projet alternatif à la mise en concession autoroutière de la RN 154. lettre adressée à Monsieur Ronan DANTEC rapporteur budgétaire sur les transports routiers.
alternative à la mise en concession autoroutière de la RN 154
1. Chartres le 15 novembre 2012
Monsieur Ronan DANTEC
RAPPORTEUR BUDGETAIRE
SUR LES TRANSPORTS ROUTIERS
Commission du Développement durable,
des Infrastructures, de l'Equipement et
de l’Aménagement du territoire
Objet : Transport /
Mise en concession autoroutière de la RN 154/ RN12 sise en Eure & Loir –
région Centre
Monsieur,
Nommé rapporteur budgétaire sur les transports routiers, vous allez vous
prononcer sur la stratégie de l’Etat en matière de création d’infrastructures
routières et à la hiérarchisation des choix des projets routiers en lien avec
les décisions du Grenelle de l’environnement, et avec le débat sur l’avenir
du SNIT.
C’est à ce titre et suite à la sollicitation de Madame Sandra RENDA,
conseillère régionale EELV à la région Centre, que notre association vous
adresse une contribution concernant le projet autoroutier de Nonencourt-
Allaines (liaison A13 – A11 – A10) : 100 km (département d’Eure-et-Loir) et
espère vous convaincre de la nécessité d’apporter à cette infrastructure des
réponses alternatives à celle actuellement préconisée et qui conforte la
politique du tout routier.
Suite au débat public du 12 octobre 2009 au 28 janvier 2010, Monsieur
Jean-Louis BORLOO, ministre de l’Ecologie, de l’Energie, du
Développement Durable et de l’Aménagement du Territoire a, par décision
du 25 juin 2010, décidé de la mise en concession autoroutière de la RN 154
/ RN 12 au motif que ce projet répondait à un enjeu de sécurité (page 50 de
l’avant projet consolidé du SNIT du 20 janvier 2011).
Si il est nécessaire de poursuivre les aménagements de la RN 154 sur son
tracé sud afin de consolider et de développer les filières industrielles dans
l’aire d’influence du projet ainsi que de maintenir l’activité agricole de la
plaine de la Beauce, nous sommes convaincus que la voie empruntée par
le ministre va à contre sens du Grenelle de l’Environnement et ne répond
pas, durablement, aux exigences sus évoquées.
…/…
2. …/… -2-
Nous tenons, tout d’abord, à vous informer du coût financier prohibitif dudit
projet. En moins de 7 ans, celui-ci a été, quasiment, multiplié par 2 :
En 2005 : La Direction Régionale de l’Equipement (D.R.E) dans son projet
d’organisation du SMO à la DRE Centre fait état d’un coût compris de 500
et 600 M€,
En 2007 : La D.R.E dans son rapport sur la Modernisation de l’itinéraire
Orléans – Chartres –Dreux fait état d’un coût compris entre 650 à 700 M€,
En 2009 : le Maître d’Ouvrage (MO) fait état d’un coût compris entre 710 et
765 M€,
En 2011 : L’avant projet consolidé du SNIT, page 49, avance la somme de
800 millions d’€,
En 2012 : Le dossier de concertation du MO fait apparaître un coût de
1 milliard d’€ alors que certains ouvrages, nécessaires au projet, ont été,
tout simplement, oubliés et, donc, n’ont pas été budgétisés !
Ramené au nombre de kilomètres qu’il reste à aménager (60 kilomètres sur
environ 100 kilomètres), le coût de revient s’élève à plus de 16 M€/ km !
La solution envisagée par Monsieur BORLOO n’est tout simplement pas
viable pour l’intérêt général.
Ensuite, nous considérons que cette mise en concession ne répond pas, à
l’insécurité routière (1), d’une part, et sera à l’origine d’une fracture sociale
et territoriale (2), d’autre part.
En revanche, nous pensons qu’il existe un projet alternatif qui concilie les
acquis du Grenelle de l’Environnement et la nécessité de donner à notre
département l’outil structurel de son développement. Il s’agit du transport
ferroviaire, véritable alternative à la mise en concession autoroutière des
RN 154/ 12 et véritable réponse au contournement de l’Ouest parisien (3)
1/ LA VERITE SUR LA SECURITE ROUTIERE :
Pour justifier la construction d’une autoroute, le M.O avance l’argument
sécuritaire, argument repris, par ailleurs, par le SNIT.
L’attention est peut être louable mais nous considérons qu’au regard du
montant de l’investissement sus évoqué et de la spécificité de notre
département en matière de sécurité routière, il est préférable d’aménager
l’existant.
En effet, sur les 5 dernières années, le nombre de tués est plus élevé sur
les autoroutes A10 et A 11 que sur la RN 154. Il est à noter que les
distances de l’A10 et l’A11 qui traversent notre département correspondent
quasiment à celle de la RN 154 (env. 100 km). (Pour les chiffres voir
tableau ci-dessous).
…/…
3. …/… -3-
De plus, l’Indice d’Accidentologie Locale (IAL) (1) (qui compare les résultats
d'un département à ce qu'ils seraient si ce département avait eu les mêmes
taux de risque que la France entière sur ses différents réseaux) est pour
l’Eure-et-Loir, sur la dernière période 2004-2008, plus élevé sur autoroutes
que sur les routes nationales et départementales. Ainsi l’IAL est de 1.45
pour les autoroutes et de 1.27 pour les RN/ RD !
Tableau : Sécurité routière (2) :
Nbre de tués 2007/2012 253
Tués A10/A11 (100km) 26
tués RN154 (100km) 22
Enfin, nous sommes convaincus que le report du trafic sur les voies de
substitutions augmentera l’accidentologie. A titre d’exemple, nous citerons
le cas des communes d’YMONVILLE, de PRUNAY-LE-GILLON et
d’ALLONNES. A l’origine, traversée par la RN 154, la commune
d’YMONVILLE a été déviée sur près de 3 km. Une deuxième déviation
concernant, cette fois, le barreau de PRUNAY-LE-GILLON et d’ALLONNES
(environ 9 km) est en voie d’achèvement. Financés sur fonds publics, ces
aménagements soulagent ces communes et leurs habitants des risques liés
au passage de milliers véhicules /jour. Avec l’autoroute et le report partiel
du trafic, elles seront, de nouveau, exposer aux risques accidentogènes.
2/ AUTOROUTE : FRACTURE SOCIALE, FRACTURE TERRITORIALE
Si, au départ, le concessionnaire supporte le financement, à l’arrivée ce
sont les usagers, les collectivités, voir même l’état qui supporteront le coût :
Les usagers paieront un péage, les collectivités régleront une subvention
d’équilibre, participeront aux éventuels abonnements et, l’état se portera,
peut être, caution…Finalement, au bout de la chaine, les contribuables
paieront.
Nombre d’Euréliens, dont 10% de la population vit dans la pauvreté, ne
pourront supporter ce surcoût financier. Ils choisiront donc d’emprunter les
voies de substitutions au risque de s’exposer au danger de la route comme
nous l’indiquions précédemment.
L’autoroute payante ne sera pas, pour notre département, une source de
développement mais bien la création d’une nouvelle frontière, un frein à la
vie de nos villages et de ses habitants. Nombre d’entre eux, isolés parce
que sans emploi ou âgés se replieront encore un peu plus sur eux-mêmes.
Nous considérons donc que l’autoroute sera à l’origine d’une fracture
sociale et territoriale sans précédent. Pourtant, l’apport du grenelle de
l’environnement est très clair sur ce point : Le développement durable
doit répondre à la cohésion sociale et la solidarité entre les territoires
et les générations.
(1) Nous précisons que cette indice a été notamment utilisé pour justifier du tracé Ouest de la RCEA
http://www.arcea.asso.fr/pdf/Rapport_Etude_ARCEA_v5.pdf page 46
(2) Sources : Observatoire départemental de la sécurité routière de l’Eure-et-Loir
…/…
4. …/… -4-
3/ LE FERROVIAIRE : ALTERNATIVE A LA MISE EN CONCESSION
AUTOROUTIERE DES RN 154/ 12 ET REPONSE AU
CONTOURNEMENT DE L’OUEST PARISIEN :
Si le recours à la mise en concession autoroutière a été acté, nous
considérons, qu’il existe une alternative qui concilie les finalités attachées à
l’objectif du développement durable et la nécessité de répondre au
contournement de l’ouest parisien tout en assurant au département de
l’Eure-et-Loir et à la région Centre des débouchés économiques. Vous
l’aurez compris, il s’agit du transport ferroviaire.
Nous regrettons que ce projet alternatif n’ait fait l’objet d’aucun examen
alors que nous savons que le projet autoroutier affectera non seulement
des zones classées NATURA 2000, ZNIEFF, sera consommatrice de
centaines d’hectares de terres cultivables, isolera les populations les plus
fragiles, n’irriguera en rien le territoire et ne sera en aucun cas vecteur d’un
quelconque développement économique à moyen et long terme.
Il est de notre devoir d’envisager une solution qui milite pour la préservation
des sites remarquables et hautement sensibles, d’une part et œuvre à
l’épanouissement socio-économique de notre bassin de vie, d’autre part.
Cette alternative prend corps au travers la liaison ferroviaire Orléans –
Chartres – Dreux – Evreux – Rouen soutenu par la région Centre. Le
premier tronçon (Chartres-Voves) sera ouvert au fret en 2013, aux trains de
voyageurs en 2014. En outre, le sillon Chartres-Dreux existe et serait
conservé sous l’appellation « étoile ferroviaire » dans le Plan de
Déplacements Urbains de l’agglomération Chartraine (en cours
d’élaboration) limitant ainsi l’emprise foncière et les impacts écologiques.
De plus, dans son rapport adopté en séance plénière le 9 février 2011, le
Conseil Economique Social et Environnemental de la région Centre
(CESER) considère page 3 que cet axe ferroviaire : « constitue, non
seulement un maillon manquant du contournement ouest de la région
parisienne mais aussi et surtout l’élément final du grand axe fret Nord-Sud
qui traverse notre région (le POLT) ».
Nous pouvons, ici, regretter que le conseil général n’ait pas pris le train en
marche concernant le projet de la Ligne Nouvelle Paris Normandie (LNPN)
dont le maître d’ouvrage, le Réseau Ferré de France, a décidé, le 5 avril
2012, de le poursuivre et de lancer les études préalables à l’enquête
publique.
Mais, il est encore possible d’agir dans l’intérêt de la région Centre et de
nous y inclure pleinement. En effet, la solution ferroviaire s’inscrit
parfaitement dans le projet de la LNPN. Le rapprochement de ces deux
projets permettrait, concomitamment, de satisfaire aux demandes des ports
séquaniens dont l’un des objectifs est d’étendre leur « hinterland », de
répondre aux exigences de leurs donneurs d’ordre, de « désaturer » le
nœud parisien, de donner des débouchés aux producteurs de notre
département, d’ouvrir des opportunités à la région Centre et de fédérer les
sources de financement. …/…
5. …/… -5-
Cette volonté épouse celle de l’union européenne, de sa volonté de
développer le transport ferroviaire dans le cadre d’un « espace ferroviaire
unique européen » et qu’à ce titre, la France et ses entreprises peuvent être
leaders sur ce marché et offrir ainsi une opportunité pour les régions
Centre, Ile-de-France et Haute-Normandie.
A l’heure où les sources de financement se tarissent, il est de notre devoir
d’agir dans l’intérêt du plus grand nombre, d’examiner avec intention les
solutions d’aménagement de l’existant telles que nous les énonçons et qui,
malheureusement, n’ont fait l’objet d’aucun examen alors que la région
Centre a, sous les présidences de Michel SAPIN et, aujourd’hui, de
François BONNEAU, toujours pris position pour un financement sur fonds
public et, que dans ce cadre, la région assumerait ses responsabilités.
Parce que l’aménagement de la RN 154 doit être finalisé dans son tronçon
sud, l’éco-taxe peut être une solution. Nous demandons à l’instar de la
RCEA à ce que cette solution soit étudiée avec sérieux d’autant qu’il
s’agirait de ne finaliser qu’à peine 20 kilomètres de voies de quoi conserver
la desserte locale, améliorer encore la sécurité et participer de façon
effective au développement économique de nos bassins de vie.
Plus que jamais les choix d’aujourd’hui détermineront l’avenir de nos
territoires et de leurs habitants.
Bien cordialement,
Laurent Bordeau
Président de l’association Agir Unis contre l’A154