les autres écoles, posé un certain nombre de questions relatives à la performance des organisations. Comment expliquer que certaines entreprises répondant aux principes du "one best way" s'avèrent incapables de survivre dans certaines circonstances? Quels sont les facteurs tant internes qu'externes aux organisations influençant la forme et le fonctionnement des organisations? Chandler a pour sa part réalisée une étude sur 4 grands groupes nord-américains (Du Pont, General Motors, Standard Oil et Sears&Roebuck) et qui montre que les paramètres de la "prospérité maximale" et de la productivité du travail sont loin d'être les seules à guider la structuration et le fonctionnement des organisations. Les paramètres de l’histoire, de "survie", de domination et d'adaptation du marché apparaissent tout aussi, sinon plus déterminants du comportement organisationnel des entreprises. La démonstration empirique de Chandler montre l’existence de nouvelles formes d’organisation d’entreprise, notamment dans des domaines de pointe. La métaphore la plus utilisée pour décrire l’école de la contingence est l’évolution d’un organisme vivant dans son milieu naturel. L’interaction entre l’organisme et son environnement, son adaptation aux conditions de survie, l’influence de son environnement sur son développement définissent les lois relatives à la bonne adéquation entre l’organisation et son milieu. De l'organisation comme système fermé (étude de la mécanique interne et de son arrangement efficient), elle passe à un système ouvert (étude de l'adaptation de l'organisation à son environnement) Il devient donc indispensable de prendre en compte l’environnement pour comprendre la structure et le fonctionnement d’une organisation. Inversement, une organisation doit tenir compte de son environnement pour optimiser son rendement. Il en découle donc de cette théorie de la contingence que l'existence d'environnements différents conduit à la présence d'espèces d'organisation
  • 27. 23 différentes. Il n'existe plus un "one best way" organisationnel mais des "one best ways" eu égard au type d'environnement auquel est confrontée l'organisation. La remise en question du déterminisme mécanique par l’école de la contingence comme seul moyen d’atteindre les objectifs stratégiques des organisations est certainement un apport substantiel à la compréhension de l’interaction qu’ont les organisations avec leur environnement. Voici résumé dans le tableau ci-dessous, les principes majeurs de cette école énoncés par des auteurs comme Minztberg et Morgan. Tableau 3 : Principes de l’école de la contingence Ecole de la contingence Principes Organisation Influencé par son environnement Il n'existe pas un « one best way » mais des « one best ways » fonction du process et du produit de l'entreprise Approche Déterministe : L’environnement est une réalité objective qui contraint l’organisation Trouver par la raison et la comparaison (entre entreprises performantes/non performantes) des lois universelles d’adaptation du comportement de l’organisation -> Etudes normative Raisonnement Constructiviste : l’environnement n’existe pas en dehors de la manière dont les décideurs le perçoivent Les apports positifs de la théorie de la contingence peuvent se résumer ainsi : • Ouverture de l’organisation à son contexte environnemental • Identification des facteurs d’environnement pesant ou contraignant les organisations et des routines dans l’étude de ces influences • Relativisme au niveau de la structuration et du fonctionnement des organisations : plusieurs marches possibles en selon les environnements
  • 28. 24 L’innovation apportée par la théorie de la contingence vu par ailleurs entraîne d’autres réflexions concernant la dynamique organisationnelle. En effet, cette école présente l’environnement comme un tout où il impossible d’isoler une variable parmi d’autres (culture, religion, traditions, concurrence,…). Ce qui nous mène à dire que l’environnement n’est pas une donnée qui échappe à l’action de l’homme et donc que l’environnement est aussi construit par l’homme. Il en découle donc que la responsabilité des hommes est largement négligée au profit d’un discours qui met l’accent sur la contrainte de l’environnement.
  • 29. 25 2. Management, culture et organisation La littérature sur le management des différences culturelles s’est intéressée depuis une trentaine d’années à cerner et à comprendre les rapports qui régissent les relations entre gestion et culture (Hofstede, 2001 ; D’Iribarne, 1989, 1998, Dupuis et Chanlat, 2008). A travers certains travaux de gestion, on constate que le facteur culturel semble être le plus souvent comme un problème plutôt que comme un avantage dans l’entreprise. Il peut être à l’origine de difficultés, de dysfonctionnements dans les organisations, y compris de conflits, ou encore de non compréhension et de faible performance (Chanlat 2002). 2.1 L’importance de la culture Le concept de culture est un concept important pour comprendre le comportement humain. Les anthropologistes utilisent le mot « culture » dans deux sens différents. D’un coté, la culture est en général l’ensemble de l‘héritage social d’un groupe d’individus (héritage national). Ceci peut comprendre le système politique, la religion ou les croyances. D’un autre coté, la culture est perçue comme un ensemble de traditions, coutumes, de liens sociaux ou de style de vie partagés entre individus. L’essence même de ce concept est que la plupart des comportements humains sont des acquis ou des construits issus de la relation avec les autres individus du groupe. Le comportement social est considéré comme l’héritage des anciens et non comme un héritage génétique ou inné (Malefijt, 1968). La culture est un construit à facettes multiples qui est relié à la religion et à l’éthique (Hofstede, 2001). Il a été également souligné que la culture est un élément qui affecte les comportements des individus quand ils doivent, par exemple, établir des liens sociaux ou gérer des situations de conflit (David, 1991). La culture est vue alors comme un outil puissant qui aide a former la perception des individus à travers le prisme des croyances, des traditions et des coutumes (D’Iribarne, 1998). Les travaux menés pour mesurer les écarts culturels entre nations ont fait naître des mots tels que « différence culturelle » ou « distance psychique » (Evans, 2000). La différence culturelle est la distance socioculturelle perçue entre la culture locale et celle d’un autre pays ou région en terme de langage, de pratiques d’affaires, de système politique et légale et d’éthique entre autres dimensions (Lee, 1998). Lane (1996) a suggéré dans ses travaux que plus la distance entre deux nations est grande, plus les adaptations nécessaires pour conduire les affaires seront également
  • 30. 26 importantes. Ainsi, une compréhension solide de la culture est un pré-requis indispensable pour comprendre les différences et les similarités qui peuvent amener à des incompréhensions et des malentendus entre individus de culture différente. Geoffrey (2002) a donné l’exemple de la signification de certains mots comme « must » que les personnes de langue française utilisent pour traduire le mot « devrait » au lieu de « »have to » alors qu’un anglophone comprend plutôt qu’il s’agit plus d’un ordre que d’une suggestion. Comprendre la culture c’est aussi connaître ses différentes dimensions. Plusieurs définitions ont été formulées pour décrire la notion de culture. Ce concept semble peu clair et incertain à cerner. En effet, il existe d’après Kroeber et Luchon cité dans Usunier (2005) plus de 160 définitions différentes de la culture. La culture est plus un processus que des habitudes. Elle est composée, selon Usunier (2005), d’un ensemble de dimensions. L’auteur affirme que la culture est complexe et les éléments qui la constitue sont inter-reliés tels que la connaissance, la croyance, les valeurs, les arts, la morale ou encore la religion. Ci-dessous un schéma des dimensions de la culture telles que définis par Usunier. Figure 2: Les dimensions de la culture Source: Marketing across culture Usunier (2005)
  • 31. 27 D’une manière globale, la culture est un outil qui permet de décrire et comprendre le comportement passé, présent et à venir des populations étudiées (Aktouf, 1990). Elle constitue la marque distinctive d’un groupe (identité collective). Elle s’acquière et se transmet par le biais de la socialisation à travers un réseau d’institutions telles que les écoles, la famille, les associations, la religion (Adler, 1994). Mais la culture peut également se transformer en subissant soit des contraintes et des confrontations (les périodes de colonisation en sont une des illustrations soit par l’apport de nouvelles idées issues de la globalisation et l’intensification des échanges de biens, de services et de capitaux. Le contact avec des immigrants la plupart expatriés a également favorisé le brassage culturel. La chute des frontières économiques et physiques ont permis le brassage de cultures parfois très différentes. Au Maroc par exemple, les anciennes familles ont conservé des traditions séculaires. Les enfants vivaient avec leur parents jusqu’au jour de leur mariage et parfois au-delà si la situation financière ne permettait pas l’indépendance. Vivre en famille était la norme et une fierté. De nos jours, principalement dans les villes, les jeunes, en contact avec les influences culturelles occidentales, l’entrée au pays de nouvelles formes d’organisation issue la plupart du modèle colonial, considèrent que vivre avec les parents après un certain âge est une preuve d’échec. Gagner un salaire, avoir son propre toit, être indépendant financièrement sont les signes extérieurs de la réussite, devenus en quelques décennies plus important que la solidarité familiale. La venue au Maroc de restaurants comme McDonald’s, Quick, Paul ou encore Pizza Hut, a profondément bouleversé les habitudes alimentaires des Marocains habitant les villes. De même que l’ouverture depuis le début des années 2000 de magasins de mode a permis à une large frange de la classe moyenne de s’habiller selon les tendances occidentales. La culture structure la perception du monde et des relations entre individus non sans excès parfois. Les attentats du 11 septembre ont engendré un malaise durable chez les musulmans pacifistes. Les stéréotypes comme cadres mentaux utilisés pour juger les autres, interpréter leurs comportements et programmer nos réactions, sont parfois la source de conflits et de mauvaise interprétation. Cependant, culture ne signifie pas automatiquement homogénéité et unité. D’autres facteurs importants entre en jeu comme les sectes, les castes ou les croyances politiques qui peuvent différer dans un même milieu culturel (D’Iribarne, 1998).
  • 32. 28 2.2 Approche des différences culturelles Pour les organisations, la diversité culturelle présente des avantages et des inconvénients. Parmi les risques encourus par une organisation dans un milieu culturel différent, on trouve l’ambiguïté et la complexité des échanges verbaux qui peuvent porter à confusion. Cela rend difficile la convergence des orientations stratégiques (Duchastel, Kirouac, 2007). Il devient difficile de faire l’unanimité autour d’un objectif commun (améliorer la productivité par une réduction des temps morts – le temps étant vu différemment selon la culture). La recherche systématique du juste milieu peut devenir abusive et conduire à des résultats non espérés (consensus au détriment du résultat). D’un autre coté, évoluer dans un contexte culturel différent permet aux entreprises d’élargir leur orientations et d’être ouverte à la diversification des idées, des interprétations et des résolutions de problèmes (Duchastel, Kirouac, 2007). Cela engendre selon les auteurs une meilleure créativité qui peut conduire à l’amélioration de la productivité et à faciliter les échanges extérieurs ou l’implantation dans des pays étrangers. L’analyse des différences culturelles s’est faite selon des approches distinctes et des niveaux différents. Il existe principalement trois niveaux d’analyse (Aktouf, 1990). L’approche dite « ethnocentrique » ou esprit de clocher qui consiste à se référer aux normes du système social auquel on appartient pour comprendre ou expliquer un système social différent. Cette approche est basée sur l’esprit de supériorité où l’autre est vu comme différent de ce qu’on est donc forcément inférieur. Les Indiens de l’Amérique du Nord en sont l’exemple parfait. La Guerre de Sécession aux Etats Unis et les années de ségrégation en Afrique du Sud témoignent douloureusement de la forte présence de cette approche ethnocentrique de concevoir les différences culturelles. La logique ethnocentrique se retrouve également au niveau des organisations. Dans cette logique, les différences sont souvent ignorées et l’organisation reste rigide au niveau de ses processus de gestion et de production, sans effort d’adaptation. McDonald’s ou encore Disney constituent deux exemples de management ethnocentrique (Les Echos, 2007). La standardisation de l’offre de ces deux compagnies présentent dans plusieurs pays constitue certes un capital perception important vis-à-vis du consommateur mais offre peu de produits adaptés aux
  • 33. 29 coutumes locales. D’autres comme Subway refuse toute adaptation de leur produit Cette stratégie a conduit Subway à fermer le seul magasin ouvert au Maroc après seulement 4 années d’activité (La Tribune, 2007).. La deuxième logique d’approche des différences culturelles est dite « polycentrique ». Elle consiste à la juxtaposition des différentes cultures sans réel échange (cloisonnement). Les dernières recherches effectuées sur cette approche émanent de Gérard Ayache dans son livre « Métaphores du politique » (2008 - http://www.infometrie.net/fr/polycentrisme.html). Le polycentrisme désigne d’après l’auteur « les sociétés dans lesquelles différentes sphères fonctionnelles coexistent de façon autonome comme la politique, le droit, l'économie, l'art, la religion. Toutes ces sphères sont autant de domaines qui possèdent une logique autonome et qui préservent jalousement leur intégrité ». Rapporté au niveau des organisations, le polycentrisme serait une approche plurielle pour s’adapter et tirer parti des différences sans pour autant mettre en commun les ressources, les systèmes et les capitaux (Lécrivain, 2008). Au Maroc, Procter&Gamble a parfaitement adopté cette posture. Présent depuis plus de 30 ans, P&G a su adopter ses produits aux consommateurs locaux mais l’entreprise reste cloisonnée. Si les middle managers sont en majorité marocains, les échanges avec d’autres sphères économiques ou sociales sont rares. Une fois entré dans la boite, les managers marocains doivent s’adapter à la culture de P&G, aux méthodes de travail et aux processus décisionnels. Peu de place est laissée aux différences culturelles locales. La seule adaptation permise a été l’aménagement d’une salle de prière pour les ouvriers. Les manuels sont en anglais et les distributeurs n’ont que très peu de contact avec l’entreprise. Les échanges sont donc réduits et la synergie qui pourrait en découler est faible. La culture P&G modèle les attitudes, renforce les convictions communes et oriente les comportements. Elle minimise l’apport culturel extérieur et renforce le sentiment d’appartenance. Mon frère a travaillé pour Procter et on lui a souvent répété la phrase : « C’est comme ça qu’on fait ici ! ». La troisième approche des différences culturelles est l’approche multiculturaliste ou interculturaliste. Celle-ci consiste, dans les organisations, à reconnaître les divergences culturelles en tant que variable à gérer et d’intégrer ces variables dans le système de management pour en tirer le maximum de profit (Lécrivain, 2008). Un
  • 34. 30 des multiples effets de la mondialisation tient à l’accroissement des relations entre personnes ayant des référents culturels différents, dans des organisations, des entreprises et des administrations. Souvent, des conflits ou des rivalités entre individus sont interprétés uniquement sous l’angle ethnocentrique alors qu’il s’agit en faite d’interprétation différente du vécu et du réel. L’approche multiculturaliste vise justement à penser l’intégration des différences culturelles au sein des organisations comme une réponse aux sensibilités culturelles. Le multiculturalisme se concrétise par la reconnaissance des différences et la cohabitation et l’interaction régulière entre individus de culture distincte. Après avoir présenté les notions de différences culturelles en générale et les approches que peuvent adopter les organisations pour les rejeter ou mieux les appréhender, nous allons à présent présenter les différents composants de la culture d’entreprise. Cette dernière évolue dans un contexte culturel précis. Elle devient donc un corps social à part entière (Thévenet, 1991) disposant d’un patrimoine culturel propre façonné par ses valeurs et ses méthodes de management. Le chapitre suivant va introduire également la culture en tant que variable d’action et d’ajustement des stratégies de management. Nous verrons également les limites de la culture d’entreprise qui peut parfois se transformer et devenir un frein au changement et à l’adaptation (cas de Subway cité auparavant). Nous présenterons certains résultats de recherches réalisés sur les différences culturelles et leurs impacts sur les organisations par des auteurs fondamentaux comme Hofstede et D’Iribarne.
  • 35. 31 3. La culture intégrée aux organisations et au management Comme nous l’avons mentionné dans la section précédente, la notion de culture va évoluer et se définir en intégrant différentes approches. D’un point de vue anthropologique «La culture est une configuration générale des comportements appris et de leurs résultats dont les éléments sont adoptés et transmis par les membres d'une société donnée » (Linton, cité dans Lécrivain, 2008, page 2). D’un point de vue sociologique, la culture apparaît comme l’ensemble des représentations, des valeurs et des normes qui sont propres aux groupes sociaux, « tout ce qui n'est pas la nature, tout ce qui est appris, le savoir, le savoir-faire, les mythes, etc., tout ce qui est transmis de génération en génération» (Edgar Morin, cité dans Lécrivain, 2008 page 2). La culture appliquée aux organisations et au management est définie comme « l’ensemble des valeurs partagées, rites, mythes, symboles et histoire de l’organisation» (Thévenet cité dans Lécrivain, 2008 page 13). Thévenet divise la culture organisationnelle en différentes dimensions que nous présentons ci-dessous : La dimension symbolique : ce sont des signes (logo, style, tenue vestimentaire,…) chargés d’informations culturelles qui sont liés aux valeurs essentielles. Ils servent aussi d’éléments de communication tant en interne qu’en externe- ex : La dimension des valeurs : ce sont les codes comportementaux (valeurs opérantes) qui ont forgé l’histoire de l’entreprise et ses pratiques de management et les valeurs déclarées (celles qui transparaissent dans le discours de l’entreprise)- ex : le style Décathlon avec ses valeurs sportives de jeunesse, de santé – Les valeurs de Toyota qui sont la qualité, la robustesse et la fiabilité – L’encastrement des croyances religieuses ou sociales dans les valeurs de l’entreprise (rapport au temps, pouvoir et hiérarchie,…) La dimension des mythes : histoires, anecdotes, récits imaginaires ou symboliques qui circulent dans l’entreprise (ex : le mythe de l’ascension sociale) Le mythe des héros : il s’agit le plus souvent des fondateurs, de dirigeants charismatiques qui font partie des mythes de l’entreprise et qui servent de référence aux salariés La dimension des rites : comportements spécifiques issus des coutumes et des pratiques développées dans l’entreprise
  • 36. 32 La dimension des tabous : ce sont les interdits dans une organisation (évènements, situations qu’il ne faut pas aborder,…). Bien entendu, cette étude ne prétend pas aborder tous les aspects de la culture d’entreprise. Un aspect dominant fera l’objet d’analyses approfondis et directement relié à notre cas : celui des rites et des traditions. Ces deux dimensions regroupent en elles-mêmes des sous-groupes tels que les croyances, les codes, la religion, le rapport au temps, le rapport à la hiérarchie, la gestion des zones d’incertitudes ou encore la relation homme-femme. Afin de mieux comprendre les enjeux de la culture d’entreprise, nous allons présenter un aperçu des travaux déjà réalisés résumant ce que les principaux auteurs ont conclu sur la relation qui peut exister entre culture et management. 3.1 Fonction et enjeux de la culture d’entreprise La culture d’entreprise présente deux fonctions principales : Les fonctions internes et les fonctions externes. Cette étude s’intéressera spécifiquement aux fonctions internes qui regroupent des facteurs sociologiques en rapport avec les individus et leur socialisation dans les organisations. On trouve parmi ces facteurs (Dupuis, 2007) : • Le facteur de socialisation : Intégration du personnel • Le facteur de motivation : Implication individuelle et amélioration de l’efficience des ressources A titre d’exemple, il m’est apparu intéressant de parler ici des approches managériales de la culture entre la vision américaine et française pour aborder la problématique culturelle. Aux Etats-Unis, la culture est introduite comme une variable interne à l'entreprise et a pris les caractéristiques inhérentes du management américain avec tout ce que cela implique (Nowotny, 1964).
  • 37. 33 Tableau 4 : Approche managériale de la culture Approche managériale américaine Approche managériale Européenne le futur la mobilité, la vitalité l'organisation. L'histoire L'identité Conventions Comportement = effet Comportement = cause = Culture construite = Culture effective et réelle Source : Nowotny, American vs. European Management Philosophy, 1964 Aux Etats-Unis, le comportement répond à l'impératif d'avenir, tandis qu'en France, il résulte de ce qui a été. Le comportement aux USA se fabrique au quotidien, selon une orientation implicite. Un dysfonctionnement organisationnel sera expliqué par un problème de coopération entre des acteurs au regard de leurs intérêts , de leurs valeurs. C’est une vision constructiviste (Weber,…..). En France, la culture est abordée sous l’angle causal. On construit le quotidien en se basant sur l’héritage culturel, l’appartenance à un groupe (aristocratie, classe populaire,....). 3.2 Le courant de gestion comparée Issu du relativisme culturel et orienté vers une sociologie statistique de la culture (Pesqueux, 2004, p.52), le courant de gestion comparée (Hofstede, 1980) vise à décrire les pratiques de gestion et les comportements au travail propres à chaque pays. Hofstede (1980) a conduit un sondage auprès de plus de 116.000 employés d’IBM répartis sur 72 pays. De par son ampleur, cette étude constitue une référence en terme de mesure standard de validation des différences culturelles. Elle est largement utilisée dans les recherches empiriques. Cette recherche a identifié 4 dimensions majeurs de la culture : L’individualisme, la masculinité, la distance au pouvoir et le contrôle de l’incertitude. Une cinquième dimension qui est la relation au temps a complété le modèle. Le concept d’individualisme/Collectivisme renvoie au degré d’individualisme ou de collectivisme qui caractérise chaque culture. Dans les cultures collectivistes, le
  • 38. 34 groupe est plus important que l’individu. Les sociétés collectivistes mettent l’accent sur la conformité et l’harmonie pour promouvoir le bien être du groupe. Les liens familiaux sont plus forts et les obligations envers les plus âgés sont considérées comme fondamentaux pour préserver l’harmonie. Dans les sociétés asiatiques, par exemple, l’individualisme est simplement inacceptable en raison des effets néfastes qu’il pourrait avoir sur l’harmonie du groupe (Hofstede, 1980). Dans des pays comme les Etats-Unis, les droits individuels sont prééminents. Les liens sociaux entre groupes sont plus fragiles et les individus tendent à faire passer en premier leurs intérêts, leurs désirs et leurs motivations. Les enfants sont encouragés dès leur jeune âge de penser par eux-mêmes. Il en résulte que les individus, issus de culture individualiste, ont tendance à ne pas appliquer les normes sociales mais plutôt à prendre des décisions indépendamment des autres membres du groupe (Steenkamp, 1999). La masculinité est basée sur les attributs du genre masculin ou féminin (Hofstede, 1980). Au niveau culturel, la masculinité est associée à toute société qui considère l’ambition, la compétition et le succès matériel. Dans les cultures masculines, la perception de la réussite sont basés sur le succès financier et matériel alors que les individus de sexe féminin sont relégués à des tâches dites « secondaires » ou non matériels comme l’éducation des enfants, la responsabilité du ménage et les tâches dites « faibles ». Les sociétés a tendance féminine sont caractérisées par le chevauchement des tâches et la possibilité qu’un homme ou une femme puissent occuper les mêmes fonctions. Dans ces sociétés, les individus sont moins intéressés par le succès matériels et la reconnaissance que celles dites masculines. Hofstede considère que la culture féminine est plus intéressée par les relations humaines proches que par le succès matériel. La distance hiérarchique ou « power distance » est définie comme « le niveau auquel les individus membres d’institutions ou d’organisations d’un pays sont prêt à accepter la distribution inégalitaire du pouvoir » (Hofstede, 2001). La distance hiérarchique peut donc être définie comme le degré d’inégalité attendu et accepté par les individus. La distance hiérarchique est donc mesurée à partir des systèmes de valeur de ceux qui ont le moins de pouvoir. La répartition du pouvoir est
  • 39. 35 également expliquée à partir du comportement de ceux qui ont le plus de pouvoir, des leaders plutôt que des suiveurs. L'autorité ne se maintient que si elle rencontre la soumission; la fonction d'encadrement n'existe que comme complément à une situation de subordination (Bernard, 1994). L’indice de contrôle d’incertitude ou « Uncertainty Avoidance » d’un pays est l’expression du niveau d’anxiété qui existe dans une société donnée face à un avenir incertain (Hofstede, 1980). Ce niveau d’anxiété fait partie de la programmation mentale des membres de cette société appris dans leur famille, à l’école, puis dans leur vie d’adulte. Le degré de contrôle d’incertitude d’un pays mesure donc le degré d’inquiétude de ses habitants face aux situations inconnues ou incertaines (Bernard, 1994). Ce sentiment s’exprime, entre autres, par le stress et le besoin de prévisibilité. 3.2.1 Les résultats des travaux d‘Hofstede Les résultats les plus pertinents de cette étude concernent la position qu’occupent les pays arabes selon les cinq dimensions par rapport à d’autres pays européens, américains ou asiatiques. Les graphiques ci-dessous présentent la position des certains pays comparativement à deux dimensions à chaque fois. La plupart des managers interrogés ont soit fait leurs études soit en France ou aux Etats-Unis, soit ont vécu et travaillé dans ces pays. Il serait donc intéressant de comparer les résultats de ces trois pays par rapport aux dimensions culturelles définis par Hofstede. Dans le premier graphique, les dimensions « contrôle de l’incertitude » et « distance hiérarchique » sont opposés. Figure 3 : Comparaison des dimensions IDH et ICI Source : Management interculturel – Dupuis (2005) Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique ++Pays ArabesPays Arabes FranceFrance EspagneEspagne ItalieItalie Pays scandinavesPays scandinaves USAUSA GrandeGrande--BretagneBretagne AllemagneAllemagne JaponJapon Contrôle de l’incertitude +
  • 40. 36 On note dans ce premier graphique que les pays arabes acceptent volontiers une grande distance hiérarchique et donc intègrent facilement l’existence de niveaux sociaux différents. L'inégalité dans une société est visible à travers l'existence de classes sociales : supérieure, moyenne, ouvrière, qui n'ont pas les mêmes facilités d'accès à certains avantages de la société dont l'éducation (Bernard, 1994). Les chercheurs constatent que, dans la plupart des sociétés, classe sociale, niveau d'étude et profession sont étroitement liés (Hofstede, 1980). Ces trois facteurs, cités comme sources de programmation mentale, sont interdépendants. Hofstede démontre que dans les pays à fort IDH, cela s'applique à toutes les catégories d'emplois, quelque soit leur statut. Dans le cadre de pays à forte distance hiérarchique, les supérieurs et les subordonnés se considèrent comme inégaux par nature dans un système fondé sur une inégalité existentielle (Bernard, 1994). Les relations entre subordonnés et supérieurs sont souvent chargées d'affectivité. Philippe d'Iribarne dans "La logique de l'honneur" écrit à ce sujet : "Le caractère souvent fortement émotionnel des relations hiérarchiques en France est étonnant. La diversité des sentiments envers les supérieurs est extrême : on peut les adorer ou les détester avec la même intensité". De ce point de vue, France et pays arabes sont proches. Par contre, les Etats-Unis ont un faible indice de distance hiérarchique, ce qui peut expliquer pourquoi aux Etats-Unis les hommes politiques et les représentant du peuple sont plus accessible et beaucoup moins distant. Dans les pays arabes, les gouvernements entretiennent des relations très distancées avec leur peuple même dans les pays riches comme les Emirats, l’Arabie Saoudite ou encore le Qatar. Dans des pays plus pauvres, la distance hiérarchique est forte comme chez les Algériens, Tunisiens et Marocains. Ce qui tend à contredire une des conclusions des recherches sur les différences culturelles qui veut que plus un pays est riche plus son IDH est faible (Bernard, 1994). Les cultures à fort IDH assoient l'autorité d'un patron tandis que patrons et subordonnés se considèrent comme égaux par nature dans un contexte à faible IDH où les rôles peuvent être modifiés : un subordonné peut devenir demain un patron. Notons par ailleurs que d’un point de vue religieux, l‘Islam reconnaît les classes sociales et les différences selon la richesse, la connaissance et l’autorité. L’Islam prône une hiérarchisation de la société et ses les membres sont invités à obéir à
  • 41. 37 leurs supérieurs. Les enfants doivent obéissance quasi-absolue à leurs parents et à leur professeur. Le châtiment corporel est conseillé, ce qui est une marque de soumission. Cependant, l’Islam rejette tout intermédiaire pour s’adresser à Dieu et tout croyant doit se soumettre uniquement à Dieu. Ce qui semble être un paradoxe est en fait une complémentarité. Le musulman doit certes se soumettre à Dieu (Islam en arabe veut dire soumission) par la prière, la reconnaissance et la pratique de sa religion (soumission verticale) mais doit aussi s’astreindre à des règles qui régissent la vie quotidienne comme la modestie, le respect des autres et de ses parents en particulier (soumission horizontale). Il doit accepter sa situation comme étant une décision divine pour autant qu’il ait fait les efforts nécessaires pour progresser socialement et financièrement. Dans le deuxième graphique ci-dessous, nous remarquons que la différence dans l’indice de masculinité est moins marquée que pour celui de la distance hiérarchique pour les pays étudiés (France, Etats-Unis et pays arabes). Figure 4 : Comparaison des dimensions Masculinité et ICI Source : Management interculturel – Dupuis (2005) Dans les cultures féminines, comme aux Pays Bas, on préfère venir à bout des conflits par le compromis et la négociation; chaque pays a pour cela des outils institutionnels différents (Chanlat, 2005). Dans une culture masculine, la famille apprend aux enfants l’assurance, l’ambition, la compétition et les organisations mettent l’accent sur les résultats. Dans une société féminine, la famille enseigne aux enfants la modestie et la solidarité; les organisations préfèrent récompenser sur une base égalitaire (Bernard, 1994). Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude ++ MasculinitMasculinitéé MasculinitMasculinitéé ++ Pays ArabesPays Arabes FranceFrance EspagneEspagne ItalieItalie Pays scandinavesPays scandinaves USAUSA GrandeGrande--BretagneBretagne AllemagneAllemagne JaponJapon
  • 42. 38 Les pays arabes ont une valeur médiane de l’indice de masculinité. Ce qui pourrait s’expliquer par le fait que pour ces pays, l’Islam prône la loi du talion (dent pour dent) mais suggère fortement dans la mesure du possible et si le croyant en est capable, de pardonner en cas de conflit, d’agression ou de faute grave. Les procès pour diffamation, pour non respect des règles de commerce ou pour récupérer son droit sont rares. Dans ces pays, on fait souvent appel à un intermédiaire où une connaissance qui pourrait gérer et régler les conflits. La différence dans l’indice de contrôle de l’incertitude est beaucoup plus marquée que pour celui de la masculinité. Si aux Etats-Unis, les règles de travail sont moins rigides qu’en France, c’est que les travailleurs américains sont moins à l’aise avec le contrôle (Bernard, 1994). Les scandales financiers récents (Worldcom ,Enron) et la crise des subprimes sont certainement l’expression la plus radicale de cette propension qu’on les cadres américains à traiter les affaires dans le strict esprit de liberté. Dans les pays à fort contrôle de l’incertitude, comme les pays latins, c’est l’absence de règles qui est déstabilisante. En France, les règles de travail font l’objet de textes de lois nettement plus rigides et plus contraignantes qu’aux Etats-Unis. De nombreuses lois, formelles et informelles, contrôlent les droits et devoirs des employeurs et des salariés (Bernard, 1994). De nombreux règlements internes contrôlent le processus de travail. Les membres de ces sociétés ont été programmés, depuis leur petite enfance, à se sentir à l’aise dans des environnements structurés : ce qui se passe réellement est moins important que la satisfaction de ce besoin. Philippe d’Iribarne remarque, que dans l’usine française il existe "une règle rigide, une pratique molle". Par contre selon D’Iribarne, les pays à faible ICI (indice de contrôle de l’incertitude) ont une aversion émotionnelle pour les règles formelles. Les règlements ne sont établis qu’en cas d’absolue nécessité, comme par exemple déterminer si on circule à droite ou à gauche de la chaussée. Le comportement est fondé sur une habitude collective renforcée par le contrôle social. Dans le monde du travail, le degré d’anxiété conduit à des différences notoires de comportement. Dans les pays à fort ICI, les gens aiment travailler dur : on se presse car le temps c’est de l’argent. Dans les pays à faible ICI, les gens sont capables de travailler dur s’il le faut, mais ils aiment se détendre et le temps est le cadre qui permet de s’orienter (Bernard, 1994).
  • 43. 39 Dans les pays arabes, la notion de perte ou de gain de temps est toute relative. Pour ces pays, on ne perd pas de temps mais on le partage. Un proverbe arabe dit que « celui que veut aller vite prend du retard ». Autrement dit, les gens ne sont pas pressés. Certes on travaille pour gagner sa vie mais surtout pour plaire à Dieu et à ses proches. L’anxiété est plutôt faible dans les pays arabes car les musulmans croient à la destinée. « Si mon avenir est déjà écrit, a quoi bon s’en inquiéter » disent les Arabes. Ce qui explique la position médiane des pays arabes sur la courbe du ICI. Jacques Horovitz cité par Marie-Claude Bernard (1994) dans les fiches de lecture de la Chaire D.S.O. du CNAM a réalisé une étude sur le contrôle exercé par la direction générale dans les entreprises françaises, allemandes et britanniques. Les patrons anglais se préoccupent plus de la stratégie que du fonctionnement quotidien, mais c’est l’inverse en France et en Allemagne (Horovitz, 1980). Les problèmes stratégiques, non structurés par définition, demandent une plus grande tolérance de l’ambiguïté que les problèmes opérationnels. Dans la mesure où ils tolèrent plus facilement les comportements déviants, les pays à faible ICI (indice de contrôle de l’incertitude) sont un terrain plus propice aux innovations. Mais, ils semblent perdre leur avantage lorsqu’il s’agit de développer ces innovations jusqu’à leur complète réalisation (Bernard, 1994). La Grande-Bretagne a remporté plus de prix Nobel que le Japon, mais ce dernier a mis plus de nouveaux produits sur le marché (Horovitz, 1980). L’indice Individualise/Collectivisme est certainement celui où les différences sont le plus marquées entre pays arabes et l’Occident. Le graphique ci-dessous, issu des recherches d’Hofstede (1980) illustre bien l’écart entre les pays arabes où l'intérêt du groupe prime l'intérêt individuel. La solidarité familiale bien connue des pays arabes en est l’aspect le plus marquant, sachant que le premier groupe auquel nous appartenons est la famille, ou famille élargie en anthropologie culturelle. Les enfants restent dépendant de leurs parents jusqu'à un âge avancé et vivre en famille sous le même toit est une marque de solidarité. Les filles en particulier ne quittent pas la maison du père avant leur mariage et peuvent dans certains cas rester au-delà. Les recherches d’Hofstede ont également montré que plus un pays est riche, plus ses habitants ont tendance à se comporter de façon individualiste. Les cas particulier des pays du Golf, riche en pétrole, montre bien l’incidence des racines culturelles arabes
  • 44. 40 (Bernard, 1994). Cependant, des nuances doivent être apportés à ses conclusions. Dans les pays colonisés comme le Maghreb, le brassage des cultures occidentales et orientales, l’ouverture des frontières et l’augmentation exponentielle des échanges commerciaux, ainsi que les flux migratoires ont fait, dans certaines couches de population aisée des pays arabes pauvres, basculé la balance vers un individualisme plus marquée. Figure 5 : Comparaison des dimensions Individualisme et IDH Source : Management interculturel – Dupuis (2005) Dans une culture collectiviste comme celles des pays arabes, embaucher une personne de la famille ou qui appartient à un groupe ethnique plus ouvert est courant, indépendamment des compétences (Bernard, 1994). Le lien familial subordonne les aptitudes intellectuelles. L’embauche est considérée comme une relation « familiale ». Souvent, les mauvaises performances d'un salarié ne sont pas une raison suffisante pour licencier. Il devient alors très difficile dans ces conditions pour un manager formé aux concepts occidentaux de gestion d’équipes (fixer des objectifs quantifiables, contrôler l’exécution, évaluer les performances, décider des sanctions ou des primes) d’établir sa crédibilité et son autorité. Les managers des pays arabes forment alors un sous-groupe minoritaire emprunt d’une culture managériale individualiste dans un milieu collectiviste. Dans les pays du Maghreb, les élites du pays et les managers sont en grande majorité formés dans les pays européens, aux Etats-Unis et au Canada. Les conflits culturels, les échecs de projet ainsi que le stress et la souffrance au travail sont alors à craindre. Les techniques de IndividualismeIndividualisme IndividualismeIndividualisme ++ Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique ++ JaponJapon FranceFrance EspagneEspagne ItalieItalie Pays scandinavesPays scandinaves USAUSA GrandeGrande--BretagneBretagne Pays ArabesPays Arabes AllemagneAllemagne