Texte de la Communication présentée au Colloque International “Bilan et perspectives de l’histoire immédiate”, organisé pour le Groupe de Recherche en Histoire Immédiate (GRHI) de la Université Toulouse-Le Mirail le 5 avril 2006. Publié en : Bilan et perspectives de l’histoire immédiate (Actes du Colloque International du GRHI, 5 et 6 avril 2006), Toulouse, 2007, pp. 29-32.
L'historiographie et l'histoire immédiates : l'expérience latine de l'Histoire en débat (1993-2006)
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L’historiographie et l’histoire
immédiates : l’expérience latine de
l’Histoire en débat (1993-2006)*
Carlos Barros
Université de Saint-Jacques de Compostelle
Notre parcours initiatique vers l’histoire immédiate s’est
fait à travers l’historiographie de l’histoire immédiate qui est
notre spécialité, celle de l’Histoire en débat.
Il s’agit d’un mouvement historiographique en réseau qui
est né, en 1993, lors d’un colloque international qui s’est tenu à
Saint Jacques de Compostelle, où étaient réunis 500 rapporteurs
et 3000 assistants dans les trois Colloques réalisés ; 12 volumes
ont été publiés sur la méthode, sur l’historiographie et l’histoire
actuelles.
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Texte de la Communication présentée au Colloque International “Bilan et perspectives de
l’histoire immédiate”, organisé pour le Groupe de Recherche en Histoire Immédiate (GRHI) de
la Université Toulouse-Le Mirail le 5 avril 2006. Publié en : Bilan et perspectives de l’histoire
immédiate (Actes du Colloque International du GRHI, 5 et 6 avril 2006), Toulouse, 2007, pp.
29-32.
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Depuis 1999, le réseau HaD a enregistré presque 3000000
de visites sur son site (www.h-debate.com) traduit en espagnol,
en français et en anglais, y sont présentés des listes de
discussion, une liste générale sur la méthode, sur
l’historiographie et sur la théorie de l’histoire avec 2700
adhérents et une liste de discussion sur l’histoire immédiate est
particulièrement active - 800 adhérents -, participants
originaires de 50 pays débattent régulièrement.
En 2001, a été signé le Manifeste académique d’HaD ; il
comprend 18 propositions sur la reconstruction du paradigme
historiographique. 400 historiens ont adhéré à ce texte, pour un
total de 37 pays représentés.
L’Histoire immédiate et HaD
En janvier 2000, un historien équatorien envoie un
message sur le mouvement indien qui fait tomber le président
Mahuad, à ce moment-là, je propose à mes collègues d’ouvrir
un débat intitulé : « histoire immédiate » - sachant que selon le
dictionnaire, il s’agit de : « quelque chose direct, sans
intermédiaire qui se crée tout de suite ».
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En avril 2002, durant un colloque d’histoire de
l’Association d’histoire actuelle, à Cadix, en Espagne, ma
communication a porté sur le thème « Est-il possible d’écrire
une histoire immédiate ? », nous parlions à ce moment là d’une
nouvelle approche de la recherche.
Au mois de juillet 2004, a été organisé le 3ème
colloque
international Histoire en Débat, où l’histoire immédiate a
occupé une place importante. C’est à ce moment-là que se sont
renforcées nos relations avec la France avec la participation de
Nicolas Prognon, membre du GRHI, et de Christian Thibon, de
l’Université de Pau, ici présents ; par la suite, nous avons fait la
connaissance de Jean-François Soulet et Guy Pervillé,
fondateur et directeur du Groupe de Recherche en Histoire
Immédiate de Toulouse.
Ce colloque de Toulouse organiser pour le GRHI
représente une grande opportunité pour internationaliser cette
« nouvelle nouvelle histoire » ; il peut-être un dénominateur
commun de cet type d’histoire sur le présent, actuelle, vraiment
contemporaine, d’intérêt même dans les pays anglo-saxons.
Pour faire aboutir cette internationalisation, il y a – à mon
avis et d’après notre expérience - trois conditions, par rapport à
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l’heure de la mondialisation de la communication et de
l’information qui nous vivons:
1. Il faut développer les échanges égaux entre les
historiographies nationales, créer des alliances
internationales sans ethnocentrisme et eurocentrisme,
parce que cela ne marche pas aujourd’hui.
2. Plurilinguisme historiographique ; aujourd’hui il n’existe
pas qu’une seule « lingua franca », l’histoire doit être
traduite ; notre expérience, au sein de HaD est de traduire
de façon automatique les interventions en trois langues :
français, anglais et espagnol pendant les colloques
internationaux et sur le site HaD.
3. Il faut motiver le travail en réseaux en privilégiant l’usage
d’internet pour diffuser et pratiquer cette modalité de
« faire l’histoire » caractéristique du XXIème siècle.
En ce sens, nous faisons quatre propositions :
1. Pour faire de l’Histoire immédiate, il faut changer les
paradigmes historiographiques, car pour inclure le présent
en tant que sujet dans la recherche historique. Le
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positivisme ne nous est plus utile. Le mythe scientiste que
le positivisme a diffusé, selon lequel, il faut 50 ans pour
écrire l’histoire de façon « impartiale », est aujourd’hui
invalidé. Même les Annales disaient qu’il faut comprendre
le passé pour le présent et le présent pour le passé, mais ne
jamais étudier comme historiens le présent pour lui-même.
Par exemple : le témoignage de Marc Bloch sur la
deuxième guerre mondiale, auquel on décline les
caractères d’un ouvrage d’histoire ; pourtant, Bloch –
« l’historien des campagnes »- a écrit qu’il applique sur
ces événements tragiques et vécus. « les mêmes habitudes
de critiques, d’observation et j’espère d’honnêteté »
(L’étrange défaite. Témoignage écrit en 1940, Paris,
Société des Éditions Franc-Tireur, 1946, p. 32).
2. Il faut différencier clairement l’histoire contemporaine
après la révolution française (XIX-XX siècles) et l’histoire
immédiate après la chute du mur de Berlin. A ce sujet, il
existe un débat sur le site HaD qui s’intitule : « Sommes-
nous encore dans l’histoire contemporaine ? ». Non, nous
sommes dans un autre temps que nous appelons Histoire
immédiate… pour le moment ! Tous les historiens sont
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formés pour étudier le présent comme l’était après tout
Marc Bloch, où comme le sont aujourd’hui les
médiévistes, auxquels j’appartiens. Nous sommes,
également, contre la prétention d’un petit nombre de
collègues en Histoire contemporaine - du moins en
Espagne - de monopoliser, de façon corporatiste, l’histoire
du monde actuel.
3. Il est inévitable, même nécessaire, que l’Histoire
immédiate soit engagée, plurielle et professionnelle. C’est-
à-dire, une histoire honnête, comme l’écrivait Bloch en
1940 ; histoire compétitive et concurrentielle avec les
autres disciplines ; une histoire avec des valeurs, ainsi que
René Remond l’a évoqué dans ce colloque. Par exemple :
la colonisation n’est pas justifiée, en tous cas, il faut ouvrir
un débat, en respectant le droit d’autrui en même temp
que l´on défende la propre position. Une histoire sans
jalousie, il faut partager le champ de l’Histoire immédiate
avec d’autres sujets : académiques mais aussi historiques,
sociaux et politiques. Aujourd’hui, tout le monde souhaite
écrire l’histoire, c’est bon ? Oui, c’est bon pour nôtre
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histoire professionnelle. Pour redéfinir l’histoire comme
discipline académique, nous devons participer au débat
social et politique sur l’histoire - bien sûr - mais sans
exiger de privilèges exclusifs. D’ailleurs, il faut éviter
combattre l’histoire officielle des certaines institutions
politiques réclament une autre « histoire official » des
historiens. Nous ne sommes pas d’accord, avec une
histoire « monopole académiste» des historiens. En bref,
nous sommes contre le « retour » actuel à Ranke,
Seignobos et Langlois, parce que nous ne pouvons pas,
nous ne devons pas, faire table rase de la critique que Marc
Bloch et Lucien Febvre ont fait contre la vieille « histoire
historisante ». Enfin, il faut éviter la fracture entre
l’histoire et la mémoire, le métier d’historien et la vie,
l’académie et la société civile, l’histoire académique et le
monde des institutions politiques. Et si on observe des
différences entre historiens, ou entre historiens et groupes
sociaux et politiques, sur la mémoire et sur l’histoire, nous
devons donc stimuler l’histoire en débat. Le débat, la
pluralité, l’engagement, c’est nécessaire, chers collègues,
même à l’intérieur de l’académie qui à aussi besoin de la
démocratie.
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4. Sans la mémoire sociale et (multi)culturelle, il n’est pas
possible de faire une vraie Histoire immédiate aujourd’hui.
Bien entendu, nous parlons de la mémoire active des
« hommes » (encore une fois Marc Bloch) et non pas de la
mémoire passive des « monuments », des « lieux de
mémoire », qu’il faut étudier aussi. En effet, la mémoire
humanisée est un « devoir » mais aussi une nécessité pour
l’historien qui fait de l’Histoire immédiate : les acteurs
sociaux sont les destinataires de nos travaux et même nos
sources. La proposition de HaD et de l’Association
d’histoire actuelle en Espagne - en France la situation est
évidemment différente - est de réaliser une Histoire
immédiate favorisant la récupération de la mémoire
historique, même prenant l’initiative depuis l’académie, en
amont ou parallèlement aux sujets sociaux ou politiques.
Un exemple à l’échelle internationale : la collaboration de
Paul Preston, historien hispaniste, avec l’assemblée
parlementaire du Conseil de l’Europe qui vient de
condamner le franquisme et de demander la réhabilitation
des ses victimes. C’est la première fois que fait cela une
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institution internationale et s’est produit avant la
publication de la loi mémorielle qu’est en train de préparer
le gouvernement de José Luis Rodríguez Zapatero, qui ne
va pas empêcher, ni pénaliser le débat sur la guerre civile,
évidemment. Merci.