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LA CRISE RENFORCE
L’IMPORTANCE
DES SOFT SKILLS
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EMPLOI DES CADRES
INCLUSION
Quand la pandémie
sensibilise sur le handicap
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SANTÉ
L’Équipe Exolis
se met au sport
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RECRUTEMENT
Saint-Gobain met ses salariés
à contribution pour attirer
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www.info-socialrh.fr
n°1552
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• Les Chroniques de 6
experts de la GRH, du droit
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• Les Clés : la tendance
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◆ Siège social : 23 rue Dupont des Loges
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◆ ISSN : 1955-5687 ◆ Dépôt légal :
novembre 2021 ◆ Commission paritaire :
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du papier : Belgique. Taux de fibres
recyclées : 0 %. Certification des fibres
utilisées : PEFC. Au moins un des
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—— billet ——
Une nouvelle vision du travail
Travaille-t-on aujourd’hui comme hier 
? Loin de là 
! Et il ne s’agit pas seu-
lement de l’impact de la technologie sur les tâches. Le travail a changé, sa
perception aussi. Certes, depuis la fin, déjà lointaine, de la société des chas-
seurs-cueilleurs, pour payer les factures, il n’y a guère d’autres solutions que
de travailler. Et le type d’emploi sert toujours, particulièrement en France, de
marqueur social. Mais quel est aujourd’hui le sens du « travail » ? Et quelle est
la relation entre salarié et employeur ? Si le travail a pu se dévaluer, se vider
de son sens, même, pour devenir un simple échange, souvent déséquilibré, les
jeunes diplômés créent aujourd’hui une nouvelle relation au travail, inédite.
Pour Pierre-Yves Martin, du cabinet de conseil One Man Support, interrogé
dans nos colonnes, ce qui caractérise cette nouvelle relation, c’est… la liberté.
Pas question d’accepter n’importe quelles conditions de travail, ni n’importe
quel management, ni n’importe quel discours, en particulier en matière de
responsabilité sociale et environnementale, qui ne correspondrait pas aux
actes. Sinon, c’est la démission immédiate 
! Le travail est en quelque sorte
« instrumentalisé ». Il doit servir. Non à la carrière, les jeunes ne rêvent plus
d’en faire une, et encore moins dans la même entreprise, mais à une vie faite
de sens et d’engagements plus larges. Charge aux employeurs de répondre à
cette nouvelle exigence, cette nouvelle immédiateté, cette nouvelle liberté et
cette nouvelle maturité face au travail de la part des jeunes.
LYS ZOHIN
Fait de la semaine
4 INCLUSION
Quand la pandémie
sensibilise sur le handicap
6 INSERTION
Améliorer les passerelles
entre Esat et milieu ordinaire
L’actualité
7 TROIS QUESTIONS À
Pierre-Yves Martin :
« Le centre de gravité
du travail a changé »
8 GESTION DES
COMPÉTENCES
Le secteur RH embrasse
la technologie
8 MOBILITÉ
Les cadres et dirigeants
sont encore plus susceptibles
que les autres de quitter
leur emploi
9 INTERNATIONAL
• 
Royaume-Uni : près de
la moitié des jeunes filles
refuseraient de travailler
pour une entreprise qui
ne respecte pas l’égalité
salariale
• 
Chine : quand une
entreprise dit que les heures
supplémentaires,
c’est génial…
• 
Émirats arabes unis :
la compagnie aérienne
Emirates déroule le tapis
rouge pour recruter
• 
Japon : le gouvernement
demande aux entreprises
de veiller aux droits humains
Point sur
10 COMPÉTENCES
La crise a renforcé
l’importance des soft skills
pour les cadres
12 INTERVIEW
Laurence Doumba-Kinda :
« On attend davantage
de valeur ajoutée de la part
des cadres »
13 RECRUTEMENT
Manpower lance un réseau
d’agences dédiées aux cadres
Sur le terrain
14 SANTÉ
L’équipe Exolis se met
au sport
14 EMPLOI
Nestlé recrute… en mangeant
15 RECRUTEMENT
Saint-Gobain met ses salariés
à contribution pour attirer
de nouveaux talents
Grand entretien
16 SOPHIE BERNARD
« Le variable brouille
la frontière entre travail
salarié et indépendant »
Les clés
18 TENDANCE ÉCO
19 NOMINATIONS
ET AGENDA
20 LIVRES
Chroniques
21 GILLES GATEAU
Changer de vie…
cela s’apprend
22 MARTIN RICHER
Pourquoi débusquer
les discriminations ?
AU SOMMAIRE
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 3
E
n 2020, 22 % seule-
ment des établisse-
ments de services
d’aide par le tra-
vail (Esat) et des
entreprises adaptées (EA), qui
emploient 150 000 personnes en
situation de handicap, ont eu un
chiffre d’affaires stable ou en
augmentation. « L’explosion du
télétravail et du commerce en
ligne, la digitalisation program-
mée dans tous les domaines
nous imposent de repenser
pratiquement tous nos métiers.
Celui de l’accueil et de la
conciergerie, à titre d’exemple,
va devoir se réinventer – avec
des sièges sociaux de moins
en moins fréquentés par des
collaborateurs qui auront par
Le bilan dressé à l’occasion de la semaine
de l’emploi des personnes en situation de
handicap, qui s’est tenue du 15 au 21 novembre,
est certes mitigé. Mais si la crise sanitaire
a pu fragiliser encore plus ces salariés,
les employeurs ont fait des efforts. D’autant
qu’ils se sont rendu compte que chacun peut
être fragile…
INCLUSION
QUAND
LA PANDÉMIE
SENSIBILISE
SUR LE HANDICAP
ailleurs probablement de nou-
veaux besoins à satisfaire »,
relève David Bourganel, le
directeur général de l’Asso-
ciation pour l’insertion et la
réinsertion professionnelle
et humaine des handicapés
(ANRH) dans le rapport de l’Ob-
servatoire économique national
des achats responsables auprès
des prestataires Esat-EA. Une
nécessité de se réinventer que
partagent aussi nombre d’entre-
prises classiques. À condition
de dépasser certains préjugés.
Marlène Cappelle, la délé-
guée générale de Cheops-Cap
emploi, rappelle qu’il était, en
pleine période de crise sani-
taire, nécessaire de rassurer
et de sensibiliser, entre autres,
sur « ce qu’était une personne
en situation de handicap pour
éviter les amalgames sur la
question du public fragile. On
se dit à tort : “Elle est en situa-
tion de handicap, donc elle doit
forcément être en télétravail ou
en arrêt” ».
Aménagements
des postes
« On considère que c’est une
population homogène là où il
faudrait aller davantage sur des
logiques plus spécifiques, des
organisations du travail repen-
sées en prenant en compte les
capacités des personnes mais
aussi leur vulnérabilité », estime
de son côté Carole Salères, la
conseillère nationale emploi,
LE
FAIT
DE
LA
SEMAINE
4 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
ressources et formation d’APF
France handicap, qui rappelle
que « le fait d’être en situa-
tion de handicap multiplie par
trois le risque de discrimina-
tion dans l’emploi ». Elle invite
ainsi à reconsidérer la portée
de ce qui est mis en place pour
l’ensemble des salariés. Une
démarche qui a commencé par
la généralisation du télétravail.
Ainsi, chez ADP, fournisseur
américain de solutions RH, sur
2 100 collaborateurs en France,
5,5 % sont en situation de han-
dicap. Certains travaillaient
déjà à distance avant la pandé-
mie, d’autres non. « Nous avons
aidé les salariés à s’équiper en
écrans de grande taille, logi-
ciels spécifiques, sièges avec
des repose-pieds ou poignets,
bureaux permettant d’alterner
la station debout et assise »,
indique Nolwenn Gourven,
responsable RSE et relations
sociales de l’entreprise. Au total,
25 aménagements de postes
ont été réalisés pour les sala-
riés en situation de handicap.
« Lorsqu’ils étaient d’accord, un
ergonome venait à leur domicile
pour être sûr d’effectuer l’adap-
tation adéquate », précise-t-elle.
Quant au secteur public, qui
compte 260 000 agents handi-
capés, il a dû également s’adap-
ter. Marc Desjardins, directeur
du FIPHFP, le fonds pour l’in-
sertion des personnes handica-
pées dans la fonction publique,
décrit une « mise en place pro-
gressive, un peu chaotique mais
finalement bénéfique, du télé-
travail ». Comme l’Agefiph pour
le secteur privé, le FIPHFP a
mis à disposition des aides
exceptionnelles, complétées
par l’État, pour financer, entre
autres, du matériel spécifique
et encourager l’embauche
durant la pandémie. Certaines
ont été prolongées jusqu’en
décembre  2021. À l’heure
du retour en présentiel – au
moins pour le moment –, Marc
Desjardins s’interroge sur l’inté-
rêt de pérenniser le télétravail.
« Les avis sont assez partagés,
constate-t-il. Il limite la fatigue,
notamment dans les transports,
mais il y a aussi un risque de
désocialisation qui est encore
plus grand pour les personnes
en situation de handicap. »
D’autant que les confinements
ont entraîné l’interruption des
suivis médicaux ou des soins
pour certaines d’entre elles.
Une enquête Ipsos-Agefiph,
menée en juin 2020 et avril 2021,
révèle qu’en un an, le sentiment
d’isolement a augmenté de
11 points chez ces actifs.
Cette fragilité psychologique
menace aussi les demandeurs
d’emploi. L’ancienneté moyenne
d’inscription pour les personnes
handicapées est passée de
883 jours en 2020 à 919 jours
cette année. Et les structures
d’accompagnement ont vu cer-
taines de leurs missions cham-
boulées par le télétravail. « Nous
ne pouvons pas étudier les situa-
tions de maintien dans l’emploi
au téléphone ou en visio, relève
Marlène Cappelle, de Cheops-
Cap emploi. Il faut aller voir le
poste de travail, échanger avec
l’employeur, la personne. 
»
Après une baisse de 9 % du
nombre de contrats signés en
2020, une amélioration tend
néanmoins à se confirmer sur
le premier semestre 2021.
Apprentissage
L’un des leviers pour améliorer
l’intégration des travailleurs
handicapés repose aussi sur
l’apprentissage, dont le nombre
de contrats a augmenté de 34 %
entre 2019 et 20201
, en dépit
de la crise sanitaire. Dans le
secteur public, 1 200 apprentis
sont ainsi aidés chaque année.
« Les plus volontaires sont
les collectivités locales, plus
souples », précise le directeur
du FIPHFP. Le taux d’emploi
des travailleurs handicapés y
atteint 6,7 %, contre 4,67 % dans
la fonction publique d’État. Le
secteur privé mise lui aussi
sur l’alternance pour amélio-
rer ses efforts d’inclusion. Le
groupe Apicil accueille ainsi
chaque année sept appren-
tis en situation de handicap,
majoritairement en reconver-
sion professionnelle. Aucune
limite d’âge n’est requise pour
les bénéficiaires de l’obligation
d’emploi (OETH). « Il y a deux
ans, nous avons, grâce à cela,
embauché deux CDI et deux
CDD », se félicite Christine
Dollé Delmotte, la responsable
mission handicap. L’enjeu est
de taille pour le groupe de
2 000 collaborateurs qui a vu
son taux d’emploi légal de sala-
riés handicapés chuter de 7,4 %
en 2019 à 5,1 % en 2021 après
le rachat d’entités et l’entrée
en vigueur de la réforme de
l’OETH. Désormais, les achats
responsables auprès des Esat et
EA ne sont plus comptabilisés
dans le taux d’emploi légal de
6 % de l’effectif global pour les
entreprises de plus de 20 sala-
riés. Ils sont soustraits de la
contribution à l’Agefiph que
l’entreprise doit verser si elle
ne remplit pas ses obligations.
u NATHALIE TISSOT
(1) Selon les chiffres du réseau
Cheops-Cap emploi.
—— LE FAIT ——
DE LA SEMAINE
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 5
INSERTION
AMÉLIORER LES PASSERELLES
ENTRE ESAT ET MILIEU ORDINAIRE
▼
Accompagnements
et formations doivent
permettre aux
travailleurs
handicapés qui le
souhaitent de
poursuivre leur
parcours
professionnel en
entreprise classique.
Reportage à l’Esat de
Châtillon.
R
ennes en bois et autres
objets de décoration
orneront bientôt les
sapins. Certains auront été
fabriqués par les travailleurs
de l’Esat de Châtillon (Hauts-
de-Seine), créé en 2001 par la
Fondation des Amis de l’Ate-
lier. Cette dernière accompagne
depuis 60 ans des personnes
en situation de handicap psy-
chique, mental ou avec autisme.
À l’heure de la pause de l’après-
midi, au sein de cet Esat situé
dans une ancienne usine, cer-
tains salariés en profitent
pour se reposer dans une
salle dédiée. Les traitements
qui les stabilisent sont parfois
contraignants, fatigants. Alors
qu’ils s’apprêtent à reprendre
leur poste, Nadège et Patrick
se prêtent au jeu des ques-
tions-réponses. « Ça fait 20 ans
que je suis dans la boîte, j’ai
fait l’ouverture ! », s’enorgueillit
Patrick, dans sa blouse grise. Il
y a trouvé la bienveillance qu’il
n’avait pas rencontrée lors de
sa précédente expérience pro-
fessionnelle, en maison de
retraite. « C’est mieux ici, car
en milieu ordinaire, on n’est
pas protégé par tout le monde »,
souligne-t-il.
Une fois l’école terminée, cer-
taines personnes en situation
de handicap psychique, mental
ou avec autisme peinent à s’in-
sérer sur le marché du travail
– comme Clément, arrivé il y
a six mois. En pleine découpe
dans l’atelier de menuiserie, il
s’arrête pour montrer fièrement
une table d’écolier réalisée avec
des palettes recyclées. Lui aussi
confie se sentir « plus à l’aise »
à l’Esat.
Pourtant, comme une quin-
zaine d’autres salariés parmi
les 90 que compte la structure,
il a émis le souhait de rejoindre
le milieu ordinaire. Depuis
2018, les directives politiques
imposent davantage d’ouver-
ture vers l’extérieur, conformé-
ment aux recommandations
de la convention de l’ONU sur
les droits des personnes han-
dicapées. « Nous n’allons au
forcing avec personne, il faut
vraiment que ça vienne d’une
envie, sinon ça ne marche pas,
prévient cependant Charles-
Henri Rey, le directeur de l’Esat
de Châtillon. Notre objectif est
d’accompagner les personnes
dans leur projet professionnel,
quel qu’il soit. »
À l’autre bout de l’atelier de
menuiserie, sur un grand éta-
bli, Laurent, lunettes sur le
nez, façonne avec minutie les
décorations de Noël en bois,
destinées aux entreprises mais
également aux particuliers.
Ses qualités manuelles l’ont
conduit ici il y a trois ans. « J’ai
eu un accident professionnel
après avoir exercé mon métier
pendant 20 ans, témoigne cet
ancien dessinateur industriel.
Peut-être ai-je une fragilité
mais mon métier m’a rendu
malade. J’ai vécu des moments
un peu durs, mes collègues de
l’époque aussi, se souvient-il.
Moi, j’ai craqué, peut-être que,
psychologiquement, je n’étais
pas assez fort pour tenir… »
Depuis, l’Esat lui a permis de
« repartir sur des bases saines.
Il n’y a pas de pression, pas
de méchanceté », apprécie ce
quinquagénaire qui suit un pro-
gramme de réinsertion dans le
milieu ordinaire avec une coach
qui l’aide à rédiger son CV et à
préparer ses entretiens. Laurent
projette de se reconvertir dans
le domaine de l’animation, mais
il reste lucide. « Il ne suffit pas
d’aimer les enfants, il faut aussi
savoir s’en occuper, être atten-
tif », tempère-t-il. Ses prochains
stages devraient lui permettre
de vérifier si ce métier lui cor-
respond avant de préparer le
brevet d’aptitude aux fonctions
d’animateur (Bafa) et de trou-
ver un nouveau poste. Une autre
étape dans laquelle l’accompa-
gnement est essentiel.
« Le handicap psychique peut
engendrer des peurs chez les
employeurs, on peut com-
prendre qu’ils soient prudents,
reconnaît Charles-Henri Rey. Il
y a un travail de sensibilisation
à faire. » Dans cet objectif, la
Fondation des Amis de l’Atelier
a lancé un événement en 2018
sur le modèle du Duoday.
Duo2
Mais à l’inverse d’un salarié
d’entreprise conventionnelle qui
accueille une personne en situa-
tion de handicap, le Duo2 pro-
pose aux salariés du milieu
ordinaire de venir à l’Esat par-
tager une journée avec l’un de
ses travailleurs. Ces initiatives
« permettent de casser les bar-
rières », selon Charles-Henri
Rey, qui mise aussi sur une mon-
tée en puissance de la formation
des travailleurs.
Depuis qu’il est directeur, deux
salariés ont été embauchés en
CDI dans des restaurants clas-
siques. Eddy, qui travaille sur
les espaces verts, espère lui
aussi poursuivre son parcours
à l’extérieur de la structure.
« Dans une collectivité locale
pour commencer », confie-t-il
au retour de sa journée de tra-
vail, bonnet vissé sur la tête. « Il
faut bien s’envoler de l’Esat au
bout d’un moment… », ajoute-
t-il, heureux d’avoir « trouvé sa
voie ». u NATHALIE TISSOT
©
N. TISSOT
Clément, arrivé il y a six mois à l’Esat de Châtillon, a émis le souhait de rejoindre
le milieu ordinaire.
6 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
—— LE FAIT ——
DE LA SEMAINE
TROIS QUESTIONS À
« LE CENTRE DE GRAVITÉ
DU TRAVAIL A CHANGÉ » LE CHIFFRE
24 %
C’est, selon l’étude Ivalua
(solutions cloud de
gestion des dépenses),
le pourcentage des
fournisseurs basés en
France, au Royaume-
Uni, en Allemagne et en
Suisse qui font l’objet
d’évaluations régulières de
leurs pratiques en faveur
de la durabilité de la part
des entreprises faisant
appel à eux. En effet,
seul un petit pourcentage
de fournisseurs affirme
que les entreprises
leur appliquent
systématiquement des
mesures d’évaluation
en fonction de critères
environnementaux tels
que la pollution de l’air
(22 %), la pollution de l’eau
(21 %) et la déforestation
(20 %). L’étude souligne
également que la plupart
des entreprises ne
communiquent pas à
l’échelle de toute la chaîne
d’approvisionnement pour
encourager les initiatives
écologiques. Et seul un
fournisseur sur dix déclare
que les entreprises
incluent systématiquement
des clauses relatives au
développement durable
dans les contrats et les
accords. u
Business partner au
sein du cabinet de
conseil One Man
Support, Pierre-Yves
Martin décrypte l’état
d’esprit des nouvelles
générations face
au travail – que les
employeurs doivent
prendre en compte…
Avez-vous, dans votre pra-
tique, noté de nouvelles
tendances chez les jeunes
face à l’emploi ?
Au-delà du fait que nombre
de jeunes ont été victimes de
la crise sanitaire, que ce soit
dans la poursuite de leurs
études, l’obtention d’un stage,
la recherche d’un poste ou leurs
premiers pas en télétravail, je
constate qu’ils perçoivent le
travail différemment. Non
seulement veulent-ils du sens
et un alignement avec leurs
désirs, dont un meilleur équi-
libre vie professionnelle/vie per-
sonnelle, mais en plus, ils ont
une démarche plus réfléchie.
Autrement dit, ils se posent
d’emblée la question : « Que
va m’apporter ce poste pour
la suite de mon parcours ? ». Il
ne s’agit donc pas de salaire, ni
même de possibilité d’évoluer
dans l’entreprise, mais d’une
vision à long terme, qui s’ins-
crit en outre dans l’idée qu’une
carrière sera forcément variée.
Ce qui implique qu’ils ne font
rien s’ils ne comprennent pas
le « pourquoi », premièrement,
et deuxièmement, que si le
poste ne leur convient pas, ils
s’en vont au bout de quelques
mois. Cet état d’esprit, associé
au fait qu’ils ne sont pas « car-
riéristes », leur donne donc un
levier de liberté impression-
nant ! En somme, le centre de
gravité du travail a changé.
Qu’est-ce que cela implique
pour l’employeur ?
Pour l’employeur et le manager,
cela signifie qu’il faut travailler
la confiance, en laissant de
l’autonomie aux jeunes, mais
tout en les pilotant, puisqu’ils
manquent d’expérience et
sont conscients qu’ils doivent
encore apprendre. Toute la
question est d’atteindre cet
équilibre. Mais il est clair que
le manager devient presque un
mentor pour ces jeunes, aux-
quels il faut prodiguer conseils
et recommandations de façon
formelle, et donc créer les
conditions pour que cela ait
lieu. Les échanges formels,
qui valorisent la collaboration
et l’intelligence, sont clés. Les
jeunes sont très friands de fee-
dback constructif et rapide.
Autre élément qui entre en
jeu, la manière dont l’entre-
prise est organisée pour par-
tager l’information. Rompus
aux médias sociaux, les jeunes
veulent immédiatement avoir
accès aux données. Ce qui
signifie par exemple que les
employeurs devront utili-
ser les outils les plus agiles
possible en ce qui concerne le
recrutement, mais aussi à l’in-
térieur de l’organisation, dans
la vie de tous les jours. De quoi
créer de nouvelles règles de
communication, moins fon-
dées sur la hiérarchie… Enfin,
ce phénomène de l’immédia-
teté se repère aussi dans la
volonté des jeunes de voir des
décisions prises rapidement.
Et c’est là encore la hiérarchie
qu’il faudra revoir, en faisant en
sorte que les prises de décision
soient plus proches de ceux qui
expriment les besoins.
Tout cela implique une
nouvelle « discipline » pour
l’employeur, n’est-ce pas ?
Absolument ! C’est particulière-
ment vrai en matière de réten-
tion des talents. Les entreprises
qui ne feraient pas, au quotidien,
vivre les valeurs qu’elles mettent
en avant dans leur communica-
tion et leurs annonces de poste
risquent de perdre rapidement
les jeunes recrues, pour qui,
de toute façon, la question de
la période d’essai n’est plus un
sujet. Et c’est particulièrement
vrai pour les jeunes diplômés.
Comme je le disais, s’ils ne sont
pas satisfaits, ils quittent rapi-
dement l’entreprise… C’est ce
nouveau rapport au temps que
les employeurs doivent com-
prendre. Les jeunes ne veulent
pas en perdre et sont capables,
plus que les précédentes géné-
rations, de se fixer des limites
concernant ce qu’ils acceptent
ou non. u PROPOS RECUEILLIS
PAR LYS ZOHIN
PIERRE-YVES MARTIN
—— L’actualité ——
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 7
Les entreprises
sont notamment
soucieuses de
développer les
compétences
personnelles et
les métiers des
collaborateurs grâce
aux outils numériques.
P
armi les bonnes résolu-
tions déjà prises pour
l’an prochain, 64 % des
2 500 managers RH interro-
gés à travers le monde par la
plateforme de coaching digital
CoachHub ont déclaré vouloir
préparer les collaborateurs
aux nouvelles technologies en
2022. Au point que l’intégration
de nouveaux outils digitaux est
considérée comme une néces-
sité, afin de répondre d’abord
aux besoins des collaborateurs
– et avant même de penser à
l’amélioration de la perfor-
mance… Des besoins qui, pour
les Français notamment, se
caractérisent par le fait que les
salariés disent vouloir travail-
ler autrement, dans le sillage
de nouvelles habitudes adop-
tées en télétravail ou en travail
hybride. De même, ils ont une
réelle volonté de changer de
carrière ou d’avoir de nouvelles
opportunités professionnelles
dans les mois à venir. Dans ce
contexte, la poursuite de l’adop-
tion d’outils digitaux est essen-
tielle, notamment pour ce qui
est de la formation, et 93 % des
managers français interrogés
s’accordent à dire que la forma-
tion est un axe stratégique clé et
qu’il est indispensable d’adapter
les programmes et le dévelop-
pement de leurs collaborateurs
au climat économique actuel et
à leur demande de flexibilité.
D’ailleurs, 30  % d’entre eux
soulignent que les collabora-
teurs déplorent un manque de
formation et de perspectives
d’évolution professionnelle…
Selon CoachHub, l’adoption
d’outils de développement tels
que la formation en ligne et le
coaching est en effet de nature
à contribuer à l’amélioration de
leurs compétences personnelles
et métiers.
Au-delà de l’accès à des for-
mations digitales personna-
lisées, plus généralement,
en digitalisant, l’entreprise
répond, selon le commentaire
de l’étude, aux nouvelles exi-
gences des collaborateurs  :
flexibilité du temps de travail
et équilibre vie professionnelle
et vie personnelle, notamment.
En outre, ajoute le commen-
taire, en généralisant les outils
digitaux pour des activités tels
que le recrutement, l’entreprise
en tire des avantages en termes
de candidatures et réduit éga-
lement la durée du processus.
Enfin, la période d’intégration
est facilitée par ces outils. Sans
oublier, poursuit CoachHub,
que la mobilité interne induite
par l’adoption d’outils digitaux
de formation favorise la réten-
tion des collaborateurs tout en
permettant d’accroître l’engage-
ment de chacun. u L. Z.
GESTION DES COMPÉTENCES
LE SECTEUR RH EMBRASSE
LA TECHNOLOGIE
MOBILITÉ
LES CADRES ET DIRIGEANTS SONT ENCORE
PLUS SUSCEPTIBLES QUE LES AUTRES DE QUITTER LEUR EMPLOI
La pandémie a donné la bougeotte aux salariés, et encore plus,
selon l’étude Qualtrics, société spécialiste de l’expérience
collaborateur, aux cadres et top managers. Alors que plus
d’un tiers des salariés (35 %) déclarent qu’ils chercheront un
nouvel emploi au cours des 12 prochains mois, cadres et top
managers seraient 39 % à vouloir quitter leur employeur actuel.
Recherche de davantage d’opportunités de développement,
meilleur salaire ou poste moins stressant font partie des
motivations mises en avant.
Parmi les découvertes de l’étude, on voit que les femmes
recherchent, dans l’ordre, un meilleur équilibre vie
professionnelle/vie personnelle, un meilleur salaire et un poste
offrant des évolutions de carrière, tandis que les hommes
privilégient d’abord les possibilités d’évolution de carrière,
l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle et enfin, un
meilleur salaire. Pour ceux et celles qui sont à la recherche d’un
nouveau poste, un « travail utile/qui a du sens » est considéré
comme l’élément le plus important, tant pour les 18-24 ans
(64 %) que pour ceux âgés de 50 ans et plus (59 %). Le moins
important étant « la marque de l’entreprise », tant pour les
18-24 ans (8 %) que pour ceux âgés de 50 ans et plus (10 %).
Enfin, lors du processus de recrutement, ce qui compte le plus
aux yeux du candidat, c’est de sentir que son bien-être est une
priorité pour l’entreprise.
« Ces résultats confirment ce que nous avons déjà vu aux
États-Unis, par exemple, où après un an et demi de Covid, des
millions de salariés cherchent à renouveler leur expérience
professionnelle en optant pour un changement d’employeur. Si
les entreprises veulent éviter l’impact d’une Great Resignation
à la française, il va falloir passer à un mode plus proactif
pour retenir les collaborateurs, puis attirer différemment
les talents en fonction de leurs attentes nouvelles. Ceci
passe inéluctablement par une écoute plus assidue et ciblée
des populations clés de salariés », conclut Douglas Rosane,
directeur des solutions Experience collaborateurs chez
Qualtrics France. u L. Z.
—— L’actualité ——
8 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
ÉMIRATS ARABES UNIS
LACOMPAGNIE AÉRIENNE
EMIRATES DÉROULE LE TAPIS
ROUGE POUR RECRUTER
Tandis que le transport aérien reprend, nombre de compagnies
lancent des recrutements massifs. Pour se distinguer de la
concurrence, Emirates, qui cherche 6 000 personnes (pilotes,
personnel de bord, ingénieurs…), fait miroiter de multiples
avantages aux candidats pour les inciter à rejoindre Dubaï. Les
entretiens d’embauche ont lieu sur place, les frais de transport (en
classe économique) étant payés pour le candidat et le conjoint. Les
pilotes potentiels sont en outre accueillis à l’aéroport et amenés
en voiture privée jusqu’au rendez-vous. Mais ce n’est pas tout,
évidemment. Emirates s’engage à participer aux frais de scolarité
des enfants, dans des écoles internationales, et même à transporter
les enfants de la maison à l’école. Le personnel recruté bénéficiera
aussi d’appartements ou de villas confortables, entièrement
payés, et d’une prise en charge santé complète. Et enfin, pilotes
et personnels navigants ne paient pas d’impôts sur leur salaire, qui
s’élève, pour un capitaine, à quelque 14 000 euros par mois. u L. Z.
ROYAUME-UNI
PRÈS DE LA MOITIÉ DES
JEUNES FILLES REFUSERAIENT
DE TRAVAILLER POUR UNE
ENTREPRISE QUI NE RESPECTE
PAS L’ÉGALITÉ SALARIALE
Alors qu’au Royaume-Uni, l’écart salarial hommes/femmes
s’est accru cette année pour atteindre 11,9 % (contre 10,6 % l’an
dernier), une étude du site d’offres d’emploi Indeed montre
que seules 5 % des jeunes filles de 16 à 18 ans sont optimistes
sur sa réduction, même si 61 % le jugent injuste… Elles ont en
tout cas l’intention de veiller au grain, et même de refuser,
pour près de la moitié (48 %) d’entre elles, de travailler pour un
employeur qui ne respecterait pas l’égalité salariale lorsqu’elles
chercheront un emploi. Les jeunes garçons interrogés ne sont
que 32 % à déclarer qu’ils refuseraient de prendre un poste dans
ces conditions. Et les jeunes filles sont également 55 % à avoir
l’intention de faire des recherches sur ce sujet avant de postuler
dans une entreprise (contre 34 % des jeunes garçons). u L. Z.
JAPON
LE GOUVERNEMENT
DEMANDE AUX
ENTREPRISES DE VEILLER
AUX DROITS HUMAINS
Alors que les grandes entreprises nipponnes
ont été critiquées pour le recours à des sous-
traitants faisant travailler, en Chine ou ailleurs,
des salariés, notamment au Xinjiang, dans des
conditions indignes, le conseiller spécial du
nouveau Premier ministre a exprimé récemment
sa volonté de sensibiliser ces entreprises aux
droits humains et aux risques encourus en cas
de non-respect de ces droits. « Certains pays en
Europe incorporent les droits humains dans les
contraintes faites aux entreprises et les États-
Unis interdisent l’importation de produits qui
auraient été fabriqués dans des conditions de
non-respect des droits humains, a-t-il déclaré.
Cela doit aussi faire partie des préoccupations
des entreprises japonaises. » Déjà, les sociétés
cotées ont été enjointes de respecter les
droits humains dans le cadre de leur bonne
gouvernance par les autorités boursières. u L. Z.
CHINE
QUAND UNE ENTREPRISE DIT QUE
LES HEURES SUPPLÉMENTAIRES,
C’EST GÉNIAL…
Elle se retrouve sous le coup d’une enquête de la part des autorités
chargées de veiller au bon respect du Code du travail… C’est en
effet ce qui est arrivé à la société Inspur, spécialisée dans la tech.
Elle a pendu des bannières rouges dans ses locaux, déclarant
que les heures supplémentaires, c’était génial, et que de toute
façon, elles ne pouvaient être considérées comme « vraies » que
si tout le monde en faisait… Une autre bannière enfonçait le clou
en déclarant « Il travaille plus, je le fais aussi. Personne ne peut
y échapper ! », de même que : « Si vous avez du temps, travaillez
plus ! » Les photos de ces bannières ont fait le tour des réseaux
sociaux et suscité non seulement une levée de boucliers de la part
des internautes, mais aussi une enquête de la part des autorités
locales, dans le Shandong (province de l’est de la Chine) où la
société est basée. Les autorités communistes cherchent en effet
depuis quelque temps à enrayer cette culture des heures de
travail à rallonge, connue sous le nom de 996, pour des horaires
de 9 heures du matin à 9 heures du soir, six jours par semaine, face
à la révolte des jeunes, notamment dans la tech, et de plusieurs
cas de décès dus au surtravail. Les salariés d’Inspur ont confirmé
à la presse que non seulement ils n’étaient pas rémunérés pour
leurs heures supplémentaires, mais qu’en plus, ces heures étaient
comptabilisées dans le cadre de leur revue de performance
annuelle… La chaîne de télévision CCTV, qui reflète l’opinion du
parti communiste, a même déclaré qu’Inspur était le symbole de
cette culture désormais illégale et pervertie et que la plupart des
salariés voulaient davantage de temps de loisir… u L. Z.
—— L’actualité ——
INTERNATIONALE
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 9
L
es propositions de
formations tou-
chant aux soft
skills, ces compé-
tences humaines et
comportementales de plus en
plus prisées par les employeurs,
abreuvent les boîtes mail. Un
exemple ? « Apprendre à bien
communiquer pour s’adapter
à un nouveau type de prise de
parole virtuelle », illustration
parmi d’autres de ce que les
entreprises attendent de leurs
cadres. « 
Le dirigeant doit
travailler ses soft skills pour
convaincre à l’oral à travers
un écran, déclarent ainsi les
experts du cabinet spécialisé
en stratégie orale Whistcom,
Depuis plusieurs années, les compétences
comportementales sont mises en avant – sans
toutefois avoir pris le pas sur la tradition
bien française des diplômes et des hard skills.
En rendant plus nécessaires l’adaptabilité
et l’autonomie de tous et notamment des
managers, la crise pourrait changer la donne.
COMPÉTENCES
LA CRISE
A RENFORCÉ
L’IMPORTANCE
DES SOFT SKILLS
POUR LES CADRES
qui propose cette formation.
Les évolutions du travail pro-
voquées par la crise sanitaire
ont fait des soft skills des apti-
tudes clés dans le recrutement
de nouveaux collaborateurs aux
postes de direction. »
« Avec l’augmentation du télé-
travail et du management à
distance, les entreprises ont
besoin de collaborateurs ayant
des compétences de gestion du
temps et des priorités, capables
d’auto-motivation et sachant
bien communiquer, résume
pour sa part Adrien Scemama,
dirigeant de Talent.com, une
plateforme qui référence
plus de deux millions d’offres
d’emploi. Sur notre moteur de
recherche, huit offres sur dix
citent les soft skills. » Avec
trois compétences principales
demandées : le sens de l’or-
ganisation, la motivation et
la rigueur. « Les compétences
valables il y a cinq ans sont
aujourd’hui dépassées. Il faut
donc être doté de soft skills
pour être capable d’apprendre
à s’adapter 
», explique-t-il.
Sans oublier qu’au-delà de cela,
managers et dirigeants doivent
non seulement passer en mode
hybride mais aussi répondre à
l’incertitude et s’adapter à des
marchés changeants…
Et si, comme le souligne Michel
Barabel, maître de conférences
à l’université Paris Est et cher-
cheur à l’Institut de recherche
en gestion, « le constat est vrai
pour les ouvriers qui doivent
savoir s’adapter face à la robo-
tisation, il l’est davantage pour
les cadres, dans un monde où
les collaborateurs sont plus
éduqués qu’il y a 50 ans et où
le management est plus par-
tagé et ne s’appuie plus sur le
seul niveau hiérarchique ou
les compétences techniques. »
Pour les cadres experts, « il
LE
POINT
SUR
10 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
faut davantage de capacité de
veille, d’apprentissage, d’esprit
critique, de faculté à collabo-
rer et à adopter des postures
réflexives », analyse-t-il.
Cela dit, « la progression des
soft skills dans le recrutement
des cadres n’est pas nouvelle,
ni une conséquence de la crise
de la Covid-19, poursuit-il. Elle
est enclenchée depuis plus de
20 ans. Et même si la France a
un vrai attachement aux hard
skills, l’équilibre est en passe
d’être modifié. »
Expertise ou potentiel ?
De fait, « le diplôme prend
moins de place car le recru-
teur cherche plutôt un poten-
tiel qu’une expertise, constate
Adrien Scemama. Les soft skills
sont de ce fait de plus en plus
recherchées lors des recrute-
ments et sont même parfois
décisives. » Les critères de
sélection et les attentes des
deux parties, candidats et
employeurs, ayant évolué avec
la crise sanitaire, « le matching
est plus compliqué », ajoute-t-il.
Afin de trouver la perle rare
dans un marché de cadres
en pénurie, les recruteurs
cherchent donc à détecter ces
nouveaux atouts chez les can-
didats. En témoigne la floraison
de terminologies pour les dési-
gner : qualités professionnelles
ou personnelles, compétences
non académiques, compétences
non cognitives ou socio- émo-
tionnelles, traits de personnalité,
compétences comportemen-
tales… « Associées initiale-
ment aux emplois de service
dont les compétences ne sont
pas toujours garanties par un
diplôme ou une qualification,
comme les métiers du net-
toyage, elles se sont progressi-
vement étendues à l’ensemble
des emplois, y compris ceux de
l’industrie, notamment du fait
de la diffusion des nouvelles
technologies et de l’implica-
tion croissante du client dans
le processus de production »,
confirme la Dares dans son
étude Les critères de sélection
du candidat : un résumé du pro-
cessus de recrutement selon
le métier (étude de Bertrand
Lhommeau et Véronique Rémy,
septembre  2021). Avec une
réelle différence pour les postes
de cadres…
Le diplôme et l’expérience per-
mettraient donc toujours de
faire le premier tri de candi-
dats, mais « l’intelligence arti-
ficielle (IA) et les données sont
en développement et la crise
de la Covid-19 a poussé à utili-
ser des outils pour créer de la
data numérisée, afin de faire du
prédictif et de l’analyse. Après
les assessment centers (centres
d’évaluation) et les mises en
situation, on voit ces pra-
tiques arriver dans le recrute-
ment », constate en effet Michel
Barabel qui nuance cependant
immédiatement son propos : « Il
y a une inertie, le changement
se fera par paliers, nous n’en
sommes qu’au tout début. »
Contrats collectifs
En parallèle, une autre méthode
de recrutement se fait jour afin
de mieux déceler les soft skills
du candidat : le recrutement
collégial. « Avant, le recrute-
ment était l’affaire des RH et
du manager. Désormais, on voit
des entretiens avec les collè-
gues, des cafés plus informels…
cela privilégie le matching
culturel », complète-t-il. Ainsi
de la société Michel  Augustin,
dont les recrutements prévoient
plusieurs temps informels,
voire des projets de travail
pour tester la compatibilité
du candidat avec ses futurs
collègues. « Certaines entre-
prises recrutent aussi non plus
en fonction des compétences
individuelles du candidat, mais
des besoins en compétences de
l’équipe, ajoute Michel Barabel.
Par exemple, pour un poste RH,
plutôt que de chercher un rem-
placement en poste à poste, on
va regarder les compétences
sociologiques ou psycholo-
giques ou en IA du postulant
pour voir ce qu’il peut appor-
ter à l’équipe. » Sony a, dans
cette optique, expérimenté les
recrutements par équipe, avec
des contrats de travail collectif.
« Les entretiens, CV et systèmes
de recommandations existent
toujours, constate cependant
Michel Barabel, mais ils ne cor-
respondent plus vraiment à ce
que l’on veut vérifier… »
L’ascension d’acteurs de l’em-
ploi comme Welcome to the
Jungle, qui mise sur le collec-
tif, le confirme : les entreprises
s’attachent à cette dimension :
le candidat rejoint une équipe
plus qu’une entreprise. Il doit
savoir s’y intégrer et apporter
sa plus-value – qui ne peut plus
seulement être technique… u
LUCIE TANNEAU
Trois compétences principales sont
demandées : le sens de l’organisation,
la motivation et la rigueur.
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 11
INTERVIEW
« ON ATTEND DAVANTAGE DE VALEUR
AJOUTÉE DE LA PART DES CADRES »
LAURENCE DOUMBA-KINDA, CONSULTANTE
▼
Laurence Doumba-
Kinda est consultante
relations entreprises
au centre Apec de
Lyon. Elle
accompagne les
organisations de la
région dans leurs
recrutements et la
gestion des
compétences. Et elle
nuance l’importance
des soft skills…
Constatez-vous une impor-
tance grandissante des
soft skills dans le recrute-
ment des cadres, depuis le
début de la crise sanitaire,
notamment ?
On en parle de plus en plus,
mais nous avons, à l’Apec,
fait une étude sur l’évolution
des pratiques dans le recrute-
ment, et ce n’est pas encore
un comportement mis en pra-
tique. La crise a changé les
habitudes sur les entretiens
en visio, mais la sélection
reste fondée sur le parcours
professionnel et les compé-
tences techniques. Dans notre
dernière étude trimestrielle,
à la question du principal cri-
tère qui a mené à l’embauche
du dernier cadre recruté, les
entreprises répondent (plu-
sieurs réponses possibles) à
46 % : le parcours profession-
nel, à 45 % : les compétences
techniques, à 30 % : la motiva-
tion, à 27 % : l’adéquation à la
culture d’entreprise, à 23 % :
le diplôme, puis viennent les
soft skills avec l’adaptation, le
relationnel…
Pourquoi, alors, parle-t-on
autant des soft skills ?
Elles sont importantes
mais, en temps de crise, les
entreprises ont besoin de
se rassurer, de sécuriser
leurs recrutements et elles
recherchent l’opérationnalité
immédiate. Elles se tournent
donc vers le diplôme ou les
expériences dans le même
domaine. Vers quelque chose
qu’elles connaissent, en
somme. C’est plus compli-
qué avec les soft skills car ce
sont des compétences trans-
versales, liées au relationnel,
au cognitif et en conséquence,
plus difficiles à évaluer. Mais
les soft skills apparaissent si
un recruteur hésite entre deux
candidats.
Ce qui était déjà le cas par
le passé…
Avant, les compétences
étaient un « stock » : elles
servaient pendant des années.
Aujourd’hui,
l’OCDE nous
d i t q u e l e s
compétences
techniques ont
une durée de
vie de deux
ans de demi,
ce qui en fait un « flux ». Si
les compétences hard restent
clés, surtout pour les cadres
experts, les entreprises ont
aussi besoin d’autres dimen-
sions, le digital, la gestion de
projet, le juridique, la com-
préhension des enjeux de
l’entreprise… Cela ne suffit
plus d’être expert d’un métier,
dans l’univers très changeant
que l’on s’apprête à connaître,
les employeurs ont besoin de
collaborateurs hyperadap-
tables, capables de résoudre
des problèmes de plus en plus
complexes, même si les com-
pétences techniques et le par-
cours professionnel restent.
Pourquoi est-ce davantage
vrai pour les cadres ?
Les fonctions se sont com-
plexifiées et l’on attend de ces
profils une forte valeur ajou-
tée, notamment pour trois pro-
fils : informatique, commercial
et technico-commercial et R
 D. On voit aussi de plus en
plus d’organisations matri-
cielles où tout fonctionne en
mode projet, ce qui implique
que les cadres doivent savoir
gérer des projets, communi-
quer, travailler en équipe. Le
geek derrière son écran est
une image révolue, même un
bon développeur doit savoir
écouter et traduire la demande
de son client. Et pour la pre-
m i è r e f o i s ,
en France, le
n o m b r e d e
cadres dépasse
c e l u i d e s
ouvriers, du
fait de la robo-
tisation. Les
soft skills permettent d’occu-
per de nouveaux postes, que
l’on ne connaît pas encore for-
cément – d’où l’importance de
les avoir ou de les développer.
Comment évoluent les pra-
tiques de recrutement ?
Les entreprises font appel
à l’IA à travers des outils –
nombre d’entreprises et de
start-up s’y sont d’ailleurs
engouffrées pour proposer des
solutions permettant de déce-
ler les soft skills – ou passent
par de la mise en situation
concrète en entretien pour
voir comment les candidats
réagissent. Recruter est un
métier et les recruteurs font
passer des tests de person-
nalité. À l’Apec, nous nous
formons et nous formons les
entreprises pour qu’elles amé-
liorent la qualité de leur ques-
tionnement et leur analyse des
réponses des candidats afin de
mieux les cerner. Même si la
dimension des soft skills reste
difficile à repérer, surtout si
l’on n’est pas spécialisé…
Cela donne-t-il davantage
de chances à des profils
différents ?
Tout à fait. Cela peut ouvrir
des portes à des individus qui
ont changé de métier, n’ont
pas le bon nom ou la bonne
adresse, et permet d’éviter
les clones. Et quand la diver-
sité est bien gérée, on a une
entreprise performante. Si
on cherche un comptable, il
doit savoir faire un bilan, évi-
demment, mais s’il sait com-
muniquer, il parlera aussi
autrement aux commer-
ciaux… Cela doit être un pro-
jet d’entreprise, poussé par le
dirigeant. Il y a des entreprises
qui recrutent sans CV. J’y crois
car le monde est multiple, et
pour le comprendre, il faut
des talents multiples au sein
des entreprises. u PROPOS
RECUEILLIS PAR LUCIE TANNEAU
« Les employeurs
ont besoin de
collaborateurs
hyperadaptables. »
—— LE POINT SUR ——
12 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
RECRUTEMENT
MANPOWER LANCE UN RÉSEAU
D’AGENCES DÉDIÉES AUX CADRES
▼
En mars 2021
ouvrait à Paris la
première agence
Manpower
spécialisée dans le
recrutement des
cadres. Un tournant
pour le groupe. D’ici
à 2023,
300 consultants
devraient être
dévolus à ce marché
qui représente la
moitié des besoins
de recrutements en
France.
C
ols blancs et cols bleus.
Les deux mondes se
sont toujours côtoyés,
mais pour la première fois en
2020, la population des cadres
a dépassé celle des ouvriers. Et
de la même manière, les pro-
fessions intermédiaires sont
plus nombreuses que celles
d’employés. Cette nouvelle
donne du marché du travail
complexifie grandement le
recrutement des cadres, en
particulier pour des profils en
pénurie.
« Parmi les entreprises qui
ont l’intention de recruter un
cadre en 2022, 66 % anticipent
des difficultés, rapporte le
dernier baromètre Manpower
France. Et 60 % d’entre elles
identifient ces difficultés
comme étant liées au faible
nombre de candidatures ou
de profils disponibles. » Le
recrutement devient donc un
enjeu, pour trouver le bon pro-
fil et le garder… Conséquence
de cette situation, Manpower
travaille depuis deux ans à
l’ouverture d’un réseau spé-
cialisé sur le recrutement des
cadres. Depuis mars 2021, le
projet s’est concrétisé et une
première agence a ouvert ses
portes à Paris. Depuis, ce
sont 45 agences spécialisées
« experts et cadres » qui ont été
implantées dans les quinze plus
grandes métropoles françaises.
Quelque 100 consultants y tra-
vaillent et 200 autres devraient
les rejoindre dans les deux ans
à venir, avec également l’ouver-
ture de trois autres agences, à
Rennes, Orléans et Dijon.
Détecter les soft skills
Leur spécificité ? « Ils sont for-
més à détecter les soft skills et
à rechercher ainsi des compé-
tences différentes par rapport
à nos agences plus anciennes
(700  agences et 70  cabi-
nets de recrutement géné-
ralistes sur les cols bleus) »,
explique Véronique Kirchner,
la directrice France du réseau
Manpower experts et cadres.
Ces nouvelles soft skills ? « La
capacité d’analyse et d’innova-
tion avant tout, car la crise a
souligné ce besoin de trouver
des solutions. Un cadre doit
savoir fixer les priorités et
identifier les problématiques
de manière englobante », ana-
lyse-t-elle. « L’adaptabilité et
l’apprentissage en continu
sont aussi nécessaires pour
s’adapter au sein d’entreprises
dans lesquelles les plans à dix
ans, voire à cinq ans, ont dis-
paru… », poursuit-elle. Et si la
directrice reconnaît que cette
situation vaut pour tous les
salariés, manutentionnaires
ou ouvriers compris, pour les
cadres, confrontés aux problé-
matiques de management, de
gestion de projets, d’environ-
nement… « c’est encore plus
vrai et ils doivent prendre
l’habitude de se former en
continu ».
« Le mix entre hard et soft
skills est plus complexe pour
les cadres », résume de son
côté Véronique Kirchner. Le
groupe Manpower a donc
développé plusieurs « labels »
correspondant à des secteurs
d’activité et à des métiers
(finance et comptabilité 
;
fonctions dirigeantes et sup-
ports ; ingénierie et techni-
ciens de l’industrie ; digital
et IT ; commerciaux, mar-
keting et communication ;
ressources humaines et juri-
dique 
; bâtiment, travaux
publics et immobilier ; bio-
technologie, chimie-pharma-
cie et santé ; supply chain),
afin de démarcher les candi-
dats puis de les proposer aux
entreprises de manière proac-
tive. « Dans ces métiers, pour
les fonctions de cadres, nos
consultants vont rechercher
des compétences nouvelles
par rapport à nos anciennes
agences, poursuit Véronique
Kirchner, car les entreprises
veulent des collaborateurs
hyperspécialisés dans leurs
métiers, mais avec les soft
skills en plus. »
Une plateforme
d’évaluation
Ces consultants utiliseront leur
expérience pour les détecter,
en entretien ou grâce à des
tests. Ils ont aussi à leur dis-
position une plateforme d’éva-
luation pour repérer les soft
skills, avec des tests pour les-
quels ils ont été habilités afin
de les faire passer aux candi-
dats. « Pour ce réseau, nous
avons recruté des consultants
différents qui connaissent à la
fois les métiers, la partie com-
merciale et le recrutement »,
poursuit la directrice. Depuis
mars 2021, 450 cadres ont été
placés chez des clients, notam-
ment dans la construction, l’IT
et la R  D. « Les clients nous
demandent aussi beaucoup de
candidats en prospection et
en finance », ajoute Véronique
Kirchner. Enfin, les postes de
commerciaux en sortie de crise
sont aussi très attendus, avec
des compétences d’adaptabi-
lité et de vision beaucoup plus
larges qu’il y a deux ans. u L. T.
Le groupe Manpower a développé
plusieurs « labels » correspondant à des
secteurs d’activité et à des métiers.
—— LE POINT SUR ——
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 13
EMPLOI
NESTLÉ RECRUTE… EN MANGEANT
Les collaborateurs de
la pépite marseillaise,
spécialisée dans
les applications
e-santé, ont mis en
place, de manière
informelle, les « jeudis
sportifs » au sein de
l’entreprise. Objectif :
décompresser tout en
renforçant la cohésion
et en découvrant de
nouvelles activités
sportives.
B
each volley, crossfit,
foot salle, pétanque, ski
nautique… depuis le
printemps dernier, chez Exolis,
des collaborateurs volontaires
peuvent faire du sport ensemble,
une fois par mois, à travers une
nouvelle activité à chaque fois.
À l’origine de cette initiative,
baptisée « jeudis sportifs », deux
collaboratrices, désireuses, à
l’issue des confinements suc-
cessifs, de retrouver la cohésion
en faisant du sport ensemble
tout en découvrant la région :
Amina Bellakhdar, responsable
du développement commercial
et ancienne handballeuse de
haut niveau, et Ludivine Protin,
responsable communication
et marketing au sein de cette
start-up marseillaise de près de
30 collaborateurs, née il y a six
ans, qui développe des solutions
connectées dans le domaine de
la santé.
Le principe de ces moments
sportifs  ? «  Tous les mois,
nous bloquons un jeudi, sur
le temps de midi. Ceux qui
sont intéressés s’inscrivent.
L’important est de proposer
tout type d’activité pour que les
sportifs comme les non-spor-
tifs puissent y participer s’ils le
souhaitent », explique Ludivine
Protin. Avec pour résultat de
multiples bienfaits… « sur la
santé, bien sûr, physique comme
mentale, notamment en période
charnière pour décompres-
ser », estime Amina Bellakhdar.
Surtout, « cela permet de voir
les collègues sous un nouvel
angle et aussi de découvrir les
talents puisque certaines per-
sonnes se “lâchent” un peu plus
lors d’événements sportifs. De
même, c’est agréable de se pro-
mener et de découvrir la ville
de Marseille, dont ses spots
de pétanque, pour nous qui
sommes nombreux au sein de
l’entreprise à venir d’une autre
région. »
À ce jour, l’ensemble des colla-
borateurs de la jeune entreprise
ont participé aux jeudis sportifs
au moins une fois – y compris
les dirigeants, pourtant peu
sportifs. Mais ils ont trouvé leur
compte dans la pétanque et les
escape games… D’autant qu’ils
voient cette initiative d’un bon
œil. « L’un des fondamentaux
de notre structure est de lais-
ser la place aux salariés dans la
construction de ce qu’est l’en-
treprise, y compris dans son
savoir-faire, son savoir-être,
ses valeurs, affirme Nicolas
Binand, cofondateur d’Exolis.
C’est donc tout naturellement
que nous avons accueilli ces
envies d’organiser et de fédérer
autour du sport. » Une manière,
entre autres, de connecter les
différents pôles au sein de la
société et ainsi d’éviter les silos.
u NATASHA LAPORTE
SANTÉ
L’ÉQUIPE EXOLIS SE MET AU SPORT
Le groupe a
récemment organisé
« Les tablées du
mieux manger »,
réunissant candidats
et collaborateurs
pour penser un avenir
plus sain. Il cherche à
recruter 1 600 jeunes
et à proposer plus
de 3 700 stages ou
alternances d’ici 2025
en France.
A
près avoir dévoilé
sa nouvelle marque
employeur au prin-
temps 2021, Nestlé France ouvre
les portes de son nouveau siège
social, à Issy-les-Moulineaux
(92), aux jeunes talents et leur
offre, autour d’un petit-déjeuner
ou d’un goûter, l’occasion de
découvrir son savoir-faire et ses
engagements en faveur des colla-
borateurs, des consommateurs et
de l’environnement. La première
édition de ces « Tablées du mieux
manger », le 27 octobre dernier,
a permis d’accueillir quelque
70 candidats sélectionnés et
répartis en plusieurs groupes,
accompagnés par un ambassa-
deur Nestlé. Ateliers culinaires,
discussions autour des engage-
ments du groupe en matière de
RSE et job dating étaient au pro-
gramme. Cette nouvelle manière
de recruter et d’interagir avec
les jeunes générations illustre la
volonté de Nestlé de leur donner
la parole, d’encourager le partage
d’idées et d’attirer des profils qui
veulent faire bouger les lignes
pour ce qui est de l’alimentation
de demain.
Emploi des jeunes
« L’employabilité des jeunes et la
réponse à leur quête d’engage-
ment et de sens sont au cœur de
nos enjeux au quotidien. Aussi,
nous avons souhaité repenser la
manière de les impliquer et de
leur faire découvrir les coulisses
d’une entreprise qui œuvre col-
lectivement pour l’alimentation
de demain. Nous avons offert à
cette nouvelle génération la pos-
sibilité de vivre, le temps d’une
journée, l’expérience du collec-
tif One Nestlé, aux côtés de nos
collaborateurs », précise Aadil
Bezza, directeur général des
ressources humaines de Nestlé
en France.
D’autant que le groupe a pour
objectif, dans le cadre de son
engagement en faveur de l’em-
ploi des jeunes, de recruter
1 600 personnes de moins de
30 ans, qui rejoindront les 10 000
collaborateurs de Nestlé dans
l’Hexagone, et de proposer,
en outre, plus de 3 700 stages
ou alternances d’ici 2025 en
France. De nouvelles éditions
des « Tablées du mieux man-
ger » sont déjà prévues en 2022
afin de continuer à cultiver cette
proximité entre candidats et
collaborateurs. La France est le
1er
marché européen de Nestlé,
le 3e
dans le monde et 70 % des
matières premières utilisées
dans ses usines sont françaises,
précise le groupe. u L. Z.
—— sur le terrain ——
14 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
À l’aide de
témoignages vidéo, le
géant qui fabrique et
distribue des produits
et des matériaux
de construction
lance une campagne
mondiale visant à
intégrer quelque
36 000 collaborateurs,
dont 7 500 en France,
en 2022.
A
vec une crois-
sance du chiffre
d’affaires total
de 21 % sur les
huit derniers
mois, Saint-Gobain, présent
dans 72 pays, se porte bien.
Cette forme resplendissante,
qui atteste de la résilience du
groupe dans sa traversée de
la crise sanitaire, lui permet
d’envisager l’avenir avec opti-
misme. D’où le lancement en
ce mois de novembre d’une
campagne mondiale de recru-
tement en ligne en sept langues
qui s’étale sur neuf mois dans
les réseaux sociaux. Objectif ?
Susciter des vocations et suffi-
samment de candidatures pour
intégrer quelque 36 000 collabo-
rateurs en 2022, dont 7 500 en
France. Tous les métiers liés à la
construction et à la rénovation
du bâtiment sont concernés :
conseillers de vente, respon-
sables d’agence, magasiniers
RECRUTEMENT
SAINT-GOBAIN MET SES SALARIÉS
À CONTRIBUTION POUR ATTIRER
DE NOUVEAUX TALENTS
SATISFACTION GARANTIE
Alors même que la crise sanitaire a contraint au passage
rapide en télétravail dans de nombreux pays et à une
communication avec les équipes via des outils digitaux,
l’enquête de satisfaction des collaborateurs réalisée à
l’automne 2020 montre que 80 % des collaborateurs du
groupe se sentent impliqués dans la définition de leurs
objectifs. En outre, 78 % ont confiance dans le management
et 85 % reconnaissent que leur manager promeut le travail
d’équipe et la collaboration. Par ailleurs, plus de 80 % des
collaborateurs estiment que leurs conditions de travail
sont bonnes et que l’équilibre entre la vie personnelle
et la vie professionnelle est satisfaisant. Enfin, l’indice
d’engagement qui agglomère quatre thèmes (fierté de
travailler pour Saint-Gobain, capacité de rétention à court
terme, recommandation de Saint-Gobain comme employeur,
sentiment d’être apprécié et valorisé pour son travail)
atteint un score de 83 %, en amélioration de quatre points
par rapport à l’enquête réalisée en 2019. Sur ce dernier
élément, le fabricant et distributeur de matériaux de
construction (via sa filiale Point P) affiche un score qui se
situe « une dizaine de points » au-dessus de la moyenne des
secteurs distribution et industrie, assure Claire Pedini. u
caristes, spécialistes au ser-
vice des clients pour développer
des solutions de construction
durable, ingénieurs process,
techniciens et ingénieurs de
maintenance, ingénieurs indus-
trie  4.0, conseillers service
logistique, ingénieurs R  D et
techniciens de recherche…
Paroles de salariés
Intitulée « 1 mois = 1 métier »,
cette campagne valorise les
métiers en donnant la parole à
des salariés qui racontent leur
quotidien professionnel ainsi
que le sens et la motivation
qu’ils y trouvent. Constituée
de vidéos d’une minute et de
bannières qui pointeront sur
les premières, la campagne
s’inscrit dans la « reality-pub »
puisqu’elle mobilise de vrais
collaborateurs. « Nous sommes
partis de l’idée que nos salariés
sont les mieux placés pour van-
ter les carrières que propose le
groupe », résume Claire Pedini,
directrice générale adjointe
et directrice des ressources
humaines et de la responsa-
bilité sociale d’entreprise. Et
pour cause, Saint-Gobain, qui
emploie à l’échelle mondiale
plus de 167 000 salariés et suit,
à travers un baromètre Ipsos,
leur satisfaction, s’enorgueillit
de bons résultats (lire encadré).
Pour la campagne de recrute-
ment, des entretiens ont donc
été organisés avec une cen-
taine de collaborateurs dans
le monde afin qu’ils partagent
leur engagement au service des
clients, de l’innovation et du
développement durable. « Le
bâtiment représente 40 % des
émissions de gaz à effet de serre
et nos solutions permettent de
les réduire. Aujourd’hui, 72 %
de nos ventes contribuent à cet
effort. Nous mettons ces argu-
ments en avant dans les entre-
tiens de recrutement et lors de
la présentation de nos métiers,
car cela contribue à l’attracti-
vité de notre marque employeur,
surtout auprès des jeunes »,
poursuit Claire Pedini.
Centre de formation
Il s’agit là d’une cible convoitée,
les moins de 26 ans constituant
en France près de la moitié des
7 500 recrutements prévus en
2022. Et pour les attirer, Saint-
Gobain ne se limite pas à la
communication. Le groupe a
ainsi créé en 2020 son propre
centre de formation d’appren-
tis (CFA), afin de former des
jeunes aux métiers du groupe.
Cette année, le CFA a accueilli
125 candidats : 100 candidats
dans la filière commerce et mar-
keting et 25 candidats dans la
filière maintenance industrielle.
L’ambition est de porter à 250 le
nombre d’apprentis formés par
le CFA maison chaque année, à
horizon de trois à quatre ans. u
FRÉDÉRIC BRILLET
—— sur le terrain ——
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 15
Votre livre se focalise sur les mutations affectant
les salariés en CDI. Pourquoi ce choix ?
Il faut en effet rappeler que neuf personnes en emploi sur dix sont
salariées, dont une majorité en CDI. Le salariat stable connaît des
mutations significatives qu’il s’agit d’appréhender dans cet ouvrage.
C’est ce que je nomme le nouvel esprit du salariat dans une référence
transparente au Nouvel Esprit du capitalisme de Luc Boltanski et Ève
Chiapello. Ces auteurs constatent que le capitalisme contemporain
exige une implication des salariés que la contrainte hiérarchique et la
motivation matérielle ne suffisent pas à susciter. Il a donc fallu forger
toute une idéologie à même de susciter cet engagement. Idéologie
que j’appréhende dans mon livre à travers l’étude empirique des
évolutions des systèmes de rémunération. Concrètement, ce nouvel
esprit du salariat favorise l’avènement d’un travailleur autonome et
responsable. L’autonomie au travail n’est pas accordée, mais exigée
des salariés, qui doivent s’impliquer aussi fortement au travail que
s’ils travaillaient pour leur propre compte. Avec tout ce qui s’ensuit
en matière de rémunération variable.
Comment en est-on arrivé là ?
Jusque dans les années 1970, la norme est celle d’un salaire de
base fixe et collectif, reposant sur les grilles de classification. Il
est régulièrement augmenté, sous la double mécanique de l’an-
cienneté et des hausses générales de salaires. Dans les années
1980, on observe une tendance à l’individualisation des salaires
et, à partir des années 2000, à un mouvement de complexification
et de diversification des pratiques de rémunération. Dorénavant,
les salariés perçoivent à la fois des éléments fixes et variables,
individuels et collectifs. La complexification et la diversification
des pratiques de rémunération s’accompagnent par ailleurs d’un
affaiblissement des traditionnelles augmentations générales des
salaires, une pratique caractéristique des Trente Glorieuses. Dans
Dans son essai Le Nouvel Esprit du salariat, récompensé du Prix du livre
RH 2021, Sophie Bernard se penche sur les mutations du salariat en CDI,
où prévalent désormais autonomie et rémunération variable.
SOPHIE BERNARD - ENSEIGNANTE ET CHERCHEUSE
« LE VARIABLE BROUILLE
LA FRONTIÈRE ENTRE
TRAVAIL SALARIÉ
ET INDÉPENDANT »
parcours
Sophie Bernard est
professeure de sociologie à
l’université Paris Dauphine et
chercheuse à l’Irisso (Institut
de recherche interdisciplinaire
en sciences sociales) qui opère
dans le champ de la science
politique, de la sociologie
et de l’économie. Elle est
également membre junior
de l’Institut universitaire de
France et a publié Travail et
automatisation des services
(Octarès, 2012) et Le Nouvel
Esprit du salariat (PUF,
Humensis, 2020). u
© DR
LE
GRAND
ENTRETIEN
16 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
ce nouvel âge du salariat, une part de plus en plus grande des
rémunérations échappe à la régulation de branche. Plus encore,
la part individualisée des rémunérations finit par se réduire à une
négociation directe avec le supérieur hiérarchique. Les managers
ont alors intégré à leur batterie d’outils managériaux ces différents
dispositifs de rémunération, collectifs et individualisés, réver-
sibles et irréversibles, dans des agencements complexes, usant
de la part variable comme d’un levier pour mobiliser les salariés.
En les enjoignant de « faire leur salaire », on les responsabilise
pour obtenir leur implication et on les persuade que, tels des
travailleurs indépendants, ils ne s’inscrivent pas dans un lien de
subordination vis-à-vis de l’employeur, mais travaillent pour leur
propre compte. Les primes variables sont ainsi justifiées au motif
qu’elles permettent d’établir des inégalités « justes » entre salariés,
en fonction de leur mérite et de leur implication.
Longtemps opposés au partage des bénéfices, les patrons
promeuvent aujourd’hui l’intéressement, la participation
et l’actionnariat salarié. Qu’est-ce qui explique ce
revirement ?
Les dirigeants d’entreprise ont changé d’avis car ces disposi-
tifs permettent de rendre le salaire partiellement flexible. Des
enquêtes démontrent d’abord que le principe de non-substitution
des primes d’intéressement aux salaires fixes n’est pas toujours
respecté. Ensuite, le régime fiscal et social de ces dispositifs
variables est très avantageux pour les employeurs et pour les
salariés. Les patrons ont donc tout intérêt à développer la part
variable. En outre, les salariés sont plutôt favorables à ce système
censé récompenser la performance individuelle, d’autant que le
développement de la part variable et de l’autonomie vont de pair.
Avec la croissance de l’autonomie, le contrôle ne disparaît pas
mais change de forme, au travers de l’autocontrôle, du contrôle
par les objectifs, par les indices de satisfaction des clients, par les
entretiens individuels d’évaluation, par tout un ensemble d’indi-
cateurs quantitatifs censés mesurer la performance des salariés.
Ce n’est plus tant l’exécution du travail qui est contrôlée que les
résultats. Ces stratégies patronales visent à l’euphémisation du
lien de subordination, favorisant de la sorte le passage du contrôle
à l’autocontrôle, de l’exploitation à l’auto-exploitation.
Vous dressez une typologie de salariés relevant de ce
nouvel esprit. Qu’est-ce qui les rassemble et les distingue ?
Tous ces salariés se perçoivent comme individuellement respon-
sables de leurs résultats, ce qui a pour conséquence de susciter une
forte implication au travail. Mais ils se distinguent par la nature
des variables qu’ils perçoivent et la part que ceux-ci prennent
dans leur rémunération totale. L’enquête menée sur le partage
de bénéfices – intéressement, participation, actionnariat salarié
– dans une entreprise de la grande distribution permet de faire
émerger la figure du « salarié associé », qui se caractérise par une
forte intégration dans l’entreprise et dans le collectif de travail.
Parce qu’il est souvent actionnaire, il se considère responsable
des résultats de l’entreprise et a le sentiment que sa rémunération
reflète son engagement au travail. À l’inverse, lorsque le partage
des bénéfices se transforme en partage des risques, le salarié prend
conscience de la faiblesse de sa rémunération et de son incapacité
à l’augmenter.
Vous évoquez aussi le « salarié méritant » rencontré dans la
banque…
Dans cet univers, les primes sur objectifs responsabilisent les salariés
sur leurs résultats et les incitent à faire plus. Leur mise en œuvre pose
néanmoinsl’épineusequestiondescritèresd’évaluationmobiliséspour
établir des inégalités « justes ». Pris dans des contraintes budgétaires
etdesconsidérationsmorales,lesmanagersenchargedelesdistribuer
se voient en réalité dans l’incapacité de respecter l’idéal méritocra-
tique qui fonde les primes sur objectifs. En résulte une opacification
des critères de répartition qui donne le sentiment aux salariés que ces
primes sont distribuées « à la tête du client ».
Le « salarié quasi indépendant » renvoie enfin à des
populations de commerciaux…
Ces salariés payés à la commission entretiennent une forte proximité
avec les travailleurs indépendants. Comme eux, ils bénéficient d’une
grande autonomie au travail et se perçoivent comme responsables
de leurs résultats. Très attachés à cette forme de rémunération, ils
voient l’incertitude salariale qui l’accompagne comme le prix à payer
pour la liberté dont ils disposent.
En quoi ce nouvel esprit du salariat précipite-t-il une
« déstabilisation de la condition salariale » ?
Avec le déploiement des formes de rémunérations variables et indivi-
dualisées, les salariés se trouvent confrontés à l’incertitude de leurs
revenus qui peuvent chuter à tout moment. Responsabilisés sur leur
salaire,c’estdorénavantàeux,etnonplusàl’employeur,d’assumerles
risques du marché et de déployer des stratégies pour y faire face et sta-
biliser leur condition. Dès lors, les régulations collectives susceptibles
d’encadrer ces pratiques se révèlent inopérantes. Ce processus lèse
les salariés les plus démunis et notamment les femmes, pour diverses
raisons. D’abord, les politiques salariales sont moins avantageuses
dans les emplois qu’elles occupent majoritairement. Moins enclines
que leurs collègues masculins à solliciter leur supérieur pour négocier
une augmentation, elles sont en outre oubliées lors de la distribution
des primes. Enfin, du fait de l’inégale répartition des tâches domes-
tiques et parentales, elles sont considérées comme moins disponibles
et jugées de ce fait moins « méritantes » que leurs collègues masculins.
Ces rémunérations variables déstabilisent par ailleurs la condition
salariale en brouillant la frontière entre travail salarié et indépendant.
D’un côté, les salariés doivent « faire leur salaire », ce qui rapproche
leur condition de celle des travailleurs indépendants. De l’autre, la
condition des « nouveaux » indépendants tend à les rapprocher des
salariés. Ainsi, les chauffeurs Uber, bien qu’indépendants, voient leur
activité encadrée et contrôlée par la plateforme. On assiste ainsi à
l’expansion d’une zone grise entre indépendance et salariat.
Il n’en demeure pas moins une forte aspiration à l’autonomie
chez les salariés. Comment concilier cette aspiration avec les
droits et la protection sociale ?
Derrière cette demande d’autonomie s’exprime une critique légitime
du salariat, trop associé à un excès de hiérarchie et de contrôle. Pour
autant, le développement d’une société de petits entrepreneurs indé-
pendants ne paraît pas souhaitable car source de précarité. C’est
aujourd’hui la condition salariale qui protège et garantit le mieux les
droits des travailleurs et travailleuses. Des combinaisons favorisant
l’autonomie et préservant les droits et les protections associés à la
condition salariale demeurent à inventer. u PROPOS RECUEILLIS PAR
FRÉDÉRIC BRILLET
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 17
CERTAINS SECTEURS MANQUENT DE MAIN-D’ŒUVRE ÉTRANGÈRE
LES
CHIFFRES
37,8 heures C’est la durée moyenne
hebdomadaire du travail dans les conventions collectives
de l’Union européenne à 27, en 2020. La France et
l’Allemagne se situent toutes les deux en bas du
classement avec le même nombre d’heures : 35,6 heures.
La Grèce, la Croatie et Malte sont dernières avec
40 heures. u
76 % C’est la part des employeurs confrontés
quotidiennement aux lacunes en orthographe et en
expression de leurs équipes, selon un sondage Ipsos pour le
projet Voltaire, d’octobre 2021. Les employeurs « se trouvent
confrontés quotidiennement aux lacunes de leurs équipes,
avec des répercussions très importantes sur leur crédibilité
et leur efficacité professionnelle et, par conséquent, sur
la réputation, la productivité et même la performance
financière des entreprises », indique ce baromètre. u
En plus d’être illégales, les discriminations sur le marché du travail
entraînent des coûts économiques sur l’ensemble de l’économie,
indique une note de la Direction générale du Trésor à Bercy, le
16 novembre 2021. Qu’elles soient fondées sur le sexe, l’origine, la
religion, le handicap ou l’âge, elles induisent plusieurs effets néfastes.
Si des personnes discriminées obtiennent un emploi inférieur à leur
niveau de qualification, alors des emplois ne sont pas occupés par
les personnes les plus qualifiées. De la même façon, les discrimina-
tions qui écartent les individus des postes peuvent réduire le taux
de participation des populations discriminées au marché du travail
et la taille de la population active. En conséquence, la résorption
des discriminations aurait des effets vertueux. Les scénarios testés
par France Stratégie produisent un effet sur le PIB à long terme
compris entre +3,6 % (égalisation des niveaux de rémunération entre
les différentes populations considérées) et +14,1 % (égalisation des
rémunérations, des taux d’activité, du nombre d’heures travaillées
et des niveaux d’éducation des différents groupes). u A. R.
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
35
30
25
20
15
10
5
0
L’un des discours économiques hostiles à l’immigration consiste à
dire que les travailleurs étrangers prennent des postes aux autoch-
tones. Faux, répond le Conseil d’analyse économique (CAE) dans
une note de novembre 2021. Les statistiques de l’Insee et du minis-
tère du Travail montrent que « les secteurs les plus concernés par
le recours aux travailleurs immigrés en période précrise figurent
également parmi ceux dont les entreprises éprouvent le plus de
difficultés de recrutement ». C’est par exemple le cas du bâtiment,
de l’hôtellerie-restauration, des transports et du tourisme et de
l’informatique. Les métiers pénibles, aux contrats précaires et au
niveau de qualification relativement faible, sont les plus concernés.
En raison de la crise Covid-19, la chute de l’immigration observée,
notamment celle de l’immigration professionnelle, « peut expliquer
en partie ce surcroît de difficultés de recrutement qui pénalise la
reprise économique, aux côtés d’autres explications comme l’in-
certitude vis-à-vis de la situation sanitaire ou une intensité des
embauches très forte une fois les principales mesures sanitaires
levées ». Le CAE estime qu’il existe des secteurs sous tension
« pour lesquels le soutien des travailleurs immigrés n’est pas suffi-
sant ». Il lui apparaît « certainement utile de faire davantage appel
à l’immigration pour pourvoir des postes dans les secteurs de la
banque-assurance, de l’électricité et, dans une moindre mesure, du
commerce ». u ALAIN ROUX
Répartition des catégories socioprofessionnelles
parmi les immigrés en emploi
Source : Insee, recensement de la population 2017 ;
traitement : Dares.
LES RÉSORPTIONS DES DISCRIMINATIONS AUGMENTERAIENT LE PIB DE 3 % À 14 %
Écarts de salaire entre les hommes et les femmes (2017)
Source : Insee, panel tous salariés du secteur privé.
Écarts liés à la répartition
genrée des postes
Écarts pour un même poste
et dans un même établissement
16,8 %
5,3 %
Ouvriers Employés Professions
intermédiaires
Cadres et
professions
supérieures
Artisans,
commerçants,
chefs
d’entreprises
Agriculteurs
exploitants
29 % 29 %
17 %
16 %
8 %
0 %
—— LES CLÉS ——
TENDANCE ÉCO
18 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
NOMINATIONS
CDC HABITAT
CATHERINE CHAVANIER, DRH
Ingénieure diplômée de l’École nationale de l’aviation civile
et titulaire d’un master en négociations et relations sociales,
Catherine Chavanier est nommée directrice des ressources
humaines de CDC Habitat. Entrée chez Air Inter en 1990,
elle est nommée en 1995 adjointe au chef du département
de l’escale d’Orly, en charge des ressources humaines.
Deux ans plus tard, elle rejoint la direction générale de
l’exploitation « sol ». En 2000, au sein d’Air France, elle
devient cheffe d’escale à Montpellier puis, en 2006, cheffe
du projet « Cible avion » avant d’être nommée responsable
du recrutement en 2007, puis responsable diversité en 2011.
Un an plus tard, elle accède au poste de directrice du centre
d’expertise et de services partagés RH. Elle est nommée
directrice des ressources humaines d’Air France KLM
Martinair Cargo en 2016 et de Radio France en 2018. u
RADIO FRANCE
MICHEL CASCIANI, DRH
Titulaire de plusieurs maîtrises (économie, sociologie
et droit du travail) ainsi que d’un DESS en ressources
humaines, Michel Casciani est nommé directeur des
ressources humaines de Radio France. Il sera également
membre du comité exécutif et du comité de direction. Sa
carrière commence en 1988 aux Nouvelles messageries de
la presse parisienne. En 2005, il est nommé directeur des
ressources humaines et membre du comité de direction.
Trois ans plus tard, il intègre le groupe Presstalis au poste
de directeur des ressources humaines. Il met en œuvre
une stratégie en phase avec l’évolution déclinante du
marché et la stratégie de l’entreprise. En 2020, il va gérer
le redressement puis la liquidation judiciaire du groupe
Presstalis. La même année, il devient conseiller en affaires
sociales à la direction générale et membre du comité
exécutif de France Messagerie, la structure qui a succédé à
Presstalis. u
KOMPOSITE
BLANCHE GOURDON,
RESPONSABLE DU PÔLE
RESSOURCES HUMAINES
Diplômée de l’EMLV en gestion des ressources humaines,
Blanche Gourdon est nommée responsable du pôle
ressources humaines de Komposite, un spécialiste des
infrastructures IT. Sa carrière commence en 2014 chez
Afocal, puis elle rejoint Patrim One Assurances en 2016
au poste d’assistante marketing avant d’intégrer Intermed
Asia en 2018 au poste de sales and marketing executive.
La même année, elle est nommée chargée de recherche et
de recrutement chez Jouve, avant de devenir un an plus
tard chargée de recrutement et de formation. En 2020,
elle rejoint Komposite pour prendre en charge le poste de
responsable des ressources humaines. En 2021, le groupe
Komposite a réalisé un chiffre d’affaires de 22 millions
d’euros. u
30 novembre 2021
Le test and learn dans la RH :
une approche pour booster l’innovation
collaborative
Webinaire. Le test and learn – mise en lumière et analyse de
l’échec là où les concepts traditionnels ne se focalisent que sur
les succès – connaît un fort essor dans les organisations, porté
par la période d’incertitude que nous connaissons actuellement.
Pour mieux en cerner les contours et ses périmètres d’utilisation
dans l’entreprise, Adilson Borges, auteur d’un livre sur le sujet
et directeur du learning chez Carrefour, propose un exposé en
trois parties, de 16 h 30 à 17 h 30, avec des exemples concrets
d’entreprises utilisatrices et un temps de questions-réponses :
• Qu’est-ce que le test and learn ?
• 
Peut-il être appliqué partout, dans tous les secteurs
de l’entreprise ou seulement dans les équipes qui sont
en mode agile ?
La RH peut-elle utiliser le test and learn, et comment, pour gagner en
efficacité et en impact au sein de l’organisation ?
Inscription : https://webikeo.fr/webinar/le-test-learn-dans-la-rh-une-
approche-pour-booster-l-innovation-collaborative-en-entreprise-8
30 novembre 2021
Managers de proximité : connaître
et reconnaître leur travail à l’aune
de la crise
Paris. À l’occasion de la publication en mai 2021 du numéro 42
de la revue Sociologies pratiques, ayant pour titre « Manager en
proximité : quel travail ? », le groupe Entreprise et Personnel,
qui vient également de publier une étude sur le management de
proximité, organise une rencontre-débat de 18 heures à 20 heures
autour des thématiques suivantes :
• Qu’est-ce qu’un manager de proximité de nos jours ?
• Quelles compétences sont attendues d’eux ?
• Comment leur permettre de bien jouer leur rôle ?
Inscription : https://bit.ly/3D1Pqjh
Lieu : Entreprise et Personnel, 1 bis avenue de la République, 75011 Paris.
1er
 décembre 2021
Les ruptures amiables du contrat
de travail et actualités
Lyon. Le cabinet d’avocats Cornet Vincent Ségurel (CVS), en
présence de Delphine Monnier, avocate directrice, Aurélie Maître
et Laura Cammarata, de l’équipe Droit social, anime un petit-
déjeuner de 8 heures à 11 heures, au cours duquel un focus sur
les ruptures amiables du contrat de travail sera proposé. Il sera
également question du télétravail (comment le pérenniser ?) et
d’un tour d’horizon des actualités législatives et jurisprudentielles
du dernier trimestre 2021 (indemnité inflation, nouvelles
compétences environnementales du CSE, repas d’affaires et
notion d’abus manifeste, charge de la preuve en matière d’heures
supplémentaires).
Inscription : https://www.eventbrite.fr/e/billets-matinee-droit-social-focus-
sur-les-ruptures-amiables-et-actualite-2021-205776421817
Lieu : Wojo Lyon grand Hôtel Dieu, coworking, bureaux et salles de réunion,
4 place Amédée-Bonnet, 69002 Lyon.
l’agenda
—— les clés ——
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 19
QUEL AVENIR POUR LES ASSOCIATIONS ?
Fragilisées par les appels d’offres, comment les associations peuvent-elles préserver leur militantisme local ?
Doivent-elles changer de gouvernance ? Quel monde associatif demain ?, ouvrage collectif et pointu, éclaire
sans fard ces enjeux.
C’est un monde dont on parle peu : celui des petites
associations, dans la culture, l’éducation populaire ou
l’aide sociale. La crise sanitaire a mis en évidence leur
capacité à organiser en urgence la solidarité locale,
dans l’aide alimentaire, notamment. Pourtant, aucune
mesure gouvernementale n’a été prise en leur faveur,
alors que « beaucoup de ces organisations participent
pourtant de l’intérêt général ». Sur 1,5 million d’as-
sociations en France, 12 % emploient des salariés.
Pourquoi un tel manque de reconnaissance ? Dans
cet ouvrage engagé, une vingtaine de chercheurs
et de responsables d’associations interrogent l’ave-
nir de celles-ci, confrontées à de fortes baisses de
financements. Ces structures militantes risquent-elles
de perdre leur âme avec une « marchandisation ram-
pante » ? Les auteurs font état de leurs difficultés, les
appels d’offres publics remplaçant les subventions, en chute libre.
Avec le risque, selon eux, de perdre en liberté d’action : « Quand
la survie de leur structure est en jeu et que des postes de salariés
sont menacés, les dirigeants peuvent faire preuve d’une certaine
frilosité » pour exprimer leurs désaccords politiques face aux élus
locaux, remarquent-ils. L’autre problème tient à l’essor de l’innovation
privée : entreprises à vocation sociale, fondations de grands groupes,
contrats d’impact social, cette « idéologie néolibé-
rale » pourrait affaiblir le petit monde associatif, déjà
fragilisé par la fin des contrats aidés.
Trouver de nouvelles dynamiques
Le livre ne s’enfonce pas dans ce scénario pessimiste,
ni dans l’idéalisme du monde associatif. Sortir de cet
étau politique ne sera pas simple, mais ces experts
soulignent « qu’une critique des réalités associatives
s’avère nécessaire ». Que ce soit dans l’action sociale
ou la solidarité, toutes les associations « ne sont pas
parfaites. » Les chercheurs évoquent la nécessité
« d’initier » d’autres pistes de financements. Mais
jugent aussi que la gouvernance associative doit
changer : « Jusqu’où les employeurs (bénévoles ou
professionnels) peuvent-ils inventer de nouvelles
modalités de travail plus démocratiques », reflétant leurs valeurs ?,
se demandent-ils. Il va falloir, selon eux, « élargir la délibération aux
citoyens comme aux salariés et aux bénévoles ». Immenses défis,
vus par de bons spécialistes. u LYDIE COLDERS
« Quel monde associatif demain ? », sous la direction de Patricia
Coler, Marie-Catherine Henry, Jean-Louis Laville et Gilles Rouby,
éditions Eres, 192 pages, 13 euros.
et aussi...
Santé psychologique au travail et Covid-19
Directions et DRH auraient tort
de négliger les conséquences
psychologiques de la pandémie sur
le moral des salariés. Cette crise « a
provoqué un stress » dont il faudra
tenir compte, selon les consultants
en risques psychosociaux auteurs
de ce guide. À grand renfort d’études,
leur livre analyse finement le vécu
(positif ou négatif) du télétravail
depuis 2020 par les salariés et les
managers. Si, aujourd’hui, le travail
hybride s’installe, les auteurs listent
des pistes pour améliorer un télétravail durable : respect des
horaires, équité du dispositif ou limitation du numérique face
à la fatigue cognitive. Si le bureau restera « le pilier essentiel »,
les consultants invitent à repenser l’organisation du travail,
alors que la crise Covid-19 a entamé la motivation des salariés.
Dans l’idéal, le présentiel doit servir à « cimenter les pratiques
de travail » et à mieux travailler – « pas à effectuer des tâches
télétravaillables »… Un bon décryptage. u
Christophe Nguyen, Jean-Pierre Brun, éditions De Boeck, 240 pages,
24,90 euros.
Préparer et conduire un 360° efficace
Certaines multinationales continuent
d’utiliser le 360° pour développer les
compétences et le leadership des
managers. Cet outil d’évaluation
comportemental est controversé,
complexe, « mais souvent mal
utilisé » par les RH, estime Karine
Arnaud, coache spécialisée. Son guide,
méthodique et truffé d’anecdotes,
donne des conseils avisés pour
que cette démarche (guidée par
les RH et un « coach interne ou
externe ») ne reste pas lettre morte. Si
l’identification des besoins est bien cernée, la communication
précise sur les attendus du 360° pour les participants (mise en
confiance) serait trop négligée, selon elle. Son manuel vivant
donne un très bon aperçu de la conduite de cet « outil de
feedback » et de l’implication nécessaire de tous à la restitution
(sensible) des résultats. Si le manager en arrive à partager les
conclusions, un maître-mot pour l’auteure : qu’il choisisse « des
axes simples », à mettre en œuvre à court terme. u
Karine Arnaud, éditions Gereso, 188 pages, 23 euros.
À LIRE
—— les clés ——
20 - Entreprise  Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
CHANGER DE VIE…
CELA S’APPREND
Q
ui n’a jamais
rêvé de changer
de vie… profes-
sionnelle  ? De
se reconvertir ?
Et donc de pouvoir se former
afin de mettre d’autres cordes
à son arc ? La crise sanitaire a
renforcé ces aspirations : pour
57 % des cadres, la situation sin-
gulière de ces derniers temps a
été l’occasion de réfléchir très
sérieusement à leurs projets
professionnels.
Dans ce sens, la création en
2014 du compte personnel de
formation (CPF) – issu d’un
accord interprofessionnel, il
faut le rappeler, aussitôt consa-
cré par la loi – a été une grande
réforme. Non parce que celui
qui écrit ces lignes y a apporté
sa modeste contribution, mais
parce qu’elle a – enfin – instauré
la portabilité des droits à la for-
mation, qu’avant on perdait
d’un coup chaque fois que l’on
quittait un emploi.
Cette grande réforme s’est
poursuivie : l’accès au CPF
est aujourd’hui facilité par
une plateforme digitale « Mon
compte formation », formidable
outil – dont on fête les deux
ans d’existence – qui permet à
chacun, quasiment en un clic,
de choisir sa formation et sur-
tout, de créer son parcours de
formation en fonction de ses
contraintes professionnelles et
personnelles.
En quelques années, le CPF a
contribué à mettre au cœur des
débats la question des compé-
tences et de l’employabilité. Un
pari risqué car sans certitude au
départ, mais un pari en passe
de réussir. Le CEP – Conseil en
évolution professionnelle – est
un des outils de cette réussite,
mais attention à ne pas en faire
un point de passage obligé !
Alourdir inutilement l’accès à la
formation de celles et ceux qui
savent parfaitement ce qu’ils
ou elles veulent, saturer l’offre
de CEP alors que pour beau-
coup – cadres ou non – une
réflexion sur son évolution pro-
fessionnelle ne passe pas obli-
gatoirement par la mobilisation
de son CPF serait un double
contresens.
Mais si la question des compé-
tences et de l’employabilité se
pose aux actifs, elle concerne
aussi au premier chef les entre-
prises, car elle est un outil stra-
tégique. À deux titres au moins.
La formule n’est pas très origi-
nale, mais elle est vraie : notre
monde va vite, de plus en plus
vite. Et dans ce contexte de
mutations accélérées - tech-
nologiques, économiques
et réglementaires -, investir
dans la formation de ses sala-
riés est pour une entreprise le
meilleur moyen de préparer
l’avenir, d’adapter les collabora-
teurs aux transformations des
métiers actuels, et plus encore
de les former à ceux de demain.
Pour dire les choses autre-
ment : pour être performant,
il est souvent mieux de « géné-
rer » en interne de nouvelles
compétences plutôt que d’aller
les chercher sur un marché de
l’emploi de plus en plus tendu.
Aujourd’hui, il est difficile,
voire très difficile, de recruter
sur les métiers en émergence,
par exemple ceux liés à la data
ou à l’usine du futur.
Former en interne, c’est valo-
riser ses propres ressources.
Valoriser dans tous les sens
du terme y compris mettre en
valeur. Car permettre à cha-
cun de gagner en compétences,
d’évoluer dans son métier ou
de faire évoluer son métier est
une source de motivation et
de fidélisation. Investir dans la
formation, c’est éviter que des
collaborateurs ayant le sen-
timent d’avoir fait « le tour de
leur poste » aillent chercher
ailleurs un surcroît d’intérêt.
Alors que seulement 22 % des
cadres ont déjà eu recours à
leur CPF, il est donc important
de les accompagner dans leurs
réflexions. L’Apec s’y emploie.
Investir dans les compétences,
c’est aussi – deuxième com-
posante stratégique – investir
dans la performance sociale de
l’entreprise. La formation est
le moyen le plus sûr de main-
tenir dans l’emploi des salariés
potentiellement fragilisés par
les évolutions du marché du
travail. C’est notamment le cas
des cadres seniors, ressources
que les entreprises ont tout
intérêt à valoriser, comme le
préconisent tous les rapports
qui se succèdent sur le sujet.
Car changer de vie, et de fonc-
tion, cela s’apprend. Et cela
s’apprend à tous les âges. ♦
—— chroniques ——
n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise  Carrières - 21
Gilles Gateau
directeur général de l’Apec
Entreprise & carrieres   29 novembre 2021
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Entreprise & carrieres   29 novembre 2021

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Entreprise & carrieres 29 novembre 2021

  • 1. LA CRISE RENFORCE L’IMPORTANCE DES SOFT SKILLS © MACROVECTOR/STOCKADOBE.COM EMPLOI DES CADRES INCLUSION Quand la pandémie sensibilise sur le handicap p. 4 SANTÉ L’Équipe Exolis se met au sport p. 14 RECRUTEMENT Saint-Gobain met ses salariés à contribution pour attirer les talents p. 15 ISSN : 1955-5687 www.info-socialrh.fr n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - 5,55 €
  • 2. Conformément à la loi Informatique et Libertés du 6/01/1978 modifiée et au Règlement européen n° 2016/679/UE du 27/04/2016 vous disposez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et à la limitation du traitement des informations vous concernant auprès de la direction commerciale de la SAS SOCIAL RH Publications. • Le Fait de la semaine : mise en relief d’un événement • L’actualité, l’essentiel de l’actualité sur la formation, les relations sociales, la gestion des ressources humaines... • Le point sur... Un dossier thématique pour accompagner votre réflexion et guider votre mise en pratique • Sur le terrain, des expériences ou innovations dans les entreprises • Le Grand entretien, une interview d’expert • Les Chroniques de 6 experts de la GRH, du droit social, de l’innovation, de la RSE... • Les Clés : la tendance économique, Chaque lundi, toute l’information RH et Management traitée de façon pratique et opérationnelle : BULLETIN D’ABONNEMENT À retourner à l’adresse suivante: SOCIAL RH Publications Service abonnements - 23 rue Dupont-des-Loges - 57000 Metz Tél.: 0140052315 - Mail: abonnements@info6tm.com Je choisis mon mode de paiement: r par chèque à l’ordre de SOCIAL RH Publications; r par virement au titulaire du compte SAS SOCIAL RH Publica- tions selon coordonnées bancaires mentionnées ci-dessous. * Offre spéciale réservée aux nouveaux abonnés en France métropolitaine jusqu’au 31/12/2021 (au-delà de cette date, le prix barré sera appliqué), franco de port et d’emballage sous réserve d’une modification du taux de TVA applicable au moment de la commande. Dans la limite d’un accès web par abonnement. Ces tarifs correspondent à des abonnements annuels. Les abonnements sont automatiquement renouvelés d’une année sur l’autre sauf avis contraire de votre part signifié un mois avant la date d’échéance. ** Prix de vente au numéro. TVA 2,10 %. r Mme r M. Nom ............................................................................................................................................................................... Prénom .................................................................................................................................................................................................................... Fonction ................................................................................................................................................................................................................. Raison sociale ................................................................................................................................................................................................... Adresse .................................................................................................................................................................................................................... Code postal abbbc Ville ....................................................................................................................................... Téléphone.............................................................................................................................................................................................................. E-mail (obligatoire) ................................................................................................................................................................................... N° Siret abbbbbbbcbbbbc Code NAF abbbc r Siège r Établissement Nombre de salariés à mon adresse ......................................................... Date et signature EEC_AP-A4_09-21 La signature de ce bulletin d’abonnement emporte adhésion des conditions générales de vente consultables sur www.info-socialrh.fr SIÈGE SOCIAL 23 RUE DUPONT-DES-LOGES I 57000 METZ I SAS AU CAPITAL DE 1000 € I RCS METZ B 823 175 617 I SIRET 823 175 617 00047 I CODE TVA FR80 823 175 617 COORDONNÉES BANCAIRES: CRÉDIT AGRICOLE DE LORRAINE | IBAN FR76 1610 6000 0196 0080 3523 481 | BIC AGRIFRPP861 | CODE TVA FR37 823 175 617 Oui, je souhaite m’abonner à l’offre* Entreprise Carrières suivante: EECAP00013 Pour tout envoi hors de France métropolitaine (DOM-TOM, Union européenne et étranger), paiement par virement ou prélèvement, offres étudiants, nous contacter au: 0140052315 Formule choisie (à cocher) Caractéristiques de l’abonnement annuel Prix unitaire HT Prix unitaireTTC O PAPIER + web 48 numéros Entreprise Carrières au format papier + 1 accès web à ces numéros et aux archives via liseuse, aux contenus en ligne réservés aux abonnés sur www.info-socialrh.fr + 1 inscription à la newsletter quotidienne infosocialRH 238 € au lieu de 261 €** 243 € au lieu de 266,48 €** O 100 %WEB 1 accès web aux 48 numéros Entreprise Carrières et aux archives via liseuse, aux contenus en ligne réservés aux abonnés sur www.info-socialrh.fr + 1 inscription à la newsletter quotidienne infosocialRH 238 € au lieu de 261 €** 243 € au lieu de 266,48 €** O AccèsWEB supplémentaire Uniquement en complément de l’abonnement annuel à la version Papier ou 100%Web. 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  • 3. 23, rue Dupont-des-Loges - 57000 Metz Pour nous joindre par téléphone ou par fax : faire le 01 81 69 suivi des 4 chiffres entre parenthèses. Président, Directeur de la publication : François Grandidier DIALOGUER AVEC LA RÉDACTION redaction-RH@info6tm.com Directrice des rédactions : Frédérique Carton ◆ Secrétariat de rédaction-maque e : Karine Léran (1re SR), Patricia Loison, Pixel6TM (Olivier Déro). ◆ Ont collaboré à ce numéro : Lydie Colders, Frédéric Brillet, Gilles Gateau, Nini La Caille, Natasha Laporte, Pessin, Pixel6TM (Benjamin D’Alguerre, Gilmar Sequeira Martins, Lys Zohin), Martin Richer, Alain Roux, Lucie Tanneau, Nathalie Tissot. PASSER UNE OFFRE D’EMPLOI OU UN APPEL D’OFFRES Directeur commercial : Olivier Desroches (80 12) ◆ Assistante commerciale : Sophie Violtat (80 45). PASSER UNE PUBLICITÉ Directeur du développement : Vincent Léonard ◆ Directricecommerciale,MarieTran(8043). MARKETING VENTES ET DIFFUSION INFO TM Chef de marché : Christine Baudet (80 03) S’ABONNER Téléphone : 0140052315. Ouverture : du lundi au vendredi de 9h00 à 12h30 et de 13h30 à 17h00 E-mail : abonnements@info6tm.com INFO6TM Service Abonnements 23, rue Dupont-des-Loges - 57000 Metz Abonnement : 1 an (48 numéros) : 261 € HT / 266,48 € TTC Prix de vente au numéro : 5,44 € HT / 5,55 € TTC Étranger : pour tout envoi hors de France métropolitaine, une majoration est prévue sur le prix HT de 10 % pour l’Union européenne et les Dom-Tom et de 20 % pour les autres pays. IMPRIMEUR-ROUTEUR Socosprint Imprimeurs, 36 route d’Arche es, 88000 Épinal ◆ Éditeur : SNC Social RH Publications, une filiale de ◆ Siège social : 23 rue Dupont des Loges – 57000 Metz. RCS Metz 823 175 617 ◆ ISSN : 1955-5687 ◆ Dépôt légal : novembre 2021 ◆ Commission paritaire : n° 0422 T 87713 ◆ Origine géographique du papier : Belgique. Taux de fibres recyclées : 0 %. Certification des fibres utilisées : PEFC. Au moins un des indicateurs environnementaux : PTOT 0,022 kg/tonne. www.info-socialrh.fr —— billet —— Une nouvelle vision du travail Travaille-t-on aujourd’hui comme hier  ? Loin de là  ! Et il ne s’agit pas seu- lement de l’impact de la technologie sur les tâches. Le travail a changé, sa perception aussi. Certes, depuis la fin, déjà lointaine, de la société des chas- seurs-cueilleurs, pour payer les factures, il n’y a guère d’autres solutions que de travailler. Et le type d’emploi sert toujours, particulièrement en France, de marqueur social. Mais quel est aujourd’hui le sens du « travail » ? Et quelle est la relation entre salarié et employeur ? Si le travail a pu se dévaluer, se vider de son sens, même, pour devenir un simple échange, souvent déséquilibré, les jeunes diplômés créent aujourd’hui une nouvelle relation au travail, inédite. Pour Pierre-Yves Martin, du cabinet de conseil One Man Support, interrogé dans nos colonnes, ce qui caractérise cette nouvelle relation, c’est… la liberté. Pas question d’accepter n’importe quelles conditions de travail, ni n’importe quel management, ni n’importe quel discours, en particulier en matière de responsabilité sociale et environnementale, qui ne correspondrait pas aux actes. Sinon, c’est la démission immédiate  ! Le travail est en quelque sorte « instrumentalisé ». Il doit servir. Non à la carrière, les jeunes ne rêvent plus d’en faire une, et encore moins dans la même entreprise, mais à une vie faite de sens et d’engagements plus larges. Charge aux employeurs de répondre à cette nouvelle exigence, cette nouvelle immédiateté, cette nouvelle liberté et cette nouvelle maturité face au travail de la part des jeunes. LYS ZOHIN Fait de la semaine 4 INCLUSION Quand la pandémie sensibilise sur le handicap 6 INSERTION Améliorer les passerelles entre Esat et milieu ordinaire L’actualité 7 TROIS QUESTIONS À Pierre-Yves Martin : « Le centre de gravité du travail a changé » 8 GESTION DES COMPÉTENCES Le secteur RH embrasse la technologie 8 MOBILITÉ Les cadres et dirigeants sont encore plus susceptibles que les autres de quitter leur emploi 9 INTERNATIONAL • Royaume-Uni : près de la moitié des jeunes filles refuseraient de travailler pour une entreprise qui ne respecte pas l’égalité salariale • Chine : quand une entreprise dit que les heures supplémentaires, c’est génial… • Émirats arabes unis : la compagnie aérienne Emirates déroule le tapis rouge pour recruter • Japon : le gouvernement demande aux entreprises de veiller aux droits humains Point sur 10 COMPÉTENCES La crise a renforcé l’importance des soft skills pour les cadres 12 INTERVIEW Laurence Doumba-Kinda : « On attend davantage de valeur ajoutée de la part des cadres » 13 RECRUTEMENT Manpower lance un réseau d’agences dédiées aux cadres Sur le terrain 14 SANTÉ L’équipe Exolis se met au sport 14 EMPLOI Nestlé recrute… en mangeant 15 RECRUTEMENT Saint-Gobain met ses salariés à contribution pour attirer de nouveaux talents Grand entretien 16 SOPHIE BERNARD « Le variable brouille la frontière entre travail salarié et indépendant » Les clés 18 TENDANCE ÉCO 19 NOMINATIONS ET AGENDA 20 LIVRES Chroniques 21 GILLES GATEAU Changer de vie… cela s’apprend 22 MARTIN RICHER Pourquoi débusquer les discriminations ? AU SOMMAIRE n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 3
  • 4. E n 2020, 22 % seule- ment des établisse- ments de services d’aide par le tra- vail (Esat) et des entreprises adaptées (EA), qui emploient 150 000 personnes en situation de handicap, ont eu un chiffre d’affaires stable ou en augmentation. « L’explosion du télétravail et du commerce en ligne, la digitalisation program- mée dans tous les domaines nous imposent de repenser pratiquement tous nos métiers. Celui de l’accueil et de la conciergerie, à titre d’exemple, va devoir se réinventer – avec des sièges sociaux de moins en moins fréquentés par des collaborateurs qui auront par Le bilan dressé à l’occasion de la semaine de l’emploi des personnes en situation de handicap, qui s’est tenue du 15 au 21 novembre, est certes mitigé. Mais si la crise sanitaire a pu fragiliser encore plus ces salariés, les employeurs ont fait des efforts. D’autant qu’ils se sont rendu compte que chacun peut être fragile… INCLUSION QUAND LA PANDÉMIE SENSIBILISE SUR LE HANDICAP ailleurs probablement de nou- veaux besoins à satisfaire », relève David Bourganel, le directeur général de l’Asso- ciation pour l’insertion et la réinsertion professionnelle et humaine des handicapés (ANRH) dans le rapport de l’Ob- servatoire économique national des achats responsables auprès des prestataires Esat-EA. Une nécessité de se réinventer que partagent aussi nombre d’entre- prises classiques. À condition de dépasser certains préjugés. Marlène Cappelle, la délé- guée générale de Cheops-Cap emploi, rappelle qu’il était, en pleine période de crise sani- taire, nécessaire de rassurer et de sensibiliser, entre autres, sur « ce qu’était une personne en situation de handicap pour éviter les amalgames sur la question du public fragile. On se dit à tort : “Elle est en situa- tion de handicap, donc elle doit forcément être en télétravail ou en arrêt” ». Aménagements des postes « On considère que c’est une population homogène là où il faudrait aller davantage sur des logiques plus spécifiques, des organisations du travail repen- sées en prenant en compte les capacités des personnes mais aussi leur vulnérabilité », estime de son côté Carole Salères, la conseillère nationale emploi, LE FAIT DE LA SEMAINE 4 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
  • 5. ressources et formation d’APF France handicap, qui rappelle que « le fait d’être en situa- tion de handicap multiplie par trois le risque de discrimina- tion dans l’emploi ». Elle invite ainsi à reconsidérer la portée de ce qui est mis en place pour l’ensemble des salariés. Une démarche qui a commencé par la généralisation du télétravail. Ainsi, chez ADP, fournisseur américain de solutions RH, sur 2 100 collaborateurs en France, 5,5 % sont en situation de han- dicap. Certains travaillaient déjà à distance avant la pandé- mie, d’autres non. « Nous avons aidé les salariés à s’équiper en écrans de grande taille, logi- ciels spécifiques, sièges avec des repose-pieds ou poignets, bureaux permettant d’alterner la station debout et assise », indique Nolwenn Gourven, responsable RSE et relations sociales de l’entreprise. Au total, 25 aménagements de postes ont été réalisés pour les sala- riés en situation de handicap. « Lorsqu’ils étaient d’accord, un ergonome venait à leur domicile pour être sûr d’effectuer l’adap- tation adéquate », précise-t-elle. Quant au secteur public, qui compte 260 000 agents handi- capés, il a dû également s’adap- ter. Marc Desjardins, directeur du FIPHFP, le fonds pour l’in- sertion des personnes handica- pées dans la fonction publique, décrit une « mise en place pro- gressive, un peu chaotique mais finalement bénéfique, du télé- travail ». Comme l’Agefiph pour le secteur privé, le FIPHFP a mis à disposition des aides exceptionnelles, complétées par l’État, pour financer, entre autres, du matériel spécifique et encourager l’embauche durant la pandémie. Certaines ont été prolongées jusqu’en décembre  2021. À l’heure du retour en présentiel – au moins pour le moment –, Marc Desjardins s’interroge sur l’inté- rêt de pérenniser le télétravail. « Les avis sont assez partagés, constate-t-il. Il limite la fatigue, notamment dans les transports, mais il y a aussi un risque de désocialisation qui est encore plus grand pour les personnes en situation de handicap. » D’autant que les confinements ont entraîné l’interruption des suivis médicaux ou des soins pour certaines d’entre elles. Une enquête Ipsos-Agefiph, menée en juin 2020 et avril 2021, révèle qu’en un an, le sentiment d’isolement a augmenté de 11 points chez ces actifs. Cette fragilité psychologique menace aussi les demandeurs d’emploi. L’ancienneté moyenne d’inscription pour les personnes handicapées est passée de 883 jours en 2020 à 919 jours cette année. Et les structures d’accompagnement ont vu cer- taines de leurs missions cham- boulées par le télétravail. « Nous ne pouvons pas étudier les situa- tions de maintien dans l’emploi au téléphone ou en visio, relève Marlène Cappelle, de Cheops- Cap emploi. Il faut aller voir le poste de travail, échanger avec l’employeur, la personne.  » Après une baisse de 9 % du nombre de contrats signés en 2020, une amélioration tend néanmoins à se confirmer sur le premier semestre 2021. Apprentissage L’un des leviers pour améliorer l’intégration des travailleurs handicapés repose aussi sur l’apprentissage, dont le nombre de contrats a augmenté de 34 % entre 2019 et 20201 , en dépit de la crise sanitaire. Dans le secteur public, 1 200 apprentis sont ainsi aidés chaque année. « Les plus volontaires sont les collectivités locales, plus souples », précise le directeur du FIPHFP. Le taux d’emploi des travailleurs handicapés y atteint 6,7 %, contre 4,67 % dans la fonction publique d’État. Le secteur privé mise lui aussi sur l’alternance pour amélio- rer ses efforts d’inclusion. Le groupe Apicil accueille ainsi chaque année sept appren- tis en situation de handicap, majoritairement en reconver- sion professionnelle. Aucune limite d’âge n’est requise pour les bénéficiaires de l’obligation d’emploi (OETH). « Il y a deux ans, nous avons, grâce à cela, embauché deux CDI et deux CDD », se félicite Christine Dollé Delmotte, la responsable mission handicap. L’enjeu est de taille pour le groupe de 2 000 collaborateurs qui a vu son taux d’emploi légal de sala- riés handicapés chuter de 7,4 % en 2019 à 5,1 % en 2021 après le rachat d’entités et l’entrée en vigueur de la réforme de l’OETH. Désormais, les achats responsables auprès des Esat et EA ne sont plus comptabilisés dans le taux d’emploi légal de 6 % de l’effectif global pour les entreprises de plus de 20 sala- riés. Ils sont soustraits de la contribution à l’Agefiph que l’entreprise doit verser si elle ne remplit pas ses obligations. u NATHALIE TISSOT (1) Selon les chiffres du réseau Cheops-Cap emploi. —— LE FAIT —— DE LA SEMAINE n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 5
  • 6. INSERTION AMÉLIORER LES PASSERELLES ENTRE ESAT ET MILIEU ORDINAIRE ▼ Accompagnements et formations doivent permettre aux travailleurs handicapés qui le souhaitent de poursuivre leur parcours professionnel en entreprise classique. Reportage à l’Esat de Châtillon. R ennes en bois et autres objets de décoration orneront bientôt les sapins. Certains auront été fabriqués par les travailleurs de l’Esat de Châtillon (Hauts- de-Seine), créé en 2001 par la Fondation des Amis de l’Ate- lier. Cette dernière accompagne depuis 60 ans des personnes en situation de handicap psy- chique, mental ou avec autisme. À l’heure de la pause de l’après- midi, au sein de cet Esat situé dans une ancienne usine, cer- tains salariés en profitent pour se reposer dans une salle dédiée. Les traitements qui les stabilisent sont parfois contraignants, fatigants. Alors qu’ils s’apprêtent à reprendre leur poste, Nadège et Patrick se prêtent au jeu des ques- tions-réponses. « Ça fait 20 ans que je suis dans la boîte, j’ai fait l’ouverture ! », s’enorgueillit Patrick, dans sa blouse grise. Il y a trouvé la bienveillance qu’il n’avait pas rencontrée lors de sa précédente expérience pro- fessionnelle, en maison de retraite. « C’est mieux ici, car en milieu ordinaire, on n’est pas protégé par tout le monde », souligne-t-il. Une fois l’école terminée, cer- taines personnes en situation de handicap psychique, mental ou avec autisme peinent à s’in- sérer sur le marché du travail – comme Clément, arrivé il y a six mois. En pleine découpe dans l’atelier de menuiserie, il s’arrête pour montrer fièrement une table d’écolier réalisée avec des palettes recyclées. Lui aussi confie se sentir « plus à l’aise » à l’Esat. Pourtant, comme une quin- zaine d’autres salariés parmi les 90 que compte la structure, il a émis le souhait de rejoindre le milieu ordinaire. Depuis 2018, les directives politiques imposent davantage d’ouver- ture vers l’extérieur, conformé- ment aux recommandations de la convention de l’ONU sur les droits des personnes han- dicapées. « Nous n’allons au forcing avec personne, il faut vraiment que ça vienne d’une envie, sinon ça ne marche pas, prévient cependant Charles- Henri Rey, le directeur de l’Esat de Châtillon. Notre objectif est d’accompagner les personnes dans leur projet professionnel, quel qu’il soit. » À l’autre bout de l’atelier de menuiserie, sur un grand éta- bli, Laurent, lunettes sur le nez, façonne avec minutie les décorations de Noël en bois, destinées aux entreprises mais également aux particuliers. Ses qualités manuelles l’ont conduit ici il y a trois ans. « J’ai eu un accident professionnel après avoir exercé mon métier pendant 20 ans, témoigne cet ancien dessinateur industriel. Peut-être ai-je une fragilité mais mon métier m’a rendu malade. J’ai vécu des moments un peu durs, mes collègues de l’époque aussi, se souvient-il. Moi, j’ai craqué, peut-être que, psychologiquement, je n’étais pas assez fort pour tenir… » Depuis, l’Esat lui a permis de « repartir sur des bases saines. Il n’y a pas de pression, pas de méchanceté », apprécie ce quinquagénaire qui suit un pro- gramme de réinsertion dans le milieu ordinaire avec une coach qui l’aide à rédiger son CV et à préparer ses entretiens. Laurent projette de se reconvertir dans le domaine de l’animation, mais il reste lucide. « Il ne suffit pas d’aimer les enfants, il faut aussi savoir s’en occuper, être atten- tif », tempère-t-il. Ses prochains stages devraient lui permettre de vérifier si ce métier lui cor- respond avant de préparer le brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (Bafa) et de trou- ver un nouveau poste. Une autre étape dans laquelle l’accompa- gnement est essentiel. « Le handicap psychique peut engendrer des peurs chez les employeurs, on peut com- prendre qu’ils soient prudents, reconnaît Charles-Henri Rey. Il y a un travail de sensibilisation à faire. » Dans cet objectif, la Fondation des Amis de l’Atelier a lancé un événement en 2018 sur le modèle du Duoday. Duo2 Mais à l’inverse d’un salarié d’entreprise conventionnelle qui accueille une personne en situa- tion de handicap, le Duo2 pro- pose aux salariés du milieu ordinaire de venir à l’Esat par- tager une journée avec l’un de ses travailleurs. Ces initiatives « permettent de casser les bar- rières », selon Charles-Henri Rey, qui mise aussi sur une mon- tée en puissance de la formation des travailleurs. Depuis qu’il est directeur, deux salariés ont été embauchés en CDI dans des restaurants clas- siques. Eddy, qui travaille sur les espaces verts, espère lui aussi poursuivre son parcours à l’extérieur de la structure. « Dans une collectivité locale pour commencer », confie-t-il au retour de sa journée de tra- vail, bonnet vissé sur la tête. « Il faut bien s’envoler de l’Esat au bout d’un moment… », ajoute- t-il, heureux d’avoir « trouvé sa voie ». u NATHALIE TISSOT © N. TISSOT Clément, arrivé il y a six mois à l’Esat de Châtillon, a émis le souhait de rejoindre le milieu ordinaire. 6 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 —— LE FAIT —— DE LA SEMAINE
  • 7. TROIS QUESTIONS À « LE CENTRE DE GRAVITÉ DU TRAVAIL A CHANGÉ » LE CHIFFRE 24 % C’est, selon l’étude Ivalua (solutions cloud de gestion des dépenses), le pourcentage des fournisseurs basés en France, au Royaume- Uni, en Allemagne et en Suisse qui font l’objet d’évaluations régulières de leurs pratiques en faveur de la durabilité de la part des entreprises faisant appel à eux. En effet, seul un petit pourcentage de fournisseurs affirme que les entreprises leur appliquent systématiquement des mesures d’évaluation en fonction de critères environnementaux tels que la pollution de l’air (22 %), la pollution de l’eau (21 %) et la déforestation (20 %). L’étude souligne également que la plupart des entreprises ne communiquent pas à l’échelle de toute la chaîne d’approvisionnement pour encourager les initiatives écologiques. Et seul un fournisseur sur dix déclare que les entreprises incluent systématiquement des clauses relatives au développement durable dans les contrats et les accords. u Business partner au sein du cabinet de conseil One Man Support, Pierre-Yves Martin décrypte l’état d’esprit des nouvelles générations face au travail – que les employeurs doivent prendre en compte… Avez-vous, dans votre pra- tique, noté de nouvelles tendances chez les jeunes face à l’emploi ? Au-delà du fait que nombre de jeunes ont été victimes de la crise sanitaire, que ce soit dans la poursuite de leurs études, l’obtention d’un stage, la recherche d’un poste ou leurs premiers pas en télétravail, je constate qu’ils perçoivent le travail différemment. Non seulement veulent-ils du sens et un alignement avec leurs désirs, dont un meilleur équi- libre vie professionnelle/vie per- sonnelle, mais en plus, ils ont une démarche plus réfléchie. Autrement dit, ils se posent d’emblée la question : « Que va m’apporter ce poste pour la suite de mon parcours ? ». Il ne s’agit donc pas de salaire, ni même de possibilité d’évoluer dans l’entreprise, mais d’une vision à long terme, qui s’ins- crit en outre dans l’idée qu’une carrière sera forcément variée. Ce qui implique qu’ils ne font rien s’ils ne comprennent pas le « pourquoi », premièrement, et deuxièmement, que si le poste ne leur convient pas, ils s’en vont au bout de quelques mois. Cet état d’esprit, associé au fait qu’ils ne sont pas « car- riéristes », leur donne donc un levier de liberté impression- nant ! En somme, le centre de gravité du travail a changé. Qu’est-ce que cela implique pour l’employeur ? Pour l’employeur et le manager, cela signifie qu’il faut travailler la confiance, en laissant de l’autonomie aux jeunes, mais tout en les pilotant, puisqu’ils manquent d’expérience et sont conscients qu’ils doivent encore apprendre. Toute la question est d’atteindre cet équilibre. Mais il est clair que le manager devient presque un mentor pour ces jeunes, aux- quels il faut prodiguer conseils et recommandations de façon formelle, et donc créer les conditions pour que cela ait lieu. Les échanges formels, qui valorisent la collaboration et l’intelligence, sont clés. Les jeunes sont très friands de fee- dback constructif et rapide. Autre élément qui entre en jeu, la manière dont l’entre- prise est organisée pour par- tager l’information. Rompus aux médias sociaux, les jeunes veulent immédiatement avoir accès aux données. Ce qui signifie par exemple que les employeurs devront utili- ser les outils les plus agiles possible en ce qui concerne le recrutement, mais aussi à l’in- térieur de l’organisation, dans la vie de tous les jours. De quoi créer de nouvelles règles de communication, moins fon- dées sur la hiérarchie… Enfin, ce phénomène de l’immédia- teté se repère aussi dans la volonté des jeunes de voir des décisions prises rapidement. Et c’est là encore la hiérarchie qu’il faudra revoir, en faisant en sorte que les prises de décision soient plus proches de ceux qui expriment les besoins. Tout cela implique une nouvelle « discipline » pour l’employeur, n’est-ce pas ? Absolument ! C’est particulière- ment vrai en matière de réten- tion des talents. Les entreprises qui ne feraient pas, au quotidien, vivre les valeurs qu’elles mettent en avant dans leur communica- tion et leurs annonces de poste risquent de perdre rapidement les jeunes recrues, pour qui, de toute façon, la question de la période d’essai n’est plus un sujet. Et c’est particulièrement vrai pour les jeunes diplômés. Comme je le disais, s’ils ne sont pas satisfaits, ils quittent rapi- dement l’entreprise… C’est ce nouveau rapport au temps que les employeurs doivent com- prendre. Les jeunes ne veulent pas en perdre et sont capables, plus que les précédentes géné- rations, de se fixer des limites concernant ce qu’ils acceptent ou non. u PROPOS RECUEILLIS PAR LYS ZOHIN PIERRE-YVES MARTIN —— L’actualité —— n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 7
  • 8. Les entreprises sont notamment soucieuses de développer les compétences personnelles et les métiers des collaborateurs grâce aux outils numériques. P armi les bonnes résolu- tions déjà prises pour l’an prochain, 64 % des 2 500 managers RH interro- gés à travers le monde par la plateforme de coaching digital CoachHub ont déclaré vouloir préparer les collaborateurs aux nouvelles technologies en 2022. Au point que l’intégration de nouveaux outils digitaux est considérée comme une néces- sité, afin de répondre d’abord aux besoins des collaborateurs – et avant même de penser à l’amélioration de la perfor- mance… Des besoins qui, pour les Français notamment, se caractérisent par le fait que les salariés disent vouloir travail- ler autrement, dans le sillage de nouvelles habitudes adop- tées en télétravail ou en travail hybride. De même, ils ont une réelle volonté de changer de carrière ou d’avoir de nouvelles opportunités professionnelles dans les mois à venir. Dans ce contexte, la poursuite de l’adop- tion d’outils digitaux est essen- tielle, notamment pour ce qui est de la formation, et 93 % des managers français interrogés s’accordent à dire que la forma- tion est un axe stratégique clé et qu’il est indispensable d’adapter les programmes et le dévelop- pement de leurs collaborateurs au climat économique actuel et à leur demande de flexibilité. D’ailleurs, 30  % d’entre eux soulignent que les collabora- teurs déplorent un manque de formation et de perspectives d’évolution professionnelle… Selon CoachHub, l’adoption d’outils de développement tels que la formation en ligne et le coaching est en effet de nature à contribuer à l’amélioration de leurs compétences personnelles et métiers. Au-delà de l’accès à des for- mations digitales personna- lisées, plus généralement, en digitalisant, l’entreprise répond, selon le commentaire de l’étude, aux nouvelles exi- gences des collaborateurs  : flexibilité du temps de travail et équilibre vie professionnelle et vie personnelle, notamment. En outre, ajoute le commen- taire, en généralisant les outils digitaux pour des activités tels que le recrutement, l’entreprise en tire des avantages en termes de candidatures et réduit éga- lement la durée du processus. Enfin, la période d’intégration est facilitée par ces outils. Sans oublier, poursuit CoachHub, que la mobilité interne induite par l’adoption d’outils digitaux de formation favorise la réten- tion des collaborateurs tout en permettant d’accroître l’engage- ment de chacun. u L. Z. GESTION DES COMPÉTENCES LE SECTEUR RH EMBRASSE LA TECHNOLOGIE MOBILITÉ LES CADRES ET DIRIGEANTS SONT ENCORE PLUS SUSCEPTIBLES QUE LES AUTRES DE QUITTER LEUR EMPLOI La pandémie a donné la bougeotte aux salariés, et encore plus, selon l’étude Qualtrics, société spécialiste de l’expérience collaborateur, aux cadres et top managers. Alors que plus d’un tiers des salariés (35 %) déclarent qu’ils chercheront un nouvel emploi au cours des 12 prochains mois, cadres et top managers seraient 39 % à vouloir quitter leur employeur actuel. Recherche de davantage d’opportunités de développement, meilleur salaire ou poste moins stressant font partie des motivations mises en avant. Parmi les découvertes de l’étude, on voit que les femmes recherchent, dans l’ordre, un meilleur équilibre vie professionnelle/vie personnelle, un meilleur salaire et un poste offrant des évolutions de carrière, tandis que les hommes privilégient d’abord les possibilités d’évolution de carrière, l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle et enfin, un meilleur salaire. Pour ceux et celles qui sont à la recherche d’un nouveau poste, un « travail utile/qui a du sens » est considéré comme l’élément le plus important, tant pour les 18-24 ans (64 %) que pour ceux âgés de 50 ans et plus (59 %). Le moins important étant « la marque de l’entreprise », tant pour les 18-24 ans (8 %) que pour ceux âgés de 50 ans et plus (10 %). Enfin, lors du processus de recrutement, ce qui compte le plus aux yeux du candidat, c’est de sentir que son bien-être est une priorité pour l’entreprise. « Ces résultats confirment ce que nous avons déjà vu aux États-Unis, par exemple, où après un an et demi de Covid, des millions de salariés cherchent à renouveler leur expérience professionnelle en optant pour un changement d’employeur. Si les entreprises veulent éviter l’impact d’une Great Resignation à la française, il va falloir passer à un mode plus proactif pour retenir les collaborateurs, puis attirer différemment les talents en fonction de leurs attentes nouvelles. Ceci passe inéluctablement par une écoute plus assidue et ciblée des populations clés de salariés », conclut Douglas Rosane, directeur des solutions Experience collaborateurs chez Qualtrics France. u L. Z. —— L’actualité —— 8 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
  • 9. ÉMIRATS ARABES UNIS LACOMPAGNIE AÉRIENNE EMIRATES DÉROULE LE TAPIS ROUGE POUR RECRUTER Tandis que le transport aérien reprend, nombre de compagnies lancent des recrutements massifs. Pour se distinguer de la concurrence, Emirates, qui cherche 6 000 personnes (pilotes, personnel de bord, ingénieurs…), fait miroiter de multiples avantages aux candidats pour les inciter à rejoindre Dubaï. Les entretiens d’embauche ont lieu sur place, les frais de transport (en classe économique) étant payés pour le candidat et le conjoint. Les pilotes potentiels sont en outre accueillis à l’aéroport et amenés en voiture privée jusqu’au rendez-vous. Mais ce n’est pas tout, évidemment. Emirates s’engage à participer aux frais de scolarité des enfants, dans des écoles internationales, et même à transporter les enfants de la maison à l’école. Le personnel recruté bénéficiera aussi d’appartements ou de villas confortables, entièrement payés, et d’une prise en charge santé complète. Et enfin, pilotes et personnels navigants ne paient pas d’impôts sur leur salaire, qui s’élève, pour un capitaine, à quelque 14 000 euros par mois. u L. Z. ROYAUME-UNI PRÈS DE LA MOITIÉ DES JEUNES FILLES REFUSERAIENT DE TRAVAILLER POUR UNE ENTREPRISE QUI NE RESPECTE PAS L’ÉGALITÉ SALARIALE Alors qu’au Royaume-Uni, l’écart salarial hommes/femmes s’est accru cette année pour atteindre 11,9 % (contre 10,6 % l’an dernier), une étude du site d’offres d’emploi Indeed montre que seules 5 % des jeunes filles de 16 à 18 ans sont optimistes sur sa réduction, même si 61 % le jugent injuste… Elles ont en tout cas l’intention de veiller au grain, et même de refuser, pour près de la moitié (48 %) d’entre elles, de travailler pour un employeur qui ne respecterait pas l’égalité salariale lorsqu’elles chercheront un emploi. Les jeunes garçons interrogés ne sont que 32 % à déclarer qu’ils refuseraient de prendre un poste dans ces conditions. Et les jeunes filles sont également 55 % à avoir l’intention de faire des recherches sur ce sujet avant de postuler dans une entreprise (contre 34 % des jeunes garçons). u L. Z. JAPON LE GOUVERNEMENT DEMANDE AUX ENTREPRISES DE VEILLER AUX DROITS HUMAINS Alors que les grandes entreprises nipponnes ont été critiquées pour le recours à des sous- traitants faisant travailler, en Chine ou ailleurs, des salariés, notamment au Xinjiang, dans des conditions indignes, le conseiller spécial du nouveau Premier ministre a exprimé récemment sa volonté de sensibiliser ces entreprises aux droits humains et aux risques encourus en cas de non-respect de ces droits. « Certains pays en Europe incorporent les droits humains dans les contraintes faites aux entreprises et les États- Unis interdisent l’importation de produits qui auraient été fabriqués dans des conditions de non-respect des droits humains, a-t-il déclaré. Cela doit aussi faire partie des préoccupations des entreprises japonaises. » Déjà, les sociétés cotées ont été enjointes de respecter les droits humains dans le cadre de leur bonne gouvernance par les autorités boursières. u L. Z. CHINE QUAND UNE ENTREPRISE DIT QUE LES HEURES SUPPLÉMENTAIRES, C’EST GÉNIAL… Elle se retrouve sous le coup d’une enquête de la part des autorités chargées de veiller au bon respect du Code du travail… C’est en effet ce qui est arrivé à la société Inspur, spécialisée dans la tech. Elle a pendu des bannières rouges dans ses locaux, déclarant que les heures supplémentaires, c’était génial, et que de toute façon, elles ne pouvaient être considérées comme « vraies » que si tout le monde en faisait… Une autre bannière enfonçait le clou en déclarant « Il travaille plus, je le fais aussi. Personne ne peut y échapper ! », de même que : « Si vous avez du temps, travaillez plus ! » Les photos de ces bannières ont fait le tour des réseaux sociaux et suscité non seulement une levée de boucliers de la part des internautes, mais aussi une enquête de la part des autorités locales, dans le Shandong (province de l’est de la Chine) où la société est basée. Les autorités communistes cherchent en effet depuis quelque temps à enrayer cette culture des heures de travail à rallonge, connue sous le nom de 996, pour des horaires de 9 heures du matin à 9 heures du soir, six jours par semaine, face à la révolte des jeunes, notamment dans la tech, et de plusieurs cas de décès dus au surtravail. Les salariés d’Inspur ont confirmé à la presse que non seulement ils n’étaient pas rémunérés pour leurs heures supplémentaires, mais qu’en plus, ces heures étaient comptabilisées dans le cadre de leur revue de performance annuelle… La chaîne de télévision CCTV, qui reflète l’opinion du parti communiste, a même déclaré qu’Inspur était le symbole de cette culture désormais illégale et pervertie et que la plupart des salariés voulaient davantage de temps de loisir… u L. Z. —— L’actualité —— INTERNATIONALE n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 9
  • 10. L es propositions de formations tou- chant aux soft skills, ces compé- tences humaines et comportementales de plus en plus prisées par les employeurs, abreuvent les boîtes mail. Un exemple ? « Apprendre à bien communiquer pour s’adapter à un nouveau type de prise de parole virtuelle », illustration parmi d’autres de ce que les entreprises attendent de leurs cadres. «  Le dirigeant doit travailler ses soft skills pour convaincre à l’oral à travers un écran, déclarent ainsi les experts du cabinet spécialisé en stratégie orale Whistcom, Depuis plusieurs années, les compétences comportementales sont mises en avant – sans toutefois avoir pris le pas sur la tradition bien française des diplômes et des hard skills. En rendant plus nécessaires l’adaptabilité et l’autonomie de tous et notamment des managers, la crise pourrait changer la donne. COMPÉTENCES LA CRISE A RENFORCÉ L’IMPORTANCE DES SOFT SKILLS POUR LES CADRES qui propose cette formation. Les évolutions du travail pro- voquées par la crise sanitaire ont fait des soft skills des apti- tudes clés dans le recrutement de nouveaux collaborateurs aux postes de direction. » « Avec l’augmentation du télé- travail et du management à distance, les entreprises ont besoin de collaborateurs ayant des compétences de gestion du temps et des priorités, capables d’auto-motivation et sachant bien communiquer, résume pour sa part Adrien Scemama, dirigeant de Talent.com, une plateforme qui référence plus de deux millions d’offres d’emploi. Sur notre moteur de recherche, huit offres sur dix citent les soft skills. » Avec trois compétences principales demandées : le sens de l’or- ganisation, la motivation et la rigueur. « Les compétences valables il y a cinq ans sont aujourd’hui dépassées. Il faut donc être doté de soft skills pour être capable d’apprendre à s’adapter  », explique-t-il. Sans oublier qu’au-delà de cela, managers et dirigeants doivent non seulement passer en mode hybride mais aussi répondre à l’incertitude et s’adapter à des marchés changeants… Et si, comme le souligne Michel Barabel, maître de conférences à l’université Paris Est et cher- cheur à l’Institut de recherche en gestion, « le constat est vrai pour les ouvriers qui doivent savoir s’adapter face à la robo- tisation, il l’est davantage pour les cadres, dans un monde où les collaborateurs sont plus éduqués qu’il y a 50 ans et où le management est plus par- tagé et ne s’appuie plus sur le seul niveau hiérarchique ou les compétences techniques. » Pour les cadres experts, « il LE POINT SUR 10 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
  • 11. faut davantage de capacité de veille, d’apprentissage, d’esprit critique, de faculté à collabo- rer et à adopter des postures réflexives », analyse-t-il. Cela dit, « la progression des soft skills dans le recrutement des cadres n’est pas nouvelle, ni une conséquence de la crise de la Covid-19, poursuit-il. Elle est enclenchée depuis plus de 20 ans. Et même si la France a un vrai attachement aux hard skills, l’équilibre est en passe d’être modifié. » Expertise ou potentiel ? De fait, « le diplôme prend moins de place car le recru- teur cherche plutôt un poten- tiel qu’une expertise, constate Adrien Scemama. Les soft skills sont de ce fait de plus en plus recherchées lors des recrute- ments et sont même parfois décisives. » Les critères de sélection et les attentes des deux parties, candidats et employeurs, ayant évolué avec la crise sanitaire, « le matching est plus compliqué », ajoute-t-il. Afin de trouver la perle rare dans un marché de cadres en pénurie, les recruteurs cherchent donc à détecter ces nouveaux atouts chez les can- didats. En témoigne la floraison de terminologies pour les dési- gner : qualités professionnelles ou personnelles, compétences non académiques, compétences non cognitives ou socio- émo- tionnelles, traits de personnalité, compétences comportemen- tales… « Associées initiale- ment aux emplois de service dont les compétences ne sont pas toujours garanties par un diplôme ou une qualification, comme les métiers du net- toyage, elles se sont progressi- vement étendues à l’ensemble des emplois, y compris ceux de l’industrie, notamment du fait de la diffusion des nouvelles technologies et de l’implica- tion croissante du client dans le processus de production », confirme la Dares dans son étude Les critères de sélection du candidat : un résumé du pro- cessus de recrutement selon le métier (étude de Bertrand Lhommeau et Véronique Rémy, septembre  2021). Avec une réelle différence pour les postes de cadres… Le diplôme et l’expérience per- mettraient donc toujours de faire le premier tri de candi- dats, mais « l’intelligence arti- ficielle (IA) et les données sont en développement et la crise de la Covid-19 a poussé à utili- ser des outils pour créer de la data numérisée, afin de faire du prédictif et de l’analyse. Après les assessment centers (centres d’évaluation) et les mises en situation, on voit ces pra- tiques arriver dans le recrute- ment », constate en effet Michel Barabel qui nuance cependant immédiatement son propos : « Il y a une inertie, le changement se fera par paliers, nous n’en sommes qu’au tout début. » Contrats collectifs En parallèle, une autre méthode de recrutement se fait jour afin de mieux déceler les soft skills du candidat : le recrutement collégial. « Avant, le recrute- ment était l’affaire des RH et du manager. Désormais, on voit des entretiens avec les collè- gues, des cafés plus informels… cela privilégie le matching culturel », complète-t-il. Ainsi de la société Michel Augustin, dont les recrutements prévoient plusieurs temps informels, voire des projets de travail pour tester la compatibilité du candidat avec ses futurs collègues. « Certaines entre- prises recrutent aussi non plus en fonction des compétences individuelles du candidat, mais des besoins en compétences de l’équipe, ajoute Michel Barabel. Par exemple, pour un poste RH, plutôt que de chercher un rem- placement en poste à poste, on va regarder les compétences sociologiques ou psycholo- giques ou en IA du postulant pour voir ce qu’il peut appor- ter à l’équipe. » Sony a, dans cette optique, expérimenté les recrutements par équipe, avec des contrats de travail collectif. « Les entretiens, CV et systèmes de recommandations existent toujours, constate cependant Michel Barabel, mais ils ne cor- respondent plus vraiment à ce que l’on veut vérifier… » L’ascension d’acteurs de l’em- ploi comme Welcome to the Jungle, qui mise sur le collec- tif, le confirme : les entreprises s’attachent à cette dimension : le candidat rejoint une équipe plus qu’une entreprise. Il doit savoir s’y intégrer et apporter sa plus-value – qui ne peut plus seulement être technique… u LUCIE TANNEAU Trois compétences principales sont demandées : le sens de l’organisation, la motivation et la rigueur. n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 11
  • 12. INTERVIEW « ON ATTEND DAVANTAGE DE VALEUR AJOUTÉE DE LA PART DES CADRES » LAURENCE DOUMBA-KINDA, CONSULTANTE ▼ Laurence Doumba- Kinda est consultante relations entreprises au centre Apec de Lyon. Elle accompagne les organisations de la région dans leurs recrutements et la gestion des compétences. Et elle nuance l’importance des soft skills… Constatez-vous une impor- tance grandissante des soft skills dans le recrute- ment des cadres, depuis le début de la crise sanitaire, notamment ? On en parle de plus en plus, mais nous avons, à l’Apec, fait une étude sur l’évolution des pratiques dans le recrute- ment, et ce n’est pas encore un comportement mis en pra- tique. La crise a changé les habitudes sur les entretiens en visio, mais la sélection reste fondée sur le parcours professionnel et les compé- tences techniques. Dans notre dernière étude trimestrielle, à la question du principal cri- tère qui a mené à l’embauche du dernier cadre recruté, les entreprises répondent (plu- sieurs réponses possibles) à 46 % : le parcours profession- nel, à 45 % : les compétences techniques, à 30 % : la motiva- tion, à 27 % : l’adéquation à la culture d’entreprise, à 23 % : le diplôme, puis viennent les soft skills avec l’adaptation, le relationnel… Pourquoi, alors, parle-t-on autant des soft skills ? Elles sont importantes mais, en temps de crise, les entreprises ont besoin de se rassurer, de sécuriser leurs recrutements et elles recherchent l’opérationnalité immédiate. Elles se tournent donc vers le diplôme ou les expériences dans le même domaine. Vers quelque chose qu’elles connaissent, en somme. C’est plus compli- qué avec les soft skills car ce sont des compétences trans- versales, liées au relationnel, au cognitif et en conséquence, plus difficiles à évaluer. Mais les soft skills apparaissent si un recruteur hésite entre deux candidats. Ce qui était déjà le cas par le passé… Avant, les compétences étaient un « stock » : elles servaient pendant des années. Aujourd’hui, l’OCDE nous d i t q u e l e s compétences techniques ont une durée de vie de deux ans de demi, ce qui en fait un « flux ». Si les compétences hard restent clés, surtout pour les cadres experts, les entreprises ont aussi besoin d’autres dimen- sions, le digital, la gestion de projet, le juridique, la com- préhension des enjeux de l’entreprise… Cela ne suffit plus d’être expert d’un métier, dans l’univers très changeant que l’on s’apprête à connaître, les employeurs ont besoin de collaborateurs hyperadap- tables, capables de résoudre des problèmes de plus en plus complexes, même si les com- pétences techniques et le par- cours professionnel restent. Pourquoi est-ce davantage vrai pour les cadres ? Les fonctions se sont com- plexifiées et l’on attend de ces profils une forte valeur ajou- tée, notamment pour trois pro- fils : informatique, commercial et technico-commercial et R D. On voit aussi de plus en plus d’organisations matri- cielles où tout fonctionne en mode projet, ce qui implique que les cadres doivent savoir gérer des projets, communi- quer, travailler en équipe. Le geek derrière son écran est une image révolue, même un bon développeur doit savoir écouter et traduire la demande de son client. Et pour la pre- m i è r e f o i s , en France, le n o m b r e d e cadres dépasse c e l u i d e s ouvriers, du fait de la robo- tisation. Les soft skills permettent d’occu- per de nouveaux postes, que l’on ne connaît pas encore for- cément – d’où l’importance de les avoir ou de les développer. Comment évoluent les pra- tiques de recrutement ? Les entreprises font appel à l’IA à travers des outils – nombre d’entreprises et de start-up s’y sont d’ailleurs engouffrées pour proposer des solutions permettant de déce- ler les soft skills – ou passent par de la mise en situation concrète en entretien pour voir comment les candidats réagissent. Recruter est un métier et les recruteurs font passer des tests de person- nalité. À l’Apec, nous nous formons et nous formons les entreprises pour qu’elles amé- liorent la qualité de leur ques- tionnement et leur analyse des réponses des candidats afin de mieux les cerner. Même si la dimension des soft skills reste difficile à repérer, surtout si l’on n’est pas spécialisé… Cela donne-t-il davantage de chances à des profils différents ? Tout à fait. Cela peut ouvrir des portes à des individus qui ont changé de métier, n’ont pas le bon nom ou la bonne adresse, et permet d’éviter les clones. Et quand la diver- sité est bien gérée, on a une entreprise performante. Si on cherche un comptable, il doit savoir faire un bilan, évi- demment, mais s’il sait com- muniquer, il parlera aussi autrement aux commer- ciaux… Cela doit être un pro- jet d’entreprise, poussé par le dirigeant. Il y a des entreprises qui recrutent sans CV. J’y crois car le monde est multiple, et pour le comprendre, il faut des talents multiples au sein des entreprises. u PROPOS RECUEILLIS PAR LUCIE TANNEAU « Les employeurs ont besoin de collaborateurs hyperadaptables. » —— LE POINT SUR —— 12 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
  • 13. RECRUTEMENT MANPOWER LANCE UN RÉSEAU D’AGENCES DÉDIÉES AUX CADRES ▼ En mars 2021 ouvrait à Paris la première agence Manpower spécialisée dans le recrutement des cadres. Un tournant pour le groupe. D’ici à 2023, 300 consultants devraient être dévolus à ce marché qui représente la moitié des besoins de recrutements en France. C ols blancs et cols bleus. Les deux mondes se sont toujours côtoyés, mais pour la première fois en 2020, la population des cadres a dépassé celle des ouvriers. Et de la même manière, les pro- fessions intermédiaires sont plus nombreuses que celles d’employés. Cette nouvelle donne du marché du travail complexifie grandement le recrutement des cadres, en particulier pour des profils en pénurie. « Parmi les entreprises qui ont l’intention de recruter un cadre en 2022, 66 % anticipent des difficultés, rapporte le dernier baromètre Manpower France. Et 60 % d’entre elles identifient ces difficultés comme étant liées au faible nombre de candidatures ou de profils disponibles. » Le recrutement devient donc un enjeu, pour trouver le bon pro- fil et le garder… Conséquence de cette situation, Manpower travaille depuis deux ans à l’ouverture d’un réseau spé- cialisé sur le recrutement des cadres. Depuis mars 2021, le projet s’est concrétisé et une première agence a ouvert ses portes à Paris. Depuis, ce sont 45 agences spécialisées « experts et cadres » qui ont été implantées dans les quinze plus grandes métropoles françaises. Quelque 100 consultants y tra- vaillent et 200 autres devraient les rejoindre dans les deux ans à venir, avec également l’ouver- ture de trois autres agences, à Rennes, Orléans et Dijon. Détecter les soft skills Leur spécificité ? « Ils sont for- més à détecter les soft skills et à rechercher ainsi des compé- tences différentes par rapport à nos agences plus anciennes (700  agences et 70  cabi- nets de recrutement géné- ralistes sur les cols bleus) », explique Véronique Kirchner, la directrice France du réseau Manpower experts et cadres. Ces nouvelles soft skills ? « La capacité d’analyse et d’innova- tion avant tout, car la crise a souligné ce besoin de trouver des solutions. Un cadre doit savoir fixer les priorités et identifier les problématiques de manière englobante », ana- lyse-t-elle. « L’adaptabilité et l’apprentissage en continu sont aussi nécessaires pour s’adapter au sein d’entreprises dans lesquelles les plans à dix ans, voire à cinq ans, ont dis- paru… », poursuit-elle. Et si la directrice reconnaît que cette situation vaut pour tous les salariés, manutentionnaires ou ouvriers compris, pour les cadres, confrontés aux problé- matiques de management, de gestion de projets, d’environ- nement… « c’est encore plus vrai et ils doivent prendre l’habitude de se former en continu ». « Le mix entre hard et soft skills est plus complexe pour les cadres », résume de son côté Véronique Kirchner. Le groupe Manpower a donc développé plusieurs « labels » correspondant à des secteurs d’activité et à des métiers (finance et comptabilité  ; fonctions dirigeantes et sup- ports ; ingénierie et techni- ciens de l’industrie ; digital et IT ; commerciaux, mar- keting et communication ; ressources humaines et juri- dique  ; bâtiment, travaux publics et immobilier ; bio- technologie, chimie-pharma- cie et santé ; supply chain), afin de démarcher les candi- dats puis de les proposer aux entreprises de manière proac- tive. « Dans ces métiers, pour les fonctions de cadres, nos consultants vont rechercher des compétences nouvelles par rapport à nos anciennes agences, poursuit Véronique Kirchner, car les entreprises veulent des collaborateurs hyperspécialisés dans leurs métiers, mais avec les soft skills en plus. » Une plateforme d’évaluation Ces consultants utiliseront leur expérience pour les détecter, en entretien ou grâce à des tests. Ils ont aussi à leur dis- position une plateforme d’éva- luation pour repérer les soft skills, avec des tests pour les- quels ils ont été habilités afin de les faire passer aux candi- dats. « Pour ce réseau, nous avons recruté des consultants différents qui connaissent à la fois les métiers, la partie com- merciale et le recrutement », poursuit la directrice. Depuis mars 2021, 450 cadres ont été placés chez des clients, notam- ment dans la construction, l’IT et la R D. « Les clients nous demandent aussi beaucoup de candidats en prospection et en finance », ajoute Véronique Kirchner. Enfin, les postes de commerciaux en sortie de crise sont aussi très attendus, avec des compétences d’adaptabi- lité et de vision beaucoup plus larges qu’il y a deux ans. u L. T. Le groupe Manpower a développé plusieurs « labels » correspondant à des secteurs d’activité et à des métiers. —— LE POINT SUR —— n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 13
  • 14. EMPLOI NESTLÉ RECRUTE… EN MANGEANT Les collaborateurs de la pépite marseillaise, spécialisée dans les applications e-santé, ont mis en place, de manière informelle, les « jeudis sportifs » au sein de l’entreprise. Objectif : décompresser tout en renforçant la cohésion et en découvrant de nouvelles activités sportives. B each volley, crossfit, foot salle, pétanque, ski nautique… depuis le printemps dernier, chez Exolis, des collaborateurs volontaires peuvent faire du sport ensemble, une fois par mois, à travers une nouvelle activité à chaque fois. À l’origine de cette initiative, baptisée « jeudis sportifs », deux collaboratrices, désireuses, à l’issue des confinements suc- cessifs, de retrouver la cohésion en faisant du sport ensemble tout en découvrant la région : Amina Bellakhdar, responsable du développement commercial et ancienne handballeuse de haut niveau, et Ludivine Protin, responsable communication et marketing au sein de cette start-up marseillaise de près de 30 collaborateurs, née il y a six ans, qui développe des solutions connectées dans le domaine de la santé. Le principe de ces moments sportifs  ? «  Tous les mois, nous bloquons un jeudi, sur le temps de midi. Ceux qui sont intéressés s’inscrivent. L’important est de proposer tout type d’activité pour que les sportifs comme les non-spor- tifs puissent y participer s’ils le souhaitent », explique Ludivine Protin. Avec pour résultat de multiples bienfaits… « sur la santé, bien sûr, physique comme mentale, notamment en période charnière pour décompres- ser », estime Amina Bellakhdar. Surtout, « cela permet de voir les collègues sous un nouvel angle et aussi de découvrir les talents puisque certaines per- sonnes se “lâchent” un peu plus lors d’événements sportifs. De même, c’est agréable de se pro- mener et de découvrir la ville de Marseille, dont ses spots de pétanque, pour nous qui sommes nombreux au sein de l’entreprise à venir d’une autre région. » À ce jour, l’ensemble des colla- borateurs de la jeune entreprise ont participé aux jeudis sportifs au moins une fois – y compris les dirigeants, pourtant peu sportifs. Mais ils ont trouvé leur compte dans la pétanque et les escape games… D’autant qu’ils voient cette initiative d’un bon œil. « L’un des fondamentaux de notre structure est de lais- ser la place aux salariés dans la construction de ce qu’est l’en- treprise, y compris dans son savoir-faire, son savoir-être, ses valeurs, affirme Nicolas Binand, cofondateur d’Exolis. C’est donc tout naturellement que nous avons accueilli ces envies d’organiser et de fédérer autour du sport. » Une manière, entre autres, de connecter les différents pôles au sein de la société et ainsi d’éviter les silos. u NATASHA LAPORTE SANTÉ L’ÉQUIPE EXOLIS SE MET AU SPORT Le groupe a récemment organisé « Les tablées du mieux manger », réunissant candidats et collaborateurs pour penser un avenir plus sain. Il cherche à recruter 1 600 jeunes et à proposer plus de 3 700 stages ou alternances d’ici 2025 en France. A près avoir dévoilé sa nouvelle marque employeur au prin- temps 2021, Nestlé France ouvre les portes de son nouveau siège social, à Issy-les-Moulineaux (92), aux jeunes talents et leur offre, autour d’un petit-déjeuner ou d’un goûter, l’occasion de découvrir son savoir-faire et ses engagements en faveur des colla- borateurs, des consommateurs et de l’environnement. La première édition de ces « Tablées du mieux manger », le 27 octobre dernier, a permis d’accueillir quelque 70 candidats sélectionnés et répartis en plusieurs groupes, accompagnés par un ambassa- deur Nestlé. Ateliers culinaires, discussions autour des engage- ments du groupe en matière de RSE et job dating étaient au pro- gramme. Cette nouvelle manière de recruter et d’interagir avec les jeunes générations illustre la volonté de Nestlé de leur donner la parole, d’encourager le partage d’idées et d’attirer des profils qui veulent faire bouger les lignes pour ce qui est de l’alimentation de demain. Emploi des jeunes « L’employabilité des jeunes et la réponse à leur quête d’engage- ment et de sens sont au cœur de nos enjeux au quotidien. Aussi, nous avons souhaité repenser la manière de les impliquer et de leur faire découvrir les coulisses d’une entreprise qui œuvre col- lectivement pour l’alimentation de demain. Nous avons offert à cette nouvelle génération la pos- sibilité de vivre, le temps d’une journée, l’expérience du collec- tif One Nestlé, aux côtés de nos collaborateurs », précise Aadil Bezza, directeur général des ressources humaines de Nestlé en France. D’autant que le groupe a pour objectif, dans le cadre de son engagement en faveur de l’em- ploi des jeunes, de recruter 1 600 personnes de moins de 30 ans, qui rejoindront les 10 000 collaborateurs de Nestlé dans l’Hexagone, et de proposer, en outre, plus de 3 700 stages ou alternances d’ici 2025 en France. De nouvelles éditions des « Tablées du mieux man- ger » sont déjà prévues en 2022 afin de continuer à cultiver cette proximité entre candidats et collaborateurs. La France est le 1er marché européen de Nestlé, le 3e dans le monde et 70 % des matières premières utilisées dans ses usines sont françaises, précise le groupe. u L. Z. —— sur le terrain —— 14 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
  • 15. À l’aide de témoignages vidéo, le géant qui fabrique et distribue des produits et des matériaux de construction lance une campagne mondiale visant à intégrer quelque 36 000 collaborateurs, dont 7 500 en France, en 2022. A vec une crois- sance du chiffre d’affaires total de 21 % sur les huit derniers mois, Saint-Gobain, présent dans 72 pays, se porte bien. Cette forme resplendissante, qui atteste de la résilience du groupe dans sa traversée de la crise sanitaire, lui permet d’envisager l’avenir avec opti- misme. D’où le lancement en ce mois de novembre d’une campagne mondiale de recru- tement en ligne en sept langues qui s’étale sur neuf mois dans les réseaux sociaux. Objectif ? Susciter des vocations et suffi- samment de candidatures pour intégrer quelque 36 000 collabo- rateurs en 2022, dont 7 500 en France. Tous les métiers liés à la construction et à la rénovation du bâtiment sont concernés : conseillers de vente, respon- sables d’agence, magasiniers RECRUTEMENT SAINT-GOBAIN MET SES SALARIÉS À CONTRIBUTION POUR ATTIRER DE NOUVEAUX TALENTS SATISFACTION GARANTIE Alors même que la crise sanitaire a contraint au passage rapide en télétravail dans de nombreux pays et à une communication avec les équipes via des outils digitaux, l’enquête de satisfaction des collaborateurs réalisée à l’automne 2020 montre que 80 % des collaborateurs du groupe se sentent impliqués dans la définition de leurs objectifs. En outre, 78 % ont confiance dans le management et 85 % reconnaissent que leur manager promeut le travail d’équipe et la collaboration. Par ailleurs, plus de 80 % des collaborateurs estiment que leurs conditions de travail sont bonnes et que l’équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle est satisfaisant. Enfin, l’indice d’engagement qui agglomère quatre thèmes (fierté de travailler pour Saint-Gobain, capacité de rétention à court terme, recommandation de Saint-Gobain comme employeur, sentiment d’être apprécié et valorisé pour son travail) atteint un score de 83 %, en amélioration de quatre points par rapport à l’enquête réalisée en 2019. Sur ce dernier élément, le fabricant et distributeur de matériaux de construction (via sa filiale Point P) affiche un score qui se situe « une dizaine de points » au-dessus de la moyenne des secteurs distribution et industrie, assure Claire Pedini. u caristes, spécialistes au ser- vice des clients pour développer des solutions de construction durable, ingénieurs process, techniciens et ingénieurs de maintenance, ingénieurs indus- trie  4.0, conseillers service logistique, ingénieurs R D et techniciens de recherche… Paroles de salariés Intitulée « 1 mois = 1 métier », cette campagne valorise les métiers en donnant la parole à des salariés qui racontent leur quotidien professionnel ainsi que le sens et la motivation qu’ils y trouvent. Constituée de vidéos d’une minute et de bannières qui pointeront sur les premières, la campagne s’inscrit dans la « reality-pub » puisqu’elle mobilise de vrais collaborateurs. « Nous sommes partis de l’idée que nos salariés sont les mieux placés pour van- ter les carrières que propose le groupe », résume Claire Pedini, directrice générale adjointe et directrice des ressources humaines et de la responsa- bilité sociale d’entreprise. Et pour cause, Saint-Gobain, qui emploie à l’échelle mondiale plus de 167 000 salariés et suit, à travers un baromètre Ipsos, leur satisfaction, s’enorgueillit de bons résultats (lire encadré). Pour la campagne de recrute- ment, des entretiens ont donc été organisés avec une cen- taine de collaborateurs dans le monde afin qu’ils partagent leur engagement au service des clients, de l’innovation et du développement durable. « Le bâtiment représente 40 % des émissions de gaz à effet de serre et nos solutions permettent de les réduire. Aujourd’hui, 72 % de nos ventes contribuent à cet effort. Nous mettons ces argu- ments en avant dans les entre- tiens de recrutement et lors de la présentation de nos métiers, car cela contribue à l’attracti- vité de notre marque employeur, surtout auprès des jeunes », poursuit Claire Pedini. Centre de formation Il s’agit là d’une cible convoitée, les moins de 26 ans constituant en France près de la moitié des 7 500 recrutements prévus en 2022. Et pour les attirer, Saint- Gobain ne se limite pas à la communication. Le groupe a ainsi créé en 2020 son propre centre de formation d’appren- tis (CFA), afin de former des jeunes aux métiers du groupe. Cette année, le CFA a accueilli 125 candidats : 100 candidats dans la filière commerce et mar- keting et 25 candidats dans la filière maintenance industrielle. L’ambition est de porter à 250 le nombre d’apprentis formés par le CFA maison chaque année, à horizon de trois à quatre ans. u FRÉDÉRIC BRILLET —— sur le terrain —— n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 15
  • 16. Votre livre se focalise sur les mutations affectant les salariés en CDI. Pourquoi ce choix ? Il faut en effet rappeler que neuf personnes en emploi sur dix sont salariées, dont une majorité en CDI. Le salariat stable connaît des mutations significatives qu’il s’agit d’appréhender dans cet ouvrage. C’est ce que je nomme le nouvel esprit du salariat dans une référence transparente au Nouvel Esprit du capitalisme de Luc Boltanski et Ève Chiapello. Ces auteurs constatent que le capitalisme contemporain exige une implication des salariés que la contrainte hiérarchique et la motivation matérielle ne suffisent pas à susciter. Il a donc fallu forger toute une idéologie à même de susciter cet engagement. Idéologie que j’appréhende dans mon livre à travers l’étude empirique des évolutions des systèmes de rémunération. Concrètement, ce nouvel esprit du salariat favorise l’avènement d’un travailleur autonome et responsable. L’autonomie au travail n’est pas accordée, mais exigée des salariés, qui doivent s’impliquer aussi fortement au travail que s’ils travaillaient pour leur propre compte. Avec tout ce qui s’ensuit en matière de rémunération variable. Comment en est-on arrivé là ? Jusque dans les années 1970, la norme est celle d’un salaire de base fixe et collectif, reposant sur les grilles de classification. Il est régulièrement augmenté, sous la double mécanique de l’an- cienneté et des hausses générales de salaires. Dans les années 1980, on observe une tendance à l’individualisation des salaires et, à partir des années 2000, à un mouvement de complexification et de diversification des pratiques de rémunération. Dorénavant, les salariés perçoivent à la fois des éléments fixes et variables, individuels et collectifs. La complexification et la diversification des pratiques de rémunération s’accompagnent par ailleurs d’un affaiblissement des traditionnelles augmentations générales des salaires, une pratique caractéristique des Trente Glorieuses. Dans Dans son essai Le Nouvel Esprit du salariat, récompensé du Prix du livre RH 2021, Sophie Bernard se penche sur les mutations du salariat en CDI, où prévalent désormais autonomie et rémunération variable. SOPHIE BERNARD - ENSEIGNANTE ET CHERCHEUSE « LE VARIABLE BROUILLE LA FRONTIÈRE ENTRE TRAVAIL SALARIÉ ET INDÉPENDANT » parcours Sophie Bernard est professeure de sociologie à l’université Paris Dauphine et chercheuse à l’Irisso (Institut de recherche interdisciplinaire en sciences sociales) qui opère dans le champ de la science politique, de la sociologie et de l’économie. Elle est également membre junior de l’Institut universitaire de France et a publié Travail et automatisation des services (Octarès, 2012) et Le Nouvel Esprit du salariat (PUF, Humensis, 2020). u © DR LE GRAND ENTRETIEN 16 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
  • 17. ce nouvel âge du salariat, une part de plus en plus grande des rémunérations échappe à la régulation de branche. Plus encore, la part individualisée des rémunérations finit par se réduire à une négociation directe avec le supérieur hiérarchique. Les managers ont alors intégré à leur batterie d’outils managériaux ces différents dispositifs de rémunération, collectifs et individualisés, réver- sibles et irréversibles, dans des agencements complexes, usant de la part variable comme d’un levier pour mobiliser les salariés. En les enjoignant de « faire leur salaire », on les responsabilise pour obtenir leur implication et on les persuade que, tels des travailleurs indépendants, ils ne s’inscrivent pas dans un lien de subordination vis-à-vis de l’employeur, mais travaillent pour leur propre compte. Les primes variables sont ainsi justifiées au motif qu’elles permettent d’établir des inégalités « justes » entre salariés, en fonction de leur mérite et de leur implication. Longtemps opposés au partage des bénéfices, les patrons promeuvent aujourd’hui l’intéressement, la participation et l’actionnariat salarié. Qu’est-ce qui explique ce revirement ? Les dirigeants d’entreprise ont changé d’avis car ces disposi- tifs permettent de rendre le salaire partiellement flexible. Des enquêtes démontrent d’abord que le principe de non-substitution des primes d’intéressement aux salaires fixes n’est pas toujours respecté. Ensuite, le régime fiscal et social de ces dispositifs variables est très avantageux pour les employeurs et pour les salariés. Les patrons ont donc tout intérêt à développer la part variable. En outre, les salariés sont plutôt favorables à ce système censé récompenser la performance individuelle, d’autant que le développement de la part variable et de l’autonomie vont de pair. Avec la croissance de l’autonomie, le contrôle ne disparaît pas mais change de forme, au travers de l’autocontrôle, du contrôle par les objectifs, par les indices de satisfaction des clients, par les entretiens individuels d’évaluation, par tout un ensemble d’indi- cateurs quantitatifs censés mesurer la performance des salariés. Ce n’est plus tant l’exécution du travail qui est contrôlée que les résultats. Ces stratégies patronales visent à l’euphémisation du lien de subordination, favorisant de la sorte le passage du contrôle à l’autocontrôle, de l’exploitation à l’auto-exploitation. Vous dressez une typologie de salariés relevant de ce nouvel esprit. Qu’est-ce qui les rassemble et les distingue ? Tous ces salariés se perçoivent comme individuellement respon- sables de leurs résultats, ce qui a pour conséquence de susciter une forte implication au travail. Mais ils se distinguent par la nature des variables qu’ils perçoivent et la part que ceux-ci prennent dans leur rémunération totale. L’enquête menée sur le partage de bénéfices – intéressement, participation, actionnariat salarié – dans une entreprise de la grande distribution permet de faire émerger la figure du « salarié associé », qui se caractérise par une forte intégration dans l’entreprise et dans le collectif de travail. Parce qu’il est souvent actionnaire, il se considère responsable des résultats de l’entreprise et a le sentiment que sa rémunération reflète son engagement au travail. À l’inverse, lorsque le partage des bénéfices se transforme en partage des risques, le salarié prend conscience de la faiblesse de sa rémunération et de son incapacité à l’augmenter. Vous évoquez aussi le « salarié méritant » rencontré dans la banque… Dans cet univers, les primes sur objectifs responsabilisent les salariés sur leurs résultats et les incitent à faire plus. Leur mise en œuvre pose néanmoinsl’épineusequestiondescritèresd’évaluationmobiliséspour établir des inégalités « justes ». Pris dans des contraintes budgétaires etdesconsidérationsmorales,lesmanagersenchargedelesdistribuer se voient en réalité dans l’incapacité de respecter l’idéal méritocra- tique qui fonde les primes sur objectifs. En résulte une opacification des critères de répartition qui donne le sentiment aux salariés que ces primes sont distribuées « à la tête du client ». Le « salarié quasi indépendant » renvoie enfin à des populations de commerciaux… Ces salariés payés à la commission entretiennent une forte proximité avec les travailleurs indépendants. Comme eux, ils bénéficient d’une grande autonomie au travail et se perçoivent comme responsables de leurs résultats. Très attachés à cette forme de rémunération, ils voient l’incertitude salariale qui l’accompagne comme le prix à payer pour la liberté dont ils disposent. En quoi ce nouvel esprit du salariat précipite-t-il une « déstabilisation de la condition salariale » ? Avec le déploiement des formes de rémunérations variables et indivi- dualisées, les salariés se trouvent confrontés à l’incertitude de leurs revenus qui peuvent chuter à tout moment. Responsabilisés sur leur salaire,c’estdorénavantàeux,etnonplusàl’employeur,d’assumerles risques du marché et de déployer des stratégies pour y faire face et sta- biliser leur condition. Dès lors, les régulations collectives susceptibles d’encadrer ces pratiques se révèlent inopérantes. Ce processus lèse les salariés les plus démunis et notamment les femmes, pour diverses raisons. D’abord, les politiques salariales sont moins avantageuses dans les emplois qu’elles occupent majoritairement. Moins enclines que leurs collègues masculins à solliciter leur supérieur pour négocier une augmentation, elles sont en outre oubliées lors de la distribution des primes. Enfin, du fait de l’inégale répartition des tâches domes- tiques et parentales, elles sont considérées comme moins disponibles et jugées de ce fait moins « méritantes » que leurs collègues masculins. Ces rémunérations variables déstabilisent par ailleurs la condition salariale en brouillant la frontière entre travail salarié et indépendant. D’un côté, les salariés doivent « faire leur salaire », ce qui rapproche leur condition de celle des travailleurs indépendants. De l’autre, la condition des « nouveaux » indépendants tend à les rapprocher des salariés. Ainsi, les chauffeurs Uber, bien qu’indépendants, voient leur activité encadrée et contrôlée par la plateforme. On assiste ainsi à l’expansion d’une zone grise entre indépendance et salariat. Il n’en demeure pas moins une forte aspiration à l’autonomie chez les salariés. Comment concilier cette aspiration avec les droits et la protection sociale ? Derrière cette demande d’autonomie s’exprime une critique légitime du salariat, trop associé à un excès de hiérarchie et de contrôle. Pour autant, le développement d’une société de petits entrepreneurs indé- pendants ne paraît pas souhaitable car source de précarité. C’est aujourd’hui la condition salariale qui protège et garantit le mieux les droits des travailleurs et travailleuses. Des combinaisons favorisant l’autonomie et préservant les droits et les protections associés à la condition salariale demeurent à inventer. u PROPOS RECUEILLIS PAR FRÉDÉRIC BRILLET n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 17
  • 18. CERTAINS SECTEURS MANQUENT DE MAIN-D’ŒUVRE ÉTRANGÈRE LES CHIFFRES 37,8 heures C’est la durée moyenne hebdomadaire du travail dans les conventions collectives de l’Union européenne à 27, en 2020. La France et l’Allemagne se situent toutes les deux en bas du classement avec le même nombre d’heures : 35,6 heures. La Grèce, la Croatie et Malte sont dernières avec 40 heures. u 76 % C’est la part des employeurs confrontés quotidiennement aux lacunes en orthographe et en expression de leurs équipes, selon un sondage Ipsos pour le projet Voltaire, d’octobre 2021. Les employeurs « se trouvent confrontés quotidiennement aux lacunes de leurs équipes, avec des répercussions très importantes sur leur crédibilité et leur efficacité professionnelle et, par conséquent, sur la réputation, la productivité et même la performance financière des entreprises », indique ce baromètre. u En plus d’être illégales, les discriminations sur le marché du travail entraînent des coûts économiques sur l’ensemble de l’économie, indique une note de la Direction générale du Trésor à Bercy, le 16 novembre 2021. Qu’elles soient fondées sur le sexe, l’origine, la religion, le handicap ou l’âge, elles induisent plusieurs effets néfastes. Si des personnes discriminées obtiennent un emploi inférieur à leur niveau de qualification, alors des emplois ne sont pas occupés par les personnes les plus qualifiées. De la même façon, les discrimina- tions qui écartent les individus des postes peuvent réduire le taux de participation des populations discriminées au marché du travail et la taille de la population active. En conséquence, la résorption des discriminations aurait des effets vertueux. Les scénarios testés par France Stratégie produisent un effet sur le PIB à long terme compris entre +3,6 % (égalisation des niveaux de rémunération entre les différentes populations considérées) et +14,1 % (égalisation des rémunérations, des taux d’activité, du nombre d’heures travaillées et des niveaux d’éducation des différents groupes). u A. R. 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0 35 30 25 20 15 10 5 0 L’un des discours économiques hostiles à l’immigration consiste à dire que les travailleurs étrangers prennent des postes aux autoch- tones. Faux, répond le Conseil d’analyse économique (CAE) dans une note de novembre 2021. Les statistiques de l’Insee et du minis- tère du Travail montrent que « les secteurs les plus concernés par le recours aux travailleurs immigrés en période précrise figurent également parmi ceux dont les entreprises éprouvent le plus de difficultés de recrutement ». C’est par exemple le cas du bâtiment, de l’hôtellerie-restauration, des transports et du tourisme et de l’informatique. Les métiers pénibles, aux contrats précaires et au niveau de qualification relativement faible, sont les plus concernés. En raison de la crise Covid-19, la chute de l’immigration observée, notamment celle de l’immigration professionnelle, « peut expliquer en partie ce surcroît de difficultés de recrutement qui pénalise la reprise économique, aux côtés d’autres explications comme l’in- certitude vis-à-vis de la situation sanitaire ou une intensité des embauches très forte une fois les principales mesures sanitaires levées ». Le CAE estime qu’il existe des secteurs sous tension « pour lesquels le soutien des travailleurs immigrés n’est pas suffi- sant ». Il lui apparaît « certainement utile de faire davantage appel à l’immigration pour pourvoir des postes dans les secteurs de la banque-assurance, de l’électricité et, dans une moindre mesure, du commerce ». u ALAIN ROUX Répartition des catégories socioprofessionnelles parmi les immigrés en emploi Source : Insee, recensement de la population 2017 ; traitement : Dares. LES RÉSORPTIONS DES DISCRIMINATIONS AUGMENTERAIENT LE PIB DE 3 % À 14 % Écarts de salaire entre les hommes et les femmes (2017) Source : Insee, panel tous salariés du secteur privé. Écarts liés à la répartition genrée des postes Écarts pour un même poste et dans un même établissement 16,8 % 5,3 % Ouvriers Employés Professions intermédiaires Cadres et professions supérieures Artisans, commerçants, chefs d’entreprises Agriculteurs exploitants 29 % 29 % 17 % 16 % 8 % 0 % —— LES CLÉS —— TENDANCE ÉCO 18 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
  • 19. NOMINATIONS CDC HABITAT CATHERINE CHAVANIER, DRH Ingénieure diplômée de l’École nationale de l’aviation civile et titulaire d’un master en négociations et relations sociales, Catherine Chavanier est nommée directrice des ressources humaines de CDC Habitat. Entrée chez Air Inter en 1990, elle est nommée en 1995 adjointe au chef du département de l’escale d’Orly, en charge des ressources humaines. Deux ans plus tard, elle rejoint la direction générale de l’exploitation « sol ». En 2000, au sein d’Air France, elle devient cheffe d’escale à Montpellier puis, en 2006, cheffe du projet « Cible avion » avant d’être nommée responsable du recrutement en 2007, puis responsable diversité en 2011. Un an plus tard, elle accède au poste de directrice du centre d’expertise et de services partagés RH. Elle est nommée directrice des ressources humaines d’Air France KLM Martinair Cargo en 2016 et de Radio France en 2018. u RADIO FRANCE MICHEL CASCIANI, DRH Titulaire de plusieurs maîtrises (économie, sociologie et droit du travail) ainsi que d’un DESS en ressources humaines, Michel Casciani est nommé directeur des ressources humaines de Radio France. Il sera également membre du comité exécutif et du comité de direction. Sa carrière commence en 1988 aux Nouvelles messageries de la presse parisienne. En 2005, il est nommé directeur des ressources humaines et membre du comité de direction. Trois ans plus tard, il intègre le groupe Presstalis au poste de directeur des ressources humaines. Il met en œuvre une stratégie en phase avec l’évolution déclinante du marché et la stratégie de l’entreprise. En 2020, il va gérer le redressement puis la liquidation judiciaire du groupe Presstalis. La même année, il devient conseiller en affaires sociales à la direction générale et membre du comité exécutif de France Messagerie, la structure qui a succédé à Presstalis. u KOMPOSITE BLANCHE GOURDON, RESPONSABLE DU PÔLE RESSOURCES HUMAINES Diplômée de l’EMLV en gestion des ressources humaines, Blanche Gourdon est nommée responsable du pôle ressources humaines de Komposite, un spécialiste des infrastructures IT. Sa carrière commence en 2014 chez Afocal, puis elle rejoint Patrim One Assurances en 2016 au poste d’assistante marketing avant d’intégrer Intermed Asia en 2018 au poste de sales and marketing executive. La même année, elle est nommée chargée de recherche et de recrutement chez Jouve, avant de devenir un an plus tard chargée de recrutement et de formation. En 2020, elle rejoint Komposite pour prendre en charge le poste de responsable des ressources humaines. En 2021, le groupe Komposite a réalisé un chiffre d’affaires de 22 millions d’euros. u 30 novembre 2021 Le test and learn dans la RH : une approche pour booster l’innovation collaborative Webinaire. Le test and learn – mise en lumière et analyse de l’échec là où les concepts traditionnels ne se focalisent que sur les succès – connaît un fort essor dans les organisations, porté par la période d’incertitude que nous connaissons actuellement. Pour mieux en cerner les contours et ses périmètres d’utilisation dans l’entreprise, Adilson Borges, auteur d’un livre sur le sujet et directeur du learning chez Carrefour, propose un exposé en trois parties, de 16 h 30 à 17 h 30, avec des exemples concrets d’entreprises utilisatrices et un temps de questions-réponses : • Qu’est-ce que le test and learn ? • Peut-il être appliqué partout, dans tous les secteurs de l’entreprise ou seulement dans les équipes qui sont en mode agile ? La RH peut-elle utiliser le test and learn, et comment, pour gagner en efficacité et en impact au sein de l’organisation ? Inscription : https://webikeo.fr/webinar/le-test-learn-dans-la-rh-une- approche-pour-booster-l-innovation-collaborative-en-entreprise-8 30 novembre 2021 Managers de proximité : connaître et reconnaître leur travail à l’aune de la crise Paris. À l’occasion de la publication en mai 2021 du numéro 42 de la revue Sociologies pratiques, ayant pour titre « Manager en proximité : quel travail ? », le groupe Entreprise et Personnel, qui vient également de publier une étude sur le management de proximité, organise une rencontre-débat de 18 heures à 20 heures autour des thématiques suivantes : • Qu’est-ce qu’un manager de proximité de nos jours ? • Quelles compétences sont attendues d’eux ? • Comment leur permettre de bien jouer leur rôle ? Inscription : https://bit.ly/3D1Pqjh Lieu : Entreprise et Personnel, 1 bis avenue de la République, 75011 Paris. 1er  décembre 2021 Les ruptures amiables du contrat de travail et actualités Lyon. Le cabinet d’avocats Cornet Vincent Ségurel (CVS), en présence de Delphine Monnier, avocate directrice, Aurélie Maître et Laura Cammarata, de l’équipe Droit social, anime un petit- déjeuner de 8 heures à 11 heures, au cours duquel un focus sur les ruptures amiables du contrat de travail sera proposé. Il sera également question du télétravail (comment le pérenniser ?) et d’un tour d’horizon des actualités législatives et jurisprudentielles du dernier trimestre 2021 (indemnité inflation, nouvelles compétences environnementales du CSE, repas d’affaires et notion d’abus manifeste, charge de la preuve en matière d’heures supplémentaires). Inscription : https://www.eventbrite.fr/e/billets-matinee-droit-social-focus- sur-les-ruptures-amiables-et-actualite-2021-205776421817 Lieu : Wojo Lyon grand Hôtel Dieu, coworking, bureaux et salles de réunion, 4 place Amédée-Bonnet, 69002 Lyon. l’agenda —— les clés —— n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 19
  • 20. QUEL AVENIR POUR LES ASSOCIATIONS ? Fragilisées par les appels d’offres, comment les associations peuvent-elles préserver leur militantisme local ? Doivent-elles changer de gouvernance ? Quel monde associatif demain ?, ouvrage collectif et pointu, éclaire sans fard ces enjeux. C’est un monde dont on parle peu : celui des petites associations, dans la culture, l’éducation populaire ou l’aide sociale. La crise sanitaire a mis en évidence leur capacité à organiser en urgence la solidarité locale, dans l’aide alimentaire, notamment. Pourtant, aucune mesure gouvernementale n’a été prise en leur faveur, alors que « beaucoup de ces organisations participent pourtant de l’intérêt général ». Sur 1,5 million d’as- sociations en France, 12 % emploient des salariés. Pourquoi un tel manque de reconnaissance ? Dans cet ouvrage engagé, une vingtaine de chercheurs et de responsables d’associations interrogent l’ave- nir de celles-ci, confrontées à de fortes baisses de financements. Ces structures militantes risquent-elles de perdre leur âme avec une « marchandisation ram- pante » ? Les auteurs font état de leurs difficultés, les appels d’offres publics remplaçant les subventions, en chute libre. Avec le risque, selon eux, de perdre en liberté d’action : « Quand la survie de leur structure est en jeu et que des postes de salariés sont menacés, les dirigeants peuvent faire preuve d’une certaine frilosité » pour exprimer leurs désaccords politiques face aux élus locaux, remarquent-ils. L’autre problème tient à l’essor de l’innovation privée : entreprises à vocation sociale, fondations de grands groupes, contrats d’impact social, cette « idéologie néolibé- rale » pourrait affaiblir le petit monde associatif, déjà fragilisé par la fin des contrats aidés. Trouver de nouvelles dynamiques Le livre ne s’enfonce pas dans ce scénario pessimiste, ni dans l’idéalisme du monde associatif. Sortir de cet étau politique ne sera pas simple, mais ces experts soulignent « qu’une critique des réalités associatives s’avère nécessaire ». Que ce soit dans l’action sociale ou la solidarité, toutes les associations « ne sont pas parfaites. » Les chercheurs évoquent la nécessité « d’initier » d’autres pistes de financements. Mais jugent aussi que la gouvernance associative doit changer : « Jusqu’où les employeurs (bénévoles ou professionnels) peuvent-ils inventer de nouvelles modalités de travail plus démocratiques », reflétant leurs valeurs ?, se demandent-ils. Il va falloir, selon eux, « élargir la délibération aux citoyens comme aux salariés et aux bénévoles ». Immenses défis, vus par de bons spécialistes. u LYDIE COLDERS « Quel monde associatif demain ? », sous la direction de Patricia Coler, Marie-Catherine Henry, Jean-Louis Laville et Gilles Rouby, éditions Eres, 192 pages, 13 euros. et aussi... Santé psychologique au travail et Covid-19 Directions et DRH auraient tort de négliger les conséquences psychologiques de la pandémie sur le moral des salariés. Cette crise « a provoqué un stress » dont il faudra tenir compte, selon les consultants en risques psychosociaux auteurs de ce guide. À grand renfort d’études, leur livre analyse finement le vécu (positif ou négatif) du télétravail depuis 2020 par les salariés et les managers. Si, aujourd’hui, le travail hybride s’installe, les auteurs listent des pistes pour améliorer un télétravail durable : respect des horaires, équité du dispositif ou limitation du numérique face à la fatigue cognitive. Si le bureau restera « le pilier essentiel », les consultants invitent à repenser l’organisation du travail, alors que la crise Covid-19 a entamé la motivation des salariés. Dans l’idéal, le présentiel doit servir à « cimenter les pratiques de travail » et à mieux travailler – « pas à effectuer des tâches télétravaillables »… Un bon décryptage. u Christophe Nguyen, Jean-Pierre Brun, éditions De Boeck, 240 pages, 24,90 euros. Préparer et conduire un 360° efficace Certaines multinationales continuent d’utiliser le 360° pour développer les compétences et le leadership des managers. Cet outil d’évaluation comportemental est controversé, complexe, « mais souvent mal utilisé » par les RH, estime Karine Arnaud, coache spécialisée. Son guide, méthodique et truffé d’anecdotes, donne des conseils avisés pour que cette démarche (guidée par les RH et un « coach interne ou externe ») ne reste pas lettre morte. Si l’identification des besoins est bien cernée, la communication précise sur les attendus du 360° pour les participants (mise en confiance) serait trop négligée, selon elle. Son manuel vivant donne un très bon aperçu de la conduite de cet « outil de feedback » et de l’implication nécessaire de tous à la restitution (sensible) des résultats. Si le manager en arrive à partager les conclusions, un maître-mot pour l’auteure : qu’il choisisse « des axes simples », à mettre en œuvre à court terme. u Karine Arnaud, éditions Gereso, 188 pages, 23 euros. À LIRE —— les clés —— 20 - Entreprise Carrières - n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021
  • 21. CHANGER DE VIE… CELA S’APPREND Q ui n’a jamais rêvé de changer de vie… profes- sionnelle  ? De se reconvertir ? Et donc de pouvoir se former afin de mettre d’autres cordes à son arc ? La crise sanitaire a renforcé ces aspirations : pour 57 % des cadres, la situation sin- gulière de ces derniers temps a été l’occasion de réfléchir très sérieusement à leurs projets professionnels. Dans ce sens, la création en 2014 du compte personnel de formation (CPF) – issu d’un accord interprofessionnel, il faut le rappeler, aussitôt consa- cré par la loi – a été une grande réforme. Non parce que celui qui écrit ces lignes y a apporté sa modeste contribution, mais parce qu’elle a – enfin – instauré la portabilité des droits à la for- mation, qu’avant on perdait d’un coup chaque fois que l’on quittait un emploi. Cette grande réforme s’est poursuivie : l’accès au CPF est aujourd’hui facilité par une plateforme digitale « Mon compte formation », formidable outil – dont on fête les deux ans d’existence – qui permet à chacun, quasiment en un clic, de choisir sa formation et sur- tout, de créer son parcours de formation en fonction de ses contraintes professionnelles et personnelles. En quelques années, le CPF a contribué à mettre au cœur des débats la question des compé- tences et de l’employabilité. Un pari risqué car sans certitude au départ, mais un pari en passe de réussir. Le CEP – Conseil en évolution professionnelle – est un des outils de cette réussite, mais attention à ne pas en faire un point de passage obligé ! Alourdir inutilement l’accès à la formation de celles et ceux qui savent parfaitement ce qu’ils ou elles veulent, saturer l’offre de CEP alors que pour beau- coup – cadres ou non – une réflexion sur son évolution pro- fessionnelle ne passe pas obli- gatoirement par la mobilisation de son CPF serait un double contresens. Mais si la question des compé- tences et de l’employabilité se pose aux actifs, elle concerne aussi au premier chef les entre- prises, car elle est un outil stra- tégique. À deux titres au moins. La formule n’est pas très origi- nale, mais elle est vraie : notre monde va vite, de plus en plus vite. Et dans ce contexte de mutations accélérées - tech- nologiques, économiques et réglementaires -, investir dans la formation de ses sala- riés est pour une entreprise le meilleur moyen de préparer l’avenir, d’adapter les collabora- teurs aux transformations des métiers actuels, et plus encore de les former à ceux de demain. Pour dire les choses autre- ment : pour être performant, il est souvent mieux de « géné- rer » en interne de nouvelles compétences plutôt que d’aller les chercher sur un marché de l’emploi de plus en plus tendu. Aujourd’hui, il est difficile, voire très difficile, de recruter sur les métiers en émergence, par exemple ceux liés à la data ou à l’usine du futur. Former en interne, c’est valo- riser ses propres ressources. Valoriser dans tous les sens du terme y compris mettre en valeur. Car permettre à cha- cun de gagner en compétences, d’évoluer dans son métier ou de faire évoluer son métier est une source de motivation et de fidélisation. Investir dans la formation, c’est éviter que des collaborateurs ayant le sen- timent d’avoir fait « le tour de leur poste » aillent chercher ailleurs un surcroît d’intérêt. Alors que seulement 22 % des cadres ont déjà eu recours à leur CPF, il est donc important de les accompagner dans leurs réflexions. L’Apec s’y emploie. Investir dans les compétences, c’est aussi – deuxième com- posante stratégique – investir dans la performance sociale de l’entreprise. La formation est le moyen le plus sûr de main- tenir dans l’emploi des salariés potentiellement fragilisés par les évolutions du marché du travail. C’est notamment le cas des cadres seniors, ressources que les entreprises ont tout intérêt à valoriser, comme le préconisent tous les rapports qui se succèdent sur le sujet. Car changer de vie, et de fonc- tion, cela s’apprend. Et cela s’apprend à tous les âges. ♦ —— chroniques —— n°1552 du 29 novembre au 5 décembre 2021 - Entreprise Carrières - 21 Gilles Gateau directeur général de l’Apec