1. A la
Découverte de
la Moutarde de
Bourgogne
By ANNIE HADDAD
I
f you have only one day to spare in Burgundy,
visit historic Beaune, capital of this wine country.
Located 160 kilometres from Lyon, Beaune still
retains all the charm and authenticity of a medieval city.
Travel back in time to the fascinating 15th century with
a walk down the paved streets.
The Hôtel-Dieu was founded in 1443 by Nicolas Rolin,
chancellor of Philippe le Bon, the Duke of Burgundy.
This hospice is a jewel of high gothic architecture with its
polychrome roofs and the golden colours of the altarpiece
of The Last Judgment by Rogier Van der Weyden. But
it also hides other treasures: the great Salle des Pôvres
with its richly sculpted and painted ceiling, the gothic
chapel, the kitchen and the pharmacy with its collection
of pewter and earthenware.
Each year, the Hôtel-Dieu or Hospices de Beaune
holds a wine auction during the third weekend of
November and Christie’s leads it.
Most of the wines are classified as Grands Crus
and Premiers Crus. This charity wine sale acts as an
international barometer for the prestigious wines market
and brings together Beaune’s major trading houses and
buyers from across the world.
Speaking of wine, immerse yourself in the culture
at the Musée du Vin de Bourgogne (Burgundy Wine
Museum) and get familiar with wine-related art and
traditions. There are plenty of opportunities for wine
tasting and purchasing all over the city. Admire the 12th-
century Notre-Dame Collegiate Church, also known as
the Daughter of Cluny, which is a beautiful example of
Burgundian Romanesque architecture.
Beaune is not only a city of art and history but also a
gourmet paradise. From snails to pain d’épices, you could
be close to heaven. Remember, though, that in Burgundy
nothing goes without mustard.
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2. Qui ne possède pas un pot de ce condiment légendaire
dans sa cuisine pour accompagner viande, gibier,
poisson et volaille ou sublimer une sauce? C’est un
élément indispensable du bien manger, un plaisir
gustatif incomparable. Les dernières tendances sont aux
moutardes aromatisées comme celles au pain d’épices,
au piment d’Espelette, au cassis, au marc de Bourgogne,
au citron et à l’aneth, à l’estragon, au miel et vinaigre
balsamique et j’en oublie. Ajoutées à la sauce, elles
subliment les arômes et donnent la touche finale au plat.
Mais il y a moutarde et moutarde et c’est là que notre
histoire commence.
Nous sommes en 1840. Edmond Fallot rachète la
moutarderie qui avait appartenu à d’autres propriétaires.
Aujourd’hui, Marc Desarménien, son petit-fils, a repris le
flambeau pour faire revivre la dernière maison familiale
indépendante de Bourgogne. Ce beaunois a retrouvé
les recettes de base, créé un musée en 2003 avec un
parcours interactif, lancé le concept de la moutarde haut
de gamme. Bref, il a réécrit l’histoire de la moutarde à
l’ancienne tout en l’adaptant aux tendances du moment.
Il s’est également lié l’expertise de grands chefs comme
Bernard Loiseau, Joël Robuchon, Alain Ducasse ou Paul
Bocuse pour créer des recettes de moutardes à tomber.
En un mot, il a redonné à la moutarde ses lettres de
noblesse. Sa femme, Nathalie, directrice administrative
et juridique, le suit dans cette aventure. aa
What kitchen doesn’t have a jar of this legendary
condiment to accompany meat, game, fish and poultry
or to transform a salad dressing? This incomparable
taste sensation is an essential ingredient for eating well.
Flavoured mustards are the latest trend: spice bread,
Espelette pepper, blackcurrant, marc de Bourgogne,
lemon and dill, tarragon, honey and balsamic vinegar.
Added to a salad dressing, it highlights the flavour and
adds a finishing touch to the dish. But there is mustard
and there is mustard, and that’s where this story begins.
In 1840, Edmond Fallot bought a mustard mill.
His grandson, Marc Desarménien, has now taken up
the challenge of reviving the last independent family
owned mustard mill in Burgundy. He has tracked down
the basic recipes, created an interactive museum in
2003 and launched the concept of premium mustards.
In short, he has rewritten the history of traditional
mustard by adapting it to current trends and has restored
mustard’s badge of honour. He has also collaborated
with great chefs like Bernard Loiseau, Joël Robuchon,
Alain Ducasse and Paul Bocuse to create mustard
recipes to die for. Marc’s wife, Nathalie, Fallot’s legal
and administration manager, has joined him on this
adventure. aa
49
taste
3. Moutardiers-vinaigriers et
charbonniers
Il faut savoir que la moutarde est une très ancienne
épice qui a marqué toutes les grandes cultures.
Plante herbacée médicinale de la famille des
crucifères, elle compte quarante espèces recensées
par les botanistes, dont une seulement entrera dans la
composition du condiment appelé moutarde de Dijon,
la moutarde brune (Brassica juncéa).
Les Chinois connaissaient cette plante aux vertus
digestives et antiseptiques depuis trois mille ans. Les
Grecs et les Romains l’utilisaient pour rehausser leurs
plats ou comme conservateur.
On mentionne la moutarde dès 1336 en France
et la confrérie des moutardiers-vinaigriers reçoit ses
premiers statuts au XIVe siècle.
Elle faisait également vivre les charbonniers qui
semaient la graine de moutarde sur le sol où avait eu
lieu la combustion du bois et donc riche en potasse.
Cela leur apportait un deuxième revenu. Puis, les
charbonniers ont disparu et après 1950, la culture de la
moutarde fut abandonnée, faute de rendement. C’est
pourquoi 70% des grains de moutarde proviennent
du Canada. Mais depuis 1990, on a réintroduit la
culture de la graine et on assiste à une recrudescence
de la culture de sénevé en Bourgogne (5300 hectares
à ce jour). Fallot utilise, quant à lui, 60% de grains de
Bourgogne et 40% du Canada.
Du sénevé, du sel et du verjus
Mais comment fait-on de la moutarde? Il faut trois
ingrédients à savoir le sel, les graines de sénevé (ou
grain de moutarde) et le verjus, jus acide extrait des
raisins n’ayant pas mûri (dit aussi raisins verts). Ce suc
provenait du Bourdelas, raisin d’autrefois aux grosses
grappes vertes. Ce verjus avait donné une saveur
particulière à la moutarde fabriquée dans la région.
Lorsque le phylloxera a ravagé la vigne en France, à la
fin du XIXe, le Bourdelas a disparu et le verjus avec.
Depuis, on l’a remplacé par du sel, de l’eau, du vinaigre
et/ou du vin blanc.
Mustard-and-vinegar-makers and
charcoal-makers
Mustard is an ancient spice that has left its mark on all
the great cultures. Botanists have recorded 40 species of
this medicinal herbal plant from the cruciferous family,
but just one of them is found in Dijon mustard: brown
mustard (Brassica juncea).
The Chinese have used mustard for its digestive
and antiseptic properties since 3000 BC. The Greeks
and Romans used it to enhance their dishes and as a
preservative. In France, mustard was first mentioned
in 1336 and the brotherhood of mustard-and-vinegar-
makers became official in the 14th century.
Mustard also helped charcoal-makers to make a
better living. They used to sow mustard seed in the soil
that was rich in potash after the wood had been burnt
and this gave them a second income. Charcoal-making
died out and then, after 1950, mustard growing was
abandoned. For this reason, 70 per cent of mustard seed
comes from Canada. However, mustard growing was
reintroduced in France in 1990 and there has been a
sharp rise in mustard cultivation in Burgundy (currently
5,300 hectares). Sixty per cent of the mustard seed Fallot
uses comes from Burgundy and 40 per cent from Canada.
Mustard seed, salt and verjus
How is mustard made? Three ingredients are needed:
mustard seed, salt and verjus (an acidic juice made from
pressed unripened grapes). Verjus originally came from
the Bourdelas grape, an old vine with big bunches of
green grapes. It gave a distinct flavour to the mustard
made in this region. When
phylloxera ravaged the vines
in France at the end of the
19th century, the Bourdelas
grape disappeared and
verjus with it. Since then,
it has been replaced with
salt, water, vinegar and/or
white wine.
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4. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la
graine de moutarde n’est pas une épice forte, c’est
sa fermentation dans un liquide approprié (verjus,
vinaigre, vin blanc) qui lui donne son piquant.
Un procédé de fabrication artisanale
Première étape, c’est le dosage des ingrédients et là
intervient toute l’expertise du moutardier-vinaigrier.
Puis, ce mélange est pompé et dirigé vers une cuve
de trempage durant quelques heures car les graines
trempées sont plus faciles à écraser.
Troisième étape, les deux meules en pierre
écrasent doucement le mélange comme cela se
faisait déjà au XIXe siècle. Il faut savoir que la graine
de moutarde est très sensible à la chaleur et donc
l’usage de ces meules a pour but essentiel de limiter
l’échauffement de la pâte.
On obtient donc une base qui est la moutarde à
l’ancienne avec des grains. Vient ensuite la dernière
étape, le tamisage, durant laquelle on passe la pâte au
travers d’une toile métallique pour la débarrasser de ses
téguments (les grains de l’écorce) et pour obtenir une
pâte lisse. Le résultat s’appelle moutarde de Dijon. Tous
les moutardiers fabriquent ces deux sortes de moutarde.
Enfin, on les aromatise avec un ou plusieurs produits.
Le conditionnement en pots est l’opération finale.
Trois quarts des ventes de Fallot sont des moutardes
de Dijon. aa
Contrary to what you might think, mustard seed
is not a strong spice. Fermentation in the right liquid
(verjus, vinegar, white wine) gives it its pungency.
A traditional production method
Firstly, the ingredients are measured and that is where
the expertise of the mustard-and-vinegar-maker comes
in. Then, this mixture is pumped into a steeping vat for
several hours because soaked mustard seeds are easier
to crush.
After steeping, two millstones gently crush the
mixture as it was done in the 19th century. Mustard seed
is heat-sensitive and millstones are used to prevent the
paste from overheating.
This produces a base which is wholegrain mustard
that contains seeds. Sifting is the next stage in the
process of making Dijon mustard; the paste is put
through wire mesh to get rid of the husk and obtain a
smooth paste. All mustard-makers produce both smooth
and wholegrain mustards. Any flavouring is added at
this stage before it is finally packaged in jars. Dijon
mustard accounts for three quarters of Fallot’s sales.
Where it gets complicated is that almost anyone can
make Dijon mustard. It is not a protected name but a
production process defined by a decree dating aa
I M A G E C R E D I T S :
La Moutarderie Fallot
51
taste
5. from 10 September 1937. This is why Marc Desarménien
has stepped up by creating the Burgundy Mustard
Association and obtaining a protected geographical
designation for the association in 2009. The
requirements are precise: the mustard must be made in
Burgundy using mustard seed produced in Burgundy
and white wine made from Burgundian Aligoté grapes. It
must also be processed in Burgundy.
Mustard in figures
So what constitutes a good mustard? Visually, it must
have a glossy, granulated consistency but above all it
must ‘get up your nose’, a sign of freshness and quality.
Of the four mustard manufacturers that remain
in Burgundy (Amora and Maille have been bought
by Unilever and Reine de Dijon by German company
Kuhne), Fallot is the only one using millstones to crush
the seeds. Fallot places great importance on artisanal
quality and the traditional method of slow crushing that
allows the mustard to develop all of its flavours.
At Fallot’s interactive museum, visitors can discover
all the age-old practices and tools. They learn that France
is the top mustard producer in Europe with 92,000
tonnes per year and that 95 per cent of this quantity is
made in Burgundy.
At the end of this olfactory and gustatory stroll,
visitors can taste different mustards at the mustard bar
next to the factory. Fallot Mustard Mill welcomed 35,000
visitors in 2015. Even though Fallot only represents
five per cent of the market (it produces 2000 tonnes of
mustard a year), it is at the high end of the market. It has
also opened a shop in Dijon and has returned mustard to
its Burgundian heritage.
Beaune, a small town in the middle of the vineyards
with 23,000 inhabitants, but capital of the Dukes of
Burgundy, awaits you. D
Là où ça se complique, c’est que tout le monde ou
presque peut fabriquer de la Moutarde de Dijon. En effet,
ce n’est pas une appellation protégée mais un procédé
de fabrication défini par le décret du 10 septembre
1937. C’est pourquoi Marc Desarménien a rebondi en
créant l’Association Moutarde de Bourgogne (AMB)
et a obtenu l’IGP (indication géographique protégée)
en 2009 pour cette dernière. Et là, les exigences sont
précises: la moutarde doit être fabriquée en Bourgogne
avec des graines de moutarde produites en Bourgogne
et du vin blanc de Bourgogne aligoté. Elle doit être aussi
transformée sur le territoire bourguignon.
La moutarde en chiffres
Alors, finalement, me direz-vous qu’est-ce qu’une bonne
moutarde? C’est d’abord le visuel: elle doit avoir une
consistance brillante, granulée. Mais surtout, elle doit
‘monter au nez’, signe de fraîcheur et de qualité.
Des quatre moutardiers qui restent en Bourgogne
(Amora et Maille ont été rachetés par le groupe
américain Unilever et Reine de Dijon par le groupe
allemand Kuhne), Fallot est le seul à utiliser la meule
de pierre pour écraser les grains. Il a choisi la qualité
artisanale et le processus traditionnel d’écrasement lent,
ce qui permet à la moutarde de développer toutes les
saveurs.
Durant la visite, vous retrouverez les gestes et les
outils d’antan. Vous apprendrez que la France est le
premier fabricant de moutarde d’Europe avec 92 000
tonnes par an et que 95% de cette quantité se fait en
Bourgogne.
A la fin de cette promenade olfactive et gustative,
vous pourrez déguster différentes moutardes et les
découvrir au bar à moutardes qui jouxte la fabrique. La
Moutarderie Fallot a accueilli 35 000 visiteurs en 2015
et si Fallot ne représente que cinq pour cent du marché,
c’est celui du haut de gamme. Il produit 2000 tonnes
de moutarde par an. Il a également ouvert une boutique
à Dijon et a donc remis la moutarde au patrimoine
bourguignon.
Beaune, petite ville de 23 000 habitants implantée
au milieu des vignobles, mais capitale des Ducs de
Bourgogne, vous attend. D
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