Voeu du conseil communautaire de Plaine Commune sur la Métropole de Paris 17 ...
Pour un grand paris multipolaire démocratique et efficace
1. Pour un Grand Paris multipolaire, démocratique et efficace
Une gouvernance du « Grand Paris » est une nécessité pour assurer un
développement plus équilibré, solidaire, durable de la métropole.
Le projet de loi gouvernemental soumis au Sénat en première lecture en juin dernier
constituait une avancée intéressante en ce sens, en s’inscrivant dans la continuité du
processus initié par Paris Métropole, et en se nourrissant des dynamiques territoriales
existantes ou en émergence avec les communautés d’agglomération et les contrats de
développement territorial.
Après son rejet par une majorité de circonstance que seule une vision étroite et
dépassée de l’autonomie communale réunissait, un nouveau projet s’inspirant du
rapport Balladur a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, sans information
ni consultation des élus concernés, et adopté en toute hâte par une majorité de
députés.
En rupture avec le projet précédent qui s’inscrivait dans un processus démocratique et
ascendant, le dispositif proposé se révèle inadapté, inefficace et impraticable.
Il est inadapté parce que le périmètre proposé ne correspond pas à l’aire
métropolitaine, en excluant par exemple les villes nouvelles ou l’aéroport de Roissy. Il
rejette dans une nouvelle banlieue toute une partie de l’aire urbaine qui fait le Grand
Paris.
Il est inefficace, et même dangereux, car il crée un monstre bureaucratique et
technocratique « gouvernant » six à huit millions d’habitants, avec un centre de
décision stratégique coupé des réalités et des dynamiques territoriales. Il correspond à
un mouvement de recentralisation sans précédent alors que l’on sait que l’efficacité
appelle la décentralisation et la proximité. Il substituera aux dynamiques de projets
territoriaux une gouvernance fondée sur des logiques technocratiques et des accords
partisans.
Il est enfin impraticable.
En supprimant les communautés d’agglomération qui rassemblent aujourd’hui plus de
70% de la population métropolitaine et en faisant remonter leurs engagements, leurs
compétences et leurs personnels au niveau de la métropole, il appelle la mise en place
de mécanismes de transferts d’une lourdeur et d’une complexité extrêmes. Imaginons
seulement un instant ce que deviendront les flux financiers entre les villes et leur EPCI
(AC et DSC), les outils communautaires (SEM, SPL, OPAC…), les engagements
juridiques et financiers (conventions de concession, PLH, CDT, marchés, dette…), les
agents !
En instituant des conseils de territoire sans pouvoirs ni moyens propres, à qui seront
subdéléguées par la métropole la gestion de certains services et la mise en œuvre de
certaines actions, il mettra en responsabilité des élus ne disposant pas de moyens de
les assumer.
2. S’il faut une gouvernance au Grand Paris, elle ne peut être celle-là. Le projet ne
peut rester en l’état. Il doit donc être amendé puisqu’heureusement, il est
amendable :
Il faut redonner au Grand Paris le périmètre de la métropole, c’est-à-dire de
l’aire urbaine.
Il ne faut pas casser ce qui existe, mais s’appuyer sur les acquis et les
dynamiques territoriales. Il faut donc doter les conseils de territoire d’une
personnalité juridique, de compétences propres déléguées par les villes qui
les constituent, de moyens.
Il faut créer une métropole avec une gouvernance issue à la fois des villes et
des territoires et dotée des grandes compétences stratégiques nécessaires
à un développement équilibré, solidaire et durable.
Il faut établir une répartition rationnelle et efficace des compétences entre
les communes (gestion des services de proximité), les territoires (services
techniques mutualisés, projets de territoire en application des orientations
stratégiques arrêtées par la métropole - PLU, PLH, action économique, emploi,
insertion, ZAC d’intérêt communautaire), la métropole (schéma directeur
d’aménagement, opérations d’aménagement d’intérêt métropolitain, logement,
transport, environnement).
Il faut redistribuer les moyens (fiscalité et dotations) entre ces trois niveaux de
manière à permettre un réel exercice des compétences et une péréquation
accrue des ressources.
Un tel dispositif, qui nécessite certes quelques amendements significatifs, permet
d’assurer un juste équilibre entre exercice des compétences stratégiques qu’appelle
une gouvernance métropolitaine, et gestion et dynamique de projets qu’appellent la
réalité et la diversité des territoires. Il se construit dans un processus ascendant,
démocratique, et évite l’imbroglio administratif et juridique qui découlerait d’abord d’une
centralisation des compétences et des moyens puis d’une délégation à des structures
déconcentrées sans pouvoir réel de décision.
Les solutions juridiques existent. Elles résident dans l’adaptation par la loi des
institutions existantes, qu’elles s’appellent EPCI ou pôle métropolitain. S’il n’y avait
qu’un amendement à proposer, ce serait alors de doter les conseils de territoire de la
personnalité juridique et de moyens propres. Les ordonnances prévues par la loi, la
raison et le principe de réalité feront le reste.
Si Paris valait bien une messe, le Grand Paris mérite bien un peu d’imagination,
d’innovation et de spécificité juridique.
Jacques MARSAUD
Directeur général de services
de Plaine Commune