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DEVELOPPER L’ENGAGEMENT DANS LES
ORGANISATIONS MODERNES
MEMOIRE
par
Julien Foulquier
https://fr.linkedin.com/in/julienfoulquier
Décembre 2016
SOMMAIRE
1 INTRODUCTION 3
1.1 Préface 3
1.2 Contexte du livre blanc et objectifs 3
1.3 Copyright 4
2 L’ENGAGEMENT 5
2.1 Cela ne se limite pas à la motivation, à l’implication ou à la satisfaction 5
2.2 L’engagement, c’est… 6
2.3 Une prise de conscience émergeante 7
2.4 Les avantages attendus du développement de l’engagement 8
3 COMMENT DEVELOPPER L’ENGAGEMENT 12
3.1 Quelques fausses idées 12
3.1.1 Sur la rémunération 12
3.1.2 Sur la carotte et le bâton 16
3.2 Créer les conditions préalables pour obtenir la satisfaction 16
3.2.1 Environnement de travail 16
3.2.2 Sécurité et perspectives 17
3.2.3 La rémunération 17
3.3 La satisfaction, un objectif intermédiaire 17
3.3.1 Les différences fondamentales entre la satisfaction et l’engagement 18
3.3.2 Le piège de la satisfaction comme objectif en soi 18
3.4 L’employé doit disposer de ressources personnelles adéquates 19
3.5 Développer l’engagement 20
3.5.1 Donner du sens à leur action 20
3.5.2 Avoir de l’impact 22
3.5.3 Permettre l’autonomie : les 4 « T » 24
3.5.4 Encourager le développement personnel 27
3.5.5 Se sentir connecté 29
3.5.6 Développer la confiance 32
3.6 Synthèse du modèle de l’engagement 35
3.7 Analyse systémique du développement de l’engagement 36
4 LA GENERATION Y OU « MILLENNIALS » 38
4.1.1 Une définition encore floue 38
4.1.2 Les spécificités réelles de la génération Y 40
5 CONCLUSION 49
6 BIBLIOGRAPHIE 50
7 TABLE DES FIGURES ET TABLEAUX 56
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 3
1 INTRODUCTION
1.1 PREFACE
En besoin croissant de talents, confrontées à une concurrence mondiale, les organisations sont
aujourd’hui confrontées à la problématique du recrutement, de la fidélisation des talents et de
leur engagement dans ses équipes. Véritable clé de voute de la réussite des organisations
modernes, l’engagement est aujourd’hui recherché comme le St Graal de beaucoup
d’organisations. Certaines y mettent des moyens considérables, avec des résultats parfois
mitigés. D’autres le considèrent comme une chimère, l’engagement étant à leurs yeux
uniquement du fait du collaborateur et non de l’organisation. Mais qu’est-ce que réellement cet
engagement ? Comment le développer réellement ? Qu’en disent les dernières avancées des
sciences sociales ? L’arrivée de la nouvelle génération dite « Y » chamboule-t-il la donne ? Et
qu’en attendre ? Ce livre blanc tente de répondre à toutes ces interrogations, en concluant par
une analyse systémique complète permettant d’appréhender l’implication de l’ensemble des
leviers.
1.2 CONTEXTE DU LIVRE BLANC ET OBJECTIFS
Dans le cadre du Cycle Supérieur de Management de l’EDHEC (équivalent Master II) que j’ai
pu suivre en parallèle de mon travail 2015, il m’a été donné l’opportunité de réaliser un mémoire
sur ce sujet. Le livre blanc est le résultat de mes recherches et de mes convictions, qui guident
aujourd’hui mon style managérial et ma communication. J’ai également eu la grande chance de
pouvoir m’immiscer au sein de l’entreprise CrossKnowledge - que je remercie encore - basée
à Sophia-Antipolis, afin de transformer les travaux de mes recherches en plan d’action « sur le
terrain ». Ce livre blanc n’intègre pas le résultat de mes travaux sur le terrain, qui resteront
confidentiels.
Ce livre blanc a pour objectif de faire un état complet et structuré des connaissances actuelles
et réelles sur le développement de l’engagement. Il se destine :
 Aux professionnels de tous les secteurs d’activité.
 A toutes les organisations, principalement celles confrontées à une forte concurrence.
 A tous ceux qui cherchent à comprendre le fonctionnement des acteurs au sein de leur
organisation.
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 4
1.3 COPYRIGHT
Tous les éléments présentés dans ce livre blanc peuvent être reproduits, sur demande, dès lors
qu’ils indiquent la source et proposent un lien vers le document d’origine.
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 5
2 L’ENGAGEMENT
Demandez à 10 personnes ce qu’est l’engagement des salariés, vous obtiendrez 10 réponses
différentes. D’autant plus qu’il existe dans le dictionnaire beaucoup de mots proches, pour ne
pas dire synonymes aux yeux des managers : implication, motivation, esprit d’initiatives ou
encore satisfaction des employés. Il est donc important de définir exactement ce qu’est
l’engagement, de comprendre les éventuelles différences avec les autres termes, avant d’aller
plus loin dans nos réflexions.
2.1 CELA NE SE LIMITE PAS A LA MOTIVATION, A L’IMPLICATION OU A LA
SATISFACTION
Commençons par les mots proches. La motivation, de la famille étymologique « mouvoir »,
est une « action des forces (conscientes ou inconscientes) qui déterminent le comportement
(sans aucune considération morale)1
». La motivation peut aider l’engagement à prospérer,
mais elle n’en est qu’une partie et ne suffit pas à elle seule.
L’implication quant à elle est très proche de l’engagement, si bien que les deux termes sont
souvent confondus ou considérés de manière homonymique. S. Baggio et P.E. Sutter2
nous
éclairent toutefois sur la différence : selon eux, dans ce contexte managérial, l’engagement
sous-entend une idée de contrepartie : quand on s’engage, on attend quelque chose en retour.
Tandis que l’implication semble dépourvue de conditionnalité et est motivée par le souhait
intrinsèque de l’employé. Une distinction confirmée par les travaux de de Macey, W.H. &
Schneider B3
.
Nous éviterons également un amalgame très répandu, celui de mélanger l’engagement des
salariés avec leur niveau de satisfaction. Comme nous le rappellent Tracy Maylett et Paul
Warner4
, la satisfaction est nécessaire au développement de l’engagement, mais elle ne
1
Le Petit Robert 2014
2
S. BAGGIO ET P.E. SUTTER (2008), Neuf salariés sur dix impliqués par leur travail – Etude sur 3000 salariés
français
3
MACEY, W.H., & SCHNEIDER, B. (2008), The meaning of employee engagement. Industrial and Organizational
Psychology
4
TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 6
l’entraine pas, et il est très possible d’obtenir leur satisfaction sans leur engagement, à coups de
dépenses de confort par exemple. Une différenciation confirmée par d’autres recherches5
.
2.2 L’ENGAGEMENT, C’EST…
Selon Wikipedia
La version anglaise de Wikipedia définit ainsi l’engagement6
: « L’engagement est une
propriété de la relation entre une organisation et ses employés. Un employé engagé est
totalement absorbé et enthousiasmé par son travail et prend des initiatives afin
d’améliorer la réputation de l’organisation et ses intérêts. ».
Selon Gallup
La définition de Gallup est dans le même esprit : « Un haut niveau de connexion
émotionnel qu’un employé ressent pour son organisation, qui le pousse à produire un
effort discrétionnaire supplémentaire ».
Selon Tracy Malylett et Paul Warner7
de DecisionWise
« L’engagement est un état émotionnel dans lequel nous nous trouvons passionné,
énergique, et impliqué dans notre travail. Nous investissons le meilleur de nous-mêmes –
notre cœur, notre esprit, notre intellect et nos mains – dans le travail que nous
réalisons. ».
Selon Wilmar B. Schaufeli
Dans son modèle sur l’engagement au travail, Wilmar B. Schaufeli8
définit l’engagement
comme un état d’esprit positif, accompli et dédié au travail caractérisé par la vigueur, le
dévouement et l’absorption. Dans ce modèle, la vigueur est caractérisée par l’énergie et
la résilience ; le dévouement par l’implication dans son travail, son sens, l’enthousiasme
et le challenge ; tandis que l’absorption n’est autre que de la forte concentration, de celle
qui fait passer le temps rapidement. En résumé, les employés engagés déborderaient
d’énergie et d’enthousiasme.
5
MACEY, W.H., & SCHNEIDER, B. (2008), The meaning of employee engagement. Industrial and Organizational
Psychology
6
https://en.wikipedia.org/wiki/Employee_engagement, consulté le 12/08/2015
7
TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement
8
WILMAR B. SCHAUFELI (2002)
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 7
En synthèse…
De ces définitions, nous pouvons retenir l’état émotionnel qui habite le salarié engagé, et en
conséquence duquel il déploie les fameux efforts discrétionnaires recherchés par les
organisations en vue d’atteindre des performances supérieures aux autres.
2.3 UNE PRISE DE CONSCIENCE EMERGEANTE
Au-delà de la simple définition de ce qu’est l’engagement, il nous a semblé important de
démontrer que l’intérêt porté à l’engagement des collaborateurs est relativement nouveau. Si
l’on se réfère à l’évolution de l’intérêt de la recherche pour « Employee Engagement » sur
Google, nous pouvons voir que la progression est soutenue depuis 2005. Nous pouvons
supposer que les organisations tentent à présent de s’approprier cette problématique.
Figure 1 Evolution de l'intérêt de la recherche "Employee Engagement" par Google Trends
Cet indice, basé sur la recherche des mots clés « Employee Engagement » ou tout autre
expression ou suite de mots jugée similaire par Google, est en progression constante depuis
2007, et a augmenté de près de 30% entre 2012 et 2015 (562 de janvier 2012 à août 2012 contre
728 sur les mêmes mois de 2015), et encore de 8% entre 2014 et 2015. Nous pouvons noter que
dans le même temps, les expressions « Employee Satisfaction » ou « Employee Motivation »
ont décru dans les mêmes proportions que la progression de « Employee Engagement ».
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 8
2.4 LES AVANTAGES ATTENDUS DU DEVELOPPEMENT DE L’ENGAGEMENT
Afin de vérifier que l’engagement réponde à la problématique posée, faisons le tour des études
sérieuses sur le sujet ayant eu pour objectif de corréler les objectifs visés avec le développement
de l’engagement.
Un meilleur recrutement par les pairs
Répondant ainsi directement à l’une des problématiques immédiates des organisations, une
enquête d’IPSOS de 20069
confirme que 67% des salariés engagés recommanderaient à un
proche d’y travailler.
En plus de diminuer les coûts de recrutement, d’accélérer les processus et d’attirer les talents,
soulignons également l’impact positif sur l’image de l’entreprise, qu’il s’agisse de l’image
renvoyée au public comme de l’image de la marque recruteur plus spécifiquement.
Moins de turnover et moins d’absentéisme
De la même manière que le recrutement, le départ d’un collaborateur coûte également cher aux
organisations. Perte de savoir-faire et de connaissance, pour lesquels l’organisation a investi du
temps et qui va profiter à une autre organisation, sans compter le coût du remplacement, de la
formation et de l’intégration d’un remplaçant. Les organisations ont donc tout intérêt à fidéliser
leurs talents le plus longtemps possible.
Dans cette optique, une étude de 200410
a ainsi confirmé que les salariés engagés sont 87%
moins susceptibles de quitter leur organisation. Mais qui dit moins susceptibles, ne dit pas
forcément démissions effectives mais seulement une absence de volonté de quitter
l’organisation au moment où la question est posée au collaborateur. Nous pouvons également
citer une enquête de Towers Perrin11
qui conclut par exemple que 66% des employés engagés
n’ont aucune intention de quitter leur employeur, contre 12% des non engagés.
Il faut toutefois comparer ce qui est comparable. En rentrant dans le détail, Gallup indique12
que dans les secteurs structurellement à fort turnover, les 25% d’organisations obtenant les
meilleurs résultats connaissent un turnover de 27% moins important que les 25%
9
IPSOS MORI (2006), Improvement and Development Agency, Lessons in Leadership
10
CORPORATE LEADERSHIP COUNCIL & CORPORATE EXECUTIVE BOARD (2004), Driving Performance through
Employee Engagement : a quantitative analysis of effective engagement strategies
11
TOWERS PERRIN, 2004 European Talent Survey: Reconnecting with Employees: Attracting, Retaining, and
Engaging.
12
http://www.gallup.com/services/169328/q12-employee-engagement.aspx, le 26/09/2015
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 9
d’organisations obtenant les plus mauvais résultats. Un bénéfice qui monte à 67% dans les
secteurs connaissant structurellement un turnover moins important.
Secteurs à turnover structurellement importants
Les plus mauvais résultats Gallup Q12 Les meilleurs résultats
25% 25% 25% 25%
De la même manière, le quart des organisations obtenant les meilleurs résultats au test Q12 de
Gallup connaissent ainsi 37% moins d’absentéisme.
Une analyse confirmée par une étude13
soulignant l’importante corrélation entre le turnover et
l’engagement des salariés.
Moins de présentéisme
Problème de beaucoup d’organisations modernes, le présentéisme désigne le fait d’être
physiquement présent sur son lieu de travail, mais sans y travailler. Difficile à identifier et plus
encore à mesurer, ce gaspillage a été évalué par une enquête de salary.com et AOL14
qui ont
évalué que les salariés gaspillaient ainsi 2 heures par jour en moyenne de travail, soit un coût
annuel estimé à plus de 750 milliards de dollars aux Etats-Unis.
Une meilleure qualité
Sur son site Internet15
, Gallup annonce que les entreprises engagées (meilleur quart) connaissent
41% de moins de défauts de qualité que les entreprises dont les salariés sont peu engagés
(dernier quart).
De meilleurs résultats financiers
13
TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement
14
SALARY.COM ET AOL (2008) (Source Business Digest n° 196 – mai 2009)
15
http://www.gallup.com/services/169328/q12-employee-engagement.aspx, le 26/09/2015
27% de turnover en moins dans
les 25% d’entreprises obtenant les
meilleurs résultats
Figure 2 Gain de turnover sur les secteurs à
turnover structurellement importants
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 10
L’amélioration des résultats de l’entreprise, c’est bien l’objectif final recherché. Des études
confirment ce que nous pouvions présupposer à la lecture de tous ces bénéfices. Par exemple,
des chercheurs anglais ont démontré que des entreprises avec un plus faible engagement des
salariés gagnent 32,7% de moins que celles avec un meilleur engagement des salariés, et
croissent 19,2% plus lentement16
.
Une autre étude17
datant de 2006 a tenté directement de corréler l’engagement des salariés avec
les résultats financiers de leurs employeurs, se basant en l’occurrence sur leur résultat
d’exploitation. Selon les résultats de cette étude, le premier groupe d’entreprises, constitué
d’entreprises dont les salariés sont engagés, a constaté une hausse de 19,2% du résultat
d'exploitation. Le deuxième groupe, quant à lui, n'a pu que déplorer une baisse de 37,7 %.
Synthèse des bénéfices de l’engagement
Nous pouvons nous rendre compte ici que l’engagement des salariés peut apporter beaucoup
aux organisations. Bien que les bases de comparaison et les méthodologies utilisées pour obtenir
ces données soient hétérogènes, nous proposons ci-après une synthèse des avantages
documentés.
Figure 3 Gain espéré entre des organisations composées de collaborateurs engagés comparé aux moins engagés
* : nombre de défauts constatés dans les chaines de fabrication
16
D. MACLEOD ET N. CLARKE (2009), Engaging for Success: Enhancing Performance Through Employee
Engagement: A Report to Government
17
TOWERS PERRIN (2006)
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
Recrutement par
les pairs
Turnover Absentéisme Qualité (nb
défauts*)
Bénéfices
entreprise
Croissance
entreprise
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 11
La question centrale posée est donc celle de l’engagement des équipes. Comment le
développer ?
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 12
3 COMMENT DEVELOPPER L’ENGAGEMENT
3.1 QUELQUES FAUSSES IDEES
Avant d’aller plus en détail sur le développement de l’engagement, il est important de faire le
point sur de fausses idées, pourtant très ancrées dans l’esprit des managers d’aujourd’hui. Des
idées qu’il nous faut battre en brèche afin de poursuivre la réflexion.
3.1.1 SUR LA REMUNERATION
De nombreuses études se sont penchées sur la question de l’impact de la rémunération sur
l’engagement des salariés. Leurs résultats démontrent l’impact très limité de l’évolution de la
rémunération sur l’engagement. Nous le savons depuis longtemps : des premières
expérimentations sur des animaux et la nourriture ont été publiées en 194918
pour valider cette
hypothèse. Une théorie confirmée par d’autres études depuis19
, sur des humains cette fois. La
motivation par le monétaire peut dans certains cas avoir un effet très court terme, qui s’estompe
rapidement et n’a aucun impact sur le plus long terme.
La rémunération peut entrainer une baisse de la motivation intrinsèque
Voyons ensemble une parfaite illustration. Si vous pouviez retourner dans les années 1990, et
que vous auriez eu à deviner laquelle de ces approches permettrait d’imposer une encyclopédie :
18
HARLOW (1949)
19
EDWARD DECI (1969)
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 13
Figure 4 Encyclopédie : modèle rémunéré contre modèle libre
Depuis, Microsoft Encarta est tombé dans l’oubli, tandis que Wikipedia réunirait sans problème
des contributeurs, qui y passent parfois plusieurs dizaines d’heures par semaine, sans
compensation financière, juste pour la beauté du geste et la motivation du résultat au bénéfice
de la société ? Et l’exemple n’est pas isolé, le monde de l’Open Source étant là pour nous donner
quantité d’autres exemples : Mozilla Firefox, Linux, standards Internet… Leur motivation ?
Interrogés à ce sujet, ces contributeurs mettent en avant le challenge de résoudre une
problématique et la volonté de faire un cadeau à la communauté20
.
Autre exemple saisissant : dans une étude21
, des enfants que l’on récompense pour faire des
dessins passent non seulement moins de temps à faire des dessins que les enfants qui ne
bénéficient d’aucune récompense ; mais deux semaines après, le groupe d’enfants ayant eu des
récompenses démontrent toujours un intérêt significativement moins important pour le dessin
que le groupe qui n’en a pas reçu.
Depuis, de nombreuses expériences similaires chez des adultes ont démontré des résultats
similaires, notamment une grande méta-analyse de 199922
. Des résultats tellement significatifs
que l’on peut raisonnablement en conclure, comme l’ont fait les auteurs de cette méta-analyse,
que « l’étude approfondie des effets des récompenses dans 128 expérimentations amènent à la
20
J. FELLER, B. FITZGERALD, S. HISSAM, ET K. R. LAKHANI (2005), Why Hackers Do What They Do:
Understanding Motivation and Effort in Free/Open Source Software Projects
21
MARK LEPPER, DAVID GREENE ET ROBERT NISBETT (1973), Undermining Children’s Intrinsic
Interest with Extrinsic Rewards: A Test of the ‘Overjustification’ Hypothesis,” Journal of
Personality and Social Psychology 28, no. 1 : 129-37
22
EDWARD DECI ET DEUX DE SES COLLEGUES (1999), dans une méta-analyse de 128 expérimentations
Grande
entreprise
profitable
Ecrit par
experts
reconnus
Chefs de
projet
Microsoft
Encarta
Supervisé
par tout le
monde /
personne
Ecrit par
Inconnus
Aucun chef
de projet
Wikipedia
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 14
conclusion que des récompenses tangibles ont tendance à avoir un effet significativement
négatif sur la motivation intrinsèque ».
La rémunération peut entrainer une baisse des performances
Mais l’impact négatif des récompenses monétaires ne s’arrête pas là. Nous pourrions également
citer cette étude en Inde23
où le groupe le plus généreusement rémunéré est celui qui a obtenu
les moins bonnes performances.
La Federal Reserve américaine elle-même a confirmé le constat, en déclarant, à l’issue de ses
expérimentations, que « dans huit des neuf tâches que nous avons examinées lors de trois
expérimentations, de plus grosses récompenses ont mené à de plus mauvaises
performances »24
.
La rémunération peut entrainer une baisse de la créativité
De la même manière, des études ont démontré l’impact négatif de la motivation extrinsèque
que représente la récompense en matière de créativité. L’exemple de la célèbre étude dite « de
la bougie »25
dans laquelle un individu doit trouver une solution pour fixer une bougie sur un
mur en utilisant le matériel fourni, a démontré que les participants ne bénéficiant pas de
récompense faisaient preuve de plus de créativité pour résoudre le problème.
La rémunération peut entrainer une addiction
Rémunérer spécifiquement un employé pour une tâche donnée, c’est également le meilleur
moyen pour s’assurer que ledit employé n’exécute plus jamais cette même tâche sans
contrepartie, nous enseigne Daniel Pink26
. Et cette même prime d’être réclamée, ou tout du
moins attendue, la prochaine fois que l’employé l’exécutera. Le versement de cette prime ne
sera alors plus vécu comme un bonus, mais comme un dû, un statu quo. Là encore, de
nombreuses enquêtes sont venues illustrer ce phénomène27
. Mais cela va plus loin, des études
23
DAN ARIELY, URI GNEEZY, GEORGE LOEWENSTEIN, NINA MAZAR (2005), Large Stakes and Big Mistakes
24
FEDERAL RESERVE BANK OF BOSTON (2005), Working Paper No. 05-11, 23/07/2005, dont un résumé peut être
trouvé dans “What’s the Value of a Big Bonus?” New York Times 20/11/2008.
25
GLUCKSBERG SAM (1962), Journal of Experimental Psychology, The influence of strength of drive on functional
fixedness and perceptual recognition, Vol 63(1), Jan 1962, 36-41
26
DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us
27
ANTON SUVOROV, Addiction to Rewards, présentation lors de l’European
Winter Meeting of the Econometric Society le 25 octobre 2003. Mimeo (2003) disponible à l’adresse
http://www.cemfi.es/research/conferences/ewm/Anton/addict_new6.pdf.
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 15
ayant montré la forte proximité entre l’addiction à une drogue, et l’addiction aux récompenses
financières : du fonctionnement du cerveau au relâchement de dopamine28
. Troublant !
La rémunération peut entrainer une déviance des comportements
Dans le même phénomène de contractualisation des tâches, Daniel Pink29
nous fait également
prendre conscience qu’une bonne action, comme le don du sang, est significativement réduite
lorsqu’on introduit une récompense financière : 52% d’un groupe a accepté de donner son sang
sans contrepartie, alors qu’ils n’étaient plus que 30% après la mise en place d’une rémunération
pour les donneurs.
Dans le même esprit, une étude israélienne30
a démontré que l’introduction de sanction
financière en cas de retard pour venir chercher son enfant à l’école n’entrainait aucune
amélioration de la situation, et avait même eu tendance à l’aggraver. Seul l’attachement des
parents au professeur a pu dans ce cas réduire significativement les retards.
La rémunération peut entrainer un court-termisme
Les entreprises poursuivant des objectifs financiers à court-terme, généralement le trimestre,
sont également les entreprises qui obtiennent les moins bonnes performances à plus long terme.
Enseignements sur la rémunération
Les enseignements concernant l’impact de la rémunération et plus spécifiquement sur la
récompense financière (ex prime) sur l’engagement sont multiples. Si cette technique peut
fonctionner avec des tâches dites algorithmiques, de type « Si […] Donc il faut […] » qui ont
bercé les générations précédentes (taylorisme), elles deviennent souvent contreproductives
lorsqu’il s’agit d’encourager du travail plus intellectuel et heuristique.
Nous comprenons maintenant que la financiarisation d’un certain nombre de tâches les
transforment en travail et, au-delà de cela, en relation contractuelle, ce qui va à l’encontre de la
recherche de l’engagement. Nous comprenons également que l’enjeu représenté par une
récompense – financière à fortiori –, réduit le périmètre de réflexion des individus en détournant
leur concentration sur cette récompense.
28
BRIAN KNUTSON (2001), Behavioral Addictions : Do They Exist ?
29
DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth about What Motivates Us
30
URI GNEEZY ET ALDO RUSTICHINI (2000), A Fine Is a Price, publié dans le Journal of Legal Studies 29
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 16
3.1.2 SUR LA CAROTTE ET LE BATON
Encore prégnante dans les pratiques du management d’aujourd’hui, la théorie de la carotte et
du bâton a eu ses heures de gloire. Et pour cause : cela a bien fonctionné pendant des décennies.
Illustration de cette pensée, le Taylorisme veut que des procédures très précises soient
communiquées aux salariés, qu’ils soient récompensés s’ils les exécutent parfaitement et dans
les conditions voulues, et qu’ils soient punis lorsque ce n’est pas le cas, le tout sous une
surveillance rapprochée. Une approche basique, tellement simple qu’elle a l’avantage d’être
comprise par tout le monde. Hors, nous savons aujourd’hui que si cette tâche fonctionne avec
des tâches algorithmiques, elles ne fonctionnent plus avec des tâches heuristiques, qui
demandent plus de créativité, de travail intellectuel et d’autonomie. C’est pourtant dans cette
direction que la société tend, les tâches algorithmiques ayant tendance à être automatisées,
tandis que l’univers des services, parfait représentant des tâches heuristiques, est devenu
prépondérant.
3.2 CREER LES CONDITIONS PREALABLES POUR OBTENIR LA SATISFACTION
Avant de parler de développement de l’engagement, différentes études que nous allons
développer nous apprennent que nous devons tout d’abord acquérir la satisfaction préalable de
l’employé. Purement transactionnelle, la satisfaction peut être achetée grâce à un
environnement de travail approprié, de la sécurité (mentale et physique), des perspectives, et
par une rémunération suffisante. A la condition, bien entendu, que l’état d’esprit de l’employé
soit propice.
3.2.1 ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL
Des études récentes nous éclairent sur l’importance grandissante que les employés accordent à
leur environnement de travail. Par exemple, l’étude 2015 de Paris Work Place 201531
nous
apporte de nombreux éclairages. Citons notamment :
 88% des cadres interrogés jugent que leur bureau influe sur leur bien-être personnel.
 80% d’entre eux sur leur motivation.
 75% d’entre eux sur leur efficacité.
31
PARIS WORK PLACE 2015 (2015), Les cadres franciliens jugent leurs bureaux
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 17
 80% estiment que leurs bureaux ont un impact sur l’image et la réputation de
l’entreprise.
 74% sur la fierté des salariés.
 73% sur le recrutement de nouveaux talents.
 72% sur la fidélisation des salariés.
3.2.2 SECURITE ET PERSPECTIVES
Libérer l’esprit du collaborateur : pour cela, il ne faut pas que le collaborateur se demande de
quoi son lendemain sera fait au sein de l’organisation. S’il ne peut s’imaginer pouvoir rester
longtemps dans l’organisation, l’engagement ne pourra pas être développé32
. De la même
manière, il doit pouvoir se projeter des perspectives d’évolution. Bref, les collaborateurs
doivent pouvoir être émotionnellement sécurisés.
3.2.3 LA REMUNERATION
Le troisième pilier des facteurs d’hygiène est la rémunération. Les organisations doivent offrir
des niveaux de rémunération compétitifs par rapport au marché, afin que le niveau de
rémunération ne devienne pas un facteur d’insatisfaction.
3.3 LA SATISFACTION, UN OBJECTIF INTERMEDIAIRE
Les recherches sur l’engagement font consensus : avant même de parler d’un éventuel
développement de l’engagement, certaines conditions doivent obligatoirement être remplies.
Sans elles, toute tentative de développement de l’engagement se ferait en pure perte. Nous
pouvons aisément faire le parallèle avec le restaurant. Si les couverts ne sont pas propres, votre
expérience sera négative, et ce peu importe si le plat servi est bon ou non. A l’inverse, si les
couverts sont propres, cela n’aura aucune incidence sur votre éventuelle expérience positive.
La propreté des couverts est tout simplement une condition obligatoire mais insuffisante. Nous
pouvons faire le parallèle avec l’engagement. Afin de développer l’engagement des salariés,
ceux-ci doivent avant tout être satisfaits. A contrario de l’engagement, la satisfaction est quant
à elle complètement transactionnelle et contractuelle. Elle peut s’acheter !
32
DAVID AUTISSIER ET FREDERIC WACHEUX (2006), Manager par le sens
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 18
3.3.1 LES DIFFERENCES FONDAMENTALES ENTRE LA SATISFACTION ET L’ENGAGEMENT
Pour nous aider à mieux comprendre cette distinction, les auteurs de MAGIC: Five Keys to
Unlock the Power of Employee Engagement33
nous dressent une liste des différences
fondamentales :
 La satisfaction est transactionnelle ; l’engagement est transformationnel.
 L’organisation a le pouvoir sur la satisfaction ; l’employé et l’organisation partagent
une responsabilité 50-50 dans l’engagement. La satisfaction est en ce sens imposée
(payée) par l’organisation, tandis que les employés doivent choisir de s’engager.
 La satisfaction et la motivation impliquent seulement des sentiments ; l’engagement
implique sentiments et action.
 La satisfaction permet d’atteindre le bonheur à court terme ; l’engagement est un
sentiment à long terme de but, vision, de sentiment d’appartenance, d’accomplissement
personnel et collectif.
 La satisfaction intervient lorsque les facteurs dits d’hygiène sont remplis ; l’engagement
lorsque les employés ont la capacité, les raisons de le faire, la liberté de le faire, et savent
comment s’engager.
 La satisfaction implique des facteurs d’hygiène, qui ne motivent pas les employés mais,
lorsqu’ils sont supprimés, les démotivent ; l’engagement est affaire de cœur, de
« tripes », d’esprit.
 La relation employeur-employé basée sur la satisfaction est une relation contractuelle
dans laquelle chaque partie fait le minimum pour remplir sa partie du contrat ;
l’engagement contribue à ce que les employés effectuent les fameux efforts
discrétionnaires de bon cœur.
 La satisfaction est coûteuse : augmentations de salaires, primes, aménagements de
bureau ; l’engagement demande de l’effort.
 La satisfaction est une question de survie ; l’engagement est question de prospérité.
3.3.2 LE PIEGE DE LA SATISFACTION COMME OBJECTIF EN SOI
A ce petit jeu, de nombreuses organisations tombent dans le piège et confondent engagement
et satisfaction. En investissant des sommes considérables pour obtenir la satisfaction de leurs
employés, comme par exemple l’installation de complexes sportifs ou de détente, les entreprises
33
TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 19
pensent développer leur engagement et tombent de leurs nuages quelques années après en ne
constatant pas d’amélioration. C’est donc un enseignement important : la satisfaction fait bien
partie des éléments indispensables à un futur développement de l’engagement, mais est
totalement insuffisante pour le développer.
3.4 L’EMPLOYE DOIT DISPOSER DE RESSOURCES PERSONNELLES ADEQUATES
Avant toute chose, nous l’avons évoqué, l’employé « à engager » doit se trouver prêt à l’être,
ou prédisposé. Il s’agit d’une condition sine qua non contre laquelle l’organisation ne peut rien.
Pour cela, l’employé doit posséder des ressources personnelles propres :
Figure 5 Les ressources personnelles nécessaires pour que l'individu soit engageable
Ces trois qualités peuvent se résumer par un capital psychologique positif minimum et ont été
démontrées comme étant significativement corrélées avec l’engagement au travail34
. Une
corrélation confirmée par une étude de 200735
. Par exemple, le sentiment de réaliser un travail
de qualité permet à l’engagé de générer ses propres feedbacks positifs, de l’appréciation, de la
reconnaissance et, in fine, du succès.
De ces traits, nous pouvons assumer que les employés les plus « facilement engageables »,
développent également cet engagement, cet optimisme et cette générosité à l’effort en dehors
34
BAKKER, A.B., & LEITER, M.P (2010), Work engagement: A handbook of essential theory and research
35
XANTHOPOULOU, D., BAKKER, A.B., DEMEROUTI, E., &SCHAUFELI, W.B. (2007), The role of personal resources
in the job demands-resources model
Sentiment
d'efficacité,
estime de
soi
Optimisme,
espoir
Résilience
Prêt pour
l'engagement
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 20
du travail, comme par exemple au sein d’une association. Une hypothèse que tendent à
confirmer des interviews menées sur des personnes ayant réalisé le test d’engagement UWES
(Utrecht Work Engagement Scale). D’autres études indiquent également que les personnes
ayant des attitudes positives prennent de meilleures décisions36
, qu’elles sont plus motivées
pour atteindre leurs objectifs de carrière37
, sont plus préoccupées par le développement
personnel de leurs pairs, résolvent plus efficacement les problèmes38
, sont plus enclines à
obtenir de bons résultats dans leurs organisations39
. Rien que ça ! Et nous aurions pu continuer
la liste.
3.5 DEVELOPPER L’ENGAGEMENT
Une fois les conditions nécessaires au développement de l’engagement réunies, nous pouvons
étudier les leviers de son développement. Par chance, la littérature scientifique est plutôt fournie
et globalement convergente. Pour développer l’engagement, il faut donc actionner des leviers
de plus haut niveau, que nous pourrions communément appeler les ressources professionnelles.
L’ensemble des leviers que nous allons développer ont été puisés dans la littérature scientifique,
en évitant les modèles lyriques des spécialistes auto-proclamés qui ne basent pas leurs
interventions sur des recherches sérieuses. Ces recherches sont cohérentes dans leur très grande
majorité, et nous avons puisé majoritairement dans les recherches ou méta analyses de Bakker
et Demerouti (2007), Schaufeli et Salanova (2007), Schaufeli et Al40
, Daniel Pink41
, James M.
Kouzes et Barry Z. Posner (2012), Tracy Maylett et Paul Warner42
, Herzberg43
, Edward Deci
et Richard Ryan.
3.5.1 DONNER DU SENS A LEUR ACTION
Donner du sens à son action, c’est le « pourquoi » : un besoin humain fondamental trop souvent
oublié et mal compris dans nos sociétés. Mal compris car il est souvent associé ou confondu
36
ALICE M. ISEN AND BARBARA MEANS (1983), The Influence of Positive Affect on Decision-Making Strategy
37
C. M. HAASE, M. J. POULIN ET J. HECKHAUSEN (2012), Happinness as a Motivator : Positive Affect Predicts
Primary Control Striving for Career and Educational Goals
38
ABIGAIL HAZLETT, DANIEL C. MOLDEN, AARON M. SACKETT (2011), Hoping for the Best or Preparing for the
Worst? Regulatory Focus and Preferences for Optimism and Pessimism in Predicting Personal Outcomes
39
J. BOEHM ET S. LYUBOMIRSKY (2008), Does Happiness Promote Career Success
40
SCHAUFELI ET AL. (2002), Utrecht Work Engagement Scale
41
DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us
42
ABIGAIL HAZLETT, DANIEL C. MOLDEN, AARON M. SACKETT (2011), Hoping for the Best or Preparing for the
Worst? Regulatory Focus and Preferences for Optimism and Pessimism in Predicting Personal Outcomes
43
HERZBERG (1959), The Motivation to Work
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 21
avec la joie de vivre. Pourtant, on peut être heureux de vivre et ne pas ressentir de sens. C’est
ce qui se passe si un de nos souhaits immédiat est exaucé. A l’inverse, on peut ressentir le sens
de son action, tout en travaillant dans des conditions de travail difficiles44
.
Peut-être parce qu’il est impossible de décrire cette sensation unique et propre à chacun. Mais
à un certain point, tout le monde est amené à se demander pourquoi il fait ce qu’il est en train
de faire, et ne pas avoir de réponse conduit à de mauvaises performances45
. Probablement
l’étape la plus importante pour développer l’engagement, c’est aussi une étape dont la
responsabilité incombe à 50/50 entre l’employé et l’organisation. L’organisation ne peut donc
que créer un environnement où le sens peut se développer. Voici une petite revue de
l’environnement à développer pour permettre cet épanouissement.
Exprimer une vision partagée
Attention ici, cette partie est souvent mal comprise par les managers. Oui, un leader doit
exprimer sa vision, et fixer un cap via des objectifs partagés. Toutefois, il ne faut pas s’attendre
à ce que les employés se les approprient tels quels. Il faut développer une vision et des objectifs
dans lesquels la propre vision des collaborateurs peut s’exprimer en congruence avec celle du
leader. Le leader doit ici inspirer en touchant le cœur des gens, en générant des émotions, et ne
pas vendre outre-mesure sa vision. Une expérience racontée par Buddy Blanton46
, programs
manager for strategy and development à Northrop Grumman Corporation, permet de
comprendre qu’une vision partagée et exprimée du leader ne suffit pas, et que le processus que
le leader a suivi pour se forger sa propre vision compte beaucoup afin que tout le monde soit
« à la même page ». Personne en effet n’apprécie de se voir imposer quoi faire ou où aller,
même si le chemin est bon. Les leaders doivent donc passer du temps à discuter avec leurs
collaborateurs, à écouter, à échanger sur ce sujet afin que des visions congruentes parmi les
employés puissent se propager dans l’organisation.
Au final, la vision stratégique doit être exprimée de façon succincte, simple et idéale, de façon
à ce que les collaborateurs puissent se projeter dans cette vision et mettre en perspective leur
travail ou « mission » dans cette vision à plus long terme.
Partage des valeurs
44
ROY F. BAUMEISTERA, KATHLEEN D. VOHSB, JENNIFER L. AAKERC & EMILY N. GARBINSKYC (2012), Some Key
Differences Between a Happy Life and a Meaningful Life, publié dans le Journal of Positive Psychology
45
ABE ARKOFF (1994), The Illuminated Life
46
JAMES M. KOUZES ET BARRY Z. POSNER (2012), The Leadership Challenge
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 22
Les valeurs de l’organisation doivent être clairement identifiées et communiquées. C’est
aujourd’hui le cas de la plupart des organisations. Le piège dans lequel elles tombent le plus
souvent est de ne pas s’y conformer. L’authenticité des valeurs affichées est primordiale. Les
valeurs ne se décrètent pas, ne s’énoncent pas, mais se démontrent par des actes récurrents.
Dans le cas contraire, les salariés perçoivent bien les différences entre les valeurs telles qu’elles
ont été communiquées avec les pratiques managériales qu’ils constatent. Cela dévalorise
l’organisation, ne permet pas d’aligner les valeurs des collaborateurs avec celles de
l’organisation, et peut même donner la sensation d’une manipulation cynique.
Donner du sens autrement
On n’y pense pas forcément au premier abord, mais il y a également d’autres moyens de donner
du sens à l’action des collaborateurs. Car le sens que l’on donne à son action pouvant être
différent d’une personne à l’autre comme nous l’avons vu, voici une liste non exhaustive
d’éléments qui peuvent permettre de donner du sens :
 Le mentorat de nouveaux arrivants.
 Participer à la préservation de l’environnement.
 Améliorer la santé de ses pairs.
 Gagner correctement sa vie afin d’envoyer ses enfants dans de grandes écoles.
 Développer un produit innovant.
Un lien direct avec l’impact
Le chapitre suivant traite en profondeur de l’importance de l’impact. Avant de l’ouvrir, il
semble important de faire le lien avec le chapitre en cours. Donner du sens à son action, c’est
aussi faire prendre conscience aux équipes de la manière dont leur travail va affecter les
personnes qu’elles essaient de servir, au premier chef les clients, car personne n’aime à penser
que son travail est futile. L’impact doit exister et avoir un sens !
3.5.2 AVOIR DE L’IMPACT
Le résultat est à l’impact ce que l’objectif est au sens, les deux sont intimement liés. Souvent
confondu à tort avec l’intensité de l’effort fourni, l’impact est plus ici une sensation que son
travail est utile, produit des résultats et s’inscrit dans la démarche globale de l’organisation.
L’impact, c’est le « quoi », c’est ce qui permet de faire la différence, de compter pour quelque
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 23
chose. Et c’est exactement ce dont ont besoin les individus afin de se sentir investis d’une
mission. Pour arriver à ce stade, les individus ont besoin de :
 Sentir des progrès dans leur travail, ce qui nous ramène à la thématique du
développement personnel.
 Comprendre comment leur travail aide l’organisation à atteindre ses missions (ce qui
nous ramène à la vision de l’entreprise). Sans voir l’impact de leur travail, les individus
peuvent se sentir inutiles – voire impuissants –.
Nous pouvons également noter que l’impact contribue positivement à la sensation d’être
reconnu pour son travail, et donc à l’estime de soi… une des ressources personnelles nécessaires
pour qu’un employé soit engageable !
Parmi les pistes évoquées par les différents auteurs pour améliorer l’impact ressenti par les
individus, nous pouvons noter :
 Exploiter la loi dite « law of impact proximity », soit la « loi de la proximité de
l’impact », qui stipule que l’impact ressenti est plus important lorsqu’il y a proximité
entre le travail réalisé et l’impact. Une loi depuis validée par de sérieuses recherches.
Dans l’une d’elles47
, des individus à qui l’on demandait d’assembler des legos pour
former des robots ont obtenu de bien meilleures performances lorsque le résultat de leur
travail leur était montré pendant plusieurs minutes... même s’ils savaient que ces robots
legos seraient démontés quelques minutes plus tard !
 Les feedbacks des managers, qui doivent être réguliers. Le salarié doit en effet avoir le
sentiment que ses actions sont reconnues dans l’organisation, et qu’on y prête attention.
Il est donc primordial de prendre le temps de vivre et consacrer les réussites48
 Faire sentir aux individus que leur effort est utile et apprécié : leur donner des signes de
reconnaissance. Une étude49
a d’ailleurs démontré que les individus ressentant cela
avaient moins d’exigence salariale que les autres et travaillaient plus longtemps.
47
DAN ARIELY (2008), What Managers Can Learn from Legos
48
DAVID AUTISSIER ET FREDERIC WACHEUX (2006), Manager par le sens
49
JAMES HEYMAN ET DAN ARIELY (2004), Effort for Payment : A Tale of Two Markets
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 24
 Une information partagée à tous les étages de la hiérarchie permet d’améliorer
l’engagement. C’est ce qu’ont démontré tour à tour plusieurs études menées par
Rodwell et al50
, Dillon et Flood51
, ou encore Caldwell et al52
.
Pour conclure, citons une étude qui exprime à elle seule l’étendue que la sensation d’avoir de
l’impact peut avoir. Dans une étude de 2007, des employés de call-center à qui une mission de
collecte de dons a été confiée ont augmenté les dons récoltés de 171% - excusez du peu -,
lorsqu’il leur a été permis de constater par eux-mêmes le résultat de leur collecte, en
l’occurrence une simple conversation de 5 minutes avec une personne ayant bénéficié de cette
récolte.
3.5.3 PERMETTRE L’AUTONOMIE : LES 4 « T »
L’autonomie laissée aux collaborateurs est un élément fondamental pour le développement de
l’engagement. Mais précisons ce qu’est à ce stade l’autonomie : c’est la faculté pour un individu
de choisir librement ses horaires de travail (Time), ses tâches (Tasks), comment effectuer ses
tâches (Technique), et avec qui les effectuer (Team). Ces quatre composantes forment les 4 T
de l’autonomie53
.
Figure 6 Les 4 "T" de l'autonomie
50
RODWELL ET AL (1998)
51
DILLON ET FLOOD (1992)
52
CALDWELL ET AL (1990)
53
DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us
Time Tasks
Technique Team
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 25
L’autonomie a été identifiée comme un des trois piliers de la motivation par Daniel Pink54
, et
le plus important des trois piliers des besoins humains par Edward Deci et Richard Ryan55
, dont
les travaux font référence. Cette recherche de liberté est prégnante dans notre société, et cette
demande est plutôt en expansion, comme nous le démontrerons dans le chapitre sur la
génération Y. Nous pouvons nous en apercevoir en constatant la multiplication des
changements de carrière, de vocation, qui vont à l’encontre de l’intérêt financier des concernés,
ou de la multiplication des personnes souhaitant travailler pour leur propre compte. Pour s’en
convaincre, des expériences à grande échelle ont déjà prouvé l’incroyable efficacité de
l’autonomie.
Citons-en une : 360 petites entreprises américaines étudiées, dont la moitié a laissé de
l’autonomie à leurs collaborateurs, et l’autre moitié a fonctionné en mode « contrôle » avec une
direction « top-down ». Le résultat ? Les entreprises qui ont misé sur l’autonomie ont crû quatre
fois plus vite que le groupe « contrôle » et ont connu 66% de turnover en moins56
!
Time : le choix des heures de travail
Plusieurs recherches et expérimentations récentes tendent à démontrer l’intérêt que peut avoir
un employeur à laisser une latitude dans le choix du temps à ses collaborateurs, vécue comme
une véritable marque de confiance, une reconnaissance et un avantage certain. Nous pouvons
citer l’expérience récente de la chaine américaine Best Buy, ayant introduit le programme
ROWE (Results Only Work Environment), soit « Seul le résultat compte ». Chaque individu a
la possibilité de travailler quand il le souhaite, d’où il le souhaite, tant que le travail est fait.
Développé par Cali Ressler et Jody Thompson57
, le programme a obtenu des résultats très
positifs pour Best Buy : HBR fait état d’une économie de 2,2 millions de dollars d’économies
en trois ans. En date de mars 2013, 40 autres organisations auraient déjà suivi cette voie58
. Au
global, la productivité grâce au programme aurait augmenté de 35%, le turnover serait
nettement abaissé, et les employés auraient arrêté de compté leurs heures59
.
Tasks : le choix des tâches
54
DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us
55
EDWARD L. DECI ET RICHARD M. RYAN (2008), Facilitating Optimal Motivation and Psychological Well-Being
Across Life’s Domains
56
PAUL P. BAARD, EDWARD L. DECI, ET RICHARD M. RYAN (2004), Intrinsic Need Satisfaction: A Motivational
Basis of Performance and Well-Being in Two Work Settings
57
CALI RESLER ET JODY THOMPSON (2010), Why Work Sucks and How to Fix It : The Results-Only Revolution
58
https://hbr.org/2013/03/goodbye-to-flexible-work-at-be/, consulté le 05/12/2015
59
TAMARA J. ERICKSON (2008), Task, Not Time: Profile of a Gen Y Job (HBR)
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 26
Il s’agit ici d’impliquer les collaborateurs en leur laissant une latitude pour choisir les tâches
qu’ils vont exécuter. L’illustration la plus célèbre de cette politique est la fameuse politique des
20% de Google, où les employés peuvent choisir librement les projets sur lesquels ils travaillent
durant cette période, à la seule condition de montrer ce qui aura été réalisé à la fin. Si elle est la
plus célèbre, Google n’est toutefois pas la seule entreprise à avoir tenté cette approche. Nous
pouvons citer 3M par exemple, ou encore Atlassian qui, après avoir introduit cette démarche,
l’a renforcée à plusieurs reprises face aux excellents résultats.
Technique : le choix du « comment »
Laisser l’autonomie des individus sur le « comment », c’est l’antithèse du taylorisme. Pourquoi
donc remettre en cause un modèle qui a eu un tel succès passé ? Parce que nous avons démontré
que ce fonctionnement fonctionne bien dans un environnement « algorithmique », où chaque
geste peut être pensé à l’avance et que la créativité de l’individu n’a aucune importance. Mais
dès lors que l’organisation souhaite faire appel à la créativité d’un individu, lui laisser de
l’autonomie a un résultat positif sur ses performances. C’est ce que nous avons démontré dans
le chapitre sur les fausses idées sur la rémunération et sur la carotte et le bâton. Des
organisations ont pu tester cette approche avec succès. Citons l’exemple de Zappos.com, site
de e-commerce (depuis propriété d’Amazon), qui, au lieu d’installer son call-center de support
offshore, l’a développé aux Etats-Unis, avec une directive simple et unique à ses
collaborateurs : « répondre au client et lui apporter des solutions ». Entreprise de taille pourtant
modeste face à des mastodontes, Zappos.com s’est régulièrement classée dans les meilleures
entreprises américaines pour son support au client, tout en connaissant un turnover de ses
effectifs particulièrement bas, un fait rarissime dans ce secteur. D’autres entreprises sont allées
plus loin, et un mouvement se développe aux Etats-Unis permettant aux répondants de call-
centers d’exercer depuis leur domicile (« homeshoring »).
Team : choisir ses collègues de travail
Dernier pilier de l’autonomie, celui du choix des hommes et femmes avec lesquels nous
pouvons travailler. Traditionnellement, les collègues de travail sont, à l’instar d’une famille,
composés de personnalités que nous n’avons pas choisies. « On choisit ses amis, pas sa
famille », nous pourrions donc ajouter « ni ses collègues de travail ». Or, en nous inspirant
d’expériences réussies, nous pouvons imaginer des voies pour permettre aux collègues de
sélectionner leurs collègues, en les impliquant davantage et favorisant l’esprit tribal « bande de
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 27
potes », dont nous soulignerons l’importance pour le développement de l’engagement dans un
chapitre suivant.
Nous pouvons ainsi citer l’exemple de GORE-TEX, qui délègue aux membres d’une équipe le
choix de leurs futurs collègues, responsabilité traditionnelle d’un manager ou d’un responsable
des ressources humaines. Nous pouvons également développer cette autonomie dans le cadre
de l’autonomie sur les tâches : si pendant une période limitée les collaborateurs travaillent sur
ce qu’ils souhaitent, une opportunité leur est offerte de choisir des collègues partageant leur
motivation. Des équipes ainsi co-construites ont « doucement, mais sûrement, poussé
l’organisation sur son axe », a pu constater Bharat Mediratta à propos de Google60
.
L’autonomie laissée aux collaborateurs a également des ramifications dans les autres leviers du
développement de l’engagement. Premièrement, elle est vécue comme une marque de
confiance. Impliquée plus en profondeur dans les processus de l’organisation, elle développe la
sensation d’être connecté à l’organisation, aux tâches et avec ses collègues (voir chapitre « Se
sentir connecté »). Elle permet enfin aux individus concernés d’avoir plus d’impact (voir
chapitre précédent). Et cela sans parler des autres avantages reconnus de l’autonomie, comme
la réduction du stress.
Toutes ces théories sont fascinantes, mais il convient de garder raison. Toutes ne sont pas
transposables facilement dans toutes les organisations. Elles nécessitent une organisation rodée,
un savoir-faire, une exécution par étapes, une maturation, et un délai pour la mise en place que
toutes les organisations ne peuvent pas forcément s’offrir dans le flot de leurs contraintes
quotidiennes. Mais en s’inspirant de ces éléments, une exploitation de ces concepts est possible
en gardant à l’esprit que l’autonomie doit avoir des limites : celles fixées par l’organisation au
sein de laquelle elle peut et doit s’exprimer.
3.5.4 ENCOURAGER LE DEVELOPPEMENT PERSONNEL
Le développement personnel est un autre des piliers nécessaires au développement de
l’engagement des organisations. Le développement personnel, menant à la maîtrise et à
l’accomplissement, est également un besoin humain universel pour certains61
, un point essentiel
à la motivation pour d’autres62
. Dans tous les cas, et quelle que soit la manière dont les grands
60
BHARAT MEDIRATTA (2007), à Julie Bick dans The Google Way: Give Engineers Room (NYT)
61
TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement
62
DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 28
auteurs s’étant penchés sur ces thématiques le modélisent, on retrouve bien cette idée liée au
développement de l’individu comme puissante source de libération des énergies.
Pour permettre le développement personnel des individus, l’organisation doit les pousser à
sortir de leur zone de confort afin de les faire progresser, en veillant bien à ne pas tomber dans
le travers de la génération de stress.
Figure 7 L'équilibre entre stress et challenge
On comprend dès lors qu’il ne doit pas être confondu avec la promotion ou à de quelconques
primes, qui s’apparenteraient ici plutôt à de la motivation extrinsèque. Autre risque identifié :
celui de mal apprécier la façon dont les individus peuvent percevoir une opportunité de
développement personnel : comme une invitation, ou comme une menace ? L’autre avantage
du développement personnel c’est que les individus ont tendance à exprimer leurs meilleurs
talents quand ceux-ci sont requis. Et quoi de mieux pour exprimer tous leurs talents que de les
faire progresser pour aller chercher – sans jamais les dépasser – leurs limites ?
Un autre modèle se dégage des études qui ont été réalisées sur le sujet. Nous pouvons
comprendre qu’offrir régulièrement des opportunités de développement, du support et de
l’accompagnement dont ils peuvent avoir besoin poussent une majorité des individus vont
s’engager. A l’inverse, fermer les opportunités peut désengager les individus, qui peuvent
devenir apathiques, voire quitter l’organisation.
Le développement personnel permet également d’atteindre un niveau émotionnel appelé
« Flow » rendu célèbre par Csikszentmihalyi, pour qui il s’agit d’« une personne effectuant une
activité dans laquelle il est complètement immergé, avec une sensation de concentration
énergique, d’implication totale, et de plaisir à effectuer ladite activité. En substance, Flow est
caractérisé par une absorption complète dans ce que quelqu’un fait. »63
. Une définition qui
n’est pas sans rappeler… la définition de l’engagement. La leçon que nous pouvons en retenir,
c’est que nous sommes plus engagés dans des tâches volontairement et assurément difficiles,
mais réalisables, que l’on a choisies, dont l’objectif en vaut la chandelle, dans une recherche
63
MIHALY CSIKSZENTMIHALYI (1990), Flow : The Psychology of Optimal Experience
Challenge
Stress
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 29
pleine et entière d’atteindre l’excellence. Une voie menant à la compétence inconsciente, dont
le modèle vous est résumé ci-dessous.
Figure 8 Les quatre étapes de l'apprentissage
3.5.5 SE SENTIR CONNECTE
Développer les connexions des collaborateurs, c’est développer le “nous” en lieu et place du
“je”. C’est développer l’esprit d’équipe et les valeurs qui y sont associées, comme l’entraide.
C’est leur permettre de s’épanouir dans leur travail. Un besoin humain profond, qui pousse les
individus. Pour s’en convaincre, on peut se rappeler qu’il y a sur terre plus d’individus disposant
d’un téléphone portable que d’individus disposant de toilettes64
! Un besoin somme toute
identifié de longue date : il s’agit de la 3e
strate des besoins de la pyramide de Maslow, juste
au-dessus des besoins dits de sécurité. Marissa Meyer ne s’y est pas trompée. Arrivée à la tête
de Yahoo, elle a interdit le télétravail à ses collaborateurs. Bien qu’admettant que les
télétravailleurs étaient plus productifs car moins dérangés, elle y préfère la collaboration et
l’innovation qui, selon ses dires, sortent du travail d’équipe65
. Elle a ainsi mis les connexions,
carburant de la collaboration, avant l’autonomie et la productivité à court terme. Un choix
discutable dont l’avenir nous dira s’il était juste, mais qui démontre l’importance des
connexions.
64
ONU (2013), Deputy UN chief calls for urgent action to tackle global sanitation crisis, consultable sur
http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=44452 (consulté le 30/11/2015)
65
http://fortune.com/2013/04/19/marissa-mayer-breaks-her-silence-on-yahoos-telecommuting-policy/, consulté
le 01/12/2015
Incompétence
inconsciente
Incompétence
consciente
Compétence
consciente
Compétence
inconsciente
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 30
Les connexions, ce sont là encore une sensation : celle d’appartenance à quelque chose de plus
grand que soi. Mais qu’appelle-t-on exactement les connexions ? Tracy Maylett et Paul
Warner66
nous éclairent à ce sujet en dénombrant cinq types de connexions :
 Sociales : le groupe de personnes autour de vous, avec lequel vous passez votre temps.
 Avec l’organisation : elle se crée grâce à des facteurs tels qu’être reconnu par
l’organisation, ou une expérience de travail très agréable. Elle s’illustre souvent par une
identification de l’individu à son organisation.
 Avec la mission : lorsque l’individu s’approprie la mission de l’organisation, et va
jusqu’à mettre – jusqu’à un certain point –, ses besoins après ceux de l’organisation.
 Avec les valeurs : lorsque l’organisation respecte et partage vos propres valeurs, et que
l’objectif de l’organisation est congruent avec ces valeurs.
 Avec les tâches : lorsque la tâche, et l’importance de son accomplissement, pousse des
personnes à se connecter afin de mener ces tâches à bien.
Avec les tâches et la mission
Des connexions s’avèrent indispensables au développement du sens donné à son action. Le
développement de connexions pouvant transcender, comme lorsque les employés de Mercedes-
Benz en Afrique du Sud ont rapidement amélioré la qualité des voitures sortant de leur usine
dès qu’il leur a été donné l’opportunité de fabriquer une voiture pour Nelson Mandela à sa sortie
de prison. Et, dans le sens contraire, une absence de connexion peut mener à une perte de sens,
dans son travail et dans la vie67
.
Nous pouvons par ailleurs établir là encore un pont avec la vision qui doit être partagée de façon
congruente. Comme nous l’avons vu, la vision doit être propagée à l’aide de discussions et
d’explications sur le cheminement intellectuel ayant mené à cette vision. Dès lors, nous
comprendrons aisément que si la « base » n’a jamais l’occasion de discuter avec son (ses)
leader(s), cela risque bien de ne jamais arriver !
Avec ses collègues
L’expérience des études récurrentes autour du Gallup Q12 par DecisionWise leur fait affirmer
qu’on retrouve significativement plus d’amitiés réelles entre certains collaborateurs dans les
66
TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement
67
TYLER F. STILLMAN, ROY F. BAUMESTEIR ET FRANK D. FINCHAM (2009), Alone and Without Purpose : Life
Loses Meaning Following Social Exclusion, publié dans le Journal of Experimental Social Psychology 45
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 31
organisations engagées que dans les autres, d’où l’existence de la question « J’ai un de mes
meilleurs amis […] » dans le questionnaire d’engagement que nous utiliserons.
Une grande entreprise a joué la carte de cette approche. Unilever, en 2008, après une baisse du
moral de ses employés suite à de difficiles réorganisations, a lancé le programme « Agile
Working » auprès de 100 000 de ses 170 000 collaborateurs. L’idée était de développer la
connexion à l’entreprise cette fois, en imposant l’idée que les collaborateurs sont une part
entière et appréciée de l’organisation. Cela s’est concrétisé par la liberté donnée aux individus
de travailler où ils le souhaitent, quand ils le souhaitent, tant que le travail est fait. Et pour ceci,
Unilever a fourni des moyens de communication très souples (ex Skype). Grâce à cette
expérience les employés d’Unilever se sont sentis reconnus et ont ressenti le soin que leur
portait leur direction. Les résultats : hausse de la productivité, de la satisfaction perçue au
travail, d’employés souhaitant rester chez Unilever, de la santé des employés (plus d’exercices,
de sommeil), de la facilité à recruter, moins de turnover et une réduction des coûts (surface des
bureaux, moins de déplacements professionnels)68
.
Avec l’organisation
Pour évoluer au stade où l’individu se sent faire partie intégrante de l’organisation, avec donc
cette sensation recherchée, créatrice de valeur, la connexion de l’individu avec l’organisation
doit passer par trois stades.
Figure 9 Les quatre étapes de connexion à l'organisation
68
TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement,
page 174
S'accorder
Sentiment
d'appartenance
Se sent partie de
l'organisation
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 32
Durant la première étape, l’individu se sent en accord avec l’organisation : il répond à un besoin,
et ce besoin est rempli. Vient ensuite un sentiment d’appartenance : il partage les valeurs de
l’entreprise, aime son travail, y trouve une source de motivation et est récompensé. Vient enfin
l’intégration, où l’individu se sent partie intégrante de l’organisation. Lorsqu’on parle de
l’organisation, l’individu se sent directement concerné.
Pour comprendre le cheminement menant un individu à se sentir pleinement connecté avec
l’organisation, Jos De Neve nous fournit la matrice de lecture de l’état d’esprit tribal des
individus en fonction de leur langage69
:
Figure 10 Langage utilisé par le groupe/individus traduisant leur état d’esprit
3.5.6 DEVELOPPER LA CONFIANCE
La confiance est une composante essentielle au développement de l’engagement. Dans une
étude de 201070
dédiée à l’effet de levier sur la confiance dans les PME, des auteurs en viennent
à modéliser l’effet que les différentes composantes de la confiance ont sur l’engagement. Une
modélisation illustrée par la figure ci-dessous :
69
JOS DE NEVE, Le changement, les cultures (2014)
70
ELSA BELLIATO, CAROLINE CHAMPAGNE, ISABELLE PRIM-ALLAZ ET MARTINE SEVILLE (2010), L'effet de levier
de la confiance sur l'engagement dans l'hypercroissance durable des PME
1 : Hostilité et
désespoir
"La vie est une
merde"
2 : Victime
apatique
"Ma vie est une
merde"
3 : Le guerrier
solitaire
"Je suis bon, vous
ne l'êtes pas"
4 : La fierté de la
tribu
"Nous sommes
bons, pas les
autres"
5 :
L'émerveillement
innocent
"La vie est
magnifique"
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 33
Figure 11 L’effet de la confiance sur l’engagement
Au-delà de cette modélisation, on comprend aisément le désengagement qui peut résulter d’un
manque de confiance, résumée en ces mots par Valérie Petit, professeur EDHEC lors de sa
présentation « Résultats de l’enquête nationale sur le leadership » le 27 mars 2015 :
 « Je reste à ma place, ce n’est pas mon boulot ; c’est à quelqu’un d’autre de le faire ».
 « Une perception que l’on se fait avoir et que d’autres employés ont plus qu’ils ne
méritent ».
 « La peur de prendre des risques, de s’exposer au regard malveillant des autres ou
d’avoir tort ».
Dans une autre étude71
, Robert M. Morgan et Shelby D. Hunt ont pu établir des connexions
directes entre la confiance et l’incertitude, la fonctionnalité des conflits, la coopération et, bien
entendu, l’engagement. Cette étude nous éclaire également sur les ingrédients nécessaires à
l’établissement de la confiance : des valeurs partagées, une bonne communication et l’absence
de comportement opportuniste. Un modèle illustré par le schéma ci-dessous :
71
ROBERT M. MORGAN ET SHELBY D. HUNT (1994), The Commitment-Trust Theory of Relationship Marketing
• Compétence
• Bienveillance
• Honnêteté
Confiance
• Calculé
• Affectif
Engagement
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 34
Figure 12 Causes et effets sur la confiance et l'engagement
James M. Kouzes et Barry Z. Posner72
ont quant à eux démontré que la création d’un climat de
confiance avait un impact important sur les relations des membres d’une organisation, et plus
précisément sur leur collaboration. La mise en place de cette confiance initiale étant même
d’après ces auteurs une condition sine qua non pour l’émergence du “nous”.
Le développement de la confiance a également un lien direct avec le levier « Donner du sens ».
En effet, des études ont montré que les organisations délivrant en fonction du sens et de la
performance étaient perçues comme des modèles et inspiraient une plus grande confiance73
.
Dans le même sens, les organisations qui, en plus de communiquer sur les aspects financiers,
communiquent largement sur le sens de son action et l’objectif final (la vision) exprimée
inspirait également la confiance74
.
Le développement de la confiance a également un impact direct sur le développement des
connexions en jouant un rôle fondamental dans leur construction. La faculté des organisations
à établir une confiance à tous les étages permet aux connexions de s’épanouir pour l’intérêt de
l’organisation. C’est aussi là que les valeurs de l’organisation entrent en jeu. Les valeurs sont-
72
JAMES M. KOUZES ET BARRY Z. POSNER (2012), The Leadership Challenge
73
BURSON-MARSTELLER (2008), Corporate Success - Driven by Purpose or Performance?
74
TANIA BRAGA, JOHN WEEKS, AILEEN IONESCU-SOMERS, PHILIPPE MARGERY ET APARNA DOGRA (2010),
Communicating Corporate Purpose
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 35
elles congruentes avec les individus en place ? Les valeurs affichées sont-elles bien
communiquées, affichées ? Mais surtout, sont-elles dignes de confiance ? Les actions
démontrent-elles les valeurs communiquées ?
Pour conclure, nous soulignerons que la confiance s’acquiert à tous les niveaux. Confiance entre
la direction et les collaborateurs, entre les managers et les collaborateurs, entre les
collaborateurs eux-mêmes. L’avantage pour l’organisation est que la confiance est purement
transactionnelle. Si une organisation décide de gagner la confiance de ses équipes, elle n’a
« qu’à » faire preuve dans le temps de fiabilité entre ce qu’elle dit et ce qu’elle fait, et démontrer
qu’elle fait siens les intérêts de ses collaborateurs.
3.6 SYNTHESE DU MODELE DE L’ENGAGEMENT
Nous vous proposons une synthèse des différents leviers du développement de l’engagement
que nous venons d’examiner. Cette synthèse permet de proposer aux organisations un modèle
simplifié, compréhensible et actionnable facilement.
Figure 13 Synthèse du modèle de l'engagement
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 36
3.7 ANALYSE SYSTEMIQUE DU DEVELOPPEMENT DE L’ENGAGEMENT
L’analyse systémique du développement de l’engagement nous permet quant à elle
d’appréhender la complexité de ses mécanismes déclencheurs. En nous basant sur notre
démonstration, notre analyse permet d’identifier en un seul graphique la majorité des relations
de causes à effets permettant de développer cet engagement.
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 37
Figure 14 Analyse systémique du développement de l'engagement
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 38
4 LA GENERATION Y OU « MILLENNIALS »
Les organisations interpellent également sur la problématique liée aux adaptations rendues
nécessaires par l’émergence de la génération Y qui, nous expliquent-t-elles, leur posent des
problèmes pour les satisfaire. Une première impression que nous partageons partiellement :
dans le cadre des ateliers, les participants, pour beaucoup de la génération Y, ont manifesté
beaucoup d’attente de flexibilisation du travail notamment, mais aussi d’exigences sur les
critères dits d’hygiène (environnements et outils de travail, rémunération).
Les Millenials sont un sujet d’actualité et représentent un enjeu majeur pour assurer le
développement serein des organisations. Au-delà des préjugés et des idées préconçues, nous
engagerons donc des recherches complémentaires sur ce sujet afin de déterminer quelles sont
les spécificités des membres de cette génération, et comment nous pouvons utiliser cette
connaissance pour développer leur engagement.
4.1.1 UNE DEFINITION ENCORE FLOUE
La génération Y succède ainsi à la génération X, et précède la génération Z, qui n’est pas encore
rentrée sur le marché du travail.
Figure 15 Frise chronologique des générations
Au-delà de cette lapalissade, il convient de préciser les dates retenues qui définissent la
génération Y afin d’en préciser les spécificités. Et pour les préciser, il n’existe pas de consensus,
aucune source ne faisant autorité. Voici une tentative de récapitulatif des dates couvertes par
cette génération en fonction des sources qui nous ont semblé faire le plus autorité. Le tableau
ci-dessous représente les bornes d’années de naissance retenues en fonction des
sources retenues :
Génération ZGénération YGénération X
Baby-
boomers
Génération
silencieuse
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 39
1974
1975
1976
1977
1978
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
Josiam & Al75
Sullivan & Heitmeyer76
Yeaton77
Bruce Horovitz78
Pew Research79
PwC & Université South California80
Marc McCrindle81
Marc McCrindle82
Time Magazine83
Sarah Sladek84
Morton L.P.85
Pew Research Center86
Tulgan, B & Al87
Vaisilescu, R.88
Raines, C. & Armsparger A.89
Wilson, M. & Gerbeer, L.E.90
Figure 16 Bornes d'âge retenues pour la qualification de la génération Y
Ces différences, loin d’être exhaustives, permettent d’entrevoir la difficulté des bases
méthodologiques utilisées dans les différentes enquêtes.
Toutefois, afin de nous faire une idée sur le poids démographique de cette génération, et donc
de l’importance de ses éventuelles spécificités pour les organisations, faisons le choix purement
arbitraire de considérer les personnes nées entre 1981 et 2000. L’étude des données
75
JOSIAM ET AL. (2009)
76
SULLIVAN & HEITMEYER (2008)
77
YEATON (2008)
78
BRUCE HOROVITZ, (2012), After Gen X, Millennials, what should next generation be?
79
http://www.pewresearch.org/fact-tank/2015/01/16/this-year-millennials-will-overtake-baby-boomers/ (2015),
consulté le 8 août 2015
80
PWC, LONDON BUSINESS SCHOOL ET UNIVERSITÉ SOUTH CALIFORNIA (2013), PwC’s NextGen: A global
generational study
81
MARC MCCRINDLE (2005), Report on the Attitudes and Views of Generations X and Y on Superannuation
82
MARK MCCRINDLE (2011), Generations Defined
83
TIME MAGAZINE (mai 2003)
84
SARAH SLADEK (2014), Kowing Y: Engage the Next Generation Now
85
MORTON L.P. (2002), Targeting generation Y, public relation quarterly.
86
PEW RESEARCH CENTER (2010) generation 2010, en ligne :http://pewinternet.org/Reports/2010/Generations-
2010.aspx consulté le 18/3/2011
87
TULGAN, B & AL (2001), Managing generation Y: global citizens born in the late seventies and early eighties
88
VASILESCU, R. (2011), The Romanian generation Y, preparing today’s students for tomorrow’s job market,
Annals of Spiru Haret University, Economic Series.
89
RAINES, C. & ARMSPARGER A. (2010), Millenials at work
90
WILSON, M. & GERBER, L.E (2008), How generational theory can improve teaching: strategies for working with
the Millenials, current in teachning and learning, vol. 1, n°1,
http://www.worcester.edu/Currents/Archives/Volume_1_Number_1/CurrentsV1N1WilsonP29.pdf, consulté le
09/08/2015.
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 40
démographiques au 1er
janvier 2015 de la France métropolitaine publiées par l’INSEE nous
démontre que les Millennials représenteront en 2016 34% des personnes en âge de travailler
(2391
à 6292
ans). Si nous nous projetons 5 ans plus loin, en 2021, les Millennials représenteront
alors 44% du total.
4.1.2 LES SPECIFICITES REELLES DE LA GENERATION Y
Capricieuse, irrespectueuse, réclamant ses droits en oubliant ses devoirs, égocentrique, infidèle,
superficielle, indifférente. Voici quelques-unes des idées reçues dont est affublée la génération
Y, largement relayées par les titres de la presse managériale bienpensante. Qu’en est-il
exactement ? Comment faut-il, le cas échéant, adapter les organisations pour développer
l’engagement de cette population ?
L’étude de la bibliographie moderne et des enquêtes laisse toutefois songeur lorsque nous
rentrons dans les détails méthodologiques. Les résultats de ces enquêtes poussent à les
relativiser : ces enquêtes ont l’habitude de comparer des populations d’âge différents (ne
retenant pas toutes les mêmes bornes d’âge), en retenant dans leurs échantillons des populations
à des moments de leur socialisation très différents, retenant par exemple bien souvent des
étudiants pour représenter la génération Y. Ces enquêtes sont également dépourvues d’axe
scientifique, se contentant le plus souvent la méthodologie de l’enquête par questionnaire.
Enfin, les résultats semblent caricaturaux. Un individu né en 1979 serait donc si différent d’un
autre né quelques jours plus tard, en 1980 ? Pourtant, personne ne nie la réalité des différences
culturelles entre les jeunes d’aujourd’hui et ceux d’il y a 30 ans.
Nous avons trouvé des recherches avec des protocoles sérieux apportant un peu de contradiction
dans ce monde policé des consultants spécialistes auto-proclamés.
4.1.2.1 QUELLE REALITE SCIENTIFIQUE ?
C’est Jean Pralong93
, dans son étude « La génération Y au travail : un péril jeune ? » (2009),
qui met le premier les pieds dans le plat. Aucune recherche scientifique n’est venue appuyer
jusqu’à présent toutes les déclarations de la presse managériale spécialisée. L’occasion pour
Jean Pralong de combler ce manque. Son étude conclue que les différences supposées liées à la
génération Y tiennent principalement à l’appartenance sociale des individus plus qu’à leur âge
91
INSEE (2007), http://www.insee.fr/fr/insee_regions/idf/themes/dossiers/mobilite/docs/mob_chap2.pdf
92
CNAV (2015), http://www.statistiques-recherches.cnav.fr/retraites-de-droit-personnel.html
93
JEAN PRALONG (2009), La génération Y au travail : un péril jeune ?
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 41
de naissance. L’effet de la socialisation est ainsi plus puissant que l’effet générationnel et
pousse à une normalisation des comportements au fur et à mesure que les individus s’installent
dans la vie sociale. Et de conclure que le plus gros risque auquel les managers font face avec la
nouvelle génération est celle du désengagement.
4.1.2.2 QUELLES DIFFERENCES RESTE-T-IL ?
La deuxième étude est celle de François Pichault et Mathieu Pleyers dans « Pour en finir avec
la génération Y… Enquête sur une représentation managériale » (2010). Cette étude a voulu
vérifier si les différences entre les générations énoncées par les consultants et illustrées dans les
enquêtes tenaient vraiment à la borne d’âge ou plutôt à l’état de socialisation des individus.
Cette enquête conclue que la majorité des enquêtes publiées sont biaisées par le fait que les
répondants « Y » sont encore étudiants. Les mêmes questions aux mêmes générations quelques
années après leur premier emploi, et les réponses se rapprochent significativement de celles des
générations précédentes.
Ci-dessous, le tableau issu de l’enquête de Pichault et Pleyers :
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 42
Catégories Caractéristiques Items de l’enquête Différences
significatives
entre
générations
Recherche de sens
au travail
Sens moral et civique, besoin d’un
travail avec signification
Sentiment d’être utile aux
autres
Non
Besoin
d’accomplissement
Intérêt pour le travail et les défis
proposés, attentes en matière
d’éducation continuée, attitude
positive à l’égard du travail
Réalisation d’un projet
personnel clair
Non
Développement des
compétences
Oui : plus
important
Possibilité de se
développer
Non
Importance des
programmes de formation
continuée pour
attirer/retenir
Non
Recherche
de feedback
Besoin de gratification rapide en
termes monétaires ou de promotion,
une fois les objectifs atteints,
recherche de feedback par rapport à
l’engagement professionnel
Besoin de reconnaissance Non
Souci de bénéficier d’une
rémunération nette
suffisante
Non
Intégration vie
privée/ vie
professionnelle
Indifférenciation temps de travail/
temps de loisir, forte importance
accordée au loisir, au divertissement,
aux amis, à la famille, recherche du
plaisir et de l’épanouissement au
travail, capacité d’être multitâche
Equilibre vie privée/vie
professionnelle
Non
Possibilité d’aménager
son temps de travail
Non
Crainte de ne pas trouver
un emploi qui plaît
Oui : plus
important
Opportunisme Poursuite d’un agenda personnel,
opportunisme, agissements de franc-
tireur, individualisme, estime de soi,
besoin de s’affirmer
Comportement
individualiste comme
source de démotivation
Non
Construire soi-même son
futur et ne compter que
sur soi
Non
Non-respect de règles de
déontologie ou de valeurs
Oui : moins
important
Esprit de groupe Intérêt pour le travail en équipe et les
collaborations
Plus forts ensemble Non
Solidarité et esprit
d’équipe
Non
Faible loyalisme
institutionnel
Peu de sentiment d’appartenance à
l’entreprise, méfiance envers l’autorité
et les institutions,
Besoin de changer
régulièrement
d’environnement
Oui : plus
important
Garantie de l’emploi Non
Difficulté à se
projeter dans le long
terme
Incertitude sur l’avenir, difficulté de
se projeter dans le futur, difficulté à
s’engager et à faire des choix, primat
de l’instantané
Attente que l’entreprise
fasse preuve d’innovation
et d’anticipation du futur
Non
Tableau 17 Réalités scientifiques établies de la génération Y selon Pichault & Pleyers
En plus de cette recherche, nous avons voulu vérifier l’existence supposée d’une plus grande
exigence de cette génération concernant leur environnement de travail. L’étude de Paris Work
Place 2015 nous apporte un éclairage complémentaire. Et c’est une surprise là encore : il s’agit
de la génération la plus satisfaite de ses bureaux : 82% le sont, contre une moyenne de 76%
pour les autres générations. A l’inverse, c’est aussi la génération qui juge la présence de lieux
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 43
de convivialité au sein de l’entreprise comme étant la plus primordiale : 58% l’estiment
primordiale, contre 37% en moyenne pour les autres générations.
Les préjugés sur la génération Y et la littérature produite par les spécialistes auto-proclamés
font largement état de l’intérêt pour la balance vie privée / vie publique qui serait la marque de
fabrique de la nouvelle génération Y. Pourtant, comme les études94
nous l’ont démontré, la
recherche de cet équilibre est partagée par toutes les générations. Un autre éclairage peut être
apporté pour l’importance de l’intégration vie privée / vie professionnelle par l’étude de Paris
Work Place 2015. Dans cette étude, les auteurs ont posé la question à des cadres « Pour vous,
la possibilité d’aménager ses horaires à sa convenance est-elle primordiale ? ». A contrario des
clichés sur la génération Y, voici les résultats :
18-29 ans 30-39 ans 40-55 ans + 55 ans
Figure 18 L'importance de l'aménagement des horaires selon les générations
L’enseignement paraît clair : ce n’est pas tant la génération qui dicte l’importance accordée à
cette souplesse, mais plutôt l’effet « jeunes parents ».
4.1.2.3 ENSEIGNEMENTS
4.1.2.3.1 DES DIFFERENCES MOINS CARICATURALES QU’ANTICIPE
En conclusion de ces différentes études, il apparaît que les caractéristiques de la génération Y
sont nettement moins caricaturales que celles avancées par la presse managériale. Nous
pouvons nous demander à ce stade pourquoi tant d’efforts pour mettre sur les épaules des
membres de la génération Y l’ensemble des difficultés que rencontrent les organisations pour
s’adapter aux nécessaires changements perpétuels. Afin d’acquérir une lecture plus
94
FRANÇOIS PICHAULT ET MATHIEU PLEYERS (2010), Pour en finir avec la génération Y… Enquête sur une
représentation managériale
49
%51
%
Oui Non
64
%
36
%
Oui Non
58
%
42
%
Oui Non
53
%
47
%
Oui Non
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 44
pragmatique et anticiper les changements nécessaires, il est nécessaire de prendre plus de recul
et d’observer les changements sociétaux sur une plus grande période.
4.1.2.3.2 LA GENERATION Y… OU LA JEUNESSE ?
En prenant ce recul, nous nous apercevons que bon nombre de qualificatifs utilisés à propos de
cette génération sont en réalité des qualificatifs de la jeunesse, presque intemporels. La nouvelle
génération « Y » bouscule l’ordre établi ? « Il est interdit d’interdire », scandaient pourtant les
étudiants de 1968, celle de la génération des Baby-boomers. Et la génération X ? C’est elle qui
a affronté les us et coutumes de l’époque pour faire tomber l’obligation de la cravate et du
vouvoiement. Une célèbre histoire illustre bien le phénomène. En 1974, un jeune homme est
embauché chez Atari, entreprise très à la mode à ce moment. Ce jeune homme refuse de se
laver. L’odeur qu’il dégage pousse alors la direction à le cantonner à une équipe de nuit, dans
laquelle il est le seul représentant. Ce jeune homme donne ensuite sa démission pour
entreprendre un voyage en Inde rencontrer son gourou. Il revient sept mois plus tard, tête rasée,
habits traditionnels indiens, réclamer son poste chez Atari. Son nom ? Steve Jobs95
.
Une conviction renforcée par la théorie de la biographie professionnelle de Pascal Paillé96
, selon
laquelle la première étape de la vie professionnelle d’un individu commence par l’intégration
du développement professionnel. Durant environ 8 ans, les jeunes salariés recherchent un
employeur susceptible de les valoriser et de répondre à leurs valeurs. Ils n’hésitent alors pas à
changer d’employeur. Cela correspond pourtant exactement à la vision que nous avons des
jeunes de la génération Y.
Toutes ces déclarations de consultants spécialistes « Millennials » auto-proclamés laissent
comme un petit arrière-goût d’opportunisme. N’ont-ils pas créé le marché sur lequel ils
prospèrent ?
Maintenant que les différences réelles de cette génération ont été identifiées, attardons-nous
quelque peu sur celles-ci.
4.1.2.3.3 MOINS D’ATTACHEMENT AUX INSTITUTIONS ET AUX TRADITIONS
Nous commencerons par un point qui a pu être testé dans d’autres études sérieuses, et qui fait
consensus chez les managers, c’est le plus faible attachement aux institutions et aux traditions.
95
WALTER ISAACSON (2012), Steve Jobs
96
PASCAL PAILLE (2004), La fidélisation des ressources humaines
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 45
Une spécificité mise en lumière par plusieurs études97
, qui explique d’ailleurs un fort déclin des
adhésions d’une manière générale, que ce soit auprès d’acteurs privés ou d’associations98
.
Toutefois, ne tombons pas dans l’amalgame entre le manque d’attachement à ces institutions et
un éventuel manque de loyauté. C’est ce que nous rappelle notamment Sarah Sladek99
, la
loyauté n’est pas absente des esprits de la nouvelle génération comme on veut bien l’entendre,
elle est différente. Contrairement aux générations précédentes, elle n’est plus centrée sur
l’organisation, mais plutôt sur les personnes : « La génération Y est loyale. Elle n’est pas
seulement loyale aux institutions, elle est loyale envers les personnes ». Nous comprenons ainsi
comment l’engagement peut se développer : moins sur une organisation que sur des personnes.
Sarah Sladek ne dit pas autre chose : « Gen Y commits when meaningful relationships and great
experiences are actively present. To them, loyalty is not something you do just because; it is
something that is earned”, soit « La generation Y s’engage lorsque des relations porteuses de
sens et d’expérience sont présentes. Pour eux, la loyauté n’est pas quelque chose que l’on
applique par principe, c’est quelque chose qui doit être gagné ».
4.1.2.3.4 LE DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES
Ceci est une différence significative d’attente entre les générations. Toutefois, nous pouvons
aussi nous poser la question : est-ce réellement une différence générationnelle ou est-ce plutôt
lié à l’âge des répondants ?
4.1.2.3.5 LA CRAINTE DE NE PAS TROUVER UN EMPLOI QUI PLAIT
Pour la génération Y, la crainte de ne pas trouver un emploi qui plait est plus important que
pour les générations précédentes comme a pu le démontrer l’étude de François Pichault et
Mathieu Pleyers. Peut-être est-ce là l’origine de la constatation que beaucoup d’employeurs en
font : cette génération est difficile à fidéliser et a tendance à multiplier les expériences. Selon
Sarah Sladek100
, cette génération est plus à la recherche de sens dans son travail et de la culture
idoine. Les études pour tenter de le démontrer sont toutefois peu nombreuses. Nous avons
toutefois identifié l’étude Cost of Millennial Retention (2013)101
, menée aux Etats-Unis, qui a
identifié les raisons principales des démissions de cette génération : avoir reçu une meilleure
97
PEW RESEARCH (2014), Millenials in Adulthood
98
U.S. CHAMBER OF COMMERCE FOUNDATION (2012), The Millenial Generation Research Review
99
SARAH SLADEK (2014), Knowing Y: Engage the Next Generation Now
100
SARAH SLADEK (2014), Knowing Y: Engage the Next Generation Now
101
http://millennialbranding.com/2013/cost-millennial-retention-study/, consulté le 03/11/2015
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 46
offre (30%), l’impression que leurs objectifs de carrière ne sont pas compatibles avec ceux de
l’organisation (27%), et l’impression d’une absence d’opportunités de carrière (13%). Cette
même étude conclue que les membres de cette génération sont donc plus coûteuses, car il faut
prévoir plus de remplacements et que les remplacements coûtent cher, surtout pour les postes
de managers.
4.1.2.3.6 BESOIN DE CHANGER REGULIEREMENT D’ENVIRONNEMENT
« Ils ont la bougeotte » est une des idées reçues qui circulent à propos de la génération Y.
L’étude de François Pichault et Mathieu Pleyers le confirme. Nous pouvons toutefois nous
demander si ce besoin de changement est vraiment lié à leur génération ou bien à leur jeunesse.
Dans tous les cas, il faut prendre en compte cette différence. Afin de leur permettre de pouvoir
changer d’air au sein de la même organisation, celle-ci pourrait réfléchir à un moyen de
développer les changements de poste, changements d’équipe, changements de technologie
(pour les développeurs) ou même changements d’environnement.
4.1.2.4 L’ETUDE DES EMPREINTES SOCIETALES
Pour autant nul n’est besoin de nier les différences sociétales émergentes qui attendent de pied
ferme les managers d’aujourd’hui. Si la réalité des différences liées strictement aux générations
est comme nous l’avons vu galvaudée et caricaturale, les changements sociétaux existent bien,
et les expériences incongrues des managers se multiplient.
Pour expliquer ces différences, il suffit de sortir un peu de la caricature, prendre de la hauteur
sur les événements. Françis Boyer l’explique très bien102
. Pour lui, les comportements des
individus s’expliquent avant tout par le contexte socio-économique dans lequel ils ont grandi,
qui mêle éducation, milieu social et contexte économique.
Années 1920 : l’empreinte tradition
Education Entreprise
Traditionnelle (maintien et reproduction
des traditions et des usages)
Paternaliste (taille humaine, artisanat,
entraide)
Années 1940 : l’empreinte force
Education Entreprise
102
FRANÇIS BOYER (2015), Du management intergénérationnel à l’innovation managériale
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 47
Force (guerres mondiales, crise
financière…)
Directif (production de masse, taylorisme…)
Années 1960 : l’empreinte ordre
Education Entreprise
Ordre (reconstruction gaulliste,
développement de l’Etat Providence…)
Bureaucratique (les cadres issus des grandes
écoles prescrivent le travail)
Années 1980 : l’empreinte succès
Education Entreprise
Réussite (ascension sociale possible,
recherche du plaisir de la vie souvent
matériel caractérisé par la propriété…)
Stratégique (mondialisation)
Années 2000 : l’empreinte bien-être (Génération Y)
Le futur devient plus incertain, poussant les individus à essayer de profiter du bonheur
rapidement, plutôt que d’en espérer plus à l’avenir. La précarisation pousse à rechercher
l’équilibre travail / temps personnel qui tend à changer la perception de la réussite, moins axée
sur la propriété et plus sur l’atteinte du bonheur.
Développement parallèle de la méfiance envers les institutions (économiques, politiques, de la
famille).
Education Entreprise
Bien-être (aspiration à l’épanouissement
maintenant, plus qu’à un avenir futur
incertain, méfiance envers les institutions,
la réussite devient associée à
l’épanouissement personnel)
Collaboratif (besoin du développement de
l’intelligence collective, combler les attentes
bien-être des individus)
Années 2010 : l’empreinte liberté (Génération Y)
Le monde en perpétuel mouvement pousse à s’affranchir et à se remettre continuellement en
question, et à profiter du moment présent, étant donné que l’avenir est incertain. Développement
de l’autonomie et de la flexibilité. D’où les demandes des salariés qui se multiplient sur la
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 48
flexibilité des horaires, le télétravail… Des attentes qui ne sont pas sans rappeler le
développement de l’entreprise libérée de Jean-François Zobrist.
Education Entreprise
Liberté Co-responsable
Cette vision a le grand avantage d’éviter de tomber dans la caricature, dans la recherche des
explications des changements sociétaux en cours. Le graphique ci-dessous, issu du site Internet
de Françis Boyer, illustre ainsi l’évolution des différentes tendances, qui s’entremêlent dans la
société.
Figure 19 Emergence des empreintes sociétales en France depuis 1940, par Françis Boyer103
103
http://www.innovationmanageriale.com/concepts/du-management-intergenerationnel-a-linnovation-
manageriale/, consulté le 10/08/2015
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 49
5 CONCLUSION
Nous avons montré à quel point l'engagement est difficile à identifier, à appréhender et à
mesurer. L’engagement présente une caractéristique singulière, qui peut représenter un
véritable challenge pour le management : il ne peut ni se décréter ni s’acheter, au grand dam
des organisations dépensant en pure perte des millions pour offrir le meilleur environnement de
travail possible à leurs collaborateurs.
L’engagement ne se développe chez les collaborateurs que lorsque ceux-ci en ont la capacité.
Il leur faut également trouver des raisons profondes, intrinsèques aux méthodes de management.
Cela passe notamment par une certaine liberté pour le collaborateur et par le fait qu'il sache
comment s’engager, en donnant du sens au travail. Cette démarche demande une forte volonté
politique qui, si elle est effectuée correctement, permettra d’assurer une croissance sereine et
facilitera la prospérité des organisations.
Nous avons également proposé une méthode et un modèle complet afin de développer
l'engagement des salariés dans leurs organisations. Si les différentes études citées dans notre
document illustrent la puissance des retombées d'un management permettant le développement
de l'engagement, les expériences des organisations modèles ont également montré que le
processus, mené jusqu’à son terme, peut prendre des années.
Dans notre étude, le développement de cet engagement est en effet le levier le plus efficace
pour répondre globalement aux objectifs exprimés par les organisations. Les résultats de la
mesure de l’engagement de ses collaborateurs sont apparus modérément positifs. Le
développement de l'engagement de ses collaborateurs passe à court terme par l'évolution de la
satisfaction de ses salariés. Pourront ensuite être mis en œuvre des leviers puissants de
développement de l’engagement, que nous avons détaillés dans nos recommandations
opérationnelles et qui permettront à notre client d’accroitre la productivité et la créativité de ses
hommes et femmes, d’attirer de nouveaux talents, de les fidéliser, de développer leurs
compétences et, in fine, d’améliorer les performances de l’organisation.
JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 50
6 BIBLIOGRAPHIE
ABIGAIL HAZLETT, DANIEL C. MOLDEN, AARON M. SACKETT (2011), Hoping for the Best or
Preparing for the Worst? Regulatory Focus and Preferences for Optimism and Pessimism in
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AFDEL/APOLLO (2013), Baromètre RH
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Making Strategy
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APEC (2015), La mobilité externe des cadres
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BAKKER, A.B., & LEITER, M.P (2010), Work engagement: A handbook of essential theory and
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BRUCE HOROVITZ, (2012), After Gen X, Millennials, what should next generation be?
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browsing behaviors through Weibull analysis of dwell time
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Employee Engagement: A Report to Government
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JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 51
DAN ARIELY, URI GNEEZY, GEORGE LOEWENSTEIN, NINA MAZAR (2005), LARGE STAKES AND
BIG MISTAKES
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DAVE ULRICH ET WAYNE BROCKBANK (2005), The HR Value Proposition
DAVID AUTISSIER ET FREDERIC WACHEUX (2006), Manager par le sens
DILLON ET FLOOD (1992)
DRH D’UN GROUPE DE CONSEIL EN RH, lors d’une réunion d’un groupe de travail ANDRH, cité
par Odile Dewachter (2010), Comment favoriser l’engagement des cadres
EDWARD DECI (1969)
EDWARD DECI ET DEUX DE SES COLLEGUES (1999), dans une méta-analyse de 128
expérimentations
ELSA BELLIATO, CAROLINE CHAMPAGNE, ISABELLE PRIM-ALLAZ ET MARTINE SEVILLE (2010),
L'effet de levier de la confiance sur l'engagement dans l'hypercroissance durable des PME
FEDERAL RESERVE BANK OF BOSTON (2005), Working Paper No. 05-11, 23/07/2005, dont un
résumé peut être trouvé dans “What’s the Value of a Big Bonus?” New York Times 20/11/2008
FRANÇIS BOYER (2015), Du management intergénérationnel à l’innovation managériale
FRANÇOIS PICHAULT ET MATHIEU PLEYERS (2010), Pour en finir avec la génération Y…
Enquête sur une représentation managériale
GLUCKSBERG SAM (1962), Journal of Experimental Psychology, The influence of strength of
drive on functional fixedness and perceptual recognition, Vol 63(1), Jan 1962, 36-41
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http://fortune.com/2013/04/19/marissa-mayer-breaks-her-silence-on-yahoos-telecommuting-
policy/, consulté le 01/12/2015
http://www.gallup.com/services/169328/q12-employee-engagement.aspx, le 26/09/2015
http://www.pewresearch.org/fact-tank/2015/01/16/this-year-millennials-will-overtake-baby-
boomers/ (2015), consulté le 8 août 2015
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Développer l'engagement dans les organisations modernes

  • 1. DEVELOPPER L’ENGAGEMENT DANS LES ORGANISATIONS MODERNES MEMOIRE par Julien Foulquier https://fr.linkedin.com/in/julienfoulquier Décembre 2016
  • 2. SOMMAIRE 1 INTRODUCTION 3 1.1 Préface 3 1.2 Contexte du livre blanc et objectifs 3 1.3 Copyright 4 2 L’ENGAGEMENT 5 2.1 Cela ne se limite pas à la motivation, à l’implication ou à la satisfaction 5 2.2 L’engagement, c’est… 6 2.3 Une prise de conscience émergeante 7 2.4 Les avantages attendus du développement de l’engagement 8 3 COMMENT DEVELOPPER L’ENGAGEMENT 12 3.1 Quelques fausses idées 12 3.1.1 Sur la rémunération 12 3.1.2 Sur la carotte et le bâton 16 3.2 Créer les conditions préalables pour obtenir la satisfaction 16 3.2.1 Environnement de travail 16 3.2.2 Sécurité et perspectives 17 3.2.3 La rémunération 17 3.3 La satisfaction, un objectif intermédiaire 17 3.3.1 Les différences fondamentales entre la satisfaction et l’engagement 18 3.3.2 Le piège de la satisfaction comme objectif en soi 18 3.4 L’employé doit disposer de ressources personnelles adéquates 19 3.5 Développer l’engagement 20 3.5.1 Donner du sens à leur action 20 3.5.2 Avoir de l’impact 22 3.5.3 Permettre l’autonomie : les 4 « T » 24 3.5.4 Encourager le développement personnel 27 3.5.5 Se sentir connecté 29 3.5.6 Développer la confiance 32 3.6 Synthèse du modèle de l’engagement 35 3.7 Analyse systémique du développement de l’engagement 36 4 LA GENERATION Y OU « MILLENNIALS » 38 4.1.1 Une définition encore floue 38 4.1.2 Les spécificités réelles de la génération Y 40 5 CONCLUSION 49 6 BIBLIOGRAPHIE 50 7 TABLE DES FIGURES ET TABLEAUX 56
  • 3. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 3 1 INTRODUCTION 1.1 PREFACE En besoin croissant de talents, confrontées à une concurrence mondiale, les organisations sont aujourd’hui confrontées à la problématique du recrutement, de la fidélisation des talents et de leur engagement dans ses équipes. Véritable clé de voute de la réussite des organisations modernes, l’engagement est aujourd’hui recherché comme le St Graal de beaucoup d’organisations. Certaines y mettent des moyens considérables, avec des résultats parfois mitigés. D’autres le considèrent comme une chimère, l’engagement étant à leurs yeux uniquement du fait du collaborateur et non de l’organisation. Mais qu’est-ce que réellement cet engagement ? Comment le développer réellement ? Qu’en disent les dernières avancées des sciences sociales ? L’arrivée de la nouvelle génération dite « Y » chamboule-t-il la donne ? Et qu’en attendre ? Ce livre blanc tente de répondre à toutes ces interrogations, en concluant par une analyse systémique complète permettant d’appréhender l’implication de l’ensemble des leviers. 1.2 CONTEXTE DU LIVRE BLANC ET OBJECTIFS Dans le cadre du Cycle Supérieur de Management de l’EDHEC (équivalent Master II) que j’ai pu suivre en parallèle de mon travail 2015, il m’a été donné l’opportunité de réaliser un mémoire sur ce sujet. Le livre blanc est le résultat de mes recherches et de mes convictions, qui guident aujourd’hui mon style managérial et ma communication. J’ai également eu la grande chance de pouvoir m’immiscer au sein de l’entreprise CrossKnowledge - que je remercie encore - basée à Sophia-Antipolis, afin de transformer les travaux de mes recherches en plan d’action « sur le terrain ». Ce livre blanc n’intègre pas le résultat de mes travaux sur le terrain, qui resteront confidentiels. Ce livre blanc a pour objectif de faire un état complet et structuré des connaissances actuelles et réelles sur le développement de l’engagement. Il se destine :  Aux professionnels de tous les secteurs d’activité.  A toutes les organisations, principalement celles confrontées à une forte concurrence.  A tous ceux qui cherchent à comprendre le fonctionnement des acteurs au sein de leur organisation.
  • 4. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 4 1.3 COPYRIGHT Tous les éléments présentés dans ce livre blanc peuvent être reproduits, sur demande, dès lors qu’ils indiquent la source et proposent un lien vers le document d’origine.
  • 5. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 5 2 L’ENGAGEMENT Demandez à 10 personnes ce qu’est l’engagement des salariés, vous obtiendrez 10 réponses différentes. D’autant plus qu’il existe dans le dictionnaire beaucoup de mots proches, pour ne pas dire synonymes aux yeux des managers : implication, motivation, esprit d’initiatives ou encore satisfaction des employés. Il est donc important de définir exactement ce qu’est l’engagement, de comprendre les éventuelles différences avec les autres termes, avant d’aller plus loin dans nos réflexions. 2.1 CELA NE SE LIMITE PAS A LA MOTIVATION, A L’IMPLICATION OU A LA SATISFACTION Commençons par les mots proches. La motivation, de la famille étymologique « mouvoir », est une « action des forces (conscientes ou inconscientes) qui déterminent le comportement (sans aucune considération morale)1 ». La motivation peut aider l’engagement à prospérer, mais elle n’en est qu’une partie et ne suffit pas à elle seule. L’implication quant à elle est très proche de l’engagement, si bien que les deux termes sont souvent confondus ou considérés de manière homonymique. S. Baggio et P.E. Sutter2 nous éclairent toutefois sur la différence : selon eux, dans ce contexte managérial, l’engagement sous-entend une idée de contrepartie : quand on s’engage, on attend quelque chose en retour. Tandis que l’implication semble dépourvue de conditionnalité et est motivée par le souhait intrinsèque de l’employé. Une distinction confirmée par les travaux de de Macey, W.H. & Schneider B3 . Nous éviterons également un amalgame très répandu, celui de mélanger l’engagement des salariés avec leur niveau de satisfaction. Comme nous le rappellent Tracy Maylett et Paul Warner4 , la satisfaction est nécessaire au développement de l’engagement, mais elle ne 1 Le Petit Robert 2014 2 S. BAGGIO ET P.E. SUTTER (2008), Neuf salariés sur dix impliqués par leur travail – Etude sur 3000 salariés français 3 MACEY, W.H., & SCHNEIDER, B. (2008), The meaning of employee engagement. Industrial and Organizational Psychology 4 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement
  • 6. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 6 l’entraine pas, et il est très possible d’obtenir leur satisfaction sans leur engagement, à coups de dépenses de confort par exemple. Une différenciation confirmée par d’autres recherches5 . 2.2 L’ENGAGEMENT, C’EST… Selon Wikipedia La version anglaise de Wikipedia définit ainsi l’engagement6 : « L’engagement est une propriété de la relation entre une organisation et ses employés. Un employé engagé est totalement absorbé et enthousiasmé par son travail et prend des initiatives afin d’améliorer la réputation de l’organisation et ses intérêts. ». Selon Gallup La définition de Gallup est dans le même esprit : « Un haut niveau de connexion émotionnel qu’un employé ressent pour son organisation, qui le pousse à produire un effort discrétionnaire supplémentaire ». Selon Tracy Malylett et Paul Warner7 de DecisionWise « L’engagement est un état émotionnel dans lequel nous nous trouvons passionné, énergique, et impliqué dans notre travail. Nous investissons le meilleur de nous-mêmes – notre cœur, notre esprit, notre intellect et nos mains – dans le travail que nous réalisons. ». Selon Wilmar B. Schaufeli Dans son modèle sur l’engagement au travail, Wilmar B. Schaufeli8 définit l’engagement comme un état d’esprit positif, accompli et dédié au travail caractérisé par la vigueur, le dévouement et l’absorption. Dans ce modèle, la vigueur est caractérisée par l’énergie et la résilience ; le dévouement par l’implication dans son travail, son sens, l’enthousiasme et le challenge ; tandis que l’absorption n’est autre que de la forte concentration, de celle qui fait passer le temps rapidement. En résumé, les employés engagés déborderaient d’énergie et d’enthousiasme. 5 MACEY, W.H., & SCHNEIDER, B. (2008), The meaning of employee engagement. Industrial and Organizational Psychology 6 https://en.wikipedia.org/wiki/Employee_engagement, consulté le 12/08/2015 7 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement 8 WILMAR B. SCHAUFELI (2002)
  • 7. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 7 En synthèse… De ces définitions, nous pouvons retenir l’état émotionnel qui habite le salarié engagé, et en conséquence duquel il déploie les fameux efforts discrétionnaires recherchés par les organisations en vue d’atteindre des performances supérieures aux autres. 2.3 UNE PRISE DE CONSCIENCE EMERGEANTE Au-delà de la simple définition de ce qu’est l’engagement, il nous a semblé important de démontrer que l’intérêt porté à l’engagement des collaborateurs est relativement nouveau. Si l’on se réfère à l’évolution de l’intérêt de la recherche pour « Employee Engagement » sur Google, nous pouvons voir que la progression est soutenue depuis 2005. Nous pouvons supposer que les organisations tentent à présent de s’approprier cette problématique. Figure 1 Evolution de l'intérêt de la recherche "Employee Engagement" par Google Trends Cet indice, basé sur la recherche des mots clés « Employee Engagement » ou tout autre expression ou suite de mots jugée similaire par Google, est en progression constante depuis 2007, et a augmenté de près de 30% entre 2012 et 2015 (562 de janvier 2012 à août 2012 contre 728 sur les mêmes mois de 2015), et encore de 8% entre 2014 et 2015. Nous pouvons noter que dans le même temps, les expressions « Employee Satisfaction » ou « Employee Motivation » ont décru dans les mêmes proportions que la progression de « Employee Engagement ».
  • 8. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 8 2.4 LES AVANTAGES ATTENDUS DU DEVELOPPEMENT DE L’ENGAGEMENT Afin de vérifier que l’engagement réponde à la problématique posée, faisons le tour des études sérieuses sur le sujet ayant eu pour objectif de corréler les objectifs visés avec le développement de l’engagement. Un meilleur recrutement par les pairs Répondant ainsi directement à l’une des problématiques immédiates des organisations, une enquête d’IPSOS de 20069 confirme que 67% des salariés engagés recommanderaient à un proche d’y travailler. En plus de diminuer les coûts de recrutement, d’accélérer les processus et d’attirer les talents, soulignons également l’impact positif sur l’image de l’entreprise, qu’il s’agisse de l’image renvoyée au public comme de l’image de la marque recruteur plus spécifiquement. Moins de turnover et moins d’absentéisme De la même manière que le recrutement, le départ d’un collaborateur coûte également cher aux organisations. Perte de savoir-faire et de connaissance, pour lesquels l’organisation a investi du temps et qui va profiter à une autre organisation, sans compter le coût du remplacement, de la formation et de l’intégration d’un remplaçant. Les organisations ont donc tout intérêt à fidéliser leurs talents le plus longtemps possible. Dans cette optique, une étude de 200410 a ainsi confirmé que les salariés engagés sont 87% moins susceptibles de quitter leur organisation. Mais qui dit moins susceptibles, ne dit pas forcément démissions effectives mais seulement une absence de volonté de quitter l’organisation au moment où la question est posée au collaborateur. Nous pouvons également citer une enquête de Towers Perrin11 qui conclut par exemple que 66% des employés engagés n’ont aucune intention de quitter leur employeur, contre 12% des non engagés. Il faut toutefois comparer ce qui est comparable. En rentrant dans le détail, Gallup indique12 que dans les secteurs structurellement à fort turnover, les 25% d’organisations obtenant les meilleurs résultats connaissent un turnover de 27% moins important que les 25% 9 IPSOS MORI (2006), Improvement and Development Agency, Lessons in Leadership 10 CORPORATE LEADERSHIP COUNCIL & CORPORATE EXECUTIVE BOARD (2004), Driving Performance through Employee Engagement : a quantitative analysis of effective engagement strategies 11 TOWERS PERRIN, 2004 European Talent Survey: Reconnecting with Employees: Attracting, Retaining, and Engaging. 12 http://www.gallup.com/services/169328/q12-employee-engagement.aspx, le 26/09/2015
  • 9. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 9 d’organisations obtenant les plus mauvais résultats. Un bénéfice qui monte à 67% dans les secteurs connaissant structurellement un turnover moins important. Secteurs à turnover structurellement importants Les plus mauvais résultats Gallup Q12 Les meilleurs résultats 25% 25% 25% 25% De la même manière, le quart des organisations obtenant les meilleurs résultats au test Q12 de Gallup connaissent ainsi 37% moins d’absentéisme. Une analyse confirmée par une étude13 soulignant l’importante corrélation entre le turnover et l’engagement des salariés. Moins de présentéisme Problème de beaucoup d’organisations modernes, le présentéisme désigne le fait d’être physiquement présent sur son lieu de travail, mais sans y travailler. Difficile à identifier et plus encore à mesurer, ce gaspillage a été évalué par une enquête de salary.com et AOL14 qui ont évalué que les salariés gaspillaient ainsi 2 heures par jour en moyenne de travail, soit un coût annuel estimé à plus de 750 milliards de dollars aux Etats-Unis. Une meilleure qualité Sur son site Internet15 , Gallup annonce que les entreprises engagées (meilleur quart) connaissent 41% de moins de défauts de qualité que les entreprises dont les salariés sont peu engagés (dernier quart). De meilleurs résultats financiers 13 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement 14 SALARY.COM ET AOL (2008) (Source Business Digest n° 196 – mai 2009) 15 http://www.gallup.com/services/169328/q12-employee-engagement.aspx, le 26/09/2015 27% de turnover en moins dans les 25% d’entreprises obtenant les meilleurs résultats Figure 2 Gain de turnover sur les secteurs à turnover structurellement importants
  • 10. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 10 L’amélioration des résultats de l’entreprise, c’est bien l’objectif final recherché. Des études confirment ce que nous pouvions présupposer à la lecture de tous ces bénéfices. Par exemple, des chercheurs anglais ont démontré que des entreprises avec un plus faible engagement des salariés gagnent 32,7% de moins que celles avec un meilleur engagement des salariés, et croissent 19,2% plus lentement16 . Une autre étude17 datant de 2006 a tenté directement de corréler l’engagement des salariés avec les résultats financiers de leurs employeurs, se basant en l’occurrence sur leur résultat d’exploitation. Selon les résultats de cette étude, le premier groupe d’entreprises, constitué d’entreprises dont les salariés sont engagés, a constaté une hausse de 19,2% du résultat d'exploitation. Le deuxième groupe, quant à lui, n'a pu que déplorer une baisse de 37,7 %. Synthèse des bénéfices de l’engagement Nous pouvons nous rendre compte ici que l’engagement des salariés peut apporter beaucoup aux organisations. Bien que les bases de comparaison et les méthodologies utilisées pour obtenir ces données soient hétérogènes, nous proposons ci-après une synthèse des avantages documentés. Figure 3 Gain espéré entre des organisations composées de collaborateurs engagés comparé aux moins engagés * : nombre de défauts constatés dans les chaines de fabrication 16 D. MACLEOD ET N. CLARKE (2009), Engaging for Success: Enhancing Performance Through Employee Engagement: A Report to Government 17 TOWERS PERRIN (2006) 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% Recrutement par les pairs Turnover Absentéisme Qualité (nb défauts*) Bénéfices entreprise Croissance entreprise
  • 11. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 11 La question centrale posée est donc celle de l’engagement des équipes. Comment le développer ?
  • 12. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 12 3 COMMENT DEVELOPPER L’ENGAGEMENT 3.1 QUELQUES FAUSSES IDEES Avant d’aller plus en détail sur le développement de l’engagement, il est important de faire le point sur de fausses idées, pourtant très ancrées dans l’esprit des managers d’aujourd’hui. Des idées qu’il nous faut battre en brèche afin de poursuivre la réflexion. 3.1.1 SUR LA REMUNERATION De nombreuses études se sont penchées sur la question de l’impact de la rémunération sur l’engagement des salariés. Leurs résultats démontrent l’impact très limité de l’évolution de la rémunération sur l’engagement. Nous le savons depuis longtemps : des premières expérimentations sur des animaux et la nourriture ont été publiées en 194918 pour valider cette hypothèse. Une théorie confirmée par d’autres études depuis19 , sur des humains cette fois. La motivation par le monétaire peut dans certains cas avoir un effet très court terme, qui s’estompe rapidement et n’a aucun impact sur le plus long terme. La rémunération peut entrainer une baisse de la motivation intrinsèque Voyons ensemble une parfaite illustration. Si vous pouviez retourner dans les années 1990, et que vous auriez eu à deviner laquelle de ces approches permettrait d’imposer une encyclopédie : 18 HARLOW (1949) 19 EDWARD DECI (1969)
  • 13. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 13 Figure 4 Encyclopédie : modèle rémunéré contre modèle libre Depuis, Microsoft Encarta est tombé dans l’oubli, tandis que Wikipedia réunirait sans problème des contributeurs, qui y passent parfois plusieurs dizaines d’heures par semaine, sans compensation financière, juste pour la beauté du geste et la motivation du résultat au bénéfice de la société ? Et l’exemple n’est pas isolé, le monde de l’Open Source étant là pour nous donner quantité d’autres exemples : Mozilla Firefox, Linux, standards Internet… Leur motivation ? Interrogés à ce sujet, ces contributeurs mettent en avant le challenge de résoudre une problématique et la volonté de faire un cadeau à la communauté20 . Autre exemple saisissant : dans une étude21 , des enfants que l’on récompense pour faire des dessins passent non seulement moins de temps à faire des dessins que les enfants qui ne bénéficient d’aucune récompense ; mais deux semaines après, le groupe d’enfants ayant eu des récompenses démontrent toujours un intérêt significativement moins important pour le dessin que le groupe qui n’en a pas reçu. Depuis, de nombreuses expériences similaires chez des adultes ont démontré des résultats similaires, notamment une grande méta-analyse de 199922 . Des résultats tellement significatifs que l’on peut raisonnablement en conclure, comme l’ont fait les auteurs de cette méta-analyse, que « l’étude approfondie des effets des récompenses dans 128 expérimentations amènent à la 20 J. FELLER, B. FITZGERALD, S. HISSAM, ET K. R. LAKHANI (2005), Why Hackers Do What They Do: Understanding Motivation and Effort in Free/Open Source Software Projects 21 MARK LEPPER, DAVID GREENE ET ROBERT NISBETT (1973), Undermining Children’s Intrinsic Interest with Extrinsic Rewards: A Test of the ‘Overjustification’ Hypothesis,” Journal of Personality and Social Psychology 28, no. 1 : 129-37 22 EDWARD DECI ET DEUX DE SES COLLEGUES (1999), dans une méta-analyse de 128 expérimentations Grande entreprise profitable Ecrit par experts reconnus Chefs de projet Microsoft Encarta Supervisé par tout le monde / personne Ecrit par Inconnus Aucun chef de projet Wikipedia
  • 14. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 14 conclusion que des récompenses tangibles ont tendance à avoir un effet significativement négatif sur la motivation intrinsèque ». La rémunération peut entrainer une baisse des performances Mais l’impact négatif des récompenses monétaires ne s’arrête pas là. Nous pourrions également citer cette étude en Inde23 où le groupe le plus généreusement rémunéré est celui qui a obtenu les moins bonnes performances. La Federal Reserve américaine elle-même a confirmé le constat, en déclarant, à l’issue de ses expérimentations, que « dans huit des neuf tâches que nous avons examinées lors de trois expérimentations, de plus grosses récompenses ont mené à de plus mauvaises performances »24 . La rémunération peut entrainer une baisse de la créativité De la même manière, des études ont démontré l’impact négatif de la motivation extrinsèque que représente la récompense en matière de créativité. L’exemple de la célèbre étude dite « de la bougie »25 dans laquelle un individu doit trouver une solution pour fixer une bougie sur un mur en utilisant le matériel fourni, a démontré que les participants ne bénéficiant pas de récompense faisaient preuve de plus de créativité pour résoudre le problème. La rémunération peut entrainer une addiction Rémunérer spécifiquement un employé pour une tâche donnée, c’est également le meilleur moyen pour s’assurer que ledit employé n’exécute plus jamais cette même tâche sans contrepartie, nous enseigne Daniel Pink26 . Et cette même prime d’être réclamée, ou tout du moins attendue, la prochaine fois que l’employé l’exécutera. Le versement de cette prime ne sera alors plus vécu comme un bonus, mais comme un dû, un statu quo. Là encore, de nombreuses enquêtes sont venues illustrer ce phénomène27 . Mais cela va plus loin, des études 23 DAN ARIELY, URI GNEEZY, GEORGE LOEWENSTEIN, NINA MAZAR (2005), Large Stakes and Big Mistakes 24 FEDERAL RESERVE BANK OF BOSTON (2005), Working Paper No. 05-11, 23/07/2005, dont un résumé peut être trouvé dans “What’s the Value of a Big Bonus?” New York Times 20/11/2008. 25 GLUCKSBERG SAM (1962), Journal of Experimental Psychology, The influence of strength of drive on functional fixedness and perceptual recognition, Vol 63(1), Jan 1962, 36-41 26 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us 27 ANTON SUVOROV, Addiction to Rewards, présentation lors de l’European Winter Meeting of the Econometric Society le 25 octobre 2003. Mimeo (2003) disponible à l’adresse http://www.cemfi.es/research/conferences/ewm/Anton/addict_new6.pdf.
  • 15. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 15 ayant montré la forte proximité entre l’addiction à une drogue, et l’addiction aux récompenses financières : du fonctionnement du cerveau au relâchement de dopamine28 . Troublant ! La rémunération peut entrainer une déviance des comportements Dans le même phénomène de contractualisation des tâches, Daniel Pink29 nous fait également prendre conscience qu’une bonne action, comme le don du sang, est significativement réduite lorsqu’on introduit une récompense financière : 52% d’un groupe a accepté de donner son sang sans contrepartie, alors qu’ils n’étaient plus que 30% après la mise en place d’une rémunération pour les donneurs. Dans le même esprit, une étude israélienne30 a démontré que l’introduction de sanction financière en cas de retard pour venir chercher son enfant à l’école n’entrainait aucune amélioration de la situation, et avait même eu tendance à l’aggraver. Seul l’attachement des parents au professeur a pu dans ce cas réduire significativement les retards. La rémunération peut entrainer un court-termisme Les entreprises poursuivant des objectifs financiers à court-terme, généralement le trimestre, sont également les entreprises qui obtiennent les moins bonnes performances à plus long terme. Enseignements sur la rémunération Les enseignements concernant l’impact de la rémunération et plus spécifiquement sur la récompense financière (ex prime) sur l’engagement sont multiples. Si cette technique peut fonctionner avec des tâches dites algorithmiques, de type « Si […] Donc il faut […] » qui ont bercé les générations précédentes (taylorisme), elles deviennent souvent contreproductives lorsqu’il s’agit d’encourager du travail plus intellectuel et heuristique. Nous comprenons maintenant que la financiarisation d’un certain nombre de tâches les transforment en travail et, au-delà de cela, en relation contractuelle, ce qui va à l’encontre de la recherche de l’engagement. Nous comprenons également que l’enjeu représenté par une récompense – financière à fortiori –, réduit le périmètre de réflexion des individus en détournant leur concentration sur cette récompense. 28 BRIAN KNUTSON (2001), Behavioral Addictions : Do They Exist ? 29 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth about What Motivates Us 30 URI GNEEZY ET ALDO RUSTICHINI (2000), A Fine Is a Price, publié dans le Journal of Legal Studies 29
  • 16. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 16 3.1.2 SUR LA CAROTTE ET LE BATON Encore prégnante dans les pratiques du management d’aujourd’hui, la théorie de la carotte et du bâton a eu ses heures de gloire. Et pour cause : cela a bien fonctionné pendant des décennies. Illustration de cette pensée, le Taylorisme veut que des procédures très précises soient communiquées aux salariés, qu’ils soient récompensés s’ils les exécutent parfaitement et dans les conditions voulues, et qu’ils soient punis lorsque ce n’est pas le cas, le tout sous une surveillance rapprochée. Une approche basique, tellement simple qu’elle a l’avantage d’être comprise par tout le monde. Hors, nous savons aujourd’hui que si cette tâche fonctionne avec des tâches algorithmiques, elles ne fonctionnent plus avec des tâches heuristiques, qui demandent plus de créativité, de travail intellectuel et d’autonomie. C’est pourtant dans cette direction que la société tend, les tâches algorithmiques ayant tendance à être automatisées, tandis que l’univers des services, parfait représentant des tâches heuristiques, est devenu prépondérant. 3.2 CREER LES CONDITIONS PREALABLES POUR OBTENIR LA SATISFACTION Avant de parler de développement de l’engagement, différentes études que nous allons développer nous apprennent que nous devons tout d’abord acquérir la satisfaction préalable de l’employé. Purement transactionnelle, la satisfaction peut être achetée grâce à un environnement de travail approprié, de la sécurité (mentale et physique), des perspectives, et par une rémunération suffisante. A la condition, bien entendu, que l’état d’esprit de l’employé soit propice. 3.2.1 ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL Des études récentes nous éclairent sur l’importance grandissante que les employés accordent à leur environnement de travail. Par exemple, l’étude 2015 de Paris Work Place 201531 nous apporte de nombreux éclairages. Citons notamment :  88% des cadres interrogés jugent que leur bureau influe sur leur bien-être personnel.  80% d’entre eux sur leur motivation.  75% d’entre eux sur leur efficacité. 31 PARIS WORK PLACE 2015 (2015), Les cadres franciliens jugent leurs bureaux
  • 17. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 17  80% estiment que leurs bureaux ont un impact sur l’image et la réputation de l’entreprise.  74% sur la fierté des salariés.  73% sur le recrutement de nouveaux talents.  72% sur la fidélisation des salariés. 3.2.2 SECURITE ET PERSPECTIVES Libérer l’esprit du collaborateur : pour cela, il ne faut pas que le collaborateur se demande de quoi son lendemain sera fait au sein de l’organisation. S’il ne peut s’imaginer pouvoir rester longtemps dans l’organisation, l’engagement ne pourra pas être développé32 . De la même manière, il doit pouvoir se projeter des perspectives d’évolution. Bref, les collaborateurs doivent pouvoir être émotionnellement sécurisés. 3.2.3 LA REMUNERATION Le troisième pilier des facteurs d’hygiène est la rémunération. Les organisations doivent offrir des niveaux de rémunération compétitifs par rapport au marché, afin que le niveau de rémunération ne devienne pas un facteur d’insatisfaction. 3.3 LA SATISFACTION, UN OBJECTIF INTERMEDIAIRE Les recherches sur l’engagement font consensus : avant même de parler d’un éventuel développement de l’engagement, certaines conditions doivent obligatoirement être remplies. Sans elles, toute tentative de développement de l’engagement se ferait en pure perte. Nous pouvons aisément faire le parallèle avec le restaurant. Si les couverts ne sont pas propres, votre expérience sera négative, et ce peu importe si le plat servi est bon ou non. A l’inverse, si les couverts sont propres, cela n’aura aucune incidence sur votre éventuelle expérience positive. La propreté des couverts est tout simplement une condition obligatoire mais insuffisante. Nous pouvons faire le parallèle avec l’engagement. Afin de développer l’engagement des salariés, ceux-ci doivent avant tout être satisfaits. A contrario de l’engagement, la satisfaction est quant à elle complètement transactionnelle et contractuelle. Elle peut s’acheter ! 32 DAVID AUTISSIER ET FREDERIC WACHEUX (2006), Manager par le sens
  • 18. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 18 3.3.1 LES DIFFERENCES FONDAMENTALES ENTRE LA SATISFACTION ET L’ENGAGEMENT Pour nous aider à mieux comprendre cette distinction, les auteurs de MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement33 nous dressent une liste des différences fondamentales :  La satisfaction est transactionnelle ; l’engagement est transformationnel.  L’organisation a le pouvoir sur la satisfaction ; l’employé et l’organisation partagent une responsabilité 50-50 dans l’engagement. La satisfaction est en ce sens imposée (payée) par l’organisation, tandis que les employés doivent choisir de s’engager.  La satisfaction et la motivation impliquent seulement des sentiments ; l’engagement implique sentiments et action.  La satisfaction permet d’atteindre le bonheur à court terme ; l’engagement est un sentiment à long terme de but, vision, de sentiment d’appartenance, d’accomplissement personnel et collectif.  La satisfaction intervient lorsque les facteurs dits d’hygiène sont remplis ; l’engagement lorsque les employés ont la capacité, les raisons de le faire, la liberté de le faire, et savent comment s’engager.  La satisfaction implique des facteurs d’hygiène, qui ne motivent pas les employés mais, lorsqu’ils sont supprimés, les démotivent ; l’engagement est affaire de cœur, de « tripes », d’esprit.  La relation employeur-employé basée sur la satisfaction est une relation contractuelle dans laquelle chaque partie fait le minimum pour remplir sa partie du contrat ; l’engagement contribue à ce que les employés effectuent les fameux efforts discrétionnaires de bon cœur.  La satisfaction est coûteuse : augmentations de salaires, primes, aménagements de bureau ; l’engagement demande de l’effort.  La satisfaction est une question de survie ; l’engagement est question de prospérité. 3.3.2 LE PIEGE DE LA SATISFACTION COMME OBJECTIF EN SOI A ce petit jeu, de nombreuses organisations tombent dans le piège et confondent engagement et satisfaction. En investissant des sommes considérables pour obtenir la satisfaction de leurs employés, comme par exemple l’installation de complexes sportifs ou de détente, les entreprises 33 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement
  • 19. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 19 pensent développer leur engagement et tombent de leurs nuages quelques années après en ne constatant pas d’amélioration. C’est donc un enseignement important : la satisfaction fait bien partie des éléments indispensables à un futur développement de l’engagement, mais est totalement insuffisante pour le développer. 3.4 L’EMPLOYE DOIT DISPOSER DE RESSOURCES PERSONNELLES ADEQUATES Avant toute chose, nous l’avons évoqué, l’employé « à engager » doit se trouver prêt à l’être, ou prédisposé. Il s’agit d’une condition sine qua non contre laquelle l’organisation ne peut rien. Pour cela, l’employé doit posséder des ressources personnelles propres : Figure 5 Les ressources personnelles nécessaires pour que l'individu soit engageable Ces trois qualités peuvent se résumer par un capital psychologique positif minimum et ont été démontrées comme étant significativement corrélées avec l’engagement au travail34 . Une corrélation confirmée par une étude de 200735 . Par exemple, le sentiment de réaliser un travail de qualité permet à l’engagé de générer ses propres feedbacks positifs, de l’appréciation, de la reconnaissance et, in fine, du succès. De ces traits, nous pouvons assumer que les employés les plus « facilement engageables », développent également cet engagement, cet optimisme et cette générosité à l’effort en dehors 34 BAKKER, A.B., & LEITER, M.P (2010), Work engagement: A handbook of essential theory and research 35 XANTHOPOULOU, D., BAKKER, A.B., DEMEROUTI, E., &SCHAUFELI, W.B. (2007), The role of personal resources in the job demands-resources model Sentiment d'efficacité, estime de soi Optimisme, espoir Résilience Prêt pour l'engagement
  • 20. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 20 du travail, comme par exemple au sein d’une association. Une hypothèse que tendent à confirmer des interviews menées sur des personnes ayant réalisé le test d’engagement UWES (Utrecht Work Engagement Scale). D’autres études indiquent également que les personnes ayant des attitudes positives prennent de meilleures décisions36 , qu’elles sont plus motivées pour atteindre leurs objectifs de carrière37 , sont plus préoccupées par le développement personnel de leurs pairs, résolvent plus efficacement les problèmes38 , sont plus enclines à obtenir de bons résultats dans leurs organisations39 . Rien que ça ! Et nous aurions pu continuer la liste. 3.5 DEVELOPPER L’ENGAGEMENT Une fois les conditions nécessaires au développement de l’engagement réunies, nous pouvons étudier les leviers de son développement. Par chance, la littérature scientifique est plutôt fournie et globalement convergente. Pour développer l’engagement, il faut donc actionner des leviers de plus haut niveau, que nous pourrions communément appeler les ressources professionnelles. L’ensemble des leviers que nous allons développer ont été puisés dans la littérature scientifique, en évitant les modèles lyriques des spécialistes auto-proclamés qui ne basent pas leurs interventions sur des recherches sérieuses. Ces recherches sont cohérentes dans leur très grande majorité, et nous avons puisé majoritairement dans les recherches ou méta analyses de Bakker et Demerouti (2007), Schaufeli et Salanova (2007), Schaufeli et Al40 , Daniel Pink41 , James M. Kouzes et Barry Z. Posner (2012), Tracy Maylett et Paul Warner42 , Herzberg43 , Edward Deci et Richard Ryan. 3.5.1 DONNER DU SENS A LEUR ACTION Donner du sens à son action, c’est le « pourquoi » : un besoin humain fondamental trop souvent oublié et mal compris dans nos sociétés. Mal compris car il est souvent associé ou confondu 36 ALICE M. ISEN AND BARBARA MEANS (1983), The Influence of Positive Affect on Decision-Making Strategy 37 C. M. HAASE, M. J. POULIN ET J. HECKHAUSEN (2012), Happinness as a Motivator : Positive Affect Predicts Primary Control Striving for Career and Educational Goals 38 ABIGAIL HAZLETT, DANIEL C. MOLDEN, AARON M. SACKETT (2011), Hoping for the Best or Preparing for the Worst? Regulatory Focus and Preferences for Optimism and Pessimism in Predicting Personal Outcomes 39 J. BOEHM ET S. LYUBOMIRSKY (2008), Does Happiness Promote Career Success 40 SCHAUFELI ET AL. (2002), Utrecht Work Engagement Scale 41 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us 42 ABIGAIL HAZLETT, DANIEL C. MOLDEN, AARON M. SACKETT (2011), Hoping for the Best or Preparing for the Worst? Regulatory Focus and Preferences for Optimism and Pessimism in Predicting Personal Outcomes 43 HERZBERG (1959), The Motivation to Work
  • 21. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 21 avec la joie de vivre. Pourtant, on peut être heureux de vivre et ne pas ressentir de sens. C’est ce qui se passe si un de nos souhaits immédiat est exaucé. A l’inverse, on peut ressentir le sens de son action, tout en travaillant dans des conditions de travail difficiles44 . Peut-être parce qu’il est impossible de décrire cette sensation unique et propre à chacun. Mais à un certain point, tout le monde est amené à se demander pourquoi il fait ce qu’il est en train de faire, et ne pas avoir de réponse conduit à de mauvaises performances45 . Probablement l’étape la plus importante pour développer l’engagement, c’est aussi une étape dont la responsabilité incombe à 50/50 entre l’employé et l’organisation. L’organisation ne peut donc que créer un environnement où le sens peut se développer. Voici une petite revue de l’environnement à développer pour permettre cet épanouissement. Exprimer une vision partagée Attention ici, cette partie est souvent mal comprise par les managers. Oui, un leader doit exprimer sa vision, et fixer un cap via des objectifs partagés. Toutefois, il ne faut pas s’attendre à ce que les employés se les approprient tels quels. Il faut développer une vision et des objectifs dans lesquels la propre vision des collaborateurs peut s’exprimer en congruence avec celle du leader. Le leader doit ici inspirer en touchant le cœur des gens, en générant des émotions, et ne pas vendre outre-mesure sa vision. Une expérience racontée par Buddy Blanton46 , programs manager for strategy and development à Northrop Grumman Corporation, permet de comprendre qu’une vision partagée et exprimée du leader ne suffit pas, et que le processus que le leader a suivi pour se forger sa propre vision compte beaucoup afin que tout le monde soit « à la même page ». Personne en effet n’apprécie de se voir imposer quoi faire ou où aller, même si le chemin est bon. Les leaders doivent donc passer du temps à discuter avec leurs collaborateurs, à écouter, à échanger sur ce sujet afin que des visions congruentes parmi les employés puissent se propager dans l’organisation. Au final, la vision stratégique doit être exprimée de façon succincte, simple et idéale, de façon à ce que les collaborateurs puissent se projeter dans cette vision et mettre en perspective leur travail ou « mission » dans cette vision à plus long terme. Partage des valeurs 44 ROY F. BAUMEISTERA, KATHLEEN D. VOHSB, JENNIFER L. AAKERC & EMILY N. GARBINSKYC (2012), Some Key Differences Between a Happy Life and a Meaningful Life, publié dans le Journal of Positive Psychology 45 ABE ARKOFF (1994), The Illuminated Life 46 JAMES M. KOUZES ET BARRY Z. POSNER (2012), The Leadership Challenge
  • 22. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 22 Les valeurs de l’organisation doivent être clairement identifiées et communiquées. C’est aujourd’hui le cas de la plupart des organisations. Le piège dans lequel elles tombent le plus souvent est de ne pas s’y conformer. L’authenticité des valeurs affichées est primordiale. Les valeurs ne se décrètent pas, ne s’énoncent pas, mais se démontrent par des actes récurrents. Dans le cas contraire, les salariés perçoivent bien les différences entre les valeurs telles qu’elles ont été communiquées avec les pratiques managériales qu’ils constatent. Cela dévalorise l’organisation, ne permet pas d’aligner les valeurs des collaborateurs avec celles de l’organisation, et peut même donner la sensation d’une manipulation cynique. Donner du sens autrement On n’y pense pas forcément au premier abord, mais il y a également d’autres moyens de donner du sens à l’action des collaborateurs. Car le sens que l’on donne à son action pouvant être différent d’une personne à l’autre comme nous l’avons vu, voici une liste non exhaustive d’éléments qui peuvent permettre de donner du sens :  Le mentorat de nouveaux arrivants.  Participer à la préservation de l’environnement.  Améliorer la santé de ses pairs.  Gagner correctement sa vie afin d’envoyer ses enfants dans de grandes écoles.  Développer un produit innovant. Un lien direct avec l’impact Le chapitre suivant traite en profondeur de l’importance de l’impact. Avant de l’ouvrir, il semble important de faire le lien avec le chapitre en cours. Donner du sens à son action, c’est aussi faire prendre conscience aux équipes de la manière dont leur travail va affecter les personnes qu’elles essaient de servir, au premier chef les clients, car personne n’aime à penser que son travail est futile. L’impact doit exister et avoir un sens ! 3.5.2 AVOIR DE L’IMPACT Le résultat est à l’impact ce que l’objectif est au sens, les deux sont intimement liés. Souvent confondu à tort avec l’intensité de l’effort fourni, l’impact est plus ici une sensation que son travail est utile, produit des résultats et s’inscrit dans la démarche globale de l’organisation. L’impact, c’est le « quoi », c’est ce qui permet de faire la différence, de compter pour quelque
  • 23. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 23 chose. Et c’est exactement ce dont ont besoin les individus afin de se sentir investis d’une mission. Pour arriver à ce stade, les individus ont besoin de :  Sentir des progrès dans leur travail, ce qui nous ramène à la thématique du développement personnel.  Comprendre comment leur travail aide l’organisation à atteindre ses missions (ce qui nous ramène à la vision de l’entreprise). Sans voir l’impact de leur travail, les individus peuvent se sentir inutiles – voire impuissants –. Nous pouvons également noter que l’impact contribue positivement à la sensation d’être reconnu pour son travail, et donc à l’estime de soi… une des ressources personnelles nécessaires pour qu’un employé soit engageable ! Parmi les pistes évoquées par les différents auteurs pour améliorer l’impact ressenti par les individus, nous pouvons noter :  Exploiter la loi dite « law of impact proximity », soit la « loi de la proximité de l’impact », qui stipule que l’impact ressenti est plus important lorsqu’il y a proximité entre le travail réalisé et l’impact. Une loi depuis validée par de sérieuses recherches. Dans l’une d’elles47 , des individus à qui l’on demandait d’assembler des legos pour former des robots ont obtenu de bien meilleures performances lorsque le résultat de leur travail leur était montré pendant plusieurs minutes... même s’ils savaient que ces robots legos seraient démontés quelques minutes plus tard !  Les feedbacks des managers, qui doivent être réguliers. Le salarié doit en effet avoir le sentiment que ses actions sont reconnues dans l’organisation, et qu’on y prête attention. Il est donc primordial de prendre le temps de vivre et consacrer les réussites48  Faire sentir aux individus que leur effort est utile et apprécié : leur donner des signes de reconnaissance. Une étude49 a d’ailleurs démontré que les individus ressentant cela avaient moins d’exigence salariale que les autres et travaillaient plus longtemps. 47 DAN ARIELY (2008), What Managers Can Learn from Legos 48 DAVID AUTISSIER ET FREDERIC WACHEUX (2006), Manager par le sens 49 JAMES HEYMAN ET DAN ARIELY (2004), Effort for Payment : A Tale of Two Markets
  • 24. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 24  Une information partagée à tous les étages de la hiérarchie permet d’améliorer l’engagement. C’est ce qu’ont démontré tour à tour plusieurs études menées par Rodwell et al50 , Dillon et Flood51 , ou encore Caldwell et al52 . Pour conclure, citons une étude qui exprime à elle seule l’étendue que la sensation d’avoir de l’impact peut avoir. Dans une étude de 2007, des employés de call-center à qui une mission de collecte de dons a été confiée ont augmenté les dons récoltés de 171% - excusez du peu -, lorsqu’il leur a été permis de constater par eux-mêmes le résultat de leur collecte, en l’occurrence une simple conversation de 5 minutes avec une personne ayant bénéficié de cette récolte. 3.5.3 PERMETTRE L’AUTONOMIE : LES 4 « T » L’autonomie laissée aux collaborateurs est un élément fondamental pour le développement de l’engagement. Mais précisons ce qu’est à ce stade l’autonomie : c’est la faculté pour un individu de choisir librement ses horaires de travail (Time), ses tâches (Tasks), comment effectuer ses tâches (Technique), et avec qui les effectuer (Team). Ces quatre composantes forment les 4 T de l’autonomie53 . Figure 6 Les 4 "T" de l'autonomie 50 RODWELL ET AL (1998) 51 DILLON ET FLOOD (1992) 52 CALDWELL ET AL (1990) 53 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us Time Tasks Technique Team
  • 25. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 25 L’autonomie a été identifiée comme un des trois piliers de la motivation par Daniel Pink54 , et le plus important des trois piliers des besoins humains par Edward Deci et Richard Ryan55 , dont les travaux font référence. Cette recherche de liberté est prégnante dans notre société, et cette demande est plutôt en expansion, comme nous le démontrerons dans le chapitre sur la génération Y. Nous pouvons nous en apercevoir en constatant la multiplication des changements de carrière, de vocation, qui vont à l’encontre de l’intérêt financier des concernés, ou de la multiplication des personnes souhaitant travailler pour leur propre compte. Pour s’en convaincre, des expériences à grande échelle ont déjà prouvé l’incroyable efficacité de l’autonomie. Citons-en une : 360 petites entreprises américaines étudiées, dont la moitié a laissé de l’autonomie à leurs collaborateurs, et l’autre moitié a fonctionné en mode « contrôle » avec une direction « top-down ». Le résultat ? Les entreprises qui ont misé sur l’autonomie ont crû quatre fois plus vite que le groupe « contrôle » et ont connu 66% de turnover en moins56 ! Time : le choix des heures de travail Plusieurs recherches et expérimentations récentes tendent à démontrer l’intérêt que peut avoir un employeur à laisser une latitude dans le choix du temps à ses collaborateurs, vécue comme une véritable marque de confiance, une reconnaissance et un avantage certain. Nous pouvons citer l’expérience récente de la chaine américaine Best Buy, ayant introduit le programme ROWE (Results Only Work Environment), soit « Seul le résultat compte ». Chaque individu a la possibilité de travailler quand il le souhaite, d’où il le souhaite, tant que le travail est fait. Développé par Cali Ressler et Jody Thompson57 , le programme a obtenu des résultats très positifs pour Best Buy : HBR fait état d’une économie de 2,2 millions de dollars d’économies en trois ans. En date de mars 2013, 40 autres organisations auraient déjà suivi cette voie58 . Au global, la productivité grâce au programme aurait augmenté de 35%, le turnover serait nettement abaissé, et les employés auraient arrêté de compté leurs heures59 . Tasks : le choix des tâches 54 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us 55 EDWARD L. DECI ET RICHARD M. RYAN (2008), Facilitating Optimal Motivation and Psychological Well-Being Across Life’s Domains 56 PAUL P. BAARD, EDWARD L. DECI, ET RICHARD M. RYAN (2004), Intrinsic Need Satisfaction: A Motivational Basis of Performance and Well-Being in Two Work Settings 57 CALI RESLER ET JODY THOMPSON (2010), Why Work Sucks and How to Fix It : The Results-Only Revolution 58 https://hbr.org/2013/03/goodbye-to-flexible-work-at-be/, consulté le 05/12/2015 59 TAMARA J. ERICKSON (2008), Task, Not Time: Profile of a Gen Y Job (HBR)
  • 26. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 26 Il s’agit ici d’impliquer les collaborateurs en leur laissant une latitude pour choisir les tâches qu’ils vont exécuter. L’illustration la plus célèbre de cette politique est la fameuse politique des 20% de Google, où les employés peuvent choisir librement les projets sur lesquels ils travaillent durant cette période, à la seule condition de montrer ce qui aura été réalisé à la fin. Si elle est la plus célèbre, Google n’est toutefois pas la seule entreprise à avoir tenté cette approche. Nous pouvons citer 3M par exemple, ou encore Atlassian qui, après avoir introduit cette démarche, l’a renforcée à plusieurs reprises face aux excellents résultats. Technique : le choix du « comment » Laisser l’autonomie des individus sur le « comment », c’est l’antithèse du taylorisme. Pourquoi donc remettre en cause un modèle qui a eu un tel succès passé ? Parce que nous avons démontré que ce fonctionnement fonctionne bien dans un environnement « algorithmique », où chaque geste peut être pensé à l’avance et que la créativité de l’individu n’a aucune importance. Mais dès lors que l’organisation souhaite faire appel à la créativité d’un individu, lui laisser de l’autonomie a un résultat positif sur ses performances. C’est ce que nous avons démontré dans le chapitre sur les fausses idées sur la rémunération et sur la carotte et le bâton. Des organisations ont pu tester cette approche avec succès. Citons l’exemple de Zappos.com, site de e-commerce (depuis propriété d’Amazon), qui, au lieu d’installer son call-center de support offshore, l’a développé aux Etats-Unis, avec une directive simple et unique à ses collaborateurs : « répondre au client et lui apporter des solutions ». Entreprise de taille pourtant modeste face à des mastodontes, Zappos.com s’est régulièrement classée dans les meilleures entreprises américaines pour son support au client, tout en connaissant un turnover de ses effectifs particulièrement bas, un fait rarissime dans ce secteur. D’autres entreprises sont allées plus loin, et un mouvement se développe aux Etats-Unis permettant aux répondants de call- centers d’exercer depuis leur domicile (« homeshoring »). Team : choisir ses collègues de travail Dernier pilier de l’autonomie, celui du choix des hommes et femmes avec lesquels nous pouvons travailler. Traditionnellement, les collègues de travail sont, à l’instar d’une famille, composés de personnalités que nous n’avons pas choisies. « On choisit ses amis, pas sa famille », nous pourrions donc ajouter « ni ses collègues de travail ». Or, en nous inspirant d’expériences réussies, nous pouvons imaginer des voies pour permettre aux collègues de sélectionner leurs collègues, en les impliquant davantage et favorisant l’esprit tribal « bande de
  • 27. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 27 potes », dont nous soulignerons l’importance pour le développement de l’engagement dans un chapitre suivant. Nous pouvons ainsi citer l’exemple de GORE-TEX, qui délègue aux membres d’une équipe le choix de leurs futurs collègues, responsabilité traditionnelle d’un manager ou d’un responsable des ressources humaines. Nous pouvons également développer cette autonomie dans le cadre de l’autonomie sur les tâches : si pendant une période limitée les collaborateurs travaillent sur ce qu’ils souhaitent, une opportunité leur est offerte de choisir des collègues partageant leur motivation. Des équipes ainsi co-construites ont « doucement, mais sûrement, poussé l’organisation sur son axe », a pu constater Bharat Mediratta à propos de Google60 . L’autonomie laissée aux collaborateurs a également des ramifications dans les autres leviers du développement de l’engagement. Premièrement, elle est vécue comme une marque de confiance. Impliquée plus en profondeur dans les processus de l’organisation, elle développe la sensation d’être connecté à l’organisation, aux tâches et avec ses collègues (voir chapitre « Se sentir connecté »). Elle permet enfin aux individus concernés d’avoir plus d’impact (voir chapitre précédent). Et cela sans parler des autres avantages reconnus de l’autonomie, comme la réduction du stress. Toutes ces théories sont fascinantes, mais il convient de garder raison. Toutes ne sont pas transposables facilement dans toutes les organisations. Elles nécessitent une organisation rodée, un savoir-faire, une exécution par étapes, une maturation, et un délai pour la mise en place que toutes les organisations ne peuvent pas forcément s’offrir dans le flot de leurs contraintes quotidiennes. Mais en s’inspirant de ces éléments, une exploitation de ces concepts est possible en gardant à l’esprit que l’autonomie doit avoir des limites : celles fixées par l’organisation au sein de laquelle elle peut et doit s’exprimer. 3.5.4 ENCOURAGER LE DEVELOPPEMENT PERSONNEL Le développement personnel est un autre des piliers nécessaires au développement de l’engagement des organisations. Le développement personnel, menant à la maîtrise et à l’accomplissement, est également un besoin humain universel pour certains61 , un point essentiel à la motivation pour d’autres62 . Dans tous les cas, et quelle que soit la manière dont les grands 60 BHARAT MEDIRATTA (2007), à Julie Bick dans The Google Way: Give Engineers Room (NYT) 61 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement 62 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us
  • 28. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 28 auteurs s’étant penchés sur ces thématiques le modélisent, on retrouve bien cette idée liée au développement de l’individu comme puissante source de libération des énergies. Pour permettre le développement personnel des individus, l’organisation doit les pousser à sortir de leur zone de confort afin de les faire progresser, en veillant bien à ne pas tomber dans le travers de la génération de stress. Figure 7 L'équilibre entre stress et challenge On comprend dès lors qu’il ne doit pas être confondu avec la promotion ou à de quelconques primes, qui s’apparenteraient ici plutôt à de la motivation extrinsèque. Autre risque identifié : celui de mal apprécier la façon dont les individus peuvent percevoir une opportunité de développement personnel : comme une invitation, ou comme une menace ? L’autre avantage du développement personnel c’est que les individus ont tendance à exprimer leurs meilleurs talents quand ceux-ci sont requis. Et quoi de mieux pour exprimer tous leurs talents que de les faire progresser pour aller chercher – sans jamais les dépasser – leurs limites ? Un autre modèle se dégage des études qui ont été réalisées sur le sujet. Nous pouvons comprendre qu’offrir régulièrement des opportunités de développement, du support et de l’accompagnement dont ils peuvent avoir besoin poussent une majorité des individus vont s’engager. A l’inverse, fermer les opportunités peut désengager les individus, qui peuvent devenir apathiques, voire quitter l’organisation. Le développement personnel permet également d’atteindre un niveau émotionnel appelé « Flow » rendu célèbre par Csikszentmihalyi, pour qui il s’agit d’« une personne effectuant une activité dans laquelle il est complètement immergé, avec une sensation de concentration énergique, d’implication totale, et de plaisir à effectuer ladite activité. En substance, Flow est caractérisé par une absorption complète dans ce que quelqu’un fait. »63 . Une définition qui n’est pas sans rappeler… la définition de l’engagement. La leçon que nous pouvons en retenir, c’est que nous sommes plus engagés dans des tâches volontairement et assurément difficiles, mais réalisables, que l’on a choisies, dont l’objectif en vaut la chandelle, dans une recherche 63 MIHALY CSIKSZENTMIHALYI (1990), Flow : The Psychology of Optimal Experience Challenge Stress
  • 29. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 29 pleine et entière d’atteindre l’excellence. Une voie menant à la compétence inconsciente, dont le modèle vous est résumé ci-dessous. Figure 8 Les quatre étapes de l'apprentissage 3.5.5 SE SENTIR CONNECTE Développer les connexions des collaborateurs, c’est développer le “nous” en lieu et place du “je”. C’est développer l’esprit d’équipe et les valeurs qui y sont associées, comme l’entraide. C’est leur permettre de s’épanouir dans leur travail. Un besoin humain profond, qui pousse les individus. Pour s’en convaincre, on peut se rappeler qu’il y a sur terre plus d’individus disposant d’un téléphone portable que d’individus disposant de toilettes64 ! Un besoin somme toute identifié de longue date : il s’agit de la 3e strate des besoins de la pyramide de Maslow, juste au-dessus des besoins dits de sécurité. Marissa Meyer ne s’y est pas trompée. Arrivée à la tête de Yahoo, elle a interdit le télétravail à ses collaborateurs. Bien qu’admettant que les télétravailleurs étaient plus productifs car moins dérangés, elle y préfère la collaboration et l’innovation qui, selon ses dires, sortent du travail d’équipe65 . Elle a ainsi mis les connexions, carburant de la collaboration, avant l’autonomie et la productivité à court terme. Un choix discutable dont l’avenir nous dira s’il était juste, mais qui démontre l’importance des connexions. 64 ONU (2013), Deputy UN chief calls for urgent action to tackle global sanitation crisis, consultable sur http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=44452 (consulté le 30/11/2015) 65 http://fortune.com/2013/04/19/marissa-mayer-breaks-her-silence-on-yahoos-telecommuting-policy/, consulté le 01/12/2015 Incompétence inconsciente Incompétence consciente Compétence consciente Compétence inconsciente
  • 30. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 30 Les connexions, ce sont là encore une sensation : celle d’appartenance à quelque chose de plus grand que soi. Mais qu’appelle-t-on exactement les connexions ? Tracy Maylett et Paul Warner66 nous éclairent à ce sujet en dénombrant cinq types de connexions :  Sociales : le groupe de personnes autour de vous, avec lequel vous passez votre temps.  Avec l’organisation : elle se crée grâce à des facteurs tels qu’être reconnu par l’organisation, ou une expérience de travail très agréable. Elle s’illustre souvent par une identification de l’individu à son organisation.  Avec la mission : lorsque l’individu s’approprie la mission de l’organisation, et va jusqu’à mettre – jusqu’à un certain point –, ses besoins après ceux de l’organisation.  Avec les valeurs : lorsque l’organisation respecte et partage vos propres valeurs, et que l’objectif de l’organisation est congruent avec ces valeurs.  Avec les tâches : lorsque la tâche, et l’importance de son accomplissement, pousse des personnes à se connecter afin de mener ces tâches à bien. Avec les tâches et la mission Des connexions s’avèrent indispensables au développement du sens donné à son action. Le développement de connexions pouvant transcender, comme lorsque les employés de Mercedes- Benz en Afrique du Sud ont rapidement amélioré la qualité des voitures sortant de leur usine dès qu’il leur a été donné l’opportunité de fabriquer une voiture pour Nelson Mandela à sa sortie de prison. Et, dans le sens contraire, une absence de connexion peut mener à une perte de sens, dans son travail et dans la vie67 . Nous pouvons par ailleurs établir là encore un pont avec la vision qui doit être partagée de façon congruente. Comme nous l’avons vu, la vision doit être propagée à l’aide de discussions et d’explications sur le cheminement intellectuel ayant mené à cette vision. Dès lors, nous comprendrons aisément que si la « base » n’a jamais l’occasion de discuter avec son (ses) leader(s), cela risque bien de ne jamais arriver ! Avec ses collègues L’expérience des études récurrentes autour du Gallup Q12 par DecisionWise leur fait affirmer qu’on retrouve significativement plus d’amitiés réelles entre certains collaborateurs dans les 66 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement 67 TYLER F. STILLMAN, ROY F. BAUMESTEIR ET FRANK D. FINCHAM (2009), Alone and Without Purpose : Life Loses Meaning Following Social Exclusion, publié dans le Journal of Experimental Social Psychology 45
  • 31. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 31 organisations engagées que dans les autres, d’où l’existence de la question « J’ai un de mes meilleurs amis […] » dans le questionnaire d’engagement que nous utiliserons. Une grande entreprise a joué la carte de cette approche. Unilever, en 2008, après une baisse du moral de ses employés suite à de difficiles réorganisations, a lancé le programme « Agile Working » auprès de 100 000 de ses 170 000 collaborateurs. L’idée était de développer la connexion à l’entreprise cette fois, en imposant l’idée que les collaborateurs sont une part entière et appréciée de l’organisation. Cela s’est concrétisé par la liberté donnée aux individus de travailler où ils le souhaitent, quand ils le souhaitent, tant que le travail est fait. Et pour ceci, Unilever a fourni des moyens de communication très souples (ex Skype). Grâce à cette expérience les employés d’Unilever se sont sentis reconnus et ont ressenti le soin que leur portait leur direction. Les résultats : hausse de la productivité, de la satisfaction perçue au travail, d’employés souhaitant rester chez Unilever, de la santé des employés (plus d’exercices, de sommeil), de la facilité à recruter, moins de turnover et une réduction des coûts (surface des bureaux, moins de déplacements professionnels)68 . Avec l’organisation Pour évoluer au stade où l’individu se sent faire partie intégrante de l’organisation, avec donc cette sensation recherchée, créatrice de valeur, la connexion de l’individu avec l’organisation doit passer par trois stades. Figure 9 Les quatre étapes de connexion à l'organisation 68 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement, page 174 S'accorder Sentiment d'appartenance Se sent partie de l'organisation
  • 32. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 32 Durant la première étape, l’individu se sent en accord avec l’organisation : il répond à un besoin, et ce besoin est rempli. Vient ensuite un sentiment d’appartenance : il partage les valeurs de l’entreprise, aime son travail, y trouve une source de motivation et est récompensé. Vient enfin l’intégration, où l’individu se sent partie intégrante de l’organisation. Lorsqu’on parle de l’organisation, l’individu se sent directement concerné. Pour comprendre le cheminement menant un individu à se sentir pleinement connecté avec l’organisation, Jos De Neve nous fournit la matrice de lecture de l’état d’esprit tribal des individus en fonction de leur langage69 : Figure 10 Langage utilisé par le groupe/individus traduisant leur état d’esprit 3.5.6 DEVELOPPER LA CONFIANCE La confiance est une composante essentielle au développement de l’engagement. Dans une étude de 201070 dédiée à l’effet de levier sur la confiance dans les PME, des auteurs en viennent à modéliser l’effet que les différentes composantes de la confiance ont sur l’engagement. Une modélisation illustrée par la figure ci-dessous : 69 JOS DE NEVE, Le changement, les cultures (2014) 70 ELSA BELLIATO, CAROLINE CHAMPAGNE, ISABELLE PRIM-ALLAZ ET MARTINE SEVILLE (2010), L'effet de levier de la confiance sur l'engagement dans l'hypercroissance durable des PME 1 : Hostilité et désespoir "La vie est une merde" 2 : Victime apatique "Ma vie est une merde" 3 : Le guerrier solitaire "Je suis bon, vous ne l'êtes pas" 4 : La fierté de la tribu "Nous sommes bons, pas les autres" 5 : L'émerveillement innocent "La vie est magnifique"
  • 33. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 33 Figure 11 L’effet de la confiance sur l’engagement Au-delà de cette modélisation, on comprend aisément le désengagement qui peut résulter d’un manque de confiance, résumée en ces mots par Valérie Petit, professeur EDHEC lors de sa présentation « Résultats de l’enquête nationale sur le leadership » le 27 mars 2015 :  « Je reste à ma place, ce n’est pas mon boulot ; c’est à quelqu’un d’autre de le faire ».  « Une perception que l’on se fait avoir et que d’autres employés ont plus qu’ils ne méritent ».  « La peur de prendre des risques, de s’exposer au regard malveillant des autres ou d’avoir tort ». Dans une autre étude71 , Robert M. Morgan et Shelby D. Hunt ont pu établir des connexions directes entre la confiance et l’incertitude, la fonctionnalité des conflits, la coopération et, bien entendu, l’engagement. Cette étude nous éclaire également sur les ingrédients nécessaires à l’établissement de la confiance : des valeurs partagées, une bonne communication et l’absence de comportement opportuniste. Un modèle illustré par le schéma ci-dessous : 71 ROBERT M. MORGAN ET SHELBY D. HUNT (1994), The Commitment-Trust Theory of Relationship Marketing • Compétence • Bienveillance • Honnêteté Confiance • Calculé • Affectif Engagement
  • 34. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 34 Figure 12 Causes et effets sur la confiance et l'engagement James M. Kouzes et Barry Z. Posner72 ont quant à eux démontré que la création d’un climat de confiance avait un impact important sur les relations des membres d’une organisation, et plus précisément sur leur collaboration. La mise en place de cette confiance initiale étant même d’après ces auteurs une condition sine qua non pour l’émergence du “nous”. Le développement de la confiance a également un lien direct avec le levier « Donner du sens ». En effet, des études ont montré que les organisations délivrant en fonction du sens et de la performance étaient perçues comme des modèles et inspiraient une plus grande confiance73 . Dans le même sens, les organisations qui, en plus de communiquer sur les aspects financiers, communiquent largement sur le sens de son action et l’objectif final (la vision) exprimée inspirait également la confiance74 . Le développement de la confiance a également un impact direct sur le développement des connexions en jouant un rôle fondamental dans leur construction. La faculté des organisations à établir une confiance à tous les étages permet aux connexions de s’épanouir pour l’intérêt de l’organisation. C’est aussi là que les valeurs de l’organisation entrent en jeu. Les valeurs sont- 72 JAMES M. KOUZES ET BARRY Z. POSNER (2012), The Leadership Challenge 73 BURSON-MARSTELLER (2008), Corporate Success - Driven by Purpose or Performance? 74 TANIA BRAGA, JOHN WEEKS, AILEEN IONESCU-SOMERS, PHILIPPE MARGERY ET APARNA DOGRA (2010), Communicating Corporate Purpose
  • 35. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 35 elles congruentes avec les individus en place ? Les valeurs affichées sont-elles bien communiquées, affichées ? Mais surtout, sont-elles dignes de confiance ? Les actions démontrent-elles les valeurs communiquées ? Pour conclure, nous soulignerons que la confiance s’acquiert à tous les niveaux. Confiance entre la direction et les collaborateurs, entre les managers et les collaborateurs, entre les collaborateurs eux-mêmes. L’avantage pour l’organisation est que la confiance est purement transactionnelle. Si une organisation décide de gagner la confiance de ses équipes, elle n’a « qu’à » faire preuve dans le temps de fiabilité entre ce qu’elle dit et ce qu’elle fait, et démontrer qu’elle fait siens les intérêts de ses collaborateurs. 3.6 SYNTHESE DU MODELE DE L’ENGAGEMENT Nous vous proposons une synthèse des différents leviers du développement de l’engagement que nous venons d’examiner. Cette synthèse permet de proposer aux organisations un modèle simplifié, compréhensible et actionnable facilement. Figure 13 Synthèse du modèle de l'engagement
  • 36. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 36 3.7 ANALYSE SYSTEMIQUE DU DEVELOPPEMENT DE L’ENGAGEMENT L’analyse systémique du développement de l’engagement nous permet quant à elle d’appréhender la complexité de ses mécanismes déclencheurs. En nous basant sur notre démonstration, notre analyse permet d’identifier en un seul graphique la majorité des relations de causes à effets permettant de développer cet engagement.
  • 37. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 37 Figure 14 Analyse systémique du développement de l'engagement
  • 38. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 38 4 LA GENERATION Y OU « MILLENNIALS » Les organisations interpellent également sur la problématique liée aux adaptations rendues nécessaires par l’émergence de la génération Y qui, nous expliquent-t-elles, leur posent des problèmes pour les satisfaire. Une première impression que nous partageons partiellement : dans le cadre des ateliers, les participants, pour beaucoup de la génération Y, ont manifesté beaucoup d’attente de flexibilisation du travail notamment, mais aussi d’exigences sur les critères dits d’hygiène (environnements et outils de travail, rémunération). Les Millenials sont un sujet d’actualité et représentent un enjeu majeur pour assurer le développement serein des organisations. Au-delà des préjugés et des idées préconçues, nous engagerons donc des recherches complémentaires sur ce sujet afin de déterminer quelles sont les spécificités des membres de cette génération, et comment nous pouvons utiliser cette connaissance pour développer leur engagement. 4.1.1 UNE DEFINITION ENCORE FLOUE La génération Y succède ainsi à la génération X, et précède la génération Z, qui n’est pas encore rentrée sur le marché du travail. Figure 15 Frise chronologique des générations Au-delà de cette lapalissade, il convient de préciser les dates retenues qui définissent la génération Y afin d’en préciser les spécificités. Et pour les préciser, il n’existe pas de consensus, aucune source ne faisant autorité. Voici une tentative de récapitulatif des dates couvertes par cette génération en fonction des sources qui nous ont semblé faire le plus autorité. Le tableau ci-dessous représente les bornes d’années de naissance retenues en fonction des sources retenues : Génération ZGénération YGénération X Baby- boomers Génération silencieuse
  • 39. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 39 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 Josiam & Al75 Sullivan & Heitmeyer76 Yeaton77 Bruce Horovitz78 Pew Research79 PwC & Université South California80 Marc McCrindle81 Marc McCrindle82 Time Magazine83 Sarah Sladek84 Morton L.P.85 Pew Research Center86 Tulgan, B & Al87 Vaisilescu, R.88 Raines, C. & Armsparger A.89 Wilson, M. & Gerbeer, L.E.90 Figure 16 Bornes d'âge retenues pour la qualification de la génération Y Ces différences, loin d’être exhaustives, permettent d’entrevoir la difficulté des bases méthodologiques utilisées dans les différentes enquêtes. Toutefois, afin de nous faire une idée sur le poids démographique de cette génération, et donc de l’importance de ses éventuelles spécificités pour les organisations, faisons le choix purement arbitraire de considérer les personnes nées entre 1981 et 2000. L’étude des données 75 JOSIAM ET AL. (2009) 76 SULLIVAN & HEITMEYER (2008) 77 YEATON (2008) 78 BRUCE HOROVITZ, (2012), After Gen X, Millennials, what should next generation be? 79 http://www.pewresearch.org/fact-tank/2015/01/16/this-year-millennials-will-overtake-baby-boomers/ (2015), consulté le 8 août 2015 80 PWC, LONDON BUSINESS SCHOOL ET UNIVERSITÉ SOUTH CALIFORNIA (2013), PwC’s NextGen: A global generational study 81 MARC MCCRINDLE (2005), Report on the Attitudes and Views of Generations X and Y on Superannuation 82 MARK MCCRINDLE (2011), Generations Defined 83 TIME MAGAZINE (mai 2003) 84 SARAH SLADEK (2014), Kowing Y: Engage the Next Generation Now 85 MORTON L.P. (2002), Targeting generation Y, public relation quarterly. 86 PEW RESEARCH CENTER (2010) generation 2010, en ligne :http://pewinternet.org/Reports/2010/Generations- 2010.aspx consulté le 18/3/2011 87 TULGAN, B & AL (2001), Managing generation Y: global citizens born in the late seventies and early eighties 88 VASILESCU, R. (2011), The Romanian generation Y, preparing today’s students for tomorrow’s job market, Annals of Spiru Haret University, Economic Series. 89 RAINES, C. & ARMSPARGER A. (2010), Millenials at work 90 WILSON, M. & GERBER, L.E (2008), How generational theory can improve teaching: strategies for working with the Millenials, current in teachning and learning, vol. 1, n°1, http://www.worcester.edu/Currents/Archives/Volume_1_Number_1/CurrentsV1N1WilsonP29.pdf, consulté le 09/08/2015.
  • 40. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 40 démographiques au 1er janvier 2015 de la France métropolitaine publiées par l’INSEE nous démontre que les Millennials représenteront en 2016 34% des personnes en âge de travailler (2391 à 6292 ans). Si nous nous projetons 5 ans plus loin, en 2021, les Millennials représenteront alors 44% du total. 4.1.2 LES SPECIFICITES REELLES DE LA GENERATION Y Capricieuse, irrespectueuse, réclamant ses droits en oubliant ses devoirs, égocentrique, infidèle, superficielle, indifférente. Voici quelques-unes des idées reçues dont est affublée la génération Y, largement relayées par les titres de la presse managériale bienpensante. Qu’en est-il exactement ? Comment faut-il, le cas échéant, adapter les organisations pour développer l’engagement de cette population ? L’étude de la bibliographie moderne et des enquêtes laisse toutefois songeur lorsque nous rentrons dans les détails méthodologiques. Les résultats de ces enquêtes poussent à les relativiser : ces enquêtes ont l’habitude de comparer des populations d’âge différents (ne retenant pas toutes les mêmes bornes d’âge), en retenant dans leurs échantillons des populations à des moments de leur socialisation très différents, retenant par exemple bien souvent des étudiants pour représenter la génération Y. Ces enquêtes sont également dépourvues d’axe scientifique, se contentant le plus souvent la méthodologie de l’enquête par questionnaire. Enfin, les résultats semblent caricaturaux. Un individu né en 1979 serait donc si différent d’un autre né quelques jours plus tard, en 1980 ? Pourtant, personne ne nie la réalité des différences culturelles entre les jeunes d’aujourd’hui et ceux d’il y a 30 ans. Nous avons trouvé des recherches avec des protocoles sérieux apportant un peu de contradiction dans ce monde policé des consultants spécialistes auto-proclamés. 4.1.2.1 QUELLE REALITE SCIENTIFIQUE ? C’est Jean Pralong93 , dans son étude « La génération Y au travail : un péril jeune ? » (2009), qui met le premier les pieds dans le plat. Aucune recherche scientifique n’est venue appuyer jusqu’à présent toutes les déclarations de la presse managériale spécialisée. L’occasion pour Jean Pralong de combler ce manque. Son étude conclue que les différences supposées liées à la génération Y tiennent principalement à l’appartenance sociale des individus plus qu’à leur âge 91 INSEE (2007), http://www.insee.fr/fr/insee_regions/idf/themes/dossiers/mobilite/docs/mob_chap2.pdf 92 CNAV (2015), http://www.statistiques-recherches.cnav.fr/retraites-de-droit-personnel.html 93 JEAN PRALONG (2009), La génération Y au travail : un péril jeune ?
  • 41. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 41 de naissance. L’effet de la socialisation est ainsi plus puissant que l’effet générationnel et pousse à une normalisation des comportements au fur et à mesure que les individus s’installent dans la vie sociale. Et de conclure que le plus gros risque auquel les managers font face avec la nouvelle génération est celle du désengagement. 4.1.2.2 QUELLES DIFFERENCES RESTE-T-IL ? La deuxième étude est celle de François Pichault et Mathieu Pleyers dans « Pour en finir avec la génération Y… Enquête sur une représentation managériale » (2010). Cette étude a voulu vérifier si les différences entre les générations énoncées par les consultants et illustrées dans les enquêtes tenaient vraiment à la borne d’âge ou plutôt à l’état de socialisation des individus. Cette enquête conclue que la majorité des enquêtes publiées sont biaisées par le fait que les répondants « Y » sont encore étudiants. Les mêmes questions aux mêmes générations quelques années après leur premier emploi, et les réponses se rapprochent significativement de celles des générations précédentes. Ci-dessous, le tableau issu de l’enquête de Pichault et Pleyers :
  • 42. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 42 Catégories Caractéristiques Items de l’enquête Différences significatives entre générations Recherche de sens au travail Sens moral et civique, besoin d’un travail avec signification Sentiment d’être utile aux autres Non Besoin d’accomplissement Intérêt pour le travail et les défis proposés, attentes en matière d’éducation continuée, attitude positive à l’égard du travail Réalisation d’un projet personnel clair Non Développement des compétences Oui : plus important Possibilité de se développer Non Importance des programmes de formation continuée pour attirer/retenir Non Recherche de feedback Besoin de gratification rapide en termes monétaires ou de promotion, une fois les objectifs atteints, recherche de feedback par rapport à l’engagement professionnel Besoin de reconnaissance Non Souci de bénéficier d’une rémunération nette suffisante Non Intégration vie privée/ vie professionnelle Indifférenciation temps de travail/ temps de loisir, forte importance accordée au loisir, au divertissement, aux amis, à la famille, recherche du plaisir et de l’épanouissement au travail, capacité d’être multitâche Equilibre vie privée/vie professionnelle Non Possibilité d’aménager son temps de travail Non Crainte de ne pas trouver un emploi qui plaît Oui : plus important Opportunisme Poursuite d’un agenda personnel, opportunisme, agissements de franc- tireur, individualisme, estime de soi, besoin de s’affirmer Comportement individualiste comme source de démotivation Non Construire soi-même son futur et ne compter que sur soi Non Non-respect de règles de déontologie ou de valeurs Oui : moins important Esprit de groupe Intérêt pour le travail en équipe et les collaborations Plus forts ensemble Non Solidarité et esprit d’équipe Non Faible loyalisme institutionnel Peu de sentiment d’appartenance à l’entreprise, méfiance envers l’autorité et les institutions, Besoin de changer régulièrement d’environnement Oui : plus important Garantie de l’emploi Non Difficulté à se projeter dans le long terme Incertitude sur l’avenir, difficulté de se projeter dans le futur, difficulté à s’engager et à faire des choix, primat de l’instantané Attente que l’entreprise fasse preuve d’innovation et d’anticipation du futur Non Tableau 17 Réalités scientifiques établies de la génération Y selon Pichault & Pleyers En plus de cette recherche, nous avons voulu vérifier l’existence supposée d’une plus grande exigence de cette génération concernant leur environnement de travail. L’étude de Paris Work Place 2015 nous apporte un éclairage complémentaire. Et c’est une surprise là encore : il s’agit de la génération la plus satisfaite de ses bureaux : 82% le sont, contre une moyenne de 76% pour les autres générations. A l’inverse, c’est aussi la génération qui juge la présence de lieux
  • 43. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 43 de convivialité au sein de l’entreprise comme étant la plus primordiale : 58% l’estiment primordiale, contre 37% en moyenne pour les autres générations. Les préjugés sur la génération Y et la littérature produite par les spécialistes auto-proclamés font largement état de l’intérêt pour la balance vie privée / vie publique qui serait la marque de fabrique de la nouvelle génération Y. Pourtant, comme les études94 nous l’ont démontré, la recherche de cet équilibre est partagée par toutes les générations. Un autre éclairage peut être apporté pour l’importance de l’intégration vie privée / vie professionnelle par l’étude de Paris Work Place 2015. Dans cette étude, les auteurs ont posé la question à des cadres « Pour vous, la possibilité d’aménager ses horaires à sa convenance est-elle primordiale ? ». A contrario des clichés sur la génération Y, voici les résultats : 18-29 ans 30-39 ans 40-55 ans + 55 ans Figure 18 L'importance de l'aménagement des horaires selon les générations L’enseignement paraît clair : ce n’est pas tant la génération qui dicte l’importance accordée à cette souplesse, mais plutôt l’effet « jeunes parents ». 4.1.2.3 ENSEIGNEMENTS 4.1.2.3.1 DES DIFFERENCES MOINS CARICATURALES QU’ANTICIPE En conclusion de ces différentes études, il apparaît que les caractéristiques de la génération Y sont nettement moins caricaturales que celles avancées par la presse managériale. Nous pouvons nous demander à ce stade pourquoi tant d’efforts pour mettre sur les épaules des membres de la génération Y l’ensemble des difficultés que rencontrent les organisations pour s’adapter aux nécessaires changements perpétuels. Afin d’acquérir une lecture plus 94 FRANÇOIS PICHAULT ET MATHIEU PLEYERS (2010), Pour en finir avec la génération Y… Enquête sur une représentation managériale 49 %51 % Oui Non 64 % 36 % Oui Non 58 % 42 % Oui Non 53 % 47 % Oui Non
  • 44. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 44 pragmatique et anticiper les changements nécessaires, il est nécessaire de prendre plus de recul et d’observer les changements sociétaux sur une plus grande période. 4.1.2.3.2 LA GENERATION Y… OU LA JEUNESSE ? En prenant ce recul, nous nous apercevons que bon nombre de qualificatifs utilisés à propos de cette génération sont en réalité des qualificatifs de la jeunesse, presque intemporels. La nouvelle génération « Y » bouscule l’ordre établi ? « Il est interdit d’interdire », scandaient pourtant les étudiants de 1968, celle de la génération des Baby-boomers. Et la génération X ? C’est elle qui a affronté les us et coutumes de l’époque pour faire tomber l’obligation de la cravate et du vouvoiement. Une célèbre histoire illustre bien le phénomène. En 1974, un jeune homme est embauché chez Atari, entreprise très à la mode à ce moment. Ce jeune homme refuse de se laver. L’odeur qu’il dégage pousse alors la direction à le cantonner à une équipe de nuit, dans laquelle il est le seul représentant. Ce jeune homme donne ensuite sa démission pour entreprendre un voyage en Inde rencontrer son gourou. Il revient sept mois plus tard, tête rasée, habits traditionnels indiens, réclamer son poste chez Atari. Son nom ? Steve Jobs95 . Une conviction renforcée par la théorie de la biographie professionnelle de Pascal Paillé96 , selon laquelle la première étape de la vie professionnelle d’un individu commence par l’intégration du développement professionnel. Durant environ 8 ans, les jeunes salariés recherchent un employeur susceptible de les valoriser et de répondre à leurs valeurs. Ils n’hésitent alors pas à changer d’employeur. Cela correspond pourtant exactement à la vision que nous avons des jeunes de la génération Y. Toutes ces déclarations de consultants spécialistes « Millennials » auto-proclamés laissent comme un petit arrière-goût d’opportunisme. N’ont-ils pas créé le marché sur lequel ils prospèrent ? Maintenant que les différences réelles de cette génération ont été identifiées, attardons-nous quelque peu sur celles-ci. 4.1.2.3.3 MOINS D’ATTACHEMENT AUX INSTITUTIONS ET AUX TRADITIONS Nous commencerons par un point qui a pu être testé dans d’autres études sérieuses, et qui fait consensus chez les managers, c’est le plus faible attachement aux institutions et aux traditions. 95 WALTER ISAACSON (2012), Steve Jobs 96 PASCAL PAILLE (2004), La fidélisation des ressources humaines
  • 45. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 45 Une spécificité mise en lumière par plusieurs études97 , qui explique d’ailleurs un fort déclin des adhésions d’une manière générale, que ce soit auprès d’acteurs privés ou d’associations98 . Toutefois, ne tombons pas dans l’amalgame entre le manque d’attachement à ces institutions et un éventuel manque de loyauté. C’est ce que nous rappelle notamment Sarah Sladek99 , la loyauté n’est pas absente des esprits de la nouvelle génération comme on veut bien l’entendre, elle est différente. Contrairement aux générations précédentes, elle n’est plus centrée sur l’organisation, mais plutôt sur les personnes : « La génération Y est loyale. Elle n’est pas seulement loyale aux institutions, elle est loyale envers les personnes ». Nous comprenons ainsi comment l’engagement peut se développer : moins sur une organisation que sur des personnes. Sarah Sladek ne dit pas autre chose : « Gen Y commits when meaningful relationships and great experiences are actively present. To them, loyalty is not something you do just because; it is something that is earned”, soit « La generation Y s’engage lorsque des relations porteuses de sens et d’expérience sont présentes. Pour eux, la loyauté n’est pas quelque chose que l’on applique par principe, c’est quelque chose qui doit être gagné ». 4.1.2.3.4 LE DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES Ceci est une différence significative d’attente entre les générations. Toutefois, nous pouvons aussi nous poser la question : est-ce réellement une différence générationnelle ou est-ce plutôt lié à l’âge des répondants ? 4.1.2.3.5 LA CRAINTE DE NE PAS TROUVER UN EMPLOI QUI PLAIT Pour la génération Y, la crainte de ne pas trouver un emploi qui plait est plus important que pour les générations précédentes comme a pu le démontrer l’étude de François Pichault et Mathieu Pleyers. Peut-être est-ce là l’origine de la constatation que beaucoup d’employeurs en font : cette génération est difficile à fidéliser et a tendance à multiplier les expériences. Selon Sarah Sladek100 , cette génération est plus à la recherche de sens dans son travail et de la culture idoine. Les études pour tenter de le démontrer sont toutefois peu nombreuses. Nous avons toutefois identifié l’étude Cost of Millennial Retention (2013)101 , menée aux Etats-Unis, qui a identifié les raisons principales des démissions de cette génération : avoir reçu une meilleure 97 PEW RESEARCH (2014), Millenials in Adulthood 98 U.S. CHAMBER OF COMMERCE FOUNDATION (2012), The Millenial Generation Research Review 99 SARAH SLADEK (2014), Knowing Y: Engage the Next Generation Now 100 SARAH SLADEK (2014), Knowing Y: Engage the Next Generation Now 101 http://millennialbranding.com/2013/cost-millennial-retention-study/, consulté le 03/11/2015
  • 46. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 46 offre (30%), l’impression que leurs objectifs de carrière ne sont pas compatibles avec ceux de l’organisation (27%), et l’impression d’une absence d’opportunités de carrière (13%). Cette même étude conclue que les membres de cette génération sont donc plus coûteuses, car il faut prévoir plus de remplacements et que les remplacements coûtent cher, surtout pour les postes de managers. 4.1.2.3.6 BESOIN DE CHANGER REGULIEREMENT D’ENVIRONNEMENT « Ils ont la bougeotte » est une des idées reçues qui circulent à propos de la génération Y. L’étude de François Pichault et Mathieu Pleyers le confirme. Nous pouvons toutefois nous demander si ce besoin de changement est vraiment lié à leur génération ou bien à leur jeunesse. Dans tous les cas, il faut prendre en compte cette différence. Afin de leur permettre de pouvoir changer d’air au sein de la même organisation, celle-ci pourrait réfléchir à un moyen de développer les changements de poste, changements d’équipe, changements de technologie (pour les développeurs) ou même changements d’environnement. 4.1.2.4 L’ETUDE DES EMPREINTES SOCIETALES Pour autant nul n’est besoin de nier les différences sociétales émergentes qui attendent de pied ferme les managers d’aujourd’hui. Si la réalité des différences liées strictement aux générations est comme nous l’avons vu galvaudée et caricaturale, les changements sociétaux existent bien, et les expériences incongrues des managers se multiplient. Pour expliquer ces différences, il suffit de sortir un peu de la caricature, prendre de la hauteur sur les événements. Françis Boyer l’explique très bien102 . Pour lui, les comportements des individus s’expliquent avant tout par le contexte socio-économique dans lequel ils ont grandi, qui mêle éducation, milieu social et contexte économique. Années 1920 : l’empreinte tradition Education Entreprise Traditionnelle (maintien et reproduction des traditions et des usages) Paternaliste (taille humaine, artisanat, entraide) Années 1940 : l’empreinte force Education Entreprise 102 FRANÇIS BOYER (2015), Du management intergénérationnel à l’innovation managériale
  • 47. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 47 Force (guerres mondiales, crise financière…) Directif (production de masse, taylorisme…) Années 1960 : l’empreinte ordre Education Entreprise Ordre (reconstruction gaulliste, développement de l’Etat Providence…) Bureaucratique (les cadres issus des grandes écoles prescrivent le travail) Années 1980 : l’empreinte succès Education Entreprise Réussite (ascension sociale possible, recherche du plaisir de la vie souvent matériel caractérisé par la propriété…) Stratégique (mondialisation) Années 2000 : l’empreinte bien-être (Génération Y) Le futur devient plus incertain, poussant les individus à essayer de profiter du bonheur rapidement, plutôt que d’en espérer plus à l’avenir. La précarisation pousse à rechercher l’équilibre travail / temps personnel qui tend à changer la perception de la réussite, moins axée sur la propriété et plus sur l’atteinte du bonheur. Développement parallèle de la méfiance envers les institutions (économiques, politiques, de la famille). Education Entreprise Bien-être (aspiration à l’épanouissement maintenant, plus qu’à un avenir futur incertain, méfiance envers les institutions, la réussite devient associée à l’épanouissement personnel) Collaboratif (besoin du développement de l’intelligence collective, combler les attentes bien-être des individus) Années 2010 : l’empreinte liberté (Génération Y) Le monde en perpétuel mouvement pousse à s’affranchir et à se remettre continuellement en question, et à profiter du moment présent, étant donné que l’avenir est incertain. Développement de l’autonomie et de la flexibilité. D’où les demandes des salariés qui se multiplient sur la
  • 48. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 48 flexibilité des horaires, le télétravail… Des attentes qui ne sont pas sans rappeler le développement de l’entreprise libérée de Jean-François Zobrist. Education Entreprise Liberté Co-responsable Cette vision a le grand avantage d’éviter de tomber dans la caricature, dans la recherche des explications des changements sociétaux en cours. Le graphique ci-dessous, issu du site Internet de Françis Boyer, illustre ainsi l’évolution des différentes tendances, qui s’entremêlent dans la société. Figure 19 Emergence des empreintes sociétales en France depuis 1940, par Françis Boyer103 103 http://www.innovationmanageriale.com/concepts/du-management-intergenerationnel-a-linnovation- manageriale/, consulté le 10/08/2015
  • 49. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 49 5 CONCLUSION Nous avons montré à quel point l'engagement est difficile à identifier, à appréhender et à mesurer. L’engagement présente une caractéristique singulière, qui peut représenter un véritable challenge pour le management : il ne peut ni se décréter ni s’acheter, au grand dam des organisations dépensant en pure perte des millions pour offrir le meilleur environnement de travail possible à leurs collaborateurs. L’engagement ne se développe chez les collaborateurs que lorsque ceux-ci en ont la capacité. Il leur faut également trouver des raisons profondes, intrinsèques aux méthodes de management. Cela passe notamment par une certaine liberté pour le collaborateur et par le fait qu'il sache comment s’engager, en donnant du sens au travail. Cette démarche demande une forte volonté politique qui, si elle est effectuée correctement, permettra d’assurer une croissance sereine et facilitera la prospérité des organisations. Nous avons également proposé une méthode et un modèle complet afin de développer l'engagement des salariés dans leurs organisations. Si les différentes études citées dans notre document illustrent la puissance des retombées d'un management permettant le développement de l'engagement, les expériences des organisations modèles ont également montré que le processus, mené jusqu’à son terme, peut prendre des années. Dans notre étude, le développement de cet engagement est en effet le levier le plus efficace pour répondre globalement aux objectifs exprimés par les organisations. Les résultats de la mesure de l’engagement de ses collaborateurs sont apparus modérément positifs. Le développement de l'engagement de ses collaborateurs passe à court terme par l'évolution de la satisfaction de ses salariés. Pourront ensuite être mis en œuvre des leviers puissants de développement de l’engagement, que nous avons détaillés dans nos recommandations opérationnelles et qui permettront à notre client d’accroitre la productivité et la créativité de ses hommes et femmes, d’attirer de nouveaux talents, de les fidéliser, de développer leurs compétences et, in fine, d’améliorer les performances de l’organisation.
  • 50. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 50 6 BIBLIOGRAPHIE ABIGAIL HAZLETT, DANIEL C. MOLDEN, AARON M. SACKETT (2011), Hoping for the Best or Preparing for the Worst? Regulatory Focus and Preferences for Optimism and Pessimism in Predicting Personal Outcomes AFDEL/APOLLO (2013), Baromètre RH ALICE M. ISEN AND BARBARA MEANS (1983), The Influence of Positive Affect on Decision- Making Strategy ANTON SUVOROV, Addiction to Rewards, présentation lors de l’European APEC (2015), La mobilité externe des cadres ARNOLD B. BAKKER, EVANGELIA DEMEROUTI (2008), Towards a model of work engagement BAKKER, A.B., & LEITER, M.P (2010), Work engagement: A handbook of essential theory and research BHARAT MEDIRATTA (2007), à Julie Bick dans The Google Way: Give Engineers Room (NYT) BRIAN KNUTSON (2001), Behavioral Addictions : Do They Exist ? BRUCE HOROVITZ, (2012), After Gen X, Millennials, what should next generation be? C. M. HAASE, M. J. POULIN ET J. HECKHAUSEN (2012), Happinness as a Motivator : Positive Affect Predicts Primary Control Striving for Career and Educational Goals CALDWELL ET AL (1990) CALI RESLER ET JODY THOMPSON (2010), Why Work Sucks and How to Fix It : The Results- Only Revolution CHAO LIU, RYEN W. WHITE, SUSAN DUMAIS de Microsoft Research, Understanding web browsing behaviors through Weibull analysis of dwell time CNAV (2015), http://www.statistiques-recherches.cnav.fr/retraites-de-droit-personnel.html D. MACLEOD ET N. CLARKE (2009), Engaging for Success: Enhancing Performance Through Employee Engagement: A Report to Government DAN ARIELY (2008), What Managers Can Learn from Legos
  • 51. JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 51 DAN ARIELY, URI GNEEZY, GEORGE LOEWENSTEIN, NINA MAZAR (2005), LARGE STAKES AND BIG MISTAKES DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us DAVE ULRICH ET WAYNE BROCKBANK (2005), The HR Value Proposition DAVID AUTISSIER ET FREDERIC WACHEUX (2006), Manager par le sens DILLON ET FLOOD (1992) DRH D’UN GROUPE DE CONSEIL EN RH, lors d’une réunion d’un groupe de travail ANDRH, cité par Odile Dewachter (2010), Comment favoriser l’engagement des cadres EDWARD DECI (1969) EDWARD DECI ET DEUX DE SES COLLEGUES (1999), dans une méta-analyse de 128 expérimentations ELSA BELLIATO, CAROLINE CHAMPAGNE, ISABELLE PRIM-ALLAZ ET MARTINE SEVILLE (2010), L'effet de levier de la confiance sur l'engagement dans l'hypercroissance durable des PME FEDERAL RESERVE BANK OF BOSTON (2005), Working Paper No. 05-11, 23/07/2005, dont un résumé peut être trouvé dans “What’s the Value of a Big Bonus?” New York Times 20/11/2008 FRANÇIS BOYER (2015), Du management intergénérationnel à l’innovation managériale FRANÇOIS PICHAULT ET MATHIEU PLEYERS (2010), Pour en finir avec la génération Y… Enquête sur une représentation managériale GLUCKSBERG SAM (1962), Journal of Experimental Psychology, The influence of strength of drive on functional fixedness and perceptual recognition, Vol 63(1), Jan 1962, 36-41 HARLOW (1949) HERZBERG ET AL (1959), The Motivation to Work http://fortune.com/2013/04/19/marissa-mayer-breaks-her-silence-on-yahoos-telecommuting- policy/, consulté le 01/12/2015 http://www.gallup.com/services/169328/q12-employee-engagement.aspx, le 26/09/2015 http://www.pewresearch.org/fact-tank/2015/01/16/this-year-millennials-will-overtake-baby- boomers/ (2015), consulté le 8 août 2015