La validation des applications santé, comment, par qui, sur quels critères et quand : Entretien avec David Sainati, président-fondateur de Medappcare
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TLM n° 107 Entretien avec David Sainati pdt de MedAppCare : De la certification de la E-santé
1. e n t r e t i e n S
TLM N° 107 AVR-MAI-JUIN 2017 7
NUL N’EST EN MESURE AUJOURD’HUI DE
DÉLIVRER UNE CERTIFICATION POUR DES
APPLIS SANTÉ OU DES OBJETS CONNECTÉS.
POUR Y PARVENIR, ASSURE DAVID
SAINATI, PRÉSIDENT-FONDATEUR DE
MEDAPPCARE, IL FAUDRA AU PRÉALABLE
QUE L’ÉTAT ÉDITE UN RÉFÉRENTIEL DE
CERTIFICATION ET UN SCHÉMA
D’ACCRÉDITATION DES ORGANISMES
EN CHARGE DE L’ÉVALUATION
TLM : Quel est le domaine d’activité de
MedAppCare ?
David Sainati: MedAppCare est une start-
up dont l’objet est d’évaluer et labelliser la
qualité des applications mobiles de santé. A
cette fin nous avons créé en 2012 un réfé-
rentiel d’évaluation qui comprend plus de
70 critères prenant en compte l’ensemble
des aspects pertinents —sécuritaires, médi-
caux, réglementaires et ergonomiques.
Nous travaillons avec des éditeurs de tous
types, institutionnels —tels que l’Assurance
maladie ou la Fondation Plan Alzheimer—,
start-ups ou industriels. Ils font appel à nous
pour améliorer la qualité de leurs services,
obtenir des recommandations d’améliora-
tion, valoriser la qualité de leurs applica-
tions et le cas échéant pour que celles-ci
soient labellisées. Notre référentiel a été
conçu en partenariat avec des institution-
nels de premier plan et en droite ligne avec
les recommandations des institutionnels en
charge de la protection des données per-
sonnelles, de la qualité des soins et de l’or-
ganisation du système de santé. J’ajoute
que notre réflexion se mène également au
niveau européen puisque je suis expert au-
près de la Commission européenne sur la
qualité de la Santé connectée.
TLM : La Haute Autorité de santé (HAS) a
publié en novembre dernier un « référen-
tiel de 101 bonnes pratiques pour favoriser
le développement d’applications et objets
connectés sûrs, fiables et de qualité ».
Comment accueillez-vous cette initiative ?
David Sainati : Très positivement, d’au-
tant que nous avons donc participé au
groupe de lecture au sein de la plateforme
de la HAS qui a élaboré ce référentiel.
Le sujet est aujourd’hui d’une actualité
brûlante : les applications de santé mobile
sont innombrables, plus de 250 000 dans
le monde, autour de 50 000 en France. En
cinq ans le marché a explosé et les chiffres
ne cessent d’augmenter. Le document de
la HAS aborde globalement tous les as-
pects pertinents pour un évaluateur.
TLM : Selon vous, ce référentiel sera-t-il
appliqué par les éditeurs ?
David Sainati: Sans doute, mais pas de fa-
çon exhaustive. Certains de ces critères sont
draconiens, notamment en termes de sécu-
rité, ce à quoi l’on pouvait s’attendre de la
part d’une instance officielle. Peu d’éditeurs
seront en capacité de s’y conformer rapide-
ment. Au stade où nous en sommes, ce réfé-
rentiel n’est pas obligatoire. Néanmoins le
document de la HAS joue un vrai rôle péda-
gogique pour faire progresser la qualité des
applications mobiles de santé. Les éditeurs,
souvent un peu perdus, peuvent ainsi y trou-
ver les orientations préconisées par les auto-
rités. En réalité ce document sert en premier
lieu aux acteurs évaluateurs, tels que Med-
AppCare. Nous en avons donc pris connais-
sance et extrait la substantifique moelle
pour améliorer notre propre référentiel.
TLM : En quels termes se pose la ques-
tion de la certification des applis santé ?
David Sainati: Aujourd’hui personne ne
peut délivrer de certification. Pour cela il
faudrait que des organismes, le nôtre ou
d’autres, aient eux-mêmes obtenu une
accréditation les autorisant à le faire. Encore
faudrait-il que l’État développe un référen-
tiel d’accréditation spécifique permettant
d’évaluer les acteurs évaluateurs eux-
mêmes. Ce qui n’est pas une mince affaire
et nécessite un à deux ans de travail pour
être pleinement opérationnel. Parallèle-
ment les recommandations de la HAS peu-
vent servir de base à un référentiel de certi-
fication en convertissant ces recommanda-
tions en critères d’évaluation. Pour être
clair, le référentiel récemment publié par la
HAS ne fait que formuler des recommanda-
tions. Le jour où l’État décidera de mettre
en place un dispositif de certification, il de-
vra éditer un véritable référentiel de certifi-
cation et un schéma d’accréditation des or-
ganismes privés en charge de l’évaluation.
TLM : Quel est alors le rôle du docu-
ment de la HAS dans la mise en place
d’un dispositif d’accréditation ?
David Sainati : Le document de la HAS
pourrait servir de base de travail et de dis-
cussion. Il pourra être utilisé comme tel le
jour où les pouvoirs publics souhaiteront
aller plus loin. Car mettre en place un dis-
positif de certification (et d’accréditation)
requiert de la part de l’Etat de collecter les
avis des parties prenantes : Ordres profes-
sionnels, associations de patients et d’usa-
gers, syndicats professionnels, industriels,
différentes agences en France et en Europe,
etc. Ces protagonistes devront se pronon-
cer de manière consensuelle sur les critères
d’évaluation et de certification.
TLM : Pensez-vous que l’on puisse par-
venir rapidement à un consensus ?
David Sainati : Le document de la HAS a
bien déblayé le terrain et nous permet d’y
voir plus clair. Manifestement le travail ne
devrait pas s’arrêter à ce stade. Il faudra me-
ner un travail constructif et efficace pour que
toutes les parties puissent se mettre d’accord
autour d’un référentiel commun le jour J.
Nous appelons ce jour de nos vœux, nous
avons tout intérêt à faire tout ce qu’il faut
pour accélérer le mouvement et ce dans la
continuité du travail de fond que nous me-
nons depuis plusieurs années sur ce sujet.
Propos recueillis par
Bernard Maruani ■
e n t r e t i e n S
DÉJÀ 50 000 APPLIS SANTÉ EN FRANCE…
De la certification de la e-santé…
David Sainati : Les « 101 bonnes pratiques » de la
HAS jouent pour l’heure un vrai rôle pédagogique