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Medicina felina chirurgie - sutures du bas appareil urinaire canin et félin
1. Le Point Vétérinaire / N° 222 / Janvier-Février 2002 /44
Se former / EN QUESTIONS-RÉPONSES /
Sutures du bas appareil
urinaire canin et félin
Un choix raisonné et un bon usage du matériel de suture contribuent
au succès de la chirurgie du bas appareil urinaire
chez les carnivores domestiques.
a chirurgie du bas appareil urinaire
est courante chez les carnivores
domestiques, même si les interven-
tions sur la vessie sont plus fréquen-
tes que celles sur les uretères ou
l’urètre (voir l’ENCADRÉ “Indications d’une
cystotomie-cystorraphie et d’une cystectomie
partielle”) [2].
L’unicité physiologique de cet appareil guide le
choix des sutures [6]. Celles-ci ont pour but de
maintenir l’apposition tissulaire afin de permet-
tre une cicatrisation de la plaie chirurgicale par
première intention. Les sutures doivent persis-
ter suffisamment longtemps pour que ce proces-
sus soit possible, mais tout fil de suture est à
considérer comme un corps étranger nécessaire
qui permet la cicatrisation, mais interfère avec
cette dernière, notamment au niveau de la
vascularisation locale.
Le choix du matériel de suture tient compte de
la résistance normale des tissus, de leur vitesse
de cicatrisation, de la rapidité avec laquelle le
matériel de suture perd sa résistance à la
traction et des interactions entre le matériel et
les tissus [2]. Dans l’idéal, il doit être aussi
résistant que le tissu receveur, résister pendant
toute la durée de la cicatrisation, ne pas induire
la formation de calculs (voir l’ENCADRÉ “Risque
calculogène”) et conserver ses qualités au
contact d’une urine infectée. Les facteurs qui
modifient le déroulement habituel de la cicatri-
sation sont donc à prendre en compte :
infection, pH du milieu, traumatisme tissulaire
et tissu tumoral [4].
Quelles sont
les particularités cicatricielles
du tractus urinaire ?
Hormis quelques caractéristiques, la réponse
du bas appareil urinaire au traumatisme chirur-
gical est semblable à celle des autres organes
[1]. L’intégration de quelques notions cicatri-
cielles permet de prévenir de nombreuses
complications. Trois phases cicatricielles
successives sont définies selon les événements
observés et la vitesse de récupération de la
solidité tissulaire [1].
La cicatrisation du bas appareil urinaire est
caractérisée par une récupération rapide de la
résistance. Il convient que le choix des sutures
tienne compte de ce paramètre : elles doivent
être au moins aussi résistantes que les tissus
sur lesquels elles sont placées [2].
1. Phase inflammatoire
La vasoconstriction immédiate observée au sein
de la plaie est suivie d’une vasodilatation locale
qui apporte des facteurs de coagulation. Le
caillot de fibrine qui se forme au sein de la plaie
L
CHIRURGIE CHEZ LE CHAT ET CHEZ LE CHIEN
Le bas appareil urinaire
des carnivores domes-
tiques cicatrise rapidement. La
résistance de la plaie chirurgi-
cale est recouvrée au 21e
jour.
Les sutures urinaires nécessi-
tent une aiguille sertie à corps
rond et pointe ronde, ou ronde
modifiée (lancéolée, triangu-
laire). Les fils irrésorbables
sont à éviter. Les fils mono-
brins résorbables (polydioxa-
none, polyglyconate, polyglé-
caprone) sont généralement
appropriés. La cystorraphie
s’effectue en un plan apposi-
tionnel non perforant qui inclut
la sous-muqueuse, par surjet
ou points simples. Les uretères
et l’urètre sont suturés en un
plan de points simples perfo-
rants.
u
Résumé
par Aymeric Deneuche*
et Éric Viguier*
* ENVA,
unité pédagogique de chirurgie,
7,avenue du Général-de-Gaulle
94704 Maisons-Alfort Cedex
! Indications d’une cystotomie-cystorraphie
• Retrait de calcul vésical et urétral ou de corps
étranger.
• Uretère ectopique, correction d’urétérocœle.
• Tumeur, polype.
• Ulcères.
• Retrait de caillots sanguins, d’urothélium
nécrotique.
• Rupture vésicale.
• Biopsies (cystite récidivante).
! Indications d’une cystectomie partielle
• Tumeur, polype.
• Ulcères.
• Anomalie de l’ouraque.
• Diverticule vésical.
Indications
d’une cystotomie-cystorraphie
et d’une cystectomie partielle
! La persistance de matériel de suture dans la
lumière vésicale favorise la formation de calculs
urinaires [2, 4, 6]. La réalisation d’une suture
strictement non perforante, qui inclut la sous-
muqueuse, est parfois difficile et peut entraîner
un contact entre le fil et l’urine, d’autant que les
propriétés physiques et chimiques du fil peuvent
limiter le recouvrement épithélial [1].
! Les propriétés “calculogènes” varient d’un fil à
l’autre. Elles sont majeures pour le polypropylène,
qui est à proscrire. La lithogenèse est en outre
influencée par les conditions locales, notamment
le pH urinaire [6]. L’alcalinisation urinaire qui résulte
d’une infection bactérienne chronique favorise
ainsi grandement la lithogenèse. L’infection
prolonge en outre l’exposition du matériel de
suture en ralentissant l’épithélialisation.
Risque calculogène
D’après [3].
2. 45/ N° 222 / Janvier-Février 2002 / Le Point Vétérinaire
constitue le seul support d’union des berges de
celle-ci lors de la phase inflammatoire qui dure
trois à quatre jours. La fragilité de la plaie est
alors maximale. L’augmentation de la perméa-
bilité vasculaire et la diapédèse des cellules
inflammatoires permettent de lutter contre
l’infection, d’éliminer d’éventuels corps
étrangers et d’assurer un relargage de facteurs
chimiotactiques et de croissance, qui recrutent
des fibroblastes et stimulent la prolifération et
la migration urothéliale. Lorsque l’apposition
est correcte et la suture solide, l’urothélium
commence à couvrir les berges de la plaie en
vingt-quatre heures et la recouvre totalement
trois à quatre jours après l’intervention. Sa
fragilité ne permet pas la contention des berges
de la plaie, même si la contraction du détrusor
tend à rapprocher celles-ci.
2. Phase fibroblastique
Les fibroblastes recrutés prolifèrent et élaborent
du collagène immature. Cette phase fibroblas-
tique dure jusqu’au 14e
jour. La résistance de la
plaie augmente significativement et rapidement.
Quatorze jours après l’intervention chirurgi-
cale, la paroi vésicale retrouve 80 % de sa
résistance initiale et cette valeur atteint 100 %
à vingt et un jours. Cette période est toutefois
prolongée par tout facteur qui favorise l’acti-
vité collagénolytique, habituellement faible,
comme les traumatismes tissulaires ou les
contaminations locales [1]. De même, des
facteurs extrinsèques (radiothérapie, corticoï-
des, chimiothérapie) peuvent retarder ce proces-
sus cicatriciel. La prise en compte des éléments
qui affectent cette étape de la cicatrisation est
déterminante dans le choix du matériel de
suture, qui doit persister jusqu’à la fin de la
phase fibroblastique.
3. Phase de maturation
La phase de maturation qui suit se prolonge
jusqu’au 70e
jour. Les fibres de collagène se
réalignent selon les lignes de tension, ce qui
permet une contraction de la plaie. Ce
phénomène peut être interrompu si la pression
intravésicale dépasse la capacité de contraction,
ce qui justifie les techniques de dérivation
urinaire [6]. À ce stade, tout contact avec l’urine
engendre une inflammation et des dommages
tissulaires au niveau du site chirurgical.
Comment favoriser
la cicatrisation ?
Les traumatismes tissulaires, en nuisant à la
microvascularisation locale, retardent la cicatri-
sation par allongement de la phase fibroblas-
tique, majorent l’œdème postopératoire et
favorisent les sepsis postopératoires.
Un geste chirurgical atraumatique et une irriga-
tion régulière des tissus sont essentiels pour
faciliter la cicatrisation [2, 5].
Les manipulations doivent être délicates et
réalisées à l’aide d’instruments de qualité, à
bords en mousse et de taille adaptée. Le scalpel
est ainsi préféré aux ciseaux. Les instruments
avec des mâchoires larges et de grosses dents,
comme les pinces d’Allis, sont remplacés par
des fils de traction (PHOTO 1). Le choix du porte-
aiguilles est déterminant : il doit être adapté à
la petite taille des aiguilles employées, de façon
à ne pas modifier leur rayon de courbure et à
conserver une longueur utile satisfaisante.
La pose des sutures est complexe. Il est préféra-
ble d’effectuer un contre-appui pariétal avec la
pince mousse plutôt que de saisir la paroi à la
pince et de l’écraser lors de l’introduction de
l’aiguille.
Des sutures appliquées sans tension prévien-
nent l’ischémie, la fibrose cicatricielle et la
désunion des sutures [5].
Quel type d’aiguille
convient le mieux ?
L’utilisation d’aiguilles serties sur le fil de suture
permet de respecter une technique chirurgicale
atraumatique car elle minimise la taille des
trous qui résultent de la perforation des tissus.
Le sertissage à chas foré garantit une continuité
optimale entre le métal et le fil : ce dernier est
sécurisé à l’extrémité de l’aiguille au sein d’un
forage à cœur. Le sertissage à canal ouvert
(gorge réalisée dans l’extrémité de l’aiguille et
refermée sur le fil) est microscopiquement
moins satisfaisant.
La pose de suture sur le bas appareil urinaire
nécessite de préserver une étanchéité maximale
autour des passages de fil. Pour cette raison,
les aiguilles à pointe triangulaire, qui découpent
les tissus lors de la pénétration, sont à proscrire.
Celles à pointe et corps ronds sont idéales, car
elles écartent les tissus qui se referment ensuite
sur le fil. Cependant, l’épaississement pariétal,
rencontré lors de cystite chronique, par
exemple, rend difficile la pénétration tissulaire
d’une aiguille ronde. Il est alors possible d’utili- !!
PHOTO 1. La vessie est maintenue par des fils de traction
de façon à respecter les principes de la chirurgie atraumatique.
Cliché:A.Deneuche
3. Se former / EN QUESTIONS-RÉPONSES /
ser une aiguille ronde modifiée dont l’extrémité
de la pointe est lancéolée ou triangulaire
(aiguilles Laser®
ou Tapercut®
).
Quel type de fil choisir ?
Les fils résorbables doivent être préférés afin
de diminuer le risque calculogène et d’éviter un
retard cicatriciel dû à la persistance d’une
inflammation locale [4, 6]. La majorité des fils
résorbables présentent encore 50 % de leur
résistance initiale à quatorze jours, ce qui est
suffisant en raison de la vitesse de cicatrisation
du bas appareil urinaire.
1. Fils tressés et spiralés
L’acide polyglycolique (Dexon®(2)
) et la polyglac-
tine 910 (Vicryl®(1)
, Polysorb®(2)
) sont deux fils
tressés résorbables, dégradés par hydrolyse avec
peu de réactions tissulaires [2]. La perte de toute
résistance vingt-huit jours après l’implantation
convient à leur utilisation sur le bas appareil
urinaire. Leur nature tressée leur confère un
haut cœfficient de friction qui garantit une
grande sécurité du nœud [2].
Les vitesses de résorption de l’acide polyglyco-
lique et de la polyglactine 910 sont affectées
différemment par les modifications de pH du
milieu. L’élévation du pH liée à une infection
urinaire entraîne une accélération significative
de l’hydrolyse de l’acide polyglycolique,
notamment lors d’infection urinaire à Proteus
ou E. coli. [2, 4, 5] (voir l’ENCADRÉ “Incidence
de l’infection sur la cicatrisation”). Il est alors
préférable d’utiliser la polyglactine 910, qui est
en revanche moins résistante que l’acide
polyglycolique lorsque l’urine est acide [1, 5].
Au niveau urétral et urétéral, ce dernier est
préféré à la polyglactine 910 car il engendre une
réaction inflammatoire moindre [1].
2. Fils monobrins
Le caractère monobase d’un fil de suture limite
les lésions tissulaires par rapport à un fil tressé,
en raison d’une irritation mécanique (effet de
drague) moindre [2]. Les bactéries adhèrent
moins à la surface du fil et leur résistance à la
traction est supérieure à celle des fils tressés, à
diamètre identique [5].
La polydioxanone (PDS II®(1)
), le glycomer 631
(Biosyn®(2)
) et le polyglyconate (Maxon®(2)
), trois
monofilaments synthétiques résorbables
couramment utilisés, se dégradent lentement
dans les tissus et gardent leur résistance plus
longtemps que nécessaire, soit plus de quatre
semaines pour chacun d’eux [1, 2, 5]. Le polyglé-
caprone (Monocryl®(1)
), plus récent, présente à
quatorze jours une résistance à la traction plus
faible que la polydioxanone ou le polyglyconate
(40 % au lieu de 70 %). Dans des conditions
cicatricielles normales, ce fil, qui allie souplesse
et sécurité au nœud, est suffisant. La polydioxa-
none, le polyglécaprone 25 et le polyglyconate
engendrent une réaction inflammatoire moindre
que les fils tressés ou spiralés résorbables [6].
L’infection entraîne une perte de résistance
plus rapide, mais moins marquée que pour les
fils tressés [4, 6]. Des différences sont notées
entre les divers monofilaments : en présence
d’une infection à E. coli, la polydioxanone
garde ainsi une résistance supérieure au
polyglyconate [4].
La polydioxanone, le polyglécaprone et le
polyglyconate sont moins “calculogènes” que
les fils tressés en cas de contact avec la lumière,
bien que ces fils persistent plus longtemps
(notamment la polydioxanone) [6].
Un fil irrésorbable
est-il utilisable ?
Dans les conditions normales de cicatrisation, la
résistance pariétale est recouvrée en quatorze à
vingt et un jours. La persistance du matériel de
suture au-delà de cette période n’est d’aucune
utilité. Les fils irrésorbables sont donc à proscrire,
d’autant qu’ils peuvent entraîner des complica-
tions (lithiases, gène à l’épithélialisation, kystes,
obstruction urétérale ou urétrale) [6].
Les fils irrésorbables ne sont indiqués qu’excep-
tionnellement, lors de retard de consolidation
marqué et/ou de péritonite sévère. L’existence
actuelle de fils monobrins résorbables lents,
comme la polydioxanone, limite toutefois
considérablement leur emploi.
La persistance prolongée des sutures peut gêner
l’épithélialisation et entraîner une migration
anormale de l’urothélium le long du fil. Ce
phénomène, à l’origine de kystes, résulte d’un
stimulus inflammatoire prolongé et peut entraî-
ner une obstruction urétérale ou urétrale. Il est
particulièrement net avec le polypropylène
(Prolène®(1)
) [6]. Ce dernier engendre une
réaction fibreuse minimale au niveau de l’urètre,
mais majeure au niveau urétéral [1, 2, 3].
Certains auteurs utilisent cependant les fils
irrésorbables pour les sutures urétrales.
Les sutures automatiques
peuvent-elles être employées ?
Les sutures automatiques ont été utilisées pour
la réalisation de cystorraphie en l’absence
d’infection, lors d’infection aiguë et chronique,
sur cinquante-deux animaux. Les autopsies
réalisées au plus tard quatre mois après l’inter-
vention ont révélé seulement six agrafes
pénétrant la muqueuse. Sur l’une d’elles, les
auteurs ont observé un phénomène de cristal-
lisation, prélude à l’apparition de calculs [7].
Le nombre d’animaux concernés par la lithoge-
nèse est donc négligeable, mais toute extrapo-
lation à long terme est difficile.
Quelle taille de fil
est la plus adaptée ?
Le but des sutures est de contrer les forces de
tension qui écartent les berges de la plaie tant
que le tissu suturé n’est pas cicatrisé. Idéale-
ment, elles devraient assurer une résistance
identique à celle d’un tissu sain. Il est tentant de
choisir un matériel d’un diamètre excessif pour
éviter la déhiscence, mais ceci augmente la
Le Point Vétérinaire / N° 222 / Janvier-Février 2002 /46
!!
! L’infection altère le cours
normal de la cicatrisation.
L’épithélialisation est ralentie
et l’activité fibroblastique et
collagénolytique locale est
perturbée [6]. La desquama-
tion cellulaire, en réponse à
l’envahissement bactérien,
retarde la cicatrisation. Le
rythme de résorption des fils
de suture peut être modifié
par les conditions locales
altérées. Proteus mirabilis a
l’effet le plus dramatique.
L’uréase qu’il produit clive
l’urée en ammoniaque, ce qui
modifie le pH du milieu. En
outre, cette uréase accélère
la vitesse d’hydrolyse des
matériaux de suture. Ces
derniers se dégradent égale-
ment plus rapidement en
présence d’E. coli.
Le choix du matériel utilisé est
donc déterminant et toute
infection du tractus urinaire
doit être traitée agressivement
afin de restaurer un pH normal
et de relancer une épithéliali-
sation rapide [6].
Incidence
de l’infection
sur la
cicatrisation
(1) Janssen-Cilag.
(2) Vétoquinol.
4. 47/ N° 222 / Janvier-Février 2002 / Le Point Vétérinaire
quantité de matériel étranger au sein de la plaie,
prolonge l’inflammation locale, nuit à la vascula-
risation, retarde la cicatrisation et favorise la
lithogenèse [6]. Différentes études ont montré
que la pression intravésicale maximale atteinte
lors de la miction est faible (au plus 20 à 40 mm
de Hg). Il est donc inutile de chercher à obtenir
des valeurs supérieures avec le matériel de
suture [1, 2]. Un fil fin suffit amplement.
Il a été démontré qu’une suture de polyglactine
910 3-0 (Vicryl®(1)
déc. 2) est plus que suffisante
pour une cystorraphie chez un chien qui pèse
20 à 30 kg. La résistance à vingt-quatre heures
est même plus élevée que celle du tissu vésical
environnant [9]. Un fil de polyglactine 910 4-0
(déc. 1) est conseillé chez l’animal qui pèse
moins de 10 kg. Une décimale 3 (2-0) est adaptée
au-delà de 30 kg [9]. Un fil d’acide polyglyco-
lique ou de polyglactine 910 de 5-0 à 8-0 est
suffisant pour une suture urétérale et un fil de
3-0 à 5-0 pour une suture urétrale [2, 6, 8, 10].
Quel type de suture
vésicale réaliser ?
Il convient que la suture soit étanche, facile à
poser et qu’elle minimise la tension incision-
nelle tout en préservant la contenance vésicale,
le diamètre urétéral ou urétral et la microvas-
cularisation locale [4].
1. Inclure la sous-muqueuse
La fermeture des plaies chirurgicales ou
traumatiques du bas appareil urinaire nécessite
d’inclure systématiquement la sous-muqueuse.
Cette dernière garantit l’ancrage de la suture
[3]. Lors de la fermeture des plaies vésicales
– le plus souvent ventrales (PHOTO 2) – le praticien
prend soin de ne pas pénétrer la muqueuse, afin
de prévenir tout risque calculogène [4, 6].
La suture doit inclure des berges saines : un
parage des tissus dévitalisés est impératif,
notamment en cas de rupture du tractus
urinaire [2].
2. Un ou deux plans ?
Deux techniques de cystorraphie sont classi-
quement décrites : en deux plans inversants ou
en un plan simple appositionnel [8] (la
technique éversante est à proscrire en raison
du risque infectieux et du retard cicatriciel
qu’elle engendre).
Le premier procédé a été longtemps recom-
mandé. Il consiste en un surjet inversant de
Cushing, recouvert par un surjet de Lembert
[2, 5]. Cette méthode permet d’éviter tout
contact entre le matériel de suture et l’urine,
mais elle réduit notablement le volume
vésical et est difficile à réaliser lors d’épais-
sissement pariétal (cystite chronique,
intervention chirurgicale antérieure).
Certains auteurs proposent alors l’applica-
tion de deux surjets simples [2, 4].
Les résistances à l’éclatement de vessies
suturées avec deux plans inversants ou avec un
plan appositionnel de points simples ont été
comparées. Les auteurs ne constatent pas de
différence dans les premières vingt-quatre
heures [9]. La muqueuse recouvre totalement
la plaie suturée à quarante-huit heures lors de
suture appositionnelle, contrairement à ce qui !!
PHOTO 2. Cystotomie ventrale médiane. Traitement chirurgical
d’une urolithiase. La cystotomie ventrale médiane est
recommandée. Elle facilite l’accès au trigone vésical et minimise
le risque de lésion des plexus vasculo-nerveux par rapport
à l’abord dorsal [3, 8]. La localisation de l’incision n’affecte pas
la vitesse de cicatrisation et il a été montré que le risque
de fuites ou d’adhérences entre un abord ventral et un abord
dorsal est équivalent [4, 5].
Cliché:A.Deneuche
PHOTO 3. La cystorraphie est réalisée en un plan simple
appositionnel avec un fil monobrin synthétique résorbable.
Cliché:A.Deneuche
5. Se former / EN QUESTIONS-RÉPONSES /
est observé avec une suture inversante en deux
plans [9]. Avec une suture appositionnelle, la
solidité augmente plus rapidement dans les
quatre premiers jours et l’étanchéité est
meilleure. La préservation de la microvascula-
risation, la diminution de la quantité de
matériel de suture et l’apposition muqueuse
précise expliquent ces résultats [9].
Une suture appositionnelle en un plan est donc
préférée à un double surjet inversant en
l’absence d’infection ou d’affection retardant la
cicatrisation (PHOTO 3) [4, 6]. Le chirurgien a le
choix entre les points simples ou le surjet. Ce
dernier, plus rapide, permet une meilleure
répartition de la tension, alors que les points
simples peuvent sembler plus sécurisants.
Lors d’épaississement pariétal (infection
chronique, urolithiases, tumeurs) ou de cystec-
tomie partielle, la fermeture en un plan est en
outre de règle pour des raisons de facilité
technique et afin d’éviter une réduction majeure
du volume vésical [4].
La fermeture en deux plans peut être envisa-
gée lors de sepsis urinaire non contrôlé, de
façon à respecter des temps septique et
aseptique. Une fermeture appositionnelle en
deux plans est alors préférable en raison de
l’étanchéité et de la rapidité de cicatrisation
qu’elle garantit.
3. Protéger la suture
Après une cystorraphie, un test d’étanchéité est
réalisé grâce à l’injection de sérum physiolo-
gique dans la vessie [2, 3, 4].
Une épiploïsation est toujours conseillée pour
assurer la protection, le drainage et faciliter la
cicatrisation de la plaie chirurgicale. Si celle-ci
est impossible, un patch séreux constitué du
bord antimésentérique d’une anse jéjunale est
apposé grâce à des points simples ou à un surjet
sur le site de la cystorraphie. Il est essentiel
d’incorporer la sous-muqueuse intestinale et
vésicale, sans pénétrer la lumière de chacun des
organes [2, 4].
En phase postopératoire, il convient d’éviter
toute réplétion vésicale excessive. Si les mictions
ne sont pas spontanées, des sondages intermit-
tents sont préférés à la mise en place d’une
sonde à demeure, dont l’extrémité peut léser la
muqueuse vésicale [3, 4].
Quel type de suture
pour l’uretère ou l’urètre ?
En raison de leur faible diamètre, les sutures
urétérales et urétrales sont difficiles à réaliser
et la technique doit être précise afin d’éviter
toute sténose secondaire [2]. La préservation de
la vascularisation (notamment au niveau de
l’urètre où elle suit une distribution longitudi-
nale), les méthodes de dérivation urinaire et une
apposition exacte sans tension des berges de la
plaie permettent de limiter les complications.
1. Sutures urétérales
Les urétéro-anastomoses sont indiquées lors
de déchirure urétérale d’origine traumatique
ou iatrogène, pour traiter les urétérocœles
(dilatations de l’uretère distal) et les uretères
ectopiques (néo-urétérostomie, urétéronéocysto-
stomie).
Les urétérotomies, destinées au retrait de calculs
urétéraux, ne sont préconisées que lors d’échec
du traitement médical (dissolution) [8, 10].
Les sutures urétérales peuvent être effectuées
directement ou sur une sonde d’urétéro-
néphrostomie en silicone laissée en place
pendant dix jours [10].
Ces sutures sont plus faciles à réaliser sous une
loupe ou un microscope opératoire [8].
Un plan de points simples appositionnels ou un
surjet appositionnel conviennent aux sutures
urétérales [2, 10]. Les surjets circulaires sont
déconseillés pour éviter toute sténose [6].
En raison de la finesse pariétale des uretères,
les sutures sont perforantes et veillent à une
apposition exacte de la muqueuse [3]. En
général, leur caractère perforant ne génère pas
l’apparition de calculs urinaires, en l’absence
d’infection.
La complication la plus fréquente est la sténose,
susceptible d’entraîner une hydronéphrose. Les
fuites peuvent occasionner un uropéritoine.
Dans les deux cas, une nouvelle urétéro-anasto-
mose est nécessaire [8, 10].
2. Sutures urétrales
Les anastomoses urétrales sont le plus souvent
indiquées lors de traumatismes urétraux sévères
(déchirures concernant plus des deux tiers du
diamètre urétral). L’urètre est alors suturé sur
une sonde urinaire de diamètre adapté qui est
laissée en place cinq à sept jours. Une sonde de
cystostomie peut être posée en complément, de
façon à dévier les urines et à éviter toute fuite
ou retard de cicatrisation.
Les lésions moins étendues sont traitées par la
mise en place d’une sonde à demeure pendant
sept jours, éventuellement doublée d’une sonde
de cystostomie.
Les urétrotomies ne sont que rarement
pratiquées (lorsqu’il est impossible de ramener
un calcul urétral dans la vessie par sondage et
flushing rétrograde).
Les sutures urétrales sont en outre employées
lors d’urétrostomies et pour le traitement des
prolapsus urétraux [2, 3].
Les principes sont les mêmes que pour les
sutures urétérales. Un surjet simple apposi-
tionnel perforant ou un plan de points simples
perforants est choisi [2, 10]. En dépit d’un
diamètre supérieur à celui de l’uretère, les
surjets circulaires sont proscrits [6].
Les sténoses sont les complications les plus
fréquentes et sont corrigées par résection-
anastomose.
Les fistules, consécutives à une fuite au niveau
du site anastomotique, nécessitent dans un
premier temps un sondage urétral à demeure,
éventuellement complété par une sonde de cysto-
stomie. Une nouvelle intervention chirurgicale
est nécessaire si la fuite est toujours présente
après sept jours de dérivation urinaire [2, 3]. s
Le Point Vétérinaire / N° 222 / Janvier-Février 2002 /48
Points forts
! Un geste chirurgical
atraumatique et une irrigation
régulière des tissus
sont essentiels pour favoriser
la cicatrisation.
! La fermeture des plaies
chirurgicales ou traumatiques
du bas appareil urinaire
nécessite d’inclure
systématiquement
la sous-muqueuse.
! Une suture appositionnelle
en un plan, par points simples
ou surjet, est préférée
à un double surjet inversant
en l’absence d’infection
ou d’affection retardant
la cicatrisation.
! Un fil résorbable monté
sur une aiguille à pointe
ronde, ou Tapercut®
,
posé avec une technique
atraumatique, convient
généralement.
! Quatorze jours après
l’intervention chirurgicale,
la vessie a retrouvé 80 %
de sa résistance initiale
et cette valeur atteint 100 %
à vingt et un jours.
!!
Bibliographie
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