Denys l'Aréopagite / Dionysius the Areopagite : the "Lost" Christian Church of the first three centuries (Coronis, Sumaries VII) is to be searched for and found in Western Christianity... (... Dionysius the Areopagite : the Genuine Doctrine and tradition of the Church).
Albert houtin-la-controverse-de-l'apostolicité-des-eglises-de-france-paris-alphonse-picard-1903
1. LA CONTROVERSE
DE
L' APOST()UCITI~ ilES f:GLlSrs BE FIL~CE
AU XIX c SIl~CLE
PAR ALBERT HOUTIN
TROISIÈME ÉDITION
HI:'"I:i: El' :l·/;.IE~Tf:T.
6~~
PARIS
ALPHONSE PICARD & FILS
~'.!I RCE nO~.·r.HTt::f 8"1
1903
2.
3. DU ~I1~:~IF A UTI~CR
Les Origines de l'Église d'Angers. - La Légende de saint
René. - LaY;i1, :. (;oupil. 1l0YClllhl'cl!lOI. Ill-S'. ïG pp.
l'I':x : ~ II'.
hUH:S n'1I1STOlllE ECCU::SI.STJ(~UE sun LE XIX" sli':CLI:
Dom Couturier, abbé de Solesmes. - Angers, Cl~l'm;IiIl cl
G. Grassin, l'UC du COl'llcl. In-1S, 3~1 pp., ;IYCC pOl'trail.
- Prix: 3 fI'.
Le Petit Séminaire Mong<lzon. Essai puhlié dans la Se/llai/II'
religieuse du diaci'se d'..ln(Jcrs ÙC janyicr il noycrnbre 1900.
Un demier Gallican. Henri Bernier, chanoine d'Angers.
Essai pub1i) dan,; la lier·uc de l'Anja·u de Iloycmbrc '1~!)S
il fl'Hier lPOl. - :lG4 pp. - Lc tirage :l part n'cst pa.,
dctn,; le Cùmmel'Cc.
Lettre il dom Chamard sur un dernier Gallican. - ::;;; aot'tt
'1901. - Chcz l'auteur. In-S', 2G pp. - Prix: 1 fr.
La Question Biblique chez les catholiques de France au
XIX· siècle. - Deuxièmc l'dition, rCYlie ct augmcnt0e.
- Paris, Picard, noycmbrc 1802, in-S', ly-3ïS pp.
Prix: 4. fr.
o
4. LA CONTROVERSE
DE
L'APOST(}UCITI~ nE~ f:GLlSES BE FILCE
AU XIX c SI~;CLE
PAR ALBERT HOUTIN
TROISd::ME ÉDITION
Hl:'tï: 1:'1' ;l"I'.ll:."Ti:T:
6~j~~
,.~~~...,
PAfiIS
ALPHONSE prCARD & FILS
::;'~, rU;I~ nO:'AP.ITl::, 82
1903
5. Il (aut énergiquement s'effol'cel' de l'éfi/ter les
mensonges ct les faussetés, Cil reCOlll'ant aU.r:
SOli l'ces; ayant sUl'toat jJl'ésent (( l'esprit « qIle
la fJl'e/l/i(:l'e lo': de l'histoil'e est de ne pas oser
mcntll'; la seconde, de ne pas craindre de d':re
l'l'ai; Cil Oli/I'C, qlle l' histOl'ien Ile fJl'êle ail soupçon
IIi de flatterie ni d'animosùé )J.
Lcttl'e de Ll~O:"
XIII SUI' /'lI i:;/oil'c,
18 août 1883.
INSTITUT
CATl-IOLtQUE
DE PARIS
6. LA CONTROVERSE
ilE
L'APOSTOLICITÉ DES ÉGLISES DE FRANCE
,U XI" srkCLE
On grand progrès intellectuel, toujours lent, est
genàalemcnt nécessaire pOllr faire admettre aux
inll'~rcsses une vérite historique qui les dépouille de
légendes flalteuses. Ils ne sacrifient qu'avec peine
de glorieuses traditions, surtout quand elles les ont
Lercés. Ils n'aiment point à discutee les moLiles de
ceux fJui les leur transmirent ou de ceux fJui les
creèrent. Le Lesoin de tout expliquer, la crédulité
avec laquelle se répète lu version reçue, la facilité
de rendre vrai, en le croyant, l'objet de ses désirs,
font accepter naturellement les récits teuditionnels.
Les premiers critiques de toutes les nations passent
pOUl' des impies et des malfaiteurs; et même ceux
qui, dans le fond, leur donnent raison, l'estent sou-
vent sous le charme des croyances explifJuées et
7. Ô L CO::TROVERSE DE L'.~ POSTOLICITÉ DES ÉGLISES
démolies. On répète volontiers ce mot de Tite
Live: Datur haec veilla anliqui/ali, IItmiscendo
Ill/mal/a divinis, pI'imol'dia Ill'billm allgllstiol'a
faciat. ?liais si, pour imprimel' il la naissance des
cités lin caractère plus auguste, les anciens y
c
.-.;
mêlai en t des interventions sa.crées, le j)rocédé ne
{ s'est point perdu avec la ruine des royaumes et des
divinités classiques. Ailleurs ct plu's tard, villes ct
pays ont aimé il rattacher leurs commencements il
fJuelque héros profane ou religieux. La passion
lIes nobles origines il longtemps sévi. Quand l'ima
gination populaire n'était pas assez puissante
pour dever un monument grandiose, le0ic~s
des lettrés y suppléaient par la suite, il tel point
que leuI' œuwe, commune ou purement person
nelle, édifia de véritables sanctuaires nationaux,
vénérés longtemps encore après avoir été sapés
"'C--l .. ~
par a cl'l!Jque.
J u V siècle, on osa déclarer les Francs d'origine
C
troyenne. L'idée fit fortune. Elle trouva de nom
breuses preuves et des lignées de partisans. Les
caus.es qui accréditèrent en France cette préten
tion assurèrent dans d'autres pay~ le succès de
semblables inventions. L'Espagne fit remonter son
histoire jusqu'il Japhet, la Grande-Bretagnejusqu'à
I3rutus, petit-fils d'Enée, l'Écosse jusqu'à Fergus,
« le chevalier au bel escu ))~ Ce ne fut que peu il
peu que l'on se détacha de ces fables. ~
Sous Louis XIV, en 1665, un magistrat éclairé
des Grands-JoUl's d'Auvergne témoignait encore,
1
8. LES CO~DrE"CDlENTS DE LA CRITIQGE 7
dans une harangue solennelle, cc qu'il était bien à
déplorer que les gentilshommes de la province,
issus du sang des Troyens et des Romains, eussent
dégénéré de l'ancienne vertu de leurs ancêtres. »
Si l'orateur avait voulu se mettre en frais d'érudi-
tion, il cùt sans doutc pu dire le nom des Troyens
fJui devinrent AUYeI'gnats. A cette époque on pou-
vait encore le savoir. La ville de Xanten, au duché
de Clèves, garda longtemps la mémoire de son
fondatcl1l', le prince Franeon, échappé ft la destruc-
tion de la très noble cité « jadis fondée en Frige ».
"u commencement llu XVIe siècle, Jean de Bour-
digné, auteur des Chroniques d'Anjou et du
Maine, raconte cc comment apl'ès la finale destruc-
tionde 'l'l'oye la Grande, une bande de Troyans,
pour' lors appelez Angions, arrivèrent au pays
d'lnjou et édiffièrcnt de l/OW'erlU la ville d'An-
gicys ». Il faut remarquer la précision de ce cc de
noùveau ». 130urdigné ne doit aucunement exagérer
l'antiquité profane de sa patrie, étar.t donné la
modération dont il fait preuve en traitant de l'Ol'i-
gine de son catholicisme. Au lieu d'identifier le
fondateur de son église, saint Julien, avec Simon le
lépl'eux, comme des Manceaux du moyen fige (1),
le digne chroniquéur dit simplement: cc La foi de
:otre-Seig'neur fut, pal' monsieur Sainct Jullian,
évesque du Mans, appol'tée en Anjou et au j'lieine,
/
(1) Simon le !l'preux a <"lé d'ailleurs dispulé au Mans par cert10ins
auteurs qui en ont faille fondaleur du siège de 11aguelonne (établi
seulemenl au 'l' siècle), . ,
9. 1;
l'
I!
1
r 8 LA C01TROYEI1SE DE L'AI'OSTOLIClTt DES tGLISES
du temps dc monsieur sain ct Clément,~e qua-
trième. Lequel benoist Julian (comme l'on treuve
ès vieux panehartes et enseignemens de l'Église
du JI ans) institua premier évesque d'Angiers ung
nommé Deffensor. » De toutes ces notions, Dounli-
gné pouvait conclure avec joie que son pays n'était
« en spiritualité ou temporalité à postposer à autrc
région ». LU siècle suivant, un bénédictin d'Anjou,
mort vers 1676, clom Barthélemy Roger, écrivait
l'histoire de sa province. Il déclare trouver dans le
liYI'e de Dourcligné bien des choses douteuses, hors
d'apparence, et va même jusqu'à qualifier le voyage
des Troyens de pure fable. Toutefois, adoptant
l'opinion du chroniqueur qu'il critique silibrement,
il lui parait assez vraisemblable qu'Angers « ait été
bùti environ le temps de Sarron », troisième roi de
Gaule ct second successeur de Samothès, sur-
nommé Dys, !ils de Japhet. Le religieux s'empresse
d'ajouter: « Mais je n'ose pas vous présenter cela
comme une vérité historique». Cette scrupuleuse
résene est un progrès. On trom'e également une
nouvelle position dans la manière dont Barthélemy
Roger recule la prédication de saint Julien jusque
vers l'an 235, sous l'empire de Gordien. Que les
traditionnistes n'accusent pas pour cela le moine
d'avoir des tendances hypercritiques ou janSé-
nistes. Si son opinion SUI' l'antiquité profane de
sa ville ne le mettait pas complètement il l'abri
de ce reproche, il suffil'ait pOUl' gal'antir ses prin-
cipes de rapporte)' la façon dont il raconte, à propos
1 INSTITUT
.CATHOLIQU&
DE PARIS
10. LF:S CO:>DIE:CE:>IE:-iTS DE LA CRITIQUE 9
de saint René, une polemiq1le du sieur de Launoy,
doctem de Sorbonne (1).
Quelque pénible et lente que soit l'extirpation des
legendcs profanes ou religieuses, les premières ont
au moins cet anlntage SUI' les autres de pouvoir
disp'araître complètement. La Suiss'e elle-même né
croit plus il Guillaume Tell. Les peuples arrivent
toujours il sentir le ridicule des prétentions fabuleu
ses ct, si le chauvinisme d'ccrivains d'imagination
ou le conservatisme de certains orateurs s'obstine
il les acceptel', ne sont dupes que ceux qui veulent
bien l'ètre. Quand ~I. de :'ovion parlait aux
Grands-Jours d'luYel'gne de l'origine hcroïque des
gentilshommes de la province, l'historien de ces
assises disait déjà sceptiquement : (( Cela n'est
appuyé que sur l'autorité de Lucain. »
Le? Icgendes' religieuses ont la vic Elus dUl.'e, ct
Il1Ime illeural'l'ive cie ressusciter. Une renaissance
de foi, un rcveil de pieux enthousiasme, une réac
tion dogmatir{lle, les font reviyre, quand on aurait
pu les croire mortes il jamais ct depuis longtemps.
,:Iors il ne sert guère de dire le peu d'autorité de
leur fondement, ou mème d'en expliquer parfaite
ment la genèse. Le récit légendaire, jadis mêlé
indirectement à de saints enseignements ou à des
("1) Vo~·e7. DarltJ....~oger, Histoil'e d'Anjou, pp. ·H-/l5 ;,Houti~)
Origines dêt'Eglise-d'..Inge,·s, p. 70. - Pour le fond cre lùOiilro
'erse à la nn du X'll' siecle, "oyez particulierement~biïw.e-'
1(ch~noine de Saint-Gaudence, au diocèse de Comminges, Nou
l velle dissertation loucha/lt .le temps auquel la "eligion chrétienne
a été établie dans les Gaules (Toulouse, 1703, in-16, 323 p.p.).
1.
~ .~:::'
11. 10 LA CO:'TTlOVrmSE DE L'APOSTOL1C:lTl~ DES I~GLlSES
pratiques liturgiques'7 apparaît comme un préten
? C; dant intéressant qui réclame contre un bannisse
" ment révolutionnaire et proteste contre toute
. proscription.lllCette attitude ______ _ pour l'accoler
suffit déjà __.~_ f t
des partisans parmi les têtes extravagantes et les
cœurs sensibles. Quand les pretentions s'appuient
sur des titres apparents et colorés, res recrues
peuvent devenir nombreuses. Elles affirment que,
dans le défrichement historique, on a procédé de
gaieté de cœur, coupant et tranchant à plaisir,
devenant hypel'critique à force de critique. ~~s
révisions de nombreux procès s'engagent forcé
ment, entrainant par l'obstination des partis d.~
menses gaspillages d'énergie. N'arriye-t-il pas que
l'inadvertance et la passion solidarisent Lien des
causes qu'une Lonne logiqué- devrait soigneusement
et froidement distinguel' ? L'appel est-il toujours
') ~ { gagné? i'e prouve·t-on pas parfois que la cause
) fut LeI et bien réglée, mais encore que ces juges
- qu'on taxait d'exagération ont été non seulement
modérés, mais trop indulgents et même faiLles?
12. .,.., .It ((' ~
::- A. / .)
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y_ tv-:, - L... ,.,L' t, )
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CILPITHE rHEJlIIŒ
(1800-18/12',
1::1'A1' IJE 1.. QI·ESTlO.'i .1' CO.I.IE:'ir.DII·:.'i1' Ill' XIX' ~Ii·:c:u:.
1.. I.I1TIlr.IE. - LES 1::Tlï)I·:~ l·:CCLl::~L;;TI'!n:S. - u: ~I()U'
'E~IE.'i1' 1l0.L:'iTI'!I'E. - I.E ~U.I'H:IE:'i F.1l.l.0:'i ET I.E
.I.IIQrIS IJE 1'0111'1.. - 1I1::.C1'!lJ:'i C..TIIOLl'!U: .:'iTICII
nOL:!':. .. >(,v' '?
, /' - - "-1
'<JI
~,(;-:, .. /
/'
Au commencement du XIX C siècl;;: le sentiment
-" _./
? (cOmmunément admis sur l'établissement des pre
1 miers évêchés de France les faisait remonter, pour
la plus grande partie':'- seulement au' I1I C siècle.
Cette opinion s'appnyait SUI' les travaux des
. ':: grands - érudits des X'Y1I c et x "III" siècles. ~ On
reconnaissait s-énéralement quïls avaient établi
un solide système chronologique t;t dégagé l'his
toire des légendes~du moyen ftge. Conformément
J
à ces données, les :ngevins, par exemple, ne
reportaient pas au deb du milieu du IV C siècle la
mission de leur premier évêque Defensor. Ils
n'avaient pas pIns l'idée d'antidater leurs origines
chrétiennes que de remonter leur généalogie pro
fane au delà du temps de la Gaule celtique, quand
les Andes occupaient à peu près leur territoire.
13. ru
c
12 LA COi'OTflOVEflSE Df.. L',POSTOLICITÉ DES ÉGLISES
~~ ~
rJ
(Toutes les régions ....de la France avaient fait de
même le sncrifice de leurs_ancicnnes prétentions. ""
Il est facile de le constater dans les bréviaires
diocésains alors en usag·e. ~
Ils anient été élahor6s.. .âï:i x~~~-Bn dévo
tion, ~olTlme en morale, on allait 0. cette epofJue'1.u
plus sùr 'et l'on croyait avoir assez de ,matières de
gloire et d'édification pour se passel'-de miracles
() JI apocryphes ou problémati(Iues.~On corrjge_~nc
J rigoureusement les leçons litlll'gique~Le~
Ù (siens+'sacrifièl'ent l'aréo agitisme de saint D~s,
.~, , dont on fixa la mission <Hl IJ1C si('c e. Les Prmn
çaux distinguèrent entre :'larie de Béthanie et la
:'ladeleine, sans les rBvendiqllcl' comme apotres.
Les :'lanceaux adopti~rent pleinement le système
grégorien CIui les prive de l'honneur d'avoir été
évangélises au lor siècle. L'n seul diocèse, peut-
I~ètre, l'esta fidèle il ~a tradition: celui d~oges.
1 ~ on b]'(~'inil'e de 1783 proclame encore saint
1_ la l'liai disciple de saint Pierre, mais, chose
l'emarfJuable, en repoussant l'apostolicilé de tou
tes les null'es églises. Traditionniste pom soi,
critique pour les autres: la position n'est pas
unifJue (1), ni surannée. Dans un grand pays, en
(1) Le B"éviaire de Limoges (li83) qui affirme si forlement
l'aposloli<2té de slint ~111:.lial. évile 50igncnsement, dans la courie
leçon qu'il consacre à saint Julien, Ionie '1ueslion de date; mais,
dans son calendrier, il le place au IJI' ou au JV' siècle. Le B"é
viai.·c d'Ange",' ('Ii3i), qni se montre Irès sage dans la légende de
saint ?llartial et en refuse une il saint ,Julien - il le célèbre seule
ment avec un sermon de saint Jean Chrysostome, - emploie une
critique bien moins rigoureuse dans les leçons de son saint René.
14. ----- _ .... _._-_. -"-'"~----~-'-----'--"--~--~-
LA UTl-nGll': 1:1
lIESr~ne, de nos joUl's même, chaque pI.'.oYince
t f!1
----
J~ dé end encore srs fastes léfj'endah~In
--
entrain égal seulemcnt il celui [lYCC lequel elle
combat les prétentions de tous les diocl~ses yoi
sins (1). Pour sayoir il quoi s'en tenir sur une
question locale. il faut consulter non pas les él'll
dits de l'endroit, mais les dudes é'crites et publiées
aux alentours, Sur la question de saint :Ii'irtiril,
les Églises de Fr<lnce rendaient leurs procl~oés <lUX
Limousins. Ceux-ci n'étaient pas d'ailleurs entl'e
eux dans une entente complète. Cn des collabora
teurs de l'Histoirc littérairc fut l'abbé p~et,
chanoine théologal de l'église collégiale de S<lint
~Iarti<ll oe Limoges, ce 'lui n'empêche p<lS les
bénédictins, ses amis, de mettre résolument le
prètenou <lr)("re au III C siècle,
Les liYl'es liturgiques dont, au commencement
du XIX C siècle, se sen'ait le clergé· ne rOl~y~ient
d~l~ contr~ll~l' qu'ale maintenil' dans les opinions
scientifiq~s;-ll était à penser que, oesormais, les
ecclésiastiques qui feraient profession d'érudition,
tout en contrôlant soigneusement les assertions oe
leurs deyanciers, ne s'écarteraient point de leur
Les jlance3ux du moins n'eureilt pas deux poids et deux mesures
et ne traitèrent pas leurs légendes différemment de celles des
au t res égl ises.
III Les Espagnols ont des « traditions» comparables à ccll~s.je
Jrs
JI Fr~.!li.e:. il~ réclament particulièrement une. m~ssion de sellt~è-
ques, dIscIples de salOt Jacques ct sacres a Home par sallll'
I~e : Torquatus à Cadix, Eu.phrasius à Andujar, Tesifon à
Berja, Indalecius il Almeria, Secundus à Bilches, Caecilius à Gre
nade, IIesicius à Tarifa,
15. {
14 LA CO:-lTIOYEHSE DE L'APOSTOLJCl'i'l~ DES '::GLISF:"
",
ligne et rempliraient les cadres historiques qu'ils
ilvaient tracés.--
Daus l'assentiment général qui semblait rester
acquis aux conclusions 'des san~ts' ~e2_~C:~IX siè
cles antérieurs, l'observation peut cependant noter
des points inquiétants. Le cleJ'gé ne se rend plus
compte de la quantité de travail que ces conclu
1 sions on t coù té, ni de'la sùre té de la méthode qui
les garantit: ..près la Révolution, les prêtres, peu
nombreux et point ~'i~hes, ne possèdent ni les loi
sirs ni les ressources nécessaires aux solides et
aux 'grandes études, Ils vont il ce quïls considè
rent le plus pressé, il l'adminislration des sacre
ments et à la reconstitution du temporel. Frottés
de latin et de théologie, ils jugent l'histoire comme
lin luxe. Ils revivent les souvenirs des éVI~nements
extraordinaires de l'Empire, ils regardent la lutte
des progressistes et des réactionnaires sous fa
nestauration commeSous la monarchie de Juillet,
s'efforçant d'être utiles il. leurs amis dans la mêlée.
Les siècles anciens leur apparaissent nguemellt
écoulés selon l'ordre providentiel. POUl' les ques
tions subsidiaires comme pour les capitales, ils
~n..!îelon les intérêts de caste, l'économie du
dogmatisme, et un criterium très délicat, « le sens
"c..al"b.Q]ique». l3ien plus, comme à tous ceux qu;-;;-i1t
souffel't, il leur est difficile d'être justes et impar
lif!, , tiaux. Ils s~spectent nombre des ~dées gui o~u r .
~ y...t.-, If c0J:1rs avant la Révolution. Ne-.-DLurai~nt-e.!ks (/(3
-Ir 0 POInt préparée dans une certaine manière? 1Iême J
16. LE ~:O[j'E~IE"T nO~L:T1QCE 15
les décisions critiques comme les opinions philoso
phiques semblent à quelques. uns deyoir C:tre reyi
sées. On ne songeait poin t encore il, réyol u tionner
~ l'histoir~ ecclésiastiq~e pal' I~ re~.tJlU1:a1içw_~_tOU-))
tes le.:>J(~gendes o'u 1 apologIe de 10u$ jçs papes;
mais quelques-uns déjà prennent le chemin de la
fl~action. En 1824, le Brùiaire d'Angers consa-
crait trois leço!!.s pleines de merveilleux à son
apocryphe c;;in_~~0 que les liturgistes du
(XïJlC sièc)e avaient réduit à une comte légende
I!-redigè-e a,-ec beaucoup de prudence. L~ditions
-J
du moyen tige de"Cnaien.!.-~ la mode en religion
comme en littérature; ceux qui ne les aimaient
pas les acceptaient pour faire comme tout le
monde.
En 1820, Baour-Lormian,"de l'Acar1l'mie fl'an
çaise,~ constatait ayec étonnement la faveur dont
jouissaient les anciens récits:
Le bon Yieux Lemps est le seul poéLique,
S'il faut du moins en croire lin nomantique,
Et sur cc point'il peut ,l'oir raison; .
Le bon vieux Lemps nous fournit il foison
Des souvenirs un tant soit peu burlesques;
~lais après tout, fiers et cheyaleresques ... (1)
E:t comme les cc contes bleus» étaient c( à l'or
dre du_ jour )), il lui prit aussi fantaisie cc de se
tremper de cette poésie )).
Lamennais, le prophète de l'avenir, s'inquiétait
(1) Légendes, ballades et fabliaux, p. 3.
17. lf) LA CO:TfOYEfSE DE L'APOSTOLlCITÉ DES ltGL1SES
de ln singulière littérature qu'on mettait en fuycur
auprl~s des catholiques. Il écriyait un jour:
On camp le extr'èrnernenl, pOUl' l'animer la foi, sur un
line in,"dit du P,2uri.N qu'on Yient d'imprimer ct de
repandre partant: c'est une histoire extI'ayaganlc des
1)o,','(~lIh,' de 1.011111111, qui e:,t !Jien tout ce qu'on pannait
imaginer de mieux ponr rendre la religion ridicule, et en
r1l'laclIel' tous le,", igllo'1lnts qni ontulle étincelle de raison;
on y yoit cOlnmellt]e bon père donnait des soumets au dia
hIc :,ur la joue de la rnàc prieure, ct comment, ayant
ordonne ::u léYi:lIlIan de sc donner des coups de fouet,
celui-ci fut .. , ]liI111é nll tir. Qne Dieu yiennc-<'l_nolre aide,
car tout cc qui sc fait, sc dit ou s'écrit, est Slll~lll}
h~I~l (1). -_._
Quelques rares livres d'histoire ou d'hagiogra
phie ~~~osèrer~.~~.~~~~Ji.()ncontre l'opinion rer,ue
tonchant la date de l'évangélisation Je la france
"
et de la fonJation Je ses anciens éyèchés. L'auteur
de la première de ces publications et de celle qui,
aHC le temps, Jeyait devenir très célèbre, était un
prè'tre de la société de Saint-Sulpice, ~r. Fuillon,
compilateur Joué de plus de patience que de cri
tique. Originaire Je Tarascon (2), il croyait la
1 gloi~'e cle sO,n pays intéressée. ft mainte~ir l'affir
i
1 matlOn de 1 apostolat de :Iane-MaJelerne et de
ses ., compagnons dans sa provinë8.'"If prit, du
moins quant li la substance du fait, la défense de
la légende qui figure _ a~ bré~iaire romainLJe
(1) Lettre il la comtesse de Senfft, 15 juin 1829, publiée dans
Fargue" (l'ut'I'es posthumes, t. II.
(2) Cr. Fie de M, Fai/lon, p"él>'e de Saint-Stllpice, par l'auteur
de la Vie de M. Mollevault (M. Gamon), Paris, in·12, 1877.
18. )1. DE FOHTlA 17
?9 juillet. D'après cc récit, :Marthe, lIadeleine,
Lawre et un grand nombre de chrétiens, furent
entassés par les Juifs sur un vaisseau, sans voi·
les, ni rames, ni provisions, et abandonnés à la
mer. Dieu fit aborder le navire à ~Inrseille. Ils
prêchèrent l'énngile lInns la région et y _finirent
leUl's .iours~~ il la Sa.inte-Baum~,!-,azare)
évêque de JInrseille, ~ à Tarascon, etc.
L'étude où JI. Faillon s'elTorçait de remettre sur
pied la mission de Béthanie parut en 1835, en trois
éditions simultanées, la première à l'nsnge des
habitants de Tarascon, la seconde pour la Provence,
la troisième pom le commun des Franç'ais (1).
Trois ans pIns tard, un membre de l'Académie
des inscriptions ct belles·lettres, le marquis de
Fortia d'Urban, sans faire aucune allusion au tl'a
vail du sulpicien, s'exprimait aussi avec une
grande bienveillance sur les trnditions proven
çales. Il admettait, d'après Grégoire de Tours,
que la Gaule fut princip[llement énngélis(:e par
une mission lIe sept évêques, vers 250, parmi les·
(luels sc trouvait Trophime d'.rles. « Il y a
donc eu, remarquait lL d~ Fo!:Ji[l, un Trophime
évêque d'Arles, l'an 250, mais rien n'empêche, si
l'on veut, d'admettre ln tralIition reçue lIans cette
ville, que dès l'an ~8 de notre ère, u_,!- autre l'ro
I phin~e_l}is.0pJ.e_d.e_.:"_ain~
( paul, ait le premier p!:,.è
ché la' foi __ dans ce diocèse. » « On connaît la
(1) Pour lc~ ouvrages qui pr'ésentent un intérêt particulier,
voyez; Appendice I.
19. 18 LA CONTflOVEflSE DE L'APOSTOLlCITt DES ÉGLISES
faiblesse des arguments négatifs. » N. de Portia,
qui était d'l,yignon, n'oublia point de relater il ln
gloire de sa ville natale la Il;gende de sainte
~Iarthe. « Sa vie, dit-il, est racontée fort au long
pal' l'historien des év6ques et arcllenrplCs d'" vi
gnon, où l'on aSSUI'e qu'elle Jlorta l'Ii:v[l1gile. La
cathédrale de cette ville l'honorait comme fonda
tricc, ct l'on veut qu'elle ait élevé un monastère
sur le roche' où cette cathédrale est située (1). »
Quant aux Hctions i.>eaucoup plus célèbrcs de
sainte ~Iarthe il Tarascon, .1. de Fortia n'en
soume mot. Et c'est ainsi que la première restau
ration des légendes provençales scmble procéder
de préoccupations de clocher, pluteH que de zèle
scientifique.
'1 :u fur et. il mesure que disparaît le ..dç':.gé qui
. ' ~t:::tudié' av@JJ.~.Jl-~::.~~~tion, les al'gl~m~
tions du genre de celles de ~I. Paillon ct du mar
quis de Fortia rencontrent plus de faveUl', On
s'éprend du style gothique et ceux qui entrent
dans cc mouvement archéologique éprouvelü une
si grande sympat1lie pOUl' les légendes de cette
époque qu'ils semblen t en désil'cr 1'1Iis torici té,
Leur sentimentalité goùtele moyen lige et le très
(1) ..1 nua/es de I1hi los.Q121/iecln'diewle, j lIillet-aoùtI83S (l. XlI),
p. 9. - Dans le n" fJ,g des Anna/es de phiiMophie ch ..ilienlle
(ill juillet ·18il.) la thèse hislorifjue s'('tale encore: la mis~ion ùes
scptél'èfjues est plr1C<'e vers 2!i5 et l'on dit qu'en 257, ~aint Sixte II
enl'o:'a une noul'elle mis,ion. Les alllorÎII'5 Sil l' lesquelles on
s'appuie sont LonG'lIcval et fléralllt-flercasleI."ün ignore encore
une réaction," .
20. m~ACTlO; A:"T1CnITIQCE Hl
nom'cau. L'espèce de catholicisme l'aisonnable ct
sec qui s'appelait le gallicanisme leur répugne: ils
sont ultramontains et Irurs chefs rêvent d'établir
Il le genre de dé"otion qui règne en JLa~l
1 Espagne. lis l'éclament aussi ce qu'ils appellent
« la science catholique H, ct mc'~prisent, autant
qu'ils s'en méfient, ceux. qlli croient ft la science
tout court. Laquarantainc de yie de saints, la
soixantaine de li,:res d'hi~'toire ~c_clési~-li~li
se publient cbaquc alll~~e, trahit celte me~ialité
)
nouveÎle, aussi surprenante pour les derniers galli
cans que pOUl' ceux qui sont indifférents il la reli
gion. Cn libre pensenr, Chades Louandre, se
livrant en 1843, il un trayail de statistique biblio
graphique, observait qu'il pad un tl'ès petit nom
hre d'œuvres, « on ne trol!'e guère dans cette sc':rie
flue de pitoyables légendes, dignes, sous tous les
rapports, de faire suite aux. histoires du prince
Fortunatus et des quatre flls ;ymon. Telle est, du
~'este, ajoU~e-t-il,. ,la pr?pl'nsion de ~el'Lains espritS)
, ( a tout crOIl:e, (Ill on "lent d El puLber unC( truduc- )/
tion de la Légcndc dorée, que''l'église 1 elle-mème LJ
avait depuis longtemps-ï'eléguée parmi les contes
les plus apocrypbes )). Comme il imprimait son
Il travail dans la Revuc dcs DCIl,;; Mondcs, 1..ou<1n
dre ne se gènait pas de conclure par une dure
admonestation:
( La critiqne ~acrée, disait-il, la ~cience, l'hisloire, ont·
elles des lumières nouvelles il, espérer de J'école ullra
catholique ?'CeLLe école a 'pClju, 'dans la critique ecclésias
21. 20 LA CO:TROVERSE DE L'APOSTOLICITÉ DES ÉGLISES
tique. les bonnes traditions de la science du passé. Pour les
questions scientifiques. elle a ré'lréci ses horizons en s'en
fermant flaus la glose, cl elle est reslée complètement. en
arrière dela pensée modeme. Dans l'hisloire. elle sc mon·
tre'crédule ~c()mme les légendaires, empol'tée comme les
o (ligueurs. Ce qu'clle sait"'de posilif,"de TaVde précis:' elle
c: l'a appris de ceux môme qll'elle combat. Qu'elle sail donc
o '. recorrnai.s:;aQlQ..à l'égal'Cl des libres re[ls~urs:' puisf)u'elle a
reçu d'eux l'initiation. Pout' aHlil' le droit d'être sé'èrc, J0
qu'elle s'lb'c au moins jusf)u'à leu!' nircClu. En allenclanl. Q
qu'clic les respecte comme ses rnaill'es (1). ))
Les éyêques refusent encore de suine cc mou
ycment légendaire, comme ils résistent au mouye
ment liturgi(]llC qui passionne les cur,)s. En 18.16,
l'évè:fjue d'Ol'!éan::, ~rgr Fayet, n'éprouve aucun
emharras ù ranger tout haut ct très lestel11er~t. la
mission de Provence pm'mi ce qu'il appelle' IQ..'?
- - - - - - - - dans le bréviaire --
fables contenues .-
romain: L'éyê·
que de Marseille, Charles-Joseph-Eugène de
~~d, proteste, il est Hai, mais il ne trOUye
pour appuyer sa réclamation, comme il reùt
désiré, aucun de ses collùgues (2). La yaleur des
tl) rlcs ])Cll,C .fondes, n û du ·t" janvicr ·18'J1.. p. '115-'118.
IIClllle
(~) Cf. billon, .Hon. illéd., t. Il, col. 1063-1068, un cxtr;lit de
la Jellrc de C.·J .-E. dc ~1"7.cnod. Ccltc JeUrc dalc'c du 28 f';l'i'icr
186 fut pllbli,'~edans lcs ..Inn. cie lJhil. cll/";I., n û dc rn~i, t. XXXII
dc la collcction. Bonnetty la fit pr{'cécler cie ces lignes 'lui mar
qucnt bien l'esprit dc sa revue - clic contrilJucl':I puissamment il
ia réaction ~nli·critiquc - : « P'·ellve.~ rie la mission de ~aillt
l La:al'e ci .llal·seille, ~ous reccvons de ~l~r l',~vèque de ~I:lrseille
1 l'écl'it sni"ant que nous publions dans nos Annales avec u!)
1 gr:md empressemcnt, d'abord parcc qu'il reycndi'lue ponr la Pro
1 vcnce un de ses plus beaux titres dc r;loi.,c, cclui d';,,'oir en pour
fondalcur de son ]::glisc un disclplc de Ji'sus, clc., elc. Nous nous
associons, du reste, de tout notre cœur ct dc toules nos sympa
22. ~1. FAILLON 21
observations de ce prélat est J'ailleurs diminuée
par les faits de sa naissance provençale, Je sa
'liaison avec ~l. Faillon ct de l'assUI'ance que
M. Faillon lui avait donnée qu'il pourrait bientôt
démontrer Phistoricité Jes chères légendes con
testées.
Douze années de recherches complémentaires,
après sa premièl'e puLlication, permirent en effet
au bon sulpicien Jc proJuire en 18~8 deux énon~es
volumes de. 1500 et 161)8 colonnes, sans compter
la préface. 1;autcUl' ~cherclwit il"y établir, pre
mi~t l'identité de ~Iudeleine, de :1arie de
Béthanie ct de la pécheressc dont parle saint Luc;
deuxiememclü l'apostolat de~ fondateurs tradition
nels de la foi cn Provence. La manière Jont
Jl.Failion cxpose tout J'abord soa sentiment fait
craindre qu'il ne soit prévenu (1); on n'en Joute
plus en le voyant déclarer que les premiers
auteurs de l'opinion contraire à l'unité des trois
I tbic5, au savant prélat, 'lui défend avec tant dc talent les ti'adi
J tions venérau/es de son antique E"lise, »
P) « Il (le lJèJ'e du mensonge) se servit, pour attaquer la
, (d~'otion en'ers sainte ~Iadcleine, d~selt~ _~mi:scie~nce,.E.!:f;~Eljl
'3: 1 1~j;_c-_eLtjrrléraire qui dcvait aboutir enOn de nos jo!!~_à_la
l n~~ation absolue de 10ute.-reli"ion ~e. A la faveur d'une
fau!;.s.e érudition; les beaux esprits de la prétendue réforme com
mencerent par jeter des nuages sur l'identité de sainte Madeleine
avec la Péchel'esse ct la sœur de ;"Iarthe, et finirent par relé~r
i ~_E:!.I)iLdes faples les plus absurdes la tradition de son apostolat
J jU~Jue-là si unh'erscllement respectée. Leur but ultérieur, qu'ils
ne Isslmuiaient pas, était de faire retomber la honte de ces pré
IJ~ tendues erreurs sur l'Eglise catbolique, quïl leur importait de
( rendre ridicule autant qu'odieuse. » Monuments inédits, préface,
p. IV (édition Migne).
23. 22 LA CO:;TflOVEnSE DE L' ArOSTOLlCITI~ DES I~GLlSES
femmes se sont tl'ouves parmi les protestants ou
les catholi(FICS suspects de leU!' llé]'(~sie. Il tait que
des écrinlins très orthoJoxes l'ont soutenue, a ln
mèllle époque et depuis, en pOllvnnt invoquer l'au
iOl'ité Je plusieurs Pères de l'Église. Surtout il
s'abstient de laisser voir, malgré ses intéressants
details sur le tr;I'ail litUl'gique, que si l'identifi
cation a triomphé, c'est que les textes de saint
Grégoire le Grand (lui l'aflirmeot ont été admis
dans les bréviaires, « Le sentiment qui soutient
l'unité des ~laries, dit dom Calmct, est presque
le seul qui ait dé re~'u dans l'Eglise d'occident
depuis le VIle siècle: c'est-a-dire depuis saint
Grégoire le Grand. La possession dont on se fait
honneur aurait été souvent troublée, si l'on eùt
étudié la matière plus il fond et unc moins de pré
ventions (1). )) Le savant bénédictin n'indique
point, lui non plus, comme une source de l'établis
sement de cette créance, l'autorité liturgique du
hréviaire romain et des bréviaires gallicans usant
du texte de saint Grégoire. Il n'y a pourtant pas
il. s'y tromper, et Richard Simon l'avait remarqué
de sa manière piquante. « En 1535, raconte-t-il,
les docteurs de la faculté Je Paris censurèrent une
proposition du bréviaire du cardinal Quignon,
(1) Dom Calmet (Dis~el'la(ion SUl' les /)'ois Jfal'ies) conclut
ainsi: « Ce n'cst pas tant le nombre des sufTl'a~es que j'on doit
complrr ici que la forcc des raisons; c'est dans rtl"angile qu'il
faut chercher la solution dc cette difficulté, üdl nous parait que
les textes des évangélistes sont bien plus favorables à l'opinion
qui en admet ùeux ou trois, qu'" celle qui les confond en une .... »
24. ~1. FAILLa;'; 23
parce qu'il y disait que le sentiment de ceux qui
distinguaient trois femmes était plus probable que
celui qui n'en melUlit qu'une ..... Ces docteurs
faisaient passel' pour une décision de l'Église cc
(lU 'ils lisaient dans lcur bréviaire ..... Une auto
rité tirée du bréviaire ct même de ce qui sc prati·
que plus communément dans nos églises, ne fait
pas une décision. C'est un principe que llaldonat
a établi judicieusement ..... qu'il faut prendre
garde que l'Église a ses opinions aussi bien que
les particuliers, et (lue tout ce qu'elle croit, elle
ne le croit pas toujours comme étant de foi (1). »
Le line de :I.(fai~ reçut de ln presse catho
lique"'les louanges qu elle aime il décerner aux
membres des communautés régulières et puis
santes. Les critiques competents s'y associerent
avec !'éserve en attendant un examen soigneux
des deux énormes volumes. S'il ne sc présentait
personne d'assez courageux pour l'entreprendre,
l'ouvrage pouvait rester suspect. Peut-être même
sombrait-il dans l'insuccès, si son apparition
n'eù t été précédée de la formation d'une savun te J
école capable, à elle seule, de remettre victol'ieu
seme nt su.r.-pied-.la. thèse .de l'.upostolicité des
É~lises de France.
('1) Richard Simon, Lc/.ll'cs choisies, J, p. 2ï4. Cr. ibid., IV,
-;> p. 5"1. - Les adversaires de ce r:dsonnement remarqueront que
;l-Ialdonat le faisait a propos de rrmmaculëe-Conceplion. SlIr la
posJ!lôiî de ce célèbre jésuite par l'apport il ce dogme, cf. PI'at,
S. J.. Maldonat et l'Unit'e)'sité de Pa)'is al~ XVII' siècle,
p. 351-304.
26. f
j
.
';
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'~ .
"r ......
_.
1
'1 CILPITIŒ II
!
1
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,1
(1S37-1S~9)
L'(:CUU: nr·: SOLES~IES. - 1.. TIII::OLOl;n: E: 1IIS'I"Olll E .
{
. I.XDIISTES ET ~II:DIISTES.
. Lc rcstaUl'ateur de l'ordrc bénédictin en fr:lIIcc,
III
d~l~~Guéranger, a dit dans sa vicillcssc : « Si je
Il! valais la pcinc d'ètrc résumé, mn vic n'a été autrc
'1 chosc qu'unc réaction contre ln tendance jansé
Il )
l nicnnc. » On ne pcut s'exprimcr plus cxactement
sürSOi-m(~mc. Ccpcndant, d'après un autrc point
de YUC, on pourrai t encore a ppe1CI' l'abbé de Soles
mes le doctcur de la liturgie romaine, et ce titre
lui parait, dès l'abord, assez incontestable pour qu'il
ne soit plus nécessaire d'insister. Liturgiste et
anti-jansénistc, il le fut au début de sa carrière
' quand, ùgé de vingt-cinq ans, il écrivait dans le
li Mémorial Catholique quatrc articles où il établis
i sait pour la liturgie la néccssité de préscnter,
comme caractères distinctifs, l'antiqu~té, l'uniyer
salité, l'autorité, l'onction.
Tous ce~ qui ~ent corrigé la liturgie du
moyen âge, tous ceux qui en avaient critiqué les
légendes, comm;t;us ~eux qui~'éta-ient mêlés dcs
2
27. ~_ Il? 'Il -"=-f ~~~ r::~
-----.--. --
26 LA CONTTIOŒnSE DE L'APOSTOLIClTi, DES J~GLJSES
~ c~rove_l'ses de la grÙce dans le sens a~~s!iui~n')1
J'3>
devinrent ses ennemis personnels. Il chercha iJ les
convaincre d'erreur sllr les terrains m0mes qui
semblent étrangers il la liturgie ct au jansénisme.
.-.ussi ne négligea-t-il aucune occasion de contre
' dire ct de désavouer Tillemont, Fleul'v, Ellies
(
'~ , Dupiu, I~~~noy. Ë_9-illet. Jl-~ta sa~-~cesse de
professer des principes qu'il semble croire OppOSI:lS
aux leurs. Dès 1834, il (~criYait :
/1 « Le génie des Baillet cl des Lrrnno.· domine encore,
nOlis ne dirons pas Irr ~cielll'c, mais les habitlldes relig-ieu
ses. Le 1re III iCI' sentimcnt qt!-ü fajJ. Ilailre chez un~r:llld
J nomhre le récit du Illii'arle l'st a (() lance; e Hal crr lali
quc, au contraire. ~e sent toull!'a1>()['(! iiiclinéÙ croire. l'our
Inl, la critique, taule nécessaire Clu'cllc c,1, est/a /01 Od;C1W';
pOlir les autres, ln loi odiclIsl' c'estl'o!Jligalion ,l'aùmettre
"le prodige. Nous ledisons ùonc franchement, nous nous l'an·
11 geons ouverlement du cûté ùes premiers (1). )
Dom Guéranger '"ppliqua ces tendallc(~s ù la
queslion des origines des églises. Elle était il
l'étude dans le petit monastère, puisqu'on y reeueil-
Iait les mat!~riaux d'une histoire locale qui devait
l être intitulée: AI/I/ales ecclésiastiques du dio
cèse du lIfal/s, L'ounage fut publié bien plus tard,
sous un autre titre, par dom Piolin, qui utilisa les
l'echerehes de ses devanciers et entra dans le sys
tème de l'importante dissertation qu'ils avaient
esquiSSée sur l'époque de l'établissement du chris
tianisme dans le l'bine. Les cri0queSdu XYIIl e
(1) Œuvres complèl~s du H. A .-J1. de Liguori, page xxxnll.
28. L'tCOLE DE SOLES)!ES 27
siècle se trouvaient malmenés dans ce travail, à
tel point que dom Guéranger voulut le laisser
mûrir et prit le temps d'en préparer la publication.
On fit la manifestation de ses principes directifs
dans Ull ounag? similaire, publié en 1837, sur les
(
Ol'igillcs dc l'Eglisc Romaillc. On y avouait la
rùaction contre les savants des deux derniers siè
cles, mais sans oser la justifier:
« :'ious 1I'ons pClIl-êtrc fllil asscz pOlir nolrC conYiclion.
'lais nonscxpliqllcrdcyanllc pnillic sm dcs qncslions anssi
grosscs dc qncrcllcs nons cùlsClllillé par lrop prvsomplncnx.
l'Cllt-~lre lin jonr l'o,crons-nolls. lorsqlle nons cn allrons
acqllis Ic droil. JII~qne-Ul !lons dirons scnlcmcnl. cn LOlllc
~implici[v. CjIlC lorsqllc, pal' le passé, ccrlains écrivains
cillholiCjul's paraissaicnL si forl. préoccnp{'5 dc la crainte de
croirc [l'Op, ils s'cxpusaicnl ail dangcr hien autrcmcnt
séricux dc nc "as croirc as,cz. f.c justc tit de la roi. : c'csl
nnc parolc dc Dicn dans Ics Liï'es Sainls (1). ))
Pourquoi donc un croyant, celui crui a la vraie foi,
chercherait-il très loin les preuves d'un système
historique crui peut alléguer en sa faveur la parole
des saints Livres et l'autorité de la sainte liturgie?
~Iieux vaut affirmer sans perdre le temps il discu
ter. Aussi, en 184.1, en dédiant le tome premier de
son Annéc lit li l'gigllc, il l'aryJlcyêqup de Paris, lIsr
Affre, l'abbé de Solesmes l'appelait le plus natu
rellement du monde le successeur de saint De!2Ys
J « l.'1.réopagi te )).
(1) Les O"igilles de rJ~'glise ROn/aine, par la commnnaulé de
Solesmes. Paris. Deuécourl (Imprimé cn 1836 el parlant celle dale
011 titre, ce 'olnme ne parut 'lu'au pl'intp.mps de l'année suivante,
comme le dit dom Piolin dans D. P,-L.-P. Guéranflel', p. Vl).
29. 1-1
1
, 1
~1
;
28 LA COl'TROYERSE DE L'APOSTOLICITIt DES ÉGLISES
': 1
i i
i
Dans une publication suivante, les Institutions
:1
l liturgiques, en indiquant le bréviaire parisien
Il
1 de Harlay, le pere abbé exprimait encore plus clai
(
.!,
" rement un système historique opposé à celui
i qu'avaient élaboré les patients travaux des éruç!its. "
i
1
C( Les traditions catholiques les plus vénérables. dit-il,
~
fU~n[ ~es. l'our commcncer par l'Eglise mème de
'il,
,
tir]
l PariS, léSCOrrecUfurs du bréviaire la desMrrrèrent de sa'
1
viëTI1e gloire d'ètre fille doC saint D.sgrs l'Aréopagite; ils J
pOl"lerenl leur main audacieuse sllrI'efameux prodige èjûi
1/'3 suint la décollatIOn du saint fondateur de lellr propre
) Église. Ils distinguèrent sainte lIarie-~ladeleine de ~Iarie.
i')l II
sœur de Marthe: ils ôtèrent il cette dernière la qualité de
vierge ct il saint Lazare celle d'éYèque )) (1).
(, C'était ainsi qu'il fallait parler pour conquérir le
l'
,l
I
}
succès. La congrégation bénédictine de Solesmes
était bien du temps et du milieu décrits par Charles
t Louandre. Au lieu de résister à l'entraînement
j légendaire, elle se plaçait à la tête du mouvement.
Ceux qui étaient désireux de parvenir, de se mettre
11 en lumière, d'afficher une' savante orthodoxie fai
saient écho. Un jeune prêtre de talent, l'abbé Dar
boy; se distingua pnrmi eux. Il anit, lui aussi,
,
1',,
..
I
une- malheureuse -thèse fi r. éhabili ter, celle de l'au
thenticité d_es œuvres deJ'Aréop!$ite, ct il essaya
de deconSlderer ses ndyersaires SUl' le terrain dog
matique. Racontant les malheurs de l'histoire, si
i / longtemps et si odieusement défig~.!:ée, il disait:
{
f.-'r
/l (1 L~ontd~buté; c'est ane le leyier d~ men
H (1) 1115t. lit., 18'>-1, t,lI, p, 4-2,2- t!dil.
1
Iii
30. LA THÉOLOGIE Di IIlSTOIlE 2()
songe qu'ils ont ébranlé la moitié de l'Europe ct, aujour·
d'hui même, ils ne sont pas encore il boul d'impostures. Les
L ~~é~ sont ,CI1US ensuite; secte chère il ceux qui
aIment l'ostentation cie la verlu, elle n;~il de la fourberie.
ct, pour 'ine, clic n'l'ni pa~ assez du génie de Pascal, il
lui fallut un calomnieux pamphle!. Les llIag-isl1'ats de Louis
~ ~.
XIV ct de Louis XY continuant les conseillers de Philippe
le Bel, elles philosophes du XYlU' siècle continuant tout ce
qui a'ait été mau'ais a'ant eux, iultt~rent conlre ies'ëiroits
de la hjér.ill'chie, con Ire les dognies de la foi al' la du' li-
cTŒ: nlenlir. c'élal ellr ((''Ise. 'n ln certains gallicans, cc
n'est pas moi qui !cnr choisis celle compagnir, certains gal-
,'-'-1
p
licans rt-digèrent l'histoire ct firenl (les recherches critiques <>
rl'Wrès un s"sLi'nIQ préconçu, cl a'cc le parti pris que
( Icnrs ali versai l'es an r.1ien Ît;:;"1't. ct l'on sa i1 quelles (-normes fi
('
rt immcnses fanss('ll'S ces prl'occupalions accumulèrent rr
r
'0
SOUS la plumc ri 1'('1'1"<11115 eccll,slasitques...... TouL n'esrpas
(IiL sur les asserLIQns passionnees ct gra~ment part iales des
~'lenr}:, des Baillet. rl(.'s~fj Ilemon l ct .lïésL~OY; ?n ~crai 1
r~,
ctonne lie la longue liste des causes Indlgnemenl Jug-ees cl ~-,
( des proci's :'1 l'é,jser, que la justice de l'a'rnir appréciera J
mieux sans rlollte Il (1).--- . ---
Comment, au soir Je sa vie, l'auteur de ces
1
ri
~ arguments extra-scientifiques '1es aurait-il jugés f'
fT'
quand, archevêque de Paris, il se trouvait lui-
même rangé parmi ces gallicans qu'il avait déclarés r
en si mauvaise compagnie? ~
d~,
--
La positio.n traditionniste devenait insensible-
.
D arbo)' O~'lIv"es de saillt Denys l'A"eopagilc (181-5), Ïlll.!:2.-
. 1. - Il est il remarquer que J'abbé Darboy ne s~P'!:o-
nonce Eas entre les deux opinions qui identifient ou diSTlnguenl
/
_:
-
+>
'7t
C'...s ;
!'
I.'ït.réopagitc et le premier é'èque de Paris. « Deventl plus lard :i.!!C-) 11"
cesseur de saint Denys sur le sjêie de Paris, il s~J:.!0$~.~i- V'
::r "e~nf il l'0rinion qui donne trois siècles de plus. d'existenc2,. il
cetle illustre Eglise, en reculant l'époque de sa fondation Ju~u'au,x
t~p~_ ~Q9slQli'lu!s. » Foulon, Histoi/'c de la vie et des œlW"CS de
Mgr Darboy, p, 60.
.......
'" y 'LWv-~~ r-C-" 0..... 2.
k T"U7-~' ~r- .~
31. 30 LA CONTROVERSE DE L'APOSTOLî.ITÉ DES I~GL!SES
ment moins nouvelle et préparait une évolution,
Aussitùt que parut la seconde défense des légendes
provençales, om Guérann'e l'ap rouva ublique
ment, « Le be ouvrage de:1. 'abbé Faillon) dit-
f il, SUI' sainté :Iarie~:Iaclelcine,·est un grand
l
1 exemple et un puissant encoul'a~ment pour les
amis de la gioire ùes saints, et nous ne craign-;ns
pas de dire qu'il y a urgence pour la science catho
1
lique de diriO'er ùe plus en plus ses efforts de ce
'J côté» (1)~ Pi.!!1i) le futur cardinal, écrivit dans
le même sens un long article hi1JliQgra~ue que
publia Lc COl'rcspondant (2).
C'est ainsi qu'une affaire Je critiquc, composée
J'éléments multiples et complexes, se trouvait
O)'-!?om Guéranièl) Iiistoi,'e de sainte Cécile,l8!!!J (édilion
princeps), p, XXIll. lJans cet ouvrage (p. 3Î5), Till~!t est appelé
« l'un des plus savanls et des plus dangereux adeptes de 1'01'1
l Ropl )J; son (CuITe l'es ire « un ml' ris su erue et s 'sl('maliCjue
l pour les monuments les lus chers à lu piété calho igue, )l ün histo
rien e nuance très conservatrice, mais sans passion, s'exprime
d'une aulre mani0re : « Tillemont, si prudent, si sagace, si
9 éloigné de tout excès et dont l'admirable sincérité n'a d'égale que
son immense ('rudition )l. (Allard, l1istoi)'e des pel'sécutions,
introd., p. '1).
(2) No du '0 octobre '18Ml, 1. XXV, pp. GO-64. Voici comment dom
Pilra s'eIpriffië-surJePSeudo Raban-~Iaur : « Ces actes porlent
bien le cachet de lenr époque ct le caractère particulier et distinctif
des écrits de l'illustre h'ëque de Mayence, la sincérité; il Y révèle
sa sincérité, une science peu commune, etce qui est plus fr.ppant
encore, une grande habiletê â exposer quelques lignes évangéli
ques, sans sortir du texte s;)cré, sans rien perdre de la tradition,
etc., etc. )J. Ailleurs dom Pitra souhaitait que les anges du mont
Sinaï fissent arriver les acÎfslle sainte Catherine à quelques mains
aussi pieuses el ausSi savantes que celles qui ont réhabilité les
J traditions provençales. (Etu.des sw' la Collection des actes des
saints, p. LXXXIIJ),
32. L'ÉCOLE DE SOLES1E5 31
englobée dans le bloc d'une réaction entraînée il. la
résoudre d'enthousiasme et sans distinctions, au
détriment peut-être de la cause elle-même. Pour
savoir à quel point ce parti deyait réussir et com
bien ln question elle-même deyait faire corps ayec
les autres reyendications, il sufTit de rappeler un
éloquent panégyri ue rononcé, en 1887, par
l'éyèque d'Anger, :I~Fre ~
« ,Je {l'ouve, disnl·il, dnns cc demi-siècle écoulé de
grande,; lulles suivies de griwdes victoires. Oui, l'hérl'sic
jansénisle détruite jusque dans ses ,'ncines, le gallicar:!.i~c
( v,liIïc'u' sans retour, J'infaillibilité doctrinale du~"ouycrain
pontife .cJlosorlDnis hors de tout conteste, l'unité de la prière
pnblique universellement rélablie comme le signe éclalnnl
de l'unilé de la foi, la scimce ct l'irllâi/ion rarnenl'es aux
Taies somces ct a!!i'anchies de (a (/1" ]Jljj/l,qis. la ?lo/ion de
{'ordre sl/rlla/urel /Il iCI/:r comprise' en elle-mème cL. dans
son a]llilica/iem à l'hi,,/oire comme il ln direction de la vic
humaine, l'ordre monnstiqne relevé de ses ruines ct l'l'pre·
nant sa place dans 'I~glise de France, "l,ili!, cerles, de
lI1ag-nifiques résullats qni font de cc conrt espace de lemps
une l'pOqUC ménlOrahle entre Ioules .... 01', qunlld je cherche
dnns cc mouvement de renaissance catholique cn France
les hommes ct les inslitulions qui lui ont imprimé la direc
tion la plus ferme ct Sl'll'e, je n'hésite pas il placer
au premier rang dom Guéranger ct J'abbaye de SQlcs
mes (1), 1)
Des théologiens, ne peuvent aspirer il. un plus
,r
magnifique • . c'est presque l'auréole des doc
éloge :'
teurs de l'Eglise," objet de l'admiration et de la
(1) Les Fê/es jl/bilaires de l'abbaye de Saint-PielTC de Soles
mes, 9. -10 ct H juil/ct 1887. Gr, in·8 de 58 p., 1887, Imprimerie
Sainl-Pierre de Solesmes,
33. :>'2 LA r.ONTIOY EnSI' DE L'. rOSTOLIC.IT~: nES ItGLISF:S
pieuse Qmbiti~n' du grand abbé. Et cette couronne
de titres d'honneur est d'autant plus glorieuse
qu'elle corresponJ parfaitement il son programme,
. formulé peu il peu et de plus en plus netli'mellt
de 183 / il 18!19. ~Iais la position que son illustre
1
autelil' y prenait était celle du tbëologienJevant
1ui la thèse apostoliciste ~ traditionniste sc pré
sente en effet avec deux arguments, ou deux prèju
gés, très forts: elle est plus conforme il la piètc),
elle est appuyëe par la lit1ll'gie.
Pour les catbolillues, au moins comme on trempe
orJinairement leur foi ct lem tempérament, cette
opinion est plus pieuse. Si on enseigne que la P(!che
l'esse, ~Ial'le-~IaJdeine ct ~Iarie de Béthanie sont
probablement trois personnes dif1'{'rentes, mais
1u'à conp sùr, il faut en distingller deux; que tout
ce que l'on sait sur elles, outre le récit énngé
li1ue, est la vénération dont jouissait le tombeau
de JIadeleine à ]~phèse : on repousse durement et
sèchement la personnification d'une grande repentie
languissante J'amour ct cl'expiation dans une grotte
sauvage, pendant 1ue sn. sœur, toujours active,
prècbe l'é"<I1gile sur un Jes cbemins de la Gaule
et que leut' frère Lazare, le ressuscité, crée la com
munauté chrétienne de la cité Pbocéenne. Préten
dre quc telle province reçut la prédication de cc
Joseph d'Arimathie qui donna son sépulcre au
Sauycur, Je la Véroniqne qui essuya sa divine face,
ou de Martial, un témoin de sa résurrection et de
son ascension, est plus beau et plus touchant que
34. LA THÉOLOGIE E:'i: HISTOmE 33
à
de reporter cette prédication un évêque ambutant "
dont on ne sait que le nom, sans même avoir la
possibilité de le dater. Et si ces origines pleines de
charme et de gloire ont été adoptées par la foi de
nos ancêtres, pourquoi se laisser déposséder de
JI ces traditions? El1~_~~~_« reçu lasnnction_Q~s
représentants de l'église, archenques et é'êques,
lesquels, apparemment ont dù sm~rr ce qu'ils fai
saient en se portant garants du culte public: on
1 peut bien supposer, jusqu'à preuve contraire, (pIe
~ les critiques ù'aujoUl'd'hui n'en savent pas ùavan
t.age, et même moins encore ) (1).
, Bien que toutes les préten tions des apos tolicis Les
.j ne soient pas sanctionnées par le Lréviaire romain,
celui-ci en garantit un Lon -nombre et des princi
J pales. L'aéropa~iLisme de sainL Denys, la mission
de sainte Marthe, n;taienL·ce pas des cro)'anccs
( autrefois) acceptées de tout l'Occident, cl s'il n'y
'a cu qu'un Îéger nuage élevé par les entrepreneurs
des bréviaires gallicans du x'"!U c siècle, la condam
nation du procédé et des tendances de leurs livres
n'est-elle pas une nouvelle garantie?
Un légendaire ajoute:
« Quelqnes membres de l'école historique soutiennent que
le christianisme avait à peine été prêché dans les différentes
parties des Gaules avant l'érection des évêchés, placée par
eux au m' siècle; que le centre des Gaules ne Cu t pas entamé
avant le m', réservant pour le IV', le v', ct même le YI', la
(Ip'emprunte ce raisonnement, souren! fait, i(~!gr Dellet. Les
Orillines des l:i1lises, DOU'. édit., 1898, page 250.
35. 34 LA CO:TROVERSE DE L'APOSTOLICITb; DES ÉGLISES
prédication dans les Belgiques, l'Armorique et la Novcmpo
pulanic. Ils concéderaicnt sans doute quo lcs nombrcux
missionnaircs du 111' ct dl IV' siècle ont été prl'cé(1L's sur
difTércnt" points par qlelqucs l'arcs apôlrcs dont lc passagc
rapi(lc laissait il pcinc dc h!gèrcs traccs.
'~ « Ainsi poséc, je ne crains pas de le dire, la thèscrlc l'écolc
f'l historiqlc cst alssi contrairo il la scicn C_C_(ll 'il l:t.r!.~'ll;. car
) ('Ilc contrcdit ln enscmble rlc tcxlcs, rlc documcnts ct do
IralliLlOns. cicvallt ICS-Cjucls doit s'lIlchncr (ouf 'l'al sll1:lIlt;
dc plls, ello supposc dans saint Pici:ré,ëTaï1s sainlî'!ïüïct
~
dans tous les hon111lrs apostoliqucs unc apatbic qlC l'on ne
saura,it acccP,tcr Il1ll1IC dans les prC/ll,ierS pro pa g atcurs,d'llJ1ll
doctrine pmcmcnt hllllaine. La e.ro'j(lcnce ,Cllc-m.Q!lle
scr!li.t cn ~alse, clic qui, pcndant si longtomps, aurnit
l'C'fllSé il de grandes nnlions la connaissance de l'uniquc
moycn de s.dul.
« 1) que l'on ne dise pas: il cxistc encore aujomd'hui
des peuplcs alxquols la bonne nouvclle n'n jamaiS' (:[é
annoncée; cal' il scrail bien dimcile de démentir cclui (pli
al1irmcrait positi'emcnt le contrairc cl souticndrait que
loutes les contrécs ùe la tcrre ont rcçu, ct presque toutes"
iL plusicurs rcpriscs, lc bicnfait de la prédicnlion é'ang-6
lirIue ») (1).
Qu'une telle position de thèse, avec de sembla
hIes arguments, soit fatalement suspecte aux ratio
nalistes, on le co~prend aisément.::;: Ils écarte,nt
(l)filOmbi0S, J., D. relig .. 1877 (l, II), p, 1):)6-87, - Il
e~t pir]1mnt pourcl'"luer Je progrès de la critique de r;1,pprochel' cc
tc,~le d'Ilnear;;lIrncnl"lion d'I1u;;ues de Saint-ïclor : « Si ql/i,~
all/em pc/'tilla:c e~~c cclii ct atlflllc fllljl/slIloc!i alilJl/os, ill ignnti,~
,'cgionilms et rcmoUs taral'tnn scriibl/s c/cgcl'e contcndat, ql/i,
rOl'tc mandatHm divinllnl dc lJrl'cipicndo baptismatissacramellto
llon accepc)'i1l1, ego rclncminem lalem esse, t'cl si. (orte 1IIi'1l/i,~
cs/" si ej/ls cllipa non obstitisset, al/di/'e ct scil'Il l)O/llissc ac
de/missc, sille clmctatione arfil'lilO, ma,rimc Clon ScritJtw'a cvi
dcntc)' clamct : « ln omncm tel'l'am c:ririt smws conon; cl il'
fincs ol'bis /el'rac l'Cl'ba conon. Il lIugues de Saint-ïclOl', Dc
sacramcnlis, lib. Il, p, 6, c. '.
36. 'l
)[AXnIlSTES i);)
dédaigneusement ln révision du procès des légen
des.' Certains catholiques la traiteront sans plus
d'égard, et s'ils louent l'érudition de<:SfJ§njon)
1 ils se hùteront de r~ppeler so.~ entho~sia~~~. pe~'
J petuel pour ~ les Peres, qu il a celebres
avec les accents de la plus tendre piété, mais sans
rien indiquer de cet esprit « rassis )) ou peilt-ôtre
desséché avec lequel on se l' .présen te ordinaire
ment le savant. Quand onl- GUér~nO'er professe
son inclination il croire beaucoup, on évoque le
sOll'enir de son i~llr6pide glorification dil(Iaiie
d'&ré<1!J ci ce qui fut appelé un besoin de créer
Hne sorte d't':"angile supplémentaire, tiré de la con
cord a nce de celte franciscaine espagnole et d'une
autre « visionnaire) allemande,@îcIjMJ~e
~0~a lutte sc porte SUI' la gt"ande difliculté qui
ait les alternatives de l'intelligence humaine: tout
croire, ne rien croire, croire aycc poids et mesure.
Les « minimistes ) tiennent un langage sévère et
duquel, pour ne pas y revenir plus tard au milieu
de l'exposé historique de la controverse elle-même
il vaut mieux reproduire maintenant quelques con
sidérants.
Pour être selon la science, la prudence et la
charité, le catholique doit se préoccuper de ce que
les incrédules peuvent croire ou penser. « Il n'est
pas chrétien et il méconnaît tout ensemble le prix
de la foi et la valeur des âmes, s'il n'est pas atten
tifà écarter, autant qu'il est en lui, tout ce qui sus
cite des préventions contre la sainte loi de Jésus
37. ,-----
36 LA CO!TnOVEnS8 DE L'APOSTOLICITÉ DES ÉGLISES
," Christ et contre son Église (1). )) Il a tort quand il
~I défend comm~pie_uses et autorisées des légendes
pué!'iles et controllvées, en face de médiévistes et,.
<::- d'lJisto;1eM de pr~fessior{qui saisissent ,l'énormes r
o fautes de cl'itiquc, de lamentables ,confusions, SUI'
des terrains qu'ils connaissentJ2.ien.' Des laïques sc ( 1
trouvent ainsi fatalement amenés à craindre que
ces intrépides apologistes ne commettent des l'qui
voques Lien autrement graves SUl' la BiLle ct les
sacrements, dont eux':' sans études spéciales," ne
peuvent juger. « D'aillems, si vous avez la témé
rité de mettre en principe qu'il faut npprounr et
propager tout cc qui peut soutenir et animer la fer
Yeur de bons chrétiens, entendez donc vos détrac
teurs, qui de là prennent texte pour vous reprocher
d'exploiter la simplicité et la crédulité des peuples.
Et, après tout, si vous n'ètes pas dans la vérité,
ils ont le droit de vous l'ailler et de médire de vous,
plus que vous n'avez celui de Lruver leurs sarcasmes
et leur détraction. Souvenez-vous donc que, hors de
la vérité, il n'y a point d'édification solide, et que
toute dévotion qui n'amait pa~~érité pOJH:•.bilse
serait une dévotion fausse et peu digne d'un chré
tien; car Jésus-Christ lui-même ne serait ni la 1
voie, ni la vie, s'il n'était pas lu (Jérité » (2). Ett 1
quand vous vous appuyez sur de prétendus argu- 1
ments liturgiques, sachez que, II dans l'espèce, la '
liturgie ne diffère pas de l'histoire. Les légendes
('1) Henri Bernier, Le Doute légitime, p. 98.
(2) Ibid.
38. )l:DlSTES 37
ùes bréviaires ne sont pas alltérielll'es aux p~ion
nuires; le plus som'ent elles ùérivent ùe ces ùer
niers. :>C'est ùonc s'abusel' ëtI'angemcnt:' qne ùe 1 lJ}
table~ SUI' les traditions ~itul·Bi9.~.~s; celles-ci J
valel}t tout juste autant que les ùocuments 1Ji~i
, q~s~dont elles sont tributaires (1). »
(1) SUI' celle dcrnièl'C cLjeclion, cf. Dellet, Les ()"igilles des
,( tgli~e~, nOll', "dit., HmS, p. lU.
t,
i
l
)
i
1.
1
1
f ::=:.
1
{
f
.,
iJ
39.
40. CHAPITRE III
(1850·1857).
PllOGllÈS OF. LA 1l1::ACTlO:'i A:'TICllITlQUE. - DO~1 PIOLI:'i ET
.'. L'lf-istoire de 1'j~!llise du, .Jans. - L'AIIBI~ AnnEI.LOT ET LA
LlTUIIGIE DE LI~IOGES. - L'AIIGU~IE:'T LITUIWIQUE 11111:;
DU T~;~lOIG:'AGE sun LE Il.l'l'bIE DE CO:'iST.;'TI:'i.
L'approbation donnée pal' dom Guéranger au
livre de 11. Faillon entraîna l'adhésion de ses amis
ct fit entrer l'afl'ail'e dans une phase 1I0uvelle.' A,
c~te é~ue: les catholiques fl'ançais pensaiept
par groupes. Ils étaient divisés en un gr,!n~_.!!QE1-
bre- de'-partis qui s'appelaient respectÏ'ement :
gallicans ct ultramontains, liturgistes autonomes
( ct romains, rigol'istes ct probabilistes, sc mi
rationalistes et traditionalistes. Des affinités
secrètes faisaient· qu'ordinairement le membre
d'une faction, par là-même qu'elle tenait pour telle
doctrine, savait pertinemment à quoi s'en tenir sur
toutes les autres. Désormais il y aura une nou
velle division, portant sur les matières d'érudi
tion et formant l'école historique et l'école
légendail·e. Chacune vel'I'a prendre p'art à la dis
pute--;;:;-qualité d'auxiliaires et d'adversaires les
..... l.
41. 40 LA CONTROVERSE DE L'APOSTOLlCITÉ DES ÉGLISES
autres partis (1). La presse quotidienne et hebdo
madaire s'en mêlel'U. La Correspondance de
Rome, parfaitement incompétente, déclal'e l'OU-]
( nage de ~ le plus savant qui ait paru
depuis deux siècles en matière de cI'itique et d'his
toire ecclésiastique. L'Unive!'s en a déjà a~té
la thèse comme une vérité théologique. Les livres J
se-pron"oneem-el1~nsëcfiîence .
Rohrbacher, dans la première édition de son
,-)'1 Histoi,rc de l'ÉglL:~e,~n'~Yait rien ~i(: de l'~po:tolat
de sUinte ~IadeleJne III cl une miSSIOn d éveques
envoyés par saint PielTe et saint Clément. Il rap
po:'Lait le martyre de saint D~s et de saint
Satul'llin il la persécution de Varérien (2), ce qui
« insultait les traditions catholiques les plus véné
raLles» comme celle (Je l'aréopagitisme. Dans la
seconde edillOn, pal'ue en 1850, le bouillant ulll'a
monTalll est asse~ sÙr des thèse~ }_I:9:~itionni0es
ll-()ur en tirer une apolog'ie des livres liturgiques
JI d~e et une aceusation~E!~s ._~~_ntre.. le
(1) ( Toutes les questions s'enchaînent par un lien plus ou moins
apparent, mais réel. Aussi un ébranlement opéré dans·quchlu'une
des branches de la science, la secousse ne tarde pas à se faire resso!
tir dans les autres rameaux, etc. » (Le P, ~lontrouzicr, S. J., sur
l'Aposto/i.dté des É.'glises de Fl'ance, Revue des Sciences ecclés.,
t. l, 3- série, p. 45),
(2) Rohrbacher, His/oil'e, t. V, livre XXIX, p. /190'.-Eremière
édition, 18i3, Voici comment dom Guéranger lui-mème Jugeait
Cërte œuvre: «J'avoue ingénument que M. Rohrbacher n'a jamais
l été à mes yeux une autorité sérieuse en fait de science historique,
et qu'il est plus d'une page dans son immense récit sur laquelle il
serait à propos d'élever quelque réclamation; ce qui soit dit
a,'ec tous les égards qui sont dus au pieux et laborieux écrivain, »
Essai su,' le Natumlisme con/empot'aill, p. 244.
42. ";"'."
PROGRÈS DE LA RÉACTIOl':
~~J
sièele)Les résultats de la critique avaient été '
XVIIe
admi-s, dit-il, «( parce que tel était l'avis de~u-' Il']
~ et de ses pareils, qui marchaient plus ou moms .
SUI' les traces .e~ et ~». -'
Le baron enrion fit, un peu plus tard, dans
son Hist~- gel1erale de l'Église, la même évolu
tion ue Rohrbacher (1).
dO'' ;Iisli abbé mitré de Sainte-:Iarie de Deg,
en Hongrie, adopta de confiance (1851) les résul
1 tats du travail de Paillon. Comme il ne vit en
Palestine aucune tradition ou aucun monument
s'opposant au voyage de sainte :'ladeleine en Pro
vence, il écrivit entre al1tres beUes choses dans
( son célèbre récit de voyage: « Les traditions ct
l les monuments qu'on trouve en Palestine sont tous
favorables à cette opinion (2). »
(1) L'extension des idées Îc'g-enclaires se fait sentir:i celle (:p0'lut'
de diH'rs côtés. Il J' ent, par exemple, de 1850 â '185/~ unc conlro
verse sur la Cl'Ol'allce 3U ciJristianismt' de S(ni'qnc. Pour Je fond
de la question, l'oye;: 'uùertin, Sdni''lile el saint l'aul, l:'tl((le 510'
les mppo)'/s sllpposl!s-"êii/l'e le 11/ii/osol'fw et l'apùt"c (Pal'is,
Didier,lSGD, in-S, v-4--.6 pp.),
1
(2) Les Saillts Liellx, 3- édilion entièrement reVlle et considé
raùJeméîït~enlée,t, Il, p. 681. Yoici quelques autres citations
curieuses:
" Raban Maur, 3r~hel'éque de ~13yence, possédait les actes de
L3;:are " (p. (76).
« Des travaux anssi savants 'Ille consciencieux, fails ces derniêres
~
années. ont établi de 13 manière la plus évidente 1'~!l_I,!Je!!D~té des
J anciennes traditions quë'1lê""tém(r.iires écrivains s'é!<lli:~_e.!!'?r~_és
de détruire ... Il est cc,·tain qne L3hr'e~~lartheel~bdelelne, ~[ar-
eelle, les saintes femmes Salomé ct !llarie, Maximin. Parmenas,
(
et plusieurs autres chrétiens, furent jetés dans une barque sans
gouvernail, etc. l) (p. 681), - Dans la premiè:re édition, ces pas
sages se trouvent aux pages -177-179. Le procédé a été relevé par
M. d'Ozouville, Lettres du 15 aVI'il 1854, - !llgr Mislin, ancien
...
,
·1
43. 'o'
42 LA CONTROVERSE DE L'APOSTOLIClTÉ DES ÉGLISES
Les conclusions de :M. Faillon allaient en se
vulgarisant comme des données acquises de la
science, quand parut en 1851 un livre qui devait
jouir d'une grande importance dans la question.
Dom Piolin, de l'abbaye de Solesmes, publia le
~
premier volume de son Histoire de l'Église du
~ Mans. L'introduction établissait le système chro
nologique de l'ouvrage e~ononçaitneltem~,:t
p~)'orig'ine apostolique. En rappelant le travail
du sulpicien, le bénédictin, au lieu de l'examiner, ne
I
l
fût-ce que dans une note et comme en passant, le
déclarait « l'un des plus beaux oUYrages de criti
, que qui existent dans notré littérature (1). » A la
"vérité toute la thèse de dom Piolin. consistant il
soutenir que saint Julien a reçu sa mission de saint
Pierre ou de saint Cléll1ent, ne repose que sur
deux autorités: premièrement la vie de Marie
~Iadeleine publiée par M. Faillon, et faussement
attribuée il Raban-Maur, secondement les discus·
sions du concile de Limoges, en 1031, où, il pro
pos de l'apostolicité de la mission de saint
Martial, on parla aussi de celle du premier évêque
du Mans. Malheureusement pour son argumenta
pr"éccpteur des empereurs Fr~nçois-Joseph ct Maximilien, était
grand ami d OUIS "<'uillol. •
(1) Intl'oduc Ion (e lstoi,'e de l'Eglise dll .Hans, p. LIV. - La
partie importante de l'introduction sc troul'e aux pages xc-ex où
l'auleur cherche il proul'er que saint Julien a reçu sa mission de
saint Pierre ou de saint Clém<'nt=:"Sur la fin de sa vie, dom Piolin';o
n'admellait plus l'authenticité du pseudo-Raban-1Iaur. D'après
M. Pau) ~Ieyer (Hist. litt., 1. XXXII, p. 96, note Il. c'est selon toute
apparence au XII" siècle qu'il cOD'ient de placer celte compo
sition.
44. ~ ;+'~';' -'
. ..
DO)! PIOLlN 43
tion, l'auteur oubliait di prou~; l'authenticité du î~
premier doc:lment justement révoquée en doute;
et d'examiner à fond sur quelles autorités le con
cile allégué établissait ses conclusions (1).
Par ailleurs, si l'on fait de sai~t Julien un disci
ple de Clément, le catalogue épiscopal du Mans se
trouve fournir une trop comte liste de prélats
pour gagner l'époque de la chronologie certaine.
Voulant diminuer la difficulté, dom Piolin dédou
bla l'évêque Turibe. Tout ce qui dans une légende
d'évêque vivant au ye siècle peut s'adapter à la
thèse ti'àditionniste sert il créer un Turibe 1"r,
missionnaire apostolique. La légende de l'évêque
Victmius est encore plus exploitée. Elle sert il
former un saint Victurills 1er , évêque pendant
soixante-huit ans, un saint Victurius II, évêque
pendant vingt-neuf ans, sans préjudice d'un saint
Victor antérieur, dont l' « épiscopat fut de beau
coup d'années (2). » Comme cette multiplication
d'évèques ne sulTit pas il rejoindre l'anneau fixé au
premier siècle, le lecteur reste dans l'alternative
ou d'incriminer l'ignorance des clercs qui n'ont
pas su rédiger la liste épiscopale, ou d'admettre
une suppression de l'évêché durant des persécu '.' J
tions qui n'ont pas laissé de martyrs (3). '.
(1) Le tranil se trouvc résumé par llof. l'abbé Duchesne, au t. II
des Fastcs épiscopaux, pages 1'14-1-16. Voir aussi C. Chevalicr,
Lcs Lé-{jcnrles au concile de Limoges.
(2) Histoi/'c rlc l'l;'glisc dl( Mans, t. l, p. 81.
(3) La cb--!:~()!9.gie_Jl~ l'Eglise du ?tIans a été très suffIsamment 1 0
Mbrouillée au XVII' siècle, par Launoy pour suint Julien, et par .1
',,1
45. 4,1 LA CONTROVERSE DE L'APOSTOLICITÉ DES ÉGLISES
L'énorme ouvrage de M. Faillorten avait plus
imposé qu'il n'avait convaincu.' La préfacehi-sto
rique de dom Piolin, d'une centaine de pages seu
lement, pour tous ceux qui ne remarquèrent pas
qu'elle reposait SUI' deux documents justement
suspects, et que l'auteur, par une singulière con
fiance, oubliait de critiquer, était une démonstra
tion plus accessible et plus probante. Aussi
servit-elle de guide et de modèle aux jeunes
prêtres studieux et, comme on disait alors, dans
les bonnes idées. Chacun en appliqua la méthode
à sa province ecclésiastique.
Le plus empressé fut un limousin, ~I. l'abbé
.~ qui devait rester le vétéran et le plus
in atigable défenseur de l'école légendaire. Il
publia, en 1854, une Dissertation sur l'apostolat
de saint Martial. Le diocèse de Limoges adoptait
à ce moment la liturgie romaine. L'évèque, MgI'
Buissas, avait eu soin, dans la préparation du
nouveau propre des saints de ce diocèse, de don
ner à saint ~Iartialle titre d'apôtre; mais, lorsqu'il
soumit son travail à l'approbation du Saint-Siège,
le secrétaire de la Sacrée-Congrégation des Rites,
Mgr Gigli, effaça le titre d'apôtre pour mettre celui
d'évêque et substitua au culte qu'on rend aux apô-
Mabillon pour saint Turibe. L'histoire du premier é"èque pré
sente un épisode qui le rend facile il dater: celui du Defensor
(Cr. Provillce du Maine, l. VIII, p. 390). Sur ce mag-islral on pelll
"oir avec profit une élude écrile en dehors de Ioule préoccupation
d'école: Emile Chénon, "Étude histol'ique su,' le Defenso,' cid
latis. Paris, Larose el Forcel, 1889.
46. LA LITURGIE Db: LDIOGES 45 ..
. ...:".~
:
l'
tl'es le culte inférieur qu'on rend aux con(esseul's
ponti/ès. En recevant ce propre ainsi modifié, ~Igl'
13uissas s'empressa d'é'crire au SouYerain Pontife:
«( L'antique Église de Limoges se trouve dans une
position particulière: fondée par saint ~Iartial, l'un
des soixante-douze disciples, qui fut envoyé par
saint Pierre, elle a toujours honoré son fondateur
par le titre et l'office d'apôtre ... je me prosterne
donc aux pieds de "otre Sainteté et je la conjure,
Jans un moment où je suis si heureux de resserrer
les liens qui m'unissent au Saint-Siège par le
l'établissement de la liturgie romaine, de ne pas
[ causer à mon cœur d'éyèque la peine la plus vive,
en dépouillant mon siège d'une de ses plus
grandes prérogatives, de ne pas répandre l'amer
tume dans le cœur de tant de saints prôtres et de
( pieux fidèles qui se réjouissent du retour à l'unité
liturgique ».
Pie IX renvoya l'afraire à la Sacrée Congré
gation, tribunal suprême, chargé de porter un
( jugement sur toutes les r[uestions qui concernent
la liturgi,e. Un ayocat de la Congrégation, ~Igr
Francesco ~Iercurelli, fut chargé par l'évèque de
Limoges de proposer l'afTuire aux cardinaux qui la
composaient. Le promoteur de la foi (1), dont la
fonction équivaut à ce que nous appelons en France
le ministère public, soutint l'opinion des adver
saires du titre et du culte apostoliques .
. A l'unanimité, le 8 avril 1854, la Sacrée
- '=--~""'''''''''-~
(1) ~Igr Andrea Frattini.
3.
47. ,lB l"A CONTROVERSE DE L'APOSTOLICITÉ DES ÉGLISES
Congrégation décida « ue l'Écrlise de Limorres
,J; devaIt être maintenue dans le privilège qu'e le
possède, de temps immémorial et en vertu ~ de
constitutions apostoliques, de donner le ~itre
J~
d'apôtre, et d'en ren 9- r g le culte, à saint ~Iar~i_~l,
1 ~on premier évêque. )) Le 18 mai, Pie IX confirma
Cette décision (1).
Comme la dissertation qui avait obtenu cette
confirmation était l'œuvre de l'abbé Arbellot,
celui-ci, très fier de l'approbation d'un tribunal de
rites, re c.h.erch a celle::--des savants~ Il fut moins
heureux. En~'>l'Acad~mie~cartadu concours
des antiquités nationales la Dissertation, dans
N9
[ laquelle elle ne vit qu'un sujet de polémique reli
gieuseCe jugcme~t d~da_ign·eüx ~iscrédii;pasne
la nouvelle opinion. L~ question des origines
-
chrétiennes de la Gaule prit une grande im~~-
-
If t~e. Elle intéressait d'ailleurs toute- - -
.
la Fra!!,ce.
Si Grégoire de Tours ne parle qqe de sept
évêques envoyés par le pontife romain, ceux-ci,
d'après leurs légendes respectives, n'étaient pas
venus seuls. C'est ainsi que }ulien"'aurait été
(1) VOIez la relation officielle de cette a!faire dans: Saaa
"ituum congregatione Emo et Rn" domino ca':din.ali MO"ichini
relatore, Lemovicen, Confi"mationis elogii et CIIltllS lit apos/vli
quo S. Ma,'tialis, primus Lemot:icensiwlt episcnpiis hac/enus
gavisus est ab immemorabili tempo,'e ... instante R. P. D. episco}Jo
Lemot'icensi. Lemovici, excudebant llarbou fralres, ~IDCCCLV,
in-ft·, 91 p.; et Romae, 185~, ex tIPographia Josephi llrancadoro.
- Voyez aussi comment ArbeUot raconte l'affaire, Disse,·tation
su,' l'apostolat, p. 1"18; et ~nt l'affaire se transforme chez'un
légendaire de seconde main7 Charbonnel, Q"igine de l'E:glise de
Mende, pp, 50-52, --=-
48. .,
LA LITURGIE DU ~IA;-;S 47
accompagné d'un prêtre. 'I.!!.!:iQe~ et d'un diacre,
ravace,J qui lui succédèrent dans le gouvernement
de l'église des Cénomans. En plusieurs cas, ses
compagnons, .personnages secondaires, auraient
quitté leurs maitres pour évangéliser des pays voi·
sins, fondés de la sorte il revendiquer aussi pour
leur foi des origines apostoliques. Presque tous
les diocèses se trouvaient donc conviés à remonter
la chronologie de leurs origines au Ile siècle.
L'alTaire fut mise il l'ordre du jour dans les
congrès archéologiques; elle figura au premier
rang dans les discussions su).: la comp-osi~s
o~es propres diocésn.ins pour la réforme litur
gique. Sur ce terrain, la victoire fut aussi prompte
que décisive. Elle fut gagnée par les chanoines du
( Mans; Leurs offices propres obtinrent, en 1855,
l'approbation romaine avec un bref louangeur
beaucoup plus remarqué que la décision en faveur
de saint ~Im·tial, et qui, par son interprétation
extrême, devait être un désastre pOul' la critique
ecclésiastique. Dans cet important document, le
c~ Pat1:!Jzi s'exprimait ainsi sur l'opinion de
la Sacrée Congrégation des Rites: « Maturo c.ra
mini subjccit, singlllisque pcrpensis, opus vidit
tanta elaboratum in dl/stria , tanta artis criticae
( et rerum liturgicarum peritia concinnatum, ut
dignllm censuerit quod unù'.ersim probaretur,
pallcis dunta.rat levibusque illdllctis emenda
tionibus qllas in ipsillS exemplaris adnotatas
reperitis. »
1·
49. 'J8 LA COl'TTIOVEIISE DE r:APOSTOUr.lTt DES f:GLlSFS
Comme le chapitre du ~Ians s'était appuyé sur
l'olï'nge ùe dom Piolin pour la r~daction des
leçons, l'auteul' prit sa part des fl',licitntiolls, 11 y vit
sn mdhode sanclionn0e par la plus haute autorité,
Il n'y a pas en elTet deux véritl~S critiques: l'une
liturgique et l'autre liistol'ique,
Le parti applaudit assez bruyamment pour cou
ni.' les protestations de quelques hommes qui
dl;clal'<licnt lIn'on n'aYn,it p:1S raison de prendre
ponr npprobation d'un travail pmemeut llistorique
cc qui d'lit dit it IÎlOnneur d'un travail purement
litllrgique. ~I. d'üzouville (;erivi! il dom Piolin :
(1 Les mols de celle lellre que vous soulignez : Tallta
arti,~ cri/icae et l'en/Ill lilllruicanl111 pcrilia cOllcimwlulIl,
parlenl tle science cl de critique e}Lln.. Üi'resJilurgiU).les cl
1
) ne parlenl p<lS de science ou de crilique en hisloire.- De
deux choses J'une: ou bien le 1r<l',lil <ldre>'sé â~lans il
Horne ét<lil. puremenl liturgique, <llors la Congrég<llion
des Hiles n'<lvafli)<ls d'c'loge ü donner il un lr<lv<lil hislo
rim!-e qui n'exisl.<lil pas; ou bien cc lranil allaquail-lès
deux queslions, Iitur gigue cl historique, alors le silence
g<lrdé sur la seconde, en presence des éloges donnés il la
premiL-re. esl la meilleure de toutes les preuves qu'en
, toules ces questions Home n'enlend régler que la seule
queslion liturgique, laissanl ü chacun toule S<l liberlé
d'apprécialion de la queslion historique (1). ))
Les légendaires ne ,"oulurent ,"oir dans cette
,I argumentation que des subtili~és ~~eant nome
J ijet d'unelJonne foi douteuse. Pour eux, les réfOr- )
- ---=------=
mateurs liturgiques des XVIl C et XYlIl e ' sièclès #'1
(") Supplement aux Lettres au H. P. dom Pialin, p. 265.
50. r:,tc(ll.F. nr,; SOIYSIES ·1 )
étnient condamnl~s, non seulement dnns leurs
entreprises ritlÏalistes, mais aussi d<tns leur cri-
tirl'lC historique, Leur j h0olog-ie d'ailleurs n'0t<til-
elle pas errollée, ct toutes les erreurs ne sc
1 tienn'ent-elles pns ? « :ous honorons la science
profonde de Tillemont, (;crinit dom Guàar.ger;
nous rcconn<tissons l'érudition vi1ric~e de D<tillet;
fI'l fIIfl mais nOJ.!2_n~ac('ertons Pi!2.-p)us leul' critiq~le_q!.1c
J'.J nô~ ne voulons suiï'c leur théologie (l), ))
Celte citation caractl~l'istiqlle est til'(~e d'un
ouvrage d'édification:dans lequel on pellt voil' un
spécimen des publications légendaires il p<tl,tir
de 1855. Comme s'ils :lY<tient en leuI' fan'ur IInc
définition dogrn<ttiquc inf<tillible, ils ne dOlllent
l
plus de l<t véritr'~ de leur systéme chrollologique, ct
l'appliquent simplement. il leurs travaux s~ns
jamais i.ndiC{ucr,C{II'il est s,'ujet ù cor~trovel.'se,; C.'est
./0 ' ainsi qll'unè':~.ï'e des Dj:n~. .<JjcJjns~ Lcs~Lc.!i...S,1.~s
Jfal't!L~'S, pluce loul. ail commencement du Ile siè.:.
. r cie les passions de ~1~t Sallll'n~!oulouse ~
_ ---=--__ '1
. de sQint Denvs Je Paris nui pi1raissent l,ien avoir
cu lieu. la pl'emi('rc sous Déc'e (250). la seconde
sous ~Iaximicn lIel'cule (286). On y malmène
étrangement les auteurs de l'école historique. On
ne respecte mème pas une gloirc de l'ordre: dom
Thierry Duinart (2).
51. 50 LA CO:-'-THOVEHSE DI': L'APOSTOLICrr8 DES l~GLlSES
D'habitude, Ir.s traditionnistes ne disaient pas
Cjue le fondement de lellr systè'me ttait l'autorité
IitllrgiCjue, mais, de temps en temps, la pol(~miCjue
faisait une nécessité de l'aYOller, Ce fut le cas
dans la controyerse Cju'entreprit l'aLbé de So
Ir.smes contre le prince .-lli..ert de Broglie.
L'auteur de L'j;'glise eL l'Empire Romain au
~tIV· siècle, au lieu d'accepter la légendc q~it
A }' Laptiser Constantin par le pnpe Silnstre, recon
te f nnît qu'il re<:ut le b~ptème in e.x:LremiLdc.'i? mains
d'Eusèbe de ïcomr':die. :Iais telle est aussi la
( cànclùsîoriqu;~t -adoptée Tillemont et les cri
liCjlles des XVIIe et XYlll e siècles, « cédant, dit dom
Il GU(:I'angel', il des préjuO'és ct il dcs anli wthies de
s~ »), L abbé de olesmcs ne pouyait donc man
Cj~ler de combattre celte opinion ga,llicane ct jansé
JJ Il!.§iç. Sans apporter aucun clement nom'eau
d'information, voici comment il s'cxprime :
(1 On[re l'ancienneté ~lcJ~J)~ion. la tradition romaine
sc recommande oneore il IIll antl'ü litre il la considéralion
« Ces paroles sont injllslcs aulant 'lu'arni,res, » dit ~1. Le Clant,
p, 2, Les ..tclcs des ,fa"ly"s, supplément aux ..tda sillcera de
dom Ruinar!. (Extr"it des mémoires de Lcadc'/llÎe des inscriptions
ct belles-lettres, l. XX, 2' partie, P"ris, Imprimerie n"liona!e,
1882), - ~1. ,llard ju~e ainsi les Acla sincel'a: « ~lal8'ré l'absolue
sincéril<~ crili'lue du sarant !J(;n(;diclin. quicon'lue youdrait refaire
aujourd"hui ~on lil"re aurait beaucoup plus il en retrancher 'lu'à
y ajouter)) (Introduction, p, XII. de l'Iiis/nire ries PerseCll/inlls
l'elldall! les deux pre 111 ier, ,ii'des, d'a près les monumenls arch0o
IO:;Î'lues, Paris, -1885). - Un aull'e passa~c intèressant des Acles
dcs .Ila"ly,'s (p, YJI) l1étrit « 1" criti'lue insultante d'un llaillet, la
narration janséniste de ~lézengu)', l'anal)"se sèche ct rebutante
ù'Alban Butler »,
52. LE BAPTf:.E DE CO~STA"T1N ::JI
de~ calholi(J11e~. Celte tradition se trol1"e con~igl1l'e au
hré'iaire romain. Dellx fois l'anllée, le () nOYemhl'e ct le
:1 dé~emhre, elle sc rellcontre dans le line ofiieiel de la
prii're; cl. quoiqlle les Ir;idition" de celle IIntnre Ile soient
pns du g-eill'e de celles ~nr le~quelles l'(:g-lise exerce ~on [1ri·
'ili'gc d'infailliiJililt-" il Ile duit. pas' être indifTérpnl aux:
nf; Ils de ],]::~Iisc ge yoir sif;nOller COlnlne une raIde llli
rt'cit,illli lell' est propo~e c 1~1(? certain 1!:l1' nDe autorité
)f <lUSSI respectable. Ils onl le droll ct 1 . . 'cie dCl11an.,rlcr
IiI c.w.mplc ;tllxJrondellrs es raisons de leur M'diliÎÏ. cl C Ile
!Ji cl"der qu'nprès n'oil' épuis(; (ou~ les llloyeriT de dNense.
C'est ici unc qncslion rI'honncllr: cl r;'cst parce qUl', pOUl'
~l
ll1a pari. jc b con~idi're comme lelle. qlle je me permets rie
dl'mander rai~on; ~1. rie Broglie du ton dégagé ayee lequel
il s'('n expliqllc (1). Il
Le respect de l'autorité liturgique apparaît donc
comme le motif de cette polémiclue. ~lais, si les
légendaires eux-mûmes reconnaissent que les tra
ditions de cette naturè' n'engagent en rien l'infail
libilité de l'Église; il n'est pas dilllcile de leur
prouver - et ils l'ont avoué - qu'elles n'ont rien
il voir avec l'honneur et la conscience des
fidèles. On peut justement se servir pour cette
démonstration des fameuses leçons du 9 novembre
et du 31 décembre,
En 1883,_ Lé~II~: a corriglla légend~_de
(1) L'Unil'cl's du 5 avril 1857, nrlicle reproduit dnns les Essais
SUI' I.e Nalw'alisme conlel1l}Jomin. p. :!()() et ~uiv. Naturellement
~ Guéran;:ci'>a ~lissé d~ns cet article un éloge de~FaiIlJlll~
. ( A propos de la question du baptême de Constnnlin, do!!!Ritra ne
'7 ') craint point de qualifier le récit d'Eusèbe « d'audacieux men-
o . songe », Pour lui, il propose il l'examen l'opinion que Constantin
aurait été bapl.Ls.é (!~x19ls : il Rome, par saint Sl'l'~t.!:e; à :"ic9
mé.die, par..Jes ActE.~s, çr. L'Ana de 1(1, Religion, numéro dll
1er janvier '1850: