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Les « savoirs locaux »
	Un	bien	commun?		
Geneviève	Michon	
IRD	
LMI	MediTer	
Ecole	Chercheur	Azrou	avril	2018		 @M.Bounyit
De quels savoirs parle-t-on ?
• Les	«	savoirs	locaux	»	(«	naturalistes	»,	«	paysans	»,	etc.)	
•  Savoirs	liés	au	plantes	(culQvées,	sauvages,	alimentaires,	médicinales,	
etc.)		
•  Savoirs	liés	à	la	forêt	(à	la	savane,	au	maquis,	à	la	montagne,	etc.)	
•  Savoirs	d’élevage,	de	culture	
•  Savoirs	arQsanaux	
• Mais	aussi	
•  Savoirs	liés	à	la	gesQon	(technique	et	écologie)	et	à	l’uQlisaQon	(usages,	
transformaQons)	
•  Savoirs	organisaQonnels	(cf.	«	Agdals	»	ou	«	syndicats	de	défense	des	
AOC)	
•  Savoirs	relaQonnels	(savoir	réguler	les	relaQons	H	/	R,	et	entre	les	H	à	
propos	de	l’accès	et	de	l’usage	des	ressources)	
•  Savoirs	«	sur	l’extérieur	»	(percepQon	des	acteurs	non	locaux)	
•  ……….
Quels a9ributs de ces savoirs?
• Indissociables	des	«	représentaQons	du	monde	»	
• Indissociables	des	savoir-faire	et	des	gestes,	des	objets	
techniques	
• Indissociables	des	praQques	producQves/sociales	
• Indissociables	de	l’environnement	naturel	mais	aussi	
religieux,	culturel,	linguisQque		
• A	la	fois	produits	par	un	collecQf	sur	la	longue	durée	et	
modifiés	par	chaque	détenteur	
• Transmis	«	en	situaQon	»,	de	façon	non	formelle,	souvent	
aussi	de	façon	intergénéraQonnelle
Les savoirs locaux comme communs?
•  Construits	et	enrichis	sur	le	temps	long	par	un	collecQf	de	détenteurs	
•  Appropriés	(incorporés?)	par	des	individus	qui	ne	s’en	arrogent	pas	la	
propriété	
•  UQlisés	(et	enrichis)	par	chaque	détenteur	sans	«	consommaQon	»	de	
l’ensemble	
•  Des	«	règles	d’uQlisaQon	»	et	de	transmission	(cf.	NC)	
•  è	Commun	d’un	ensemble	d’agents	(une	tribu,	une	ethnie,	un	peuple,	
un	collecQf	de	«	professionnels	»	-	thérapeutes,	apiculteurs-)
Les savoirs locaux comme communs?
•  Construits	et	enrichis	sur	le	temps	long	par	un	collecQf	de	détenteurs	
•  Appropriés	(incorporés?)	par	des	individus	qui	ne	s’en	arrogent	pas	la	
propriété	
•  UQlisés	(et	enrichis)	par	chaque	détenteur	sans	«	consommaQon	»	de	
l’ensemble	
•  Des	«	règles	d’uQlisaQon	»	et	de	transmission	
•  è	Commun	d’un	ensemble	d’agents	(une	tribu,	une	ethnie,	un	
peuple,	un	collecQf	de	«	professionnels	»	-	thérapeutes,	apiculteurs-)	
•  Mais	aujourd’hui	«	appropriaQon	»	plus	large	:	
•  Communs	d’une	naQon?		
•  Communs	de	l’Humanité?
Dans quel(s) contexte(s) en parle-t-on? (1)
•  I	–	Une	très	grave	érosion	de	la	diversité	culturelle	
•  èBesoins	d’inventaires,	de	conservaQon	et/ou	de	protecQon	des	SL	
•  èPlutôt	les	«	systèmes	de	savoirs	»	
•  èIntervenQons	au	niveau	naQonal	/	internaQonal	
•  II	–	Des	problèmes	en	agriculture	(s.l.)	:	défaite	des	modèles	
techniques	qui	«	n’arrivent	plus	à	répondre	»	(producQon	en	quanQté	
et	en	qualité,	acceptaQon	sociale,	durabilité	environnementale)		
•  èBesoin	de	«	remobiliser	»	les	SL	
•  pour	résoudre	des	problèmes	concrets	
•  pour	inventer	de	nouvelles	manières	de	produire	
•  pour	mieux	valoriser	les	producQons	
•  comme	réservoir	d’idées	
•  èPlutôt	les	savoirs	producQfs		
•  èNiveau	naQonal,	internaQonal	mais	aussi	intérêts	privés
Dans quel(s) contexte(s) en parle-t-on? (2)
•  Des	«	savoirs	locaux	»	pris	dans	diverses	dynamiques	
•  valorisaQon	des	produits	locaux	(marché	et	patrimoine)	
•  labélisaQon		
•  protecQon	et	conservaQon	
•  Appréhendés,	triés,	validés	ou	invalidés,	normalisés		
•  par	diverses	catégories	d’acteurs	(collecQfs	locaux,	scienQfiques,	services	
d’encadrement	technique,	etc.)	souvent	en	interacQon	
•  dans	le	cadre	de	processus	de	«	cadrage	»	(plus	ou	moins	formels)	
•  Confrontés	aux	(ou	validés	par)	le	savoir	scienQfique	
•  Mis	à	profit	par	des	intérêts	privés	
•  è	Modifiés	par	ces	processus
Les processus d’appropriaBon: les grandes
tendances (1)
•  1/	Inventaire	pour	le	développement	è	«	scienQsaQon	»	(Agrawal)	
•  «	Par$cularisa$on	»:	isoler	le	savoir,	le	séparer	à	la	fois	des	autres	
connaissances,	des	praQques,	du	milieu,	du	contexte	et	des	croyances	
culturelles	avec	lesquels	il	se	combine	
•  è	Tri,	sélecQon:	«	Ne	nécessitent	donc	adenQon	et	protecQon	que	celles	de	ses	formes	
qui	offrent	un	intérêt	potenQel	pour	le	développement,	et	l’on	peut	laisser	les	autres	
disparaître,	précisément	parce	qu’elles	sont	sans	rapport	avec	les	besoins	du	
développement	»	
•  «	Valida$on	»	=	recours	à	des	critères	scienQfiques	pour	le	tester	et	
l’examiner	
•  è	«	Les	rituels,	mots,	mouvements,	gestes	et	actes	accompagnant	parfois	dans	une	
praQque	autochtone	l’administraQon	d’un	médicament	ou	stupéfiant	consQtué	par	une	
plante	peuvent	en	être	dissociés	et	abandonnés	comme	étrangers	à	ce	qui	rend	cede	
plante	directement	uQle	»	
•  «	Généralisa$on	»	
•  è	«	Best	pracQces	»
Les processus d’appropriaBon: les grandes
tendances (2)
•  1/	Inventaire	pour	le	développement	
•  2/	ProtecQon,	conservaQon	
•  A	travers	des	mesures	localisées	(régionales,	naQonales)	
•  À	travers	diverses	catégories	internaQonales	(«	patrimoine	culturel	
immatériel	»	de	l’UNESCO)	
•  A	travers	des	inventaires	
•  À	travers	des	mesures	réglementaires	(IndicaQons	Géographiques)	
•  À	travers	des	négociaQons	internaQonales	(OMC,	IMPI)
Les processus d’appropriaBon: les grandes
tendances (3)
•  1/	Inventaire	et	«	ScienQsaQon	»	(Agrawal)	
•  2/	ProtecQon,	conservaQon	
•  3/	Accaparement	par	des	intérêts	privés	
•  Biopiraterie	
•  Dépôts	de	brevets
Les « savoirs sur l’arganier »: un commun aujourd’hui
soumis à une appropriaBon mulBdimensionnelle
Quels savoirs ?
•  Sur	l’arbre
L’huile d’argan: où est le patrimoine socio-
environnemental ? 
•  Une	patrimonialisaQon	par	le	haut	à	diverses	échelles	
•  HC	E&Forêts,	UNESCO	(MAB	+	Patrimoine	immatériel)	
•  IGP	Argane	et	développement	de	la	filière	
•  Un	patrimoine	rural	scindé,	de	nombreuses	composantes	
ignorées		
•  gesQon	des	arbres	dans	les	terroirs,	interacQons	arganier-élevage,	
«	domesQcaQon	»	de	l’arganier,	rôle	de	l’homme	dans	la	producQon	
de	l’arganier,	diversité	des	huiles,	etc.	
•  L’approche-terroir	a	effacé	la	complexité	et	la	diversité	des	
patrimoines	ruraux	de	l’arganeraie	
•  è	une	simplifica$on	à	l’extrême	du	patrimoine	local
L’arganier de plein champ: un long travail de formation du tronc
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•  Sur	l’arbre	è	«	domesQcaQon	»	=	intégraQon	à	l’économie	
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•  Sur	l’arbre	è	«	domesQcaQon	»	=	intégraQon	à	l’économie	
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Quels savoirs ?
•  Sur	l’arbre	è	«	domesQcaQon	»	=	intégraQon	à	l’économie	
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•  Sur	l’espace	/	le	paysage	è	cohabitaQon	pastoralisme	/	
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•  Sur	la	fabricaQon	et	les	usages	de	l’huile	d’argan
L’huile d’argan: des savoirs féminins
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Quelles « appropriaBons »?
• Au	niveau	naQonal	:	forêt	domaniale	et	IGP	argane
è	FolklorisaQon	+	
prolétarisaQon	des	femmes
Quelles « appropriaBons »?
• Au	niveau	naQonal	:	forêt	domaniale	et	IGP	argane	
• è	prédominance	des	savoirs	«	scienQfiques	»	sur	les	savoirs	
locaux	
• è	les	savoirs	féminins	devenus	«	commun	naQonal	»?
Quelles « appropriaBons »?
• Au	niveau	naQonal	:	forêt	domaniale	et	IGP	argane	
• è	prédominance	des	savoirs	«	scienQfiques	»	
• è	les	savoirs	féminins	comme	«	commun	naQonal	»?	
• Au	niveau	internaQonal	:	Réserve	de	biosphère	et	PCI
Quelles « appropriaBons »?
• Au	niveau	naQonal	:	forêt	domaniale	et	IGP	argane	
• è	prédominance	des	savoirs	«	scienQfiques	»	
• è	les	savoirs	féminins	comme	«	commun	naQonal	»?	
• Au	niveau	internaQonal	:	Réserve	de	biosphère	et	PCI	
• è	Accent	sur	les	savoirs	féminins	
• è	OblitéraQon	des	savoirs	sur	la	domesQcaQon	de	l‘arbre	et	du	
paysage	
• è	les	savoirs	féminins	comme	«	commun	de	l’humanité	»?
Quelles « appropriaBons »?
• Au	niveau	naQonal	:	forêt	domaniale	et	IGP	argane	
• Au	niveau	internaQonal	:	Réserve	de	biosphère	et	PCI	
• Par	les	privés	:	industries	de	la	cosméQque
-  Essor	indéniable	de	la	filière	argan	
-  Dépôt	de	marques	=	dépossession	
des	populaQons	locales	
-  è	les	savoirs	locaux	comme	
ressource	pour	le	privé	
(biopiraterie?)
Conclusion
•  Savoirs	locaux	=	construits	sur	le	temps	long	par	des	communautés	
de	détenteurs,	non	appropriés	individuellement	
•  Savoirs	scienQfiques	=	bien	public?	
•  Savoirs	industriels	=	propriété	privée	(système	des	brevets)	
•  Problème	de	reconnaissance	(è	protecQon)	des	SL	par	les	systèmes	
internaQonaux	de	propriété	intellectuelle	
•  Problème	de	mainQen	du	commun	(pas	que	sur	les	SL!)	dans	le	
système	(idéologie,	économie)	dominant	
•  è	À	qui	apparQent	la	connaissance	construite	généraQon	après	
généraQon?		
•  è	Peut-on	privaQser	la	connaissance?

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Les savoirs locaux : "un bien commun" ?

  • 1. Les « savoirs locaux » Un bien commun? Geneviève Michon IRD LMI MediTer Ecole Chercheur Azrou avril 2018 @M.Bounyit
  • 2. De quels savoirs parle-t-on ? • Les « savoirs locaux » (« naturalistes », « paysans », etc.) •  Savoirs liés au plantes (culQvées, sauvages, alimentaires, médicinales, etc.) •  Savoirs liés à la forêt (à la savane, au maquis, à la montagne, etc.) •  Savoirs d’élevage, de culture •  Savoirs arQsanaux • Mais aussi •  Savoirs liés à la gesQon (technique et écologie) et à l’uQlisaQon (usages, transformaQons) •  Savoirs organisaQonnels (cf. « Agdals » ou « syndicats de défense des AOC) •  Savoirs relaQonnels (savoir réguler les relaQons H / R, et entre les H à propos de l’accès et de l’usage des ressources) •  Savoirs « sur l’extérieur » (percepQon des acteurs non locaux) •  ……….
  • 3. Quels a9ributs de ces savoirs? • Indissociables des « représentaQons du monde » • Indissociables des savoir-faire et des gestes, des objets techniques • Indissociables des praQques producQves/sociales • Indissociables de l’environnement naturel mais aussi religieux, culturel, linguisQque • A la fois produits par un collecQf sur la longue durée et modifiés par chaque détenteur • Transmis « en situaQon », de façon non formelle, souvent aussi de façon intergénéraQonnelle
  • 4. Les savoirs locaux comme communs? •  Construits et enrichis sur le temps long par un collecQf de détenteurs •  Appropriés (incorporés?) par des individus qui ne s’en arrogent pas la propriété •  UQlisés (et enrichis) par chaque détenteur sans « consommaQon » de l’ensemble •  Des « règles d’uQlisaQon » et de transmission (cf. NC) •  è Commun d’un ensemble d’agents (une tribu, une ethnie, un peuple, un collecQf de « professionnels » - thérapeutes, apiculteurs-)
  • 5.
  • 6. Les savoirs locaux comme communs? •  Construits et enrichis sur le temps long par un collecQf de détenteurs •  Appropriés (incorporés?) par des individus qui ne s’en arrogent pas la propriété •  UQlisés (et enrichis) par chaque détenteur sans « consommaQon » de l’ensemble •  Des « règles d’uQlisaQon » et de transmission •  è Commun d’un ensemble d’agents (une tribu, une ethnie, un peuple, un collecQf de « professionnels » - thérapeutes, apiculteurs-) •  Mais aujourd’hui « appropriaQon » plus large : •  Communs d’une naQon? •  Communs de l’Humanité?
  • 7. Dans quel(s) contexte(s) en parle-t-on? (1) •  I – Une très grave érosion de la diversité culturelle •  èBesoins d’inventaires, de conservaQon et/ou de protecQon des SL •  èPlutôt les « systèmes de savoirs » •  èIntervenQons au niveau naQonal / internaQonal •  II – Des problèmes en agriculture (s.l.) : défaite des modèles techniques qui « n’arrivent plus à répondre » (producQon en quanQté et en qualité, acceptaQon sociale, durabilité environnementale) •  èBesoin de « remobiliser » les SL •  pour résoudre des problèmes concrets •  pour inventer de nouvelles manières de produire •  pour mieux valoriser les producQons •  comme réservoir d’idées •  èPlutôt les savoirs producQfs •  èNiveau naQonal, internaQonal mais aussi intérêts privés
  • 8. Dans quel(s) contexte(s) en parle-t-on? (2) •  Des « savoirs locaux » pris dans diverses dynamiques •  valorisaQon des produits locaux (marché et patrimoine) •  labélisaQon •  protecQon et conservaQon •  Appréhendés, triés, validés ou invalidés, normalisés •  par diverses catégories d’acteurs (collecQfs locaux, scienQfiques, services d’encadrement technique, etc.) souvent en interacQon •  dans le cadre de processus de « cadrage » (plus ou moins formels) •  Confrontés aux (ou validés par) le savoir scienQfique •  Mis à profit par des intérêts privés •  è Modifiés par ces processus
  • 9. Les processus d’appropriaBon: les grandes tendances (1) •  1/ Inventaire pour le développement è « scienQsaQon » (Agrawal) •  « Par$cularisa$on »: isoler le savoir, le séparer à la fois des autres connaissances, des praQques, du milieu, du contexte et des croyances culturelles avec lesquels il se combine •  è Tri, sélecQon: « Ne nécessitent donc adenQon et protecQon que celles de ses formes qui offrent un intérêt potenQel pour le développement, et l’on peut laisser les autres disparaître, précisément parce qu’elles sont sans rapport avec les besoins du développement » •  « Valida$on » = recours à des critères scienQfiques pour le tester et l’examiner •  è « Les rituels, mots, mouvements, gestes et actes accompagnant parfois dans une praQque autochtone l’administraQon d’un médicament ou stupéfiant consQtué par une plante peuvent en être dissociés et abandonnés comme étrangers à ce qui rend cede plante directement uQle » •  « Généralisa$on » •  è « Best pracQces »
  • 10. Les processus d’appropriaBon: les grandes tendances (2) •  1/ Inventaire pour le développement •  2/ ProtecQon, conservaQon •  A travers des mesures localisées (régionales, naQonales) •  À travers diverses catégories internaQonales (« patrimoine culturel immatériel » de l’UNESCO) •  A travers des inventaires •  À travers des mesures réglementaires (IndicaQons Géographiques) •  À travers des négociaQons internaQonales (OMC, IMPI)
  • 11. Les processus d’appropriaBon: les grandes tendances (3) •  1/ Inventaire et « ScienQsaQon » (Agrawal) •  2/ ProtecQon, conservaQon •  3/ Accaparement par des intérêts privés •  Biopiraterie •  Dépôts de brevets
  • 12. Les « savoirs sur l’arganier »: un commun aujourd’hui soumis à une appropriaBon mulBdimensionnelle
  • 13. Quels savoirs ? •  Sur l’arbre
  • 14.
  • 15. L’huile d’argan: où est le patrimoine socio- environnemental ? •  Une patrimonialisaQon par le haut à diverses échelles •  HC E&Forêts, UNESCO (MAB + Patrimoine immatériel) •  IGP Argane et développement de la filière •  Un patrimoine rural scindé, de nombreuses composantes ignorées •  gesQon des arbres dans les terroirs, interacQons arganier-élevage, « domesQcaQon » de l’arganier, rôle de l’homme dans la producQon de l’arganier, diversité des huiles, etc. •  L’approche-terroir a effacé la complexité et la diversité des patrimoines ruraux de l’arganeraie •  è une simplifica$on à l’extrême du patrimoine local
  • 16. L’arganier de plein champ: un long travail de formation du tronc
  • 17. « Culture » des germinations « Culture » des rejets « Culture » des drageons @R.Simenel
  • 18.
  • 19. L’arganier des parcours : un aménagement pour les chèvres
  • 20.
  • 21. Quels savoirs ? •  Sur l’arbre è « domesQcaQon » = intégraQon à l’économie domesQque, à l’habiter
  • 22. Quels savoirs ? •  Sur l’arbre è « domesQcaQon » = intégraQon à l’économie domesQque, à l’habiter •  Sur l’espace / le paysage
  • 23. Champs et parcours, du privé au collecBf @R.Simenel
  • 24. Quels savoirs ? •  Sur l’arbre è « domesQcaQon » = intégraQon à l’économie domesQque, à l’habiter •  Sur l’espace / le paysage è cohabitaQon pastoralisme / céréaliculture / producQon huile d’argan
  • 25. Quels savoirs ? •  Sur l’arbre è « domesQcaQon » = intégraQon à l’économie domesQque, à l’habiter •  Sur l’espace / le paysage è cohabitaQon pastoralisme / céréaliculture / producQon huile d’argan •  Sur la fabricaQon et les usages de l’huile d’argan
  • 26. L’huile d’argan: des savoirs féminins @R.Simenel
  • 27. Quelles « appropriaBons »? • Au niveau naQonal : forêt domaniale et IGP argane
  • 28.
  • 30. Quelles « appropriaBons »? • Au niveau naQonal : forêt domaniale et IGP argane • è prédominance des savoirs « scienQfiques » sur les savoirs locaux • è les savoirs féminins devenus « commun naQonal »?
  • 31. Quelles « appropriaBons »? • Au niveau naQonal : forêt domaniale et IGP argane • è prédominance des savoirs « scienQfiques » • è les savoirs féminins comme « commun naQonal »? • Au niveau internaQonal : Réserve de biosphère et PCI
  • 32.
  • 33. Quelles « appropriaBons »? • Au niveau naQonal : forêt domaniale et IGP argane • è prédominance des savoirs « scienQfiques » • è les savoirs féminins comme « commun naQonal »? • Au niveau internaQonal : Réserve de biosphère et PCI • è Accent sur les savoirs féminins • è OblitéraQon des savoirs sur la domesQcaQon de l‘arbre et du paysage • è les savoirs féminins comme « commun de l’humanité »?
  • 34. Quelles « appropriaBons »? • Au niveau naQonal : forêt domaniale et IGP argane • Au niveau internaQonal : Réserve de biosphère et PCI • Par les privés : industries de la cosméQque
  • 36. Conclusion •  Savoirs locaux = construits sur le temps long par des communautés de détenteurs, non appropriés individuellement •  Savoirs scienQfiques = bien public? •  Savoirs industriels = propriété privée (système des brevets) •  Problème de reconnaissance (è protecQon) des SL par les systèmes internaQonaux de propriété intellectuelle •  Problème de mainQen du commun (pas que sur les SL!) dans le système (idéologie, économie) dominant •  è À qui apparQent la connaissance construite généraQon après généraQon? •  è Peut-on privaQser la connaissance?