L’approche genre suppose de considérer les différentes opportunités offertes aux hommes et aux femmes, les rôles qui leur sont assignés socialement et les relations qui existent entre eux. Il s’agit de composantes fondamentales qui influent sur le processus de développement de la société et sur l’aboutissement des politiques, des programmes et des projets de développement. Le programme national de sécurité alimentaire au Tchad, chargé de gérer les investissements agricoles, n’a pas tenu compte des représentantes des femmes ruralesdans les comités pour gérer les tracteurs déployés dans les villages et villes afin d’aider les producteurs agricoles à beaucoup produire. Or sur le terrain, ce sont les femmes qui sont plus nombreuses dans les exploitations agricoles, mais elles ne peuvent pas utiliser les tracteurs à cause de leurs petites parcelles. Bref, elles sont confrontées à l’accès difficile au foncier du fait des pesanteurs socio-culturelles, du faible pouvoir économique de l’ignorance de leurs droits économiques et sociaux, de l’existence même de cet outil mis en place par l’Etat.
Ayant constaté cette situation, le CNCPRT a négocié un partenaire avec OXFAM pour lui trouver un financement complémentaire à l’appui du PAOPA pour développer des activités de renforcement des capacités des femmes leaders du Collège. Un projet de dialogue et de promotion du leadership féminin rural, a été trouvé et qui a permis aux femmes de mener une campagne de plaidoyer sur la participation citoyenne des femmes rurales aux instances de prise de décision et leur accès aux moyens de production agricole. Une série d’informations et de formations axées sur leurs droits économiques et sociaux, les différentes politiques, programmes et projet de développement liés à la sécurité alimentaire, a été développé en faveur de ces femmes. Des rencontres inter-faîtières pour créer des alliances, des études sur les principales thématiques retenues ont été réalisées aux fins de documenter la campagne.
Les femmes leaders ont donc réussi à intégrer certaines instances de prises de décision ; ce qui a permis d’améliorer la gouvernance des moyens de production au Tchad.
Gouvernance des moyens de production agricole: Plaidoyer des femmes rurales du CNCPRT/TCHAD
1. 1
CONSEIL NATIONAL DE CONCERTATION DES PRODUCTEURS RURAUX DU
TCHAD (CNCPRT)
Téléphone portable: 66319161 / 99139919
Mail : cncprt_optchad@yahoo.fr /apmtchad2000@yahoo.fr
BP : 5995 - NDJAMENA- TCHAD
ETUDE DE CAS DU CNCPRT POUR L’ATELIER DE
CAPITALISATION DU PAOPA
Titre : Gouvernance des moyens de production agricole :
Plaidoyer des femmes rurales du CNCPRT
Résumé :
L’approche genre suppose de considérer les différentes opportunités offertes aux hommes et
aux femmes, les rôles qui leur sont assignés socialement et les relations qui existent entre eux. Il
s’agit de composantes fondamentales qui influent sur le processus de développement de la
société et sur l’aboutissement des politiques, des programmes et des projets de développement.
Le programme national de sécurité alimentaire au Tchad, chargé de gérer les investissements
agricoles, n’a pas tenu compte des représentantes des femmes rurales dans les comités pour
gérer les tracteurs déployés dans les villages et villes afin d’aider les producteurs agricoles à
beaucoup produire. Or sur le terrain, ce sont les femmes qui sont plus nombreuses dans les
exploitations agricoles, mais elles ne peuvent pas utiliser les tracteurs à cause de leurs petites
parcelles. Bref, elles sont confrontées à l’accès difficile au foncier du fait des pesanteurs socio-
culturelles, du faible pouvoir économique de l’ignorance de leurs droits économiques et sociaux,
de l’existence même de cet outil mis en place par l’Etat.
Ayant constaté cette situation, le CNCPRT a négocié un partenaire avec OXFAM pour lui trouver
un financement complémentaire à l’appui du PAOPA pour développer des activités de
renforcement des capacités des femmes leaders du Collège. Un projet de dialogue et de
promotion du leadership féminin rural, a été trouvé et qui a permis aux femmes de mener une
campagne de plaidoyer sur la participation citoyenne des femmes rurales aux instances de prise
de décision et leur accès aux moyens de production agricole. Une série d’informations et de
formations axées sur leurs droits économiques et sociaux, les différentes politiques,
programmes et projet de développement liés à la sécurité alimentaire, a été développé en faveur
de ces femmes. Des rencontres inter-faîtières pour créer des alliances, des études sur les
principales thématiques retenues ont été réalisées aux fins de documenter la campagne.
Les femmes leaders ont donc réussi à intégrer certaines instances de prises de décision ; ce qui a
permis d’améliorer la gouvernance des moyens de production au Tchad.
2. 2
1. Contexteet justification :
La création du collège des femmes au sein du CNCPRT a proposé un problème de définition des
attributions statutaires. Après avoir achevé le processus de création en 2011, il fallait trouver le
motif de cette création, c’est celui de s’occuper des questions spécifiques aux femmes rurales
pour des actions de plaidoyer en leur faveur. Il était donc question de rendre ces femmes rurales
plus visible d’abord au niveau du CNCPRT puis dans les instances de prise de décision au niveau
public. En 2013, dans le cadre de recherche de partenariat, le CNCPRT parvient à signer une
convention de collaboration avec OXFAM-Tchad pour mettre en œuvre des activités de
renforcement des capacités des femmes leaders évoluant en milieu rural. Le projet entend
pousser à une meilleure gouvernance interne par une plus grande responsabilisation des
femmes d’une part, ensuite à rendre plus légitime la représentation des organisations de
producteurs par une plus grande participation des femmes aux initiatives de dialogue avec les
autres acteurs.
Au Tchad, il n’est plus à démontrer l’importance du rôle de la femme dans le secteur productif
rural, les dynamiques de citoyenneté paysanne en sont étroitement liées et par voie de
conséquence, les résultats du dialogue citoyen entre les organisations paysannes et les décideurs
politiques au niveau local, régional ou national. Autant le leadership féminin est quasi-absent au
sein de l’élite politique nationale (5% de femmes au parlement national par exemple), autant la
situation au sein de la plus grande organisation représentative des producteurs ruraux reflète
cette réalité. L’enjeu pour le leadership féminin rural vient d’une initiative de l’Etat tchadien qui
vient de décider de consacrer cinq années (2012–2016) au développement rural avec un
investissement de près d’US$ 1 milliard. Le leadership paysan est ouvertement invité à
participer, ce qui fait que si le leadership féminin rural ne s’engage dans cet espace de
participation, les décisions liées à ces investissements se prendront sans lui. La marginalisation
de la femme se renforcera rien qu’à cause de la faible qualité de sa participation, ce qui est un
problème solvable. L’initiative de l’Etat tchadien constitue donc une opportunité d’engager un
dialogue interne aux organisations faîtières paysannes pour améliorer la gouvernance interne
par un meilleur positionnement politique du leadership féminin dans la gestion interne des
organisations des producteurs, et au-delà dans le dialogue citoyen avec les institutions
publiques, d’où l’initiative de renforcer par ce projet la participation qualitative de ce leadership.
Il est donc question que non seulement la participation physique du leadership féminin se
renforce, mais aussi la qualité de son engagement.
2. Stratégiesmenées :
Les actions entreprises pour résoudre les problèmes sont :
- Le développement des informations et de sensibilisation sur la citoyenneté et le droit à la
participation citoyenne en faveur des femmes pour leur permettre de dialoguer
efficacementavec les décideurs ;
- La réalisation des émissions (en langue locale) sur les politiques publiques, les
programmes de sécurité alimentaire, les lois au niveau local et les droits des femmes, à
travers les radios communautaires ;
3. 3
- La formation des femmes leaders sur les techniques de plaidoyer et dialogue citoyen au
bénéfice de leaders féminins et sur le suivi-évaluation des projets de développement
local ;
- L’identification des thématiques pertinentes pour les actions de plaidoyer ;
- La réalisation des études sur les thématiques urgentes et prioritaires en vue de
documenter le plaidoyer
- L’élaboration d’un cahier de doléances résumant les principales demandes des femmes
rurales
- La réalisation de quelques actions de suivi-évaluation des projets de sécurité alimentaire
auprès des 10 régions sur 23 que compte le Tchad. Le but recherché est de mesurer les
impacts des projets sur la vie des populations rurales et de vérifier le niveau
d’implication des femmes rurales dans la mise en œuvre des projets ;
- L’élaboration d’un plan d’action du plaidoyer sur l’année 2014-2015 axé sur la
gouvernance des moyens de production (tracteur, micro crédit, formation technique) et
de transformation des produits agricoles le problème des prix des produits agricoles,
l’accès au service sociaux de base (santé, eau potable) et l’amélioration de la
gouvernance interne du CNCPRT ;
- L’organisation des rencontres inter-faitières pour créer des synergies et des alliances
avec d’autres organisations engagées sur les mêmes thématiques ; Ces rencontres ont
constitué une opportunité de brassage culturel et ont permis d’échanger directement
avec les chefs de services déconcentrés de l’Etat.
3. Résultatsobtenus :
Les principaux résultats obtenus sont :
- Les femmes leaders deviennent des actrices peu à peu dans les mécanismes locaux de
prise de décision, tels que les Comité Régionaux d’Action (CRA) et le Mécanisme Africain
d’Evaluation par les Pairs (MAEP),Comités de gestion des crises alimentaires ;
- Les femmes ont peu à peu investi l’arène de la gouvernance du CNCPRT (forte
implication dans les représentations régionales) ;
- Les femmes ont acquis des connaissances et une maîtrise des outils de plaidoyer ;
- Elles ont acquis de nouvelles attitudes, comportements et savoir-faire. Ces changements
sont des évolutions qualitatives enregistrées et mesurées par le processus de collecte
des informations sur les projets de développement liés à la sécurité alimentaire ;
En termes d’écarts, il faut mentionner l’inadéquation des ressources disponibles face aux larges
besoins identifiés par les femmes qui ne pourraient être satisfaits en un laps de temps avec le
peu de financement.
4. Enseignementstirés :
Les enseignements tirés se résument en quatre points :
1. Une bonne maîtrise du discours, des codes et des méthodes utilisées
généralement dans les processus décisionnels. L’exclusion des femmes des
débats étaient entretemps fondé sur ce motif de manque de maîtrise. Le projet
n’a pas produit des universitaires, ces femmes restent toujours des paysannes,
mais il est désormais impossible de les exclure du débat. C’est donc le principal
4. 4
handicap des femmes pour entrer dans les débats qui peut être considéré comme
plus ou moins vaincu.
2. Non seulement les femmes participent, mais elles osent questionner, opposer
leur avis, demander des comptes, réclamer le respect de leur droit. Les décideurs
ont appris à composer avec leur présence parfois dérangeante. Cela confère aux
femmes leaders une plus grande visibilité dans les instances surtout locales, de
prise de décision.
3. En conséquence de tout cela les femmes leaders ont développé une assurance à
aborder le dialogue avec les décideurs, une certaine confiance en soi dans les
débats, et même une fierté à apporter de la valeur-ajoutée dans les processus
décisionnels.
4. Les femmes-leaders jettent les bases de leur autonomisation y compris par la
mobilisation de ressources propres. Les femmes leaders ont pris la décision de
continuer les actions de plaidoyer avec leurs propres ressources et de poursuivre
la quête de réponses sur l’accès des productrices rurales aux moyens de
production subventionnés, et sur l’épineuse question de l’accès à des prix juste
pour les producteurs/productrices ruraux. C’est aussi la preuve que le leadership
féminin peut vite se libérer des pesanteurs/contraintes et se projeter vers une
perspective propre. Ceci montre les lignes qui bougent mais en même temps le
tout début des changements des attitudes et potentiels d’action des femmes dans
un environnement qui leur est fortement défavorable
4.1. Cequi a bienmarché :
Cette expérience a réussi grâce à :
- un partenariat dynamique entre le CNCPRT, OXFAM et GRAMPTC une ONG nationale
chargée de monitoring du pétrole Tchad Cameroun qui aide les populations rurales à
connaître leurs droits économiques et sociaux ;
- une ligne de financement PAOPA dont disposait le CNCPRT pour le renforcement des
capacités des femmes du Collège ;
- un engagement du partenaire Oxfam à accompagner le CNCPRT dans toutes les étapes de
plaidoyer ;
- une expertise disponible et fournie par le GRAMPTC qui a permis aux femmes d’être
capables de mener les actions de plaidoyer ;
- une volonté des femmes leaders rurales de créer une bonne dynamique de travail entre
elles (zonesoudanienne et sahélienne) ;
4.2. Cequi n’apas bienmarché
Il faut relevé la question du temps et l’insuffisance des moyens financiers qui n’ont pas permis
de tout mettre en œuvre. Le plan de plaidoyer n’est pas entièrement réalisé. Les femmes ont pris
la relève en continuant avec leurs propres cotisations mobilisées pour assurer le suivi auprès
des autorités régionales.
Le temps est trop court pour mener une action de plaidoyer de grande envergure, surtout qu’il
fait apporter de changement dans la gouvernance des comités chargés de la gestion des
5. 5
matériels agricoles. Il fallait un temps supplémentaire pour évaluer les actions menées en vue
des réajustements nécessaires.
4.3. Les facteursexplicatifsdesréussitesoudeséchecs
Lesfacteurs explicatifsdesréussitessont:
- Les impacts de la sensibilisation et information sur les femmes,
- La connaissance de leurs droits civiques, économiques et sociaux,
- Les impacts de la formation sur les techniques de plaidoyer et le suivi-évaluation des
projets
- Les rencontres nationales pour nouer des alliances et synergie d’action
- La réalisation des études pour documenter le plaidoyer
- La qualité des appuis techniques et financiers apportés
Les facteurs explicatifs des échecs : C’est le temps et l’insuffisance des moyens financiers pour
étendre les actions sur l’ensemble des régions.
4.4. Cequi seraitimportantde prendreen comptepourle futur
Pour le futur, il faudra bien prendre en compte tous les aspects importants d’une action de
plaidoyer, à savoir :
- Le choix réaliste du thème de plaidoyer
- Les moyens financiers et techniques
- Le temps nécessaire
5. ValeurajoutéesurleCNCPRT
- Plus de visibilité du leadership féminin, surtout dans les 10 régions. Des femmes
capacités de mener des actions de plaidoyer sans l’appui des hommes ; ce qui montre
que lorsque l’on investit dans le renforcement des capacités des leaders, on parvient
à changer des situations de positionnement ;
- Plus de représentativité des femmes dans les comités régionaux d’action : Des
femmes impliquées dans les instances de prise de décision : les femmes qui
participent aux instances de prise de décision sont actives et compétentes. Les
autorités recourent à elles en cas de nécessité
- Prise en compte des besoins des ruraux dans les instances locales ;
- Mobilisation des ressources internes pour les actions de plaidoyer : des femmes
capacités de mobiliser des ressources et des partenaires : ce sont les groupements à
majorité féminine qui cotisent pour le fonctionnement. Ce travail est facilité par les
femmes leaders ayant bénéficié de techniques de sensibilisation et de mobilisation ;
- Une crédibilité vis-à-vis des partenaires au développement se traduisant par une
forte implication du CNCPRTdans l’ensemble des comités de pilotage des projets.
6. Conclusion
Cette expérience a permis de comprendre que lorsqu’on a bien identifié un problème et l’on a
bien défini ses contours, il est plus facile de choisir de bonnes stratégies pour le résoudre. Les
6. 6
femmes leaders rurales ont relevé un grand défi, à travers cette action de plaidoyer, en faisant
comprendre aux décideurs qu’elles sont capables de choisir ce qu’elles veulent ; mais qu’elles
sont capables de se mobiliser pour défendre des causes communes.
On retiendra également que si l’on renforce suffisamment les capacités des leaders ruraux, ils
pourraient influer réellement les différentes politiques qui les concernent ; et cela à tous les
niveaux.