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L’altérité en tant que prémisse
de la Littérature Comparée
JosÉ MANUEL LosADA GoyA. U.C.M.
Personne n’a jamais douté de l’importance des études portant sur la
littérature nationale. Par ailleurs, II ne pourrait étre que dommageable de
ne pas initier nos étudiants dans la connaissance des principaux auteurs,
idées et textes dont s’est nourrie, depuis toujours, la mentalité de notre
pays. Cela, on le fait depuis fon longtemps, ji faut continuer ~le faire.
II est certain, en revanche, qu’on est parfois tombé dans un nationalisme
—voire un provincialisme—, qui n’est pas sans nuire á la formation souhai-
table de la personnalité d’un lycéen ou d’un étudiant. Le principal obstacle
a 1 ‘é:ude interculturelle es: le préjugé du provincialisme, a-t-on dit (Miner,
1989: 179). Comme tout extrémisme, cette recherche désordonnée et nar-
cissiste qul emprunte des voies nationalistes et qui est le plus souvent orlen-
tée vers des buts idénlogiques (Guillén, 1985: 14), appara?t fondamentale-
ment viciée. Cette exclusivité des littératures nationales ainsi pratiquées
(Doubrovsky, 1910: 14) a ses propres limites, on ne saurait le cacher
(Weisstein, 1975). Ainsi, nous nous trouvons sur la ligne de démarcation
entre deux domaines qu’on a trop souvent con9us comme des entités oppo-
sées: l’identité et I’altérité. Diderot s’était déjh heurté á ce prob1~me quand
il avait posé les principes de la dialectique des éclectiques: La séité ou le
soi, la quiddité ou le ce, 1 ‘identité, la diversité ou 1 ‘altérité nc son: pas, d
proprementparler, les qualités de 1 ‘&re; mais ce son: ses propriétés, des
concomitants nécessaires de 1 ‘existence actuelle (Enc-yclopédie, 1976, t.
VII: 86). Or, rien de plus faux que de les séparer comme s’il s’agissait
d’abstractions antinomiques: de m6me que l’identité n’a aucun sens, privée
de la dimension sociale, l’altérité, coupée de la constante réfiexion sur soi-
méme, sombre dans le néant.
Revista de Filología Francesa, 5. Editorial Complutense, Madrid, ¡994.
248 José Manuel Losada Goya
II est question, par conséquent, de se fixer comme objectif une forma-
tion la plus compléte possible, car la découverte d’autres littératures peut et
doit collaborer au plein épanouissement des mentalités. En effet, on montre
volontiers ses griffes contre toute approche qui puisse constituer une me-
nace contre la paisible situation des acquis; or, il ne s’agit pas ici d’inimi-
tié, mais d’une véritable coopération dans un méme but. S’il est vrai que la
relation culturelle qui occupe les comparatistes est presque toujours un
“rapport de force”, il ne l’est pas moins que celui-ci ne différe point du
dessein ultime qui est de parvenir A un dialogue de cultures, d’apr~s l’ex-
pression de Guillermo de Torre. Cette affirmation ne signifie nullement
favoriser, souligne Daniel Pageaux, un quelconque type de manichéisme ou
une vision belliqueuse de l’univers comparatiste, mais plutót nous rappeler
l’indispensable fondement des rapports littéraires et culturels qui, jusqu’á
un certain point, ne sont pas autonomes mais dépendants des conjonctures
historiques late sensu (Pageaux, 1990: 23). On ne saurait trop insister sur
cette dimension unificatrice de la littérature comparée. Peut-étre le terme
choisi depuis sa naissance n’est-il pas pour rien dans ce malentendu: la
littérature comparée ne doit jamais se donner pour but de “comparer”
—dans l’acception péjorative du terme—, mais de “mettre en rapport” en
vue d’aboutir A une interprétation plus équilibrée du fait littéraire.
En effet, la constatation de l’autre incite A mieux nous connaitre —la
lit:éra:ure comparée raous aide a mieux comprendre, e: pourquoi pas? a
mieux défendre chacune de nos lit:ératures, disait Mmt Nieeupako?eva
(Étiemble, 1963: 88)—. Elle nous permet d’étre plus conscients des ¡acunes
de notre littérature comme de mieux savoir jouir des innovations qu’elle a
su exporter. Nous ne saurions que trop attirer l’attention sur les probl~mes
qui naissent de ce repli sur soi. Qui plus est, la théorisation culturelle peut
souvent étre grevée par la méconnaissance de ¡‘autre, de celui qu’on a
maintes fois ignoré ou, qui pis est, méprisé. Miner l’a montré avec une
grande force de conviction dans son analyse sur les études comparées inter-
culturelles, oú il attaque l’atavisme vicieux de l’impérialisme occidental
selon lequel la littérature non occidentale n’existe pas, ou si elle existe elle
n’a pas d’importance (Miner, 1989: 177). Des progr~s sont en train de se
faire dans ce domaine, et il est sans doute encourageant de voir publides
des études orientées en ce sens’. Le concept d’altérité est donc une partie
essentielle de la littérature comparée ou, encore, la considération habituelle
de l’existence de l’Au:re (Pageaux, 1986: 69); comme disait Octavio Paz:
Lo véritable vie rae s ‘oppose ni ~ la vie quotidienne ni a la vie hérotque;
Mettons pour cas le Sixihne Syinposium de la Société Espagnole de Liflérature Générale
a Comparée (1989), qul a eonsacit une importante paule de sea travaux aux contiucaces
littérnirts eL textuelles entre l’Orient eL ¡Europe.
L‘qítéñié en an: que prémisse de La Ijítérature comparée 249
elle es: la perception de 1 ‘écla: in:ermit:ent de la “otredad” dans :ous nos
actes, saras exception dii plus petfr (Paz, 1976: 266).
Mais l’altérité ne finit pas 1k; elle est beaucoup plus qu’une donnée, plus
encore que la constatation d’une réalité: elle est surtout une attitude, un
certain préjugé en quelque sorte, si l’on ¡mus permet l’expression. De 1k
que l’altérité soit pour le critique de littérature comparée ce qu’est l’objecti-
vité —la Wenfreihei:, dirait Max Weber (Madelénat, 1989: 110)— pour le
sociologue. A proprement dire, on pourrait meme avancer que c’est 1k oú
réside l’objectivité du comparatiste: la constatation pure et simple de l’exis-
tence de ¡‘autre. Ensuite, u faut “savoir” le distinguer, car le regard nc
témoigne pas toujours d’une image de l’extériorité: par l’effet de distance
—peu importe qu’elle soit ici spatiale ou temporelle—, les yeux du sujet qui
s’adonne k cette tache ne sont pas toujours forcément bien adaptés aux
dimensions de l’objet k étudier; il tui faut alors se servir des moyens adé-
quats, d’oú l’attitude de cette discipline. Effectivement, gráce k celle-ci, la
dimension du texte écrit acquiert une autre perspective, une perspective que
d’aucuns ont appelée télescopique (M. Schmeling). Ainsi, cette discipline
nous aiderait ainsi k regarder de pr&s les productions littéraires étrangéres.
II est vrai que rien ne pourra éliminer —exception faite et de l’ouverture
totale et du bilinguisme parfait—, l’obstacle évident qu’est la verri~re, le
matériel linguistique étranger. Mais u ne faut pas oublier que c’est cette
máme verri~re qui rend possible en grande partie ce rapprochement.
D’ailleurs, puisque l’on ne peut oublier que l’un des objectifs spécifi-
ques de la littérature est le plaisir, la lecture de textes autres que ceux de la
littérature nationale ne pourra-t-elle pas, le moment venu, apporter cette
satisfaction intellectuelle?
La prémisse de l’altérité, point capital des études interculturelles, rend
raison de la véritable nature de la littérature comparée. Gráce k son ouver-
ture d’esprit, celle-ci a un caract~re éminemment expansif, aussi bien par la
pluralité des littératures nationales qu’elle touche, que par la diversité du
champ d’application ou, encore, par ses rapports avec les autres disciplines
(Gorceix, 1983: 127). Cette tendance á la dilatation suffirait á expliquer
pourquoi les authentiques études comparatistes ne connaissent d’obstacles ni
dans l’espace ni dans le temps. Logiquement, les principaux problémes
pourraient naitre du fait que les frontiéres existent, tout comme existent
aussi les périodisations entre les différentes époques de l’histoire littéraire.
Mais nous sommes ici face k une discipline soucieuse de décloisonner les
eraseignemen:s littéraires (Pageaux, 1986: 72).
Si les frontiéres existent, il serait illusoire, voire ridicule, de les igno-
rer. Elles peuvent ¿tre politiques, historiques, culturelles, linguistiques,
etc., et le comparatiste doit tenir compte des différents aspects qui entrent
en action dés que l’on franchit l’une de ces barriéres. Ainsi, par exemple,
le critique séricux nc peut ignorer les conditionnements culturels qu’a
connus, ou que connatt encore par endroits, l’importation de nouvelles
250 José Manuel Losada Goya
idées littéraires dans les pays qui sont soumis -ou l’ont été- A un régime
communiste. C’est une donnée qui doit &tre prise en considération lors de
toute étude de réception concernant ces ensembles culturels. Un autre do-
maine d’action oú les frontiéres doivent átre bien délimitées avant de passer
k l’analyse litt&aire, est celul des ¿tudes intraculturelles, qui sont nettement
distinctes des études interculturelles. Celles-ci sont exercées sur des langues
n’appartenant pas A la méme famille et dont l’influence n’est pas discutée
(Miner, 1989: 164). II n’en demeure pas rnoins que le point de repére
capital est celui des frontiéres ayant pour fondement les critéres d’ordre
Iinguistique (Weisstein, 1975: 37-42). Mais k nouveau encore il y aurait ici
quelques remarques A faire. Que faire, par exemple, des littératures d’une
seule et unique langue qui se développent dans différents pays? Peut-on les
considérer comme des ensembles dans lesquels on aurait la possibilité de
mener A bien la mise en apptication des relations évoquées plus haut? C’est
le cas, par exemple, de la communauté francophone, celui de la commu-
nauté hispanophone ou encore celui de la communauté lusophone... Lors de
la publication d’un récent manuel d’introduction A la littérature comparée,
on a ouvert un débat abordant ce suje?; sans nullement dédaigner la tradi-
tionnelle frontiére linguistique, II est en effet trés intéressant de repérer
d’autres frontiéres qui passent A l’intérieur d’une méme langue: celles de la
culture, de la tradition, du niveau social...
La conséquence de La remarque précédente serait l’un des postulats
qu ont toujours défendu les critiques comparatistes: U n’existe pas —tout du
moins de fa~on générale— de littérature en vase dos (Lambert, 1986: 52).
Les courants et les idées, les belles trouvailles textuelles et les aphorismes
traversent les frontiéres. Qn pourra nuancer les circonstances de ces passa-
ges, aussi bien que leur débit ou leur ressemblance au modéle, mais ces
passages existent bel et bien.
II est un autre type de frontiéres qul présente aussi ses conditionnements
spécifiques: c’est celui des coordonnées temporelles. De nos jours c’est de
plus en plus évident. Le développement technologique offre la possibilité de
se procurer k has prix et dans les moindres délais n’importe quel ouvrage
écrit il y a A peine quelques mois ou quelques décennies A l’autre bout du
monde. Mais u n’en a pas toujours été ainsi, et Von pourrait objecter un
cloisonnement littéraire A travers les Ages. Ce qui pourrait signifier —étant
donné l’exigulté d’une telle approche de la littérature— une sérieuse entra-
ve; laquelle devient un défi sans cesse osé par les ¿tudes de littérature
~ Vid. Rulletin de Liaison e, d‘Injormaflon de la Société Fran~aisede Liltérature Géné-
rule el Comparée. printemps ¡990. no 8, pp. 38-42. Le manuel est ccliii d’Yves Chevrel, La
Ulléralure co,nparée. Paris: Presses Universitaires de France, colí. Que sais-je?, 1989. Le n~
12, prinleunps ¡992, dc ce Balletin sugg=rede reinarquables d¿es ~ ce sujet; II est consacré A
la littérature cotnparée el la francophonie.
L‘aftértt¿ en taní que prémisse de la littéraíure comparée 251
comparée. Cette discipline a été parfois définie comme un “lift”, un ascen-
seur qui met en rapport la littérature de différents “étages” ou siécles de
l’histoire, ceux du passé et ceux du présení. En effet, l’approche compara-
tiste sait que le présera: es: :oujours chargé de moments du passé, c‘es:-ñ-
dire, u apparal: :oujours comme une accumulation de momerais passés
(Nethersole, 1989: 8?), tel qu’on peut le déduire des principaux textes oú
la récréation du passé acquiert des dimensions ontologiques; nous pensons
maintenant aux Mémoires d ‘ou:re-:ombe, A la recherche du :emps perdu ou
k l’euvre biographique de Julien Green. Ceci expliquerait, A notre avis,
l’énorme développement qu’ont connu dans les derniers temps les études de
philologie classique dans bus les domaines: histoire, rhétorique, mytholo-
gle... Ce que l’on comprend mieux quand on sait que l’esprit comparatiste
nie par principe l’existence simultanée de structures discontinues qui ca-
ractériseraient les périodes particuliéres (Nethersole, 1989: 87). Tel d’ail-
leurs est le dessein que Victor Hugo avait pour sa Légende des Siécles:
Exprimer 1 ‘humanité dans une espéce d ‘ceuvre cyclique; la peindre successi-
yemen: e: simultanémení sous tous ses aspeas, histoire, Jable, philosophie,
religion, science, lesqucis se résumení en un seul et immense mouvemerat
d’ascension vers la lumiére (Hugo, 1950: 3). Ainsi donc, non seulement les
études synchroniques, mais aussi les études diachroniques —centrées Sur la
longue durée— acqui&ent dans la littérature comparée un véritable droit de
cité (Pageaux, 1986: 68).
Par voie de conséquence, la littérature comparée doit faire grand cas des
circonstances historiques particuli~res A un pays déterminé. Gr¿ce k cet
abord on peut comprendre, par exemple, l’évolution littéraire du pays en
question ou d’un groupe littéraire de ce méme pays. II est méme des cas ot¡
il serait difficile de suivre autrement les diverses manifestations qui ne
répondent pas A des causes habituelles. Pensons par exemple A l’évolution
des littératures tchéque et frangaise. Leurs relations culturelles remontent au
moyen ¿ge; pourtant la plus grande influence s’est surtout manifestée A
partir des “lumi~res” et pendant tout le XIXt siécle. Apr~s la premi~re
guerre, ces relations se sont encore intensifiées —el cela aussi bien en ce
qui concerne les tendances dites “progressistes” que le courant catholique,
plus particulibrement le catholicisme social. Toutefois, quelques données
historiques ne sauraient étre mutiles: le rapprochement progressif de la
littérature frangaise n’est pas seulement le résultat du prestige de cette
civilisation auprés des inrellectuels tchéques: un approfondissement plus
sérieux nous permettrait de constater l’éloignement progressif, lui aussi, par
rapport k l’infiuence autrichienne, clivage qui se fit notoire lors du Congrés
de Vienne et qui devint presque incontrólable vers 1867, A partir du dua-
lisme austro-hongrois. C’est en agissant de la sorte que la littérature com-
parée atteint l’un de ses principaux objectifs: celui d’éclairer une nature et
une évolution litt¿raires en retragant la courbe des relations entre deux ou
plusieurs pays. De cene réfiexion A propos des passages qu’une littérature
252 José Manuel Losada Goya
fait réellement sans entraves spatiales ou temporelles, on peut déduire
qu‘elle se présente comme l’outil idéal au moment de dresser un constat
objectif d’un rapport littéraire précis. Quelles seraient donc les limites du
comparatiste? A notre avis, il n’en aurait que celles de son bagage culturel,
qu’il doit sans cesse rafratchir et élargir: langue, formation, connaissances,
esprit... Aussi, par les ouvertures qu’elle suscite et qu’elle pratique en
direction des littératures et des cultures étrangéres, par l’accent mis sur le
caractére relationnel des textes littéraires et des faits de culture (Pageaux,
1986: 67), la littérature comparée se veut une discipline sans fronti~res, et
elle peul dire comme MéphistophéI~s dans ltuvre de Goethe: Le large
lib¿2re 1 ‘esprit, et la u n ‘est pas besoin d ‘aiguiser le génie (Faustus, partie
II, acte V, sc~ne 3).
II n’existe pas de véritable comparatisme sans la confrontation des mani-
festations de deux littératures, et il est fort A souhaiter que cette mise en
rapport embrasse celles de plusieurs langues et pays: tel est le principe
fondamental de la multinationalité.
Mais il est un deuxi~me principe gui a été souvent négligé dans le passé
et qui est pourtant la condition indispensable pour une authentique approche
comparatiste, et qui n’est autre que la supranationalité. A elle seule, cette
caractéristique de “littérature supranationale” contribue A une meilleure
compréhension de la vocation de la littérature comparée; justement Guillén
l’a tr~s bien montré en la confrontant A celle de la littérature internationale.
II insiste ainsi sur un aspect fondamental de ces études: elles ne surgissent
pas des littératures nationales —ou des relations entre ces littératures—,
mais d’un effort pour éclaircir les propriétés de la communication littéraire
(Guillén, 1985: ¡3-14; 93-121). Pour continuer dans le sens de la réflexion
de ce critique, nous dirions, par exemple, que ce n’est pas l’étude de telle
ou telle piéce tragique qui va nous apprendre ce qu’est la tragédie; en
revanche, ¡‘¿tude, prenons pour exemple le cas des différentes métamor-
phoses d’une pi~ce tragique d’Euripide au travers des ¿ges, des langues et
des pays, semble plus apte pour répondre A notre question sur l’essence de
la tragédie. En effet, ce n’est pas parce qu’on étudie une période littéraire
en plusieurs langues qu’on devient comparatiste: il faut de surcroit suivre
une démarche neutre dans l’¿tude des macrostructures philologiques et
culturelles. Hugo Dyserinck en apporte la preuve A travers l’exemple du
classicisme allemand, dont les ínanifestations sont circonscritcs entre la
moitié du xviiie si&le et celle du XIXC: le comparatiste, dit Dyserinck,
doi: 1 ‘étudier non pas dans le sens de 1 ‘interprétation allemande du terme
«classique», mais aussi dans la perspec:ive d ‘une class4fication tout a fai:
d¿tférente, celle de la France, par ¿temple avec sa période classique du
xvi,” siécle. E:u devra ¿tudier aussi les rapports entre la période «classi-
que» allernande e: la liuéra:ure anglaise e: les relatioras entre 1 ‘Angleterre
e:la France a cette époque (Dyserinck, 1990: 6 et Pageaux, 1990: 23-24),
autrement, il n’aurait fait —ce qul n’est par ailleurs que trés licite— qu’un
L aliérué en ¡ant que prémtsse de la littéraíure comparée 253
approfondissement d’une littérature nationale. Ceci nous convie á la ré-
flexion Sur la mani~re dont on doit mener k bien ces études. II est néces-
saire que le comparatisme se lib~re des entraves du temps et de l’espace,
des frontiéres, disions-nous plus haut; mais il doit en méme temps acquérir
le recul nécessaire par rapport k sa propre littérature, bref, il doit dépasser
tout nationalisme qui puisse nuire á l’objectivité dont il est le garant.
S’iJ agit de la sorte, u atteindra les principaux objectifs de la littérature
comparée dans le domaine des échanges interculturels. Ainsi, d’abord, II
sera mieux k méme de connaitre et de respecter une littérature nationale
déterminée. Ensuite, dans un deuxiéme temps, l’objectivité et le recul
nécessaires l’aideront-ils sans doute k mieux discerner la vérite, k ne pas
confondre les tendances accidentelles (...) avec l’universel (Miner, 1989:
166). Finalcment, cet élargissement des perspectives gui est ¿ la base de la
littérature comparée (Wellek et Warrren: 112) le rendra capable de redéfi-
nir la litt¿rature et, avec elle, de mieux comprendre l’Homme.
“La <eornpamtio~ pennette, fra ¡‘altro di distinguere jI vero dal falso, ¡‘eccezione dal
luogo coznune” ¡talo Siciliano, “Nota sulla letteratura comparata” dana Lenerazure conipara-
¡e. Proble,ni e metodo, Studi in onore di Ettore Paratore, Bologna, Pátron, 1981, vol. IV, p.
2009.
254 José Manuel Losada Goya
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L‘ahérité en ¡ant que prémisse de la linércaure comparée 255
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Pour un renouveau des études comparatistes”, dans Sensus communis, Con-
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Gunter Narr Verlarg.
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  • 1. L’altérité en tant que prémisse de la Littérature Comparée JosÉ MANUEL LosADA GoyA. U.C.M. Personne n’a jamais douté de l’importance des études portant sur la littérature nationale. Par ailleurs, II ne pourrait étre que dommageable de ne pas initier nos étudiants dans la connaissance des principaux auteurs, idées et textes dont s’est nourrie, depuis toujours, la mentalité de notre pays. Cela, on le fait depuis fon longtemps, ji faut continuer ~le faire. II est certain, en revanche, qu’on est parfois tombé dans un nationalisme —voire un provincialisme—, qui n’est pas sans nuire á la formation souhai- table de la personnalité d’un lycéen ou d’un étudiant. Le principal obstacle a 1 ‘é:ude interculturelle es: le préjugé du provincialisme, a-t-on dit (Miner, 1989: 179). Comme tout extrémisme, cette recherche désordonnée et nar- cissiste qul emprunte des voies nationalistes et qui est le plus souvent orlen- tée vers des buts idénlogiques (Guillén, 1985: 14), appara?t fondamentale- ment viciée. Cette exclusivité des littératures nationales ainsi pratiquées (Doubrovsky, 1910: 14) a ses propres limites, on ne saurait le cacher (Weisstein, 1975). Ainsi, nous nous trouvons sur la ligne de démarcation entre deux domaines qu’on a trop souvent con9us comme des entités oppo- sées: l’identité et I’altérité. Diderot s’était déjh heurté á ce prob1~me quand il avait posé les principes de la dialectique des éclectiques: La séité ou le soi, la quiddité ou le ce, 1 ‘identité, la diversité ou 1 ‘altérité nc son: pas, d proprementparler, les qualités de 1 ‘&re; mais ce son: ses propriétés, des concomitants nécessaires de 1 ‘existence actuelle (Enc-yclopédie, 1976, t. VII: 86). Or, rien de plus faux que de les séparer comme s’il s’agissait d’abstractions antinomiques: de m6me que l’identité n’a aucun sens, privée de la dimension sociale, l’altérité, coupée de la constante réfiexion sur soi- méme, sombre dans le néant. Revista de Filología Francesa, 5. Editorial Complutense, Madrid, ¡994.
  • 2. 248 José Manuel Losada Goya II est question, par conséquent, de se fixer comme objectif une forma- tion la plus compléte possible, car la découverte d’autres littératures peut et doit collaborer au plein épanouissement des mentalités. En effet, on montre volontiers ses griffes contre toute approche qui puisse constituer une me- nace contre la paisible situation des acquis; or, il ne s’agit pas ici d’inimi- tié, mais d’une véritable coopération dans un méme but. S’il est vrai que la relation culturelle qui occupe les comparatistes est presque toujours un “rapport de force”, il ne l’est pas moins que celui-ci ne différe point du dessein ultime qui est de parvenir A un dialogue de cultures, d’apr~s l’ex- pression de Guillermo de Torre. Cette affirmation ne signifie nullement favoriser, souligne Daniel Pageaux, un quelconque type de manichéisme ou une vision belliqueuse de l’univers comparatiste, mais plutót nous rappeler l’indispensable fondement des rapports littéraires et culturels qui, jusqu’á un certain point, ne sont pas autonomes mais dépendants des conjonctures historiques late sensu (Pageaux, 1990: 23). On ne saurait trop insister sur cette dimension unificatrice de la littérature comparée. Peut-étre le terme choisi depuis sa naissance n’est-il pas pour rien dans ce malentendu: la littérature comparée ne doit jamais se donner pour but de “comparer” —dans l’acception péjorative du terme—, mais de “mettre en rapport” en vue d’aboutir A une interprétation plus équilibrée du fait littéraire. En effet, la constatation de l’autre incite A mieux nous connaitre —la lit:éra:ure comparée raous aide a mieux comprendre, e: pourquoi pas? a mieux défendre chacune de nos lit:ératures, disait Mmt Nieeupako?eva (Étiemble, 1963: 88)—. Elle nous permet d’étre plus conscients des ¡acunes de notre littérature comme de mieux savoir jouir des innovations qu’elle a su exporter. Nous ne saurions que trop attirer l’attention sur les probl~mes qui naissent de ce repli sur soi. Qui plus est, la théorisation culturelle peut souvent étre grevée par la méconnaissance de ¡‘autre, de celui qu’on a maintes fois ignoré ou, qui pis est, méprisé. Miner l’a montré avec une grande force de conviction dans son analyse sur les études comparées inter- culturelles, oú il attaque l’atavisme vicieux de l’impérialisme occidental selon lequel la littérature non occidentale n’existe pas, ou si elle existe elle n’a pas d’importance (Miner, 1989: 177). Des progr~s sont en train de se faire dans ce domaine, et il est sans doute encourageant de voir publides des études orientées en ce sens’. Le concept d’altérité est donc une partie essentielle de la littérature comparée ou, encore, la considération habituelle de l’existence de l’Au:re (Pageaux, 1986: 69); comme disait Octavio Paz: Lo véritable vie rae s ‘oppose ni ~ la vie quotidienne ni a la vie hérotque; Mettons pour cas le Sixihne Syinposium de la Société Espagnole de Liflérature Générale a Comparée (1989), qul a eonsacit une importante paule de sea travaux aux contiucaces littérnirts eL textuelles entre l’Orient eL ¡Europe.
  • 3. L‘qítéñié en an: que prémisse de La Ijítérature comparée 249 elle es: la perception de 1 ‘écla: in:ermit:ent de la “otredad” dans :ous nos actes, saras exception dii plus petfr (Paz, 1976: 266). Mais l’altérité ne finit pas 1k; elle est beaucoup plus qu’une donnée, plus encore que la constatation d’une réalité: elle est surtout une attitude, un certain préjugé en quelque sorte, si l’on ¡mus permet l’expression. De 1k que l’altérité soit pour le critique de littérature comparée ce qu’est l’objecti- vité —la Wenfreihei:, dirait Max Weber (Madelénat, 1989: 110)— pour le sociologue. A proprement dire, on pourrait meme avancer que c’est 1k oú réside l’objectivité du comparatiste: la constatation pure et simple de l’exis- tence de ¡‘autre. Ensuite, u faut “savoir” le distinguer, car le regard nc témoigne pas toujours d’une image de l’extériorité: par l’effet de distance —peu importe qu’elle soit ici spatiale ou temporelle—, les yeux du sujet qui s’adonne k cette tache ne sont pas toujours forcément bien adaptés aux dimensions de l’objet k étudier; il tui faut alors se servir des moyens adé- quats, d’oú l’attitude de cette discipline. Effectivement, gráce k celle-ci, la dimension du texte écrit acquiert une autre perspective, une perspective que d’aucuns ont appelée télescopique (M. Schmeling). Ainsi, cette discipline nous aiderait ainsi k regarder de pr&s les productions littéraires étrangéres. II est vrai que rien ne pourra éliminer —exception faite et de l’ouverture totale et du bilinguisme parfait—, l’obstacle évident qu’est la verri~re, le matériel linguistique étranger. Mais u ne faut pas oublier que c’est cette máme verri~re qui rend possible en grande partie ce rapprochement. D’ailleurs, puisque l’on ne peut oublier que l’un des objectifs spécifi- ques de la littérature est le plaisir, la lecture de textes autres que ceux de la littérature nationale ne pourra-t-elle pas, le moment venu, apporter cette satisfaction intellectuelle? La prémisse de l’altérité, point capital des études interculturelles, rend raison de la véritable nature de la littérature comparée. Gráce k son ouver- ture d’esprit, celle-ci a un caract~re éminemment expansif, aussi bien par la pluralité des littératures nationales qu’elle touche, que par la diversité du champ d’application ou, encore, par ses rapports avec les autres disciplines (Gorceix, 1983: 127). Cette tendance á la dilatation suffirait á expliquer pourquoi les authentiques études comparatistes ne connaissent d’obstacles ni dans l’espace ni dans le temps. Logiquement, les principaux problémes pourraient naitre du fait que les frontiéres existent, tout comme existent aussi les périodisations entre les différentes époques de l’histoire littéraire. Mais nous sommes ici face k une discipline soucieuse de décloisonner les eraseignemen:s littéraires (Pageaux, 1986: 72). Si les frontiéres existent, il serait illusoire, voire ridicule, de les igno- rer. Elles peuvent ¿tre politiques, historiques, culturelles, linguistiques, etc., et le comparatiste doit tenir compte des différents aspects qui entrent en action dés que l’on franchit l’une de ces barriéres. Ainsi, par exemple, le critique séricux nc peut ignorer les conditionnements culturels qu’a connus, ou que connatt encore par endroits, l’importation de nouvelles
  • 4. 250 José Manuel Losada Goya idées littéraires dans les pays qui sont soumis -ou l’ont été- A un régime communiste. C’est une donnée qui doit &tre prise en considération lors de toute étude de réception concernant ces ensembles culturels. Un autre do- maine d’action oú les frontiéres doivent átre bien délimitées avant de passer k l’analyse litt&aire, est celul des ¿tudes intraculturelles, qui sont nettement distinctes des études interculturelles. Celles-ci sont exercées sur des langues n’appartenant pas A la méme famille et dont l’influence n’est pas discutée (Miner, 1989: 164). II n’en demeure pas rnoins que le point de repére capital est celui des frontiéres ayant pour fondement les critéres d’ordre Iinguistique (Weisstein, 1975: 37-42). Mais k nouveau encore il y aurait ici quelques remarques A faire. Que faire, par exemple, des littératures d’une seule et unique langue qui se développent dans différents pays? Peut-on les considérer comme des ensembles dans lesquels on aurait la possibilité de mener A bien la mise en apptication des relations évoquées plus haut? C’est le cas, par exemple, de la communauté francophone, celui de la commu- nauté hispanophone ou encore celui de la communauté lusophone... Lors de la publication d’un récent manuel d’introduction A la littérature comparée, on a ouvert un débat abordant ce suje?; sans nullement dédaigner la tradi- tionnelle frontiére linguistique, II est en effet trés intéressant de repérer d’autres frontiéres qui passent A l’intérieur d’une méme langue: celles de la culture, de la tradition, du niveau social... La conséquence de La remarque précédente serait l’un des postulats qu ont toujours défendu les critiques comparatistes: U n’existe pas —tout du moins de fa~on générale— de littérature en vase dos (Lambert, 1986: 52). Les courants et les idées, les belles trouvailles textuelles et les aphorismes traversent les frontiéres. Qn pourra nuancer les circonstances de ces passa- ges, aussi bien que leur débit ou leur ressemblance au modéle, mais ces passages existent bel et bien. II est un autre type de frontiéres qul présente aussi ses conditionnements spécifiques: c’est celui des coordonnées temporelles. De nos jours c’est de plus en plus évident. Le développement technologique offre la possibilité de se procurer k has prix et dans les moindres délais n’importe quel ouvrage écrit il y a A peine quelques mois ou quelques décennies A l’autre bout du monde. Mais u n’en a pas toujours été ainsi, et Von pourrait objecter un cloisonnement littéraire A travers les Ages. Ce qui pourrait signifier —étant donné l’exigulté d’une telle approche de la littérature— une sérieuse entra- ve; laquelle devient un défi sans cesse osé par les ¿tudes de littérature ~ Vid. Rulletin de Liaison e, d‘Injormaflon de la Société Fran~aisede Liltérature Géné- rule el Comparée. printemps ¡990. no 8, pp. 38-42. Le manuel est ccliii d’Yves Chevrel, La Ulléralure co,nparée. Paris: Presses Universitaires de France, colí. Que sais-je?, 1989. Le n~ 12, prinleunps ¡992, dc ce Balletin sugg=rede reinarquables d¿es ~ ce sujet; II est consacré A la littérature cotnparée el la francophonie.
  • 5. L‘aftértt¿ en taní que prémisse de la littéraíure comparée 251 comparée. Cette discipline a été parfois définie comme un “lift”, un ascen- seur qui met en rapport la littérature de différents “étages” ou siécles de l’histoire, ceux du passé et ceux du présení. En effet, l’approche compara- tiste sait que le présera: es: :oujours chargé de moments du passé, c‘es:-ñ- dire, u apparal: :oujours comme une accumulation de momerais passés (Nethersole, 1989: 8?), tel qu’on peut le déduire des principaux textes oú la récréation du passé acquiert des dimensions ontologiques; nous pensons maintenant aux Mémoires d ‘ou:re-:ombe, A la recherche du :emps perdu ou k l’euvre biographique de Julien Green. Ceci expliquerait, A notre avis, l’énorme développement qu’ont connu dans les derniers temps les études de philologie classique dans bus les domaines: histoire, rhétorique, mytholo- gle... Ce que l’on comprend mieux quand on sait que l’esprit comparatiste nie par principe l’existence simultanée de structures discontinues qui ca- ractériseraient les périodes particuliéres (Nethersole, 1989: 87). Tel d’ail- leurs est le dessein que Victor Hugo avait pour sa Légende des Siécles: Exprimer 1 ‘humanité dans une espéce d ‘ceuvre cyclique; la peindre successi- yemen: e: simultanémení sous tous ses aspeas, histoire, Jable, philosophie, religion, science, lesqucis se résumení en un seul et immense mouvemerat d’ascension vers la lumiére (Hugo, 1950: 3). Ainsi donc, non seulement les études synchroniques, mais aussi les études diachroniques —centrées Sur la longue durée— acqui&ent dans la littérature comparée un véritable droit de cité (Pageaux, 1986: 68). Par voie de conséquence, la littérature comparée doit faire grand cas des circonstances historiques particuli~res A un pays déterminé. Gr¿ce k cet abord on peut comprendre, par exemple, l’évolution littéraire du pays en question ou d’un groupe littéraire de ce méme pays. II est méme des cas ot¡ il serait difficile de suivre autrement les diverses manifestations qui ne répondent pas A des causes habituelles. Pensons par exemple A l’évolution des littératures tchéque et frangaise. Leurs relations culturelles remontent au moyen ¿ge; pourtant la plus grande influence s’est surtout manifestée A partir des “lumi~res” et pendant tout le XIXt siécle. Apr~s la premi~re guerre, ces relations se sont encore intensifiées —el cela aussi bien en ce qui concerne les tendances dites “progressistes” que le courant catholique, plus particulibrement le catholicisme social. Toutefois, quelques données historiques ne sauraient étre mutiles: le rapprochement progressif de la littérature frangaise n’est pas seulement le résultat du prestige de cette civilisation auprés des inrellectuels tchéques: un approfondissement plus sérieux nous permettrait de constater l’éloignement progressif, lui aussi, par rapport k l’infiuence autrichienne, clivage qui se fit notoire lors du Congrés de Vienne et qui devint presque incontrólable vers 1867, A partir du dua- lisme austro-hongrois. C’est en agissant de la sorte que la littérature com- parée atteint l’un de ses principaux objectifs: celui d’éclairer une nature et une évolution litt¿raires en retragant la courbe des relations entre deux ou plusieurs pays. De cene réfiexion A propos des passages qu’une littérature
  • 6. 252 José Manuel Losada Goya fait réellement sans entraves spatiales ou temporelles, on peut déduire qu‘elle se présente comme l’outil idéal au moment de dresser un constat objectif d’un rapport littéraire précis. Quelles seraient donc les limites du comparatiste? A notre avis, il n’en aurait que celles de son bagage culturel, qu’il doit sans cesse rafratchir et élargir: langue, formation, connaissances, esprit... Aussi, par les ouvertures qu’elle suscite et qu’elle pratique en direction des littératures et des cultures étrangéres, par l’accent mis sur le caractére relationnel des textes littéraires et des faits de culture (Pageaux, 1986: 67), la littérature comparée se veut une discipline sans fronti~res, et elle peul dire comme MéphistophéI~s dans ltuvre de Goethe: Le large lib¿2re 1 ‘esprit, et la u n ‘est pas besoin d ‘aiguiser le génie (Faustus, partie II, acte V, sc~ne 3). II n’existe pas de véritable comparatisme sans la confrontation des mani- festations de deux littératures, et il est fort A souhaiter que cette mise en rapport embrasse celles de plusieurs langues et pays: tel est le principe fondamental de la multinationalité. Mais il est un deuxi~me principe gui a été souvent négligé dans le passé et qui est pourtant la condition indispensable pour une authentique approche comparatiste, et qui n’est autre que la supranationalité. A elle seule, cette caractéristique de “littérature supranationale” contribue A une meilleure compréhension de la vocation de la littérature comparée; justement Guillén l’a tr~s bien montré en la confrontant A celle de la littérature internationale. II insiste ainsi sur un aspect fondamental de ces études: elles ne surgissent pas des littératures nationales —ou des relations entre ces littératures—, mais d’un effort pour éclaircir les propriétés de la communication littéraire (Guillén, 1985: ¡3-14; 93-121). Pour continuer dans le sens de la réflexion de ce critique, nous dirions, par exemple, que ce n’est pas l’étude de telle ou telle piéce tragique qui va nous apprendre ce qu’est la tragédie; en revanche, ¡‘¿tude, prenons pour exemple le cas des différentes métamor- phoses d’une pi~ce tragique d’Euripide au travers des ¿ges, des langues et des pays, semble plus apte pour répondre A notre question sur l’essence de la tragédie. En effet, ce n’est pas parce qu’on étudie une période littéraire en plusieurs langues qu’on devient comparatiste: il faut de surcroit suivre une démarche neutre dans l’¿tude des macrostructures philologiques et culturelles. Hugo Dyserinck en apporte la preuve A travers l’exemple du classicisme allemand, dont les ínanifestations sont circonscritcs entre la moitié du xviiie si&le et celle du XIXC: le comparatiste, dit Dyserinck, doi: 1 ‘étudier non pas dans le sens de 1 ‘interprétation allemande du terme «classique», mais aussi dans la perspec:ive d ‘une class4fication tout a fai: d¿tférente, celle de la France, par ¿temple avec sa période classique du xvi,” siécle. E:u devra ¿tudier aussi les rapports entre la période «classi- que» allernande e: la liuéra:ure anglaise e: les relatioras entre 1 ‘Angleterre e:la France a cette époque (Dyserinck, 1990: 6 et Pageaux, 1990: 23-24), autrement, il n’aurait fait —ce qul n’est par ailleurs que trés licite— qu’un
  • 7. L aliérué en ¡ant que prémtsse de la littéraíure comparée 253 approfondissement d’une littérature nationale. Ceci nous convie á la ré- flexion Sur la mani~re dont on doit mener k bien ces études. II est néces- saire que le comparatisme se lib~re des entraves du temps et de l’espace, des frontiéres, disions-nous plus haut; mais il doit en méme temps acquérir le recul nécessaire par rapport k sa propre littérature, bref, il doit dépasser tout nationalisme qui puisse nuire á l’objectivité dont il est le garant. S’iJ agit de la sorte, u atteindra les principaux objectifs de la littérature comparée dans le domaine des échanges interculturels. Ainsi, d’abord, II sera mieux k méme de connaitre et de respecter une littérature nationale déterminée. Ensuite, dans un deuxiéme temps, l’objectivité et le recul nécessaires l’aideront-ils sans doute k mieux discerner la vérite, k ne pas confondre les tendances accidentelles (...) avec l’universel (Miner, 1989: 166). Finalcment, cet élargissement des perspectives gui est ¿ la base de la littérature comparée (Wellek et Warrren: 112) le rendra capable de redéfi- nir la litt¿rature et, avec elle, de mieux comprendre l’Homme. “La <eornpamtio~ pennette, fra ¡‘altro di distinguere jI vero dal falso, ¡‘eccezione dal luogo coznune” ¡talo Siciliano, “Nota sulla letteratura comparata” dana Lenerazure conipara- ¡e. Proble,ni e metodo, Studi in onore di Ettore Paratore, Bologna, Pátron, 1981, vol. IV, p. 2009.
  • 8. 254 José Manuel Losada Goya RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPJflQUES * DIDEROT, D. (1976). Encyclopédie, dans ~Euvrescomplétes. Paris: Hermann, t. VII. “Eclectisme” * DOUBROVSKY, 5. (1970). Pourquoi la nouvelle critique. Cri:ique e: objectivité. Paris: Mercure de France. * ETIEMBLE, R. (1963). Comparaison n ‘es: pos raison. Lo crise de la li::éra:ure comparée. Paris: Galí imard. * GORCEIX, P. (Halbjahreshand 1983). Compte-rendu de Vergícichende Literaturwissenschaft, Hrsg. von Manfred SCHMELING, dans Archiv, 220. Band 135. .Jahrgang 1. * GUILLÉN, C. (1985). Entre lo uno y lo diverso. Introducción a la lite- ratura comparada. Barcelona: Editorial Crítica. * HUGO, Y. (1950). La Légende des Siécles. Paris: Gallimard, colí. de la Pléiade. * LAMBERT, J. (1986). “Les relations littéraires internationales”, dans Sensus communis, lontemporary Trends in (‘omparative Literature, Pano- rama de la situation actuelle en Littérature C’omparée, Festchrift fiir Henry Remak, Ilibingen: Gunter Narr Verlarg. * MADELÉNAT, D (1989). “Littérature et société”, dans BRUNEL, P. et CHEVREL, Y., Précis de lit:éra:ure comparée. Paris: Presses Universitai- res de France. * MINER, E. (1989). “Etudes comparées interculturelles”, dans lhéorie li:téraire. Paris: Presses Universitaires de France. * NETHERSOLE, (1989). “Accounling for Change in literary .history”, dans Actas del VI Simposio de la Sociedad Española de Literatura General y Comparada. Ed. por Juan PAREDES NUNEZ y Andrés SORIA OLME- DO, Granada: Ed. Universidad de Granada. * PAGEAUX, D-H. (1990). “La literatura comparada como un nuevo campo para los estudios literarios”, dans Europa en España, España en Europa. Simposio Internacional cJe Literatura Comparada. Universidad de Navarra, Barcelona: Promociones y Publicaciones Universitarias.
  • 9. L‘ahérité en ¡ant que prémisse de la linércaure comparée 255 * PAGEAUX, D-H. (1986) “Littérature comparée et sciences humaines. Pour un renouveau des études comparatistes”, dans Sensus communis, Con- :emporary Trends in Comparative Lirerature, Panorama de la situation ac- ¡¿¿elle en Litiérature Comparée, Festchrift flir Henry Remak, Túbingen: Gunter Narr Verlarg. * PAZ, 0. (1970 El arco y la lira. México: Fondo de Cultura Econó- mIca. * WEISSTEIN, U. (1975). Introducción a la literatura comparada. Barcelona: Planeta. * WELLEK et WARREN, cité par ÉTIEMBLE, (1963). Comparaison n ‘ese pas raison. La crise de la liteérature comparée. Paris: Gallimard.