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Une expérience de l’interdisciplinarité
en études de sciences à Strasbourg :
le GERSULP (période 1976-1996)
Facteurs d’unité du GERSULP
PREMIER FACTEUR D’UNITE :
les membres de l’équipe travaillent effectivement ensemble dans les locaux
de l’Institut Le Bel et interagissent en permanence.
Source : document de présentation du Gersulp, 1993
DEUXIEME FACTEUR D’UNITE :
la référence aux sciences.
Tous les projets de recherche du GERSULP traitent, à un titre ou un autre, de la
dimension scientifique et/ou technique des sociétés contemporaines.
Le cadre général qui donne sens et valeur à ces préoccupations est celui des
rapports entre science et démocratie.
Facteurs d’unité du GERSULP
Source : document de présentation du Gersulp, 1993
TROISIEME FACTEUR D’UNITE :
l’ouverture transdisciplinaire.
Cette ouverture implique pour chaque membre de l’équipe (quelle que soit sa
formation d’origine) un assouplissement de son identité disciplinaire initiale au profit
d’un engagement personnel plus prononcé sur les problèmes à résoudre et d’une
volonté de communication a priori sans réserves.
Facteurs d’unité du GERSULP
Source : document de présentation du Gersulp, 1993
Création et premières études du groupe
entre 1972 et 1976
Le GERSULP (Groupe de Recherche sur la Science de l’Université Louis Pasteur),
initialement « Groupe d’Etude sur la Recherche » (1973),
qui deviendra ensuite dans la même année « Groupe sur le Développement des Sciences »
puis « Groupe d’Etude sur la Recherche Scientifique », de l’Université Louis Pasteur (ULP),
fut créé en 1973 à Strasbourg sous l'impulsion de Guy Ourisson, chimiste,
et premier Président de l’ULP.
Unité de lieu
Transdisciplinarité
Disponibilité
Création et premières études du groupe
entre 1972 et 1976
« Crée en 1973 par le Prof. Guy
Ourisson, le GERSULP mène des études
approfondies sur les problèmes posés
par l’intégration sociale, politique,
économique et culturelle des sciences
dans les sociétés d’aujourd’hui. »
Document de présentation du GERSULP,
1991 – Partie « Bref historique du
GERSULP »
« Nous sommes un groupe de recherche
multidisciplinaire qui, au sein de l’Université Louis
Pasteur de Strasbourg, université scientifique, nous
livrons à des recherches sociologiques, politiques,
économiques et juridiques sur les divers aspects de
l’activité scientifique dans ses rapports avec la
société.
Notre groupe a été créé à l’initiative de Monsieur le
Professeur Guy OURISSON, Président de l’Université
Louis Pasteur, et il fonctionne sous sa direction
effective. »
Document – Lettre de Josiane Olff-Nathan à M. Aubrac,
Directeur de la F. A. O. , 1er avril 1975.
Un groupe de recherche initié par le chimiste
Guy Ourisson
Dès 1972, l’Université Louis Pasteur met en place un programme, dit dans un premier
temps « d’activité », puis dès l’année suivante « de recherche », sur les politiques de
recherche. Ce programme sera financé jusqu’en septembre 1973.
Un groupe de recherche initié par le chimiste
Guy Ourisson
Pour Liliane de Lassus (à l’époque Liliane Stéhelin) c’est la personnalité de ce premier
Président de l’ULP qui a rendu possible la mise en place d’un tel groupe de recherche :
« il y avait une sorte de curiosité positive pour cet ailleurs des sciences, de la part de
quelqu'un, qui était un maître éminent, comme G. Ourisson, qui est bien plus qu'un grand
scientifique, qui est une personne.... Et dans la création du GERSULP, en fait c'est ça qui a
fonctionné […] ».
Entretien avec Liliane de Lassus, le 10 mai 2010.
Une équipe qui se constitue autour des premiers projets
(1973-1974)
Financé à la rentrée 1973, par un contrat ATP (Action Thématique Programmée) du CNRS, intitulé
« recherche sur la recherche », le Groupe d’Etude sur la Recherche Scientifique tout juste constitué,
initie une large enquête auprès des chercheurs de Strasbourg, « sur l’influence qu’ont, sur le choix
des sujets de recherche fondamentale, un certain nombre de facteurs. […] ».
Il s’agit alors « d’évaluer la répercussion des objectifs scientifiques nationaux et des contacts
personnels sur l’évolution des thèmes scientifiques abordés par un chercheur et sur l’évolution d’un
projet de recherche précis. »
Document – Programme du groupe d’Etude sur la recherche scientifique de l’université Louis Pasteur, partie « Programme de 1973/74 », p2/2,
1973.
Une équipe qui se constitue autour des premiers projets
(1973-1974)
« Le programme de recherche au cours de l’année 1972/73 a consisté essentiellement dans une enquête sur
la politique de la recherche dans les universités françaises. Ces études ont été effectuées par Monsieur
Ronald BRICKMAN, chercheur américain, Ph. D. en sciences politiques du M. I. T. ; leur objet a été l’examen
du rôle potentiel et actuel des universités françaises dans la définition et dans la réalisation de la politique
scientifique française. […] Les domaines retenus pour l’examen ont été les structures et l’organisation de la
recherche, le financement de la recherche, la constitution et la gestion des corps des chercheurs, la
documentation et la publication des travaux, le contenu de la recherche, l’utilisation et l’affectation de locaux et
d’équipement, et la formation des chercheurs. Cette analyse a été complétée par l’examen de la distribution
interne du pouvoir universitaire, des possibilités d’influencer la politique scientifique nationale, et des
changements principaux dans le système de la recherche universitaire par rapport aux anciennes facultés. »
Document - PROGRAMME DU GROUPE D’ETUDE SUR LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE DE L’UNIVERSITÉ LOUIS
PASTEUR , partie « Année 1972-73 », 1973.
Une équipe qui se constitue autour des premiers projets
(1973-1974)
« Groupe interdisciplinaire qui réunit huit chercheurs à plein temps
(scientifiques de sciences exactes, sociologues, psychologue, historien,
politologue, juriste) amenés par l’unité géographique du lieu de travail à
interagir quotidiennement, le GERSULP a, dans ses deux premières années
d’existence (1973-1975) mené 5 projets de recherche. »
Source : document de présentation daté de 1976
1. analyse des facteurs sociopolitiques influençant le choix des sujets de recherche par les chercheurs fondamentalistes
des sciences exactes (type, source et montant des financements, facilités des échanges internationaux, structure
organisationnelle des laboratoires, actualité du sujet dans la communauté scientifique internationale, compétitivité,
stratégie personnelle de continuité ou de discontinuité scientifique à partir de la thèse, …) (contrat CNRS)
2. mise au point de propositions pour la coordination de la recherche à l’échelle des communautés économiques
européennes (contrat CEE)
3. implications sociologiques chez une population rurale de l’implantation d’une centrale nucléaire : le cas de
Fessenheim (Alsace) (bourse EDF)
4. la sécurité physique des chercheurs dans les laboratoires universitaires : aspects juridiques et aspects psycho-
sociologiques (contrat DGRST)
5. la science dans le Tiers Monde : recherche des conditions d’exercice d’une créativité scientifique propre au Tiers
Monde (ressources propres au GERSULP) »
Document à l’en-tête du GERSULP (Groupe d’Etude et de Recherche sur la Science) de l’ULP, daté du 9 octobre 1975, pas d’auteur indiqué
Assurer la stabilité et la légitimité du groupe
• asseoir une certaine légitimité du groupe au sein d’une université majoritairement de sciences exactes et
expérimentales.
L’affirmation et l’importance de la reconnaissance du travail entrepris comme étant un véritable travail de
recherche
« […] et donc une des premières choses que j’ai fait ça a été de me détacher de la présidence. De
dire, « voilà nous sommes un groupe de recherche, et je ne veux pas que l’image d’être le think-tank
de la présidence soit attaché au groupe ».
Nous sommes des chercheurs, nous avons des problèmes à poser, et il faut les poser de façon
indépendante. »
Extrait de l’entretien de Baudouin Jurdant, le 18 juin 2009.
• redéfinition des attributions du GERSULP
Lettre de B. Jurdant à destination du CNRS adressée au comité STS
Envoyée le 21 octobre 1980 à Guy Ourrisson
Objet : présentation d’un programme scientifique à long terme
Objectif : « donner des moyens aux équipes constitués »,
demande de financement de fonctionnement et pour projets
L’interdisciplinarité au GERSULP?
1. Des parcours transdisciplinaires
2. Un quotidien interdisciplinaire
3. L’interdisciplinarité comme méthode de recherche sur la recherche
4. Les enjeux épistémologiques de l’interdisciplinarité entre sciences exactes et sciences
sociales
5. Les enjeux institutionnels de l’interdisciplinarité
(période 1976-1996)
1. Des parcours transdisciplinaires (période 1976-1996)
« Donc… c’était très intéressant en revanche, très très
intéressant, pour la personne de formation scientifique que
j’étais, d’avoir l’occasion ainsi de pénétrer dans des tas de
disciplines des sciences humaines. Alors là je me suis adonnée
à ça sans réserve. Que ce soit l’histoire des sciences,
l’épistémologie, la psychanalyse (...) »
Liliane de Lassus, entretien 10 mai 2010
« Autrement dit, je me voyais comme l’un de ces spécialistes au champ tout à fait étroit.
Mais alors mes intérêts pour la littérature, pour la logique, mes intérêts pour ceci ou cela, pour moi c’était
des pertes de temps, que je faisais en secret dans mon coin.
Avec le Gersulp, il y a eu une légitimité de ces pertes de temps et de ces occupations marginales, au
contraire. Cela a donné une certaine valeur à ce que j’appelle mes gadgets, c’est-à-dire les choses qui me
passionnent réellement. Et, vous connaissez le principe que, quand on est passionné par quelque chose, on
passionne les autres donc… il y a au moins cette sorte de transmission, en particulier pour les gens qui
étaient plus jeunes que moi, ce qui n’est pas trop difficile [rires], ça a donné des choses qui ont été
marquantes, pour les tournants qu’ont pris d’autres personnes. »
Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
Dans des échanges écrits entre les membres, les objectifs du GERSULP se définissent dès
1976 en termes d’accueil de scientifiques souhaitant, non pas quitter la science exacte
ou expérimentale, mais se nourrir de la réflexion permise par l’existence du groupe,
pour ensuite mieux poursuivre leur travail de recherche dans leur discipline d’origine.
La mobilité des membres de l’équipe :
un lieu de passage, un lieu de réflexivité
Le GERSULP se propose ainsi
d’accueillir les chercheurs « en errance »
issus des sciences de la nature
La mobilité des membres de l’équipe :
un lieu de passage, un lieu de réflexivité
« La réflexion sur la science est une nécessité qui se fait essentiellement sentir dans le domaine des sciences
sociales. Il arrive sans aucun doute que le même besoin soit ressenti par tel ou tel scientifique des sciences
exactes ; mais si ce besoin est suffisamment impératif pour conduire le scientifique à entreprendre effectivement
une telle réflexion, nous le voyons du coup s’éloigner progressivement – et souvent contre sa volonté – de sa
pratique « proprement scientifique » rigoureusement déterminée par son appartenance disciplinaire, pour
s’engager dans le mouvement infini de cette expérience souvent douloureuse mais presque quotidiennement
familière aux sciences sociales, d’errance. L’errance est une recherche de fondement ; elle éclot par et dans le
désir de savoir ce qu’il en est du vrai. Le scientifique des sciences exactes dont le but est de cerner au plus près
possible les fondements de la science ( ou de la vérité scientifique) risque, par conséquent, de rejoindre bientôt
une des disciplines relevant des sciences sociales – sociologie, psychologie, histoire, philosophie, épistémologie,
etc… »
Document – Sciences exactes, science sociales : la question d’un clivage mis en question, écrit par Philippe Breton,
Ragip Ege et Baudouin Jurdant, septembre 1979.
La mobilité des membres de l’équipe :
un groupe de nomades
« il y a pas mal de gens qui sont revenus, retournés, après leur
passage par le Gersulp, à leur discipline d'origine »
Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
Lettre de B. Jurdant à destination du CNRS adressée au comité STS
Envoyée le 21 octobre 1980 à Guy Ourrisson
Malgré l’idée que le passage au GERSULP se devait d’être transitoire, certains chercheurs
étaient tentés de rester, une fois l’intérêt éveillé par ce questionnement sur les sciences.
La question se pose alors du choix, au sein de l’équipe, de les accepter comme membre.
Partager une même « longueur d’onde » est alors un critère fondamental, mais les
conditions financières et le statut institutionnel attribué aux nouveaux venus sont souvent les
conditions les plus problématiques.
Passer ou s’installer ?
« Lui (…) c'était tout à fait son cas, enfin il disait, à un moment
donné (…) on ne pouvait plus le payer ou quelque chose
comme ça : "je quitterai pas le Gersulp, je m'accrocherai aux
tables !" »
Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
2. Un quotidien interdisciplinaire
L’interdisciplinarité comme expérience et comme transformation individuelle par le collectif
(période 1976-1996)
« (…) personne ne nous apprend l'interdisciplinarité. On
n’apprend pas, on tâtonne... (…) On ne nous apprend pas, il n'y
a pas de cours.
Comment, comment construire l'interdisciplinarité en fait ? Et
j'ai l'impression que l'expérience que j'ai vécue au Gersulp, est
de ce ressort là. Apprendre à écouter, et apprendre aussi à
parler d'où on est. Dans un groupe, les autres sont d'ailleurs. »
Michèle Kirch, entretien du 26 novembre 2009
« Ce qui fait que moins d’être un chercheur productif, j’étais un… comment on
peut appeler ça ? Un chercheur protégé…
Le Gersulp (…) c’était vraiment mon port d’attache.
Quand j’avais un moment, j’étais là, soit pour un temps de travail avec les uns ou
les autres, soit pour une discussion informelle, soit pour…
Et c’est grâce au Gersulp que j’ai fait ce que j’ai fait (…) je sais que je ne l’ai pas
fait toute seule, c’était la seule existence de ce lieu, ce lieu interdisciplinaire, où
la porte était ouverte, où les problèmes pouvaient être mis sur la table,
intellectuellement s’entend. C’était un bonheur de chaque instant. »
Michèle Kirch, entretien du 26 novembre 2009
« l’idée de la transdisciplinarité c’est vachement bien. Mais le vivre, je trouve ça pas si
facile du tout. Parce que du coup on ne sait plus où on est… »
Sylvie Koullen, entretien du 23 juin 2010
« (…) ça foisonnait ça partait dans - pas dans tous les sens en terme péjoratif - mais une forme de foisonnement…
si on prend des métaphores entre le monde macroscopique et le monde quantique les premières années
scientifiques c’était le monde de la cristallographie [rires], tout est en place, les noyaux, les atomes etcetera, les
années Gersulp c’était plutôt le monde quantique avec [rires] des particules qui foisonnent, des probabilités, des
spins, des probabilités de présence, vous voyez ? Voilà. Si la métaphore vous parle.
Ça foisonnait, il y avait une émulation, on faisait venir des physiciens, qui avaient une réflexion parallèle à leur
pratique en épistémologie ; des historiens des sciences. Il y avait des débats intellectuels permanents dans
lesquels on s’enfonçait avec volupté [rires] en pensant qu’évidemment nos réflexions apportaient une
contribution majeure et je suis sûre qu’effectivement ça apportait un regard nouveau sur les choses. »
Liliane de Lassus, entretien 10 mai 2010
« l’élément essentiel c’est la pluridisciplinarité. Le fait que dans le même labo il y avait des gens qui
étaient sociologues et d’autres chimistes, ou mathématiciens, fait que, l’intérêt pour je ne sais pas
quoi, la poésie, l’histoire ou la philosophie, devient tout à fait légitime.
Et… si dans un rayonnage de bibliothèque, il y a cinquante centimètres de poésie, ce n’est pas
quelqu’un qui perd son temps à lire de la poésie, c’est quelqu’un qui creuse un domaine, oui. Donc
la pluridisciplinarité est vraiment très fondamentale dans la légitimité. Parce que ça signifie : il y a
une vie en dehors des rails. Et les gens qui sont en-dehors des rails ne déraillent pas forcément
[rires]. Alors que dans les structures habituelles soit on est dans les rails, soit on déraille. Là au
contraire, tout peut être fécond. »
Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
3. L’interdisciplinarité comme méthode de recherche sur la recherche
La socio-épistémologie de « l’intervention gersulpienne directe »(1979-1980)
Source : document rédigé par B. Jurdant en 1979/1980
« La difficulté du « terrain » dans les études « socio-
épistémologiques » du Gersulp réside dans le maintien
d’une attitude extérieure, non-impliquée dans les
enjeux multiples des disciplines particulières, mais
néanmoins attentive aux forces vives de la recherche
et à la créativité. »
« une fonction d’analyse critique menée avec les
scientifiques et en accord avec eux »
« Il s’agit de faire exister de façon pertinente une
résistance extérieure à la science, pour que celle-ci
s’en porte mieux. »
« le but du Gersulp est de mieux connaître les sciences par un contact direct avec les réalités qui les font exister telles
qu’elles sont »
Source : document rédigé par B. Jurdant en 1979/1980
Source : Lettre de Baudouin Jurdant à destination du CNRS adressée au comité STS
Envoyée le 21 octobre 1980 à Guy Ourrisson
« G. Ourisson, à la création du groupe avait posé des exigences. (…)
Premièrement, il disait, je veux que, contrairement aux sciences sociales, vous
travailliez sur place, dans le labo. Que les gens soient présents, et interagissent. Ça
c’est une chose, et deuxièmement, plus intéressant encore, c’est… de travailler à partir
de problèmes, et pas de disciplines, et pas de méthodologies disciplinaires. Ce qui
vient d’abord, ce sont les problèmes, les questions. »
Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
Le GERSULP ET LES SCIENCES
« Etudes et recherches sur la science », telle est la vocation du
groupe, qui , on le sait, ne relève d’aucune discipline particulière.
L’idée qui se trouve à la base de cette « indiscipline » repose sur le
refus d’accorder à un domaine quelconque plus de pertinence qu’à
un autre quant à l’étude de cet objet particulier qu’est la science.
En conséquence, c’est bien de n’importe quelle discipline, aussi
bien des sciences exactes et naturelles que des sciences sociales et
humaines, que peuvent venir ceux qui désirent participer aux
recherches du Gersulp.
Cette participation ne peut être fondée sur une interdisciplinarité concerté en vue de faciliter la saisie de cette totalité
(« science et société ») sous tous ses aspects (social, politique, économique, culturel, technique, écologique, etc…).
Il ne s’agit pas par exemple de construite des modèles de l’activité scientifique qui en rendrait si bien compte, qu’une maîtrise
politique de cette activité, pourrait être envisagée avec plus de succès qu’auparavant. Ni d’inspirer par là, ou de justifier après
coup, les politiques scientifiques existantes. »
Baudouin Jurdant, document à la date estimé 1979 ou 1980
Les difficultés liées à la mise en place d’un groupe de recherche sur la
science dans une université des sciences de la nature
« c’était ancré dans une université dite
scientifique, c’était les sciences physiques, il y avait
des scientifiques d’origine dedans et donc, je crois
que tout le projet de Baudouin (…) c’était de créer
un espace intellectuel particulier. »
Liliane de Lassus, entretien 10 mai 2010
Les difficultés liées à la mise en place d’un groupe de recherche sur la
science dans une université des sciences de la nature
La présence du GERSULP au sein de l’Université Louis Pasteur, où travaillaient
des chercheurs en sciences exactes et expérimentales, ne passe pas inaperçue.
Si elle était encouragée et soutenue par le Président lui-même, au moment de
son initiation et dans les années qui suivirent, les activités de ce groupe suscitent
un mélange d’interrogations, de critiques et de méfiance.
Les « ulperies d’Ourisson »
« vous connaissez la différence entre pluridisciplinarité et interdisciplinarité ?
La pluridisciplinarité, c’est quand des gens, de disciplines différentes, travaillent dans le même groupe. L’interdisciplinarité
c’est lorsque il y a réellement un travail qui se fait, avec les compétences de différentes disciplines à la fois. C’est-à-dire les
compétences disons sociologiques, historiques et psychanalytiques pour l’approche d’un même sujet. Et ça, ce bain-là est
un bain probablement assez rare à l’université. »
Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
Les sciences comme objet commun
« avec n’importe qui, mais pas n’importe quoi »
Cahier S.T.S n°1. Indisciplines, 1984
« Le fait, déjà, de vouloir venir au Gersulp était un acte, en soi, qui signifiait quelque
chose. N’importe qui ne voulait pas venir au Gersulp [rires], en tout cas dans la
première période. C’était bien parce que la personne était intéressée par ce qui s’y
passait, par cette interdisciplinarité, par ce type de questionnement »
Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
« Oui, alors disons que jusque-là, le seul point commun, qu'il y avait entre tous les membres du
Gersulp, c'était l'objet. C'est-à-dire que... on travaillait sur les sciences et les technologies, avec
le regard, un regard de philosophe, un regard d'historien , un regard de ce qu'on voulait, mais
l'essentiel c'était les sciences et les technologies. »
Bernard Ancori, entretien du 20 novembre2009
4. Les enjeux épistémologiques de l’interdisciplinarité
(…)
5. Les enjeux institutionnels de l’interdisciplinarité
« ce qu'il y avait à l'époque, c'était ces bourses interdisciplinaires créées par G.
Ourisson. Je crois que Carmen Aiguabella a eu la première et je pense qu'ensuite il y a
eu Jean-Michel Truong, qui venait de la psycho, qui en a eu une aussi. Pour nous ça a
été très important. »
Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
« Mais alors nous, on savait pas quoi faire de nous. Comment nous classer, qu'est-ce que c'est ? Ce
n’est pas une discipline, c'est... En plus Baudouin qui défendait l'"adisciplinarité", etc. C'était
quelque chose d'extrêmement étrange, dont les gens ne savaient pas très bien quoi faire. Donc a
priori, on s'en méfiait. »
Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
« « Adisciplinarité », c’est sans doute de constater que… toutes les choses réellement importantes et probablement les
frayages qui apportent des éclairages nouveaux sont tous pluridisciplinaires, ou adisciplinaires, donc on finirait par en
conclure que les disciplines n’ont aucune importance, et que la première des choses à faire, c’est de faire éclater les
disciplines, pour qu’elles puissent se retrouver.
Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
« je rencontre énormément de personne (…) qui me demandent ce que je fais, alors de temps en
temps je leur dis « je suis poète », de temps en temps « je suis philosophe », de temps en temps,
« je suis historien », de temps en temps « je suis physicien ».
Et quand je leur explique la diversité des trucs, ils me disent, « mais comment ça se fait ? Comment
ça se fait qu’à l’université on peut faire des choses diverses comme ça ? ». Et bien ça c’est un cas
particulier lié à la création d’un institut comme ça, d’un groupe comme ça par le président de
l’université qui s’appelait Guy Ourisson… c’est lui qui a eu l’idée de faire un groupe
interdisciplinaire à l’intérieur d’une université scientifique, et c’est une inspiration assez
étonnante. Et une construction pas banale. Pour laquelle j’ai beaucoup de reconnaissance
individuelle. »
Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
« Toute interprétation qui viserait à assimiler l’« intervention gersulpienne » à l’expression d’un
obscurantisme latent, est bien entendu erronée.
Au contraire, le Gersulp s’attache à défendre l’aventure scientifique, en sachant notamment qu’il
faut parfois la défendre contre elle-même, et que le mieux est souvent l’ennemi du bien. »
Document - Le GERSULP et les sciences, écrit par Baudouin Jurdant, 1979 ou 1980.
Difficultés d’identification et ambiguïtés
« Exactement, c'était comme ça. On était là pour observer et critiquer les scientifiques. Et aussi
pour... un certain nombre de gens craignaient qu'on attaque l'image de la science, c'était aussi ça. »
Extrait de l’entretien de Josiane Olff-Nathan, le 30 octobre 2009.
Difficultés d’identification et défenses
« Donc il fallait, tous les ans, il fallait que j’aille, non seulement il fallait que je renouvelle mon poste,
parce que j’étais associé, j’étais belge, et on n’avait pas le droit, on avait pas de permanence, donc
tous les ans je devais renouveler mon dossier.
Et tous les ans, ils m’appelaient au conseil scientifique pour faire une défense du GERSULP. Et moi, je
disais « voilà, on travaille sur la physique des hautes énergie, on travaille… » bon. C’était pas grand-
chose, mais c’était, nerveusement toujours difficile. Alors heureusement que j’avais des protecteurs,
des gens qui disaient « mais non, ils font du travail…», mais on n’était pas bien vu. »
Extrait de l’entretien de Baudouin Jurdant, le 18 juin 2009.
Cette précarité institutionnelle avait non seulement des conséquences sur les
relations entretenues avec la présidence et les autres laboratoires de l’Université,
mais également sur l’unité et les conditions de travail du groupe lui-même.
D’une certaine manière, elle semble avoir contribué à la construction d’une
identité collective de l’équipe tout en générant de fortes insatisfactions et
des tensions entre certains des membres
Difficultés d’identification et précarité institutionnelle
Difficultés d’identification et défenses
« Enfin (…) on avait toujours quand même le sentiment d'une menace qui planait, et on ne savait pas si
on allait subsister l'année suivante. C'est vrai.
Mais je n'arrive plus maintenant à le raccrocher à des choses précises. Qu'est-ce qu'on craignait ? Est-ce
qu'on craignait qu'on ait plus d'argent ? Qu'on ferme le labo ? Que Baudouin n'ait pas son poste, ou que ?
Je ne me souviens plus si c'est rattaché... à une crainte vraiment précise ou si c'était un sentiment un peu
diffus comme ça. Mais c'est vrai qu'il était là quoi.
Mais ce qui était aussi très stimulant d'un côté [rires] parce qu'on n’était pas installé dans une espèce de
routine, ça pas du tout […] oui, tout le monde [dans l’équipe] avait ce sentiment : (…) qu'on faisait
quelque chose de pionnier. Et qu’on était en danger. Qu'on n’avait pas d'assurance sur la continuité. Ça je
crois que c'était un sentiment partagé par tout le monde. […]
Je ne crois pas que quelqu’un ait pu penser, disons, faire carrière au GERSULP, quelque chose comme ça.
La preuve, c’est qu’il y a eu énormément de mouvements(…). En fait je suis la seule, oui [rires] [à être
restée]. »
Extrait de l’entretien de Josiane Olff-Nathan, le 30 octobre 2009.
« Et pour le Gersulp lui-même il faudrait distinguer entre les époques. Parce que la vocation initiale du Gersulp (…) n'était
absolument pas de fabriquer une équipe de permanents.
Le but initial de Guy Ourisson c'était qu'il y est bien sûr un directeur qui soit permanent, peut-être un ou deux
chercheurs, mais que le reste de l'équipe ce soit des scientifiques pur et durs, qui séjournent dans le Gersulp pour une
durée limitée. Et au début ça fonctionnait comme ça. J'ai le souvenir de plein de chimistes ou de physiciens qui sont
passé par le Gersulp.
Peu à peu ça n'a plus fonctionné comme ça. C'est-à-dire que c'est devenu… mais c'était nécessaire aussi, il fallait que
l'équipe grandisse, il fallait qu'il y ait un nombre de permanent plus important que simplement une ou deux personnes.
Et comme l'équipe à grandit, et bien les relations internes entre les membres de l'équipe ont pris le pas sur l'appel à des
collaborations externes, donc c'est devenu moins un lieu de passage qu'au début, plus un lieu de permanents, plus un
lieu de situations permanentes… »
Bernard Ancori, entretien du 20 novembre2009
Du lieu de passage à l’équipe instituée
En 1979, Baudouin Jurdant fait une demande officielle au CNRS afin
d’accéder au statut de jeune équipe CNRS, dans la section 34
(sociologie). Cette demande aboutie en 1982 et marque pour l’équipe
« un tournant dans la dynamique de recherche qui caractérise le
GERSULP depuis sa création ».
Le statut du GERSULP évolue de nouveau en 1989, lorsque le groupe
s’intègre au CRTST (Centre de Recherches Transdisciplinaires sur les
Sciences et les Techniques), composé de trois équipes de l’ULP.
En 1991, il prend le statut URA (Unité de Recherche Associée) du
CNRS au sein de l’IERST (Institut Européen de Recherche sur les
Sciences et les Techniques).
En janvier 1993, le GERSULP deviendra temporairement une
composante de l’IRFEST (Institut de Recherches sur les Fondements et
les Enjeux des Sciences et des Techniques), UMR ULP-CNRS C9949,
dirigée par William Shea.
Le GERSULP est associé en 2004/2005 aux deux équipes LESVS
(Laboratoire d’Epistémologie des Sciences de la Vie et de la Santé) et
EPM (Ethique et Pratiques Médicales) dans le cadre de l’Equipe
d’Accueil IRIST (Institut de Recherches Interdisciplinaires sur les
Sciences et la Technologie).
Aujourd’hui devenu l'AHP PREST :
les Archives Henri-Poincaré - Philosophie et Recherches sur les
Sciences et les Technologies
toujours l’interdisciplinarité au centre.
« quel est le bénéfice qu’en a tiré l’institution, puisque au départ c’était bien ça : quelque chose pour réfléchir sur la
pratique de la science, que ce soit en terme politique, scientifique, au niveau des parcours cognitifs en tant que
chercheurs, l’interdisciplinarité, etcetera.
Quel est le bénéfice dans la pratique, et qu’en a tiré la communauté scientifique ? Je ne sais pas. Et vraiment je ne le
sais pas. (…) Et les grandes années Gersulp… elles se sont développées après mon départ. Donc après, quand les
choses marchent bien, qu’on commence à être connu, qu’on commence à être courtisé, quand il y a des gens qui se
pressent pour finir faire des thèses chez vous, etcetera, il y a toujours le risque, ce qui est inhérent à cette trajectoire,
que cela se ferme, que cela se clôture, cela devient un domaine. Mais « cela se clôture » ça ne veut pas dire qu’il n’y a
pas d’interface [rires].
Ce n’est pas ce que je sous-entends, mais quelles interfaces ? Pour quels bénéfices ? Au bénéfice de qui, par rapport
au projet originel ? Je ne sais pas. D’ailleurs faut-il que ce soit conforme au projet originel, je ne sais pas. Le projet
originel peut avoir été un déclencheur pour une transformation vers quelque chose d’autre. »
Liliane de Lassus, entretien 10 mai 2010
Contact : faury@unistra.fr

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191122 misha gersulp_v3

  • 1. Une expérience de l’interdisciplinarité en études de sciences à Strasbourg : le GERSULP (période 1976-1996)
  • 2. Facteurs d’unité du GERSULP PREMIER FACTEUR D’UNITE : les membres de l’équipe travaillent effectivement ensemble dans les locaux de l’Institut Le Bel et interagissent en permanence. Source : document de présentation du Gersulp, 1993
  • 3. DEUXIEME FACTEUR D’UNITE : la référence aux sciences. Tous les projets de recherche du GERSULP traitent, à un titre ou un autre, de la dimension scientifique et/ou technique des sociétés contemporaines. Le cadre général qui donne sens et valeur à ces préoccupations est celui des rapports entre science et démocratie. Facteurs d’unité du GERSULP Source : document de présentation du Gersulp, 1993
  • 4. TROISIEME FACTEUR D’UNITE : l’ouverture transdisciplinaire. Cette ouverture implique pour chaque membre de l’équipe (quelle que soit sa formation d’origine) un assouplissement de son identité disciplinaire initiale au profit d’un engagement personnel plus prononcé sur les problèmes à résoudre et d’une volonté de communication a priori sans réserves. Facteurs d’unité du GERSULP Source : document de présentation du Gersulp, 1993
  • 5. Création et premières études du groupe entre 1972 et 1976 Le GERSULP (Groupe de Recherche sur la Science de l’Université Louis Pasteur), initialement « Groupe d’Etude sur la Recherche » (1973), qui deviendra ensuite dans la même année « Groupe sur le Développement des Sciences » puis « Groupe d’Etude sur la Recherche Scientifique », de l’Université Louis Pasteur (ULP), fut créé en 1973 à Strasbourg sous l'impulsion de Guy Ourisson, chimiste, et premier Président de l’ULP. Unité de lieu Transdisciplinarité Disponibilité
  • 6. Création et premières études du groupe entre 1972 et 1976 « Crée en 1973 par le Prof. Guy Ourisson, le GERSULP mène des études approfondies sur les problèmes posés par l’intégration sociale, politique, économique et culturelle des sciences dans les sociétés d’aujourd’hui. » Document de présentation du GERSULP, 1991 – Partie « Bref historique du GERSULP » « Nous sommes un groupe de recherche multidisciplinaire qui, au sein de l’Université Louis Pasteur de Strasbourg, université scientifique, nous livrons à des recherches sociologiques, politiques, économiques et juridiques sur les divers aspects de l’activité scientifique dans ses rapports avec la société. Notre groupe a été créé à l’initiative de Monsieur le Professeur Guy OURISSON, Président de l’Université Louis Pasteur, et il fonctionne sous sa direction effective. » Document – Lettre de Josiane Olff-Nathan à M. Aubrac, Directeur de la F. A. O. , 1er avril 1975.
  • 7. Un groupe de recherche initié par le chimiste Guy Ourisson Dès 1972, l’Université Louis Pasteur met en place un programme, dit dans un premier temps « d’activité », puis dès l’année suivante « de recherche », sur les politiques de recherche. Ce programme sera financé jusqu’en septembre 1973.
  • 8. Un groupe de recherche initié par le chimiste Guy Ourisson Pour Liliane de Lassus (à l’époque Liliane Stéhelin) c’est la personnalité de ce premier Président de l’ULP qui a rendu possible la mise en place d’un tel groupe de recherche : « il y avait une sorte de curiosité positive pour cet ailleurs des sciences, de la part de quelqu'un, qui était un maître éminent, comme G. Ourisson, qui est bien plus qu'un grand scientifique, qui est une personne.... Et dans la création du GERSULP, en fait c'est ça qui a fonctionné […] ». Entretien avec Liliane de Lassus, le 10 mai 2010.
  • 9. Une équipe qui se constitue autour des premiers projets (1973-1974) Financé à la rentrée 1973, par un contrat ATP (Action Thématique Programmée) du CNRS, intitulé « recherche sur la recherche », le Groupe d’Etude sur la Recherche Scientifique tout juste constitué, initie une large enquête auprès des chercheurs de Strasbourg, « sur l’influence qu’ont, sur le choix des sujets de recherche fondamentale, un certain nombre de facteurs. […] ». Il s’agit alors « d’évaluer la répercussion des objectifs scientifiques nationaux et des contacts personnels sur l’évolution des thèmes scientifiques abordés par un chercheur et sur l’évolution d’un projet de recherche précis. » Document – Programme du groupe d’Etude sur la recherche scientifique de l’université Louis Pasteur, partie « Programme de 1973/74 », p2/2, 1973.
  • 10. Une équipe qui se constitue autour des premiers projets (1973-1974) « Le programme de recherche au cours de l’année 1972/73 a consisté essentiellement dans une enquête sur la politique de la recherche dans les universités françaises. Ces études ont été effectuées par Monsieur Ronald BRICKMAN, chercheur américain, Ph. D. en sciences politiques du M. I. T. ; leur objet a été l’examen du rôle potentiel et actuel des universités françaises dans la définition et dans la réalisation de la politique scientifique française. […] Les domaines retenus pour l’examen ont été les structures et l’organisation de la recherche, le financement de la recherche, la constitution et la gestion des corps des chercheurs, la documentation et la publication des travaux, le contenu de la recherche, l’utilisation et l’affectation de locaux et d’équipement, et la formation des chercheurs. Cette analyse a été complétée par l’examen de la distribution interne du pouvoir universitaire, des possibilités d’influencer la politique scientifique nationale, et des changements principaux dans le système de la recherche universitaire par rapport aux anciennes facultés. » Document - PROGRAMME DU GROUPE D’ETUDE SUR LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE DE L’UNIVERSITÉ LOUIS PASTEUR , partie « Année 1972-73 », 1973.
  • 11. Une équipe qui se constitue autour des premiers projets (1973-1974)
  • 12. « Groupe interdisciplinaire qui réunit huit chercheurs à plein temps (scientifiques de sciences exactes, sociologues, psychologue, historien, politologue, juriste) amenés par l’unité géographique du lieu de travail à interagir quotidiennement, le GERSULP a, dans ses deux premières années d’existence (1973-1975) mené 5 projets de recherche. » Source : document de présentation daté de 1976
  • 13. 1. analyse des facteurs sociopolitiques influençant le choix des sujets de recherche par les chercheurs fondamentalistes des sciences exactes (type, source et montant des financements, facilités des échanges internationaux, structure organisationnelle des laboratoires, actualité du sujet dans la communauté scientifique internationale, compétitivité, stratégie personnelle de continuité ou de discontinuité scientifique à partir de la thèse, …) (contrat CNRS) 2. mise au point de propositions pour la coordination de la recherche à l’échelle des communautés économiques européennes (contrat CEE) 3. implications sociologiques chez une population rurale de l’implantation d’une centrale nucléaire : le cas de Fessenheim (Alsace) (bourse EDF) 4. la sécurité physique des chercheurs dans les laboratoires universitaires : aspects juridiques et aspects psycho- sociologiques (contrat DGRST) 5. la science dans le Tiers Monde : recherche des conditions d’exercice d’une créativité scientifique propre au Tiers Monde (ressources propres au GERSULP) » Document à l’en-tête du GERSULP (Groupe d’Etude et de Recherche sur la Science) de l’ULP, daté du 9 octobre 1975, pas d’auteur indiqué
  • 14. Assurer la stabilité et la légitimité du groupe • asseoir une certaine légitimité du groupe au sein d’une université majoritairement de sciences exactes et expérimentales. L’affirmation et l’importance de la reconnaissance du travail entrepris comme étant un véritable travail de recherche « […] et donc une des premières choses que j’ai fait ça a été de me détacher de la présidence. De dire, « voilà nous sommes un groupe de recherche, et je ne veux pas que l’image d’être le think-tank de la présidence soit attaché au groupe ». Nous sommes des chercheurs, nous avons des problèmes à poser, et il faut les poser de façon indépendante. » Extrait de l’entretien de Baudouin Jurdant, le 18 juin 2009. • redéfinition des attributions du GERSULP
  • 15. Lettre de B. Jurdant à destination du CNRS adressée au comité STS Envoyée le 21 octobre 1980 à Guy Ourrisson Objet : présentation d’un programme scientifique à long terme Objectif : « donner des moyens aux équipes constitués », demande de financement de fonctionnement et pour projets
  • 16. L’interdisciplinarité au GERSULP? 1. Des parcours transdisciplinaires 2. Un quotidien interdisciplinaire 3. L’interdisciplinarité comme méthode de recherche sur la recherche 4. Les enjeux épistémologiques de l’interdisciplinarité entre sciences exactes et sciences sociales 5. Les enjeux institutionnels de l’interdisciplinarité (période 1976-1996)
  • 17. 1. Des parcours transdisciplinaires (période 1976-1996) « Donc… c’était très intéressant en revanche, très très intéressant, pour la personne de formation scientifique que j’étais, d’avoir l’occasion ainsi de pénétrer dans des tas de disciplines des sciences humaines. Alors là je me suis adonnée à ça sans réserve. Que ce soit l’histoire des sciences, l’épistémologie, la psychanalyse (...) » Liliane de Lassus, entretien 10 mai 2010
  • 18. « Autrement dit, je me voyais comme l’un de ces spécialistes au champ tout à fait étroit. Mais alors mes intérêts pour la littérature, pour la logique, mes intérêts pour ceci ou cela, pour moi c’était des pertes de temps, que je faisais en secret dans mon coin. Avec le Gersulp, il y a eu une légitimité de ces pertes de temps et de ces occupations marginales, au contraire. Cela a donné une certaine valeur à ce que j’appelle mes gadgets, c’est-à-dire les choses qui me passionnent réellement. Et, vous connaissez le principe que, quand on est passionné par quelque chose, on passionne les autres donc… il y a au moins cette sorte de transmission, en particulier pour les gens qui étaient plus jeunes que moi, ce qui n’est pas trop difficile [rires], ça a donné des choses qui ont été marquantes, pour les tournants qu’ont pris d’autres personnes. » Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
  • 19. Dans des échanges écrits entre les membres, les objectifs du GERSULP se définissent dès 1976 en termes d’accueil de scientifiques souhaitant, non pas quitter la science exacte ou expérimentale, mais se nourrir de la réflexion permise par l’existence du groupe, pour ensuite mieux poursuivre leur travail de recherche dans leur discipline d’origine. La mobilité des membres de l’équipe : un lieu de passage, un lieu de réflexivité Le GERSULP se propose ainsi d’accueillir les chercheurs « en errance » issus des sciences de la nature
  • 20.
  • 21. La mobilité des membres de l’équipe : un lieu de passage, un lieu de réflexivité « La réflexion sur la science est une nécessité qui se fait essentiellement sentir dans le domaine des sciences sociales. Il arrive sans aucun doute que le même besoin soit ressenti par tel ou tel scientifique des sciences exactes ; mais si ce besoin est suffisamment impératif pour conduire le scientifique à entreprendre effectivement une telle réflexion, nous le voyons du coup s’éloigner progressivement – et souvent contre sa volonté – de sa pratique « proprement scientifique » rigoureusement déterminée par son appartenance disciplinaire, pour s’engager dans le mouvement infini de cette expérience souvent douloureuse mais presque quotidiennement familière aux sciences sociales, d’errance. L’errance est une recherche de fondement ; elle éclot par et dans le désir de savoir ce qu’il en est du vrai. Le scientifique des sciences exactes dont le but est de cerner au plus près possible les fondements de la science ( ou de la vérité scientifique) risque, par conséquent, de rejoindre bientôt une des disciplines relevant des sciences sociales – sociologie, psychologie, histoire, philosophie, épistémologie, etc… » Document – Sciences exactes, science sociales : la question d’un clivage mis en question, écrit par Philippe Breton, Ragip Ege et Baudouin Jurdant, septembre 1979.
  • 22. La mobilité des membres de l’équipe : un groupe de nomades « il y a pas mal de gens qui sont revenus, retournés, après leur passage par le Gersulp, à leur discipline d'origine » Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009 Lettre de B. Jurdant à destination du CNRS adressée au comité STS Envoyée le 21 octobre 1980 à Guy Ourrisson
  • 23. Malgré l’idée que le passage au GERSULP se devait d’être transitoire, certains chercheurs étaient tentés de rester, une fois l’intérêt éveillé par ce questionnement sur les sciences. La question se pose alors du choix, au sein de l’équipe, de les accepter comme membre. Partager une même « longueur d’onde » est alors un critère fondamental, mais les conditions financières et le statut institutionnel attribué aux nouveaux venus sont souvent les conditions les plus problématiques. Passer ou s’installer ? « Lui (…) c'était tout à fait son cas, enfin il disait, à un moment donné (…) on ne pouvait plus le payer ou quelque chose comme ça : "je quitterai pas le Gersulp, je m'accrocherai aux tables !" » Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
  • 24. 2. Un quotidien interdisciplinaire L’interdisciplinarité comme expérience et comme transformation individuelle par le collectif (période 1976-1996) « (…) personne ne nous apprend l'interdisciplinarité. On n’apprend pas, on tâtonne... (…) On ne nous apprend pas, il n'y a pas de cours. Comment, comment construire l'interdisciplinarité en fait ? Et j'ai l'impression que l'expérience que j'ai vécue au Gersulp, est de ce ressort là. Apprendre à écouter, et apprendre aussi à parler d'où on est. Dans un groupe, les autres sont d'ailleurs. » Michèle Kirch, entretien du 26 novembre 2009
  • 25. « Ce qui fait que moins d’être un chercheur productif, j’étais un… comment on peut appeler ça ? Un chercheur protégé… Le Gersulp (…) c’était vraiment mon port d’attache. Quand j’avais un moment, j’étais là, soit pour un temps de travail avec les uns ou les autres, soit pour une discussion informelle, soit pour… Et c’est grâce au Gersulp que j’ai fait ce que j’ai fait (…) je sais que je ne l’ai pas fait toute seule, c’était la seule existence de ce lieu, ce lieu interdisciplinaire, où la porte était ouverte, où les problèmes pouvaient être mis sur la table, intellectuellement s’entend. C’était un bonheur de chaque instant. » Michèle Kirch, entretien du 26 novembre 2009
  • 26. « l’idée de la transdisciplinarité c’est vachement bien. Mais le vivre, je trouve ça pas si facile du tout. Parce que du coup on ne sait plus où on est… » Sylvie Koullen, entretien du 23 juin 2010 « (…) ça foisonnait ça partait dans - pas dans tous les sens en terme péjoratif - mais une forme de foisonnement… si on prend des métaphores entre le monde macroscopique et le monde quantique les premières années scientifiques c’était le monde de la cristallographie [rires], tout est en place, les noyaux, les atomes etcetera, les années Gersulp c’était plutôt le monde quantique avec [rires] des particules qui foisonnent, des probabilités, des spins, des probabilités de présence, vous voyez ? Voilà. Si la métaphore vous parle. Ça foisonnait, il y avait une émulation, on faisait venir des physiciens, qui avaient une réflexion parallèle à leur pratique en épistémologie ; des historiens des sciences. Il y avait des débats intellectuels permanents dans lesquels on s’enfonçait avec volupté [rires] en pensant qu’évidemment nos réflexions apportaient une contribution majeure et je suis sûre qu’effectivement ça apportait un regard nouveau sur les choses. » Liliane de Lassus, entretien 10 mai 2010
  • 27. « l’élément essentiel c’est la pluridisciplinarité. Le fait que dans le même labo il y avait des gens qui étaient sociologues et d’autres chimistes, ou mathématiciens, fait que, l’intérêt pour je ne sais pas quoi, la poésie, l’histoire ou la philosophie, devient tout à fait légitime. Et… si dans un rayonnage de bibliothèque, il y a cinquante centimètres de poésie, ce n’est pas quelqu’un qui perd son temps à lire de la poésie, c’est quelqu’un qui creuse un domaine, oui. Donc la pluridisciplinarité est vraiment très fondamentale dans la légitimité. Parce que ça signifie : il y a une vie en dehors des rails. Et les gens qui sont en-dehors des rails ne déraillent pas forcément [rires]. Alors que dans les structures habituelles soit on est dans les rails, soit on déraille. Là au contraire, tout peut être fécond. » Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
  • 28. 3. L’interdisciplinarité comme méthode de recherche sur la recherche La socio-épistémologie de « l’intervention gersulpienne directe »(1979-1980) Source : document rédigé par B. Jurdant en 1979/1980 « La difficulté du « terrain » dans les études « socio- épistémologiques » du Gersulp réside dans le maintien d’une attitude extérieure, non-impliquée dans les enjeux multiples des disciplines particulières, mais néanmoins attentive aux forces vives de la recherche et à la créativité. » « une fonction d’analyse critique menée avec les scientifiques et en accord avec eux » « Il s’agit de faire exister de façon pertinente une résistance extérieure à la science, pour que celle-ci s’en porte mieux. » « le but du Gersulp est de mieux connaître les sciences par un contact direct avec les réalités qui les font exister telles qu’elles sont »
  • 29. Source : document rédigé par B. Jurdant en 1979/1980
  • 30. Source : Lettre de Baudouin Jurdant à destination du CNRS adressée au comité STS Envoyée le 21 octobre 1980 à Guy Ourrisson
  • 31. « G. Ourisson, à la création du groupe avait posé des exigences. (…) Premièrement, il disait, je veux que, contrairement aux sciences sociales, vous travailliez sur place, dans le labo. Que les gens soient présents, et interagissent. Ça c’est une chose, et deuxièmement, plus intéressant encore, c’est… de travailler à partir de problèmes, et pas de disciplines, et pas de méthodologies disciplinaires. Ce qui vient d’abord, ce sont les problèmes, les questions. » Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
  • 32. Le GERSULP ET LES SCIENCES « Etudes et recherches sur la science », telle est la vocation du groupe, qui , on le sait, ne relève d’aucune discipline particulière. L’idée qui se trouve à la base de cette « indiscipline » repose sur le refus d’accorder à un domaine quelconque plus de pertinence qu’à un autre quant à l’étude de cet objet particulier qu’est la science. En conséquence, c’est bien de n’importe quelle discipline, aussi bien des sciences exactes et naturelles que des sciences sociales et humaines, que peuvent venir ceux qui désirent participer aux recherches du Gersulp. Cette participation ne peut être fondée sur une interdisciplinarité concerté en vue de faciliter la saisie de cette totalité (« science et société ») sous tous ses aspects (social, politique, économique, culturel, technique, écologique, etc…). Il ne s’agit pas par exemple de construite des modèles de l’activité scientifique qui en rendrait si bien compte, qu’une maîtrise politique de cette activité, pourrait être envisagée avec plus de succès qu’auparavant. Ni d’inspirer par là, ou de justifier après coup, les politiques scientifiques existantes. » Baudouin Jurdant, document à la date estimé 1979 ou 1980
  • 33. Les difficultés liées à la mise en place d’un groupe de recherche sur la science dans une université des sciences de la nature « c’était ancré dans une université dite scientifique, c’était les sciences physiques, il y avait des scientifiques d’origine dedans et donc, je crois que tout le projet de Baudouin (…) c’était de créer un espace intellectuel particulier. » Liliane de Lassus, entretien 10 mai 2010
  • 34. Les difficultés liées à la mise en place d’un groupe de recherche sur la science dans une université des sciences de la nature La présence du GERSULP au sein de l’Université Louis Pasteur, où travaillaient des chercheurs en sciences exactes et expérimentales, ne passe pas inaperçue. Si elle était encouragée et soutenue par le Président lui-même, au moment de son initiation et dans les années qui suivirent, les activités de ce groupe suscitent un mélange d’interrogations, de critiques et de méfiance. Les « ulperies d’Ourisson »
  • 35. « vous connaissez la différence entre pluridisciplinarité et interdisciplinarité ? La pluridisciplinarité, c’est quand des gens, de disciplines différentes, travaillent dans le même groupe. L’interdisciplinarité c’est lorsque il y a réellement un travail qui se fait, avec les compétences de différentes disciplines à la fois. C’est-à-dire les compétences disons sociologiques, historiques et psychanalytiques pour l’approche d’un même sujet. Et ça, ce bain-là est un bain probablement assez rare à l’université. » Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010 Les sciences comme objet commun « avec n’importe qui, mais pas n’importe quoi » Cahier S.T.S n°1. Indisciplines, 1984
  • 36. « Le fait, déjà, de vouloir venir au Gersulp était un acte, en soi, qui signifiait quelque chose. N’importe qui ne voulait pas venir au Gersulp [rires], en tout cas dans la première période. C’était bien parce que la personne était intéressée par ce qui s’y passait, par cette interdisciplinarité, par ce type de questionnement » Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009 « Oui, alors disons que jusque-là, le seul point commun, qu'il y avait entre tous les membres du Gersulp, c'était l'objet. C'est-à-dire que... on travaillait sur les sciences et les technologies, avec le regard, un regard de philosophe, un regard d'historien , un regard de ce qu'on voulait, mais l'essentiel c'était les sciences et les technologies. » Bernard Ancori, entretien du 20 novembre2009
  • 37. 4. Les enjeux épistémologiques de l’interdisciplinarité
  • 38. (…)
  • 39. 5. Les enjeux institutionnels de l’interdisciplinarité « ce qu'il y avait à l'époque, c'était ces bourses interdisciplinaires créées par G. Ourisson. Je crois que Carmen Aiguabella a eu la première et je pense qu'ensuite il y a eu Jean-Michel Truong, qui venait de la psycho, qui en a eu une aussi. Pour nous ça a été très important. » Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009
  • 40. « Mais alors nous, on savait pas quoi faire de nous. Comment nous classer, qu'est-ce que c'est ? Ce n’est pas une discipline, c'est... En plus Baudouin qui défendait l'"adisciplinarité", etc. C'était quelque chose d'extrêmement étrange, dont les gens ne savaient pas très bien quoi faire. Donc a priori, on s'en méfiait. » Josiane Olff-Nathan, entretien du 30 octobre 2009 « « Adisciplinarité », c’est sans doute de constater que… toutes les choses réellement importantes et probablement les frayages qui apportent des éclairages nouveaux sont tous pluridisciplinaires, ou adisciplinaires, donc on finirait par en conclure que les disciplines n’ont aucune importance, et que la première des choses à faire, c’est de faire éclater les disciplines, pour qu’elles puissent se retrouver. Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
  • 41. « je rencontre énormément de personne (…) qui me demandent ce que je fais, alors de temps en temps je leur dis « je suis poète », de temps en temps « je suis philosophe », de temps en temps, « je suis historien », de temps en temps « je suis physicien ». Et quand je leur explique la diversité des trucs, ils me disent, « mais comment ça se fait ? Comment ça se fait qu’à l’université on peut faire des choses diverses comme ça ? ». Et bien ça c’est un cas particulier lié à la création d’un institut comme ça, d’un groupe comme ça par le président de l’université qui s’appelait Guy Ourisson… c’est lui qui a eu l’idée de faire un groupe interdisciplinaire à l’intérieur d’une université scientifique, et c’est une inspiration assez étonnante. Et une construction pas banale. Pour laquelle j’ai beaucoup de reconnaissance individuelle. » Guy Chouraqui, entretien du 20 avril 2010
  • 42.
  • 43. « Toute interprétation qui viserait à assimiler l’« intervention gersulpienne » à l’expression d’un obscurantisme latent, est bien entendu erronée. Au contraire, le Gersulp s’attache à défendre l’aventure scientifique, en sachant notamment qu’il faut parfois la défendre contre elle-même, et que le mieux est souvent l’ennemi du bien. » Document - Le GERSULP et les sciences, écrit par Baudouin Jurdant, 1979 ou 1980. Difficultés d’identification et ambiguïtés « Exactement, c'était comme ça. On était là pour observer et critiquer les scientifiques. Et aussi pour... un certain nombre de gens craignaient qu'on attaque l'image de la science, c'était aussi ça. » Extrait de l’entretien de Josiane Olff-Nathan, le 30 octobre 2009.
  • 44. Difficultés d’identification et défenses « Donc il fallait, tous les ans, il fallait que j’aille, non seulement il fallait que je renouvelle mon poste, parce que j’étais associé, j’étais belge, et on n’avait pas le droit, on avait pas de permanence, donc tous les ans je devais renouveler mon dossier. Et tous les ans, ils m’appelaient au conseil scientifique pour faire une défense du GERSULP. Et moi, je disais « voilà, on travaille sur la physique des hautes énergie, on travaille… » bon. C’était pas grand- chose, mais c’était, nerveusement toujours difficile. Alors heureusement que j’avais des protecteurs, des gens qui disaient « mais non, ils font du travail…», mais on n’était pas bien vu. » Extrait de l’entretien de Baudouin Jurdant, le 18 juin 2009.
  • 45. Cette précarité institutionnelle avait non seulement des conséquences sur les relations entretenues avec la présidence et les autres laboratoires de l’Université, mais également sur l’unité et les conditions de travail du groupe lui-même. D’une certaine manière, elle semble avoir contribué à la construction d’une identité collective de l’équipe tout en générant de fortes insatisfactions et des tensions entre certains des membres Difficultés d’identification et précarité institutionnelle
  • 46. Difficultés d’identification et défenses « Enfin (…) on avait toujours quand même le sentiment d'une menace qui planait, et on ne savait pas si on allait subsister l'année suivante. C'est vrai. Mais je n'arrive plus maintenant à le raccrocher à des choses précises. Qu'est-ce qu'on craignait ? Est-ce qu'on craignait qu'on ait plus d'argent ? Qu'on ferme le labo ? Que Baudouin n'ait pas son poste, ou que ? Je ne me souviens plus si c'est rattaché... à une crainte vraiment précise ou si c'était un sentiment un peu diffus comme ça. Mais c'est vrai qu'il était là quoi. Mais ce qui était aussi très stimulant d'un côté [rires] parce qu'on n’était pas installé dans une espèce de routine, ça pas du tout […] oui, tout le monde [dans l’équipe] avait ce sentiment : (…) qu'on faisait quelque chose de pionnier. Et qu’on était en danger. Qu'on n’avait pas d'assurance sur la continuité. Ça je crois que c'était un sentiment partagé par tout le monde. […] Je ne crois pas que quelqu’un ait pu penser, disons, faire carrière au GERSULP, quelque chose comme ça. La preuve, c’est qu’il y a eu énormément de mouvements(…). En fait je suis la seule, oui [rires] [à être restée]. » Extrait de l’entretien de Josiane Olff-Nathan, le 30 octobre 2009.
  • 47. « Et pour le Gersulp lui-même il faudrait distinguer entre les époques. Parce que la vocation initiale du Gersulp (…) n'était absolument pas de fabriquer une équipe de permanents. Le but initial de Guy Ourisson c'était qu'il y est bien sûr un directeur qui soit permanent, peut-être un ou deux chercheurs, mais que le reste de l'équipe ce soit des scientifiques pur et durs, qui séjournent dans le Gersulp pour une durée limitée. Et au début ça fonctionnait comme ça. J'ai le souvenir de plein de chimistes ou de physiciens qui sont passé par le Gersulp. Peu à peu ça n'a plus fonctionné comme ça. C'est-à-dire que c'est devenu… mais c'était nécessaire aussi, il fallait que l'équipe grandisse, il fallait qu'il y ait un nombre de permanent plus important que simplement une ou deux personnes. Et comme l'équipe à grandit, et bien les relations internes entre les membres de l'équipe ont pris le pas sur l'appel à des collaborations externes, donc c'est devenu moins un lieu de passage qu'au début, plus un lieu de permanents, plus un lieu de situations permanentes… » Bernard Ancori, entretien du 20 novembre2009 Du lieu de passage à l’équipe instituée
  • 48. En 1979, Baudouin Jurdant fait une demande officielle au CNRS afin d’accéder au statut de jeune équipe CNRS, dans la section 34 (sociologie). Cette demande aboutie en 1982 et marque pour l’équipe « un tournant dans la dynamique de recherche qui caractérise le GERSULP depuis sa création ». Le statut du GERSULP évolue de nouveau en 1989, lorsque le groupe s’intègre au CRTST (Centre de Recherches Transdisciplinaires sur les Sciences et les Techniques), composé de trois équipes de l’ULP. En 1991, il prend le statut URA (Unité de Recherche Associée) du CNRS au sein de l’IERST (Institut Européen de Recherche sur les Sciences et les Techniques). En janvier 1993, le GERSULP deviendra temporairement une composante de l’IRFEST (Institut de Recherches sur les Fondements et les Enjeux des Sciences et des Techniques), UMR ULP-CNRS C9949, dirigée par William Shea. Le GERSULP est associé en 2004/2005 aux deux équipes LESVS (Laboratoire d’Epistémologie des Sciences de la Vie et de la Santé) et EPM (Ethique et Pratiques Médicales) dans le cadre de l’Equipe d’Accueil IRIST (Institut de Recherches Interdisciplinaires sur les Sciences et la Technologie). Aujourd’hui devenu l'AHP PREST : les Archives Henri-Poincaré - Philosophie et Recherches sur les Sciences et les Technologies toujours l’interdisciplinarité au centre.
  • 49. « quel est le bénéfice qu’en a tiré l’institution, puisque au départ c’était bien ça : quelque chose pour réfléchir sur la pratique de la science, que ce soit en terme politique, scientifique, au niveau des parcours cognitifs en tant que chercheurs, l’interdisciplinarité, etcetera. Quel est le bénéfice dans la pratique, et qu’en a tiré la communauté scientifique ? Je ne sais pas. Et vraiment je ne le sais pas. (…) Et les grandes années Gersulp… elles se sont développées après mon départ. Donc après, quand les choses marchent bien, qu’on commence à être connu, qu’on commence à être courtisé, quand il y a des gens qui se pressent pour finir faire des thèses chez vous, etcetera, il y a toujours le risque, ce qui est inhérent à cette trajectoire, que cela se ferme, que cela se clôture, cela devient un domaine. Mais « cela se clôture » ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’interface [rires]. Ce n’est pas ce que je sous-entends, mais quelles interfaces ? Pour quels bénéfices ? Au bénéfice de qui, par rapport au projet originel ? Je ne sais pas. D’ailleurs faut-il que ce soit conforme au projet originel, je ne sais pas. Le projet originel peut avoir été un déclencheur pour une transformation vers quelque chose d’autre. » Liliane de Lassus, entretien 10 mai 2010