De plus en plus dépendants de la technologie, sommes-nous en passe de devenir des cyborgs et de perdre notre humanité? C’est la question centrale de ma nouvelle chronique.
«Die Ferien sind vorbei – Ich sortiere aus, werfe weg, gebe fort»
«Les cyborgs sont parmi nous!»
1. Neil Harbisson/flickr
Les cyborgs sont parmi nous!
Compte tenu des bouleversements constants qui agitent notre société, les
spéculations sur l’évolution de l’humanité vont bon train. Théories trans-
humanistes en tête. Demain (et dans le cas présent, demain veut vraiment
dire demain), l’Homo sapiens aura-t-il disparu au profit des cyborgs?
Neil Harbisson est le premier cyborg officiellement reconnu comme tel. Neil Harbisson, c’est
cet artiste catalan qui se promène avec un «eyeborg», un truc qui ressemble à une webcam
ou à une mini lampe de bureau fiché dans le crâne et qui lui retombe entre les deux yeux. Un
système qui permet à son cerveau de convertir les couleurs, qu’une forme rare de
daltonisme l’empêche de voir, en fréquences sonores.
Cyborg est la contraction de cybernetic organism. Un cyborg serait donc un organisme
«cybernétique». Ce terme dérivé du grec kubernesis, désignant le pilotage d’un navire, a été
francisé au début du XIXe
et indiquait alors l’art de gouverner les hommes, puis, un siècle
plus tard, la science des systèmes. D’où le concept de cyborg, une créature mi-homme
mi-machine.
Neil Harbisson a ainsi développé une faculté surhumaine. Et la base de l’eyeborg a fini par
fusionner avec son os occipital. Du pain bénit pour les transhumanistes.
«Nous pourrions faire face à un avenir radieux»
Les transhumanistes sont ces gens qui pensent fort que, grâce aux progrès technologiques,
nous pourrons surmonter nos limites biologiques et, selon le meilleur des scénarios,
un avenir merveilleux et radieux s’ouvrira devant nous. Mais, ça c’est après. Quand les
2. pauvres Homo sapiens que nous sommes s’appuieront sur des machines superintelligentes
qui feront tout mieux que nous. Jusqu’à être capables de se passer de nous…
Quel avenir! Des robots qui feront le sale boulot, des pilules qui nous promettent la félicité
perpétuelle, des colonies de cyborgs sur des planètes lointaines, lesquelles deviendront vite
des sortes de banlieues de la Terre desservies par des liaisons régulières en navettes
spatiales, des thérapies géniques qui tiendront, enfin, le vieillissement en échec. Beaux,
superintelligents, en pleine santé… et bientôt immortels.
«Bienvenue dans le monde des cyborgs!»
Les scénarios élaborés par les transhumanistes nous emmènent parfois un peu loin. Ou
l’on préfère ne pas y croire, parce que le monde qu’ils laissent entrevoir n’a pas l’air très
rigolo. Et pourtant. Three Square Market, une société informatique basée dans le Wisconsin,
vient d’annoncer son intention d’être la première entreprise américaine à offrir des implants
RFID à ses collaborateurs. Des microchips à peine plus grosses qu’un grain de riz grâce
auxquels ils pourront ouvrir des portes et démarrer des ordinateurs, régler des achats, etc.
Va savoir ce que ces puces sont encore capables d’enregistrer et de transmettre comme
informations! Surtout que, si une grosse seringue suffit pour les implanter, on ne s’en
débarrasse pas comme ça.
Au moins, le téléphone portable – ce terrible engin auquel nous sommes accros et par lequel
nous sommes épiés, évalués, ciblés –, on peut l’éteindre. Ou l’oublier quelque temps dans la
pièce d’à côté. Mais une micropuce implantée entre le pouce et l’index, il faut une opération
chirurgicale pour s’en débarrasser. Une cinquantaine de collaborateurs de Three Square
Market se sont cependant déjà portés volontaires pour recevoir un implant.
L’opération est programmée pour le 1er
août et donnera lieu à une grande fête, une «chip
party». Bienvenue dans le monde des cyborgs. Perso, le 1er
août, je sais à peu près ce que je
vais faire. Entre le grain de riz et la Bratwurst, je choisirai le moindre mal.
Sylvie Castagné est mère d’une adolescente qui, comme nombre de ses pairs, lâche difficilement son
smartphone. La jeune fille trouve toutefois que sa mère passe un peu trop de temps sur Facebook, Twitter et
Instagram. La rédactrice free-lance basée à Zurich a cependant une bonne excuse, puisque l’un de ses sujets de
prédilection est l’impact de la transformation numérique sur nos vies.
@belluslocus