2. « J’ai la volonté d’animer des initiatives européennes »
Vous avez participé aux premiers lance-ments
de logiciels de gestion grand public
en Europe, pouvez-vous nous en dire plus ?
Fabrice Vernière : Ce fut une aventure assez
exceptionnelle. En 1995 j’étais DAF pour la
France puis pour l’Europe de l’éditeur amé-ricain
INTUIT qui concevait des logiciels de
gestion pour les particuliers et les très petites
entreprises. Notre logiciel Quicken était un
concurrent direct de Money de Microsoft. En
France nous l’avons lancé dans la grande
distribution au tarif très agressif de
99 francs. Nous nous sommes aussi implan-tés
dans la majeure partie des pays euro-péens.
Cependant INTUIT avait voulu aller
trop vite en voulant répliquer son succès
américain sans bien l’adapter au contexte
marché spéciƒque à chaque pays européen,
parce qu’il voulait concurrencer sur les prix
son grand concurrent Microsoft. Ma der-nière
année a été consacrée à la restructu-ration
et la fermeture la plupart des ƒliales
européennes, mettant ƒn à ma propre mis-sion.
Vous vous êtes vous-même lancé dans la
création d’un logiciel de gestion…
J’ai effectivement conçu un logiciel de ges-tion
des notes de frais avec mon épouse, DAF
comme moi et quelques amis. C’était un pro-gramme
de suivi des déplacements profes-sionnels
très novateur à l’époque. Via un
système de work!ow intégré, il offrait aux
grosses entreprises la possibilité de gérer de
A à Z toutes les étapes d’un déplacement
(demande, validation, comptabilisation, rè-glement).
Nous y avons travaillé avec achar-nement
nuits et week-ends en parallèle de
nos activités professionnelles. Le logiciel était
performant, la société avait été créée avec un
montage ƒnancier international ingénieux
et pour le développement, nous avions re-cruté
un salarié qui y a travaillé un an. Nous
avons réussi à vendre un exemplaire au
groupe Nike. Malheureusement nos moyens
étaient limités et nous avons dû revendre la
société et perdre notre investissement de
départ. Nous avons par contre appris que
sans les bonnes compétences commerciales
et marketing, un projet technologiquement
bon a peu de chance de réussir.
Comment êtes-vous entré chez Sage ?
En 1998, j’exerçais une activité de consul-tant
Free Lance en M&A et j’ai aidé Sage à
vendre des activités et à acheter plusieurs
sociétés. Sage me proposa le poste de DAF
alors que j’allais partir dans une start-up
internet franco-américaine en pleine eupho-rie
de la nouvelle économie. Ce fut évidem-ment
la bonne décision car cette start-up,
comme bien d’autres, ne ƒt pas long feu et
j’ai vu passer quelques années plus tard son
dossier de reprise en tant que DAF de Sage
France. Moi qui n’étais jamais resté jamais
plus de 2 à 3 ans dans mes fonctions précé-dentes,
je n’imaginais pas que j’allais passer
15 ans à ce poste.
Qu’avez-vous appris chez Sage ?
D’abord le management d’équipe. J’avais
acquis une bonne expérience technique du
métier avec une dimension internationale
mais je n’avais jamais géré véritablement de
collaborateurs sur un moyen terme. À mon
arrivée, je me suis trouvé à la tête d’une
équipe d’une vingtaine de personnes. Nos
multiples acquisitions de sociétés et notre
croissance organique m’ont donné l’occa-sion
d’intégrer et de faire grandir des équipes
venant de l’extérieur. J’ai eu à gérer jusqu’à
200 personnes.
La croissance externe a monopolisé une
grande partie de votre activité ?
Historiquement, Sage est une société an-glaise
qui a été à l’international de manière
pragmatique via des acquisitions. En France,
Sage a acheté les éditeurs Ciel (sur le marché
de la TPE) puis Saari (sur la PME) et Sybel
(sur le Mid Market). Depuis, dans le cadre de
mes fonctions de DAF France j’ai participé à
la politique de croissance de Sage et ai mené
plus une trentaine d’acquisitions sur une
période de dix ans. Nous en avons fait un
vrai savoir faire que nous avons formalisé
par des process documentés nous permet-tant
d’industrialiser cette activité. L’objectif
était d’intégrer les activités reprises au plus
vite. Ainsi, pour ne pas être dépendant des
délais administratifs, nous avons plusieurs
fois utilisé les location-gérances comme
outil de « fusion rapide des activités ». À ce
jour, Sage France n’est plus porté que par
une seule entité juridique.
Comment Sage a-t-il vécu la crise de
2008 ?
Notre politique de croissance externe a
connu un coup d’arrêt notamment par
manque de cibles et notre capacité de crois-sance
organique affectée. Heureusement,
nos contrats de maintenance, qui repré-sentent
les deux tiers de nos revenus, nous
ont permis de ne pas voir décroître notre
chiffre d’affaires. Nous nous sommes alors
recentrés sur notre coeur de business et nous
avons décidé de céder certaines activités qui
ne s’inscrivaient plus dans notre stratégie.
Trois d’entre elles ont ainsi été reprises par
un fonds d’investissement Small Cap en asso-ciation
avec les dirigeants en place (MBO).
Elles sont à ce jour profitables, à notre
grande satisfaction, et continuent à être
partenaires de Sage tout en poursuivant leur
propre trajectoire.
Vous êtes DAF Europe depuis quelques
mois. Quels sont les enjeux de votre nou-velle
mission ?
J’ai pour rôle d’accompagner les ƒliales eu-ropéennes
dans la conduite de leurs affaires
et la mise en oeuvre de la stratégie de Sage
au niveau local. Sage est un groupe très
décentralisé aujourd’hui en termes d’exécu-tion.
Les ƒliales européennes nées des acqui-sitions
successives travaillent encore sur des
outils de gestion différents. Une de mes mis-sions
sera donc de construire des synergies
européennes en implantant un outil de back
ofƒce commun. J’ai aussi la volonté d’ani-mer
des initiatives européennes qui seront
pilotées par les DAF des pays, leur permet-tant
de pleinement participer à la construc-tion
d’une équipe de ƒnanciers européens.
Je reste pour cela basé à Paris et rapporte au
VP Europe lui-même basé à Madrid. De
nombreux déplacements en perspective,
d’autant que notre maison mère est base à
Newcastle au nord de l’Angleterre… ●
XSAGE EN CHIFFRES
Dans le monde
1,500 Md€ de chi!re d’a!aires
12 700 collaborateurs
+ de 6 millions d’entreprises clientes
40 000 clients experts comptables
22 600 partenaires revendeurs et intégrateurs
24 pays répartis sur les 5 continents
En France
303 M€ de chi!re d’a!aires
2 000 collaborateurs dont 500 dédiés à la R&D
600 000 entreprises clientes
Une entreprise sur deux équipée d’une
solution de gestion est cliente de Sage
5 400 clients experts comptables.
3 400 partenaires revendeurs et intégrateurs
FINANCE & GESTION JUIN 2014
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