Le film « Daisy », destiné à soutenir le candidat démocrate et président sortant L.B. Johnson contre le candidat ultra conservateur B. Goldwater, lors de la course à la présidence américaine de 1964, n’a, comme le fameux « Apple 1984 », été diffusé qu’une seule fois. Il a suffi de l’achat d’un passage, à une émission clé, pour que ce film à l’impact rarement égalé devienne un phénomène médiatique, passant gratuitement au cours des journaux télévisés des jours durant. C’est certainement l’un des films parmi les plus durs, les plus agressifs, les plus représentatifs de la communication négative au service des campagnes politiques.
Ces slides ont été réalisés dans le cadre du projet IONIS Brand Culture. Pour découvrir l'intégralité des cas étudiés, rendez-vous sur : www.ionisbrandculture.com.
3. SYNTHESE
Le film « Daisy », destiné à soutenir le candidat démocrate et
président sortant L.B. Johnson contre le candidat ultra conservateur B.
Goldwater, lors de la course à la présidence américaine de
1964, n’a, comme le fameux « Apple 1984 », été diffusé qu’une seule
fois. Il a suffi de l’achat d’un passage, à une émission clé, pour que ce
film à l’impact rarement égalé devienne un phénomène
médiatique, passant gratuitement au cours des journaux télévisés des
jours durant. C’est certainement l’un des films parmi les plus durs, les
plus agressifs, les plus représentatifs de la communication négative au
service des campagnes politiques.
3
4. Fruit du travail créatif de DDB, sous la houlette de Bill Bernbach, ce
travail est exceptionnel à plusieurs titres : comme archétype de la
campagne négative (jamais le nom de l’adversaire n’est cité), comme
l’archétype du « media event », une campagne en réalité destinée à
être relayée par les médias pour bénéficier d’un supplément de
légitimité et d’actualité. Il s’agit d’une campagne d’une rare
performance, tant les spectateurs ne peuvent que conclure dans le
sens de la proposition : le choix proposé ne conduit, de manière
censée, qu’à une seule voie, celle de voter pour le concurrent
démocrate. Summum de la communication anxiogène, on notera enfin
que l’histoire retiendra Daisy comme l’un des films parmi les plus
pacifistes et qui portera au pouvoir le président démocrate qui
s’enfoncera le plus et pour le pire dans le bourbier de la guerre du
Viêt Nam.
4
5. 1. LE CONTEXTE ET LA DEMARCHE
• L’élection présidentielle de 1964 aux USA, se déroule dans un contexte particulièrement
tendu : la tension avec Cuba reste haute, les contestations étudiantes
débutent, l’assassinat de J.F. Kennedy un an plus tôt reste dans toutes les mémoires. Mais
c’est surtout le « bourbier » vietnamien qui est l’objet essentiel de cette élection.
• L.B. Johnson, le candidat démocrate, n’est pas une «colombe » parmi les plus réputées
mais il affronte Barry Goldwater, candidat du Sud, connu pour son conservatisme et ses
positions favorables à la guerre, plus globalement représentatif d’une ligne dure en
matière de politique étrangère.
• Influencé par les campagnes renommées et qui bousculaient les habitudes de la
communication aux Etats-Unis, le staff de L.B. Johnson fait appel à Bill Bernbach et
DDB, pour contrecarrer l’outsider (dont la campagne se déroulait relativement bien).
• L’équipe du candidat démocrate produit un spot nommé Daisy, qui ne passera qu’une fois
(en tant que publicité achetée), le 7 septembre 1964. Cette action sera, de l’avis de
nombreux experts, l’une des plus efficaces jamais menée en communication aux Etats-
Unis et le spot le plus renommé de la communication politique.
5
6. Les oppositions étaient telles qu’il était
hors de question de mener une campagne
de « sympathiques gentlemen ».
6
7. 2. LES CHOIX STRATEGIQUES ET CREATIFS
• La réputation de ce spot provient de l’extraordinaire impact de « the most effective
campaign in American History », selon le Sénateur Eugene McCarthy. Cette campagne
négative s’appuie sur une menace, une peur terrifiante, qui ne conduit qu’à une seule et
unique solution, le vote pour L.B. Johnson.
• Une jeune fille effeuille une marguerite et le comptage se transforme en celui du
lancement d’une bombe atomique (à peine 20 ans après celle qui a détruit Hiroshima).
Face à une telle menace, face à un homme qui nous demande de choisir entre ceux qui
prônent la vie et ceux qui prônent la mort, le choix est immédiat (précisons que Daisy en
anglais signifie marguerite).
• On conduit le téléspectateur à se confronter à un choix : « to make a world in which all
the God’s children can live or go into the dark ». D’un côté la jeunesse, la pureté, la
bonté, de l’autre la haine, la violence, la guerre, la perte de cette paix tant voulue en 1945
et que la Guerre du Viêt Nam venait tant troubler.
• Jamais le nom de l’adversaire n’est cité. Jamais l’élection n’est au cœur de la construction
du film (seulement à la conclusion). On est dans l’essentiel, l’humain et sa survie.
7
8. 2. LES CHOIX STRATEGIQUES ET CREATIFS
• L’autre atout de ce modèle de communication négative, c’est qu’il a été pensé comme un
« objet médiatique » exceptionnel. Il était inutile de jouer la répétition, d’en faire une
campagne classique, puisque son pouvoir émotionnel en faisait un évènement.
• L’effet sur les téléspectateurs, dont les journalistes, fut tel que des centaines de passages
gratuits traduisirent le besoin d’information, sur une publicité qui devenait un objet de
débat, une information à part entière et non plus une communication payante.
• En l’espace d’une soirée, ce qu’Apple réussira en 1984, un évènement publicitaire devient
un évènement politique majeur et est traité en tant que tel, avec de multiples repasses
sur toutes les chaînes de télévision de tous les Etats, conduisant à des milliers de
débats, de prises de position dans la presse… Poussant le candidat républicain à se
défendre et à passer plusieurs semaines de campagne à justifier ce qu’il est et ce qu’il
n’est pas, créant une nouvelle perception du candidat démocrate, soudain plus
humain, plus crédible face au risque d’enlisement du conflit.
8
9. Un film qui n’est pas le résultat du hasard
créatif, mais bien d’une volonté de déstabiliser
le candidat républicain. Ci-joint, une copie
d’un mémo sur les priorités pour les
démocrates
(Sources :http://www.conelrad.com/daisy/documents.php)
9
12. Daisy contenait naturellement une référence
au cinéma d’épouvante, ce qui rendait le
spectacle encore plus prenant et angoissant (le style
photographique est une allusion directe aux films
d’horreur dont les célèbres Frankenstein).
12
13. 3. LES RESULTATS
• Le premier résultat : l’élection facile de L.B. Johnson à la présidence des Etats-Unis. Un
succès pour lequel tous les commentateurs souligneront l’impact de Daisy.
• « Lyndon Johnson remporte l'élection avec 61,1 % des voix et 44 états contre 38,5 %
des suffrages et 6 états à Barry Goldwater. Avec 22,7 % de voix d'écarts, c'est le
meilleur score pour un candidat à l'élection présidentielle depuis 1820 » (Wikipedia).
• La carrière du candidat républicain Barry Goldwater, nettement marqué à l’extrême-
droite, est brisée et « l’effet Daisy » est également reconnu.
• Le plus étonnant concerne la déclaration faite par le directeur du staff des RP de la
campagne démocrate, l’un des acteurs du projet de campagne négative. Il déclare en
1989 « It haunts me all this time that Johnson was portrayed as the peacemaker in that
campaign but he committed the country to a long, bloody war in Vietnam ».
• Comme l’indique l’auteur James Twitchell dans un ouvrage de référence, « Twenty ads
that shook the world », Barry Goldwater déclara à propos de cette campagne : « it was
enough to make me vote democratic, if I had not known their nominee so well ».
13
14. 3. LES RESULTATS
• Finalement, le principal tour de force de cette campagne aura été d’avoir réduit le
candidat républicain au rôle d’hystérique dangereux, susceptible d’appuyer facilement
sur le bouton de la bombe atomique et le second à celui de politicien pacifiste et humain.
• “DB’s propaganda campaign (which included the "Daisy Spot") did two significant things:
(1) it created a convincing image of Goldwater as an “extremist” “product” and (2) it
softened the image of Johnson as a “crass wheeler-dealer,” making him seem almost
avuncular—virtually a “peace and love” advocate of the 1960s—in comparison to his
“bellicose” opponent”. (Sources : www.ithaca.edu/rhp/ programs/cmd/blogs/posters).
• Ainsi, le vice-président L.B. Johnson, largement responsable de l’escalade de
l’intervention américaine au Vietnam, s’était transformé pour le grand public en un
politicien tellement plus humain et pacifiste que son concurrent…
14
15. Quand le Time, magazine
de référence aux Etats-Unis
alors, affiche Daisy au cœur
du débat sur l’utilisation
éventuelle de l’arme nucléaire.
15
16. 4. SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE
• Twenty Ads That Shook the World: The Century's Most Groundbreaking Advertising and
How It Changed Us All, James Twitchell, Editions Broadway, 2001.
• Wikipedia - Daisy : http://en.wikipedia.org/wiki/Daisy_(advertisement)
• Buell, E. H. (2012). Daisy Petals and Mushroom Clouds: lbj, Barry Goldwater, and the Ad
That Changed American Politics. Journal of American History, 99(1), 364-365.
• Bowersox, K. L. Presidential campaign advertising and" Daisy": an honors thesis
([HONRS] 499).
• Jefferson, T. (1997). Political Images: Public Relations, Advertising, and Propaganda.
Visual Intelligence: Perception, Image, and Manipulation in Visual Communication, 281.
• Mark, D. (2009). Going dirty: The art of negative campaigning. Rowman & Littlefield
Publishers.
• Levenson, B. (1987). Bill bernbach's book: A history of the advertising that changed the
history of advertising. New York: Villard Books.
• Un site excellent pour tout savoir sur le sujet... http://conelrad.com/daisy/daisy3.php
16
17. 4. SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE
• JERIT, Jennifer. Survival of the fittest: Rhetoric during the course of an election campaign.
Political Psychology, 2004, vol. 25, no 4, p. 563-575.
• KAID, Lynda Lee et JOHNSTON, Anne. Negative versus positive television advertising in
US presidential campaigns, 1960–1988. Journal of Communication, 1991, vol. 41, no 3, p.
53-064.
• SPERRY, Chris et SPERRY, Sox. Media construction of presidential campaigns. Social
Education, 2007, vol. 71, no 7, p. 366.
• JACOBS, Scott. Nonfallacious rhetorical strategies: Lyndon Johnson’s Daisy ad.
Argumentation, 2006, vol. 20, no 4, p. 421-442.
• EDWARDS, Dale. Book Review: Daisy Petals and Mushroom Clouds: LBJ, Barry
Goldwater, and the Ad that Changed American Politics. Electronic News, 2012, vol. 6, no
2, p. 100-102.
• GERSTLÉ, Jacques. La publicité politique. Hermès (Paris. 1988), 1989, N° 4, fascicule
thématique" Le nouvel espace public", 1989.
17
19. Ces slides ont été réalisés dans le cadre du
projet IONIS Brand Culture.
Pour découvrir l'intégralité des cas
étudiés, rendez-vous sur :
www.ionisbrandculture.com.