2. I – Le parlementarisme: les fondements
A- Théorie classique de la séparation des pouvoirs
B- Le régime parlementaire: les caractéristiques
II- Les régimes parlementaires en France de 1814 à la
Vème République
A- De 1814 à 1870
B- De l’IIIème République à la Vème République
3. Introduction :
L’histoire politique française a été toujours surprenante, du fait qu’elle a
connu plusieurs régimes politiques durant presque 200 ans : Empire,
Monarchie absolue et constitutionnelle, République… Il est donc
utile d’étudier et d’analyser le système d’aujourd’hui qui est de
nature « parlementaire » et de se poser les deux questions :
- Quels sont ses fondements ? (I)
- Comment il a évolué a travers cette histoire ? (II)
4. I – Le parlementarisme : les fondements
A- Théorie classique de la séparation des pouvoirs
Une théorie déjà envisagée à l’Antiquité par Aristote, elle fut étudiée par
John Locke en 1690 (Second traité du Gouvernement Civil).
Il n’empêche qu’en France, le fameux politologue et moraliste
Montesquieu l’étudie, et la développe dans son ouvrage « De l’Esprit
des lois » en 1748.
Elle consiste; cette théorie en réelle séparation de pouvoirs, qui sont le
pouvoir exécutif, le pouvoir législatif, et le pouvoir judiciaire.
Toujours selon Montesquieu, des objectifs bien déterminés sont attribués à
chacune des fonctions précitées:
La fonction législative est confiée au pouvoir législatif, c’est-à-dire que
c’est à ce pouvoir de concevoir et élaborer des règles générales.
La fonction exécutive : est confiée au pouvoir exécutif pour assurer
l’application et le respect de ces règles générales
La fonction juridictionnelle, est la fonction exclusive du pouvoir judiciaire;
et elle consiste à sanctionner le manquement à ces règles et à régler
les litiges résultants de leur application.
De différents organes se chargent d’assurer ces fonctions: Le législatif au
Parlement, l’exécutif au Chef d’Etat ou bien au Chef du
Gouvernement ainsi qu’aux ministres. Et c’est là où doit intervenir la
séparation des pouvoirs. Mais selon Montesquieu, non seulement elles
doivent être séparées (les trois fonctions) mais aussi doivent être
égales.
5. -
Le pouvoir exécutif et son fonctionnement:
Il possède des pouvoirs traditionnels tels que :
* Tout d’abord l’exécution des lois (règles générales),
* La direction de l’Administration (du Gouvernement),
* Mener la politique étrangère, le Chef d’Etat est le
représentant de l’Etat à l’étranger, signe et ratifie les
engagements internationaux; néanmoins, pour raison
d’équilibre; les plus importants d’entre eux doivent
avoir le visa du Parlement est toujours requis avant la
ratification,
* Le chef d’Etat est le chef des Armées,
* Le chef d’Etat participe aussi à la législation, il
possède lui et son gouvernement; les initiatives de
lois,
6. -
Le pouvoir législatif :
Il possède des pouvoirs traditionnels tels que :
* Le pouvoir de voter les lois,
* Il procède à l’approbation du Gouvernement et du Premier
ministre par un « vote d’investiture »,
* Exerce un contrôle sur le Gouvernement par diverses
procédures…,
* Il possède une fonction financière : l’élaboration de la « loi de
finances » et le contrôle du budget .
* Un pouvoir judiciaire sur le Président de la République (la Haute
Cour) et sur les membres du gouvernement devant la Cour de
Justice de la République composée de 6 députés, 6 sénateurs
et 3 magistrats.
7. On conçoit donc l’importance de la théorie
développée par Montesquieu, qui est la
base des régimes qui se sont succédé en
France depuis 1791 même.
8. B- Les caractéristiques du régime parlementaire
Il y a trois caractéristiques qui sont propres
au régime parlementaire:
- Une structure particulière du pouvoir
exécutif: la dualité du pouvoir exécutif (1)
- Une collaboration souple entre les pouvoirs,
(2)
- Un équilibre organique. (3)
9. 1- La dualité du pouvoir exécutif:
L’exécutif dans un régime parlementaire se
divise en quelque sorte en deux : Le
Président de la République et du Premier
ministre (Chef du Gouvernement ou
Président du Cabinet ministériel).
10. A- Le Président de la République:
- Le Président est élu au suffrage universel direct selon
l’article 6 de la Constitution de 1958,
- Il est irresponsable devant le parlement contrairement
au Gouvernement,
- Tout acte pris par le Chef d’Etat (Le Président) est
soumis à ce qu’on l’appelle « contreseing ministériel »,
- Les prérogatives consacrées par la Constitution au
Président sont exercées en réalité par le
Gouvernement.
11. B- Le premier ministre :
- Nommé par le Président de la République,
- Propose les noms des ministres de son gouvernement
au Président,
- Doit être consulté par le Président de la République
avant la dissolution de l’Assemblée Nationale,
- Contresigne les actes pris par le Président,
- Responsable de l’action du gouvernement,
- L’initiative des lois appartient concurremment au
Premier ministre et aux Parlementaires.
12. >> On constate donc qu’il y a une dualité
du pouvoir exécutif.
13. 3- L’équilibre organique des pouvoirs :
Chacun des deux organes peut mettre fin à l’existence de l’autre, cela suppose
qu’il y a des procédés :
a- La dissolution :
Elle met fin à la législature. Elle sert de carte de menace générée par le
Gouvernement. En France, ce droit appartient exclusivement au Président
de la République.
b- La question de confiance :
Elle intervient pour voir si le Gouvernement dispose ou non, de la confiance de
la majorité.
Si non, ce dernier doit démissionner.
c- La responsabilité :
Elle permet de mettre terme aux conflits entre le Gouvernement et le
Parlement. Elle est pas insignifiante ou négligeable, car elle risque de faire
perdre le pouvoir politique, et ce en vertu du principe de la solidarité
ministérielle et par conséquent, la totalité du Gouvernement doit démissionner.
Elle est mise en jeu par le Parlement.
d- La motion de censure :
Il s’agit de la dénonciation des parlementaires de la politique du
Gouvernement. Si le Gouvernement n’est pas soutenu pour accomplir une
réforme qu’il juge « primordiale », il doit démissionner. Ce procédé est rarement
utilisé.
14. II – Les régimes parlementaires en
France de 1814 à aujourd’hui
A- De 1814 à 1870
- La Charte constitutionnelle de 1814 octroyée par
Louis XVIII constitue l’une des première fondations
du régime parlementaire français, en garantissant
de nouveaux droits, et en s’inspirant du modèle
britannique, en confiant par contre de larges
prérogatives au Roi.
15. La structure politique se décompose comme suit :
Le pouvoir exécutif est dualiste par la forme, c'est-àdire qu’il est constitué du Roi d’un coté, et des
ministres de l’autre. Mais la réalité du pouvoir est
concentrée entre les mains du Roi.
Le pouvoir législatif est bicaméral (composé de deux
chambres), une est élue, c’est « la chambre des
députés des départements » et l’autre « l’Assemblée
des pairs » qui est héréditaire, et elle se composait en
premier lieu des membres de la famille du Roi. Ce
système reste trop favorable à l’Aristocratie puisque
même la Chambre élue, elle l’est de manière
censitaire (tribut), donc seuls les riches qui peuvent
être élus.
Néanmoins, ce système va rapidement se pencher vers
le parlementarisme, puisque Louis XVIII va laisser une
grande autonomie aux ministres et aux
parlementaires.
16. - La Charte constitutionnelle de 1830 ; après le coup
d’Etat et le déclanchement des insurrections de 1830
pendant 3 jours « Les trois glorieuses » qui va conduire
Charles X à s’exiler et c’est le duc Louis-Philippe
d’Orléans qui succédera à la trône ; elle marque un
tournant dans l’histoire du parlementarisme Français,
selon cette Charte, le droit d’initiative des lois
appartient désormais au pouvoir exécutif et au
Parlement, d’où on le qualifie « parlementarisme
dualiste ». Plusieurs changements majeurs ont eu lieu
pendant cette période, le Roi désormais ne peut plus
recourir aux ordonnances prévues à la base par Louis
XVIII pour diriger le pays en cas de crise.
Ainsi, les chambres deviennent plus représentatives, du
fait que le cens est revu à la baisse, et le caractère
héréditaire de la chambre des Pairs est éliminée.
17. Le Roi Louis-Philippe admet la réinstauration
de la souveraineté nationale, acceptant le
titre « Roi des Français » et le drapeau
tricolore révolutionnaire. La pratique
politique va connaître une profonde
évolution.
En effet on assiste, sous le régime orléaniste
(de Louis-Philippe toujours) que la liberté de
la presse est améliorée, et en affirmant la
responsabilité politique collective du
ministère devant la chambre des députés ;
par plusieurs moyens et techniques comme
« l’Adresse » et « le débat budgétaire », et
de mécanismes novateurs tels que « les
questions » , « commissions d’enquête
parlementaires » , « la question de
confiance » , et « l’interpellation ».
18. L’essentiel c’est que, entre 1840 et 1848, la
stabilité gouvernementale résulte de
l’entente entre le Roi et le Premier
ministre; c’est ce qui marque un régime
parlementaire dualiste ou « orléaniste ».
19. - Le bref retour à la République et à la
séparation stricte des pouvoirs en 1848
Après la proclamation de cette IIème République, une
Assemblée constituante élabore la Constitution de
1848 novembre 1848.
L’exécutif (Président de la République) et le législatif
sont élus au suffrage universel direct, ce dernier est
monocaméral et comprend 750 députés. Le
Président de la République ne dispose plus de droit
de véto.
20. Après le retour du Second Empire, la politique
française sera marquée par les à-coups, reflux
et l’instabilité pour atteindre la phase dans
laquelle sera installé le régime parlementaire
au sein de la République, cette instabilité
durera jusqu’à 1870 avec l’avènement de la
IIIème République.
21. B- De l’IIIème République à la Vème
République
Après une défaite militaire contre la Prusse,
la France sera de nouveau une
République, le 4 septembre 1870 et
Napoléon III sera déchu. Pour des raisons
d’opposition entre les républicains et les
monarchistes, le processus constituant
fut chaotique et long.
22. La troisième République et les lois constitutionnelles de
1875 :
Le nouveau régime politique sera fondé sur :
* La loi du 24 février, 1875 relative à l’organisation du
Sénat, qui fait de cette chambre l’instrument d’une
potentielle restauration monarchique ;
* La loi du 25 février 1875 relative à l’organisation des
pouvoirs publics, qui met sur pieds un Parlement
bicaméral, et un pouvoir exécutif bicéphale
(Président de la République et Conseil des ministres
« solidairement responsables ») ;
* La loi du 16 juillet 1875 sur les rapports des pouvoirs
publics, cette loi va créer les mécanismes du
dialogue et d’interaction qui caractérisent le régime
parlementaire.
23.
24. Le passage vers un système moniste, c’est
quand le Président Mac Mahon laisse
émerger, en pratique, la fonction de Chef
de gouvernement, confiée au président du
Conseil des ministres. Dès lors se pose la
question de la nature des relations entre les
deux têtes de l’exécutif.
25.
Après la crise du 16 mai 1877, on consacre
le régime moniste et cela, lors des élections
d’octobre 1877 en confirmant une majorité
républicaine. Le Président Mac Mahon qui
soutenait « le dualisme » avait perdu le
soutien du Sénat et finit par démettre.
Ajoutant à cette crise la Constitution Grévy,
ces deux éléments vont conduire à
l’affaiblissement du pouvoir exécutif en
pratique et, corrélativement, à la montée
en puissance du Parlement.
26. On peut présenter plusieurs causes de cet
affaiblissement :
- Elu par le Parlement ;
- Privé du droit de dissolution (après la crise) sauf avec
l’accord du Sénat ;
- Responsable pénalement, et irresponsable
politiquement (tous ses actes sont contresignés par
les ministres) ;
- Ses pouvoirs deviennent formels ;
- Il est privé ; selon la logique moniste, de révoquer le
Gouvernement sauf s’il obtient la majorité
parlementaire.
27. Donc on constate que le parlementarisme
à cette période, était déséquilibré.
C'est seulement en 1924 sous le
gouvernement Poincaré, que le
Parlement a concédé son pouvoir
législatif, car la situation économique et
financière de la France à cette époque
justifiait le recours à la pratique des
décrets-lois.
28. - La IVème République : l’édifice d’un régime
parlementaire rééquilibré et rationalisé en
théorie
La Constitution du 27 octobre 1946 rétablit le
régime parlementaire en France et ce par
référendum du 13 octobre 1946. Cette
Constitution prévoit un bicamérisme fortement
inégalitaire (Conseil de le République et
l’Assemblée nationale), l’Assemblée nationale
y est l’institution de base du régime. En effet,
l’article 13 de la Constitution de 1946 précise
d’ailleurs qu’elle « vote seule la loi » sachant
que la loi, est l’expression de la volonté
générale, elle est la norme universelle et elle
n’est pas soumise à un véritable contrôle de
constitutionnalité.
29. La Constitution consacre le bicéphalisme de l’exécutif, mais
confie la réalité du pouvoir au président du Conseil des
ministres, dont l’existence est consacrée par la même
Constitution pour la première fois.
Les rapports se nouent entres les pouvoirs, mais en mettant
l’accent sur le fait de ne plus revenir sur les fautes
commises antérieurement :
- La dissolution est soumises à de strictes conditions, prévues
par les articles 51 et 45 de la Constitution ;
- Techniques de « responsabilité ministérielle » renforcées ;
Au niveau pratique, on assiste à un déséquilibre et à
l’instabilité gouvernementale ; les efforts de rationalisation
ne furent pas suffisants pour empêcher le retour aux
habitudes politiques de la IIIème République.
La révision constitutionnelle de 1954 tenta de corriger les
défauts du système ; notamment le statut du Conseil de la
République fut amélioré…
30. - La Vème République et le renouveau du
régime parlementaire
Dans la Constitution du 4 octobre 1958 on
retrouve la dualité de l’exécutif
(bicéphale), un premier ministre à la tête
de l’exécutif, une responsabilité
gouvernementale, le contreseing ministériel
ainsi que la collaboration des pouvoirs.
L’objectif de cette nouvelle Constitution est
d’éviter l’instabilité politique connue sous
l’IVème République : la question de
confiance est donc réglementée ainsi que
la motion de censure.
31. Si l’on retrouve les caractéristiques de la
théorie initiale dans la Constitution, la
pratique va montrer quelques
différences.
La Constitution de 1958 fait apparaitre la
démocratie semi-directe avec le
Référendum. D’autre part la fonction
présidentielle est renforcée, la fonction
gouvernementale également. On peut
souligner aussi l’abaissement du
Parlement, la création du Conseil
constitutionnel et l’instauration de la
constitutionnalité des lois.
32.
En 1959, on peut voir apparaitre une dérive
présidentialiste, celle-ci étant contraire à la
constitution ; cette dérive va conduire à ce
que le Président de la République soit le
chef de l’exécutif, le Premier ministre
n’étant plus qu’un simple rouage
d’exécution de la politique présidentielle.
Cependant il faut nuancer ce principe,
puisque lorsque le Président perd la
majorité parlementaire, une période de
cohabitation s’ouvre. Le premier ministre
gouverne et le président à un rôle d’arbitre
en vertu de l’article 5 de la constitution.
33. Pour conclure, peut-on dire que le système
français aujourd’hui est un
parlementarisme totalement déformé
qui s’exerce ? On pourrait parler de
régime présidentiel dans un décor
parlementaire ?