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Sarah Pernet IUGA L3 ES
Théorie des sciences sociales
Exercice de lecture : l’opposante
« Le sexe comme le genre est une catégorie construite par le discours » Judith BUTLER,
2005.
Le discours d’Erving Goffman dans « l’arrangement des sexes » paru en 1977 vise pour
l’époque à déconstruire les rôles des rapports sociaux sous le prisme du genre. Il part de
plusieurs faits réels pour agrémenter et composer son analyse. Nous pouvons dès lors définir
cette approche d’interactionniste. Bien que son analyse soit novatrice pour l’époque, on
peut y relever plusieurs contradictions dans ses dires, un champ d’étude restreint et une
manière d’aborder la chose de façon très réductrice.
Tout d’abord, rappelons que l’écriture de Goffman est particulière, qu’elle peut nous
interpeller voir nous heurter. Comme le dit si bien Claude Zaidman dans la préface du livre :
« L’ironie, la causticité du style de Goffman rend la traduction du texte parfois difficile et sa
lecture immédiate parfois trompeuse, car les formules qui sont censées éclairer le propos
théorique ne sont pas toujours à prendre seulement en premier degrés. p11» Alors,
E.Goffman aurait un style d’écriture particulier que l’on se devrait d’accepter sous le joug du
pacte du.de le/la lect.eur.rice. L’emploi de certains de ces mots ne serait donc pas à relever,
car il conviendrait non pas d’une mauvaise analyse ou mauvaise intention, mais bien d’un
style d’écriture particulier et d’une façon de dire les choses, que ceux qui lisent se doivent
d’accepter.
Pourtant lorsque qu’il évoque dans le paragraphe 9 le fait que pour les femmes : « il serait
toujours possible de trouver des preneurs. » p115, il peut crisper le/la dit.e lect.eur.rice, car
bien qu’elle soit dans son contexte, cette phrase et choquante et objectivise la femme. En
effet, la généralité fait que les hommes ont un sentiment de pouvoir sur la femme, nous ne
sommes pas sans le rappeler, mais quoi qu’il arrive ils ne peuvent la prendre, comme on
prend un objet. Cette objectification se révèle aussi lorsqu’il dit que pour les hommes «
toute occasion fera l’affaire. » p115, réduisant la condition de la femme à une transaction. Il
va de soi que c’est une dénonciation de ce pouvoir dont E.Goffman nous fait part dans son
livre, mais l’emploi de ces termes, et bien qu’il ne soit pas mal intentionné, sont dans la
limite de l’acceptable car trop réducteurs. En écrivant de cette sorte, il est parfois difficile de
croire que Goffman ai compris l’arrangement des sexes et la dimension sexiste que les
femmes vivent chaque jour. Par ailleurs, il fait partie de la classe des oppresseurs alors
l’utilisation de l’ironie ou de ces dits mots dans ce genre de conditions sont réellement mal
venus.
De plus, et toujours dans le même paragraphe, il énonce que « toutes les femmes de
belles apparences valent le coup d’œil. » p113 retranscrivant ce qu’il a pu observer dans
l’espace. Mais cela réduit la femme à des choses, qui s’admirent si elles sont belles, se
jettent si elles sont moches. Pourtant certaines femmes ne peuvent recevoir ce traitement
de faveurs du fait de leur non-conformité aux codes de beauté établis dans nos sociétés. On
peut dès lors relever une contradiction dans son analyse puisqu’il nous fait comprendre qu’il
est plus facile pour une femme de trouver « preneurs », mais oublie que dans son
paragraphe 5 il disait que « les femmes âgées et les femmes laides sont ainsi continuellement
menacées de ne pas être traitées d’une manière qui convienne à la nature humaine que leur
classe sexuelle est censée leur conférer. » p70. Mais la diversité des femmes ne se réduit pas
qu’aux belles femmes, aux femmes âgées et laides. Notons malgré tout que la beauté est
une notion très subjective.
En effet, dans la totalité de son ouvrage il évoque le prisme du genre dans son spectre le plus
réduit. Bien qu’écrit en 1977, son ouvrage reste dans le prisme de l’hétéro-normativité. Une
femme trouvera « preneur » et non preneuse. Nous pouvons dès lors voir une étude de la
classe moyenne blanche, américaine/occidentale cis-genre et hétérosexuelle. Il ne parle
jamais des difficultés qu’ont les femmes racisées, handicapées, sans-abris, transgenres,
grosses, pauvres… Qui vivent leurs oppressions de femmes en plus de ce par quoi elles sont
altérées dans la vie de tous les jours, en fonction de leur différence à la « norme ». C’est un
point de vue relativement hégémonique de la part de Goffman, alors que ces femmes sont
tout autant importantes dans ce genre d’études. Toutes les personnes qui souffrent
d’invisibilité peuvent se sentir déconsidérées, mis à part par l’auteur et ne peuvent y trouver
une sorte de soulagement et de réconfort entre ces lignes. Cette invisibilité est présente
pour certaines catégories de femmes mais aussi pour les différentes composantes du genre.
Effectivement, aujourd’hui, une analyse du genre sous la 4eme vague féministe, ne peut se
faire sans inclure la communauté LGBTQIAAP+ (liste non-exhaustive) qui souffre des
rapports de force et de domination similaires dans l’espace privé comme public. En ajoutant
à cela que le prisme du genre ne s’arrête pas à la binarité et l’hétéro-normativité redondante
dans ce livre. Elle est multiple et son panel de diversité énorme. Ne pas l’évoquer c’est
passer à côté de nombreuses questions et réponses sur les pratiques et les représentations
de nos rapports sociaux.
Penchons-nous sur une autre phrase qui m’a interpelé au cours de ce paragraphe 9 : « Il est
manifeste que les hommes et les femmes ont des rapports très différents de la vie publique,
ses imprévus étant bien plus important pour les femmes que pour les hommes (…) » p115. Il
parle « d’imprévus », mais c’est bien plus que cela. Ce que vivent les femmes dans la vie
publique c’est une constante exposition au regard de tous. Elles sont toujours dans l’alerte
d’un potentiel danger auquel elles peuvent faire face.
Cette « mise en lumière sous les projecteurs de la vie publique. » p112, est, je suppose, pour
les femmes un sentiment plus profond qu’une exposition permanente. C’est un sentiment
de jugement qui pèse sur elles, et elles sont épiées pour chacun de leur fait et gestes. Ses
« Imprévus » alors, ne sont pas. C’est la société patriarcale qui a normalisé ses événements.
Ces derniers sont en réalité des insultes, des regards, de la violence symbolique, des
oppressions sous différentes formes, des agressions… Minimiser les rapports de force en
parlant d’imprévus n’aide pas à les éradiquer complètement. En effet Jil Valentine nous
informe que « La plupart des femmes ont connu au cours de leur vie une expérience sexuelle
alarmante. » Elle parle « d’expérience alarmante » et non pas d’imprévus qui semble faire
croire que la femme subit la petite pluie du patriarcat et non sa tempête.
Pour finir, E. Goffman en conclusion de son ouvrage, soulève une notion avec laquelle
j’ai énormément de mal à être en accord : « Et l’on peut comprendre que les femmes aient un
pouvoir dont elles ne disposent guère, celui d’autoriser l’accès à elle-même. » p115. A
première vue, cela sous-entend que les femmes auraient un avantage et pourrait contrôler
l’usage de leur corps comme bon leur semble selon les lois de l‘attractivité dont il nous fait
part quelques lignes en deçà. Or ceci est faux. On ne compte plus les atteintes du « territoire
du moi » (E.Goffman, « Les Relations en public. La Mise en scène de la vie quotidienne II » ; 1973)
chez ses dernières. Le territoire du moi, selon lui est multiple, il en distingue 8 espaces :
L’espace personnel, les domaines réservés de la conversation, la place, l’espace utile, le tour,
le territoire de la possession, les réserves d’informations, l’enveloppe.
Je vais seulement en retenir quelques-uns pour appuyer mes propos. Le premier, l’espace
personnel, se caractérise par une enveloppe fictive se situant autour du corps qui
s’apparenterait à une bulle de confort, synonyme d’intimité. Cette bulle qui, lorsqu’elle est
pénétrée, marque une rupture avec notre protection « où toute pénétration est ressentie
comme un empiètement ». Le second, les domaines réservés de la conversation qui désigne
le droit d’exercer un contrôle sur qui peut nous adresser la parole et quand. Le dernier,
l’enveloppe, représente la peau ou bien les vêtements, nos territoires de « peau » sont
traités différemment selon les parties du corps. La protection de notre territoire envers les
coudes sera moindre que nos parties intimes par exemple.
Dès lors, que ce soit une bise non voulu, une parole, une agression, une insulte, un viol…
plusieurs espaces du territoire du moi sont rompus.
Ainsi, si les femmes disposent de plus d’avances elles sont confrontées à plus de risques et
de ruptures. La société ayant formé l’homme en celui qui demande des faveurs par le biais
d’actions comme la cour ou la galanterie. La femme elle, se doit d’offrir. Offrir sa rhétorique,
sa réponse, son corps. Dès lors tout cela ne justifie pas le fait qu’une femme ai le pouvoir, en
toute circonstances, d’autoriser l’accès à elle-même. On ne compte plus le nombre de viols,
de fémicides, autrement dit meurtre d’une femme par un homme (on en dénombre 149 en
2019), et d’agressions physiques qu’elles subissent. Allez dire aux femmes qui se font exciser
si elles ont le pouvoir de disposer d’elles-mêmes. Si ce processus se révélait vrai, nous,
féministes ne lutterions pas autant pour rendre la femme à l’égal de l’homme dans ces
privilèges et droits. Les mouvements récents comme #metoo ou encore #stopféminicides
nous montre bien que ce pouvoir n’est pas en vigueur et qu’il est au cœur des débats et des
luttes de ces mouvements.
Dès lors, on peut affirmer qu’E.Goffman a pour son époque apporté quelques
fondements théoriques sur les différents questionnements et réflexions de nos rapports de
genre dans l’espace et dans nos relations. Il a permis la déconstruction de certains rapports
entre l’homme et la femme. Mais ces champs d’actions sont soit trop précis, soit ne sont pas
assez larges dans les catégories de personnes évoquées. Le fait qu’il y ai une invisibilité de
ces dernières rend son discours fade, redondant et peu original. L’hétéro-normativité et la
binarité appauvrissent ces exemples et théories. De plus, ceci est l’étude du genre sous l’œil
d’un homme favorisé car blanc, cis-genre, de classe moyenne supérieure et surement
hétérosexuel, ne souffrant pas d’oppressions quelqu’une. Loin de délégitimer ses propos, il
part avec des avantages et une perception du monde différente de ceux qui sont oppressés.
De par le fait, il n’apporte pas les même réponses qu’une personne ayant vécu ou subit des
altérisations par le genre.

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Exercice de l'opposant.e - Sarah Pernet (2019-2020)

  • 1. Sarah Pernet IUGA L3 ES Théorie des sciences sociales Exercice de lecture : l’opposante « Le sexe comme le genre est une catégorie construite par le discours » Judith BUTLER, 2005. Le discours d’Erving Goffman dans « l’arrangement des sexes » paru en 1977 vise pour l’époque à déconstruire les rôles des rapports sociaux sous le prisme du genre. Il part de plusieurs faits réels pour agrémenter et composer son analyse. Nous pouvons dès lors définir cette approche d’interactionniste. Bien que son analyse soit novatrice pour l’époque, on peut y relever plusieurs contradictions dans ses dires, un champ d’étude restreint et une manière d’aborder la chose de façon très réductrice. Tout d’abord, rappelons que l’écriture de Goffman est particulière, qu’elle peut nous interpeller voir nous heurter. Comme le dit si bien Claude Zaidman dans la préface du livre : « L’ironie, la causticité du style de Goffman rend la traduction du texte parfois difficile et sa lecture immédiate parfois trompeuse, car les formules qui sont censées éclairer le propos théorique ne sont pas toujours à prendre seulement en premier degrés. p11» Alors, E.Goffman aurait un style d’écriture particulier que l’on se devrait d’accepter sous le joug du pacte du.de le/la lect.eur.rice. L’emploi de certains de ces mots ne serait donc pas à relever, car il conviendrait non pas d’une mauvaise analyse ou mauvaise intention, mais bien d’un style d’écriture particulier et d’une façon de dire les choses, que ceux qui lisent se doivent d’accepter. Pourtant lorsque qu’il évoque dans le paragraphe 9 le fait que pour les femmes : « il serait toujours possible de trouver des preneurs. » p115, il peut crisper le/la dit.e lect.eur.rice, car bien qu’elle soit dans son contexte, cette phrase et choquante et objectivise la femme. En effet, la généralité fait que les hommes ont un sentiment de pouvoir sur la femme, nous ne sommes pas sans le rappeler, mais quoi qu’il arrive ils ne peuvent la prendre, comme on prend un objet. Cette objectification se révèle aussi lorsqu’il dit que pour les hommes « toute occasion fera l’affaire. » p115, réduisant la condition de la femme à une transaction. Il va de soi que c’est une dénonciation de ce pouvoir dont E.Goffman nous fait part dans son livre, mais l’emploi de ces termes, et bien qu’il ne soit pas mal intentionné, sont dans la limite de l’acceptable car trop réducteurs. En écrivant de cette sorte, il est parfois difficile de croire que Goffman ai compris l’arrangement des sexes et la dimension sexiste que les femmes vivent chaque jour. Par ailleurs, il fait partie de la classe des oppresseurs alors l’utilisation de l’ironie ou de ces dits mots dans ce genre de conditions sont réellement mal venus.
  • 2. De plus, et toujours dans le même paragraphe, il énonce que « toutes les femmes de belles apparences valent le coup d’œil. » p113 retranscrivant ce qu’il a pu observer dans l’espace. Mais cela réduit la femme à des choses, qui s’admirent si elles sont belles, se jettent si elles sont moches. Pourtant certaines femmes ne peuvent recevoir ce traitement de faveurs du fait de leur non-conformité aux codes de beauté établis dans nos sociétés. On peut dès lors relever une contradiction dans son analyse puisqu’il nous fait comprendre qu’il est plus facile pour une femme de trouver « preneurs », mais oublie que dans son paragraphe 5 il disait que « les femmes âgées et les femmes laides sont ainsi continuellement menacées de ne pas être traitées d’une manière qui convienne à la nature humaine que leur classe sexuelle est censée leur conférer. » p70. Mais la diversité des femmes ne se réduit pas qu’aux belles femmes, aux femmes âgées et laides. Notons malgré tout que la beauté est une notion très subjective. En effet, dans la totalité de son ouvrage il évoque le prisme du genre dans son spectre le plus réduit. Bien qu’écrit en 1977, son ouvrage reste dans le prisme de l’hétéro-normativité. Une femme trouvera « preneur » et non preneuse. Nous pouvons dès lors voir une étude de la classe moyenne blanche, américaine/occidentale cis-genre et hétérosexuelle. Il ne parle jamais des difficultés qu’ont les femmes racisées, handicapées, sans-abris, transgenres, grosses, pauvres… Qui vivent leurs oppressions de femmes en plus de ce par quoi elles sont altérées dans la vie de tous les jours, en fonction de leur différence à la « norme ». C’est un point de vue relativement hégémonique de la part de Goffman, alors que ces femmes sont tout autant importantes dans ce genre d’études. Toutes les personnes qui souffrent d’invisibilité peuvent se sentir déconsidérées, mis à part par l’auteur et ne peuvent y trouver une sorte de soulagement et de réconfort entre ces lignes. Cette invisibilité est présente pour certaines catégories de femmes mais aussi pour les différentes composantes du genre. Effectivement, aujourd’hui, une analyse du genre sous la 4eme vague féministe, ne peut se faire sans inclure la communauté LGBTQIAAP+ (liste non-exhaustive) qui souffre des rapports de force et de domination similaires dans l’espace privé comme public. En ajoutant à cela que le prisme du genre ne s’arrête pas à la binarité et l’hétéro-normativité redondante dans ce livre. Elle est multiple et son panel de diversité énorme. Ne pas l’évoquer c’est passer à côté de nombreuses questions et réponses sur les pratiques et les représentations de nos rapports sociaux. Penchons-nous sur une autre phrase qui m’a interpelé au cours de ce paragraphe 9 : « Il est manifeste que les hommes et les femmes ont des rapports très différents de la vie publique, ses imprévus étant bien plus important pour les femmes que pour les hommes (…) » p115. Il parle « d’imprévus », mais c’est bien plus que cela. Ce que vivent les femmes dans la vie publique c’est une constante exposition au regard de tous. Elles sont toujours dans l’alerte d’un potentiel danger auquel elles peuvent faire face. Cette « mise en lumière sous les projecteurs de la vie publique. » p112, est, je suppose, pour les femmes un sentiment plus profond qu’une exposition permanente. C’est un sentiment de jugement qui pèse sur elles, et elles sont épiées pour chacun de leur fait et gestes. Ses « Imprévus » alors, ne sont pas. C’est la société patriarcale qui a normalisé ses événements.
  • 3. Ces derniers sont en réalité des insultes, des regards, de la violence symbolique, des oppressions sous différentes formes, des agressions… Minimiser les rapports de force en parlant d’imprévus n’aide pas à les éradiquer complètement. En effet Jil Valentine nous informe que « La plupart des femmes ont connu au cours de leur vie une expérience sexuelle alarmante. » Elle parle « d’expérience alarmante » et non pas d’imprévus qui semble faire croire que la femme subit la petite pluie du patriarcat et non sa tempête. Pour finir, E. Goffman en conclusion de son ouvrage, soulève une notion avec laquelle j’ai énormément de mal à être en accord : « Et l’on peut comprendre que les femmes aient un pouvoir dont elles ne disposent guère, celui d’autoriser l’accès à elle-même. » p115. A première vue, cela sous-entend que les femmes auraient un avantage et pourrait contrôler l’usage de leur corps comme bon leur semble selon les lois de l‘attractivité dont il nous fait part quelques lignes en deçà. Or ceci est faux. On ne compte plus les atteintes du « territoire du moi » (E.Goffman, « Les Relations en public. La Mise en scène de la vie quotidienne II » ; 1973) chez ses dernières. Le territoire du moi, selon lui est multiple, il en distingue 8 espaces : L’espace personnel, les domaines réservés de la conversation, la place, l’espace utile, le tour, le territoire de la possession, les réserves d’informations, l’enveloppe. Je vais seulement en retenir quelques-uns pour appuyer mes propos. Le premier, l’espace personnel, se caractérise par une enveloppe fictive se situant autour du corps qui s’apparenterait à une bulle de confort, synonyme d’intimité. Cette bulle qui, lorsqu’elle est pénétrée, marque une rupture avec notre protection « où toute pénétration est ressentie comme un empiètement ». Le second, les domaines réservés de la conversation qui désigne le droit d’exercer un contrôle sur qui peut nous adresser la parole et quand. Le dernier, l’enveloppe, représente la peau ou bien les vêtements, nos territoires de « peau » sont traités différemment selon les parties du corps. La protection de notre territoire envers les coudes sera moindre que nos parties intimes par exemple. Dès lors, que ce soit une bise non voulu, une parole, une agression, une insulte, un viol… plusieurs espaces du territoire du moi sont rompus. Ainsi, si les femmes disposent de plus d’avances elles sont confrontées à plus de risques et de ruptures. La société ayant formé l’homme en celui qui demande des faveurs par le biais d’actions comme la cour ou la galanterie. La femme elle, se doit d’offrir. Offrir sa rhétorique, sa réponse, son corps. Dès lors tout cela ne justifie pas le fait qu’une femme ai le pouvoir, en toute circonstances, d’autoriser l’accès à elle-même. On ne compte plus le nombre de viols, de fémicides, autrement dit meurtre d’une femme par un homme (on en dénombre 149 en 2019), et d’agressions physiques qu’elles subissent. Allez dire aux femmes qui se font exciser si elles ont le pouvoir de disposer d’elles-mêmes. Si ce processus se révélait vrai, nous, féministes ne lutterions pas autant pour rendre la femme à l’égal de l’homme dans ces privilèges et droits. Les mouvements récents comme #metoo ou encore #stopféminicides nous montre bien que ce pouvoir n’est pas en vigueur et qu’il est au cœur des débats et des luttes de ces mouvements.
  • 4. Dès lors, on peut affirmer qu’E.Goffman a pour son époque apporté quelques fondements théoriques sur les différents questionnements et réflexions de nos rapports de genre dans l’espace et dans nos relations. Il a permis la déconstruction de certains rapports entre l’homme et la femme. Mais ces champs d’actions sont soit trop précis, soit ne sont pas assez larges dans les catégories de personnes évoquées. Le fait qu’il y ai une invisibilité de ces dernières rend son discours fade, redondant et peu original. L’hétéro-normativité et la binarité appauvrissent ces exemples et théories. De plus, ceci est l’étude du genre sous l’œil d’un homme favorisé car blanc, cis-genre, de classe moyenne supérieure et surement hétérosexuel, ne souffrant pas d’oppressions quelqu’une. Loin de délégitimer ses propos, il part avec des avantages et une perception du monde différente de ceux qui sont oppressés. De par le fait, il n’apporte pas les même réponses qu’une personne ayant vécu ou subit des altérisations par le genre.