Etre présent sur mobiles_Patrice de Saint-Steban_13ème rencontre des Tisseran...
L'eglise en réseaux_Intervention p. Eric Salobir _ 13ème rencontre des Tisserands _ 6 avril 2013
1.
Eglise
et
réseaux
–
Notes
personnelles
Le
réseau,
les
réseaux
A
l’heure
du
Web
2.0,
c’est-‐à-‐dire
de
la
rencontre
entre
un
besoin
d’interactivité
et
une
technologie
qui
permet
d’assouvir
ce
besoin,
on
ne
parle
plus
que
de
réseaux.
L’Eglise
catholique,
elle-‐même,
souhaite
se
connecter,
voire
«
se
mettre
en
réseau
»,
pour
reprendre
une
expression
du
langage
informatique
qui
fait
florès.
Cependant,
qu’est-‐ce
qu’un
réseau
?
Au
sens
premier,
selon
la
définition
du
dictionnaire,
le
réseau
est
«
un
ensemble
de
lignes
entrecroisées,
ou
le
dessin
que
forment
ces
lignes
».
Au
sens
figuré,
le
réseau
désigne
«
un
ensemble
de
relations
»
représentées
par
des
lignes.
On
peut
donc
noter,
tout
d’abord,
que
l’approche
d’une
organisation
à
travers
le
prisme
du
réseau
met
la
relation
en
avant,
par
rapport
aux
réalités
qui
sont
reliées,
à
leurs
propriétés
spécifiques
ou
aux
ensembles
qu’elles
constituent.
S’il
existe
plusieurs
types
de
réseaux,
qu’il
serait
fastidieux
d’énumérer
ici,
deux
d’entre
eux
semblent
prééminents,
par
la
place
qu’ils
occupent
dans
nos
organisations
tout
comme
dans
la
nature.
Le
premier
type
est
le
réseau
«
en
étoile
».
Il
a
un
centre,
comporte
des
passages
obligés
et
tous
ses
membres
n’ont
pas
la
même
fonction
ni
la
même
importance.
C’est
le
cas
du
réseau
sanguin,
organisé
autour
d’un
cœur.
Lorsque
le
froid
engourdit
nos
membres,
nous
prenons
conscience
du
caractère
foncièrement
inégalitaire
de
ce
réseau
:
le
sang
reflue
des
membres
pour
se
concentrer
sur
les
organes
vitaux.
Ce
modèle
dit
«
en
étoile
»
est
aussi
adopté
par
la
plupart
des
réseaux
de
distribution
:
adduction
d’eau
ou
réseau
bancaire.
L’analogie
entre
la
circulation
du
sang
et
celle
de
l’eau
peut
permettre
de
comprendre
les
choix
faits
par
les
urbanistes.
Pourtant,
il
semble
que
l’architecture
du
réseau
ferré
français
ait
été
sciemment
influencée
par
la
philosophie
des
réseaux
héritée
de
Saint-‐Simon1.
Sa
distribution
en
rayonnement
à
partir
de
la
capitale
fut
établie
par
une
Loi
dite
«
Etoile
de
Legrand
»2
(1842).
Dans
une
France
jacobine,
un
réseau
ayant
une
tête
avait,
sans
doute,
quelque
chose
de
logique
et
de
rassurant.
Il
existe
cependant
un
autre
type
de
réseau,
dont
l’organisation
est
suggérée
par
l’étymologie
même
du
mot
réseau.
En
effet,
le
terme
vient
de
retiolus,
diminutif
de
rete,
-‐
is,
le
filet.
Il
s’agit
d’une
organisation
en
maillage,
dont
on
trouve
notamment
l’exemple
dans
le
réseau
neuronal.
Les
expériences
de
rééducation
après
une
lésion
cérébrale
montrent,
en
effet,
la
capacité
d’un
tel
réseau
à
faire
transiter
l’influx
nerveux
par
de
nouvelles
voies,
en
remplacement
des
connexions
qui
ont
été
détruites.
C’est
cette
particularité
qui
a
poussé
les
militaires
à
développer
des
réseaux
informatiques
en
maillage,
ancêtres
d’Internet
:
ce
type
de
réseau
est
plus
difficile
à
détruire,
car
on
ne
peut
pas
lui
trancher
la
jugulaire.
Un
tel
réseau,
présente
une
relative
horizontalité
et
est
caractérisé
par
sa
modularité
:
dans
sa
version
informatique,
Internet,
il
est
composé
ne
«
nodules
informationnels
» 3
connectés
par
des
hyperliens.
Son
fonctionnement
est
1
Bathélémy
Prosper
Enfantin,
directeur
de
la
Compagnie
du
chemin
de
fer
Paris-‐Lyon-‐Méditerranée
l’a
appliquée
dans
son
entreprise.
2
Loi
relative
à
l’établissement
des
grandes
lignes
de
chemin
de
fer
en
France,
dite
«
Etoile
de
Legrand
»
(1842)
3
Lev
Manovich
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
1
2.
délinéarisé
:
la
navigation
se
fait,
au
gré
des
liens,
d’information
en
information,
de
page
en
page,
sans
parcours
préétabli
ou
obligatoire.
Réseaux
sociaux
L’étude
de
nos
organisations
sur
le
modèle
des
réseaux
semble
être
contemporaine
d’un
changement
de
paradigme
:
le
passage
de
réseaux
en
étoile
à
des
réseaux
en
maillage.
Elle
est
aussi
contemporaine
d’avancées
dans
le
domaine
de
l’informatique,
ce
qui
n’est
probablement
pas
le
fruit
du
hasard.
Il
ne
faut
cependant
pas
confondre
communications
et
télécommunications
:
un
réseau
social
est
avant
tout
un
réseau
dont
les
éléments
(les
lignes)
sont
des
relations
sociales.
Un
réseau
qui
«
fait
société
».
L’origine
du
terme
est
significative
:
il
fut
employé
pour
la
première
fois
par
l’anthropologue
des
sociétés
John
Arundel
Barnes
en
1954,
dans
une
étude
intitulée
«
Class
and
Committees
in
a
Norwegian
Island
Parish
».
Les
réseaux
sociaux
désignaient
ainsi
des
réalités
de
l’anthropologie
religieuse.
Par
ailleurs,
à
y
regarder
de
plus
près,
le
premier
réseau
social
dans
lequel
un
individu
se
trouve
tramé
n’est-‐il
pas
sa
famille
?
Forts
de
ces
constatations,
nous
pouvons
aborder
les
réseaux
sociaux
en
nous
gardant
de
toute
«
approche
fétichiste
des
technologies
numériques
»4
et
exploiter
la
proximité
existant
entre
les
réseaux
de
notre
société
et
les
services
en
ligne
comme
Facebook.
En
effet,
les
médias
numériques
sont
des
productions
de
la
société,
au
deux
sens
du
génitif
:
ils
en
sont
le
fruit,
mais
ils
la
façonnent
aussi
en
retour.
Les
ressemblances
entre
ces
deux
réalités
sociale
et
numérique,
ne
sont
donc
pas
le
fruit
du
hasard.
En
outre,
les
services
en
ligne,
internet
en
tête,
constituent
de
moins
en
moins
un
univers
parallèle,
une
prétendue
«
Second
life
»
et
de
plus
en
plus
une
composante
de
notre
expérience
de
vie,
aux
côtés
des
réalités
tangibles
de
notre
existence
déconnectée
:
une
rencontre
faite
autour
d’un
café
sur
poursuit
sur
Facebook,
et
inversement.
Pour
reprendre
les
néologismes
forgés
par
le
sociologue
Bernard
Cathelat5,
nous
pourrions
dire
que,
depuis
2008,
nous
sommes
passés
d’un
«
alter-‐monde
»
à
une
«
virtu-‐réalité
».
Alors,
si
nos
contemporains
se
contemplent
volontiers
dans
le
reflet
souvent
déformant
des
médias
en
ligne,
peut-‐être
faut-‐il
user
de
ce
jeu
de
miroir
:
porter
un
regard
attentif
sur
la
société
pour
comprendre
le
monde
numérique
et
penser,
en
retour,
la
société
comme
un
réseau.
Ces
deux
démarches
nous
permettront
de
mettre
en
lumière
certaines
réalités
avant
de
faire
entrer
un
troisième
acteur
:
l’Eglise.
En
effet,
ce
regard
en
miroir
de
la
société
et
du
monde
numérique
laisse
penser
qu’une
organisation
comme
l’Eglise
catholique
ne
peut
se
développer
sur
les
réseaux
sociaux
numériques,
que
si
elle
prend
conscience
qu’elle-‐même
est
aussi
un
réseau
social
et
qu’elle
se
comporte
comme
tel.
On
ne
fait
pas
«
du
réseau
social
»
comme
on
«
ferait
dans
le
social
»,
ne
serait-‐ce
qu’en
raison
du
caractère
chronophage
d’une
action
sur
les
réseaux
sociaux
numériques,
qui
demande,
justement,
de
mobiliser
son
réseau.
N’en
déplaise
aux
hommes
de
marketing,
seule
la
cohérence
paye.
4
Philippe
Breton
???
5
Directeur
de
recherches
au
Centre
de
communication
avancée
(CCA),
membre
du
forum
Netexplorateur
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
2
3.
La
société
comme
un
réseau
Notre
société
:
un
philosophe,
s’il
était
à
la
place,
la
qualifierait
sûrement
de
post-‐
moderne,
tant
elle
écarte
progressivement
toute
forme
de
tradition
pour
s’en
remettre
à
la
seule
raison.
Pour
ma
part,
je
me
bornerai
à
relever
deux
corolaires
de
cette
dénomination,
qui
nous
seront
utiles.
Tout
d’abord,
la
montée
de
l’individuation
:
l’individu
occupe
désormais
une
place
prééminente.
Cette
tendance
n’est
cependant
pas
obligatoirement
synonyme
d’individualisme
forcené
:
notre
société,
qui
fait
la
part
belle
aux
médias
numériques,
voit
naître
des
projets
collaboratifs
comme
Wikipedia
et
des
logiciels
libres.
Le
«
Partage
»
n’est
pas
seulement
un
argument
marketing
et
fait
des
émules
dans
la
«
vraie
vie
».
On
note
ainsi,
et
c’est
le
second
corollaire,
un
réel
souci
du
bien
commun.
Dans
ce
contexte
paradoxal,
c’est
le
rapport
de
l’individu
à
la
société
qui
est
interrogé.
Individu
et
société
:
l’heure
du
choix
En
effet,
l’atténuation
de
la
pression
sociale
donne
à
l’individu
plus
de
latitude
pour
décider
des
modalités
de
son
existence
:
on
n’est
plus
orfèvre
ou
tanneur
comme
son
père,
on
peut
épouser
une
fille
qui
vient
d’un
autre
village,
ce
qui
aurait
horrifié
les
contemporains
de
Marcel
Pagnol.
Cette
tendance
est
même
poussée
jusqu’à
l’excès,
quand
certains
affirment
qu’on
peut
décider
de
changer
de
sexe
et,
bientôt,
des
caractéristiques
de
son
enfant.
Nous
sommes
dans
une
société
du
choix.
L’appartenance
est,
dès
lors,
moins
reçue
que
choisie.
On
comprend
alors
pourquoi
notre
réalité
humaine
est
progressivement
abordée
sous
l’angle
des
réseaux
plutôt
que
sous
celui
des
classes.
Dans
la
littérature
anglophone,
le
nombre
d’occurrences
du
terme
«
réseaux
sociaux
»
a
ainsi
dépassé
celui
du
terme
«
classes
sociales
»
depuis
l’an
2000.6
Le
réseau
de
se
focalise
pas
sur
l’appartenance,
par
essence
statique,
mais
sur
la
relation,
qui
est
dynamique.
En
outre,
il
s’accommode
mieux
des
appartenances
multiples
et
changeantes,
qui
sont
devenues
notre
quotidien.
On
a
ainsi
un
film,
plutôt
qu’une
photo
de
notre
société
qui,
comme
ses
médias,
est
«
à
la
demande
».
Il
ne
faut
certes
pas
se
leurrer
:
réseaux
et
classes
restent
deux
notions
corrélées
et,
en
moyenne,
le
réseau
social
d’un
individu
est
d’autant
plus
étendu
qu’il
appartient
à
une
catégorie
socio-‐professionnelle
élevée.
Pourtant,
la
notion
de
réseau
s’avère
intéressante
pour
mieux
connaître
la
société.
Une
équipe
américaine
l’a
ainsi
appliquée
à
l’étude
de
l’obésité
:
elle
a
démontré
qu’une
personne
en
surpoids
a
plus
de
chance
d’avoir
des
personnes
en
surpoids
dans
son
entourage
qu’une
personne
mince.
L’obésité
serait-‐elle
contagieuse
?
Est-‐ce
par
effet
d’entraînement
(on
mange
ce
que
mangent
nos
parents
et
amis),
par
rapprochement
(qui
se
ressemble
s’assemble)
ou
par
évolution
de
la
norme
sociale
(le
poids
socialement
acceptable
évolue
d’un
milieu
à
l’autre)
?
Difficile
à
dire,
mais
les
recherches
ne
font
que
commencer
;
et
elles
s’avèrent
prometteuses
pour
améliorer
la
santé
publique.
Un
nouveau
mode
de
socialisation
Ce
passage
d’une
identité
reçue,
que
certains
diront
«
imposée
»,
à
une
identité
choisie,
induit
de
nouveaux
modes
de
socialisation.
Pour
faire
simple,
disons
que
l’on
passe
d’un
modèle
hiérarchique
et
pyramidal
à
un
modèle
plus
participatif.
Là
encore,
nous
6
Sources
:
Google
Book
Ngram
Viewer
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
3
4.
sommes
face
à
un
paradoxe.
D’un
côté,
la
mobilisation
se
fait
de
plus
en
plus
au
niveau
de
l’individu,
qui
s’engage,
par
choix,
dans
la
défense
de
telle
ou
telle
cause.
C’est
le
cas
des
mouvements
sociaux,
qui
dépassent
largement
le
cadre
des
structures
représentatives
:
la
manifestation
précède
le
syndicat.
On
l’a
également
vu
avec
la
mobilisation
massive
autour
du
refus
du
mariage
gay.
Les
participants
étaient
bien
plus
nombreux
que
les
seuls
militants
de
la
«
Manif
pour
tous
».
D’un
autre
côté,
alors
que
l’individu
est
roi,
on
assiste
à
la
multiplication
des
collectifs.
Un
recours
au
groupe,
comme
si
la
liberté
gagnée
dans
une
société
choisie
pesait
sur
les
épaules
de
nos
contemporains
;
comme
si
elle
s’avérait
même
parfois
écrasante,
dans
un
contexte
de
déterminisme
social
faible.
Mais
trois
défis
se
posent
à
ces
collectifs
plus
ou
moins
spontanés
:
comment
dépasser
les
revendications
consensuelles
?
Comment
bâtir
une
stratégie,
quand
on
ne
relève
pas
d’une
organisation
centralisée
?
Comment
proposer
un
contre-‐modèle
cohérent
?
Pour
reprendre
l’exemple
cité
plus
haut,
la
Manif
pour
tous
est
surtout
affrontée
à
l’un
de
ces
défis
:
bâtir
une
stratégie
pour
«
l’après
24
mars
».
On
voit
cependant
qu’il
est
de
taille.
Pour
des
collectifs
plus
flous,
comme
la
FASM,
les
trois
défis
sont
bien
réels.
Des
organisations
collaboratives
Dans
ce
contexte
de
prééminence
de
l’individu
et
d’émergence
de
collectifs,
les
modèles
organisationnels
évoluent
aussi.
Empruntant
les
caractéristiques
des
réseaux,
ils
passent
d’une
structuration
en
étoile,
avec
un
chef
à
leur
tête,
à
un
modèle
collaboratif,
plus
proche
du
maillage
:
les
entreprises
adoptent
une
organisation
par
projet,
au
sein
de
laquelle
le
responsable
fonctionnel
n’est
plus
le
supérieur
hiérarchique
;
la
créativité
se
développe
au
sein
d’équipes.
Le
rôle
du
leader
est
alors
fortement
remis
en
question
:
à
l’image
de
ce
qui
existe
sur
les
réseaux
sociaux,
le
supérieur
de
communauté,
comme
le
cadre
supérieur,
doit
se
muer
en
community
manager.
Sa
légitimité
est
mise
en
question
:
dans
une
société
à
l’image
des
réseaux
numérique,
il
n’y
a
pas
d’autorité
supérieure
et
la
légitimité
se
mérite.
Elle
vient
moins
d’un
savoir-‐
faire,
comme
celle
des
maîtres
artisans
du
passé,
et
plus
d’un
savoir-‐être,
d’une
compétence
comportementale
:
engagé,
le
leader
ne
peut
se
contenter
d’un
management
exhortatif
de
type
«
allez-‐y
!
»
et
se
doit
de
développer
un
coaching
collaboratif,
une
proximité
relationnelle.
En
outre,
l’objectif
n’est
pas
de
tout
prendre
en
mains,
mais
plutôt
de
soutenir
ceux
qui
agissent
et
qui
créent
:
il
faut
donner
des
moyens
aux
marges,
et
ne
pas
tenter
de
centraliser
l’action.
L’idée
est
qu’en
étant
ainsi
moins
leader,
on
peut
paradoxalement
être
un
meilleur
leader
!
L’époque
est
à
l’abandon
du
fantasme
de
la
toute
puissance.
Ce
changement
de
paradigme
est
plus
patent
encore
dans
des
organisations
comme
l’Eglise,
au
sein
desquelles
nombre
de
personnes
sont
engagées
sur
le
mode
du
volontariat,
du
bénévolat,
de
l’adhésion
à
une
cause.
Contrairement
aux
salariés,
rien
ne
les
retient,
si
ce
n’est
une
foi
en
Christ
et
en
son
Eglise
qui
doit
aussi
être
alimentée.
Certains
poussent
plus
loin
et
vont
jusqu’à
remettre
en
cause
la
notion
même
de
leadership.
Selon
eux,
en
centrant
l’attention
sur
un
individu,
elle
induirait
de
l’individualisme.
Henry
Mintzberg,
professeur
de
management
à
l’université
Mc
Gill
de
Montréal,
va
jusqu’à
prôner
le
remplacement
du
leadership
par
le
«
communityship
».
A
regarder
le
fonctionnement
des
chapitres
communautaires
en
usage
dans
certains
ordres
religieux,
on
pourrait
penser
qu’il
n’a
rien
inventé.
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
4
5.
Dernier
point,
dans
cette
approche
sociétale
sous
l’angle
des
réseaux
:
l’engagement.
Comme
nous
l’avons
vu,
il
n’a
pas
disparu,
mais
ses
modalités
ont
évolué.
Fini,
le
militantisme
indéfectible
de
l’Action
Catholique
:
un
jeune
peut
donner
une
année
entière
de
sa
vie
pour
préparer
les
JMJ,
mais
sur
la
base
d’un
contrat
clair
et
à
durée
déterminée.
Comme
sur
Internet,
on
veut
savoir
à
quoi
l’on
s’engage
et
pour
combien
de
temps.
Et
l’on
veut
aussi
souvent
pouvoir
se
désengager
d’un
clic
:
c’est
ce
que
Robert
Putnam
appelle
«
opting
out
».
Tout
responsable,
même
dans
l’Eglise,
doit
garder
cela
en
tête
s’il
veut
emmener
une
équipe
au
terme
de
son
projet.
Eglise
(et)
réseau
social
En
regard
de
cette
approche
de
réseau
en
maillage
et
de
cette
nouvelle
socialisation,
par
essence
horizontale,
les
structures
hiérarchiques
comme
celle
de
l’Eglise
catholique
peuvent
apparaître
en
porte-‐à-‐faux.
Les
traditions
spirituelles
à
l’organisation
moins
structurée
pourraient
sembler
plus
en
phase
avec
internet.
Au
sein
même
de
l’Eglise,
certains
pourraient
être
tentés
d’opposer
d’un
côté
«
un
peuple
qui
connaîtrait
Dieu
selon
la
vérité
»7
et
l’annoncerait
à
ses
pairs
sur
le
Web
et,
d’un
autre
côté,
un
corps
du
Christ
composé
«
d’une
diversité
de
membres
et
de
fonctions
»8
au
sein
duquel
«
la
grâce
accordée
aux
apôtres
tient
la
première
place
»9.
Pourtant,
il
ne
s’agit
pas
de
deux
visions
de
l’Eglise,
mais
seulement
de
deux
définitions.
En
l’occurrence,
il
ne
vous
aura
pas
échappé
que
la
formulation
que
j’en
ai
donnée
vient
d’un
seul
et
même
texte
:
il
y
a
maintenant
50
ans,
alors
qu’internet
n’était
pas
même
un
projet,
les
pères
conciliaires
rédigeant
la
Constitution
dogmatique
Lumen
Gentium
ont
jeté
les
bases
d’une
articulation
entre
ces
deux
définitions.
De
nos
jours,
le
développement
rapide
d’internet
accroit
l’urgence
d’une
appropriation
toujours
plus
grande
de
ces
textes.
Chacun,
à
son
niveau
et
selon
sa
compétence,
peut
œuvrer
pour
mobiliser
et
mettre
en
synergie
des
réseaux,
sans
pour
autant
menacer
l’unité
dont
les
pasteurs
sont
les
garants.
J’irai
même
plus
loin
:
si
l’Eglise
est
un
corps,
pour
reprendre
une
image
paulinienne
qui
a
fait
ses
preuves,
doivent
pouvoir
y
cohabiter
des
réseaux
en
étoile,
hiérarchisés,
comme
le
réseau
sanguin
et
des
réseaux
en
maillage,
comme
celui
des
neurones.
Je
ne
m’inquiète
pas
pour
les
réseaux
hiérarchiques,
qui
bénéficient
de
près
de
2000
ans
d’expérience.
En
revanche,
les
réseaux
ecclésiaux
ne
doivent
pas
rester
des
réseaux
en
étoile
:
au
sein
d’un
corps
hiérarchisé,
il
y
a
de
la
place
pour
des
réseaux
en
maillage.
Il
me
semble
important
de
voir
se
développer
ces
réseaux,
qui
permettront
à
notre
Eglise
d’être
pleinement
en
prise
avec
les
réseaux
numériques.
Ils
vont
s’avérer
être
des
facteurs
déterminants
de
succès
pour
nos
entreprises
numériques
sur
au
moins
trois
points.
Tout
d’abord,
nous
l’avons
dit,
une
présence
efficace
sur
les
réseaux
sociaux
numériques
est
beaucoup
plus
chronophage
qu’une
action
via
un
mass
média
:
là
où
un
seul
article
était
diffusé
auprès
d’un
large
public,
il
faut
maintenant
entamer
une
infinité
de
dialogues
avec
une
infinité
d’interlocuteurs.
En
outre,
il
faut
également
assurer
la
promotion
et
la
distribution
de
l’information
que
l’on
met
en
ligne
:
c’est
le
fameux
«
buzz
».
Ces
actions
ne
sont
pas
à
la
portée
d’une
institution,
aussi
solide
soit-‐elle,
mais
elles
sont
abordables
par
tout
un
peuple
de
7
Concile
Vatican
II,
Constitution
dogmatique
sur
l’Eglise
Lumen
Gentium,
9.
8
Idem,
7.
9
Ibid.
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
5
6.
croyants.
Pour
évangéliser
sur
internet,
toutes
les
forces
vives
sont
requises.
Dans
le
monde
de
l’entreprise,
on
appellerait
cela
du
«
crowdsourcing
»10
En
outre,
il
faut
bien
reconnaître
que
nous
n’avons
pas
toutes
les
compétences
en
interne.
Une
collaboration
avec
des
professionnels
me
semble
donc
déterminante.
Cependant,
le
recours
ponctuel
à
une
agence
de
web
design
ou
de
publicité
virale
ne
me
semble
pas
satisfaisant.
Or,
l’approche
en
réseau
horizontal
augmente
la
surface
de
contact
et
donc
la
porosité
entre
ces
milieux
professionnels
et
l’Eglise
catholique,
en
créant
les
conditions
d’un
accompagnement
dans
la
durée
et
le
lieu
d’un
compagnonnage
avec
les
acteurs
de
la
culture
numérique.
Enfin,
le
réseau
en
maillage
présente
un
atout
de
nature
plus
théologique.
Face
à
son
écran,
l’internaute
se
trouve
bien
seul.
En
permettant
à
des
chrétiens
qui
se
trouvent
sur
le
seuil
de
l’Eglise
et
qui
se
méfient
parfois
de
l’institution,
de
se
situer
comme
appartenant
à
un
peuple
de
croyants,
on
leur
permet
d’objectiver
leur
rapport
à
Dieu.
10
En
français,
«
Externalisation
ouverte
»
est
l'utilisation
de
la
créativité,
de
l'intelligence
et
du
savoir-‐faire
d'un
grand
nombre
de
personnes,
en
sous-‐traitance,
pour
réaliser
certaines
tâches
traditionnellement
effectuées
par
un
employé
ou
un
entrepreneur.
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
6
7.
II.
Le
réseau
social
à
la
lumière
de
la
société
Partir
de
la
notion
de
réseau
pour
décrypter
les
nouvelles
formes
de
socialisation
nous
a
permis
de
voir
comment
conformer
nos
organisations
à
notre
objectif
:
être
présents
de
façon
efficace
sur
les
réseaux
numériques.
Reste
maintenant
à
aborder
les
outils
dont
nos
réseaux
sociaux
ecclésiaux
pourront
se
saisir.
En
effet,
la
présence
sur
ces
réseaux
s’avère
déterminante,
quand
on
sait
que
la
fréquentation
des
globale
des
sites
internet
français
est
en
baisse
depuis
2011.
Pour
rejoindre
le
public,
il
ne
faut
plus
attendre
qu’il
vienne
à
nous
mais
aller
le
chercher
là
où
il
se
trouve
:
sur
les
nouvelles
agoras.
En
outre,
alors
que
notre
société
laïque
relègue
la
religion
dans
la
sphère
du
privé,
sur
Facebook
ou
Twitter,
la
vie
de
chacun
s’étale
à
la
vue
de
tous.
Pour
reprendre
la
terminologie
du
psychanalyste
Serge
Tisseron,
l’intimité
devient
«
extimité
»
11
et
les
convictions
religieuses
s’invitent
ainsi
dans
le
débat
public
:
le
christianisme
est
chassé
par
la
porte,
mais
les
chrétiens
reviennent
par
la
fenêtre.
C’est
le
second
volet
de
ce
jeu
de
miroirs
:
voir
évoluer
des
groupes
humains,
«
in
real
life
»
peut
nous
aider
mieux
comprendre
les
règles
de
la
vie
sociale
connectée
et
à
nous
y
insérer
avec
plus
de
facilité,
voire
à
devenir
de
vrais
community
managers.
Multiplicité
des
contacts
Il
nous,
tout
d’abord,
faut
reconnaître
les
caractéristiques
propres
que
les
réseaux
numériques
ont
su
imposer
au
fait
social.
Tout
d’abord,
les
réseaux
sociaux
numériques
fondant
leur
succès
et
leur
modèle
économique
sur
le
nombre
de
leur
membres,
ils
cherchent
constamment
à
l’augmenter.
Pour
cela,
ils
lancent
chaque
internaute
dans
une
course
à
la
multiplicité
des
contacts
:
tout
est
fait
pour
vous
faire
tisser
de
nouveaux
liens.
La
règle
des
15012,
établie
en
1993
par
l’anthropologue
britannique
Robin
Dunbar,
dénombre
le
maximum
de
relations
suivies
simultanées
que
peut
entretenir
un
individu.
Force
est
de
constater
qu’elle
n’a
plus
cours
sur
Facebook.
L’expérience
du
«
petit
monde
»
réalisée
en
1967
par
le
psychologue
Stanley
Milgram
et
qui
a
abouti
à
la
règle
des
«
6
degrés
de
séparation
»
reliant
deux
personnes
aux
USA
sera
peut-‐être
aussi
bientôt
caduque.
Cette
pléthore
de
contacts
(je
n’ose
dire
«
d’amis
»)
induit
un
fractionnement
de
l’attention.
Le
psychanalyste
Serge
Tisseront
disait
ainsi
«
Le
fait
qu’une
personne
pense
à
moi
souvent
est
maintenant
remplacé
par
le
fait
que
beaucoup
de
personnes
pensent
à
moi
un
peu
».
En
termes
médiatiques,
on
parlerait
d’un
morcellement
de
l’audience,
qui
rend
plus
difficile
la
transmission
d’un
message
:
au
lieu
d’une
publication
dans
la
revue
du
diocèses
ou
du
mouvement,
il
faut
maintenant
des
quantités
de
«
partages
»
et
de
«
retweets
»
pour
toucher
un
même
public.
En
outre,
le
phénomène
s’accompagne
d’une
valorisation
du
carnet
d’adresses
:
une
marchandisation,
via
des
avantages
et
des
cadeaux
accordés
internautes
les
plus
populaires
et
qui
pousse
chacun
à
devenir
leader
d’opinion.
Et
ces
leaders,
le
community
manager
du
diocèse
se
doit
de
les
connaître
et
de
les
chérir.
11
Serge
Tisseron,
L'intimité
surexposée,
Ramsay
(rééd
Hachette,2003),
2001.
12
Règle
fondée
sur
l’étude
du
cortex
humain.
Le
nombre
semble
correspondre
à
la
taille
d’un
village.
Au
delà,
la
confiance
mutuelle
et
la
communication
ne
suffisent
plus
à
assurer
la
cohésion.
Peut-‐être
est-‐elle
aussi
liée
à
la
capacité
à
repérer
les
«
passagers
clandestins
»
dans
une
société.
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
7
8.
Nivèlement
des
relations
et
relations
faibles
En
outre,
on
assiste
à
un
nivèlement
des
relations,
la
plupart
des
réseaux
sociaux
en
ligne
ne
proposant
qu’un
ou
deux
niveau
ou
mode
de
contact
(«
amis
»
et
«
connaissances
»,
sur
Facebook).
Outre
la
question
du
sentiment,
qui
reste
comme
abandonnée,
une
telle
nomenclature
de
nos
carnets
d’adresses
pousse
à
la
multiplication
des
liens
faibles.
On
peut
s’en
inquiéter,
mais
aussi
percevoir
la
force
de
ces
liens
faibles.
Il
ne
faut
certes
pas
tomber
dans
la
cyber-‐utopie,
qui
voit
dans
la
révolution
libyenne
une
«
Emeute
BlackBerry
»
alors
que
seuls
320.000
libyens
sur
6
millions
avaient
accès
à
internet
:
là,
comme
au
Yémen,
le
rôle
de
la
télévision
et
de
l’armé
est
plus
important
qu’on
ne
le
croit.
Cependant,
la
mobilisation
autour
de
la
Manif
pour
tous
a
montré
combien
les
réseaux
sociaux
pouvaient
palier
le
silence
des
mass
médias
et
offrir
un
lieu
de
ralliement.
Peut-‐être
assistons-‐nous
vraiment
à
l’émergence
d’une
«
Wikipolitique
», 13
bien
qu’à
l’heure
des
cyber-‐révolutions,
le
principal
lieu
d’engagement
reste
la
rue
!
«
Big
brother
is
watching
you
»
A
l’heure
des
engagements
citoyens
sur
les
réseaux
sociaux,
le
développement
de
ce
que
l’on
appelle
maintenant
les
«
Big
Data
»14
permet
un
profilage
très
précis
du
client-‐
internaute.
Pour
cela,
les
informations
sont
collectées
par
des
systèmes
capables
de
déduire
un
divorce
prochain
de
la
liste
de
vos
achats
ou
de
repérer
vos
liens
de
parenté
en
suivant
votre
activité
sur
Facebook15.
Dans
ce
contexte,
«
si
vous
ne
payez
pas,
vous
n’êtes
pas
le
client
mais
le
produit
que
l’on
vent
»16.
La
donnée
est
l’or
du
XXIème
siècle.
Ces
technologies
de
profilage
sont
largement
employées
par
les
grandes
sociétés
informatiques
pour
bâtir,
autour
de
l’internaute,
un
monde
qui
lui
ressemble
de
plus
en
plus.
Depuis
2009,
Google
utilise
l’historique
de
vos
recherches
(57
paramètres
personnels) 17
pour
vous
proposer
des
réponses
toujours
plus
susceptibles
de
vous
plaire.
De
même,
Facebook
sélectionne
les
posts
de
vos
amis
pour
vous
proposer
les
plus
pertinents.
Sachant
que
les
contacts
que
les
réseaux
sociaux
s’établissent
de
proche
en
proche
et
qu’un
internaute
fait
facilement
confiance
à
l’avis
de
ses
pairs
sur
la
toile,
le
risque
d’auto-‐endoctrinement
est
fort
:
quand
je
regarde
le
Web,
j’aime
ce
que
je
vois,
car,
en
fait,
je
me
regarde
!
C’est
le
syndrome
du
«
Truman
show
»,
qui
bâtit
pour
chaque
utilisateur
un
monde
parallèle
à
son
image,
rendant
tout
débat
citoyen
impossible.
Vous,
qui
êtes
responsables
d’activités
numériques,
voyez
bien
la
conséquence
:
il
devient
de
plus
en
plus
difficile
de
faire
passer
une
information
au
delà
du
cercle
de
ceux
qui
sont
déjà
convaincus
et
de
savoir
si
l’on
a
effectivement
percé
la
bulle
catho.
13
Yann
Moulier
Boutang
14
Bases
de
données
si
importants
qu’elles
demandent
des
modes
de
traitement
spécifiques,
permettant
un
profilage
très
précis
du
client-‐internaute
15
Fellows
16
Andrew
Lewis
17
Cf
The
Filter
Bubble
(Eli
Pariser).
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
8
9.
Comment
Luther
devint
viral
?
Morcellement
de
l’audience,
difficulté
à
percer
la
bulle
des
internautes
déjà
convaincus
:
cela
pourrait
paraître
décourageant.
Pourtant,
il
est
bon
de
nous
souvenir
comment
Martin
Luther
imposa,
en
son
temps,
des
idées
différentes.
Certains
diront
qu’il
s’est
appuyé
sur
l’invention
de
l’imprimerie.
Ce
n’est
pas
faux,
mais
cette
invention
était
à
la
disposition
de
tous.
En
revanche,
il
a
compris
comment
combiner
une
technologie
de
publication
améliorée
avec
les
réseaux
sociaux.
Déjà
!
Et
son
expérience
nous
apporte
plusieurs
enseignements.
Elle
montre
comment
une
nouvelle
forme
de
média
donne
à
aux
membres
d’un
groupe
minoritaire
les
moyens
de
s’exprimer,
de
déclarer
leur
solidarité
et
d’organiser
leur
action.
S’exprimer,
tout
d’abord
:
Luther
cloua
ses
«
95
thèses
sur
la
puissance
des
indulgences
»
sur
la
porte
de
l’église
du
château
de
Wittenberg
le
31
octobre
1517.
Ses
contemporains
estiment
qu’il
leur
fallut
14
jours
pour
être
connues
dans
toute
l’Allemagne
et
quatre
semaines
pour
qu’elles
soient
familières
à
toute
la
chrétienté.
Le
buzz
du
siècle
!
Pour
obtenir
cela,
il
observa
quelques
règles
simples
:
• Ecrire
dans
un
langage
accessible
:
si
les
thèses
étaient
rédigées
en
latin,
les
libelles
et
pamphlets
furent
ensuite
écrits
dans
un
allemand
simple.
• Utiliser
un
réseau
décentralisé
(Cf
1ère
partie)
:
les
participants
étaient
invités
à
participer
à
la
distribution
de
l’information,
au
partage
(lecture
aux
illettrés),
• Rendre
à
César
ce
qui
est
à
César
:
o Les
textes
étaient
diffusés
gratuitement
et
sans
droits
d’auteur,
o La
réimpression
était
libre
et
tout
imprimeur
pouvait
gagner
de
l’argent
avec
les
textes
que
Luther
proposait
gratuitement,
• Ne
pas
avoir
peur
de
la
contradiction
:
les
lecteurs
étaient
invités
à
débattre
des
thèses
luthériennes,
• Diffuser
du
multimédia
:
les
textes
étaient
accompagnés
d’images
et
de
chansons
(sur
des
airs
connus
de
cantiques
religieux.
Des
règles
qui
ont
toujours
cours
et
dont
l’Eglise
institution
devrait
plus
largement
s’inspirer.
Le
réseau
social
permet
également
à
ses
membres
de
déclarer
leur
solidarité.
En
l’occurrence,
il
permit
aux
partisans
de
la
réforme
de
se
compter
et
aux
mécontents
de
se
découvrir
plus
nombreux
qu’ils
ne
le
pensaient.
Le
réseau
est
un
mécanisme
collectif
de
signalement.
Enfin,
le
réseau
permit
aux
réformés
d’organiser
leur
action.
A
bien
y
regarder,
c’est
à
peu
près
ainsi
que
qu’un
collectif
plutôt
spontané
a
agrégé
autour
de
lui,
par
des
actions
non
violentes
et
créatives,
un
grand
nombre
d’individus
«
non
encartés
»
pour
défendre
l’identité
du
mariage.
Certains
catholiques
ont
déjà
bien
compris
la
leçon.
J’ajouterais
une
règle
qui
n’avait
pas
cours
au
temps
de
Luther
mais
que
les
organisateurs
de
la
Manif
pour
tous
ont
très
bien
comprise
:
ne
pas
asséner
d’arguments
religieux
à
une
société
qui
ne
l’est
plus.
Les
défis-‐Facebook
Dans
le
déploiement
numérique
de
nos
réseaux
ecclésiaux,
chacun
part
à
la
chasse
aux
«
Like
»
et
cherche
à
développer
son
audience.
Quatre
défis
se
présentent
alors
à
nous.
Le
premier
consiste
à
être
des
créateurs,
pas
des
suiveurs.
L’Eglise
est-‐elle
condamnée
à
produire
le
dernier
lip
dub
ou
la
dernière
flash
mob
de
l’histoire
?
Si
créer
la
tendance
coûte
cher
et
n’est
pas
donné
à
tous,
nous
pouvons
au
moins
surfer
sur
la
vague
sans
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
9
10.
attendre
qu’elle
soit
passée.
La
courbe
de
diffusion
de
l’innovation
nous
montre,
en
l’espèce,
la
position
que
doit
adopter
le
surfer.
C’est
là
que
le
compagnonnage
avec
les
acteurs
de
la
culture
numérique
que
nous
avons
évoqué
entre
en
jeu
:
il
peuvent
nous
permettre
de
discerner
les
tendances
assez
tôt
pour
les
employer
à
tant.
Le
second
défi
consiste
à
ne
pas
être
prisonniers
du
buzz.
Dans
leur
course
à
la
notoriété,
les
catholiques
peuvent
parfois
céder
à
la
tentation
de
la
facilité
pour
se
faire
remarquer.
Comme
certaines
stars
sur
le
déclin
qu’aucune
émission
de
téléréalité
ne
rebute,
ils
sont
prêts
à
tout.
Pourtant,
peut-‐on
surfer
sur
tout
?
Peut-‐on
utiliser
la
bêtise
d’une
starlette
pour
faire
parler
du
pape
ou
parodier
à
l’infini
Bref
ou
Gangam
Style
?
A
ce
titre,
le
dernier
buzz
en
date
est
Harlem
Shake.
Faut-‐il
vraiment
lancer
le
notre
?
Le
danger
est
alors
de
tomber
dans
la
«
bad
buzz
»,
qui
dégrade
l’image
de
marque
autant
qu’il
vous
fait
connaître.
A
ce
titre,
deux
critères
issus
du
marketing
me
semblent
devoir
être
pris
en
compte
:
• Vérifier
le
lien
avec
le
produit
:
en
l’occurrence,
avec
la
Parole
de
Dieu
que
nous
avons
à
annoncer,
ou
avec
notre
action
pastorale.
• Apporter
une
réelle
valeur
ajoutée.
La
copie
conforme
ne
suffit
pas,
d’autant
plus
que
les
copies
de
copies
sont
souvent
moins
nettes
que
l’original.
A
ce
titre,
certains
annonceurs
excellent
dans
l’art
de
mettre
leur
produit
en
scène
et
de
surfer
sur
l’événement.
La
série
«
Bref,
je
suis
catho
»
de
la
Frassateam
me
semble
répondre
à
ces
deux
critères.
Il
faut
ensuite
garder
à
l’esprit
que
la
communication
sur
les
réseaux
sociaux
obéit
à
des
règles
et
des
méthodes
précises,
qui
peuvent
évoluer
mais
que
l’on
ne
peut
pas
vouloir
ignorer.
C’est
une
affaire
de
professionnels
:
on
se
forme,
on
embarque
des
créatifs
dans
l’aventure
ou…
on
paye.
Car,
un
buzz,
ça
coûte
!
L’exemple
de
#cetaituneblague
de
Carambar
est
assez
éclairant.
Enfin,
dans
un
monde
qui
survalorise
l’interactivité,
il
me
semble
important,
de
ne
pas
oublier
l’intériorité
:
montrer
que
l’on
peut
se
poser,
prendre
le
temps.
Que
l’on
peut
même
prier
connecté.
La
boîte
à
outils
Sans
aucune
ambition
présidentielle,
je
vous
signale
cependant
en
passant
quelques
éléments
de
la
boîte
à
outil
de
Facebook.
Une
étude
nommée
Eye
Tracking
a
ainsi
permis
de
repérer
les
parties
d’un
profil
Facebook
qui
attirent
le
plus
l’attention
et
de
reconstituer
le
cheminement
du
regard
d’une
zone
à
l’autre.
Cela
permet
de
se
concentrer
sur
les
parties
les
plus
vues.
Si
vous
ouvrez
une
page,
plutôt
qu’un
profil
particulier
vous
pourrez,
en
outre,
connaître,
pour
chaque
publication
:
• La
Portée
:
nombre
de
personnes
qui
l’ont
vue,
• Le
nombre
d’utilisateurs
engagés
:
ceux
qui
ont
cliqué
dessus,
• Le
nombre
de
personnes
qui
en
parlent
:
qui
l’ont
partagée,
commentée
ou
aimée,
• Le
pourcentage
de
viralité
:
rapport
entre
les
vues
et
les
actualités
engendrées.
Un
cabinet
de
marketing
a
également
mis
en
place
un
calcul
du
«
Q.I.
Facebook
»
des
grandes
marques,
permettant
de
savoir
si
elles
agissent
intelligemment.
Sans
espérer
entrer
dans
leur
classement,
on
peut
au
moins
noter
quelques
«
best
practices
».
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
10
11.
Il
y
a
une
vie
après
Facebook
Le
milliard
d’inscrits
sur
Facebook
nous
ferait
presque
oublier
qu’il
existe
d’autres
réseaux
sociaux.
Twitter,
certes,
mais
aussi
beaucoup
d’autres,
plus
spécialisés.
Outre
Flickr
pour
les
galeries
de
photos,
je
ne
saurais
trop
vous
inviter
à
aller
fureter
du
côté
d’Instagram,
qui
a
la
faveur
des
marques
de
luxe,
de
Pinterest,
qui
permet
de
réaliser
des
«
moodboards
»
(tableaux
de
tendances)
et
de
partager,
ou
de
Tumblr,
que
j’aime
beaucoup,
car
il
attire
des
artistes
très
créatifs.
Certes,
vous
pourrez
objecter
que
l’éparpillement
nous
guette.
Il
existe
cependant
des
solutions
de
multi-‐publication
comme
IFTTT,
qui
peuvent
nous
en
sauvegarder.
Conclusion
Les
réseaux
sociaux
en
maillage,
dans
la
vie
déconnectée
comme
sur
Internet,
me
semblent
présenter
deux
atouts
de
nature
à
nous
donner
le
courage
de
les
mettre
en
place.
Tout
d’abord,
la
structure
en
filet
est
plutôt
évangélique.
Elle
est
connaturelle
à
des
pécheurs
d’hommes
:
personne
n’y
est
au
centre
et
chacun
est
y
tramé
dans
un
réseau
de
pairs,
replacé
au
voisinage
de
son
prochain.
En
outre,
elle
invite
paradoxalement
les
pasteurs
à
jouer
pleinement
leur
rôle
de
leader.
Un
rôle
qui
n’a
rien
de
commun
avec
un
«
fonctionnaire
de
Dieu
»,
mais
consister
à
guider,
à
encourager,
à
donner
des
moyens
et
à
soutenir
un
peuple
qui
se
connecte
progressivement.
Tout
cela,
si
nous
n’oublions
pas
de
parler
aussi
de
l’essentiel
:
Dieu.
Mais
pas
Dieu
en
général.
L’internaute
n’y
accorde
guère
d’importance.
Il
faut
lui
parler
de
l’Emmanuel
au
sens
étymologique
:
«
Dieu
avec
nous
»,
ou
plutôt
Dieu
avec
lui
;
dieu
dans
sa
vie.
OPTIC
-‐
Eric
Salobir
o.p.
–
7
mars
2013
–
Notes
personnelles
11