Conférence introductive au cycle "Futurs urbains" de l'Ecole d'urbanisme de SciencesPo, février 2019.

1. « Si, comme dit la maxime, "la politique est l’art du possible",
encore faut-il qu’il y ait des arts pour multiplier ces possibles. »
Bruno Latour
Daniel Kaplan
Février 2019

2. D’où je viens...

3. Qu’est-ce que le futur ?

4. Le futur n’existe pas
• « Le futur n’existe pas dans le présent, mais l’anticipation,
si. La forme que le futur prend dans le présent est
l’anticipation. » Riel Miller, Transforming the Future
• Par définition une construction imaginaire
• Mais d’une imagination « agente » (Cynthia Fleury),
qui produit des effets dans le présent
• Une infinité de futurs ?
• Il existe sans doute aussi beaucoup de présents
• Le futur n’est pas écrit (mais il ne s’ensuit pas nécessairement que
nous puissions l’écrire à notre guise)

5. « Utiliser le futur »
• Repérer et anticiper des tendances, prévoir,
se donner des buts et planifier leur réalisation :
réduire l’incertitude
• Se préparer aux crises, aux surprises :
maîtriser l’incertitude
• Sentir et donner sens à ce qui change, à son action :
agir avec intelligence dans l’incertitude
• Etendre l’éventail des alternatives, en être acteur :
accepter la complexité et l’incertitude
• Accueillir l’autre et le changement dans toute leur
étrangeté, être l’autre et le changement :
vouloir l’incertitude et la complexité
+ facile /
+ utile
+ difficile /
+ nécessaire

6. Deux grandes formes d’action anticipatrice (R. Miller)
« Anticipation for the Future » : réduire l’incertitude,
organiser l’action en vue de buts communs et désirables
« Anticipation for Emergence » : repérer et faire émerger
de nouvelles possibilités (donc accroître l’incertitude)
• Mots-clés : problèmes, probabilité, faisabilité,
faisabilité, agentivité…
• Pratiques : prévision, tendances, prospective,
scénarios, planification stratégique…
• Mots-clés : émergence, hétérotopies, résilience,
complexité, plausibilité, paradigme
(« changement des conditions de changement »…
• Pratiques : design spéculatif, disruption, fiction,
expérimentation, « scénarios extrêmes »…

7. Le futur, expression culturelle
• Rien de plus historique culturel que la vision du temps
• … et celle de notre capacité à agir sur le Monde
• Il existe d’autres futurs ailleurs !

8. Des futurs très contextuels
Technologie  … Changement climatique  …
Technologie +
Changement climatique  …

9. Le futur comme « espace public »
• La prospective (au moins en Europe) est ne pratique
généralement collective, en amont et/ou en aval
• Inclut une réflexion sur la différence entre probable,
possible, et souhaitable
• Révèle nos hypothèses, manières de voir, préférences,
valeurs
• (potentiellement) Egalise les participants, puisque
personne ne « connaît » le futur
• (potentiellement) Permet d’échanger à propos de sujets
qui nous opposent, parfois violemment, dans le présent

10. Futurs urbains?

11. Une longue (et positive) tradition de prospective urbaine

12. … Profondément culturelle
Luc Schuiten –
Cité végétale :
Laeken (Belgique)
Forest City (Singapour-Malaisie)

13. … Fragilisée comme toute l’action publique

14. La ville territoire fictionnel

15. Villes-mondes
Blade Runner City from DeviantArt by 5ofnovember

16. Washington DC dans Minority Report
Villes du pouvoir (autoritaire)

17. Star Wars – Coruscant, la planète-capitale de l’Empire, qui finira anéantie avec ses milliards (!) d’habitants

18. Villes stratifiées (verticalement)

19. Cloud City (Star Wars Battlefront)
Villes autonomes (et volantes)

20. Villes post-changement climatique

21. Dystopies inspirantes et utopies professionnelles

22. Felix van den Bergh
Du « raft » de Snowcrash aux îles flottantes de Peter Thiel

23. Shanghai
Dubai
Du L.A. de Blade Runner aux mégapoles d’aujourd’hui

24. De la ville cyberpunk à la smart city

25. Paolo Soleri (1969)
Les utopies urbaines sont de la SF… par des architectes !

26. Futurs urbains à… 100 ans ?

27. Incertitude maximale…
• Abandonner toute idée de prévision et même de
probabilité
• Assumer la dimension fictionnelle : focaliser sur la plausibilité
(cohérence interne) plutôt que la vraisemblance
• Abandonner l’idée de « résoudre des problèmes »,
se focaliser sur de nouveaux paradigmes, de nouvelles
questions (ou des questions revisitées)
• Produire une « bonne » fiction (littéraire ou pas)
• Commencer par le « worldbuilding » : dans quel monde, quelle
société la ville en question existe-t-elle ?
• Des personnages, des acteurs, avec une personnalité forte qui,
idéalement, vous échappe
• De la tension, des rebondissements, du conflit…

29. L’utilité d’une rétrospective
• Qu’est-ce qui a changé en 100 ans ?
• Qu’imaginait-on il y a 100 ans ?

30. C’est quand même
de la prospective !
• S’intéresser au chemin, pas seulement à la destination
• Susciter la discussion en amont et/ou en aval
• Imaginer des conséquences possibles pour aujourd’hui
• Repérer des germes de ces futurs aujourd’hui…
Winfried Baumann

31. Un outil (parmi d’autres) pour raconter une « transition »
5
DÉNOUEMENT
DÉNOUEMENT
JEANNE,
jeune pousse
SHAN,
anthropologue
numérique
http://reseau.fing.org/qntransitions/jeu-de-la-transition

32. Quelques points de vigilance
• Réserver le jugement
• Eviter ou retarder le classement paresseux utopie / dystopie
• Garder vivantes quelques tensions fondatrices
• Ordre ↔︎ Désordre
• Efficient ↔︎ Résilient
• Individuel ↔︎ Collectif
• Rareté ↔︎ Abondance
• Durable ↔︎ Profitable
• Subi ↔︎ Agi
• Intégrer ↔︎ Dépasser les limites
• …
• Ne pas négliger ni surestimer…
• La technologie
• La politique
• Le quotidien 
Alexandra Daisy Ginsberg

33. Une transformation par le quotidien
« Many of our daily interactions have become
organised around that glowing homescreen.
Everything from the mundane, like calling a cab, to the
life-changing, like starting a relationship, pivot around
those glowing icons nestled in our palm. And these
discrete, quotidian, tech-enabled interactions combine
to shape the city itself; again, just as the car did.
Writing a generation before the likes of Uber and
Airbnb would emerge, the architect Ralph Erskine
would have had different things in mind when he
wrote, “it is the everyday situations that are important
and that shape the major part of our lives and our
cities.” Yet his point that it is these workaday
interactions that define our cities, rather than ‘grand
projets’, continues to ring true. »
Dan Hill, "The city is my homescreen", 2019

34. Daniel Kaplan / dkaplan@plurality-university.org / @kaplandaniel