Intervention dans le cadre du CITIC, organisé par le Grand Lyon, en partenariat avec l'école nationale des Beaux-Arts.
Programme sur: http://www.millenaire3.com/CiTIC-Numerique-et-espaces-urbains.122+M57585664d24.0.html
Cette présentations a comme objectif de présenter, sur le territoire du Grand Lyon, la position et les actions possibles d'acteurs de proximité dans le développement de la « ville numérique ».
Un postulat, voir une évidence de départ : l'identité numérique d'une ville se construit avec et par ses habitants. Cela implique donc une reconnaissance de leur rôle et leur accompagnement dans le développement des interconnexions, y compris dans ce qu'elles produisent pour les espaces urbains.
Les nouvelles formes possibles de sociabilité, les nouvelles modalités d'occupations de l'espace/des espaces urbains, les nouveaux outils déployés et les usages qui se développent de façon continue signifient pour les individus : - des capacités d'adaptations technologiques et cognitives - le besoin de comprendre les enjeux de ces évolutions - la nécessité de s'inscrire dans ces changements en lien avec ses propres besoins, son « expérience » Sans l'ensemble de ces éléments peu de chances que les personnes puissent faire des choix « éclairés « autour de leur place dans la ville numérique.
La tentation peut être forte de se « laisser porter » par des logiques de consommation de services, applications, contenus, qui sont proposés de façon exponentielle
En n'investissant pas suffisament sur les démarches de participation, de mutualisation, d'expression, voir de co-construction facilitées par les outils numériques le risque est grand de « laisser de coté » de nombreux habitants, de créer de nouvelles formes d'exclusion à la vie numérique de la cité. Je pense aux personnes déjà « en marge » des pratiques numériques de base, personnes à faibles revenus, faible niveaux de formation, personnes handicapés, âgées, etc. Pour rappel, 9% de la population française en situation d'illettrisme.
Cette « ville numérique » est-il possible d'en ouvrir les contours, les formes, afin qu'elle aille vers l'inclusion de l'ensemble de ses habitants. Inclusion qui sous entend que chacun y a véritablement sa place « dès le départ », plus qu'intégration qui définit un processus de l'extérieur vers l'intérieur...
En effet, même si les données sur les pratiques numériques vont vers « toujours plus » d'activités en ligne, des inégalités fortes persistent. Ces inégalités de déportent « de l'accès à » (ordinateur, réseaux, etc.) à « l'usage de ». Nous ne sommes pas égaux devant nos usages du numérique ! Il ne s'agit pas seulement d'un inégalité dans l'agilité que nous avons façe aux outils (qui caractérisent les + jeunes, les plus diplômés, etc), mais plutôt dans la façon dont chacun « trouve sa place » dans les nouveaux lieux de conversation, délibération, création, etc. Par ailleurs l'agilité technique ne présume pas de la capacité à « faire sens ».
Afin que le « doute » ne l'emporte pas dans des franges importantes de la population, que de nouvelles barrières ne s'érigent pas, une des clés est....
La « mise en compétences numériques » des individus. Ces compétences ne sont pas innées, elles évoluent dans le temps et demandent d'être adressées dans différents champs et temps de vie : école, famille, environnement professionnel, formation tout au long de la vie. Etre équipé d'une « culture numérique » est, pour tous, et chacun, en fonction de ses besoins...
Le pré requis pour pour évoluer d'une sidération/fascination face aux outils et contenus proposés à la possibilité d'une « mise en mouvement »
Cette mise en mouvement permet aux habitants de la « ville numérique » de contribuer de façon significative à la vie de leur territoire, voir même d'en co-construire la vision, et l'évolution.
Quand les habitants d'un territoire vont construire une cartographie libre et ouverte de leur territoire, par exemple en s'appuyant sur le projet Open Street Map ( www.osm.org ) c'est une réappropriation de l'espace urbain qui est en cours. Et, dans le même temps se constituent des « biens communs numériques », mobilisables pour différents projets, sous différentes formes.
L'enjeu est donc, comment à partir de la capacité d'avoir aux réseaux, aux contenus, peut et doit se développer la possibilité de devenir un acteur à part entière de son territoire physique et numérique.
Cette évolution dynamique de « l'accès au numérique » à « l'agir via le numérique » a été récemment formalisé par les canadiens. Nous n'allons pas détailler cette évolution, mais regarder de plus près
Des outils, des projets qui vont permettre à chacun de devenir des « artisans » de la ville numérique. Ces outils sont essentiellement ici des outils d'accompagnement, d'éducation et de médiation. Sur ce territoire (Grand Lyon), il existe une variété d'acteurs qui se sont emparés de ce besoin « d'appropriation citoyenne du numérique ».
Dans le champ de la culture et de la création, dans l'accompagnement des publics se fait aussi bien dans les bibliothèques/médiathèques que par des acteurs qui se sont emparés de la façon dont les outils numériques pouvaient contribuer à de nouvelles formes de production et de diffusion de la création.,
Par exemple, le festival Art is Chaud travaille autour de la culture libre et propose, pour différents formes de création de mettre en avant les possibilités qu'offrent des formes nouvelles de partage de la production culturelle.
L'association AADN rassemble des artistes numériques, pour certains ancrés sur un territoire « hyper-local » (La Guillotière) et différents projets sont développés afin d'engager les habitants dans le processus d'appropriation culturelle en lien avec le territoire. Le projet «Les hommes debout » a combiné captations sonores, visuelles, installations afin de restituer la mémoire d'un territoire défini, de la partager avec ses habitants, et, maintenant au delà.
Au sein des Espaces Publics Numériques (EPN) se développent progressivement des projets qui permettent au delà d'activités d'initiation à l'utilisation des outils numériques de mobiliser le numérique comme « activateur » de projets, de mémoire, de participation et de socialisation.
Sans les décrire tous en détails, mais pour illustrer la façon dont ces projets sont à la fois « hyper locaux » et « hyper liens » dans des ensembles plus vastes, je mentionnerai la façon dont WikiGuill', sur la base d'un outil collaboratif et d'une animation menée par la Salle des Rancy donne à voir la richesse des initiatives d'un quartier. Ce site est alimenté par les acteurs du territoire eux-mêmes.
Dans un autre registre, la [email_address] de Grigny, projet né sur un territoire précis, axé sur des projets de développement des usages du numérique a aujourd'hui une place particulière dans un espace élargi, notamment autour des projets d'éducation aux médias, d'expérimentations, etc.
Autre exemple, la WEB TV de Saint-Priest, née à l'initiative du Centre Social de la Carnière est résolument centrée sur un projet de mobilisation sociale autour du numérique.
Le développement de ces projets, comme nous l'avons vu précédemment, implique que les individus ont une culture numérique. Et la question de l'accompagnement du développement de celle-ci reste problématique. L'école fait et évolue dans ses pratiques, essentielles dans la démarche d'éducation, mais elle ne touche pas tous les publics, les EPN de proximité sont insuffisamment identifiés et ont du mal à répondre à l'ensemble des demandes qui leur sont adressées. Cette culture numérique et avancer dans la compréhension des enjeux revient, entre autres, à se poser la question de l'éducation au numérique.
Vive la culture numérique, cycle de conférences animées par le réseau des BM de Lyon, en partenariat avec Doc Forum, s'empare des thématiques du numérique et de nos constructions culturelles.
Fréquences Ecoles, parmi ses nombreux projets autour de l'éducation à l'image travaile sur des territoires de proximité pour des projets expérimentaux qui permettent à des jeunes de « déconstruire » des images pour apprendre à fabriquer leur propre vision de leur territoire.
Ces projets, non exhaustifs, illustrent un tryptique possible pour définir les missions des médiateurs numériques existants et en émergence pour permettre à chacun d'habiter, de comprendre et de créer dans la ville numérique.
Ces médiateurs numériques sont les « interfaces humaines » qui permettent de s'engager de façon élcairée dans la co-construction, de nouvelles formes de vivre ensemble sur les réseaux. Ces médiateurs numériques ne sont pas seulement des techniciens, ce sont des acteurs sociaux, culturels, du développement local, qui dans le cadre de leur projets et missions s'impliquent dans la façon dont le numérique change la place des individus dans la cité. Ils se trouvent dans des lieux variés et leur complémentarité doit être recherchée et renforcée.
Au carrefour des différentes « familles » de médiateurs numériques, se trouvent les « Espaces Publics Numériques » et de nouveaux lieux en émergence. Creuset de rencontres, de frictions, d'expérimentations, de « faire au quotidien », lieux ouverts et hybrides qui restent à développer et accompagner sur le territoire. Penser la ville numérique implique donc de s'interroger sur cette place des « passeurs », et sur le soutien dont eux-mêmes ont besoin..