1. LA LOIRE ET SA REGION
Actualité
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« On sait s’adapter si une mère
ou un père est en congé parental »
Législation.
Le texte, voté en première lecture à
l’Assemblée nationale, vise à inciter les pères à interrompre
leur carrière professionnelle pour s’occuper de leurs
enfants. Exemple à Auchan Villars, qui emploie 600 salariés,
où l’on ne semble pas perturbé par cette réorganisation.
«S
ept hôtesses de
caisses sur dix
prennent un
congé parental », annonce Joël
Robert, sans sourciller. Pour le
responsable des ressources
humaines de l’hypermarché
Auchan de Villars, ce n’est en
aucun cas un problème. « C’est
d’ailleurs tout à fait normal, ce
sont des femmes majoritairement jeunes, qui sont donc en
âge d’avoir des enfants », explique-t-il. Particulièrement compréhensif ?
« Leur jeunesse est aussi l’assurance d’une meilleure adaptabilité au métier, de dynamisme
et d’un bon rapport avec la
clientèle », assure le DRH. C’est
d’ailleurs pour ces qualités que
l’enseigne les recrute. À tel
point que trois caissières sur
quatre sont des jeunes femmes.
Concrètement, comment
Auchan gère ces mamans qui
choisissent d’élever bébé à la
maison ?
« Si une future mère nous dit
qu’elle envisage de prendre
seulement six mois de congé
parental, on recrute une personne en contrat à durée déterminée pour la remplacer sur
son poste », expose Joël
Robert.
« En revanche, si dès le départ,
elle arrive à se projeter, et
qu’elle nous annonce qu’elle va
être absente un an, deux ans
voire trois ans, alors on embauche une personne en contrat à
durée indéterminée pour la
remplacer. »
À son retour, la jeune mère
n’aura, certes, pas l’assurance
En chiffres
Seul 1,5 % des hommes
sont restés à la maison
pour garder bébé en 2012
En 2012, la Caisse d’allocations
familiales de la Loire a versé
27,5 millions d’euros à 7 547
bénéficiaires du Complément de
libre choix d’activité (CLCA). Pour
rappel, il s’agit d’une allocation
mensuelle de 572 euros maximum, versée aux parents désireux
de réduire ou de cesser totalement leur activité professionnelle
pour s’occuper de leur enfant de
moins de 3 ans, et 388 euros s’ils
sont déjà bénéficiaires de l’allocation de base de la Paje (Prestation
d’accueil du jeune enfant). Seul
1,5 % d’hommes ont cessé totalement leur activité pour s’occuper
de leur enfant, âgé de moins de 3
ans. Un chiffre qui monte à 4 %
pour les papas qui ont choisi de
travailler à temps partiel. Dans
3 % des cas, le papa et la maman
ont décidé, tous les deux, de ne
travailler à temps partiel dans la
limite d’un taux plein. Donc dans
93 % des cas, c’est la femme qui a
bénéficié du congé parental.
À Auchan Villars, les caissières sont majoritairement jeunes. Dès lors, l’enseigne sait que les congés maternité
sont courants. Aussi, elle s’adapte en conséquence. Photo Claude Essertel
I
de retrouver son poste laissé
pour rester à la maison. « Mais,
dans le même métier », assure
le responsable des ressources
humaines. En clair : si une salariée travaillait au rayon alimentaire, à son retour, elle sera
positionnée sur un emploi
identique mais pas peut-être
dans le secteur de l’habille-
ment.
« À cause des horaires contraignants de la grande distribution, en contrepartie on est
conciliant avec nos employés
sur d’autres domaines », assure
ce DRH.
Que des hommes puissent
dorénavant laisser leur blouse
au vestiaire pour s’occuper de
leur progéniture, « ce ne sera
donc pas un problème »,
estime ce DRH. « On a une élasticité dans notre métier, avec
des périodes de vente plus ou
moins c hargées, qui nous
permet de nous adapter constamment », argumente cet
homme. I
Véronique Miot
« Ça ne correspond pas à la réalité
de ce qui se passe en entreprise »
« En France, nous disposons
déjà d’une politique familiale très
développée. Le congé parental
existe et n’est pas toujours
utilisé. Ce volet de la réforme sur
la parité homme-femme ne
correspond donc pas à la réalité
de ce qui se passe en entreprise », estime Eric Le Jaouen, le
président du Medef Loire. Autant
dire que le représentant des
dirigeants d’entreprises de la
Loire ne voit pas d’un très bon
œil, ni l’allongement du congé
« Favoriser un meilleur partage
des responsabilités parentales »
Régis Juanico, Député PS de la Loire
« Aujourd’hui 96 % des bénéficiaires de la prestation qui finance le congé parental sont des femmes. Or, mieux équilibrer les responsabilités parentales est la
condition indispensable pour réaliser l’égalité professionnelle, car une année d’arrêt professionnel
conduit à 10 % de baisse de salaire une fois le retour à l’emploi effectué. C’est pourquoi, le Parti
socialiste a initié cette réforme du congé parental en prestation partagée à l’éducation partagée de
l’enfant afin de favoriser un meilleur partage des responsabilités parentales. Ainsi, les parents d’un
seul enfant qui aujourd’hui ont droit à six mois de congé parental pourront prendre six mois de plus à
condition que le second parent en soit bénéficiaire. À partir de deux enfants, la durée du congé parental restera de trois ans à condition que les six derniers mois soient pris par le second parent, sinon elle
sera raccourcie à deux ans et demi. Et après une expérimentation sur plusieurs territoires, seront
généralisés de nouveaux dispositifs d’accompagnement de retour à l’emploi pour les personnes
ayant pris un congé parental (droits aux formations professionnelles renforcées, accompagnement
par Pôle emploi… et aussi une priorité dans l’accès à un mode de garde). D’ailleurs, cette réforme
s’accompagne d’un plan ambitieux pour l’accueil de la petite enfance, avec la création de 275 000
places d’accueil pour moins de 3 ans, dont 100 000 créations de places en crèche, 100 000 chez
des assistantes maternelles, et 75 000 solutions d’accueil supplémentaires à l’école maternelle. »
parental pour le premier enfant,
ni l’incitation à ce qu’il soit partagé entre les hommes et les
femmes. « Ça va renforcer les
inégalités entre les PME et les
plus grosses structures qui
peuvent plus facilement s’organiser quand un salarié est absent
longtemps. Sur une structure de
moins de dix salariés, il est
évident que cela aura un impact
sur la vie de l’entreprise. »
Un sentiment que partage Daniel
Villaréal. « Ça va poser un pro-
blème quand quelqu’un qui
possède un savoir-faire va partir
de l’entreprise durant six mois.
Impossible de le remplacer :
nous n’aurons pas le temps de
former quelqu’un qui soit opérationnel pour seulement dix
mois », s’alarme le président de
la CGPME 42. Même si M. Villaréal concède que « cette mesure
peut apparaître sympathique de
prime abord, notamment pour
les hommes qui ont envie de
profiter de leur bébé. »
« S’absenter pendant plusieurs mois
sera difficile chez les artisans »
Paul Salen, Député UMP de la Loire
« La loi en discussion sur l’égalité entre les femmes et les
hommes est un fourre-tout où tout est mélangé. C’est
dommage. Sur le volet congé parental, on peut être d’accord sur le fond.
La société évolue. Le partage des tâches est inévitable. Nous nous rapprochons du modèle des pays scandinaves. Cependant, la mise en place
de ce congé parental pour les pères me paraît difficile dans certains cas.
Dans les grandes entreprises, des salariés pourront s’absenter pendant
plusieurs mois sans problème.
En revanche, dans les petites entreprises, dans les professions libérales
et surtout chez les artisans, la prise de ce congé sera compliquée. Souvent les artisans travaillent avec un seul salarié. Comment vont-ils faire
pour s’en séparer pendant la durée du congé ?
Or, cette loi est censée s’appliquer à tous les pères. Je pense que ce ne
sera pas possible. Vouloir légiférer sur ce sujet ne résoud pas tout. Nous
constaterons que selon l’entreprise où travaillent les pères, l’obtention
de ce congé parental ne sera pas facile. »