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L’assurance dans la nouvelle économie collaborative
Avril 2016 – © ANEO
Guillaume Cazeneuve
2
On constate depuis les deux dernières
décennies un accroissement de pratiques
économiques et sociales dites
«collaboratives». L’«économie collaborative»
1
désigne un «ensemble d’activités visant à
produire de la valeur en commun et reposant
sur de nouvelles formes d’organisation du
travail»
2
. L’économiste Jeremy Rifkin évoque
quant à lui «l’âge de l’accès» et désigne par
«collaborative commons» l’«espace digitalisé
où pourvoyeurs et usagers partagent des biens
et des services»
3
.
L’économie collaborative bouscule le
positionnement des entreprises traditionnelles
en percutant leurs marchés. Et le secteur de
l’assurance commence à être concerné. Le
magazine Capital l’a d’ailleurs identifié comme
l’un des dix créneaux porteurs pour
entreprendre de manière disruptive en 2016.
Pour cette industrie, cela signifie aussi,
paradoxalement, un retour aux sources :
l’assurance porte dans son patrimoine une
composante collaborative. Les sociétés de
secours mutuels ont en effet constitué «des
lieux de sociabilité communautaire où devait
se reconstruire le lien social sur des bases
solidaires qui étaient, en partie du moins, en
tension avec le modèle libéral de la
concurrence marchande»
4
. Ce qui n’est pas le
cas des initiatives capitalistiques actuelles où
s’insère le plus souvent un nouvel
intermédiaire rémunéré.
1
Il s’agit du vocable que nous utiliserons dans cet article
qui n’a pas pour objet d’expliciter les nuances entre les
nombreux termes auquel la littérature a recours
(«économie du partage», «économie pair à pair»,
«communs collaboratifs», «maillage»…).
2
L’économie collaborative, le nouvel eldorado ?,
Alternatives Economiques, Novembre 2015.
3
J. RIFKIN, Uber and the Zero Marginal Cost Revolution,
The Huffington Post, 9 mars 2014.
4
M. PETITCLERC, P. TOUCAS-TRUYEN, Mutualité et
protection sociale en Europe occidentale et en Amérique
du Nord, XIXe
-XXe
siècles, Histoire et société n° 16, p. 7,
octobre 2005.
3
Une économie de plus en
plus largement
collaborative
L’économie collaborative comme le troc est
une pratique ancienne que le capitalisme
numérique renouvelle profondément via
l’émergence de plateformes internet dont la
valeur ajoutée repose sur la mise en
relations d’individus. Elle s’étend aujourd’hui
pratiquement à tous les pans de
l’économie voire de la société.
Plusieurs facteurs se juxtaposent pour
favoriser l’émergence de cette économie
collaborative, où l’usage prime sur la
possession. Les nouveaux acteurs de
l’économie collaborative peuvent bénéficier de
la défiance dont pâtissent les
intermédiaires et acteurs institutionnels du
système capitaliste traditionnel.
Par ailleurs, un contexte de ralentissement
économique durable pousse les
consommateurs à rechercher des opportunités
d’arbitrages entre les services.
Ce recours à l’économie collaborative est enfin
facilité par les technologies numériques qui
permettent une impressionnante réduction des
coûts de transaction et de communication, à
un moment où la confiance des
consommateurs dans la sécurité des
transactions sur l’internet progresse.
4
D’après un sondage commandé et publié par
60 Millions de consommateurs en novembre
2014
5
, l'économie collaborative représente le
mode de consommation du XXIème siècle
pour la moitié des personnes interrogées et
deviendra aussi importante que l'économie
traditionnelle. L’économie collaborative pourrait
même atteindre 335 Mds € de chiffre
d’affaires dans le monde d’ici 2025 selon
PwC
6
(contre 15 Mds € en 2014).
L’économie collaborative et les nouveaux
modes de consommation et de production
qu’elle induit viennent diversifier la matière
assurable. Elle peut aussi favoriser
l’émergence de nouveaux compétiteurs sur
ce marché. Celle-ci est pour l’instant plus le fait
de startups que des géants du web. En
récoltant massivement des données qu’ils
savent monétiser, ceux-ci pourraient se
confronter directement aux assureurs, dont le
métier est justement d’agréger des données
pour mutualiser un risque.
De nouveaux usages
offrant des leviers de
croissance aux opérateurs
d’assurance
Les ressources des espaces de coworking, les
échanges d’appartements entre particuliers ou
encore le covoiturage constituent des objets
inédits d’assurance. Les assureurs doivent
développer de nouveaux produits portant
moins sur la possession des biens que sur
l’usage (privé, professionnel, partagé…) que
l’on en fait. A titre d’exemple, ce changement
peut se traduire par une modification de la
durée de la couverture du risque, qui
correspondrait désormais à celle de l’utilisation
du bien et ne serait plus permanente.
Des acteurs du marché de l’assurance ont
déjà créé des partenariats avec des
entreprises collaboratives, ce qui a crédibilisé
celles-ci auprès des consommateurs.
5
Les nouveaux modes de consommation : attitudes et
pratiques des Français, Mediaprism, octobre 2014.
6
Consumer Intelligence Series: The Sharing Economy,
PwC, avril 2015.
5
L’assurance collaborative,
une menace pour le
business model des
acteurs traditionnels ?
«Un Uber peut très bien émerger dans la santé
du jour au lendemain. Je suis obnubilé par ce
risque»
7
.
Guillaume Sarkozy, Délégué Général de
Malakoff Médéric.
Le paysage de l’assurance se distingue par
une actualité réglementaire et prudentielle très
dense (Solvabilité 2, accord national
interprofessionnel, contrat responsable,
généralisation du tiers payant…).
Même si les barrières réglementaires à l’entrée
protègent a priori les acteurs en place des
nouveaux entrants, les nouveaux modèles
d’assurance collaborative peuvent
concurrencer les assureurs traditionnels
sur quelques éléments de la chaîne de
valeur.
Un manque de transparence, un foisonnement
d’intermédiaires, des offres peu lisibles et
subissant des hausses tarifaires supérieures à
l’inflation
8
constituent autant de griefs retenus
par les consommateurs contre les acteurs
classiques. De surcroît, le phénomène de non-
assurance progresse dangereusement : le
nombre de dossiers ouverts par le Fonds de
garantie des assurances obligatoires de
dommages a augmenté de 31,5% en 2014 par
rapport à 2013
9
. Ainsi ce marché constitue un
terrain favorable à l’émergence de pratiques
d’assurance collaborative. Les réseaux
sociaux peuvent être utilisés pour créer des
communautés permettant à leurs membres de
négocier de meilleures conditions tarifaires
voire de s’assurer entre eux.
7
Le nouvel Economiste, 15 septembre 2015.
8
Assurance, quelle hausse des prix en 2016, Assurland,
2 février 2016.
9
FGAO, Rapport d’activité 2014.
L’achat groupé d’assurance
Bought By Many
L’achat groupé d’assurance ne constitue pas
une révolution
10
. La rupture technologique
en cours lui donne cependant une nouvelle
dimension. La plateforme Bought By Many,
créée en 2012 en Grande-Bretagne, permet la
constitution de communautés de personnes
ayant des demandes similaires qui, en raison
de leur nombre, peuvent prétendre à un tarif
de gros (18,6% de rabais en moyenne) sur des
contrats qui restent individuels.
Bought By Many ne se cantonne pas à cet
arrangement tarifaire et peut négocier, fort de
la communauté des demandeurs d’assurance,
la création de contrats spécifiques sur des
risques peu usuels. La plateforme compte
actuellement 145 000 membres qui peuvent y
renseigner en ligne leurs besoins.
10
La commune de Caumont-sur-Durance (Vaucluse) a mis
en œuvre une mutuelle communale en 2014 permettant à
ses administrés de percevoir une assurance santé à prix
négocié.
6
Kontsurnous
Plateforme lancée dès 2009 par Generali, son
principe était d’assurer à un montant
avantageux une tribu de deux à quinze
personnes. A chaque contrat souscrit, la tribu
accumulait des points qui pouvaient être
affectés ensuite à un membre confronté à un
sinistre, les points permettant de diminuer le
montant de la franchise.
L’assurance peer-to-peer adossée à
un assureur
Les réseaux sociaux permettent aux
personnes qui cherchent à s’assurer, en marge
du circuit traditionnel, d’entrer en relation avec
des personnes acceptant d’offrir une
couverture.
Friendsurance
Plateforme allemande créée en 2010, elle est
constituée à la fois d’un comparateur
traditionnel (en assurance de biens et de
responsabilités) et d’un réseau social.
Après avoir choisi une offre, le souscripteur
construit une communauté avec des membres
du réseau social. Chaque membre verse une
somme dans un «pot commun» qui sera mis à
contribution en cas de réalisation du sinistre. Si
ce dernier excède la somme récoltée,
l’assureur prend le relais au-delà de ce seuil.
Dans ce contexte, plus le nombre de
membres est important, plus le seuil de
remboursement du sinistre par l’assureur est
élevé, ce qui permet une baisse de la
cotisation due à l’assureur. Lorsque les
sinistres sont faibles ou inexistants, les
membres récupèrent tout ou partie des
sommes engagées. 80% des clients de
Friendsurance auraient bénéficié d’un tel
remboursement, équivalent à environ le tiers
de la prime versée.
Inspeer
Lancée en février 2015, Inspeer est la
première plateforme française d’assurance
collaborative permettant à ses utilisateurs de
mutualiser leurs franchises, c’est-à-dire leur
reste à charge en cas de sinistre en
complément d’un contrat d’assurance
(automobile, moto, habitation).
Inspeer parie sur des communautés de
membres réduites et choisies : l’utilisateur
invite des membres à rejoindre son réseau
pour participer au paiement de la franchise et
s’engage réciproquement. Un indicateur de
confiance note les utilisateurs sur le respect de
leur engagement lors des sinistres.
L’engagement à payer est en effet moral et
non contractuel. Une commission de 10% sur
les montants collectés lors du sinistre vient
rémunérer la plateforme.
L’assurance peer-to-peer sans
intermédiaire
Hey Guevara - Jfloat
11
Les personnes souhaitant une assurance
automobile constituent des groupes, soit de
leur propre fait, soit sur une proposition de
Guevara qui réunira des profils de risques
analogues. Guevara recueille ensuite des
informations sur le risque (modèle du véhicule,
lieu de résidence, profession…) pour proposer
un devis. Les cotisations versées par les
membres constituent un «protection pool»
servant à payer les sinistres de l’année. Lors
du renouvellement, les appels de cotisation
ne portent que sur la part entamée de la
réserve, l’objectif étant de reconstituer le
fonds à son niveau initial. En cas de sinistre
exceptionnel, le fonds «Watterloo» est mobilisé
par Guevara pour compléter l’indemnisation.
Cela représenterait près de 80% d’économie
pour les assurés selon l’entreprise.
Les membres de la communauté ont la
possibilité d’exclure un participant et sont
informés de tous les événements (versement
des cotisations, paiement des sinistres)
affectant le groupe.
Peercover
Peercover, lancée en 2013 et fermée en juin
2014, fut une plateforme américaine ayant
pour slogan «Devenez votre propre
compagnie». Des particuliers, regroupés en
communautés, étaient à la fois assureurs et
assurés. Des conditions étaient établies, avec
l’aide de Peercover, pour définir les modalités
des règlements des sinistres, dont le paiement
avait besoin d’être approuvé par les membres.
Ceux qui refusaient le versement ne pouvaient
plus participer et n’étaient plus assurés.
11
Jfloat a préalablement testé une initiative autour de la
mise en contact des personnes afin que ceux-ci puissent
former des cohortes. Chaque individu verse une somme
d’argent à la cohorte. Lors de la réalisation d’un sinistre, si
celui-ci est inférieur à un certain seuil, la cohorte le prend
en charge. Dans le cas contraire, un assureur intervient.
A l’épuisement des fonds, la cohorte peut décider de se
perpétuer moyennant un appel de cotisation à ses
membres. Dans le cas où la cohorte n’aurait pas les
moyens de payer le sinistre, un algorithme de la
plateforme détermine les apports de chaque membre.
7
Recensement d’initiatives peer-to-peer à travers le monde
8
Les nombreux avantages
comparatifs de l’assurance
collaborative
L’examen des différentes initiatives en matière
d’assurance collaborative permet d’identifier
quels sont les marchés de risque les plus à
même de faire l’objet de telles pratiques. Il
s’agirait plutôt de ceux avec une faible
exposition (pour qu’ils n’excèdent pas la
capacité d’absorption des réseaux) voire de
leurs parties non couvertes (les franchises).
En outre, seuls les risques où l’aléa moral ex
post est très faible semblent à même d’offrir
les plus larges opportunités de
développement. Par exemple en santé, il y a
aléa moral ex post lorsque l’individu se met à
dépenser plus s’il est mieux assuré.
L’assurance collaborative permettrait en
premier lieu de réduire les coûts d’acquisition.
Plus la taille du réseau est importante, plus
grande est la couverture. C’est un résultat bien
connu de l’économie des réseaux : une
externalité positive surgit dès lors que la
satisfaction que retire un agent de son
adhésion à un réseau est corrélé positivement
au nombre de personnes adoptant ce réseau.
La cooptation active des membres de la
communauté diminue dans le même temps les
dépenses liées au marketing.
La gestion des sinistres est l’autre poste
budgétaire impacté. Cette dernière pourrait se
concentrer sur les grands risques moins
probables, les petits sinistres à haute
fréquence faisant l’objet de couverture sur ces
plateformes.
Toute la tarification est en réalité
concernée. L’économie de l’assurance est
marquée par une forte asymétrie d’information
entre les agents. Or, le fait que des individus
se regroupent de manière volontaire dans des
communautés restreintes, et donc supposant
des relations personnelles et transparentes,
incite à la retenue. Cela pourrait réduire le
phénomène d’antisélection
12
(chaque individu
a intérêt à choisir des personnes à bas risque)
et d’aléa moral
13
(il est délicat de frauder ou
d’être négligent quand l’indemnisation est du
ressort de ses proches) et donc in fine de
réduire le coût de la couverture. Le «Cash
back» (bonus versé en fin d’année en cas
d’absence de sinistre) incite aussi à l’adoption
d’un comportement vertueux.
12
Les assurés connaîtraient mieux leur risque que les
assureurs. Dans ce contexte, l’assureur, incapable
d’identifier les «bons» et les «mauvais» risques, propose
des contrats où chaque niveau de couverture correspond à
un niveau de risque moyen dans la population. Les
individus, eux, sont à même de mieux apprécier leur
risque ; s’il est inférieur au risque moyen sur lequel est
tarifé le contrat, ils ne le souscriront pas.
13
Il y a aléa moral lorsque du fait d’être assurée, la
personne se met à adopter des comportements
susceptibles d’augmenter la probabilité de survenance du
risque (par exemple en négligeant l’entretien de certains
biens).
9
L’assurance collaborative
en quête de confiance et
de reconnaissance
Les petites entreprises et celles de taille
intermédiaire, qui ont difficilement accès au
crédit bancaire, trouvent déjà dans le
crowfunding
14
une source alternative de
financement. Des particuliers souhaitant
obtenir une couverture pour un risque peu
usuel pourraient, en se regroupant, susciter la
création d’une offre spécifique. On peut penser
par exemple aux personnes s’expatriant dans
un autre pays devant payer des primes
automobiles très élevées car leur sinistralité
auto est inconnue dans leur nouveau lieu de
résidence.
Certes les pratiques collaboratives ont la
capacité de modifier le fonctionnement du
secteur de l’assurance. Dernière preuve de
l’engouement pour l’assurance collaborative,
Lemonade a levé en décembre 2015 un
montant record de 13 M $ auprès du capital
risqueur Sequoia Capital pour lancer une offre
peer-to-peer dont le contenu n’est pas encore
révélé. Quant à la technologie blockchain, elle
montre qu’il est possible de transférer de la
valeur en toute sécurité sans passer par un
tiers de confiance (cf. notre article La
blockchain révolutionnera-t-elle
l’assurance ?).
14
Technique de financement visant à solliciter via internet
des milliers de personnes afin d’apporter des capitaux
propres nécessaires à la phase d'amorçage d’un projet.
Il reste cependant un nombre important de
défis à relever, au premier rang desquels la
confiance dans un tel système. Alors que le
crowdfunding bénéficie d’un dispositif depuis le
1
er
octobre 2014
15
visant à favoriser un
environnement sécurisant pour les
investisseurs, prêteurs et donateurs,
l’assurance collaborative reste dans le flou
juridique.
Le secteur de l’assurance se caractérise par
l’inversion du cycle de production : la prime est
encaissée avant la fourniture de la prestation
et l’événement qui la déclenche. Cette
particularité est à l’origine de règles de
solvabilité visant à pérenniser cette industrie.
C’est l’existence d’un tiers de confiance, le
régulateur, qui garantit l’indemnisation à
l’assuré par la réglementation (nationale et
supranationale) qu’il fait peser sur les
organismes. Cette réalité tranche avec la
nature même du peer-to-peer, système
sans frontière et sans organe central.
.
.
15
Ordonnance n°2013-559 du 30 mai 2014
Contacts
122, avenue du Général Leclerc
92100 Boulogne Billancourt
Tél. : +33 (0)1 46 44 24 66
www.aneo.eu
gcazeneuve@aneo.fr

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L'assurance dans la nouvelle économie collaborative

  • 1. L’assurance dans la nouvelle économie collaborative Avril 2016 – © ANEO Guillaume Cazeneuve
  • 2. 2 On constate depuis les deux dernières décennies un accroissement de pratiques économiques et sociales dites «collaboratives». L’«économie collaborative» 1 désigne un «ensemble d’activités visant à produire de la valeur en commun et reposant sur de nouvelles formes d’organisation du travail» 2 . L’économiste Jeremy Rifkin évoque quant à lui «l’âge de l’accès» et désigne par «collaborative commons» l’«espace digitalisé où pourvoyeurs et usagers partagent des biens et des services» 3 . L’économie collaborative bouscule le positionnement des entreprises traditionnelles en percutant leurs marchés. Et le secteur de l’assurance commence à être concerné. Le magazine Capital l’a d’ailleurs identifié comme l’un des dix créneaux porteurs pour entreprendre de manière disruptive en 2016. Pour cette industrie, cela signifie aussi, paradoxalement, un retour aux sources : l’assurance porte dans son patrimoine une composante collaborative. Les sociétés de secours mutuels ont en effet constitué «des lieux de sociabilité communautaire où devait se reconstruire le lien social sur des bases solidaires qui étaient, en partie du moins, en tension avec le modèle libéral de la concurrence marchande» 4 . Ce qui n’est pas le cas des initiatives capitalistiques actuelles où s’insère le plus souvent un nouvel intermédiaire rémunéré. 1 Il s’agit du vocable que nous utiliserons dans cet article qui n’a pas pour objet d’expliciter les nuances entre les nombreux termes auquel la littérature a recours («économie du partage», «économie pair à pair», «communs collaboratifs», «maillage»…). 2 L’économie collaborative, le nouvel eldorado ?, Alternatives Economiques, Novembre 2015. 3 J. RIFKIN, Uber and the Zero Marginal Cost Revolution, The Huffington Post, 9 mars 2014. 4 M. PETITCLERC, P. TOUCAS-TRUYEN, Mutualité et protection sociale en Europe occidentale et en Amérique du Nord, XIXe -XXe siècles, Histoire et société n° 16, p. 7, octobre 2005.
  • 3. 3 Une économie de plus en plus largement collaborative L’économie collaborative comme le troc est une pratique ancienne que le capitalisme numérique renouvelle profondément via l’émergence de plateformes internet dont la valeur ajoutée repose sur la mise en relations d’individus. Elle s’étend aujourd’hui pratiquement à tous les pans de l’économie voire de la société. Plusieurs facteurs se juxtaposent pour favoriser l’émergence de cette économie collaborative, où l’usage prime sur la possession. Les nouveaux acteurs de l’économie collaborative peuvent bénéficier de la défiance dont pâtissent les intermédiaires et acteurs institutionnels du système capitaliste traditionnel. Par ailleurs, un contexte de ralentissement économique durable pousse les consommateurs à rechercher des opportunités d’arbitrages entre les services. Ce recours à l’économie collaborative est enfin facilité par les technologies numériques qui permettent une impressionnante réduction des coûts de transaction et de communication, à un moment où la confiance des consommateurs dans la sécurité des transactions sur l’internet progresse.
  • 4. 4 D’après un sondage commandé et publié par 60 Millions de consommateurs en novembre 2014 5 , l'économie collaborative représente le mode de consommation du XXIème siècle pour la moitié des personnes interrogées et deviendra aussi importante que l'économie traditionnelle. L’économie collaborative pourrait même atteindre 335 Mds € de chiffre d’affaires dans le monde d’ici 2025 selon PwC 6 (contre 15 Mds € en 2014). L’économie collaborative et les nouveaux modes de consommation et de production qu’elle induit viennent diversifier la matière assurable. Elle peut aussi favoriser l’émergence de nouveaux compétiteurs sur ce marché. Celle-ci est pour l’instant plus le fait de startups que des géants du web. En récoltant massivement des données qu’ils savent monétiser, ceux-ci pourraient se confronter directement aux assureurs, dont le métier est justement d’agréger des données pour mutualiser un risque. De nouveaux usages offrant des leviers de croissance aux opérateurs d’assurance Les ressources des espaces de coworking, les échanges d’appartements entre particuliers ou encore le covoiturage constituent des objets inédits d’assurance. Les assureurs doivent développer de nouveaux produits portant moins sur la possession des biens que sur l’usage (privé, professionnel, partagé…) que l’on en fait. A titre d’exemple, ce changement peut se traduire par une modification de la durée de la couverture du risque, qui correspondrait désormais à celle de l’utilisation du bien et ne serait plus permanente. Des acteurs du marché de l’assurance ont déjà créé des partenariats avec des entreprises collaboratives, ce qui a crédibilisé celles-ci auprès des consommateurs. 5 Les nouveaux modes de consommation : attitudes et pratiques des Français, Mediaprism, octobre 2014. 6 Consumer Intelligence Series: The Sharing Economy, PwC, avril 2015.
  • 5. 5 L’assurance collaborative, une menace pour le business model des acteurs traditionnels ? «Un Uber peut très bien émerger dans la santé du jour au lendemain. Je suis obnubilé par ce risque» 7 . Guillaume Sarkozy, Délégué Général de Malakoff Médéric. Le paysage de l’assurance se distingue par une actualité réglementaire et prudentielle très dense (Solvabilité 2, accord national interprofessionnel, contrat responsable, généralisation du tiers payant…). Même si les barrières réglementaires à l’entrée protègent a priori les acteurs en place des nouveaux entrants, les nouveaux modèles d’assurance collaborative peuvent concurrencer les assureurs traditionnels sur quelques éléments de la chaîne de valeur. Un manque de transparence, un foisonnement d’intermédiaires, des offres peu lisibles et subissant des hausses tarifaires supérieures à l’inflation 8 constituent autant de griefs retenus par les consommateurs contre les acteurs classiques. De surcroît, le phénomène de non- assurance progresse dangereusement : le nombre de dossiers ouverts par le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages a augmenté de 31,5% en 2014 par rapport à 2013 9 . Ainsi ce marché constitue un terrain favorable à l’émergence de pratiques d’assurance collaborative. Les réseaux sociaux peuvent être utilisés pour créer des communautés permettant à leurs membres de négocier de meilleures conditions tarifaires voire de s’assurer entre eux. 7 Le nouvel Economiste, 15 septembre 2015. 8 Assurance, quelle hausse des prix en 2016, Assurland, 2 février 2016. 9 FGAO, Rapport d’activité 2014. L’achat groupé d’assurance Bought By Many L’achat groupé d’assurance ne constitue pas une révolution 10 . La rupture technologique en cours lui donne cependant une nouvelle dimension. La plateforme Bought By Many, créée en 2012 en Grande-Bretagne, permet la constitution de communautés de personnes ayant des demandes similaires qui, en raison de leur nombre, peuvent prétendre à un tarif de gros (18,6% de rabais en moyenne) sur des contrats qui restent individuels. Bought By Many ne se cantonne pas à cet arrangement tarifaire et peut négocier, fort de la communauté des demandeurs d’assurance, la création de contrats spécifiques sur des risques peu usuels. La plateforme compte actuellement 145 000 membres qui peuvent y renseigner en ligne leurs besoins. 10 La commune de Caumont-sur-Durance (Vaucluse) a mis en œuvre une mutuelle communale en 2014 permettant à ses administrés de percevoir une assurance santé à prix négocié.
  • 6. 6 Kontsurnous Plateforme lancée dès 2009 par Generali, son principe était d’assurer à un montant avantageux une tribu de deux à quinze personnes. A chaque contrat souscrit, la tribu accumulait des points qui pouvaient être affectés ensuite à un membre confronté à un sinistre, les points permettant de diminuer le montant de la franchise. L’assurance peer-to-peer adossée à un assureur Les réseaux sociaux permettent aux personnes qui cherchent à s’assurer, en marge du circuit traditionnel, d’entrer en relation avec des personnes acceptant d’offrir une couverture. Friendsurance Plateforme allemande créée en 2010, elle est constituée à la fois d’un comparateur traditionnel (en assurance de biens et de responsabilités) et d’un réseau social. Après avoir choisi une offre, le souscripteur construit une communauté avec des membres du réseau social. Chaque membre verse une somme dans un «pot commun» qui sera mis à contribution en cas de réalisation du sinistre. Si ce dernier excède la somme récoltée, l’assureur prend le relais au-delà de ce seuil. Dans ce contexte, plus le nombre de membres est important, plus le seuil de remboursement du sinistre par l’assureur est élevé, ce qui permet une baisse de la cotisation due à l’assureur. Lorsque les sinistres sont faibles ou inexistants, les membres récupèrent tout ou partie des sommes engagées. 80% des clients de Friendsurance auraient bénéficié d’un tel remboursement, équivalent à environ le tiers de la prime versée. Inspeer Lancée en février 2015, Inspeer est la première plateforme française d’assurance collaborative permettant à ses utilisateurs de mutualiser leurs franchises, c’est-à-dire leur reste à charge en cas de sinistre en complément d’un contrat d’assurance (automobile, moto, habitation). Inspeer parie sur des communautés de membres réduites et choisies : l’utilisateur invite des membres à rejoindre son réseau pour participer au paiement de la franchise et s’engage réciproquement. Un indicateur de confiance note les utilisateurs sur le respect de leur engagement lors des sinistres. L’engagement à payer est en effet moral et non contractuel. Une commission de 10% sur les montants collectés lors du sinistre vient rémunérer la plateforme. L’assurance peer-to-peer sans intermédiaire Hey Guevara - Jfloat 11 Les personnes souhaitant une assurance automobile constituent des groupes, soit de leur propre fait, soit sur une proposition de Guevara qui réunira des profils de risques analogues. Guevara recueille ensuite des informations sur le risque (modèle du véhicule, lieu de résidence, profession…) pour proposer un devis. Les cotisations versées par les membres constituent un «protection pool» servant à payer les sinistres de l’année. Lors du renouvellement, les appels de cotisation ne portent que sur la part entamée de la réserve, l’objectif étant de reconstituer le fonds à son niveau initial. En cas de sinistre exceptionnel, le fonds «Watterloo» est mobilisé par Guevara pour compléter l’indemnisation. Cela représenterait près de 80% d’économie pour les assurés selon l’entreprise. Les membres de la communauté ont la possibilité d’exclure un participant et sont informés de tous les événements (versement des cotisations, paiement des sinistres) affectant le groupe. Peercover Peercover, lancée en 2013 et fermée en juin 2014, fut une plateforme américaine ayant pour slogan «Devenez votre propre compagnie». Des particuliers, regroupés en communautés, étaient à la fois assureurs et assurés. Des conditions étaient établies, avec l’aide de Peercover, pour définir les modalités des règlements des sinistres, dont le paiement avait besoin d’être approuvé par les membres. Ceux qui refusaient le versement ne pouvaient plus participer et n’étaient plus assurés. 11 Jfloat a préalablement testé une initiative autour de la mise en contact des personnes afin que ceux-ci puissent former des cohortes. Chaque individu verse une somme d’argent à la cohorte. Lors de la réalisation d’un sinistre, si celui-ci est inférieur à un certain seuil, la cohorte le prend en charge. Dans le cas contraire, un assureur intervient. A l’épuisement des fonds, la cohorte peut décider de se perpétuer moyennant un appel de cotisation à ses membres. Dans le cas où la cohorte n’aurait pas les moyens de payer le sinistre, un algorithme de la plateforme détermine les apports de chaque membre.
  • 8. 8 Les nombreux avantages comparatifs de l’assurance collaborative L’examen des différentes initiatives en matière d’assurance collaborative permet d’identifier quels sont les marchés de risque les plus à même de faire l’objet de telles pratiques. Il s’agirait plutôt de ceux avec une faible exposition (pour qu’ils n’excèdent pas la capacité d’absorption des réseaux) voire de leurs parties non couvertes (les franchises). En outre, seuls les risques où l’aléa moral ex post est très faible semblent à même d’offrir les plus larges opportunités de développement. Par exemple en santé, il y a aléa moral ex post lorsque l’individu se met à dépenser plus s’il est mieux assuré. L’assurance collaborative permettrait en premier lieu de réduire les coûts d’acquisition. Plus la taille du réseau est importante, plus grande est la couverture. C’est un résultat bien connu de l’économie des réseaux : une externalité positive surgit dès lors que la satisfaction que retire un agent de son adhésion à un réseau est corrélé positivement au nombre de personnes adoptant ce réseau. La cooptation active des membres de la communauté diminue dans le même temps les dépenses liées au marketing. La gestion des sinistres est l’autre poste budgétaire impacté. Cette dernière pourrait se concentrer sur les grands risques moins probables, les petits sinistres à haute fréquence faisant l’objet de couverture sur ces plateformes. Toute la tarification est en réalité concernée. L’économie de l’assurance est marquée par une forte asymétrie d’information entre les agents. Or, le fait que des individus se regroupent de manière volontaire dans des communautés restreintes, et donc supposant des relations personnelles et transparentes, incite à la retenue. Cela pourrait réduire le phénomène d’antisélection 12 (chaque individu a intérêt à choisir des personnes à bas risque) et d’aléa moral 13 (il est délicat de frauder ou d’être négligent quand l’indemnisation est du ressort de ses proches) et donc in fine de réduire le coût de la couverture. Le «Cash back» (bonus versé en fin d’année en cas d’absence de sinistre) incite aussi à l’adoption d’un comportement vertueux. 12 Les assurés connaîtraient mieux leur risque que les assureurs. Dans ce contexte, l’assureur, incapable d’identifier les «bons» et les «mauvais» risques, propose des contrats où chaque niveau de couverture correspond à un niveau de risque moyen dans la population. Les individus, eux, sont à même de mieux apprécier leur risque ; s’il est inférieur au risque moyen sur lequel est tarifé le contrat, ils ne le souscriront pas. 13 Il y a aléa moral lorsque du fait d’être assurée, la personne se met à adopter des comportements susceptibles d’augmenter la probabilité de survenance du risque (par exemple en négligeant l’entretien de certains biens).
  • 9. 9 L’assurance collaborative en quête de confiance et de reconnaissance Les petites entreprises et celles de taille intermédiaire, qui ont difficilement accès au crédit bancaire, trouvent déjà dans le crowfunding 14 une source alternative de financement. Des particuliers souhaitant obtenir une couverture pour un risque peu usuel pourraient, en se regroupant, susciter la création d’une offre spécifique. On peut penser par exemple aux personnes s’expatriant dans un autre pays devant payer des primes automobiles très élevées car leur sinistralité auto est inconnue dans leur nouveau lieu de résidence. Certes les pratiques collaboratives ont la capacité de modifier le fonctionnement du secteur de l’assurance. Dernière preuve de l’engouement pour l’assurance collaborative, Lemonade a levé en décembre 2015 un montant record de 13 M $ auprès du capital risqueur Sequoia Capital pour lancer une offre peer-to-peer dont le contenu n’est pas encore révélé. Quant à la technologie blockchain, elle montre qu’il est possible de transférer de la valeur en toute sécurité sans passer par un tiers de confiance (cf. notre article La blockchain révolutionnera-t-elle l’assurance ?). 14 Technique de financement visant à solliciter via internet des milliers de personnes afin d’apporter des capitaux propres nécessaires à la phase d'amorçage d’un projet. Il reste cependant un nombre important de défis à relever, au premier rang desquels la confiance dans un tel système. Alors que le crowdfunding bénéficie d’un dispositif depuis le 1 er octobre 2014 15 visant à favoriser un environnement sécurisant pour les investisseurs, prêteurs et donateurs, l’assurance collaborative reste dans le flou juridique. Le secteur de l’assurance se caractérise par l’inversion du cycle de production : la prime est encaissée avant la fourniture de la prestation et l’événement qui la déclenche. Cette particularité est à l’origine de règles de solvabilité visant à pérenniser cette industrie. C’est l’existence d’un tiers de confiance, le régulateur, qui garantit l’indemnisation à l’assuré par la réglementation (nationale et supranationale) qu’il fait peser sur les organismes. Cette réalité tranche avec la nature même du peer-to-peer, système sans frontière et sans organe central. . . 15 Ordonnance n°2013-559 du 30 mai 2014 Contacts 122, avenue du Général Leclerc 92100 Boulogne Billancourt Tél. : +33 (0)1 46 44 24 66 www.aneo.eu gcazeneuve@aneo.fr