Le silence est, après la paysannerie, l’une des thématiques à partir de laquelle on peut lire ou revisiter l’œuvre de Michel-Rolph Trouilllot. La problématique est assez importante pour retenir l’attention de l’anthropologue-historien qui a publié, il y a tout juste vingt ans, l’essai intitulé Silencing the Past : Power and the Production of History . Le présent article aborde la définition du silence et ses liens avec la production du discours dont celui de l’histoire. En ce sens, nous verrons de quelle manière les préoccupations de Trouillot rejoignent les critiques que Louis Sala-Molins a adressées aux Lumières dans son livre Les misères des Lumières : sous la raison, l’outrage . Dans la dernière partie de cette contribution, le concept de silence sera mis en parallèle avec celui de l’« invu » que nous aurons à définir en prenant appui sur la pensée phénoménologique de Jean-Luc Marion.
Logiciels libres, économie collaborative et web 2.0 par Schallum Pierre, PhD.Schallum Pierre
Plan de la présentation
Plateformes logicielles
Logiciels
Logiciels libres
Web 2.0
Écosystème collaboratif
Économie collaborative
Cité du savoir, économie collaborative et ISTEAH
Les habiletés à développer pour devenir une bonne communicatrice ou un bon...Schallum Pierre
Qu’est-ce qu’animer ? ;
Qualités d’une bonne animatrice ou d’un bon animateur ;
Communication chaude, froide et mixte ;
Que faire devant les conflits ? ;
Comment circule la communication dans les groupes, selon Christophe carré ?
Définir les valeurs d’un groupe
Qu’est-ce qu’une communicatrice ou un communicateur empathique ?
Logiciels libres, économie collaborative et web 2.0 par Schallum Pierre, PhD.Schallum Pierre
Plan de la présentation
Plateformes logicielles
Logiciels
Logiciels libres
Web 2.0
Écosystème collaboratif
Économie collaborative
Cité du savoir, économie collaborative et ISTEAH
Les habiletés à développer pour devenir une bonne communicatrice ou un bon...Schallum Pierre
Qu’est-ce qu’animer ? ;
Qualités d’une bonne animatrice ou d’un bon animateur ;
Communication chaude, froide et mixte ;
Que faire devant les conflits ? ;
Comment circule la communication dans les groupes, selon Christophe carré ?
Définir les valeurs d’un groupe
Qu’est-ce qu’une communicatrice ou un communicateur empathique ?
En 1927, Raoul Follereau fonde la Ligue d'Union Latine, organe de défense contre tous les paganismes et toutes les barbaries. Article décrivant la pensée politique de Raoul Follereau exprimée dans trois de ses œuvres : faudra-t-il arracher les cordes de la lyre, le sourire de la France et la trahison de l'intelligence.
Ce que peut apporter Michel de Certeau aux recherches en communicationAlexandre Coutant
Séminaire ELLIADD -CCM Besançon, le 17 novembre 2022.
Résumé : Michel de Certeau jouit d’une notoriété ambivalente en SIC. Régulièrement évoqué, il est cependant peu mobilisé dans le détail de sa théorie ou de sa méthode d’enquête. Il est souvent cantonné à une explication des « restes » de pouvoir d’agir que les institutions laissent aux individus et présenté comme un optimiste théoricien de l’autonomie des usagers. Cette représentation s’éloigne pourtant fortement du modèle qu’il a forgé, à la fois bien plus agonistique mais aussi très original dans sa manière de comprendre les pratiques dans des contextes contraints. L’objectif de cette intervention sera de redonner de la visibilité à ce modèle, en montrant comment il s’applique à l’analyse des phénomènes actuels de communication.
Analyse d'un numéro de La Libre Parole de 1936, journal antisémite de Henry Coston qui relate une conférence organisée par le Centre de Documentation et de Propagande de Henri-Robert Petit au cours de laquelle Raoul Follereau côtoie divers théoriciens de l'antisémitisme.
Postmodernité et postradiomorphoses : contexte, enjeux et limitesDr Sebastien Poulain
« Postmodernité et postradiomorphoses : contexte, enjeux et limites », in Sebastien Poulain (sous la direction de), « La radio du futur : du téléchromophotophonotétroscope aux postradiomorphoses », Cahiers d’histoire de la radiodiffusion, n°132, avril-juin 2017, https://radiodufutur.wordpress.com/2017/10/24/sebastien-poulain-postmodernite-et-postradiomorphoses-contexte-enjeux-et-limites/ et http://cohira.fr/cahier-n-132-avril-juin-2017/
Les usages citoyens de la blockchain par Schallum Pierre, PhD.Schallum Pierre
Cet atelier traite du potentiel de la blockchain du point de vue de la sécurité des données et du respect de la vie privée. Il existe de nombreuses applications de la blockchain dans les domaines comme les actifs numériques, les contrats intelligents, la tenue de dossiers, les systèmes d'identification, l’infonuagique et le covoiturage. Nous échangerons sur l’intérêt de cette technologie de stockage et d’exécution décentralisée pour l’internaute au regard du pouvoir des géants du Web qui recueillent, traitent, stockent et diffusent à des fins publicitaires les informations fournies par leurs utilisateurs. Nous montrerons comment un réel contre-pouvoir citoyen peut émerger lorsque, par la blockchain, les citoyennes et les citoyens pourront devenir les véritables propriétaires de leurs données et en assurer le contrôle. Notre propos sera illustré par le prototype d’une application que notre équipe “blockchain et santé” a conçu, dans le cadre du #Coopérathon2017, pour soutenir l’autogestion du diabète de type 2.
Biographie
Professeur de communications sociales et médias sociaux à l’Université Saint-Paul, Schallum Pierre, Ph.D. (Université Laval) est stagiaire postdoctoral à l’École Polytechnique de Montréal où il travaille, au sein du Laboratoire de recherche en réseautique et informatique mobile (LARIM), dans le cadre d’un projet de modélisation d’une plateforme de m-paiement.
https://www.eventbrite.ca/e/billets-les-usages-citoyens-et-en-entreprise-de-la-blockchain-lvs-39623772771#
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Similaire à Histoire et silence selon Michel Rolph Trouillot, par Schallum Pierre, PhD.
En 1927, Raoul Follereau fonde la Ligue d'Union Latine, organe de défense contre tous les paganismes et toutes les barbaries. Article décrivant la pensée politique de Raoul Follereau exprimée dans trois de ses œuvres : faudra-t-il arracher les cordes de la lyre, le sourire de la France et la trahison de l'intelligence.
Ce que peut apporter Michel de Certeau aux recherches en communicationAlexandre Coutant
Séminaire ELLIADD -CCM Besançon, le 17 novembre 2022.
Résumé : Michel de Certeau jouit d’une notoriété ambivalente en SIC. Régulièrement évoqué, il est cependant peu mobilisé dans le détail de sa théorie ou de sa méthode d’enquête. Il est souvent cantonné à une explication des « restes » de pouvoir d’agir que les institutions laissent aux individus et présenté comme un optimiste théoricien de l’autonomie des usagers. Cette représentation s’éloigne pourtant fortement du modèle qu’il a forgé, à la fois bien plus agonistique mais aussi très original dans sa manière de comprendre les pratiques dans des contextes contraints. L’objectif de cette intervention sera de redonner de la visibilité à ce modèle, en montrant comment il s’applique à l’analyse des phénomènes actuels de communication.
Analyse d'un numéro de La Libre Parole de 1936, journal antisémite de Henry Coston qui relate une conférence organisée par le Centre de Documentation et de Propagande de Henri-Robert Petit au cours de laquelle Raoul Follereau côtoie divers théoriciens de l'antisémitisme.
Postmodernité et postradiomorphoses : contexte, enjeux et limitesDr Sebastien Poulain
« Postmodernité et postradiomorphoses : contexte, enjeux et limites », in Sebastien Poulain (sous la direction de), « La radio du futur : du téléchromophotophonotétroscope aux postradiomorphoses », Cahiers d’histoire de la radiodiffusion, n°132, avril-juin 2017, https://radiodufutur.wordpress.com/2017/10/24/sebastien-poulain-postmodernite-et-postradiomorphoses-contexte-enjeux-et-limites/ et http://cohira.fr/cahier-n-132-avril-juin-2017/
Les usages citoyens de la blockchain par Schallum Pierre, PhD.Schallum Pierre
Cet atelier traite du potentiel de la blockchain du point de vue de la sécurité des données et du respect de la vie privée. Il existe de nombreuses applications de la blockchain dans les domaines comme les actifs numériques, les contrats intelligents, la tenue de dossiers, les systèmes d'identification, l’infonuagique et le covoiturage. Nous échangerons sur l’intérêt de cette technologie de stockage et d’exécution décentralisée pour l’internaute au regard du pouvoir des géants du Web qui recueillent, traitent, stockent et diffusent à des fins publicitaires les informations fournies par leurs utilisateurs. Nous montrerons comment un réel contre-pouvoir citoyen peut émerger lorsque, par la blockchain, les citoyennes et les citoyens pourront devenir les véritables propriétaires de leurs données et en assurer le contrôle. Notre propos sera illustré par le prototype d’une application que notre équipe “blockchain et santé” a conçu, dans le cadre du #Coopérathon2017, pour soutenir l’autogestion du diabète de type 2.
Biographie
Professeur de communications sociales et médias sociaux à l’Université Saint-Paul, Schallum Pierre, Ph.D. (Université Laval) est stagiaire postdoctoral à l’École Polytechnique de Montréal où il travaille, au sein du Laboratoire de recherche en réseautique et informatique mobile (LARIM), dans le cadre d’un projet de modélisation d’une plateforme de m-paiement.
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Plan
I. Types d’usages des médias sociaux
II. Économique
III. Politique
IV. Culturel
V. Scientifique
VI. Militant
VIII Conclusion
Titre du cours : Communications sociales et médias sociaux
ISC 4702
Automne 2017
Par Schallum Pierre, Ph.D.
Professeur à temps partiel à l’Université Saint-Paul
Stagiaire postdoctoral à Polytechnique Montréal
https://ustpaul.ca/timetablesNewEn.php?task=detail&typeSearch=0&location=0&session=2179&codeCours=&sujet=0&coursId=017760¤tSession=20179
La science, une partie intégrante de notre culture ;
Les impacts de la science sur le développement économique ;
Les implications sociales de la science et des technologies;
Rôle de la science dans l’agenda politique des nations ;
Les défis scientifiques dans un contexte local et global.
Médias socionumériques et nouvelles pratiques pédagogiques en haïtiSchallum Pierre
Schallum Pierre est professeur et directeur adjoint aux affaires académiques à l'Institut des Sciences, des Technologies et des Études Avancées d’Haïti. Chercheur associé à l'École Polytechnique de Montréal, il participe à la préparation du prochain congrès du Global Research Council qui aura lieu en 2017. Portant sur le partage des données, ce congrès est organisé par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG). Les intérêts de recherche de Schallum comprennent la philosophie éthique, les technologies de l’information, les humanités numériques et la pensée caribéenne.
El proyecto del ISTEAH y el ecosistema de la banca móvil en Haití Schallum Pierre
Schallum Pierre es profesor y Director adjunto de asuntos académicos en el Instituto de Ciencia, Tecnología y Estudios Avanzados de Haití (ISTEAH). Investigador asociado a la Escuela Politécnica de Montreal, Schallum Pierre cuenta con un doctorado obtenido en la Universidad de Laval. Completó estudios de filosofía y de gestión de las tecnologías de la información. Sus intereses de investigación incluyen la filosofía ética, la tecnología de la información, las humanidades digitales y el pensamiento de América Latina y el Caribe.
El proyecto del ISTEAH y el ecosistema de la banca móvil en Haití Schallum Pierre
Schallum Pierre es profesor y Director adjunto de asuntos académicos en el Instituto de Ciencia, Tecnología y Estudios Avanzados de Haití (ISTEAH). Investigador asociado a la Escuela Politécnica de Montreal, Schallum Pierre cuenta con un doctorado obtenido en la Universidad de Laval. Completó estudios de filosofía y de gestión de las tecnologías de la información. Sus intereses de investigación incluyen la filosofía ética, la tecnología de la información, las humanidades digitales y el pensamiento de América Latina y el Caribe.
Un gran agradecimiento a mi amigo Eduardo Castillo por su traducción
http://www.microfinancegateway.org/es/training-events/encuentro-internacional-banca-m%C3%B3vil-y-dinero-electr%C3%B3nico-oportunidades-y-desaf%C
Penser la collaboration avec les logiciels libres, par Schallum Pierre, PhD.Schallum Pierre
Les logiciels libres occupent une place de plus en plus importante au sein de l'économie
collaborative. Ils sont développés, distribués, étudiés et améliorés par une communauté
d'experts à l'échelle planétaire. La conférence se propose de définir la notion du libre qui
est lié ici au logiciel à partir d'exemples concrets de collaboration, dans une perspective
citoyenne. Elle montre en quoi le fait de recourir à cette communauté mondiale de
programmeurs 24/7 est de loin la solution la plus efficace dans un monde où les méga-données
doivent être recueillies, traitées et diffusées rapidement (règle des V : volume, vélocité et variété). Nous nous intéressons au rôle que ces programmes jouent dans la gestion de la cybersécurité et l’élaboration des connaissances ouvertes. D’une part, dans le cas de la
cybersécurité, il est à remarquer que les milliers de programmeurs des communautés de
logiciels libres à travers le monde mettent souvent moins de temps pour résoudre des
failles de sécurité que les programmeurs rattachés à des éditeurs de logiciels
propriétaires ou privatifs. D’autre part, dans le cas de l’élaboration des connaissances
ouvertes, la conférence traite du logiciel libre MediaWiki, utilisé pour produire des articles
sur Wikipedia.
Bien que l'économie collaborative remette en question la supériorité de l'économie
traditionnelle, comme on le voit avec Uber et Airbnb, il reste que les logiciels libres qui
font partie de la nouvelle économie constituent une belle illustration de la façon dont on
peut penser et pratiquer la collaboration.
Biographie
Schallum Pierre est président et cofondateur de Cyberstr@tech. Membre du comité d'éthique de l'Université Laval, il détient un Ph. D. de la même université. Défenseur des solutions technologiques basées sur des principes éthiques et écoresponsables, il a effectué des études en gouvernance des technologies de l'information et en philosophie. Sous la direction de Québec International et d'Entreprenariat Laval, il a fait partie de la délégation québécoise qui est allée, en juin dernier, à Philadelphie pour l'édition 2015 de Bio International Convention, le plus grand évènement en biotechnologies dans le monde. Schallum est également conférencier. Parmi les universités où il a prononcé des conférences, figurent Harvard, Paris 8, l'Université de Bar Ilan, l'École Nationale d'Administration Publique de Port-au-Prince, l'Université Laval, l'Université d'Ottawa et l'UQAM.
MediaWiki : entre collaboration et participationSchallum Pierre
Cette conférence propose un parcours historique de MediaWiki. Elle aborde les applications de ce logiciel libre dans la communauté créative : Wikimedia Foundation, Wikimedia Québec, Wikemedia France... Parallèlement, elle questionne les conséquences de son avènement sur les encyclopédies traditionnelles, étant donné que Britannica, Universalis et Larousse ont dû mettre fin à leur version papier. Elle traite du sens que recouvrent la collaboration et la participation par l’usage des Wikis dans l’économie collaborative et la démocratie participative.
Newsletter SPW Agriculture en province du Luxembourg du 03-06-24BenotGeorges3
Les informations et évènements agricoles en province du Luxembourg et en Wallonie susceptibles de vous intéresser et diffusés par le SPW Agriculture, Direction de la Recherche et du Développement, Service extérieur de Libramont.
https://agriculture.wallonie.be/home/recherche-developpement/acteurs-du-developpement-et-de-la-vulgarisation/les-services-exterieurs-de-la-direction-de-la-recherche-et-du-developpement/newsletters-des-services-exterieurs-de-la-vulgarisation/newsletters-du-se-de-libramont.html
Bonne lecture et bienvenue aux activités proposées.
#Agriculture #Wallonie #Newsletter #Recherche #Développement #Vulgarisation #Evènement #Information #Formation #Innovation #Législation #PAC #SPW #ServicepublicdeWallonie
M2i Webinar - « Participation Financière Obligatoire » et CPF : une opportuni...M2i Formation
Suite à l'entrée en vigueur de la « Participation Financière Obligatoire » le 2 mai dernier, les règles du jeu ont changé !
Pour les entreprises, cette révolution du dispositif est l'occasion de revoir sa stratégie de formation pour co-construire avec ses salariés un plan de formation alliant performance de l'organisation et engagement des équipes.
Au cours de ce webinar de 20 minutes, co-animé avec la Caisse des Dépôts et Consignations, découvrez tous les détails actualisés sur les dotations et les exonérations, les meilleures pratiques, et comment maximiser les avantages pour les entreprises et leurs salariés.
Au programme :
- Principe et détails de la « Participation Financière Obligatoire » entrée en vigueur
- La dotation : une opportunité à saisir pour co-construire sa stratégie de formation
- Mise en pratique : comment doter ?
- Quelles incidences pour les titulaires ?
Webinar exclusif animé à distance en coanimation avec la CDC
4. Silence - définition
• « Absence » ou l’« abolition de toute parole »,
Henri-Jacques Stiker, anthropologue
• Toute forme de discours semble
intrinsèquement liée au silence
5. Michel-Rolph Trouillot et Silence
• « Au-delà des règles propres à l’économie
narrative, ce que l’exemple extrême du récit
nous révèle, c’est que les silences sont
nécessaires à toute mise en ordre des faits
pour la production d’un sens – explicite ou
latent »
6. Les deux dimensions du silence
• Sens positif : quand il fait partie de la
démarche de la production du discours
(nécessaire)
• Sens négatif : quand il se fait entendre
(assourdissant)
8. Silence nécessaire
• Silence nécessaire à la production du discours
• « Silences are inherent in history because any
single event enters is always left out while
something else is recorded », Trouillot
9. Silence assourdissant
• Utilisation d’un discours en vue de délivrer un
message
• Absence de parole visant à mettre en valeur
une idée au détriment d’une autre
• «By silence, I mean an active and transitive
process », Trouillot
10. Exemple de silence donné par
Trouillot
• « Napoléon perdit à Saint-Domingue plus de
soldats qu’à Waterloo et dix-neuf généraux,
dont son beau-frère qui commandait
l’expédition chargée de rétablir l’esclavage. La
campagne infructueuse contre les anciens
esclaves, dirigés par Toussaint Louverture puis
Jean-Jacques Dessalines, contribua à la vente
de la Louisiane et à la fin du rêve d’un empire
français en Amérique du Nord »
11. Comment dépister les silences
• « Dépister les silences de l’histoire revient
donc à cerner les moments de la production
historique où l’organisation des faits aide à
façonner le sens non seulement dans le récit,
mais aussi en amont et en aval de celui-ci »,
Trouillot
13. Premier moment
• Celui : « de la production des sources, quand
les traces écrites, orales ou matérielles – du
témoignage au relevé de compte et au vestige
– se transforment en documents dotés de
sens rétroactifs […]», Trouilot
14. Deuxième moment
• Celui « de la production des archives, de
l’assemblage des faits, quand les traces sont
classées, inventoriées, hiérarchisées en
fonction d’une direction du sens à découvrir »,
Trouillot
15. Troisième moment
• Celui « de la reconstitution des faits et de leur
explication dans la production du récit »,
Trouillot
16. Quatrième et dernier moment
• Celui « de la production du sens final, de la
signification rétrospective propre à l’histoire,
où le citoyen lecteur – étudiant,
téléspectateur, vétéran des dernières guerres
ou célébrant des vieux anniversaires – rejoue
la narration explicative de l’historien et la fait
entrer dans un imaginaire où se confondent à
la fois le privé et le public, le vécu et le vrai, la
mémoire et l’histoire », Trouillot
18. Silence et nation
• « Derrière l’historien de métier, c’est la nation qui se
dresse. Si l’histoire est toujours "sous surveillance"
(Marc Ferro), la nation est gardienne de son choix.
C’est elle que nous retrouvons comme une des
constantes les plus solides de ces quatre moments de
la production historique. Unité de base dans la
production des documents, unité de classement dans
la production des documents, unité de classement
dans la production des archives, unité d’analyse et
unité de sens dans la production du récit, la nation
émerge comme une unité de gestion de l’histoire dans
sa signification rétrospective », Trouillot
21. Le manifeste du roi
• Utilise l’expression « Palais de Sans-Souci » ou
« Palais Royal de Sans-Souci » pour parler du
Palais d’Henry Christophe
22. 2e interprétation : Jean-Baptiste Sans-
Souci
• Esclave bossale et venant probablement du
Congo
• Devenu colonel et grand stratège
• Joué un rôle important dans la révolution
haïtienne
• Assassiné près de l’endroit où le Palais a été
construit
23. 3e interprétation : autre Palais de
Sans-Souci
• Construit sur l’ordre de l’empereur Prusse
Frédéric le Grand
• Situé à Postdam, le Palais de Frédéric Le Grand
a été érigé entre 1745 et 1747
26. Louis Sala-Molins et le silence des
Lumières
• « Prenez les systèmes des Lumières, installés sur la
revendication de la liberté, sur une haute conception
de la citoyenneté. Mettez un Noir dedans, les systèmes
ne tiennent plus, ils sautent. Plus rien n’a de sens. Le
fait qu’il y ait une inadéquation totale entre l’existence
massive du Noir esclave, le point le plus élevé du
système esclavagiste dans toute sa durée historique
d’une part, et le sommet de la pensée des Lumières
d’autre part et que cela n’ait pas dérangé le moins du
monde Rousseau, ou Kant, très bien renseignés l’un et
l’autre, comme les autres, cela pose un problème qui
n’est pas sur le coup cognitif ni joliment esthétique,
mais fondamentalement philosophique »
28. Conclusion
• Deux catégories de silence
• Détecter les volontés de toutes les formes de
domination qu’une nation pourrait vouloir
exercer sur une autre ou qu’une élite pourrait
tenter d’exercer sur un peuple
30. Bibliographie
• Jean-Pierre Le Glaunec, L’armée indigène : la défaite de Napoléon en Haïti, préf. L. Trouillot, Montréal, Lux Éditeur, 2014.
•
• Jonathan I. Israel, Les Lumières Radicales : la philosophie, Spinoza et la naissance de la modernité (1650-1750), Paris,
Amsterdam, 2005.
•
• Joseph Saint-Rémy, Essai sur Henri-Christophe, général haïtien, Paris, Félix Malteste, 1839.
•
• Laurent Dubois, Avengers of the New World: The Story of the Haitian Revolution, Cambridge, Belknap Press of Harvard
University Press, 2004, p. 294.
•
• Lewis Gordon, « A Phenomenology of visible Invisibility: Racial Portrait of Anonymity » dans Confluences : Phenomenology
and Postmodernity, Environment, Race, Gender: seventeenth annual symposium of the Simon Silverman Phenomenology
Center, Pittsburgh, Daniel J. Martino, 2000. p. 39-50.
•
• Louis Sala-Molins, « Les Antilles entre passé et présent : entretien avec le professeur Louis Sala-Molins », entretien réalisé
par Fritz Calixte, James Darbouze et Schallum Pierre, Recherches haïtiano-antillaises, 2004, p. 63-70.
•
• Louis Sala-Molins, Les Misères des Lumières : sous la raison, l’outrage, Paris, R. Laffont, 1992.
•
• Michel-Rolph Trouillot, « Esclavage et colonialisme : des silences assourdissants », Le Monde des débats, No 19, nov. 2000, p.
14-15.
•
• Michel-Rolf Trouillot, Silencing the Past : Power and the Production of History, Boston, Beacon Press, 1995.
31. Webographie
• Claude Markovits, « Subaltern Studies », Encyclopædia Universalis, http://www.universalis.fr/encyclopedie/subaltern-
studies/, consulté le 7 février 2015.
•
• Doudou Sow, « La déqualification professionnelle et la précarisation des immigrants travailleurs qualifiés », Huffington Post,
Avril 2014, http://quebec.huffingtonpost.ca/doudou-sow/la-dequalification-professionnelle-et-la-precarisation-des-
immigrants-travailleurs-qualifies_b_5774476.html, consulté le 7 février 2015.
•
• Henri-Jacques Stiker, « Silence », Encyclopædia Universalis, http://www.universalis-
edu.com.acces.bibl.ulaval.ca/encyclopedie/silence/, consulté le 23 avril 2014.
•
• Henry Christophe, Le manifeste du roi, Cap-Henry, P. Roux, impr. du Roi, 1814, p. 18 (page n19).
http://archive.org/stream/royaumedhaytiman00hait#page/n19/mode/2up/search/palais+, consulté le 6 février 2015.
•
• Jean Marie Goulemot, « Lumières », Encyclopædia Universalis, http://www.universalis-
edu.com.acces.bibl.ulaval.ca/encyclopedie/lumieres/, consulté le 7 février 2015.
•
• Tzvetan Todorov, L’esprit des Lumières,http://expositions.bnf.fr/lumieres/arret/02.htm, consulté le 22 avril 2014.
•
• http://www.statcan.gc.ca/pub/81-004-x/def/4068739-fra.htm, consulté le 7 février 2015.
Notes de l'éditeur
Le silence se définit, selon l’anthropologue Henri-Jacques Stiker, comme l’« absence » ou l’« abolition de toute parole ». L’élaboration de toute forme de discours semble intrinsèquement liée au silence. Les doctorants et doctorantes le savent très bien. Pour terminer une thèse, il faut souvent limiter le champ de sa problématique et donc choisir, de façon éclairée, de ne pas développer certaines thématiques. Cela signifie que pour éviter de dévier de la ligne directrice, il est préférable de ne pas évoquer certains points. Il en est de même pour la mise en forme d’un récit romanesque ou historique. Cette idée confirme ce que Michel-Rolph Trouillot écrit dans Esclavage et colonialisme : des silences assourdissants: Henri-Jacques Stiker, « Silence », Encyclopædia Universalis, http://www.universalis-edu.com.acces.bibl.ulaval.ca/encyclopedie/silence/, consulté le 23 avril 2014.
Même à l’intérieur d’un champ délimité, le risque existe. De plus, c’est très complexe pour l’historien, dans la fabrication de l’histoire, il procède par le processus de sélection. Autrement dit, il isole les matériaux qu’il juge les plus pertinents.
Ce silence est très révélateur. Il est forgé dans l’objectif de mettre en valeur une idée au détriment d’une autre. Le choix de se taire vise à réinterpréter les faits dans la perspective d’une certaine idéologie. Trouillot n’hésite pas à citer quelques exemples repérés dans le champ de l’histoire dont celui-ci
Pour comprendre le sens d’un récit, il faut questionner les différents moments qui ont participé à son organisation. Autrement dit, le récit étant une fabrication, il faut savoir l’aborder d’un point de vue critique. Trouillot nous enjoint à interroger les moments conduisant à la constitution du discours. Ils sont au nombre de quatre.
La trace renvoie à la mémoire, à ce qui reste d’une expérience ou d’un vécu. Elle fait appel à des éléments sonores et visuels auxquels nous attribuons une signification particulière.
L’archive est une référence fondamentale qui permet de déceler les aspects du discours qui sont mis de côté ou tout simplement passés sous silence. Le moment de la production des archives comprend la classification, l’inventaire et la hiérarchie des faits. Il importe, d’une part, d’avoir une connaissance globale des documents constituant un récit et, d’autre part, de savoir précisément les choix opérés dans la fabrication du discours.
Cette dernière phrase de Trouillot est très significative. Renvoyant à l’enquête, sens étymologique de l’histoire, elle suggère de faire œuvre de détective. Car il faut s’armer d’outils pertinents qui s’enracinent dans la reconstitution des faits pour traquer ce que Jean-Baptiste Marongiu appelle, à la suite d’Avital Ronell, « les zones d’ombre des grandes théories » de « ces criminels que sont les penseurs ». On comprend que ce troisième moment peut mener aussi une pratique de la déconstruction.
Que faut-il comprendre lorsque Trouillot conseille de « rejoue[r] la narration explicative de l’historien » ? Ce qu’il propose ici c’est précisément d’envisager la parole historienne comme une construction personnelle et collective rattachée à un contexte spécifique – étant entendu que l’histoire est toujours immédiate. De cette façon, le citoyen lecteur sera attentif à l’idée selon laquelle l’interprétation de ces historiens obéit souvent à des exigences identitaires. C’est ce dont nous allons traiter dans la prochaine partie.
Les explications de l’historien ou de l’historienne constituent le travail acharné d’un chercheur ou d’une chercheuse qui maîtrise les méthodes de sa discipline pour recueillir les faits, les analyser puis leur donner un sens. Cependant, l’individu-historien n’est pas le seul dans l’élaboration du discours. La nation joue un rôle de premier plan dans le choix des problématiques et le sens qui leur sont attribué. Le choix d’un sujet et surtout l’orientation que l’individu-historien est capable de lui donner peut porter la trace d’une mémoire nationale. De même, le silence peut être la trace d’un héritage national. Le livre Silencing the past: Power and the production of History détaille plusieurs silences dans l’histoire d’Haïti. Le discours élaboré au sujet de Sans-Souci en est une belle illustration. Michel-RolphTrouillot postule trois faces ou interprétations de Sans-Souci comme s’intitule le deuxième chapitre : « The tree Faces of Sans Souci : Glory and Silences in the Haitian Revolution ».
Le livre Silencing the past: Power and the production of History détaille plusieurs silences dans l’histoire d’Haïti. Le discours élaboré au sujet de Sans-Souci en est une belle illustration. Michel-RolphTrouillot postule trois faces ou interprétations de Sans-Souci comme s’intitule le deuxième chapitre : « The tree Faces of Sans Souci : Glory and Silences in the Haitian Revolution » Le dernier ouvrage de Jean-Pierre Le Glaunec rappelle à propos « de la bataille de Vertières», « le silence des historiens français sur un épisode pourtant central de l’histoire de France ».
Chéri Warlook en est l’architecte. Le Palais été dessiné par l’Haitien Henri Baré. Il est situé a une altitude de 970 m
http://www.mhaiti.org/billet/le-palais-sans-souci
Le manifeste du roi, une série d’écrits – composés entre autres d’extraits des registres de délibération des Consuls de la République et de réfutation de lettre – probablement rédigés par le Baron de Vastey mais portant, à de nombreuses reprises, la signature du roi Henry, utilise l’expression « Palais de Sans-Souci » ou « Palais Royal de Sans-Souci ». Aimé Césaire, Alejo Carpentier et beaucoup d’autres écrivains s’y réfèrent dans leurs différents écrits. L’admirable édifice est l’histoire officielle de Sans-Souci. C’est également le récit qui est raconté par les guides, lorsqu’on procède à une visite touristique du Palais, selon Trouillot.
Aimé Césaire, La Tragédie du roi Christophe, Paris, Présence africaine, 1963.
Alejo Carpentier, La Habana, El reino de este mundo, Editorial Pueblo y Educación, primera reimpresión, 1949, 1981.
Joseph Saint-Rémy, Essai sur Henri-Christophe, général haïtien, Paris, Félix Malteste, 1839.
Le deuxième visage de Sans-Souci, poursuit l’ouvrage Silencing the past: Power and the production of History, correspond à un homme, un colonel. Il s’appelle Jean-Baptiste Sans-Souci. Esclave bossale et venant probablement du Congo, il a joué un rôle important dans la révolution haïtienne. Il était grand stratège comme d’autres chefs militaires congolais. Il était devenu l’un des subalternes d’Henry Christophe. Mais il contesta, avec le temps, les orientations politiques et tactiques de ce dernier. Il a été assassiné près de l’endroit où le Palais a été construit. Près de dix ans après la publication de Trouillot, Laurent Dubois suggère l’une des raisons qui pourrait être à l’origine de cet assassinat commandité par Henry Christophe : « After Christophe made himself king of the north of Saint-Domingue, he built a great palace called Sans-Souci, whose name was probably meant in part to erase the memory of his Congo victim ». Effectivement, du colonel, il en reste peu de trace. Celui qui avait réalisé des prodiges est peu cité quand on aborde l’histoire de Sans-Souci. « Almost every mention of Sans Souci, the palace, the very resilience of the physical structure itself, effectively silences Sans Souci, the man, his political goals, his military genius » Laurent Dubois, Avengers of the New World: The Story of the Haitian Revolution, Cambridge, Belknap Press of Harvard University Press, 2004, p. 294.
Ces deux derniers discours sur Sans-Souci – lesquels sont peu évoqués – pourraient nous éclairer sur Henry Christophe et une possible origine du Palais. Si aujourd’hui les deux dernières « faces » de Sans-Souci commencent à être connues – il suffit de procéder à une recherche booléenne sur Internet pour s’en convaincre – il reste un fait que la première « face » est considérée comme la version officielle. Qu’on aille visiter le Palais Sans-Souci ou qu’on se renseigne auprès des gens de la localité, c’est la première version qui est souvent mise en lumière, rapporte Trouillot. Dès lors, on comprend pourquoi dans Silencing the past: Power and the production of History, celui-ci écrit que « The production of traces is always also the creation of silences ». L’exemple de la production de l’histoire en Inde comme en Haïti ou en France témoigne de la présence de cette absence dans le but de préserver « l’unicité de la nation ». Mais l’histoire n’est pas la seule discipline qui dénote cette absence, la philosophie en fait aussi état. C’est particulièrement le cas lorsqu’on examine la philosophie des Lumières.
Un exemple pertinent de silence pour préserver « l’unicité de la nation » porte sur la relation historique d’ordre impérialiste entre Haïti et la République dominicaine. Les historiens ont du mal à travailler sur l’occupation haïtienne en République dominicaine pendant la période de Boyer (1822-1844) puisque cela pourrait remettre en question les éléments qui ont trait à la construction de la nation haïtienne comme peuple rebelle et anti-impérialiste.
La philosophie des Lumières du 18e siècle se veut une remise en question de l’obscurantisme dans la pensée. Elle est fondée sur la raison et la capacité du soi à questionner et à choisir en dehors des préceptes fixés par la religion et par l’État. La liste des philosophes des Lumières est très longue : Condorcet, Condillac, Diderot, D’Alembert, Rousseau, Voltaire, Kant, Hume, Spinoza, etc. Ces penseurs prônent ce que Todorov appelle « l’autonomie », « la finalité humaine » et « l’universalité ». Bien que la pensée des Lumières provienne de l’Europe, l’idée de la liberté qu’elle défend serait applicable partout. Or, s’agit-il véritablement d’universalité quand on sait que la réalité de Saint-Domingue est passée sous silence ? « Qu’est-ce que les Lumières ? En décembre 1784, Emmanuel Kant répond à cette question, posée en janvier 1783 par le pasteur Zöllner dans la Berlinische Monatsschrift. Alors que tous les grands noms des Lumières françaises ont disparu, Kant fait comme si, oubliant les antagonismes et les fractures, il était devenu possible de proposer une vue d'ensemble, d'atteindre une sorte d'épistémê des Lumières elles-mêmes. Il ne cite aucun nom, aucune œuvre. Son propos ne relève pas de l'histoire littéraire, ni même réellement de l'histoire. Prenant appui sur le contemporain, il se veut intemporel parce qu'à la recherche de fondements. Les Lumières représenteraient donc une autonomie de pensée, un idéal vers lequel tendre, déjà partiellement atteint, mais sans cesse menacé, renié pour céder à la soumission de l'esprit et à l'aliénation de la raison. À partir de Qu'est-ce que les Lumières ?, on peut penser celles-ci comme la conquête d'une attitude intellectuelle plus qu'un ensemble de valeurs, de textes et d'analyses, voire d'engagements concrets ». Jean Marie Goulemot, « Lumières », Encyclopædia Universalis, http://www.universalis-edu.com.acces.bibl.ulaval.ca/encyclopedie/lumieres/, consulté le 7 février 2015.
Le lecteur ou la lectrice pourra se référer à l'ouvrage de Jonathan I. Israel pour une compréhension plus complète des Lumières. Jonathan I. Israel, Les Lumières Radicales : la philosophie, Spinoza et la naissance de la modernité (1650-1750), Paris, Amsterdam, 2005.
Tzvetan Todorov, L’esprit des Lumières,http://expositions.bnf.fr/lumieres/arret/02.htm, consulté le 22 avril 2014.
La conception de l’universel dont il est question ici doit se rapprocher de celle d’Aimé Césaire. « Ma conception de l’universel est celle d’un universel riche de tout le particulier, riche de tous les particuliers, approfondissement et coexistence de tous les particuliers ». Aimé Césaire, « Lettre à Maurice Thorez » dans Aimé Césaire et Malcom X, Black revolution, préf. F. Durpaire, Paris, Demopolis, 2010, p. 41-42. Édouard Glissant utilise le concept « tout-monde » en lieu et place d’universel. « J’appelle Tout-Monde notre univers tel qu’il change et perdure en échangeant et, en même temps, la "vision" que nous en avons. La totalité-monde dans sa diversité physique et dans les représentations qu’elle nous inspire : que nous ne saurions plus chanter, dire ni travailler à souffrance à partir de notre seul lieu, sans plonger à l’imaginaire de cette totalité ». Édouard Glissant, Traité du Tout-Monde : Poétique IV, Paris, Gallimard, 1997, p. 176.
Voilà pourquoi, Louis Sala-Molins suggère une autre méthode de lecture des Lumières. Pour les lire, il faut avoir « le code noir sous la main » propose-t-il dans son livre Les Misères des Lumières : sous la raison, l’outrage. Lorsque Kant mentionne le concept d’« universalité », il se réfère à un contexte européen, ce qui exclut la réalité de l’esclave dominguois, par exemple. Il faut, écrit Sala-Molins, « Lire les Lumières en se situant du côté des ténèbres. Des ténèbres qu’elles ne créent pas. Qu’elles ne dissipent pas, parce qu’elles ne les éclairent pas. Pour ne parler que des esclaves noirs ? Pour pouvoir remonter du non-sens absolu jusqu’à la rigueur sensée des meilleurs arguments et pouvoir les mettre à l’épreuve de l’esclave noir ».
Par son interrogation du silence dans la production du discours, le travail de Louis Sala-Molins se rapproche de celui de Michel-Rolph Trouillot. Cependant, la proposition de Trouillot se veut un questionnement sur le silence non seulement dans le discours de penseurs ou d’historiens de métier produit en France ou en Europe, Les Lumières en particulier, mais aussi dans celui des historiens haïtiens.
Louis Sala-Molins, Les Misères des Lumières : sous la raison, l’outrage, op. cit., 1992, p. 17.
Nous avons parcouru plusieurs types de silences. Trouillot repère deux grandes catégories : les silences nécessaires à l’élaboration du discours et les silences gênant la compréhension de la complexité du réel. Silencing the Past : Power and the Production of History et Esclavage et colonialisme : des silences assourdissants touchent en particulier à la seconde catégorie, laquelle n’est pas neutre. Ce type de silence peut être dépisté si le lecteur ou la lectrice procède à l’analyse de la classification, de l’inventaire et de la hiérarchie du sens attribué aux faits en remontant à leur source. Il importe d’identifier ces absences puisque le discours qui en découle se rattache à des enjeux liés à des rapports de force. Voilà pourquoi, Trouillot nous convie à mener notre propre enquête afin de détecter les volontés de toutes les formes de domination qu’une nation pourrait vouloir exercer sur une autre ou qu’une élite pourrait tenter d’exercer sur un peuple, etc.
Si le silence est indispensable pour l’élaboration d’une pensée, il y a des silences dont il faut se méfier voire qu’il faut tout simplement éviter. La production du discours, qu’il soit historique ou philosophique, commande une éthique. Il s’agira dorénavant de définir les termes de celle-ci, en dehors de toute forme de domination.