2. Introduction
Répondre à une question faussement simple : qu’est
ce qu’une politique publique ?
Un terme du langage commun (acteurs politicoadministratifs,
journalistes, chercheurs, etc.)
Un terme large couvrant des réalités multiples : variation des
secteurs, politiques à différents niveaux de gouvernement,
problèmes publics globaux, etc.
Un lien évident et de plus en plus problématique avec l’Etat ?
Partir d’un exemple (la canicule de 2003), avant de
présenter quelques éléments de définition et
d’analyse
3. La canicule de 2003
Les faits :
Une vague de chaleur non anticipée…
… définie scientifiquement et administrativement
(températures > 20°C la nuit, 35 °C le jour ; variété des seuils)
Des problèmes multiples pour différentes
administrations concernées :
Les centrales nucléaires (problème réchauffement réacteurs et
limites usage de l’eau)
Les conditions de travail
Le nombre sans cesse croissant de décès: 14802 selon
l’INSERM (surmortalité par rapport aux années antérieures)
4. La canicule de 2003
L’Etat face à ces problèmes publics ou les aspects d’une
politique publique :
Une information partiellement disponible et inégalement
distribuée entre les acteurs publics (météo et santé)
Une coordination insuffisante des services
Des moyens inadaptés (Cf. aux urgences avec le manque de
personnels et de lits)
Des acteurs mobilisés
Le rôle des acteurs associatifs (syndicat d’urgentistes)
La médiatisation du problème
La politisation du problème
La recherche des causes et des responsabilités
5. Introduction
Soit une politique publique comme un ensemble
complexe d’enjeux sociaux, d’acteurs publics et
privés, ainsi que de dynamiques et procédures plus
ou moins formalisées
Les objectifs de l’analyse des politiques publiques :
Avoir une vue la plus complète possible des faits
Trouver des éléments d’explication (dimension
analytique)
Participer (éventuellement) aux débats ou aux processus
attachés à une politique précise (dimension pratique)
7. 1. Définir les politiques publiques
Une définition problématique : les politiques
varient dans le temps et dans l’espace
Une définition simple
« Tout ce qu’un gouvernement choisit de faire ou de ne
pas faire » (Dye, 1998)
Une définition… moins simple
« Un ensemble de décisions reliées entre elles, pris par
un acteur ou un groupe d’acteurs, avec pour
caractéristique fondamentale de définir les buts à
atteindre, ainsi que les moyens nécessaires pour remplir
les objectifs fixés » (Howlett, Ramesh, 1995)
8. 1. Définir les politiques publiques
Une politique publique comme « construit social »
(ce que les acteurs en disent…) et comme
« construit analytique » (les composantes d’une
politique)
Les composantes d’une politique publique (Mény,
Thoenig, 1989)
Des éléments de contenu matériels et immatériels
Un programme
Une orientation normative
Un facteur de coercition
Le ressort social
12. 3. L’agenda
La notion centrale d’agenda : l’ensemble des
problèmes qui, à un instant t, suscite l’attention
des pouvoirs publics
Métaphore de l’énigme : activation de l’action
publique est possibilité de résoudre des problèmes
et/ou des revendications
La notion de problème : « la perception par les
acteurs d’un écart entre ce qui est, ce qui devrait
être et ce qui pourrait être » (Padioleau, 1982)
13. 3. L’agenda
Trois aspects:
L’idée d’un constat sur une situation sociale (les
informations disponibles et diffusées). Elément
cognitif. Ex. : le taux de chômage
L’aspect prescriptif et normatif. Ex. : le travail
comme vecteur de lien social et valeur
dominante.
La dimension pratique. Moyens mobilisables ?
Compétences ?
15. 3. L’agenda
Pourquoi un problème estil public ?
Un nombre « significatif » d’acteurs
concernés (pas de seuil véritable)
La résolution du problème est imputée à
des acteurs publics
Un processus de construction et de
publicisation par étapes
16. 3. L’agenda
Dynamiques progressives de construction
(Flestiner, Abel, Sarat, 19801981)
Naming (identification et diagnostic des
problèmes)
Blaming (recherche des causes et imputation
de responsabilités)
Claiming (production de revendications et
mobilisations diverses)
17. 3. L’agenda
Quatre dynamiques d’émergence (Favre,
1992) :
L’émergence progressive par canaux multiples
(les SDF du Canal St Martin)
L’émergence instantanée (catastrophes
naturelles)
L’émergence automatique : dispositifs de veille et
problèmes cycliques (pollution)
L’émergence captée (l’affaire du « sang
contaminé »)
18. 3. L’agenda
Quatre dynamiques d’inscription
(Favre, 1992) :
L’inscription complète (la crise)
L’inscription factice (l’euthanasie)
La noninscription (la « saturation » de
l’agenda)
L’immergence (la réforme de la télévision
publique en 2008)
19. 4. La décision
Trois points essentiels :
La formulation des solutions
La légitimation politique des choix
effectués
La question centrale de la rationalité des
décisions publiques
20. 4. La décision
Une première phase de formulation ou de
sélection des alternatives
Un lien étroit avec la phase d’inscription sur
l’agenda (flexibilité dans l’usage des séquences)
Production des diagnostics et identification des
solutions jusqu’au choix préférentiel
Le travail des cabinets et/ou des agences
gouvernementales
21. 4. La décision
Une seconde phase de légitimation :
La phase politique et formelle de la
décision : gouverner, c’est assumer un
choix
Politisation et responsabilité (élément qui
nourrit et facilite les imputations causales
positives ou négatives)
Exemple : la procédure législative
22. 4. La décision
Un problème classique et central de rationalité de
la décision publique : produire des décisions
cohérentes, rationnelles et déterminées par le bien
public
Une question liée à la conception traditionnelle de
l’Etat (Durkheim, Weber) :
Durkheim et la conception organiciste de la société, où
l’Etat opère comme le cerveau du corps social
Max Weber et l’Etat moderne comme exemple de
rationalité garantie par l’appareil bureaucratique mis en
place
24. 4. La décision
La rationalité limitée (Herbert Simon)
L’information est rare, coûteuse et
inégalement distribuée
Caractéristiques de la rationalité humaine :
Impossibilité d’anticiper conséquences ;
Discontinuités (mémoire sélective, décisions parallèles)
Contraintes institutionnelles/organisationnelles, poids
des habitudes
Les acteurs sont raisonnables et non rationnels ;
ils s’arrêtent à l’alternativepivot
25. 4. La décision
L’incrémentalisme de Lindblom
Le caractère collectif de la décision
L’incrémentalisme ou l’évolution de l’action
publique à la marge (« muddling through »)
Deux exemples :
Une étude classique sur le processus budgétaire
(Wildavsky)
Les réformes des systèmes de retraites
27. 4. La décision
Une illustration : Challenger (Morel, 2004)
Thèse du calculateur amoral : nonrespect des
procédures et détournement de l’objectif
Thèse de la normalisation de la déviance : des
petits écarts successifs à l’égard des procédures
habituelles
L’explication proposée :
Une erreur cognitive : attention focalisée sur les
moyennes de température (vague de froid improbable)
Une appréciation différenciée des risques (conflit
organisationnel entre managers et ingénieurs)
28. Conclusion
Une politique publique…
… est un ensemble complexe et évolutif d’acteurs
publics et privés, d’institutions, d’organisations,
de normes, de problèmes sociaux, de demandes
plus ou moins diffuses, d’orientations
idéologiques, etc.
… est un processus variable organisé autour de
séquences, qui en constituent la grammaire
minimale (de l’agenda à l’évaluation, en passant
par la décision et la mise en œuvre)