1. 15/12/2011
STRESS, DEPRESSION, JOIE DE VIVRE ET INFARCTUS
Les rôles du stress, de la dépression, des La survenue d’au moins deux événements Dans une méta analyse, Van Melle constate
facteurs psycho-émotionnels et sociaux dans la majeurs dans la vie d’un coronarien, décès qu’une dépression post infarctus était
survenue et le pronostic des accidents d’un proche, conflit familial, licenciement, associée à une augmentation de la mortalité
coronariens aigus, ne sont plus discutés. Les chômage, maladie grave sont des facteurs globale (OR : 2,38, IC 95 %, 1,76-3,22,
études consacrées aux modes d’apparition, à
l’évolution des cardiopathies ischémiques,
prédictifs de complications secondaires dans p< 0,0001), une augmentation de la mortalité
constatent dans près de 30 % des cas des l’année qui suit, avec une augmentation de cardiaque et des événements
facteurs déclenchants ou favorisants, liés à des 40 % du risque d’hospitalisation après cardiovasculaires. (OR 2, 49, IC 95%, 1,77-
émotions particulièrement intenses, une correction tenant compte des autres facteurs 3,77 p< 0,0001) (3).
détresse majeure, un découragement soudain. de risque.
Dans la presse cardiologique récente et au La Heart and Soul Study, fut une étude
dernier congrès de l’AHA une série de Un score de stress psychologique et de prospective menée chez 1017 coronariens
publications a été dédiée au retentissement difficultés psycho sociales élevé est corrélé stables soumis à la recherche d’un syndrome
neuro hormonal, biologique et cardiaque du avec un risque de surmortalité chez les dépressif par un questionnaire validé (4). 341
stress et de la dépression impliqués dans la
coronariens stables. Chez 248 patients événements cardiovasculaires survinrent
survenue et le pronostic des SCA.
stables, le stress évalué selon un pendant un suivi de 4 900 patients années.
questionnaire validé était mesuré dans 3 Après correction tenant compte des autres
T out d’abord une peur intense, la crainte
de mourir, une angoisse extrême, lors de
l’hospitalisation pour un infarctus, sont très
domaines. La mortalité fut la plus élevée chez
les patients ayant le score de stress le plus
facteurs, les symptômes dépressifs sont
associés à une majoration de 31 % du nombre
défavorables (1). Dans une série récente, haut. Après correction tenant compte de l’âge, d’événements cardiovasculaires par rapport
cette terreur soudaine, constatée dans près de du sexe, de la FE, des pics de VO2 à l’effort, aux patients non déprimés. Les auteurs
30 % des cas, au sein d’une cohorte le stress psychosocial, toutes les émotions pensent que le mode de vie, le mauvais suivi
comprenant 280 patients, particulièrement négatives apparaissent comme un facteur de des traitements, l’inactivité physique peuvent
prononcée chez les patients les moins âgés, risque indépendant de mortalité. expliquer cet effet défavorable.
célibataires, avec un faible niveau socio
économique , est associée à une intense Il est bien confirmé qu’une dépression majeure Un stress mental ayant un fort retentissement
stimulation sympathique, une activation est un facteur de risque de décès après un émotionnel induit une série de réactions
plaquettaire, mais aussi à un syndrome infarctus. Carney et col ont comparé la survie vasculaires et biologiques délétères avec une
inflammatoire très délétère avec des à 3 ans de 370 patients ayant un syndrome vasoconstriction, une tachycardie,
élévations pathologiques significatives et dépressif validé par les psychiatres et de 408 l’augmentation des facteurs thrombogènes,
persistantes des cytokines, TNF alpha, IL 6, patients non déprimés (2). Ceux qui ont une une stimulation sympathique, une activation
une réduction de la variabilité sinusale, une dépression majeure, liée a la survenue de plaquettaire avec formation d’agrégats
diminution de la sécrétion de cortisol, facteur l’infarctus, ont une mortalité globale de 18 % monocytes plaquettes. La rupture de plaques
d’adaptation au stress (1). vs 3 ,6 % par rapport aux patients non et une thrombose in situ sont facilitées.
Tous les stress psychologiques influencent de déprimés. Ceci est indépendant de l’état …/…
manière significative le pronostic des atteintes cardiaque initial, des facteurs de risque et
coronaires. d’une pathologie cérébro-vasculaire associée.
2. De même, chez les déprimés, on a constaté Par contre, fait réjouissant, la satisfaction, 1) Steptoe A et col Fear of dying and inflammation
following acute coronary syndromes. Eur Heart J
une dysfonction du système nerveux l’optimisme et la joie de vivre sont associés a
2011;32:2405-11.
autonome, une réduction de la variabilité un faible risque cardiovasculaire Chez 2076 2) Carney RM et col History of depression and survival
sinusale, une désynchronisation de la membres inclus dans White hall II study, after acute myocardial infarction Psychosomatic Med
repolarisation avec des réponses anormales à l’angor, les événements coronariens et les 2009;71:253-59.
3) Van Melle. Prognosis of post myocardial depression
la stimulation ventriculaire programmée créant décès sont associés, après correction tenant
Psychosomatic medicine 2004;66:814-8.
des circonstances favorables aux arythmies compte des facteurs classiques à des faits 4) Moretti R. Depression in cardiovascular pathologies
ventriculaires et à la mort subite. Certains positifs : la satisfaction au travail, la vie Vascular health and risk management 2011;7:433-443.
auteurs constatent une inflammation au long familiale réussie, des activités de loisir 5) Whooley MA et al. Depressive symptoms, health
behaviours, and cardiovascular events in coronary
cours avec des taux élevés de CRP, réjouissantes, un optimisme devant les aléas
disease. JAMA 2008;20:2079-83.
d’interleukine et des molécules d’adhésion de la vie quotidienne diminuent les risques 6) Boehm J et al. Heart Health when life is satisfying :
cellulaire qui influencent le pronostic des d’événements coronariens ! (6). evidence from the Whitehall II cohort Study. Eur Heart J
cardiopathies associées. (5) Mais le Tenons en compte ! 2011;32:2672-7.
découragement, le désintérêt des sujets pour
leur état, une mauvaise observance des Pr Jean-Paul BOUNHOURE,
traitements, des effets réduits des traitements Toulouse
anti dépresseurs, sur ce terrain, peuvent
intervenir (3).