Expérience MAN : Avec L’Académie du Service, MAN investit la culture de service
Les services se conjuguent-ils au féminin ?
1. Débat | Debate
Garance Yverneau a fondé 5A CONSEIL,
cabinet d’accompagnement des femmes dans
leur carrière et transitions professionnelles
(coaching, bilan de compétences, formations,
etc.) et de conseil auprès des entreprises
sur l’égalité Hommes / Femmes.
Les services
se conjuguent-ils
au féminin ?
Par Patrice Theillout – Photos philippe baudouin
Selon l’INSEE, 70,9 % des femmes travaillent dans le secteur des services. Pour quelles
raisons ? Les services possèdent-ils par nature une forte dimension féminine, ou faut-il
chercher des explications ailleurs ? Réflexions croisées sur le sujet.
Comment expliquer cette forte représentation
des femmes dans le secteur des services ?
Garance Yverneau : Les explications sont culturelles
et sociologiques. L’intégration massive des femmes dans
la sphère professionnelle est récente. Aujourd’hui encore, bien
que plus diplômées que les hommes, elles ne se cantonnent
majoritairement qu’à une dizaine de filières, sur les quatre-vingts
existantes. Elles se dirigent plus facilement vers le tertiaire et
l’univers des services que vers les filières scientifiques.
Quel est le pourcentage de femmes chez O2 ?
Damien-Jean Coquin : 98 % ! Je vois deux raisons à cette
répartition. Celles, sociologiques, évoquées par Garance.
Les candidatures qui nous sont soumises - soixante mille l’an dernier ! sont quasi-exclusivement féminines. Et il y a également
une autocensure de la part des hommes à se diriger vers
ce type de métiers, relayée et amplifiée par nos clients qui, pour
certaines prestations telles que la garde d’enfants, ne souhaitent
pas qu’on leur propose un homme. Par ailleurs, la plupart de nos
intervenantes doivent élever leurs enfants et donc partager
leur temps entre vie professionnelle et vie de famille. Chez O2,
elles travaillent en moyenne vingt-quatre heures par semaine,
toutes en CDI, et peuvent aménager leurs horaires de travail, ce
qui favorise l’attractivité de nos professions.
Damien-Jean Coquin est directeur
du développement et de la relation client
d’O2, leader français du service à la
personne, qui a réalisé un chiffre d’affaires de
77 millions d’euros en 2011, et emploie
7 500 collaborateurs, dont 98 % de femmes.
48 | N° 4 – Décembre 2012
Mais les notions d’empathie, d’écoute, d’attention,
de proximité inhérentes aux services ne sont-elles
pas plus développées chez les femmes ?
G.Y. : Aucune étude scientifique sérieuse n’atteste une différence
neurobiologique entre les hommes et les femmes en matière de
capacités au care, ni d’une quelconque inaptitude des femmes à
exercer des métiers techniques. On part du postulat que les femmes
« On part du postulat
que les femmes sont
moins bonnes en
maths, et meilleures
en communication, ou
en relation clients. »
Garance Yverneau
•••
Cultures Services | 49
2. Débat | Debate
la mixité sont supérieures, dans le domaine des services comme
dans d’autres secteurs. Les femmes peuvent ainsi aller vers
des métiers plus techniques et à responsabilités, et les hommes
intégrer des secteurs jusqu’alors considérés comme féminins,
comme celui des services. Une meilleure répartition entre la
sphère privée et la sphère professionnelle pour
les hommes aussi bien que pour les femmes est alors possible.
Damien-Jean Coquin is the development
and customer relations director at O2,
the French leader in home help services,
with sales of €77 million in 2011 and a
workforce of 7,500, 98% of whom are
women.
Au sein d’O2, employez-vous des femmes à des postes
à responsabilités ?
D-J. C. : Nous avons effectivement choisi de privilégier
la promotion interne. Nos encadrants en sont issus à 40 %, et
90 % sont des femmes. Trois femmes sont également membres
de notre comité de direction.
« Le poids et l’empreinte
des habitudes et
des traditions restent forts.
à nous de les faire évoluer ! »
Damien-Jean Coquin
••• sont moins bonnes en maths, et meilleures en communication, ou en
relation clients. Les femmes qui dépassent ces postulats connaissent
des réussites professionnelles dans tous les domaines. La plasticité
du cerveau, en revanche, est une réalité scientifiquement avérée.
C’est ce qu’on lui donne à faire qui conditionne son fonctionnement
et l’évolution de ses capacités.
D-J. C. : La répartition des tâches est une construction
sociale encore d’actualité. La répartition inéquitable des tâches
ménagères à l’intérieur du couple reste la deuxième cause
de séparation en France ! Mais les lignes bougent, timidement.
Les pères réclament de plus en plus la garde alternée
des enfants en cas de divorce. Chez O2, les quelques rares
éléments masculins qui composent notre effectif s’acquittent
parfaitement de leurs missions de services.
S’il n’y a pas de différence fondamentale entre
hommes et femmes sur la manière de les délivrer, fautil prôner la mixité dans l’univers des services ?
G. Y. : Il existe deux niveaux de réponse possibles. La mixité est
d’abord un droit. Au-delà du monde des services et de la sphère
professionnelle, il est important qu’hommes et femmes soient
sur un pied d’égalité. Ensuite, toutes les études prouvent que
les performances économiques des entreprises qui pratiquent
50 | N° 4 – Décembre 2012
Votre mot de conclusion ?
G. Y. : Abandonnons une fois pour toutes les stéréotypes
de genre. Il n’y a pas de qualités spécifiquement féminines
ou masculines mais un intérêt pour toutes les entreprises à faire
travailler ensemble hommes et femmes, sans cantonner les uns
et les unes à telle ou telle activité ! Tout le monde a à y gagner :
les hommes, les femmes et les entreprises.
D-J. C. : Je suis entièrement d’accord. Mais le chemin sera
encore long. Le poids et l’empreinte des habitudes et
des traditions restent forts. à nous de les faire évoluer ! •
Les femmes
récompensées !
Le 3 décembre dernier s’est tenue la 3e édition des
« La Tribune Women’s Awards », qui consacrent des
femmes ayant réussi un parcours d’exception dans
le domaine économique et financier, qu’elles soient
créatrices d’entreprise ou cadres dirigeants.
Voici le palmarès 2012 :
• ervices : Sophien Pecriaux, CITYONE
S
• inance : Marie-Laure Mazaud, ALCATEL-LUCENT
F
• reen Business : Nathalie Lebas-Vautier, EKYOG
G
• echno Médias : Anne-Marie de Couvreur,
T
MEDIAMEETING
• ndustrie : Erin Gainer, HRA PHARMA
I
• arrières à l’international : Florence Verzelen,
C
GDF SUEZ QATAR
• oup de cœur du Jury : Fadila Palmer, LUNALOGIC
C
• rand Prix Allianz – La Tribune : Marie-Laure Mazaud,
G
ALCATEL-LUCENT
Garance Yverneau is the founder of 5A
CONSEIL, a consultancy that assists
women in their careers and professional
development (coaching, skill
assessment, training, etc) and advises
businesses on gender equality issues.
Services: a woman’s work?
According to the French statistics office INSEE, 70.9% of women
work in the service industry. What are the reasons for this? Do
services have a particularly strong female aspect to them, or
should we be looking elsewhere for the answer?
How do you explain such a high proportion of women in the
service industry?
What is the proportion of women at 02?
Garance Yveneau: The reasons are both cultural and sociological.
the sociological reasons, mentioned by Garance; we received
The mass arrival of women in the world of work is a recent
60,000 applications last year, and nearly all of them were from
phenomenon. Even today, although women are better qualified
women. Men actually self-exclude themselves from working for
than men, they remain circumscribed to about ten sectors out of
us, and this is repeated and amplified by our clients who, for some
the 80 that exist. They lean more towards the tertiary sector and
services such as child minding, do not wish to be offered a man.
the service world than towards scientific vocations.
Furthermore, most of our female staff have to raise their
Damien-Jean Coquin: 98%! I can see two reasons for this. Firstly,
•••
Cultures Services | 51
3. Débat | Debate
••• children
and thus split their time between work and family. At
O2, they work on average 24 hours per week, all with indefinite
contracts, and can choose their working hours, which makes
working in our line of business even more attractive.
The notions of empathy, openness, attention and proximity
are inherent in services; aren’t they also more feminine
traits?
G. Y.: No serious scientific research actually proves that there is a
neurobiological difference between men and women in their ability
to “care”, or that women might be naturally incapable of doing
technical jobs. But the general assumption is that women are poorer
at maths and better at communications or customer relations.
Women who transgress these assumptions are professionally
The weight and imprint
made by our customs
and traditions are still very
prevalent. It is up to us to
make them change!
successful in all areas. What has been scientifically demonstrated,
on the other hand, is the brain’s plasticity. How well it works and the
development of its capacities all depends on what it is given to do.
Damien-Jean Coquin
D-J. C.: The division of tasks is still a very present-day social
better balance between personal and professional life is therefore
phenomenon. The uneven allocation of household chores within
possible, for men as well as for women.
the couple is the second most important cause of divorces in
France. But bit by bit, things are changing. For example, fathers
At O2, do you employ women in managerial positions?
increasingly request equal custody of their children in the event
D-J. C.: We have indeed decided to put the emphasis on internal
of a divorce. At O2, the few men that do work for us are perfectly
promotion. 40% of our managers have come from internal
competent at their jobs.
promotion and 90% are women. There are also three women in our
management committee.
Recognition for women
On 3rd December 2012 the third edition of “La Tribune Women’s
Awards” was held, distinguishing women who have been
particularly successful in the economic and financial sector,
whether they are entrepreneurs or top managers. The winners
of the 2012 awards were as follows:
Garance Yverneau
52 | N° 4 – Décembre 2012
A final word?
•Finance: Marie-Laure Mazaud, ALCATEL-LUCENT
G. Y.: We should eradicate these stereotypes once and for all. There
•Green Business: Nathalie Lebas-Vautier, EKYOG
G. Y.: There are two ways of answering that. Firstly, gender mix is
are neither specifically male nor female qualities; on the contrary,
•Technology Media: Anne-Marie de Couvreur, MEDIAMEETING
a basic right. Beyond the world of services and the work sphere,
it is in the interests of all businesses to make men and women
•Industry: Erin Gainer, HRA PHARMA
it is important that men and women be on an equal footing.
work together, without confining either population to a particular
•International careers: Florence Verzelen, GDF SUEZ QATAR
Furthermore, all the research says that businesses in which there
job type. Everyone stands to gain from this: men, women and
•Judging Panel’s Special Award: Fadila Palmer, LUNALOGIC
is a gender mix deliver better economic results, whether in the
businesses.
• rand Prix Allianz – La Tribune : Marie-Laure Mazaud, ALCATELG
service sector or elsewhere. Women can move towards technical
D-J. C.: I totally agree. But there is a long way to go yet. The weight
jobs and more responsibility, and men can go into sectors which
and imprint made by our customs and traditions are still very
were previously considered as feminine, such as services. A
The general assumption
is that women are poorer
at maths and better
at communications or
customer relations.
If there isn’t a fundamental difference between men and
women in how they deliver, should we be promoting more
of a gender mix in the service industry?
prevalent. It is up to us to make them change! •
•Services: Sophien Pecriaux, CITYONE
LUCENT
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