Intervention Michel Puech : "Zone A Défendre ou Territoire A Aménager ?", Rencontres Nationales de l'Ingénierie Publique, Climat et territoires: De l'intention à la réalisation, Toulouse, 11-12 juin 2015
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Toulouse, 11 juin 2015
ZAD ou territoire à aménager ?
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présentations
philosophie de la technologie, technoéthique
analyse des systèmes de valeur contemporains
→ questions de « soutenabilité » dans la
modernité
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questions
la planète est devenue une
« zone à défendre » ?
notamment à cause du problème climatique
ce qui tombe bien parce que le système de valeurs
des « zones à défendre » est en pleine puissance
mais est-ce une mission d'« aménagement du
territoire » et comment la remplir ?
ou est-ce une contestation de l'aménagement du
territoire (tel qu'il existe) et comment y répondre ?
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« zadiste », un mot, des valeurs
des problèmes de mots...
« zadiste » dans le dictionnaire en 2015
« aménagement du territoire » est-il aussi usité en
français ?
« climatosceptique » dans le dictionnaire en 2015
et pas son contraire, qui n'existe pas
« climato-croyant » ?
« climato-conscient » , « climato-concerné » ?
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« zadiste », un mot, des valeurs
...un problème de valeurs
pas un problème de notoriété, mais un problème de
valeurs :
une valorisation orientée
le zadiste « s'oppose à un projet d'aménagement qui
porterait préjudice à l'environnement »
= il est lucide et courageux, même si le dommage
environnemental reste au conditionnel
le climatosceptique « met en doute les théories les plus
répandues concernant le réchauffement climatique »
= il a un puissant esprit critique, comme celui qui
caractérise les grands génies scientifiques, d'abord
minoritaires
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« zadiste », un mot, des valeurs
un échec massif
1992 Rio ↔ 2009 Copenhague :
ce sont les choses qui commandent, pas les humains, et
encore moins leurs valeurs
nous avons échoué à prendre les commandes de la
planète
1) notre intelligence n'a pas été fabriquée par l’évolution
naturelle pour traiter des questions écologiques globales
comme celle du climat
2) notre intelligence collective n'a pas été capable de créer
les institutions pour traiter des questions écologiques
globales comme celle du climat
bilan : des valeurs collectives qui ne vont plus de soi
notamment les valeurs de base de l'ingénierie publique
le progrès, le développement, la prospérité économique, la légitimité
institutionnelle, l'efficacité des moyens, l'organisation centralisée de
l'action publique...
Jamieson Dale, Reason in a dark
time: why the struggle against
climate change failed -- and what
it means for our future, Oxford
University Press, 2014
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mon hypothèse
un paradoxe
il est devenu plus facile
de réaliser techniquement
de grands équipements
collectifs que de les
rendre sociétalement
acceptables
application à la question climatique :
la grande action collective nécessaire est engluée par
son manque d'acceptabilité sociétale
paradoxe
de
l'acceptabilité
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mon hypothèse
une défaillance : éthique
pas seulement l'échec factuel,
mais un échec « moral » (Jamieson 2014 + Gardiner 2011)
un constat d'humilité
vertu défaillante
+ une attitude de courage
vertu défaillante aussi
le savoir-faire défaillant n'est pas technique, il
est sociétal
dans ce sociétal, il n'est ni politique ni
communicationnel, il est éthique
= il porte sur la compréhension, l’acceptation et la
pratique de valeurs
Gardiner Stephen, A perfect moral
storm: the ethical tragedy of
climate change, Oxford University
Press, 2011
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la crise des biens communs
volet aménagement des espaces collectifs dans
le dossier ouvert dès les années 1960-1970
une « tragédie des biens communs »
à l’origine de l'alerte sur le
soutenable, il y a... un demi-siècle
un problème essentiellement technique et une solution
essentiellement politique, institutionnelle
aggravation : de la tragédie des biens communs
(Hardin 1968) à la tragédie morale du climat (Gardiner
2011, Jamieson 2014)
un problème qui n'est plus essentiellement technique
et une solution qui n'est plus essentiellement politique,
institutionnelle
Hardin Garrett, "The tragedy of
the commons", Science, 13
décembre 1968, vol. 162,
no 3859, p. 1243-1248
http://www.sciencemag.org/content/162
/3859/1243
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la dimension globale, nouvelle dimension éthique
notre équipement intellectuel (philosophique et
surtout éthique)
est dangereusement en retard sur le
développement scientifique et technologique
nous savons et nous savons-faire beaucoup mais nous
ne savons pas très bien ce que nous voulons vraiment ou
ce que nous devrions faire
la globalisation est un défi concernant nos valeurs, pas
nos structures institutionnelles (politiques ou
économiques)
les structures institutionnelles existantes sont même au contraire
des obstacles, notamment les Etats-nations
idem les pseudo-institutions internationales qu'ils contrôlent (et
paralysent) à 100%
Singer Peter, One world: the
ethics of globalization, Yale
University Press, 2002
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la dimension globale, nouvelle dimension éthique
reprendre les dossiers « globaux » dans un
esprit « Zone à Défendre »
lancer un Occupy the Earth
des Indignados
un We are the 99 %
de la soutenabilité
étudier et capter la logique des nouveaux mouvements
sociaux
ils sont dimensionnés pour le global
Castells Manuel, Networks of outrage
and hope: social movements in the
Internet age, Malden, MA, Polity, 2012
Rifkin Jeremy, The empathic civilization: the race to global
consciousness in a world in crisis, Cambridge, Polity Press,
2011 / Une nouvelle conscience pour un monde en crise vers
une civilisation de l’empathie, traduit par Françoise Chemla et
Paul Chemla, Arles, Actes Sud, 2012
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empowerment climatique
une défaillance éthique à l'origine du délitement
sociétal : la désappropriation
← logiques de gouvernement par la délégation
y compris la délégation du « vernaculaire » : la gestion de
l'oikos (éco-), son habitation, sa santé, l'éducation, etc.
Ivan ILLICH, années 1970
logiques de réappropriation
portées par le numérique : l'empowerment
numérique
désintermédiation et retrait de délégation
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empowerment climatique
application au climat :
une réappropriation « citoyenne » et
« participative » ?
c'est encore une tentative politique (= institutionnelle), la
dernière peut-être
plutôt : réappropriation non-institutionnelle
= post-politique
au niveau des systèmes de valeur, dans un rapport
d'authenticité personnelle
prendre la mesure du fait
que la question climatique
« change tout »
Klein Naomi, This changes everything:
capitalism vs. the climate, Simon &
Schuster, 2015 / Tout peut changer, Arles ;
Montréal, Actes Sud, 2015
un empowerment climatique,
intégré dans un empowerment écologique,
de même niveau que et utilisant les moyens
de l'empowerment numérique
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la reconquête en 3 points
1) prise de conscience
faire évoluer le référentiel de valeur « occidental »
de : efficacité, croissance, arrogance écologique (=
domination matérielle)
vers : des « vertus » comme l'humilité (Jamieson 2014)
et le sens de l’harmonie
besoin d'un travail constructif
des intellectuels et des
relais culturels
malheureusement ils sont en partie englués dans un
« logiciel sociologique/politique » des années 1970
→ cercle vicieux avec des institutions (privées –
entreprises – et publiques) qui ont elles aussi du mal à
sortir de l'ère industrielle
Hershock Peter D, Valuing diversity: Buddhist
reflection on realizing a more equitable global
future, Albany, State University of New York
Press, 2012
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la reconquête en 3 points
2) acceptabilité des valeurs
renoncer au confrontationnel idéologique, ne pas
chercher de victoire idéologique (= domination
idéologique)
le problème est « qu'est-ce qu'on fait ? »
et non pas « qui a raison ? », encore moins « qui est-ce
qui commande ? »
assumer le pluralisme et chercher des consensus
pragmatiques approchés
dé-politiser → vers des alternatives constructives
dans l'espace post-politique
= la phase post-indignation
du collaboratif (des émergences, horizontales) et
pas du « participatif » (vertical)
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la reconquête en 3 points
3) authenticité des actions
devenir sensible à la contre-productivité du
« bidon »
= greenwashing, climate-washing, virtue-washing
devenir sensible à la différence éthique qualitative entre
discours et action
et même entre prise de conscience et action effective
la grande majorité des fumeurs sait que fumer est très
dangereux pour la santé et « veut » arrêter mais ... juste ils ne le
font pas
des micro-actions, collaboratives, produisant des
effets d'émergence
bilan : une éthique pragmatique
depuis les micro-ZAD de sa vie quotidienne
jusqu'à la macro-ZAD qu'est notre planète
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plus
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documents :
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