1. Séquence 2 :
Etats-Unis – Brésil : rôle mondial, dynamiques territoriales
Introduction :
Les Etats-Unis et le Brésil sont les deux grandes puissances du continent américain. Elles disposent de nombreux
points communs : l’immensité de leur territoire qui leur fournissent d’abondantes ressources naturelles, une
population principalement d’origine européenne (colonisation) et africaine (esclavage), un territoire
progressivement intégré d’Est en Ouest.
Cependant la puissance des deux Etats est très différente. Les Etats-Unis sont la première puissance mondiale
depuis le début du XXème siècle alors que le Brésil est une puissance émergente dont l’influence est
principalement régionale.
Quel rôle mondial jouent les Etats-Unis, puissance mondiale, et le Brésil, puissance émergente ?
Quels dynamiques animent leurs territoires ?
I. Le rôle mondial des Etats-Unis et du Brésil
1) Deux poids lourds de l’économie mondiale
Les Etats-Unis et le Brésil sont deux grandes puissances économiques (1ère ou 2ème pour les Etats-Unis, 7ème ou 8ème
puissance mondiale pour le Brésil selon les modes de calcul).
Les Etats-Unis dominent largement le Brésil : son PIB est plus de 10 fois supérieur à celui du Brésil et
représente 20 % du PIB mondial.
Les Etats-Unis représentent 26 % de la production industrielle mondiale et 20 % de la valeur de la production
agricole.
Les Etats-Unis sont le 2ème exportateur mondial, le Brésil est 25ème. La valeur de ses exportations est 8 fois
supérieure à celles du Brésil. Cependant, alors que la balance commerciale du Brésil est à l’équilibre, celle
des Etats-Unis est fortement déficitaire.
Sur les 500 premières FTN mondiales, 133 sont américaines et seulement 7 sont brésiliennes. Parmi les 100
premières, 54 sont américaines.
Dans le domaine financier, le poids des Etats-Unis est écrasant : rôle du dollar, places boursières (Wall
Street, Chicago…). La bourse de Sao Paulo n’est que la 44ème mondiale.
Les Etats-Unis attirent près de 20 % des IDE mondiaux et ¼ des IDE sont d’origine américaine.
Cependant le Brésil s’affirme sur la scène économique. Son taux de croissance jusqu’en 2013 a été très
important.
Sur le plan industriel, le Brésil s’affirme dans le domaine de l’énergie (Petrobras, 1ère entreprise brésilienne,
58ème mondiale), de l’aéronautique (Embraer, 3ème constructeur mondial d’avions de ligne derrière Airbus et
Boeing)
Dans le domaine agricole, la modernisation de l’agriculture dans les années 60 a fait du Brésil une grande
puissance agricole, productiviste et exportatrice. Le Brésil, est le 1er producteur et exportateur de café,
oranges et sucre, 1er exportateur de viande bovine et de volailles, 2ème producteur et exportateur de soja…
2. 2) Une influence politique et une puissance militaire très inégales
Le Hard Power des Etats-Unis est de très loin le plus puissant au monde et surclasse largement celui du Brésil dont
l’influence est plus régionale :
- L’influence politique des Etats-Unis est mondiale et sans équivalent. Néanmoins, à l’échelle régionale, le
Brésil apparait comme un contrepoids à la domination des Etats-Unis. Le pays s’affirme comme l’un des
leaders des pays émergents, critique l’impérialisme des Etats-Unis (notamment l’implantation de bases US
en Colombie), mène une politique étrangère indépendante (ouverture à l’Iran…). Malgré tout, bien qu’il
fasse partie du G20, le Brésil ne dispose pas d’un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU.
- Le poids militaire des deux pays n’est pas comparable.
Les Etats-Unis disposent d’un budget militaire 18 fois plus élevé que le Brésil (600 milliards de dollars
contre 33). Ils disposent d’un complexe militaro-industriel très puissant qui leur permet de produire
les armes les plus sophistiquées pour équiper l’armée américaine et exporter massivement (1er
vendeur d’armes au monde).
Les Etats-Unis sont la seule puissance militaire planétaire, capable d’intervenir partout sans l’aide
d’alliés grâce à sa puissance terrestre, navale et aérienne (« gendarmes du monde »). Ils sont à la tête
de l’OTAN.
Le Brésil n’est pas une grande puissance militaire (14ème rang mondial et 2ème armée du continent
après celle des Etats-Unis). Ses missions principales sont la défense de son immense territoire.
Le pays a renoncé à se doter de l’arme nucléaire à la fin des années 80.
Contrairement aux Etats-Unis, le Brésil n’intervient pas à l’extérieur de ses frontières, en dehors de
la fourniture de casques bleus pour des opérations de maintien de la paix, comme en Haïti depuis
2006.
Néanmoins, le Brésil s’est actuellement lancé dans un vaste programme de modernisation de ses
armées pour lui donner les moyens de jouer un plus grand rôle sur la scène internationale,
conformément à l’orientation de la politique étrangère du pays.
Pour ne pas dépendre des Etats-Unis, le Brésil s’est principalement tourné vers la France (avions,
sous-marins, porte-avions, hélicoptères…).
3) Un rayonnement culturel très déséquilibré
Le Soft Power des deux pays, c’est-à-dire l’attractivité et le degré de fascination qu’exercent leur modèle, n’est pas
comparable.
- Malgré les critiques et les résistances, le modèle américain demeure très attractif et son rayonnement est
planétaire. Le pays demeure la 1ère destination touristique, attire les étudiants et les migrants les mieux
formés, son modèle culturel est universel (couverture médiatique, généralisation des modes de
consommation…). L’American Way of Life et le « rêve américain » ont gardé leur force d’attraction.
- Le Brésil a un rayonnement davantage régional (production de télénovas, football…). Néanmoins,
l’organisation de la Coupe du monde de football en 2014 et des Jeux Olympiques en 2016 ont permis au
Brésil de bénéficier d’une attention mondiale et révèle le rôle que souhaite jouer le Brésil dans la promotion
de son Soft Power à l’échelle mondiale.
3. II. Les dynamiques territoriales de deux Etats-continents.
1) L’appropriation des espaces de deux Etats-continents
La colonisation européenne des deux Etats s’est faite à partir du littoral atlantique (fin du XVème siècle par les
Portugais pour le Brésil, début du XVIIème siècle par les Anglais et les Français pour les Etats-Unis). C’est pourquoi
ce sont toujours les espaces les plus peuplés aujourd’hui.
Dans les deux cas, le processus d’appropriation des territoires s’est fait par une progression vers l’Ouest, tout en
reléguant ou en exterminant les populations indigènes.
Aux Etats-Unis, l’appropriation du territoire (9,8 millions de km2, 3ème rang mondial) est achevée. Le
territoire est maîtrisé et valorisé. Les réseaux de communication sont denses et les infrastructures
performantes : les Etats-Unis accueillent plus de 30 % du trafic aérien mondial (5 aéroports parmi les 10
premiers au monde) et disposent de 30 % du réseau mondial de chemin de fer et de 95 000 kms
d’autoroutes.
Les ressources du territoire sont importantes :
60 % du territoire est utilisable pour l’agriculture (Grandes plaines du Midwest), mais seulement la
moitié est exploitée.
Le pays possède les réserves importantes de charbon (2ème producteur mondial), de gaz (1er
producteur mondial, grâce au gaz de schiste) et de pétrole (3ème producteur mondial)
Potentiel hydroélectrique important.
Au contraire, l’appropriation du territoire brésilien (8,5 millions de km2, 5ème rang mondial) n’est pas
achevée. Le processus des fronts pionniers se poursuit en Amazonie.
Les réseaux sont à la fois insuffisants et déséquilibrés : le réseau routier et autoroutier est concentré au sud
et au nord-est mais seules 12 % des routes sont goudronnées. 7 % seulement des lignes de chemin de fer
sont électrifiées.
Le pays est une grande puissance agricole. La réserve de terres agricoles est considérable (3,4 millions de
km2) et en augmentation avec les défrichements. Le Brésil et les Etats-Unis sont est les plus gros
producteurs mondiaux d’agrocarburants.
2) Les territoires intégrés à la mondialisation
Les territoires des Etats-Unis et du Brésil sont marqués par la littoralisation des hommes et des activités
(65% des Américains, 85% des Brésiliens. 8 des 10 grandes métropoles américaines et brésiliennes).
L’organisation de l’espace des États-Unis reflète sa puissance. Le Nord-est y joue depuis longtemps
un rôle structurant en concentrant le cœur des pouvoirs économique et politique dans des villes au
rayonnement mondial. Mais le territoire américain se fait de plus en plus polycentrique comme en
témoigne le dynamisme de la Sun Belt où ont émergé des pôles urbains au poids démographique et
fonctionnel croissant. La présence mondiale des Etats-Unis et le processus de mondialisation de
l’économie provoquent ainsi un glissement du centre de gravité économique du Nord - est vers les
régions périphériques de la Sun Belt.
La Sun Belt s'étend de Seattle à la côte atlantique jusqu'au sud de Washington. Elle accueille près de
45 % de la population américaine et surtout est à l’origine de 70 % de l’accroissement
démographique des Etats-Unis depuis les années 60. Ce dynamisme est lié au développement de
l'interface Asie-Pacifique et Mexique-Amérique Latine, à l'implantation d'industries de haute
technologie, d’aéronautique, spatiales et de défense, à la présence d'une main d'œuvre peu chère
et souvent immigrée, à l’abondance des ressources en sous- sol (hydrocarbures) et au
développement de la société de loisirs.
4. Cependant, ce dynamisme est discontinu et il faut parler d'archipels de croissance :
La Californie, 8ème PNB mondial, 36,7 millions d'hab. fortement métropolisée. 1er Etat
industriel notamment grâce à la haute technologie (Silicon Valley) ; 1er Etat agricole (10 % de
la production).
La Floride, 1ere région touristique au monde (50 millions de touristes/an). Industrie de haute
technologie (NASA à Cap Kennedy), agrobusiness, et surtout place financière majeure avec
Miami
Le Texas, 2ème Etat pour sa population (25 millions d'habitants) et pour ses productions
agricoles, Houston 1er port pétrolier du continent.
Au Brésil, le Sud et le Sudeste concentrent 57 % de la population sur 18 % du territoire, les 2/3 du
PIB brésilien et 90 % de la production industrielle. Le seul Etat de Sao Paulo concentre 22 % de la
population sur 3 % du territoire et réalise 33 % du PIB.
Les deux pays sont aussi marqués par le métropolisation de leurs territoires (les villes concentrent les
activités, l’innovation et les pouvoirs de décision). Le taux d'urbanisation est de 87% au Brésil, de 82% aux
Etats-Unis.
Aux Etats-Unis, la Megalopolis de Boston à Washington demeure un centre d’impulsion de portée
mondiale, ainsi que l'ancienne Manufacturing belt (de Chicago à la côte atlantique) qui réalise
encore 40 % de la production industrielle. Les métropoles de la Megalopolis concentrent les centres
de décisions (CBD) économiques et politiques (75% des sièges sociaux, Bourses de Wall Street et de
Chicago, ONU, FMI, Pentagone). Elles possèdent 16 des 25 premières universités (Yale, Harvard,
Princeton). En 2014, Le poids économique de la Mégalopolis équivaut à celui de l'Allemagne.
Dans la Sun Belt, les autres métropoles d’importance sont Seattle (Aéronautique, informatique), Los
Angeles (2ème ville du pays, industrie du cinéma), San Francisco (informatique dans la Silicon Valley),
Houston (aérospatial), Miami (hautes technologies…).
Au Brésil, les métropoles du Sud et du Sudeste concentrent la puissance économique (4/5ème du PIB
du Brésil). São Paulo est au cœur de la plus vaste région industrielle de l’Amérique du Sud, abrite la
bourse et de nombreux sièges sociaux. 50 % des sièges sociaux des 500 premières entreprises
brésiliennes et étrangères sont à Sao Paulo. C'est le 1er port et 1er aéroport d'Amérique Latine. Cette
situation fait d’elle une ville monde : c’est la capitale économique, mais pas politique (Brasilia).
Les espaces transfrontaliers sont animés par des flux importants.
Aux Etats-Unis : Puget Sound, Main Street America, Mexamérique. Espaces dynamisés par l’ALENA.
Au Brésil renforcement des axes pour désenclaver les régions intérieures et relier les économies du
Mercosur (frontières Brésil/Argentine/Paraguay dans l'état du Sud.
3) Les déséquilibres territoriaux, plus accentués au Brésil qu’aux Etats-Unis
Aux Etats-Unis, le sud-est du pays est défavorisé du fait d’importantes inégalités socio-spatiales qui
touchent particulièrement les afro-américains. C’est également le cas dans le sud-ouest avec les latinos.
Au Brésil, les inégalités sont très importantes :
Le Nord et surtout le Centre-Ouest sont des périphéries en voie d'intégration dynamisés par la
politique de conquête des territoires (Fronts pionniers, Brasilia). Mato grosso ("grosse foret" en
portugais) : région grande comme 2x la France : ferme du Brésil. 1/3 de l’éthanol mondial y est
produit. Déboisage énorme, paysage de champs de cannes à sucre.
Le Nordeste avec Recife, Salvador de Bahia est une périphérie délaissée qui souffre d'un mal-
développement : 22 % d'analphabétisme contre 4,5 % à Brasilia, mortalité infantile 2 x > à celles du
Sudeste, 20 % des foyers n’ont pas encore l’eau courante. Près de 50 % des exploitations (moins de
5. 10 ha) occupent 2,2 % des surfaces agricoles, alors que 2,2 % des exploitations (plus de 500 ha)
occupent 56,3 % des terres. 45 % de la population noire vit au Nordeste.
L'Amazonie couvre 54 % du territoire dont le pôle dynamique est Manaus grâce aux zones franches.
Le problème de la déforestation est toujours d’actualité car elle a atteint un seuil problématique,
fruit de l’accumulation des politiques précédentes (en 30 ans, on a supprimé l’équivalent du
territoire de la France + Belgique + Luxembourg + Suisse + 50% de l’Allemagne).
Conclusion :
Le rôle mondial des Etats-Unis et du Brésil ne sont pas comparables tant l’influence des Etats-Unis sur le monde est
importante, alors que celle du Brésil est essentiellement régionale. L’organisation et les dynamiques territoriales
des Etats-Unis et du Brésil reflètent leur intégration à la mondialisation.
Alors que les Etats-Unis souhaitent conserver leur rang et leur hégémonie dans la cadre de la compétition mondiale,
le Brésil souhaite jouer un rôle plus global. Il devra pour cela atténuer les fortes disparités spatiales de son
territoire.
