Malgré de nombreux postes à pourvoir, le secteur est confronté à de sérieuses difficultés de recrutement pour faire face à ses besoins. Un problème d'attractivité ?
2. Pénurie de candidats, profils inadaptés,
manque de motivation, complexité
administrative… Tels sont les freins à
l’embauche habituellement cités par
les employeurs potentiels du secteur.
L’hôtellerie-restauration reste néanmoins
le premier pourvoyeur d’emplois dans le
pays avec 237 261 projets d’embauches
recensés en 2015, selon l’enquête
annuelle de Pôle Emploi sur les besoins
en main-d’oeuvre des entreprises. Soit
une hausse de 5% par rapport à 2014. Au
sein des services, la profession se détache
nettement (33,7% des établissements
se déclarent recruteurs contre 31,6%
l’an dernier), suivie par les activités
informatiques (25,8% contre 23,4%
en 2014) et le secteur sanitaire et social
(25,1% contre 23% l’an dernier).
Les trois régions les plus dynamiques
sont la Provence-Alpes-Côte d’Azur
CGAcontact - N°112 Janvier / Février 2016 8
GROS PLAN
par Nasser NEGROUCHE
L’HÔTELLERIE-RESTAURATION
PEINE À RECRUTER !
50 000 offres d’emplois non pourvues
en 2015 ! Au moment où la lutte contre
le chômage des jeunes mobilise toutes
les énergies gouvernementales, le constat
laisse perplexe… Les nombreux postes
disponibles dans l’hôtellerie-restauration
ne trouvent pas preneurs. Une situation
qui déconcerte les professionnels du
secteur. « On ne comprend pas vraiment ce
qui se passe… Oui, nos postes sont souvent
difficiles et saisonniers, mais c’est un pied
à l’étrier qui permet de grimper vite dans le
métier et d’assurer son avenir professionnel
en acquérant rapidement une expérience »,
explique Samuel, gérant d’une brasserie
branchée dans le quartier du Marais à
Paris.
Même son de cloche dans ce chaleureux
petit hôtel-restaurant d’Ille-et-Vilaine
qui n’a toujours pas réussi à trouver les
bons profils pour ses deux postes de
réceptionniste et cuisinier. « On a eu
plusieurs candidats, mais ils ont tous fini
par nous quitter, souvent sans prévenir
d’ailleurs… On savait que les profils n’étaient
pas tout à fait ceux que nous recherchions,
mais nous étions prêts à les former. Cela n’a
pas suffi… Depuis, on se débrouille avec
des intérimaires. L’embauche, c’est trop
compliqué…», confie, dépitée, Emilie,
directrice de l’établissement.
1ER
POURVOYEUR
D’EMPLOIS
EN FRANCE
Malgré de nombreux postes à pourvoir, le secteur est confronté à de sérieuses difficultés
de recrutement pour faire face à ses besoins. Un problème d’attractivité ?
3. CGAcontact - N°112 Janvier / Février 2016
GROS PLAN
par Nasser NEGROUCHE
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(35 947 projets dont 76,6% saisonniers), la
région Rhône-Alpes (34 019 projets dont
67% saisonniers) et l’Île-de-France (28 636
projets dont 15% saisonniers). A l’inverse,
les régions les plus confrontées aux
difficultés d’embauche sont la Franche-
Comté (53,8%), le Centre-Val de Loire
(42,7%) et les Pays de la Loire (41,7%).
Le métier le plus recherché est celui de
serveur de café-restaurant, avec 70 873
projets de recrutement ; une activité
principalement saisonnière (71,3%). Pour
les aides et apprentis de cuisine et les
employés polyvalents de la restauration,
69 889 projets (+9% par rapport à 2014)
ont été identifiés en 2015.
Les employés de l’hôtellerie concentrent
34 300 projets. Cette activité marque
des contrastes saisonniers selon les
régions : importants en Paca (85%) et
Rhône-Alpes (83,1%) et relativement
faibles en Île-de-France (26,1%). Les
offres relatives aux cuisiniers sont
également nombreuses (34 917 projets)
avec, là encore, de grands besoins en
Rhône-Alpes (5 746 projets dont 75,8%
saisonniers), Paca (4 879 projets dont
74% saisonniers) et Île-de-France (3 818
projets dont 12,3% saisonniers).
L’enquête «Besoins en main-d’oeuvre
2015» recense aussi les perspectives de
recrutement pour les maîtres d’hôtel
(2 027 projets), les cadres de l’hôtellerie-
restauration (2 040 projets), les chefs
cuisiniers (6 440 projets)...
Parmi les autres facteurs qui peuvent
expliquer les difficultés de recrutement
rencontrées par les employeurs de
l’hébergement-restauration, il faut aussi
citer les conditions de travail, parfois
pénibles, décrites par les salariés : horaires
contraignants, amplitudes importantes,
contrats précaires, faibles perspectives,
absence de réelle compensation
salariale… Autant de freins à l’attractivité
de la profession et à la fidélisation des
collaborateurs, surtout dans les petites
structures qui subissent, plus que les
grandes enseignes de l’hébergement-
restauration, ce préjudice d’image.
« C’est vrai que nos métiers sont parfois
mal perçus, comme d’autres professions
du commerce de proximité d’ailleurs…
Nous devons lutter contre toutes ces
idées préconçues en ce qui concerne nos
conditions de travail. Cela rassurerait
les jeunes, et contribuerait à faciliter leur
intégration dans notre filière, même pour
les demandeurs d’emploi sans expérience
et qui seraient prêts à relever le défi.
J’en ai vu beaucoup trouver ainsi leur voie
grâce à des formations qualifiantes »,
analyse Gérald, formateur en cuisine dans
les Vosges.
Pour les TPE du secteur, l’enjeu
économique est majeur car ce sont les
petites unités de moins de 10 salariés
qui constituent l’essentiel de son tissu
productif. Ces dernières réalisent la
moitié du chiffre d’affaires et de la valeur
ajoutée (VA), soit une contribution
supérieure de près de quinze points à celle
constatée dans l’ensemble du champ des
services non financiers principalement
marchands (34%). À l’opposé, malgré la
présence de quelques grands groupes
internationalisés, la concentration reste
modérée : les plus grandes sociétés
(250 salariés ou plus) n’ont qu’un rôle
secondaire (20% de la VA au lieu de 34%).
L’hébergement-restauration est un
secteur intensif en main d’oeuvre, puisque
ses 758 000 salariés représentent
20% de l’emploi hors intérim des
services marchands non financiers,
alors qu’il ne contribue que pour 11%
à la VA. Par ailleurs, cette intensité
s’est renforcée : entre 2000 et 2013,
les effectifs salariés ont crû de 25%,
alors que la production n’augmentait
parallèlement que de 13%. Selon l’INSEE,
cette évolution « est à relier au passage
aux 35 heures, et s’est faite au profit des
emplois à bas salaires, notamment dans
la restauration, favorisés par les différents
dispositifs d’allègement de cotisations
sociales ».
UNE
IMAGE À
REDORER
Chiffre d’affaires :
90 milliards d’euros
Nombre d’entreprises :
261 000
Nombre de salariés :
758 000
LES CHIFFRES
CLÉS DU
SECTEUR
Source INSEE 2013