Evaluation posturale et morpho fonctionnelle du pied chez des patients lombal...
Thèse pierre schoch
1. UNIVERSITE LOUIS PASTEUR - STRASBOURG I
FACULTE DE CHIRURGIE DENTAIRE
Année 2011 N°39
THESE
Présentée pour le Diplôme d’Etat de Docteur en Chirurgie Dentaire
par
SCHOCH Pierre
né le 17 janvier 1985, à Saverne
INTERETS DES « SERIOUS GAMES » DANS L’ENSEIGNEMENT
APPLICATION AUX URGENCES MEDICALES AU CABINET DENTAIRE
Président : Professeur A. FEKI
Assesseurs : Professeur A. BLOCH-ZUPAN
Docteur S. BAHI-GROSS
Docteur B. CALON
Docteur G. REYS
Monsieur P. PORTELLI
1
3. A Monsieur le Professeur Ahmed FEKI, Président du jury,
Vous me faites le grand honneur d’avoir accepté la présidence de ce jury.
Permettez-moi en cette occasion de vous témoigner toute ma
reconnaissance pour la qualité de votre enseignement si précieux et mon
admiration pour l’étendue de votre expérience clinique.
Veuillez recevoir l’expression de ma profonde gratitude et le témoignage de
ma sincère considération.
3
4. A Madame le Professeur Agnès BLOCH-ZUPAN,
J’ai été très sensible à l’intérêt que vous avez spontanément exprimé en
acceptant de siéger au sein de ce jury.
Je tiens à vous remercier pour votre enthousiasme au moment de me confier
ce sujet.
Permettez-moi de vous témoigner ma grande reconnaissance pour votre
expérience, votre pédagogie, ainsi que votre grande disponibilité clinique
durant ces années d’études.
Veuillez recevoir l’expression de ma profonde estime.
4
5. A Madame le Docteur Sophie BAHI-GROSS,
Je tiens à vous remercier pour votre participation à mon jury de thèse.
C’est un honneur pour moi d’avoir pu profiter pendant ces études de votre
grande expérience clinique et de votre énergie.
Permettez-moi de vous témoigner ma sincère reconnaissance pour tout votre
investissement.
5
6. A Monsieur le Docteur Bartholomeus CALON,
Ce fut un grand plaisir pour moi de pouvoir travailler avec vous durant
l’élaboration de ce travail.
Vous avez tout de suite montré un intérêt profond pour tout ce qui touche à
la formation et un grand enthousiasme pour ce sujet, je vous en remercie.
Je vous suis très reconnaissant pour votre grande expérience clinique, dont
vous m’avez fait profiter avec tant de disponibilité et de bonne humeur.
Permettez-moi de vous témoigner ma sincère gratitude.
6
7. A Monsieur le Directeur Philippe PORTELLI,
Je vous remercie pour notre entrevue, certes de courte durée, mais au
combien enrichissante.
Je suis heureux d’avoir pu m’inspirer de votre passion pour l’enseignement
et la grande sagesse qui l’accompagne. Je suis très sensible à l’intérêt que
vous m’avez porté.
En vous remerciant de m’avoir aidé à percer certains mystères de la
pédagogie,
je voudrais vous faire part de ma sincère reconnaissance pour votre
participation à l’élaboration de ce travail.
7
8. A Monsieur le Docteur Guillaume REYS, Directeur de thèse,
Tout d’abord j’aimerai vous remercier pour la proposition de ce projet, aussi
original que passionnant. Cela a été un honneur de me le voir confier.
Ce fut une chance pour moi de bénéficier de votre soutient et de votre
dynamisme tout au long de ce travail.
Je vous exprime toute ma reconnaissance pour votre disponibilité et votre
efficacité qui m’ont permis de mener à bien ce projet.
Cette thèse est l’occasion pour moi de vous vous faire part de mon estime
pour votre forte implication dans la formation, de saluer la grande attention
que vous y portez, et d’admirer votre continuelle volonté d’innover.
Veuillez recevoir mes plus sincères remerciements.
8
9. A mes parents, pour les belles valeurs qu’ils m’ont inculqué, et pour m’avoir
aidé dans ce travail.
A ma mère, qui m’a enseigné l’humanité et m’a toujours offert beaucoup
d’affection.
A mon père, qui m’inspire la sagesse et le respect, pour sa sensibilité
d’écoute.
A mon oncle Henri, pour m’avoir accueilli au sein de son cabinet, et avec qui
je partage la vision humaine du métier. Pour toutes ces fabuleuses
rencontres musicales que je savoure.
A ma grande sœur Caroline, qui m’a appris le voyage et l’humilité. Merci
d’être là, c’est quand même mieux d’avoir grandis à deux.
A mon cousin Nicolas, pour tous ces moment sportifs privilégiés,
indispensables pour garder la forme. Des petits déjeuners philosophiques
aux débats d’opinion endiablés, il fait bon en ta compagnie.
A Guillaume, mon coloc’ de toujours, avec qui j’ai évolué pendant ces
années, tu es un peu comme mon frère, pourvu que l’on puisse longtemps
partager ces passions communes pour le sport, le voyage et la montagne.
A Philippe et Kiri, mes amis de « bon temps », pour toutes ces aventures qui
nous rassemblent et me rappellent que d’autres vies existent que celle de
dentiste.
A Iris et Steven, pour tous ces beaux moments passés en votre compagnie.
Aujourd’hui vous êtes à l’autre bout du monde, mais qu’importe, on se
retrouve toujours.
Des sommets Alpins aux plages Guyanaises, que la nature reste longtemps
notre terrain de jeu.
A Zazou, merci d’avoir pensé à moi, à tout bientôt…
A mes autres amis de promo, Alessandro, Alex, Matthieu, Julia, Cyril, Ben,
Magali, pour ces séances de travaux pratiques mémorables, et toutes ces
vacances, on repart au ski quand vous voulez !
A François, Vianney, et Vaudrey, pour toutes ces soirées épiques, ces idées
de voyage, à l’assaut de la poudreuse ou de l’exotisme...que ça continue !
A Charlotte, pour la tendresse que tu m’apportes chaque jours, la passion et
l’enthousiasme toujours exprimés. Merci pour ton soutien et tes
encouragements au fil de ce travail.
A Thibald, Hugo, Jean-Sébastien, Louis, et les autres, que cette thèse soit
l’occasion de penser à vous.
9
10. SOMMAIRE
PREMIERE PARTIE : L’ENSEIGNEMENT
.....................................................................................18
L’ART DE TRANSMETTRE DES CONNAISSANCES : LA PÉDAGOGIE
...........................................18
Définitions
......................................................................................................18
La pédagogie
.........................................................................................................................18
La didactique
.........................................................................................................................19
Les doctrines pédagogiques
...........................................................................19
Qualité des modèles pédagogiques
................................................................20
LES DIFFERENTS MODELES D’APPRENTISSAGE [7, 8, 9]
..........................................21
La pédagogie magistrale : méthode transmissive
............................................21
Le behaviorisme [8,9, 10,11]
..........................................................................22
La pédagogie constructiviste [7, 8, 9]
..............................................................25
Quelle pédagogie pour les métiers de la santé ?
.............................................26
La formation continue en odontologie : réalité actuelle [12, 13,14]
.................27
DES NOUVEAUX OUTILS AU SERVICE DE LA FORMATION [7, 15, 16, 17, 18, 29]
.....29
De nouveaux constats [7, 29]
.........................................................................29
Le e-Learning
.................................................................................................30
Les Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement
(TICE) [15, 18, 19, 36]
.....................................................................................31
Présentation [15, 36]
.............................................................................................................31
Espace Numérique de Travail (ENT) [19, 36]
...........................................................................31
La situation à l’étranger
.....................................................................................................32
Royaume-Uni
................................................................................................................32
Le Danemark
.................................................................................................................33
L’Espagne
33
La France[36]
.................................................................................................................34
Enseignements de cette étude
.......................................................................................36
La 3D : [16]
............................................................................................................................37
Apport de la 3D pour enseigner l’anatomie à la Faculté de Médecine de Lyon
....................37
Retours des professeurs
....................................................................................................38
LES PLATEFORMES VIRTUELLES 3D DANS L’ACQUISITION ET L’ECHANGE DE
CONNAISSANCES
.............................................................................................39
Présentation
..........................................................................................................................39
Apport dans l’échange des connaissances [25]
.......................................................................40
Les différents types d’informations véhiculées
.......................................................................41
Les sites dédiés à l’éducation et la sensibilisation à la santé :
............................................41
Les sites de soutien : [21]
..................................................................................................42
Les sites dédiés à la formation : [21]
..................................................................................43
L’impérial College London
.............................................................................................43
Programme Play2Train
...................................................................................................44
Medical Examiner's Office
..............................................................................................44
Dental Life
45
Les sites de marketing et de promotion de la santé
............................................................46
Les sites dédiés à la recherche
...........................................................................................46
Discussion
.............................................................................................................................47
Retours d’expérience
.............................................................................................................47
Une étude d’un séminaire interactif
...................................................................................47
Case Western University [26]
..............................................................................................48
Retour d’étudiants [27]
......................................................................................................49
Résultats
50
Discussion
51
Limites et critiques
................................................................................................................53
Limites d’ordre technique.
.................................................................................................53
Limites de compétences
....................................................................................................53
De nouveaux outils, mais pour qui ?
.......................................................................................54
Les étudiants et les jeux vidéos
.........................................................................................54
Constat sur l’utilisation du numérique
...............................................................................55
10
11. DEUXIEME PARTIE : LE SERIOUS GAME (SG) AU SERVICE DES MÉTIERS DE LA
SANTE
...................................................................................................................................................58
DEFINITIONS
..........................................................................................................58
Différence entre serious game et jeu vidéo [28]
..............................................58
Détourner la fonction initiale d’un « jeu »
.......................................................60
Différence SG et « simulation » [7].
..................................................................60
Classification des Serious game
......................................................................61
Le Gameplay
..........................................................................................................................62
L’objectif pédagogique
...........................................................................................................62
Les domaines d’application
....................................................................................................63
Définir la place du SG dans la pédagogie multimédia
......................................63
Le jeu métaphore
...................................................................................................................63
L’exemple de Adibou
.........................................................................................................64
INTÉRÊTS PÉDAGOGIQUES
..........................................................................................65
Une génération d’apprenants ouverts au jeu
...................................................66
Du professeur au médiateur [7p18, 34]
..........................................................67
Dextérité visuelle et cérébrale
.........................................................................67
Développement du sens critique
.....................................................................68
Le facteur « plaisir »
.......................................................................................68
L’expérimentation d’une montée en compétence
...................................................................69
Le sentiment d’autonomie totale dans la progression
.............................................................69
La qualité de relation aux autres joueurs
................................................................................70
Le joueur et le cycle d’expertise
......................................................................70
Le rapport à l’erreur
.......................................................................................71
L’information « Just in time » (à la demande)
..................................................71
Le mode d’évaluation
......................................................................................72
Un mode d’apprentissage « ouvert » et collaboratif
.........................................73
RÈGLES D’ÉLABORATION ET D’ÉVALUATION
....................................................................74
S’appuyer sur une vision constructiviste de l’apprentissage [7p131]
...............74
Le modèle mental ou représentation sémantique [7, 46]
.................................75
Définir les besoins
..........................................................................................76
A quoi sert le projet
...............................................................................................................77
A qui d’adresse le projet
........................................................................................................77
Quel type de gameplay pour quel type de formation [7p182]
.................................................77
Passer des objectifs pédagogiques (serious) au JEU (game)
.............................78
Analyse du corpus
.................................................................................................................79
Caractérisation des données
..................................................................................................79
Connaissances factuelles et/ou déclaratives :
.....................................................................79
Connaissances procédurales :
............................................................................................79
Connaissances expertes :
...................................................................................................79
REVUE DE LITTÉRATURE DES SG DANS LA SANTÉ [3P83]
..................................................82
Message éducatif
...................................................................................................................82
- Re-Mission :
...................................................................................................................82
- Fatworld :
........................................................................................................................82
- Pulse !! :
..........................................................................................................................83
- Hospital Waste Disposal :
................................................................................................83
- Triage training :
..............................................................................................................83
Message informatif
.................................................................................................................83
Message persuasif
..................................................................................................................84
- Histoire de dent :
............................................................................................................84
- Campto ou Multaq :
........................................................................................................85
Entraînement cérébral
............................................................................................................85
Entraînement physique
...........................................................................................................86
- Flower for all :
.................................................................................................................87
RETOURS D’EXPÉRIENCE
............................................................................................87
Triage training [50]
.........................................................................................88
Résultats
................................................................................................................................88
Discussion :
...........................................................................................................................89
11
12. Pulse !! [48, 49]
..............................................................................................89
MicroSim
........................................................................................................92
Résultats:
...............................................................................................................................92
Remarque :
............................................................................................................................92
Etude sur la Réanimation Cardio-PULMONAIRE (RCP) virtuelle
.........................93
Résultats apportés
.................................................................................................................93
Limite de l’étude
....................................................................................................................94
TROISIEME PARTIE : MISE EN APPLICATION ET EXEMPLE CONCRET, LA
CONCEPTION D’UN SERIOUS GAME AU SEIN DE DENTAL LIFE
....................................96
BUT DU PROJET PÉDAGOGIQUE
....................................................................................96
Une vision pragmatique
..................................................................................96
Créer des automatismes
.................................................................................96
Instaurer un climat d’apprentissage divertissant
.............................................97
Favoriser la « rencontre »
................................................................................97
Proposer une pédagogie moderne
..................................................................97
Vers une formation « à la demande »
..............................................................97
SITUATIONS THÉORIQUES
..........................................................................................98
Syndrome coronarien/ Infarctus du myocarde
.................................................98
Manifestations cliniques
........................................................................................................98
Conduite à tenir
.....................................................................................................................99
Choc anaphylactique
.....................................................................................101
Les manifestations cliniques sont :
.......................................................................................101
Conduite à tenir :
.................................................................................................................101
Evolution
.............................................................................................................................101
L’asthme
.......................................................................................................104
Conduite à tenir en cas de crise :
.........................................................................................104
Evolution :
...........................................................................................................................105
En cas d’asthme aigu grave:
.................................................................................................105
Obstruction des Voies aériennes Supérieures
................................................107
Cas de l’obstruction partielle
...............................................................................................107
Conduite à tenir
..............................................................................................................107
Cas de l’obstruction complète
..............................................................................................107
Conduite à tenir
..............................................................................................................107
Epilepsie
.......................................................................................................110
Manifestations cliniques du patient sujet à une crise
............................................................110
Conduite à tenir
...................................................................................................................110
Etat de mal épileptique
........................................................................................................111
Emphysème sous cutané
...............................................................................113
Signes cliniques
...................................................................................................................113
Conduite à tenir
...................................................................................................................113
Complications :
....................................................................................................................113
Malaise hypoglycémique
...............................................................................116
Signes cliniques :
.................................................................................................................116
Conduite à tenir
...................................................................................................................116
RÉSULTATS
..........................................................................................................119
Description
...................................................................................................119
Arrivée sur l’Ile :
..................................................................................................................120
Découverte d’Ivoire
..............................................................................................................120
Structure du serious game
...................................................................................................121
Discussion
...........................................................................................................................124
CONCLUSION
..................................................................................................................................126
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
...........................................................................................129
WEBOGRAPHIE
................................................................................................................................133
12
14. INTRODUCTION
La survenue d’une urgence médicale au cabinet dentaire est un évènement
rare.
Pour cette même raison, c’est une situation stressante exigeant une parfaite
connaissance de la part du praticien.
Comment y préparer au mieux les professionnels « autonomes » comme les
chirurgiens dentistes pour qu’ils puissent agir de manière éclairée, et quels
types de formation vont permettre une gestion optimale de l’urgence et
réduire au maximum le risque de séquelles pour les patients face à une telle
situation ?
Actuellement, les attestations de formation aux gestes et soins d’urgence
(AFGSU 1 et 2), effectuées pendant le cursus universitaire et réactualisées
tous les 4 ans valident cette compétence.
On peut alors se demander ce qu’il advient des connaissances une fois la
formation achevée, pendant ces longues années sans entraînement.
Cette formation traditionnelle suffit-elle ou peut on faire plus ?
En complément des séances de formation continue aux soins d’urgence,
certes de qualité, mais coûteuses en temps et en moyens, avons nous à notre
disposition des outils différents qui répondent à la problématique d’un
enseignement durable ?
C’est le sujet de ce travail, que nous aborderons en trois parties.
Dans la première partie, pour comprendre l’intérêt du « serious game » ou
« jeu sérieux » dans le paysage éducatif, on tentera de montrer en quoi
l’enseignement est évolutif dans le temps, ou comment la société par
plusieurs aspects, influence ses propres modes d’éducation.
14
15. On décrira ensuite la place des environnements virtuels 3D et leurs attributs
(dont fait partie le serious game) dans l’enseignement actuel et notamment
dans les métiers de la santé.
Enfin nous ferons un rapide bilan de la situation actuelle de la formation
continue en odontologie destinée aux urgences médicales.
Dans une seconde partie, il sera question du serious game ou « jeu sérieux »
en tant que tel, un outil numérique novateur dont on dégagera, après l’avoir
décrit, les principaux atouts pédagogiques ainsi que certaines règles
d’élaboration.
Enfin dans la troisième partie, plus pratique, on créera des scénarios de mise
en situation d’urgence, utilisés dans le processus d’élaboration d’un serious
game, et on engagera une discussion concernant l’impact d’un tel
programme informatique sur la formation des chirurgiens dentistes.
15
18. PREMIERE PARTIE : L’ENSEIGNEMENT
Comment transmettre au mieux un savoir pour qu’il soit compris, appris et
retenu par le plus grand nombre ?
Il ne semble pas y avoir de réponse unique à cette question, tant les
populations apprenantes et enseignantes ainsi que les contextes éducatifs
sont variables.
Tous les professionnels de l’enseignement se la posent néanmoins et une
science s’y consacre : la pédagogie
I. L’ART DE TRANSMETTRE DES CONNAISSANCES : LA PÉDAGOGIE
I.1 DÉFINITIONS
Lorsqu’on souhaite créer un nouveau moyen d’enseigner, comme le Serious
Game, on va chercher à prévoir son impact sur l’apprenant, et ce que l’on en
attend comme évolution dans l’apprentissage, c’est le projet pédagogique.
Définissons d’abord quelques termes :
I.1.1 La pédagogie
En cherchant dans le dictionnaire Larousse, on trouve la définition suivante :
pédagogie « science de l’éducation ». [1]
Beaucoup d’auteurs à travers les époques lui ont attribué des définitions
variées,
parmi lesquelles, celle d’Emile Durkheim:
Pédagogie « Réflexion appliquée aussi méthodiquement que possible aux
choses de l’éducation ».[2]
18
19. I.1.2 La didactique
La didactique se définit comme « l’étude des questions que posent
l'enseignement et l'acquisition des connaissances », dans différents
domaines et matières « spécifiques » auxquelles elle se rattache. [3]
Pour Philippe PORTELLI, Directeur des Usages du Numérique à l’Université de
Strasbourg, la didactique correspond à « la structuration des étapes d’un
cours et la gestion des outils utilisés pour le parcours d’apprentissage.»
La didactique va correspondre à l’agencement stratégique des différents
supports écrits, imagés, vidéos, voulu par le pédagogue pour transmettre de
façon appropriée des connaissances spécifiques.
D’autre part, toujours selon Philippe PORTELLI, la pédagogie concerne plus la
prise en charge de la dimension humaine dans l’enseignement (gestion des
interactions directes enseignants - apprenants). [29]
La didactique faisant partie intégrante de la pédagogie au sens large, et pour
simplifier les propos, on parlera par la suite uniquement de pédagogie, par
abus de langage, recouvrant les deux significations.
Selon les auteurs et les époques on distingue différentes doctrines, ou
courants de pensées pédagogiques.
I.2 LES DOCTRINES PÉDAGOGIQUES
Les doctrines pédagogiques s’inscrivent dans un processus dynamique ; il
n’existe pas UNE UNIQUE pédagogie valable, ni UNE pédagogie
intemporelle ; elles sont liées à une période historique donnée, dans une
conjoncture donnée, et évoluent sans cesse.
Différentes doctrines se détachent selon les périodes historiques avec des
courants majoritaires tels que :
- la pédagogie traditionnelle ou transmissive dont Comenius passe pour
être le fondateur (La Grande Didactique, 1657) [5],
- la pédagogie négative prônée par J-J Rousseau (Emile, 1762) mettant
l’accent sur la recherche du développement spontané de l’apprenant,
19
20. où l’environnement n’exercerait pas de pression sur l’enfant mais où
l’enfant viendrait par lui même à corriger ses erreurs par nécessité et
instinct de survie [6] ;
- la pédagogie active portée par Célestin Freinet (1896-1966) et Jean
Piaget (1896-1980), mettant l’individu au cœur de l’apprentissage en
tant qu’acteur de son éducation[4] ; la pédagogie de Rudolph Steiner
(1919) cherchant un équilibre entre l’intellectuel, le manuel,
l’artistique nécessaire au juste développement de l’enfant…
La liste est longue, chaque pédagogue apportant sa propre définition ou
presque, mais avec toujours le même leitmotiv : transmettre des savoirs de la
meilleure façon à un sujet apprenant.
I.3 QUALITÉ DES MODÈLES PÉDAGOGIQUES
Chaque modèle pédagogique possède une part de présupposé concernant
les mécanismes cérébraux mobilisés chez l’apprenant dans l’accès aux
connaissances, et sur l’élaboration d’un savoir ou d’une compétence dans le
cerveau.
Chaque modèle s’appuie sur des postulats concernant l’état cognitif initial, la
plasticité cérébrale de l’apprenant, et sur une bonne part d’hypothèses
comportementales (non scientifiquement prouvées) qui le légitimeraient.
Ces modèles se doivent d’être en permanence en évolution et remis en
question, en amélioration, en raison du type d’information, de la quantité et
de la complexité des savoirs utilisés, transmis et exigés par la société
moderne.[7]
Une connaissance est acquise, quand elle peut être réutilisée pour la
résolution d’un problème concret, même longtemps après son
apprentissage.
Pour cela, il faut les moyens d’apprendre qui soient les plus harmonieux, les
plus efficaces, pour être au final les plus « engrammés » possibles.
20
21. Par exemple, apprendre une liste par cœur va permettre de la réciter à la
perfection dans un délai court, mais pas sur le long terme. Par contre si les
éléments de cette liste sont conceptualisés, mis en relation les uns avec les
autres, la connaissance a plus de chance d’être mobilisable dans le temps.
On peut se poser la question : par quel moyen pédagogique va-t-on le
mieux établir une connaissance durable dans le cerveau de l’apprenant ?
Le modèle pédagogique transmissif est prédominant dans notre système
éducatif français tant dans le secondaire que dans les études supérieures,
mais détaillons également les autres principaux modes d’apprentissage.[7]
II.LES DIFFERENTS MODELES D’APPRENTISSAGE [7, 8, 9]
II.1 LA PÉDAGOGIE MAGISTRALE : MÉTHODE TRANSMISSIVE
C’est une approche centrée sur le « maître », qui détient le savoir ;
l’apprenant est un verre vide qui a comme principale fonction de mémoriser
les connaissances transmises. Simple mécanique d’enregistrement, son
exemple extrême est le cours de faculté en amphithéâtre. [8]
Elle part du principe que la transmission se fait sur un cerveau « vierge »,
disponible, et considère l’acquisition comme un empilement de savoirs
successifs.
Elle nécessite un «émetteur », au discours unilatéral, et un « récepteur » :
c’est le modèle de la salle de classe. [7 p.125]
Dans notre système éducatif principal, où ce modèle transmissif n’a plus à
faire ses preuves, les modalités d’évaluation des élèves se font surtout sur la
quantité d’informations mémorisées, sans doute par nécessité, notamment
dans les études supérieures.
On peut alors se demander ce que deviennent ces connaissances une fois
« déposées sur la feuille d’examen ».
21
22. Les interrogations sont nombreuses : manque d’action de la part de
l’apprenant ? Répétition de la pensée de quelqu’un qui a sans doute une
autre logique ?
D’autre part, si l’on reprend l’exemple du cours en amphithéâtre, on risque
de passer à côté des lacunes des élèves qui n’ont dans ce système que peu
l’occasion de les exprimer. Entre croire et avoir compris, ne pas oser
demander du fait de l’effet de nombre, ou encore par manque de temps, les
raisons sont nombreuses de passer à côté de la compréhension unanime et
intégrale.
L’idéal serait de pouvoir appliquer ces connaissances à la résolution de
problèmes pratiques, et d’utiliser les notions apprises pour la réflexion, pour
garantir l’entière compréhension de ce qui est enseigné.
II.2 LE BEHAVIORISME [8,9, 10,11]
C’est une théorie éducative mettant l’accent sur le comportement observable.
Elle part du principe que les modèles mentaux individuels sont inaccessibles
par le pédagogue. Par contre ils peuvent être modelés, retravaillés par des
stimuli externes bien pensés.
Selon cette approche, c’est l’environnement qui « conditionne » les conduites
humaines. Ce modèle ne nie pas la réalité de l’individu, ni son
fonctionnement interne, mais n’en tient pas compte dans un schéma
d’apprentissage.[8]
Selon Skinner [11], les comportements qui se fixent sont les comportements
qui permettent de réussir ce que souhaite le sujet, donc renforcés
positivement (par une récompense).
Après avoir décrit le conditionnement opérant chez les souris, Skinner s’est
intéressé à la pédagogie. Il a créé la machine à enseigner : l’élève est mis
face à des questions auxquelles il doit répondre dans des cases prévues à cet
effet ; puis il actionne une manette pour voir immédiatement s’il a bien
22
23. répondu, ce qui va jouer le rôle de renforcement positif ou négatif de la
réponse.[11]
Au niveau de l’enseignement, cela se traduit par un apprentissage fondé sur
une progression par paliers, avec des petits exercices effectués de
nombreuses fois, faisant pas à pas évoluer l’élève.
Un cours global est découpé en nombreux sous objectifs, au cours desquels
l’élève passe de la connaissance initiale à la connaissance finale.
La pédagogie béhavioriste est fondée sur l’entraînement à haute dose avec
des « renforcements positifs » (si la réponse est juste) et des « renforcements
négatifs » (menant à l’abandon d’une réponse fausse par l’élève).
Dans ce modèle, l’agent de renforcement tient une place centrale : lorsqu’il
est positif, sa représentation favorise un comportement (compliments,
louanges, bons points), il est facilitateur d’apprentissage. A l’opposé, s’il est
négatif (blâme, malus), c’est sa suppression qui favorise ce comportement.
[10]
C’est un principe utilisé par exemple dans l’enseignement assisté par
ordinateur (EAO),
et de certains logiciels éducatifs tel Adibou® [7 p126].
Dans cet exemple (Figure 1), on apprend à trier des déchets, et à les placer
dans les poubelles adéquates. Si l’on se trompe, une voix off le signale et
l’objet reprend sa place initiale. Par contre s’il s’agit du bon emplacement,
une animation vocale enthousiaste félicite le joueur, et place le déchet
directement dans la poubelle concernée, ce qui renforce l’association d’idée
canette/métal. On recommence jusqu’ à ce que tous les objets trouvent leur
juste place. En comparaison avec une simple question, « dans quelle poubelle
se jette une canette ? », on peut concevoir le caractère motivant de cette
approche.
23
24. Figure 1 : Adibou (Source : www.adibou.com/)
Avantages :
C’est une pédagogie qui permet un bon suivi de l’évolution de l’élève, qui
permet de s’adapter à son rythme (à l’inverse d’un cours en classe où
certains élèves peuvent être « lâchés »).
Inconvénients :
Scinder les problèmes ne permet pas de voir si l’apprenant possède une
vision d’ensemble. Savoir passer de A à B, puis de B à C ne permet pas
nécessairement de savoir passer directement de A à C… [9]
Ce modèle ne tient pas compte des représentations initiales internes de
l’individu, qui peuvent ressurgir et parasiter la réflexion face à des
problèmes plus complexes.
En ne cherchant aucunement à s’adapter au « terrain » mental préexistant,
cette pédagogie va en quelque sorte déconstruire des représentations
mentales et les remplacer par d’autres. [7 p.126]
La théorie suivante dite « pédagogie de la construction » fut développée,
entre autre, par Jean Piaget dans les années 1920, en réaction au
behaviorisme qui d’après lui limitait trop l’apprentissage à l’association
stimulus - réponse. [7p.126]
24
25. II.3 LA PÉDAGOGIE CONSTRUCTIVISTE [7, 8, 9]
Selon cette théorie, les représentations internes initiales des élèves
interviennent dans la construction du savoir.
Ces mêmes représentations, modifiées au contact de la nouvelle
connaissance et mises en relation avec elle, vont participer à l’acquisition de
nouveaux concepts mentaux.
C’est un apprentissage dit « actif » qui met en avant l’autonomie de
l’apprenant, qui va accéder aux connaissances par des besoins spontanés
d’apprendre.
Je cite « En bref, beaucoup de chercheurs s’entendent à dire que :
- « apprendre » n’est pas le résultat d’empreintes que laisseraient des
stimulations sensorielles dans l’esprit de l’élève à la manière de la
lumière sur la pellicule photographique (appartenant plutôt au modèle
transmissif).
- « apprendre » n’est pas non plus uniquement le résultat d’un
conditionnement opérant, dû à l’environnement (pédagogie
behavioriste).
- « apprendre » procède d’abord de l’activité d’un sujet, sa capacité
d’action étant effective ou symbolique, matérielle ou verbale, et cette
capacité d’action procède de représentations mentales
personnelles. » (constructivisme). [7 p.127]
L’acquisition de nouveaux savoirs ne se fait pas par empilement, effaçant
toute connaissance antérieure, mais par façonnage de celle-ci.
L’apprentissage selon la théorie constructiviste naît d’une transformation des
informations reçues par l’apprenant, en fonction de son expérience et de ses
connaissances préalables.
Qu’en est-il concernant les métiers de la santé ?
25
26. II.4 QUELLE PÉDAGOGIE POUR LES MÉTIERS DE LA SANTÉ ?
Actuellement, l’apprentissage des métiers de la santé passe par le circuit des
facultés, et donc tout d’abord par un modèle transmissif que proposent les
cours magistraux.
Lorsque l’on avance dans le cursus, si les connaissances factuelles
nécessaires (vérités scientifiques établies, notions à mémoriser sans
représentation spécifique, faisant surtout travailler la mémoire) sont
dispensées de cette façon, des capacités manuelles spécifiques et des
concepts scientifiques plus complexes viennent s’y ajouter.
Ces derniers nécessitent une habileté cognitive d’analyse, de critique, de
mise en relation (abordé les parties suivantes), et en plus de cela, des
facultés d’adaptation et de réactivité à acquérir sur fond de savoir théorique.
Tous ces éléments ne sont pas aisés à transmettre par l’intermédiaire de
cours en amphithéâtre, et même, si l’on considère la mise en situation
clinique on constate :
- Un manque de cas relatif,
- La confrontation à des problèmes éthiques,
- Un nombre d’étudiants élevé, en relation au nombre de cas,
- Une diversité clinique non exhaustive de ce qu’on peut rencontrer dans
la vie professionnelle, du moins inégale selon les étudiants.
Comment s’assurer que les notions sont acquises, que les apprenants
peuvent répondre à une situation aléatoire, alors que bon nombre d’entre
eux n’a pu bénéficier d’un véritable entraînement ?
Manipuler des notions, retravailler les connaissances de façon dynamique et
les mettre en relation pour être préparé à agir dans une situation concrète :
un défi posé à l’enseignement dans les études supérieures, notamment dans
26
27. le domaine de la santé où les données techniques et intellectuelles sont de
plus en plus complexes.
De nouveaux outils pédagogiques apparaissent depuis de nombreuses
années, notamment via le développement de l’informatique et du Web,
cherchant à performer la formation traditionnelle qui doit s’adapter aux
nouvelles données (recherche d’économie financière, complexité des notions
à maîtriser, et raisons d’éthique).
II.5 LA FORMATION CONTINUE EN ODONTOLOGIE : RÉALITÉ
ACTUELLE [12, 13,14]
Nous avons effectué une enquête auprès des organismes de formation
continue en odontologie, sur les différentes formations attribuées aux
Urgences médicales au cabinet dentaire à travers l’hexagone, sur la période
2008/2011.
Description de l’étude : j’ai recueilli auprès du conseil de l’Ordre des
Chirurgiens Dentistes (ONCD) les coordonnées des différents Organismes
français de formation continue[14].
Un mail a ensuite été envoyé à la plupart des organismes susceptibles de
dispenser une formation continue sur le thème des Urgences médicales au
cabinet dentaire en leur demandant le but de la formation ainsi que le
support pédagogique utilisé.
Sur 51 organismes interrogés, seuls 14 ont répondu, dont 7 par l’affirmative.
Voici les observations de l’étude :
En ce qui concerne la préparation aux Urgences médicales au cabinet
dentaire elle semble être actuellement essentiellement assurée par des
formations AFGSU (Attestation de Formation aux Gestes et Soins d’Urgence)
27
28. niveau 1 et 2, obligatoires pour les professionnels qui sont inscrits dans la
quatrième partie du code de la santé publique (le chirurgien dentiste en fait
partie) selon le journal officiel, arrêté du 3 mars 2006. Elles sont dispensées
par divers organismes de Formation continue via les facultés de médecine et
les praticiens hospitaliers. [12,13]
Valables 4 ans ces formations nécessitent des remises à niveau.
La formation AFGSU 1 et 2 (figure 2) fait également partie du cursus des
étudiants en chirurgie dentaire.
Figure 2: Formation AFGSU 2 à Strasbourg (Source Dr VALLE, Chirurgien dentiste)
Par ailleurs, on dénombre en plus de ces formations AFGSU, quelques
conférences internet dédiées à ce thème, via des sites internet comme
ZeDental.com ® (www.zedental.com/formations/fiche.cfm?
i=ZEDE00000000986 ) ou Dentalespace ® (www.dentalespace.com/dentiste/
formation/video-352.htm),ou encore de conférences retransmises sur des
univers virtuels 3D (Dr CALON/Conférence au symposium 2009 du CAICB)
vouées à mettre l’accent sur les Urgence spécifiques à la pratique dentaire.
On remarque que la formation aux urgences médicales survenant
spécifiquement au sein du cabinet dentaire est assez peu développée, au
profit d’une formation plus généraliste (AFGSU).
Si des initiatives locales s’intéressent à l’urgence médicale plus
caractéristique de notre profession, elle sont tout de même plutôt rares, au
28
29. regard de la préparation que réclame une situation de stress, comme un
patient en détresse vitale, surtout dans notre pratique professionnelle isolée.
Comment faire évoluer ces systèmes de formation traditionnelle, comment
les compléter, les potentialiser, rester dans une perpétuelle évolution
pédagogique ?
L’outil informatique peut-il représenter cette évolution, et apporter du
progrès pour les formateurs ? Pour les apprenants ?
Trouver des éléments de réponse représente tout l’enjeu des parties qui
suivent.
III.DES NOUVEAUX OUTILS AU SERVICE DE LA FORMATION [7, 15,
16, 17, 18, 29]
On va d’abord expliquer les raisons de l’apparition de ces nouveaux outils
numériques au sein de l’enseignement avant d’en décrire certains.
III.1 DE NOUVEAUX CONSTATS [7, 29]
« Nous assistons de nos jours à une réelle mutation de la demande des
apprenants en matière de produits de formation, et cette demande est en
rapport direct avec l’évolution de la société. Elle témoigne d’un besoin urgent
de combler un déséquilibre de plus en plus marqué entre une société
multimédia en pleine mutation et des modalités éducatives encore attachées
à des processus académiques de transfert de connaissance. » [7 p.21]
Dans une société moderne où internet est un des vecteurs principaux du
développement intellectuel de chacun, l’outil multimédia devrait faire partie
intégrante de l’acquisition de nouvelles connaissances.
En plus de la présence d’un professeur devant une assistance, de la lecture
de livres ou d’articles, d’autres moyens d’apprendre sont désormais
accessibles à tous.
29
30. L’observation anthropologique de la société fait remarquer une évolution
dans l’univers de la formation ; les populations étudiantes sont de plus en
plus mobiles, les formations spécifiques les amenant parfois loin de leur
famille, les charges périscolaires augmentent (tarifs des technologies comme
internet, le prix des logements souvent loin des parents, les frais de
déplacements) et par conséquent les étudiants travaillent de plus en plus en
parallèle de leur formation. [29]
Ces emplois du temps chargés imposent à l’université un nouveau défi : être
flexible et adaptable. Cette transformation devient progressivement possible
avec le numérique.
L’éventail des supports d’enseignement est de plus en plus large, et permet
donc de nouvelles possibilités pédagogiques.
III.2 LE E-LEARNING
Dans les pays anglo-saxons, ce terme désigne la formation à distance.
La définition française est beaucoup plus vaste, puisque étymologiquement,
e-learning signifie apprendre par des moyens électroniques (allant ainsi du
cours par correspondance, aux plateformes internet, en passant par le simple
CD-Rom).
Par conséquent, vu l’étendue du sujet, nous ne rentrerons pas dans le
détail .[29]
Cependant, il faut savoir que dans un projet pédagogique, le e-Learning peut
avoir différentes formes ou fonctions ; il peut correspondre par exemple à la
simple médiatisation des contenus de cours pour les rendre accessibles au
plus grand nombre, mais peut également faire partie d’une réflexion plus
avancée, par assemblage de deux types d’enseignement : en « présentiel » et
30
31. en « distanciel » (un professeur qui décide de faire un cours magistral et de
suivre un exercice en ligne par exemple).
Le principe e-Learning fait alors partie d’une stratégie didactique bien
réfléchie de la part du pédagogue.
III.3 LES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DE LA
COMMUNICATION POUR L’ENSEIGNEMENT (TICE) [15, 18, 19,
36]
III.3.1Présentation [15, 36]
Le terme TICE recouvre les outils et produits numériques pouvant être
utilisés dans le cadre de l’éducation et de l’enseignement. Sans entrer dans
les détails, depuis la deuxième moitié du XXe siècles, mais surtout depuis les
années 2000, le monde de la formation tente de se les approprier.
En septembre 1997, la Direction de l’Information Scientifique et des
technologies Nouvelles du Ministère de l’Education Nationale estimait que
« l’Ecole ne peut rester à l’écart de ces évolutions […] de la société de
l’information ». [15]
En enrichissant et en diversifiant les supports et les pratiques pédagogiques
dans toutes les disciplines, les TICE permettent de mieux prendre en compte
l'hétérogénéité des élèves et d'individualiser les apprentissages. Elles
permettent également de mieux assurer la continuité pédagogique en dehors
de la classe.[36]
A l’intérieur même de ce concept de TICE, on trouve une multitude de
dénominations, pour un grand nombre de supports au service de
l’enseignement dans une multitude de domaines.
III.3.2Espace Numérique de Travail (ENT) [19, 36]
C’est la traduction française d’un concept d’origine anglo-saxonne, le VLE
(Virtual Learning Environnement).
31
32. Il se définit comme un « terme générique qui décrit un large éventail de
systèmes TIC (Technologies de l’Information et de la Communication) utilisés
pour fournir des services d’apprentissage et des services d’assistance en
éducation.
Il doit combiner des outils de communication et de collaboration, sécuriser
un espace de travail en ligne individuel, fournir à l’enseignant des outils pour
pouvoir gérer et adapter les contenus aux besoins des utilisateurs, garantir le
suivi des progrès des élèves et offrir un accès partout et à n’importe quel
moment. »
III.3.2.1La situation à l’étranger
D’après un rapport d’étude de 2010 auprès d’experts du Royaume Uni, du
Danemark et de l’Espagne, de manière générale et quel que soit le pays, ces
plateformes servent à l’heure actuelle à la communication entre enseignants,
entre parents et enseignants, à la gestion et à l’organisation de la vie scolaire
mais moins à de véritables usages pédagogiques.[19]
III.3.2.1.1Royaume-Uni
« De grands moyens et un développement coordonné »
Le développement des TIC au niveau national est depuis longtemps une
grande priorité. Ces dernières années, les infrastructures, la connectivité et
les contenus ont beaucoup évolué, avec de nombreux enseignants faisant
appel à ces technologies, mais rencontrant des difficultés à adapter les
contenus pédagogiques.
Malgré le ralentissement du développement des TIC du à la décentralisation
gouvernementale de 1999 qui laisse l’éducation à chaque assemblée locale,
plusieurs initiatives gouvernementales ont été lancées, vouées « à améliorer
les résultats des élèves et offrir une manière d’apprendre plus motivante, en
matière de contenus et méthodes ». [19]
32
33. Parmi elles, on peut citer la BECTA (British Educational Communications and
Technology Agency), qui est l’agence gouvernementale dédiée à l’intégration
des TICE dans le système éducatif, The National Grid for Learning (réseau
national d’apprentissage), Harnessing Technology : Transforming Learning
and Children’s Service (avec comme objectifs principaux de transformer
l’enseignement et l’apprentissage, améliorer les résultats des élèves et
proposer une manière d’apprendre plus motivante).
III.3.2.1.2Le Danemark
« Une approche pragmatique axée sur la demande des enseignants »
Pays en pointe en matière de TIC en public et en privé, son système éducatif
y est largement ouvert.
Une agence nationale UNI-C de 1985 (Centre d’Education et de Recherche du
Ministère de l’Education Danois) à été crée à ce sujet.
Les plateformes virtuelles dans ce système nordique sont utilisées par 97%
des établissements.
Mais une fois encore, elles le sont plus par les enseignants que par les
étudiants, dont elles doivent aujourd’hui chercher à susciter l’intérêt en
privilégiant les fonctions pédagogiques.
Parmi les initiatives Danoises on peut souligner celle de 2007 : Stratégie
nationale pour l’apprentissage soutenu par les TIC concernant la flexibilité de
l’enseignement en temps et en espace.
III.3.2.1.3L’Espagne
« Approches régionales, fondées sur les logiciels libres »
En Espagne, l’accent est mis sur la formation des enseignants à l’utilisation
des TICE, et sur les ressources pédagogiques digitales.
De grandes initiatives débutant dans les années 2000 concernent internet en
salle de classe, un programme visant à développer une infrastructure
technologique, et à favoriser l’insertion numérique dans le scolaire, mais
33
34. également à former les enseignants et assurer le suivi des initiatives dans les
écoles.
Il n’y pas en Espagne, d’étude concrète sur les moyens mis en place comme
dans les deux autres pays, mais l’impression des responsables est que
l’usage pédagogique se développe, même s’il est progressif.
III.3.2.1.4La France[36]
Comme il est difficile de trouver un rapport national sur l’utilisation des TICE,
nous allons donc nous intéresser aux initiatives ministérielles et les plans de
développement des TICE depuis 2006.
Les grandes initiatives françaises [36]:
2007 : Mise en place du B2i (brevet informatique et internet) au collège et
lycée qui certifie de la formation des étudiants à l’utilisation maîtrisée et
raisonnée des ressources numériques et d’internet.
Mise en place du livret scolaire électronique destiné au suivi du parcours de
l’élève.
2009 : Une circulaire distribuée en début d’année insiste pour :
- Donner des chances de réussite à tous les élèves par le développement
de l’accès aux technologies TICE et leurs usages,
- Développer des ENT en priorité, en partenariat avec les collectivités
territoriales.
- Instaurer le cahier de texte électronique
- Etablir un plan « Ecoles numériques rurales », pour l’équipement de
5000 écoles de village de moins de 2000 habitants.
- Encourager le développement des TICE au service de la scolarisation
d’enfants en situation de handicap.
2010 :
- Généralisation des ENT à tous les établissements scolaires, mettant
l’accent sur le développement des ressources pédagogiques et le rôle
prépondérant du chef d’établissement.
- Amélioration de l’apprentissage des langues grâce au numérique
34
35. - Mise en place d’un plan de formation des enseignants à l’utilisation des
TICE, initiative arrêtée en juin 2010, relayée par un programme
collaboratif :
- p@irformance: http://national.pairformance.education.fr/
Bien que ces initiatives semblent dynamiques et prometteuses, je n’ai pas
trouvé de rapport national sur la situation sur le terrain, en dehors de
témoignages individuels d’utilisation des TICE dans des expériences
pédagogiques isolées (exemple Farm Frenzy [32]).
Si l’on explore un ENT (par exemple celui de l’UDS) ce site propose :
- un suivi du parcours de l’étudiant (résultats d’examens, cursus)
- des informations sur l’organisation de l’Université
- l’accès via une bibliothèque numérique à de nombreuses ressources
documentaires et revues électroniques,
- des « podcasts » (fichiers audio ou vidéo consultables en différé via
internet) sur différents thèmes dans différentes filières (à noter que si
l’on recherche en chirurgie dentaire par exemple, il n’y a qu’une seule
référence, celle du Professeur Bloch-Zupan : cela signe un faible
développement de ces supports dans nos études de dentistes)
- la formation au C2i (certificat informatique et internet des études
supérieures) ou encore l’apprentissage de langues étrangères via
internet.
- l’accès aux Universités Numériques Thématiques (UNT) francophones,
destinées à mettre en commun des ressources émanant des différents
lieux de recherche et d’enseignement dans un même domaine (http://
www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/notice-1699).
Pour exemple, l’UNF3S (http://www.unf3s.org/) est l’UNT des Sciences de la
Santé et du Sport.
Dans cet historique concernant les initiatives françaises en matière de TICE
on sent une volonté (émanant plutôt du ministère et de la haute hiérarchie)
35
36. d’ « imposer » ces nouvelles technologies sans connaître l’avis de ceux qui
sont sensés les utiliser.
Pour Philippe PORTELLI, expert dans ce domaine, l’erreur serait de « faire
pression » sur le corps enseignant quand à l’utilisation des TICE, alors qu’il
serait plus habile d’en faire la promotion auprès des enseignants.
La venue des technologies numériques dans l’enseignement est inévitable
mais doit émaner de l’interaction « enseignant - apprenant ».
Elle se fera naturellement, dès lors que ces outils numériques montreront
leur « évidence pédagogique » dont seuls les enseignants et les étudiants du
terrain sont juges.
La place des instances supérieures et des ingénieurs à l’origine de ces outils
est de les soumettre au corps enseignant et de travailler en collaboration
avec eux ainsi que les élèves pour favoriser leur développement. [29]
III.3.2.1.5Enseignements de cette étude
Dans ces Pays Européens, on remarque que les plateformes de type ENT sont
surtout destinées à la gestion et à la communication mais trop peu à la
pédagogie.
L’évolution pourra venir d’initiatives ministérielles, mais également d’une
impulsion donnée par les enseignants et les élèves (qui représentent la
demande).
Pour en arriver là, le facteur de succès passe par un développement des ENT
qui doit se faire à la manière d’un processus pédagogique et non comme
vitrine technologique.
Partout il faut organiser le rôle des différents acteurs, créer progressivement
un accès facile aux ressources (voire même en salle de classe plus que dans
une salle dédiée, mettant l’outil numérique au centre de l’enseignement).
Il serait souhaitable d’agir sur les contenus, la qualité de la formation de
l’enseignant à son utilisation, et travailler la communication autour des TICE.
36
38. Figure 3 : Cours d’anatomie en 3D (Source http://anatomie3d.univ-lyon1.fr)
Selon les professeurs de l’Université de Lyon intégrant à leur enseignement
ce nouvel outil, l’abord de la matière est facilité par :
- L’utilisation d’images mentales au sein du cours est rendue possible (se
servir de l’image d’un objet concret pour en symboliser un autre ; par
exemple pour représenter un bassin humain, en partant d’une image
de bassine, sa représentation 3D permet de tirer l’étudiant vers une
représentation logique et aboutie) par un graphisme informatique
réaliste, et elles sont rendues modelables à souhait.
- La possession d’une image concrète (et non pas un dessin en 2D) dont
on peu faire le tour, rentrer dans les structures (figure3), ce qui
favorise une compréhension immédiate.
- La possible mise en ligne du contenu du cours sur une plateforme
numérique avec une évaluation des connaissances.
Cet outil utilisé dans ce cas en « présentiel » va pouvoir servir sur une
plateforme destinée à l’enseignement à distance, ou sur un ENT
(Espace Numérique de Travail).
III.3.3.2Retours des professeurs
Selon les professeurs en ayant usage, l’enseignement à l’aide de la 3D
possède plusieurs atouts :
38
39. - Une plus grande motivation de la part des apprenants, la 3D étant
plébiscitée à plus de 94% selon un panel de 500 étudiants.
- L’accès à l’information est simplifié car elle peut être scénarisée, une
démarche possible grâce au virtuel.
- La 3D aide l’enseignant à faire la démonstration car il possède une
grande maniabilité des structures (maniabilité des différents plans
osseux, musculaires, vasculo-nerveux)
III.4 LES PLATEFORMES VIRTUELLES 3D DANS L’ACQUISITION ET
L’ECHANGE DE CONNAISSANCES
III.4.1Présentation
« Les mondes virtuels sont en train de faire partie intégrante du paysage
technologique éducatif ».[25]
Il existe plusieurs mondes virtuels comme OpenSim®, Second Life®, Active
Worlds®, Blue Mars®[22].
Nous prendrons comme exemple Second Life® (SL), qui reste le plus utilisé,
et sur lequel porte la plupart des études trouvées.
Lancé en 2003, par la société Linden Lab ®, Second Life est un
environnement d’immersion en 3D dont l’aspect ressemble à celui de jeux
vidéo, mais dont la finalité serait plus axée sur la socialisation, l’interaction,
l’exploration, la construction.
Les résidents qui s’y téléportent, représentés par des avatars (apparence que
prend un internaute dans un univers virtuel), peuvent interagir avec un grand
nombre de personnes, dans des lieux virtuels très divers, et participer à des
activités individuelles et de groupe, des discussions, des moments de
distraction et de formation.
Il existe une communauté active d’éducation dans SL.
39
40. Plus de 300 collèges et universités ont construit des « lieux » ou sont
dispensés des cours et/ou des rencontres à but professionnel. [25]
III.4.2Apport dans l’échange des connaissances [25]
La plateforme SL possède un énorme potentiel comme environnement
d’apprentissage ; elle offre une grande souplesse d’interaction entre les
intervenants, un engagement intense du participant, la possibilité de mise au
point de scénarios immersifs rendus réalistes par l’utilisation de la 3D. On
peut y développer des programmes de simulation, des jeux de rôle,
participant à une vision constructiviste d’un enseignement.
Potentiel lieux pour la formation, en temps réel, ouvert à la plupart, avec une
capacité d’interactivité et de communication quasi identique au réel.
Devant une telle puissance de communication, on peut alors dégager un
nouvel aspect important : l’apprenant devient acteur de sa formation, tant
en terme de recherche de l’information (qui n’est plus uniquement dispensée
par un « maître » qui détient la connaissance), qu’en terme de participation
au savoir collectif (en apportant ses connaissances) ; le bénéfice supposé
d’un apprentissage collaboratif est alors renforcé.
Si l’on émet l’hypothèse de l’apport positif d’un flux d’échanges et d’un
apprentissage collaboratif par partage d’expériences, une telle plateforme
les optimise.
Cette plateforme permet en outre de réduire les frais et les déplacements en
rapport avec la formation traditionnelle.
D’autre part la représentation dans SL des personnes physiques situées
devant leur écran se fait sous forme d’avatars, dont on s’aperçoit qu’ils sont
souvent fidèles en ressemblance à la personne qui les créé, soulignant une
volonté d’apparaître « en personne » au monde virtuel.
40
41. Un sentiment de présence accrue, donc, qui est rendu possible quel que soit
la nature expansive ou introvertie de l’internaute, grâce à l’anonymat
qu’offre la plateforme, et qui semble conduire à moins d’inhibition dans les
interactions et la participation aux évènements .
Aucune autre méthode d’enseignement n’offre une telle liberté d’expression.
Dans les 4 dernières années, les communautés médicales ont montré un
intérêt grandissant à l’utilisation de SL pour l’enseignement public, la
sensibilisation et la formation. En 2009, un article sur les activités SL liées à
la Santé rapporte 68 sites directement liés au sujet de la santé, dont 34 sont
dédiés à la simple diffusion d’informations.
La plupart de ces sites proposent des présentations visuelles, des clips, des
diaporamas et des liens Web. Cependant, il existe plusieurs sites où des
simulations médicales, des soins infirmiers sont modélisés et où les
étudiants en médecine peuvent s’exercer avec des équipements virtuels.
III.4.3Les différents types d’informations véhiculées
Selon un article de 2009 [21], Beard distingue 5 catégories d’activités liées à
la santé sur SL.
III.4.3.1Les sites dédiés à l’éducation et la sensibilisation à la santé :
Les sites qui y sont destinés sont ouverts au grand public, il s’agit d’un
carrefour d’informations et de liens web, orientant et redirigeant les
utilisateurs vers d’autres sites ou centres d’information de la vie réelle. Ils
peuvent aussi inclure des groupes de discussions, des conférences
communiquant des informations sur des sujets spécifiques. Il s’agit des sites
les plus courants sur SL.
Quelques exemples :
- Health Info Island, University of Plymouth avec Sexual Health Sim de US
Centers for Disease Control and Prevention (CDC),
41
42. - National Institutes of Health qui donne la possibilité de parler
directement avec un représentant du CDC.
- La Ann Myers Medical Center (Figure 4), avec un environnement offrant
salles de classes, ressources de connaissances ainsi que les premières
simulations médicales (2007).
- Ou encore le Women’s Health Center (WHC) qui sensibilise à l’auto
examen mammaire en prévention du cancer du sein.
Figure 4 : Ann Myers Médical Center
(Source : http://scienceroll.com/2007/06/17/top-10-virtual-medical-sites-in-second-life)
III.4.3.2Les sites de soutien : [21]
Ils offrent la possibilité de discuter avec des professionnels de santé, sans
l’aspect tabou de la maladie.
Pour ne citer que l’exemple des problèmes d’halitose (mauvaise haleine)
qu’un patient n’oserait pas aborder face à un professionnel. Grâce à la
barrière de l’écran d’ordinateur, il libère sa parole. Cette relative distance
désinhibe l’internaute et facilite l’expression.
Ces sites proposent des liens vers des groupes de soutien et de discussions
spécifiques à différentes maladies.
On souligne un taux de connexions élevé sur ce type de sites. Cela justifie-t-
il leur utilité ?
42
43. III.4.3.3Les sites dédiés à la formation : [21]
Selon le même article, Beard n’en retient que 11 au sein de SL, mais ce type
de sites serait en croissance rapide. [21]
Stott (2007) soulève que certaines universités ont constaté que la proposition
de formations sur SL peut favoriser l’image de marque de l’Université et
attirer de futurs étudiants.
III.4.3.3.1L’impérial College London
L’impérial Collège London, entre autre, a créé un jeu de simulation fondé sur
SL pour les étudiants en médecine, avec des patients virtuels, pour apprendre
et savoir agir face à des pathologies respiratoires (figure 5). Une analyse de
l’impact de ces nouvelles opportunités pédagogiques est en cours, avec le
retour d ‘étude de cette expérience menée de juillet 2010 à juin 2011[23].
Lors de ma visite, ce site était vide.
Figure 5: Hopitâl virtuel de l’Imperial College of London sur SL (Source :http://slurl.com/
secondlife/Imperial%20College%20London/150/86/27/)
43
44. III.4.3.3.2Programme Play2Train
Figure 6 : Mise en situation Play2train
(Source : http://elianealhadeff.blogspot.com/2007/07/play2train-serious-games-for-
emergency_24.html )
Le programme Play2Train [24] est une simulation qui entraine à la réaction
au bioterrorisme, ayant pour théâtre une ville et un hôpital virtuels, dans
Second Life (figure 6). Il vise à enseigner le triage des blessés en cas de
catastrophe, et la bonne gestion de la crise par la population.
Cette simulation utilise les fonctions audios de la plateforme qui aident à
améliorer le réalisme de la situation et la communication entre participants.
Les concepteurs projettent de comparer les résultats de cette méthode à une
simulation dans le monde réel.[21]
III.4.3.3.3Medical Examiner's Office
On peut apprendre à effectuer une autopsie dans une salle de médecin
légiste reconstituée en 3D dans SL (figure 7) où les avatars agissent avec
réalisme, recréant une autopsie virtuelle.[21]
44
45. Figure 7 : Salle d’autopsie
(Source : http://maps.secondlife.com/secondlife/Whispering Angel Island/19/97/22/ )
III.4.3.3.4Dental Life
Dans cette même partie liée à l’utilisation de SL pour la formation, évoquons
bien évidemment Dental Life®.
Cet environnement virtuel se situe sur « Ivoire », une île en forme de molaire
au sein de SL (figure 8), où l’on peut se retrouver avec toute la communauté
des chirurgiens dentistes pour diverses activités devant son écran :
Des cours universitaires iconographiés mis en lignes et accessibles à tous,
des possibilités d’interactions entre les dentistes géographiquement et
temporellement éloignés (par la voix ou par des fenêtres de texte écrit), des
conférences en temps réel retransmises au sein d’un auditorium : les
possibilités sont nombreuses et vont même aller prochainement vers la
création d’un programme de formation et d’entraînement aux urgences
médicales pour les chirurgiens dentistes.
45
46. Figure 8 : L’île « Ivoire » de Dental Life (Source : http://www.dentallife.fr/)
III.4.3.4Les sites de marketing et de promotion de la santé
Certains sites cherchent à promouvoir l’image des établissements de santé
en organisant une visite virtuelle par exemple, pour préparer les futurs
patients à une éventuelle hospitalisation et rendre l’environnement plus
familier. On peut également faire découvrir de nouvelles technologies au
service des patients, sorte d’opération marketing ; Second Health (UK),
Palomar West Hospital.
Ces sites existent également dans le but d’obtenir des dons pour des
fondations, comme l’American Cancer Society, en décrivant leur activité de
manière virtuelle.
III.4.3.5Les sites dédiés à la recherche
Bainbridge (2007) évoque le potentiel des mondes virtuels pour effectuer des
recherches, créer des laboratoires, des expériences, et des paramètres qui
simulent l'expérience réelle, le tout à un coût très faible [21].
46
47. Exemple : l'Université de Houston dans Second Life qui s’intéresse à la lutte
anti obésité propose aux visiteurs de participer à des enquêtes, études et
activités.
III.4.4Discussion
On aura compris les avantages qu’offre ce type de plateforme en terme
d’immersion réaliste, de flux de communication, de disponibilité
permanente, d’interactivité, de liberté d’expression, de gain de temps et de
confort d’utilisation.
Cependant, si la majorité des sites sur SL concernant la santé sont des sites
informatifs pour grand public et répondent totalement à leur cahier de
charge, qu’en est il vraiment de ceux destinés à la formation ? Si l’on met de
côté les arguments cités ci dessus, la formation virtuelle porte-t-elle autant
ses fruit qu’une formation sur le terrain ?
On ne trouve pas d’étude certifiant formellement l’efficacité pédagogique des
formations virtuelles comparativement au « présentiel », par manque de
preuves empiriques. Des analyses et des retours d’expériences tendent à se
développer et apportent progressivement leurs résultats. En voici quelques
exemples. On verra également les limites de ces environnements virtuels
juste après.
III.4.5Retours d’expérience
III.4.5.1Une étude d’un séminaire interactif
Ce séminaire a été réalisé dans SL, pour la formation médicale continue sur
le thème de la prise en charge d’un patient diabétique [25].
Le but de cette expérience est de dégager le potentiel de SL dans la
formation médicale continue.
Ce retour d’expérience est fondé sur les impressions des médecins
participant au test, soit 14 personnes.
47
48. Premier élément en faveur de ce support : le « chat » (se prononce
« TCHATT »), qui est une fenêtre d’échanges écrits permettant de lancer des
discussions, faisant interagir les participants, en parallèle à l’activité
principale, et favorisant l’investissement de chacun.
Des enquêtes en ligne avant et après la session ont été effectuées pour
contrôler les connaissances, et ne constatent pas de différence avec la
même formation dans le réel.
Les intervenants livrent des impressions positives sur cette expérience,
supérieure en efficacité selon eux à d’autres formations en ligne, et sans
différence notoire avec une formation en « présentiel ».
On assiste même à la naissance d’un groupe de discussion extérieur à la
formation, entre professionnels, vu comme un partage d’informations
sérieuses (et pas uniquement divertissantes).
En conclusion ils plébiscitent une formation conforme à leurs horaires
chargés de médecins, sans voyage nécessaire, qui les plongent dans un
univers très réaliste, un anonymat qui favorise le partage, et pourvoyeur de
connexions professionnelles au delà de l’étude.
III.4.5.2 Case Western University [26]
Au sein de Second Life, cette université
de Cleveland, Ohio, propose aux
étudiants en chirurgie dentaire de
travailler leur communication. En allant
sur le site, ils rendent visite à Masha
(figure 9), une patiente virtuelle qui
change de problème dentaire au gré
Figure 9 : Masha, patiente virtuelle
des rencontres, et avec qui on apprend (Source : http://blog.case.edu/
casenews/2008/07/28/
à transmettre les messages de virtualdentistry/ )
thérapeute à patient.
48
49. Le projet développe des scénarios qui aident à la récolte d’informations sur
l’histoire d’un patient, à transmettre des conseils sur l’hygiène ou encore à
proposer et expliquer clairement un traitement au patient. Malheureusement
je n’ai pu testé le programme, le lieu étant vide au moment de ma visite.
Selon Kristin Z. Victoroff [26], professeur adjoint à l'École de médecine
dentaire de l'Université Case Western Reserve, qui est à l’origine du projet, le
fait de passer par un environnement virtuel permet d’aller plus loin dans les
situations rencontrées, les barrières sont quasi inexistantes pour développer
l’imagination dans toutes les situations envisageables.
De plus, parce qu’il s’agit d’un module de formation facultatif, on peu
organiser les cours sans libérer trop de moyens financiers. On imagine
qu’atteindre le même objectif par petits groupes de travail de mise en
situation réelle serait économiquement et humainement plus coûteux.
Kristin Z. Victoroff dégage aussi le fait qu’il s’agit de compétences plutôt à
transmission orale qu’écrite, et que le support virtuel répond mieux à ces
exigences qu’un questionnaire QCM, ou encore un examen classique.
Elle en conclue que les environnements virtuels comme Second Life ,
permettent , par immersion réaliste et grâce à une communication
performante, d’ enseigner certaines notions aussi bien qu’une formation
standard .
Comme c’est le cas dans l’apprentissage d’une langue étrangère par
exemple : par des interactions désinhibées au sein d’un environnement
virtuel, il est facilitée en comparaison à un enseignement classique.
III.4.5.3 Retour d’étudiants [27]
Une étude datant de 2008 a été réalisée par Catheryn Cheal professeur du
département « Art » de l’université d’Oakland. [27]
Elle rapporte les impressions de 15 étudiants se définissant comme « non
joueurs informatiques » ayant suivi un cours sur le thème des
environnements virtuels.
49
50. Le cours portait sur les technologies, la théorie et les enjeux actuels autours
des Mondes Virtuels. Les étudiants devaient créer un environnement sur
Second Life illustrant leurs observations en fin de session.
Sept questions leurs ont été posées portant sur les problème techniques
rencontrés , sur ce qu’ils aimaient ou pas dans la démarche de travailler sur
SL, puis sur les possibilités pédagogiques promues par SL selon eux, ainsi
que sur la possibilité de retenter l’expérience d’ un autre cours sur SL.
III.4.5.3.1Résultats
L’enquête indique clairement un problème avec l’accès à SL. 60% des
étudiants n’ont pas pu accéder depuis leur domicile faute de configurations
matérielles informatiques suffisantes. Des difficultés sont également
présentes à l’université et les mises à jour logicielles nécessaires sont trop
rarement effectuées par le service informatique.
Un aspect plus positif vient du temps mis pour créer un avatar, 60% des
élèves ont mis moins d’une heure grâce à l’ergonomie proposée (https://
join.secondlife.com/?lang=en-US ).
L’apprentissage de la modification de l’apparence des avatars, la navigation
et la communication ont été faciles malgré le fait qu’un seul élève déclare
avoir une expérience de jeu vidéo.
En quelques chiffres :
- 20% des étudiants se sont limités à l’exploration de l’univers, omettant
la dimension éducative.
Pour les autres, le potentiel pédagogique de SL réside dans la
dimension créative qu’il offre, et dans une communication possible à
travers le monde entier.
- 46% des étudiants dénigrent la lenteur du programme, 26% trouvent
l’interface de construction difficile à utiliser et les autres ont eu des
50
51. soucis avec le moteur de recherche de SL, les fonctions vocales, ou
encore des avatars « parasites » n’ayant rien à apporter à leur travail.
- 33 % des élèves voient le chat écrit comme un moyen de communication
trop lent pour être efficace.
- 33% considèrent que la courbe d’apprentissage pour la création d’objets
est trop difficile.
- 26% déplorent une configuration matérielle trop exigeante pour accéder
correctement aux fonctions qu’offre le site.
Sur les 15 étudiants enfin, aucun ne souhaite rééditer une telle expérience
sur SL.
III.4.5.3.2Discussion
Le commentaire positif vient du projet pédagogique du professeur d’utiliser
SL comme une méthode d’apprentissage constructiviste : en communiquant,
en explorant et en construisant des objets au sein de SL, les élèves ont
acquis des compétences et une compréhension des environnements virtuels.
Le style d’apprentissage variable des étudiants (préférant parfois lire et
écouter que agir) pourrait avoir influencé le relatif échec de l’étude. En tout
cas le fait de ne plus vouloir reprendre un tel cours sur SL impose une
sérieuse étude concernant les méthodes d’enseignement sur une telle
plateforme.
La réaction des étudiants couplée à de précédentes études indique 3 critères
de réticence faces à SL comme environnement d’enseignement :
1. Les problèmes techniques et logiciels concernant l’exigence en matière
de performance de l’équipement informatique, une prise en main du
51
52. logiciel parfois décourageante en ce qui concerne les fonctions
avancées autres que la création d’avatars et l’exploration.
2. Une difficulté dans la conception des cours : les enseignants ont des
styles et des stratégies d’apprentissage très différentes, ce qui
complique encore plus la création du contenu d’un cours sur SL.
Un cours dans SL pour lequel les étudiants doivent se trouver dans la
salle informatique de l’établissement, avec une communication par
« chat » plus lente, souffre par comparaison avec le même cours en
classe et une interaction personnalisée avec un professeur disponible.
Pour les élèves, il a été difficile de comprendre les stratégies
pédagogiques utilisées pour illustrer les objectifs à atteindre (ex :
comment transmettre un cours de mathématiques dans un monde
3D ?).
3. Une difficulté à concevoir SL comme environnement d’apprentissage :
75% des élèves déclarent avoir été attirés par le côté « fun » (amusant)
du monde virtuel par rapport à l’environnement de salle de classe
traditionnelle. L’attrait pour le cours en ligne viendrait donc de son
aspect pratique et flexible.
Dans la présente expérience, les étudiants se sont retrouvés face à des
difficultés inattendues sur internet, ce qui s’est avéré plus contraignant
qu’un cours traditionnel.
Je cite : « La disparition de la dimension amusante du monde virtuel
risque d‘être une raison importante du décrochage des étudiants vis-
à-vis du cours virtuel. »(Stanford-Bowers 2008)[27]
D’autre part et pour finir, le fait de se retrouver dans un
environnement ressemblant à l’univers des jeux vidéos, conduit les
élèves à se sentir joueurs plutôt qu’apprenants, ce qui leur semble
néfaste pour atteindre les objectifs .
52
53. III.4.6Limites et critiques
III.4.6.1Limites d’ordre technique.
Ces sites se trouvent sur le réseau Internet, et il est vrai que garantir la
sécurité des données qui circulent, et l’exactitude des informations n’est pas
simple.
D’autre part pour que chaque internaute ait un accès aux ressources et un
fonctionnement optimal, il y a une exigence de performance matérielle et
logicielle qui n’est pas encore atteinte par tous, et les équipements
informatiques sont parfois inadaptés.
Cela s’accompagne d’un débit internet trop variable à l’heure actuelle pour
prévenir la survenue de bugs et autres interruptions de communication.
Ces paramètres sont sensés évoluer avec l’Internet du futur (élévation du flux
de connexion, augmentation de la performance des ordinateurs).
III.4.6.2Limites de compétences
Cette « révolution » dans le monde de la formation et de l’information se fait
avec des générations qui ne sont pas toutes familières à l’utilisation de
l’informatique. Cela peut créer un fossé et le découragement de certains, tant
la mise à niveau nécessaire au maniement de l’outil peu être chronophage et
prendre parfois autant de temps que la formation elle même[21]. Il est
évident que l’expérience de « jeu » informatique des « nouveaux
apprenants » est un atout dans l’utilisation de ces plateformes, et en tout cas
il faut veiller à rendre « ergonomique » l’accès aux programmes pour attirer
les plus septiques.
Ces critiques ne remettent pas en cause le vivier que représentent ces
mondes virtuels et leurs fonctionnalités pour un espace d’apprentissage
constructiviste, susceptible d’améliorer les résultats d’apprentissage fournis
par la formation traditionnelle.
53
54. Les technologies du numérique semblent apporter de nouvelles solutions
pour les enseignants qui n’ont de cesse de s’« adapter » à leurs élèves.
D’un autre côté, quel est l’impact de la personnalité des apprenants sur leur
manière d’apprendre ? On peut se poser la question.
III.4.7De nouveaux outils, mais pour qui ?
La population apprenante compte des individus aux comportements et aux
manières d’apprendre extrêmement variables et par conséquent le support
informatique ne convient pas à tous.[29]
Les environnements virtuels font ressortir un côté ludique pouvant stimuler
l’intérêt de l’apprenant, mais les élèves sont-ils tous sensibles à cet
argument ?
III.4.7.1Les étudiants et les jeux vidéos
Une étude, publiée en 2010 [37] sur l’attitude de 217 étudiants en médecine
face aux jeux vidéo, a été réalisée auprès de 2 universités de médecine,
basée sur des critères démographiques, d’utilisation de jeux vidéos en
fonction du sexe et de l’âge.
Cette étude apporte certains résultats :
- 53% des étudiants interrogés étaient des femmes.
- 98% des étudiants ont jugé utile l’idée d’utiliser des nouvelles
technologies pour l’éducation de santé.
- 96% pensent que l’éducation pourrait davantage utiliser les
technologies numériques.
- 80% pensent que le jeu vidéo peut avoir une vertu pédagogique.
- 77% utiliseraient une simulation de santé multi-joueurs en ligne
pendant leur temps personnels à condition que cela les aide dans un
objectif pédagogique bien défini au préalable.
- 97% des étudiants accordent leur intérêt à la simulation à condition
qu’elle soit amusante.
54
55. - 90% se sentent motivés pour une simulation à condition qu’elle leur
apporte un plus dans la prise en charge des patients.
Cette étude nous montre que ces étudiants sont ouverts à l’emploi de
nouvelles technologies dans leur formation. Si l’on compare les résultats de
cette étude avec celle de Catheryn Cheal (chap. III.4.5.3) on se rend bien
compte que les perceptions sont différentes.
Il faut garder à l’esprit que la volonté du pédagogue est de transmettre les
connaissances au plus grand nombre. Ainsi, les outils numériques, et, en
particulier ceux renfermant une dimension ludique, pourraient être un moyen
de plus pour atteindre cet objectif, offrant une approche pédagogique
différente adaptée à certains élèves.
III.4.7.2Constat sur l’utilisation du numérique
Il ne faut pas non plus faire l’erreur de penser que la forte consommation de
moyens technologiques dans la société est directement transposable à
l’éducation. Le fossé entre les deux existera toujours, car le monde éducatif
et celui de la vie privée bien que de plus en plus entremêlés, fonctionnent
différemment (par exemple, l’utilisation d’un réseau social comme
Facebook®, peut servir dans la vie privée, comme dans la vie professionnelle,
mais pas sur le même mode ; son fort pouvoir de communication et de
partage servant dans un cas à exhiber la vie privée, ou alimenter le lien
social, dans l’autre il permet de rassembler une communauté de
professionnels et d’aider, par exemple, à l’organisation d’un travail d’équipe,
ne faisant circuler que des informations purement « sérieuses ») .
Une étude réalisée en 2011 auprès d’étudiants de l’Université de Strasbourg
confirme ce fossé utilisation universitaire/utilisation domestique [38]:
- dans la sphère privée, l’utilisation des services et outils numériques se
fait essentiellement par les réseaux sociaux, les mails, la messagerie
instantanée, les achats et la recherche d’informations.
55
56. - Dans la sphère universitaire, elle se fait pour l’accès aux ENT, aux
plateformes e-Learning, à la messagerie professionnelle et les
recherches documentaires.
Les ingénieurs qui créent des technologies numériques perfectionnées ont
beau être enthousiastes quand à leur utilisation pour l’éducation, il n’en
demeure pas moins que le « jus » pédagogique doit en être extrait grâce à
l’interaction entre enseignants et étudiants, sous peine d’être abandonnées.
[29]
Parmi ces supports, il en est un qui s’appuie sur des hypothèses cognitives
nouvelles, le « Serious Game » ou « jeu sérieux ». Il s’agit d’un programme
informatique aux dimensions ludique et sérieuse, fondé sur les techniques
issues du jeu vidéo (ludique) au service d’une démarche pédagogique
(sérieuse).
Ce programme peut être utilisé sur un support indépendant (logiciel, CD-
Rom) ou bien être développé sur une plateforme virtuelle comme celles
présentées dans cette partie.
56