Cahier annuel sur les grandes subcultures de la société française actuelle et leur capacité à créer des mouvement sociétaux, à faire bouger les lignes plus ou moins durablement, à challenger les marques. - 07/2019
3. The first step - especially for
young people with energy
and drive and talent,
but not money - the first step
to controlling your world
is to control your culture.
To model and demonstrate
the kind of world you
demand to live in.
To write the books.
Make the music.
Shoot the films.
Paint the art.
Chuck Palahniuk
Auteur, Fight Club
6. Culture, subculture, tribu ?
Méthodologie
Carte de navigation entre les cultures
Les Nouveaux Nomades
Les Living in the Clouds
Les Locatifs de vie
Les Yukaphiles
Les Natures sur mesure
Les Maisons passives
Les Slow travellers
Les Animal rights activists
Les Villeculteurs
Les Menus à la carte
Nos sources
Contacts
Nos outils exclusifs
9. La Culture est une notion pleine d’ambiguïtés comme le soulignait
Dick Hebdige dans son texte fondateur des Cultural Studies en 1979,
Sous-Culture, le sens du style. Il convoque d’ailleurs de nombreux
auteurs pour définir la Culture et en retient particulièrement deux,
T.S. Eliot et Jean Genet.
« En premier lieu, c’est Eliot qui nous offre notre définition de base
du concept de culture, à savoir toutes les activités et les intérêts
caractéristiques d’un peuple en quoi il perçoit une cohérence
signifiante, l’intégralité d’un mode de vie. (…) Mais c’est Genet
qui fournit une métaphore et un modèle car il a fini par apprendre
à vivre de façon stylée. Genet est une subculture à lui tout seul.
Tout au long du livre, je me suis servi de sa vie et de son œuvre comme
modèles pour construire la notion de style dans les subcultures.
J’ai essayé de mettre en lumière le droit qu’ont les subalternes
à faire quelque chose de ce qui a été fait d’eux pour reprendre la
formule de Sartre – d’embellir, de décorer et de parodier leur position
de subalternes et y compris, dans la mesure du possible,
de la reconnaître et la dépasser. » Et Dick Hebdige de conclure :
« Par conséquent, si les subcultures sont bien des formes d’expression,
ce qu’elles expriment est, en dernière instance, une tension
fondamentale entre les détenteurs du pouvoir et ceux qui sont
condamnés à des positions subalternes et à des existences de seconde
classe. »
Une culture ou subculture est donc toujours une forme de
résistance. À la culture dominante. Une subculture est bien entendu
sociale : elle possède ses propres conventions, valeurs et rituels,
mais elle peut également être immergée ou absorbée.
C’est cette dernière précision qui fait d’une subculture,
selon Ken Gelder, auteur de Subcultures, une contre-culture.
Dans son ouvrage, il détermine 6 grands traits d’une Subculture :
• Une relation négative au travail
• Des relation ambigües avec la société de classes
• Une référence à des territoires ou à des espaces publics,
plutôt qu’à des propriétés
• Une appartenance à un groupe au-delà de la famille
ou du foyer domestique
• Une démarcation par le style
• Un refus de la banalité de la vie ordinaire et de la massification
À cette définition qu’il nous apparaît important de rappeler après
le mouvement des Gilets Jaunes et la bataille des rond-points,
nous avons également fait appel à la définition Maffesolienne de tribu
En effet, une tribu est plus intégrative qu’une subculture et incarne
une forme de sociabilité ouverte au sein de laquelle les individus
circulent, passant d’un groupe à un autre, d’une conception identitaire
à une autre. Une définition qui correspond également très bien à notre
société actuelle, où les jeunes générations particulièrement n’hésitent
pas à être multi-identités dans un monde protéiforme qui évolue
très rapidement. Si le monde change, pourquoi pas eux ?
La notion de Culture est donc très ambiguë mais c’est aussi ce qui fait sa richesse. C’est sur ce terrain de jeu
unique qu’Initiative a décidé d’accompagner ses clients dans le monde entier. Parce que nous croyons en
la force de ces Culture, Subculture, Contre-Culture ou Tribu à créer des mouvements sociétaux, à faire bouger
les lignes, à challenger les marques mais aussi à faire mieux contribuer la communication à leurs succès.
Enrichissement de l’esprit par des exercices intellectuels ; Connaissances dans un domaine particulier ;
Ensemble des phénomènes matériels et idéologiques qui caractérisent un groupe ethnique, une Nation,
une civilisation, par rapport à un autre groupe ou à une autre nation ; Dans un groupe social, ensemble
des signes caractéristiques de comportement de quelqu’un (langage, gestes, vêtements,…) qui le différencient
de quelqu’un appartenant à une autre couche sociale que lui ; Ensemble de traditions technologiques
et artistiques caractérisant tel ou tel stade de la préhistoire. (Larousse)
Culture
Nom féminin
9
12. 12
LIFE CONTROL
HIPSTERISME
ANT
SURTOURISME
SOUPING
BUDGET PLANNING
E-SPORT
TINY HOUSE
LOW TECH
YOGA SKIN
FLEXITARISME
NOUVEAUX
NOMADES
AGRICULTURE URBAINE
CONSOMMATION RESPONSABLE
ÉTHIQU-OCOLOGIQUE
LOCATIFS DE VIE
OVER-CONTROLLER
DERNIER VERRE DE TA VIE
PROTÉINES VÉGÉTALES
MENU À LA CARTE
VILLECULTEURS
RÉPARATEURS
EN HERBE
NATURE
SUR-
MESURE
TH
JUSTICE FOR ANIMAL
ÉTHIQUE
AGRICULTURE VERTICALE AUTHENTICITÉ
MICRO-INFLUENCEURS
VIANDE ARTIFICIELLE
Tourisme expérientiel
Durabilité & Écologie
Sm
Avoir moins pour vivre mieux
Condition animale
Commerce de demain
Nouveau genre
No Waste
Bien manger
Retour à la naturalité
Fait moi-même
Le Slow
MADE IN FRANCE
PRODUITS FERMENTÉS
RÉGIME BIBLIQUE
Mode
JEUX VIDÉO
Co
Sport
Animal
Agriculture
No alcool
Hygiène & Beauté
Commerce
Écono
Habitat
Alimentation
Mode de vie
Voyage
LOCAL
MAISON PASSIVE
Les Locatifs de vie
Les Nouveaux Nomades
Les Slow travellers
Les Maisons passives
Le
Les Villeculteurs
Les Menus à la carte
Les Animal rights activists
Carte de navigation
entre les Cultures
13. 13
ANTICONSUM
ÉRISM
E
FORMES DE TRAVAIL
JOBBING
DÉVELOPPEMENT PERSONNEL
ESPACES DE TRAVAIL
MÉDITATION
GA SKIN
DIGITAL DETOX
BLOCKCHAIN
STUDYGRAM
HYPER-PERSONNALISATION
STORYLIVING
TRANSPARENCE
YUKAPHILES
NATURE
SUR-
MESURE
LIVING IN
THE CLOUDS
HENTICITÉ
LUENCEURS
Collaboratif
Nouveaux schémas familiaux
Smart
e de demain
Bien au travail
naturalité
Fait moi-même
Super Humains
ÉO
Couple & Famille
Beauté
Économie
Mobilité & City
Technologie
IA
Travail
Bien-être & santé
Les Living in the clouds
es
Les Natures sur mesure
Les Yukaphiles
TENDANCES
SPÉCIFIQUES ou
TRANSVERSALES
Thématiques
Phénomènes
Le lien entre les cercles
est associé au nombre de
verbatim en commun par
thème
La taille des cercles
dépend du nombre de
contenus web associés
L’analyse sémantique réalisée
par Synomia a donné naissance
à cette carte de navigation sur laquelle
gravite un phénomène central,
la durabilité.
Rien d’étonnant quand on retrace
les événements de l’année écoulée.
D’un été 2018 ravagé par la chaleur,
les incendies et la sécheresse
à un printemps 2019 où la fonte
des glaces au Groenland est gravement
inhabituelle, de la démission
du ministre de la transition écologique
à la vague verte des dernières élections
européennes, la prise de conscience
d’un destin planétaire commun
est en marche.
La durabilité est à l’origine de nombreuses
subcultures repérées dans ce premier
cahier culturel. Elles ont pour point
commun une forme plus ou moins
radicale d’Anticonsumérisme.
Et aux côtés de ce premier grand
mouvement culturel triomphant,
nous en avons décelé deux autres
à la fois complémentaires et opposés :
le souhait de reprendre le contrôle
sur sa vie -Life control- et la quête
d’un vrai absolu en risquant
la caricature -Hipsterisme -.
14. 14
MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 790
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 2
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 43 340
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +8%
Une soif de liberté,
un rejet de la
surconsommation,
une envie de reprendre
le contrôle de sa vie
en se libérant
des entraves
traditionnelles…
Autant de raisons
de choisir le nomadisme
comme mode de vie.
Plongée dans la vie
des Nomades modernes.
Entre rêves et réalités.
15. 15
Depuis plusieurs années, le nomadisme numérique est en
pleine croissance. S’il est difficile de donner des chiffres précis,
Clément Marinos, maître de conférence à l’Université de Bretagne
Sud, estime qu’il y a entre 250 000 et 500 000 Nomades numériques
dans le monde. « Nous sommes arrivés à ce chiffre en recensant
les groupes Facebook dédiés aux Nomades numériques et en se basant sur
des enquêtes menées dans les pays où se rend la majorité d’entre eux »,
précise t-il dans une interview au Temps.
Margaux quitte ainsi « sa maison au milieu des rizières à Bali
pour débuter sa journée avec une session de surf ou de yoga.
Puis, place au travail dans un espace de co-working ou chez des amis
jusqu’à 17 heures. » Une vie de rêve pour beaucoup d’entre nous.
Mais Margaux poursuit en soulignant que « ce n’est pas pour tout
le monde. Il faut savoir se débrouiller, être organisé et rigoureux,
se fixer des contraintes horaires, ne pas craindre le volet administratif.
Accepter aussi d’être dans le changement permanent et de perdre
ses repères. » Directrice d’un laboratoire de recherche à Harvard,
Beth Altringer confirme que nombreux Nomades numériques sont victimes
du mal du pays : « En tant que Nomade numérique, vous allez rencontrer
des gens pendant les un, trois, six ou neuf mois que vous passerez dans
un endroit. Mais fonder des amitiés solides prend du temps.
Avec des individus qui bougent sans cesse autour de vous et malgré
les nombreuses activités sociales qui ont lieu au sein des communautés
de nomades, vous pouvez vous retrouver à la fin de votre journée
sans personne pour vous remonter le moral ou à qui vous confier. »
Se retrouver face à soi-même est pourtant un des moteurs du
nomadisme. Dans un article du Télégramme, Marion, 28 ans, témoigne :
« Voyager m’a permis de voir que j’étais beaucoup trop focus sur mon métier et
que je laissais plein de choses de côté. Il y a des tas de trucs à faire dans la vie.
Je prends maintenant des cours de chant, je dessine. Voyager m’ouvre
l’esprit. » Administratrice de réseaux sociaux pour de nombreuses entreprises,
Marion a choisi de tester le nomadisme avant de se lancer totalement dans
l’aventure. Une semaine par mois, elle s’envole pour une ville en Europe,
travaille le matin et visite l’après-midi. Le constat ne s’est pas fait attendre :
« La première fois que j’ai expérimenté la chose, mes clients ne s’en sont
même pas rendu compte. Que je sois assise dans un parc à Porto, dans un
café d’Amsterdam ou dans mon bureau à Vannes, cela ne change finalement
rien à titre professionnel. En revanche, à titre personnel, c’est incomparable.
Si cela continue, l’année prochaine, j’allongerai les périodes et j’irai plus loin.»
À l’origine, ce sont les blogueurs de voyage qui ont grandement contribué
à ce changement de mentalité en montrant qu’il était possible de voyager
tout en gagnant sa vie. Aujourd’hui, ce phénomène concerne aussi bien des
freelances que des entrepreneurs, mais également des salariés qui peuvent
travailler de n’importe où, sans l’exigence de se rendre dans les locaux de
leurs entreprises. Très lié à l’essor du digital, le nomadisme concerne plus
particulièrement les métiers du web, même s’il a tendance à se diversifier ces
dernièresannées.LamajoritédesNomadesnumériquessontdestrentenaires,
qui après une première expérience professionnelle, veulent voyager
tout en travaillant. Ou l’inverse : travailler en voyageant. Bien souvent,
ils découvrent que leur projet a un nom en le pratiquant et constatent surtout
qu’ils ne sont pas seuls. Quand Marion a commencé à travailler à l’étranger
quelques jours par mois fin 2018, elle ne savait pas que le nomadisme
digital « avait un nom. En fait, il existe toute une communauté autour de
ça. Les gens partagent leurs expériences, leurs photos, leurs périples… »
En effet, les Nomades numériques s’adressent souvent à des agences,
qui pendant un an ou quelques mois, leur permettent de voyager tout en
conservant le confort nécessaire pour travailler. Ces programmes dénommés
Remote Year coûtent assez cher mais autorisent les Nouveaux Nomades
à larguer les amarres en toute sécurité. « Il y a une forme d’envie de
prolonger la vie étudiante, voire même peut-être aussi l’adolescence,
bien que l’on voit de plus en plus de couples avec enfants voyager de cette
manière. Ils se font leur expérience de backpacker tout en poursuivant leur
activité professionnelle. »
re
me
16. 16
La décision d’adopter ce mode de vie tient bien souvent aux problèmes
profondément enracinés dans le monde du travail en Occident
(présentéisme, harcèlements divers et variés, ambiance, intérêt du job,
hiérarchies multiples…). À la rentrée 2018, l’anthropologue et professeur
à la London School of Economics, David Graeber a d’ailleurs fait sensation
avec la sortie en France de son livre Bullshits Jobs, où il soulignait
le nombre croissant de salariés conscients de la faible utilité de leurs emplois.
Selon lui, la sentence des Bullshits Jobs est lourde : « Des millions de
personnes souffrent aujourd’hui d’un terrible manque de sens, couplé
à un sentiment d’inutilité sociale. » À la même époque, l’institut BVA
corroborait les dires de David Graeber, en affirmant que les français avaient
de gros doutes sur leurs activités ou celles de leurs collègues. L’étude mettait
notamment en avant que 78 % des salariés ont l’impression d’effectuer des
tâches inutiles, 73 % estiment que certaines fonctions existantes sont inutiles
pour la réalisation de leur mission, 64 % estiment que leur job consiste
parfois à résoudre des problèmes qui n’existent pas et 12% affirmaient que
leur propre métier était un boulot à la con.
Face à ce constat, le nombre de Nomades devrait donc croître dans
les prochaines années. Les espaces de co-working ont d’ailleurs explosé
en France avec 700 sites répertoriés fin 2018. D’après Regus, spécialiste du
co-working, le travail flexible devrait concerner environ 11% des emplois en
2030. Dans les entreprises, de nouvelles façons de penser les aménagements
des espaces de bureaux apparaissent pour tendre vers le bonheur
au travail : flex office , desk sharing , fab lab, workcafés… Pas sûr que ces
solutions redonnent du sens au travail. Ce qui est sûr, c’est que le travail au
sens de tourmenter est mort.
18. MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 4 878
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 7
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 985 820
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +39%
18
La maison intelligente n’est plus un objet de science-fiction
mais bien une réalité concrète. Avec de nombreux avantages
en terme d’économie, d’énergie, d’environnement,...
Et sans aucun doute, de nombreux questionnements
sur la place à donner à ces objets dans notre quotidien.
20. 20
Les spécialistes de l’habitat comme Legrand ou Somfy se lancent dans
l’aventure. Il y a un peu plus d’un an, au CES 2018, Legrand lançait son
programme d’interropérabilité Works with Legrand, avec l’objectif de connecter
40 familles de produits d’ici 2020. Le contrat était finalement déjà rempli
fin 2018 : son programme Eliot - des innovations qui permettent de relier
interrupteurs, prises électriques et autre vidéophones aux smartphones
et assistants vocaux - représente déjà un chiffre d’affaires de 635 millions d’euros,
soit plus de 10% des ventes du groupe. De son côté, Somfy, surtout connu pour
ses moteurs roulants connectés et portails, a décidé de s’ouvrir aux autres,
en intégrant le programme de Legrand ou en s’associant à Free afin de proposer
des fonctions domotiques dans la toute dernière Freebox Delta. Bref, le monde
des équipements domestiques connectés commence à ne former qu’une planète,
même si le protocole unique pour la maison connectée n’existe pas encore.
Mais la maison connectée n’est pas qu’alarme, chauffage ou volet roulant,
elle s’invite également dans de nombreuses autres pièces de la maison ou
auprès de nos meilleurs amis, les chiens et chats. Rien que la cuisine connectée
est un univers à part entière: mijoteuse intelligente, plaque de cuisson à induction
connectée, cafetière ou encore balance. Les fabricants l’ont bien compris
et lancent des produits de plus en plus futuristes à la recherche de la précision
extrême. Electrolux a imaginé une table de cuisson capable de surveiller au
degré près la cuisson des aliments, et Beko a lancé son premier lave-vaisselle
qui dose automatiquement les quantités de détergents selon le degré de saleté de
la vaisselle. En espérant que bientôt nous n’aurons plus besoin de nous inquiéter
de faire la vaisselle.
La chambre connaît également une petite révolution, tout particulièrement
ducôtédusommeil.Denombreusesapplications,braceletsoucapteursanalysent
les différentes phases de sommeil et nous proposent conseils et exercices pour
se préparer à aller dans les bras des Morphée. Sans oublier les lampes de couleurs
et d’intensités variables qui favorisent l’endormissement comme pour les bébés.
La start-up française Dreem propose un bandeau, qui placé la nuit sur le crâne,
analyse, dans un premier temps le sommeil de l’utilisateur, puis qui dans
un second temps, conseille, via l’application mobile le programme de sommeil
le mieux adapté.
Enfin, si ce n’est pas déjà fait, nos animaux de compagnie auront aussi
bientôt droit à la gamelle à reconnaissance faciale, à la litière bardée de
capteurs, ou encore au collier Bluetooth anti-aboiement. Selon l’Observatoire
des Français et de leurs animaux de compagnie, réalisé par Ipsos pour l’assurance
de Santé animale, SantéVet, les propriétaires d’animaux de compagnie sont de
plus en plus intéressés par les objets connectés afin de pouvoir mieux localiser
leur animal ou surveiller leur santé. Rassurants, ces accessoires intelligents
donnent le sentiment aux propriétaires de mieux comprendre leur animal, mais,
en réalité, ils ne sont guère mieux que les réseaux sociaux en entretenant une
illusion de proximité et de communication.
Mais l’entrée dans le concret de la maison intelligente commence
à soulever de nombreuses interrogations, notamment sur la protection des
données personnelles. D’après une étude d’OpinionWay pour l’ONG Internet
Society France, les Français et les objets connectés, 76% des citoyens pensent
que les objets connectés présentent un risque pour le respect de la vie privée
ou la protection des données personnelles et plus de la moitié des personnes
interrogées aurait davantage confiance en ces dispositifs s’ils disposaient d’un
label garantissant la protection des données personnelles et la sécurité de
l’usager. Il suffit d’avoir suivi la polémique autour du micro caché dans le robot
cuiseur de Lidl, pour se rendre compte de la méfiance grandissante des français
vis-à-vis des objets connectés.
22. 22
Depuis une dizaine d’années,
l’abonnement et la location
rencontrent un succès très net
en France et permettent
l’émergence de consommations
alternatives qui changent
le rapport à la possession.
Jusqu’à voir renaître certains
vieux concepts comme la consigne.
Bienvenue dans l’ère où jouir
d’un service prime sur le bien
et la possession.
23. Convaincre les gens à acheter toujours plus commence à buter sur
des limites, soulignait Philippe Moati, président de l’ObSoCo, lors de la
sortie du 4ème Observatoire des consommations émergentes en mars 2018.
En effet, d’après cette même étude, près d’un français sur 8 déclarent que
l’important est de pouvoir utiliser un produit plutôt que de le posséder,
62% achètent des vêtements d’occasion et plus de 20% pratiquent
occasionnellement l’emprunt de matériel, le glanage d’objets ou de meubles
sur le trottoir ou encore le covoiturage.
L’aspiration des Français à consommer différemment est bien réelle.
Ils prennent conscience que la propriété n’est qu’une modalité parmi
d’autres pour bénéficier d’un bien. Un phénomène que Chris Goodall,
économiste britannique, avait prophétisé dès 2011, lorsqu’il affirmait que la
Grande-Bretagne avait atteint un seuil maximum d’objets possédés par
habitant, avant de le voir décliner. Bref, un pic des objets ou Peak Stuff.
Un phénomène qui perdure et ce, au niveau mondial : en début d’année
2019, Bloomberg Businessweek faisait sa couverture sur le Peak Car, atteint
sous l’effet des nouvelles formes de mobilité qui rendent totalement
obsolète l’achat d’une voiture personnelle. D’ailleurs, les derniers chiffres
communiquésparlaFédérationdesconstructeursautomobilessontédifiants :
en 2017, la location avec option d’achat (LOA) a concerné 55% des
immatriculations de voitures particulières en France. Or, la plupart
des personnes qui ont recours à la LOA n’en profitent pas pour autant
pour devenir propriétaires de leur véhicule. Si la voiture individuelle
reste plébiscitée par les Français, sa symbolique s’est beaucoup érodée,
en devenant banale, source de corvées et de pollution.
Cette dynamique autour de nouvelles pratiques de consommation
s’affirme dans tous les secteurs de consommation, grâce notamment
au développement de la multiplication des formules d’abonnement.
En effet, 66% des français ont l’habitude de consommer des services
par abonnement, selon une enquête Harris Poll publiée début
mai 2019. Même si la France semble en retard dans l’économie de
l’abonnement dans le monde - sur les 13 pays analysés, la moyenne des
personnes consommant des services par abonnement s’établit à 77% -,
ce chiffre a bondi de +15 points en 5 ans. La culture et le divertissement sont
les principaux bénéficiaires de cet engouement : Netflix, Spotify, Amazon
Prime Video, Deezer sont devenus des incontournables dans les budgets
des Français, en lieu et place des DVD, CD... En début d’année, Netflix
a ainsi dépassé la barre des 5 millions d’abonnés en France.
Dans son dernier baromètre semestriel, Médiamétrie soulignait ainsi
que 30% des français utilisaient un service de vidéo en ligne sur abonnement,
soit près de 14 millionsde personnes.
Ce phénomène est également très net dans d’autres secteurs, comme ceux
de la décoration ou de l’habillement. Lancé dans un premier temps par
les startups, ce mouvement fait de plus en plus d’émules chez les distributeurs
et les marques de la grande consommation au luxe. Après avoir révolutionné
le marché avec ses meubles en kit bon marché, IKEA vient de se lancer
dans la location de meubles pour les particuliers et pour les entreprises.
Jusqu’alors réservée à des moments particuliers (déguisement, soirée,
mariage,…), la location s’ouvre de plus en plus aux vêtements du quotidien,
en proposant soit des abonnements soit une réservation à l’unité pour
une période donnée (The Closet, Panoply, Les Cachotières, Une Robe
Un soir,…). En 2018, Kering annonçait que le groupe testait un modèle
de vente par souscription alors même que le Groupe Galeries Lafayette
annonçait l’arrivée dans ses murs d’un stand Panoply, site de location
de vêtements de luxe. Aujourd’hui, c’est Urban Outfitters qui annonce
l’ouverture d’ici l’été de Nuuly, son service sur abonnement permettant
à ses clients de louer des vêtements. Côté chaussures, le groupe Eram vient
de se lancer et permet aux clientes de se marque Bocage de louer une paire
de chaussures pour 2 mois.
23
MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 388
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 0
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 5 210
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : -5%
ns
s
e.
25. 25
CURIOSITÉ
ÉVOLUTION AFFINITÉ
BIENVEILLANCE
APPARTENANCEORIGINE
STATUT
ACCO
MPLISSEMENT
HÉDONISME
OUVERTUROUVERTUREA
UCHANGEMENT OUVERTURGROUP
ORIENTED
OUVE
RTU
RCONSERVATISME
OUV
ERTU
RINDIVIDUALISME
Les ressorts de ce basculement vers de nouvelles valeurs de consommation ?
Une défiance croissante des consommateurs vis-à-vis des grandes marques et
des lobbys industriels, la prise de conscience des ravages environnementaux
de l’hyperconsommation. Si la déconsommation reste pour nombre
de Français une réalité contrainte, comme nous le rappelle la crise des
Gilets Jaunes, une frange non négligeable des consommateurs témoigne
ainsi d’une frugalité « choisie ». La sociologue Sophie Dubuisson - Quellier
affirmait,dansLeMondeenmarsdernier,qu’une« nouvelleculturematérielle
était en train de naître, où on vante la sobriété plutôt que l’accumulation
d’objets, la réparation plutôt que le renouvellement, le partage plutôt que
la propriété, la réflexivité du consommateur plutôt que sa souveraineté. »
De nouvelles références normatives portées par un groupe homogène
au capital culturel élevé. Partie d’une petite frange de consommateurs
engagés et d’associations militantes, cette remise en question de notre
culture matérielle gagne ainsi, peu à peu, tous les secteurs de la vie sociale.
Les pouvoirs publics délivrent des messages incitant les citoyens
à la réparation et au recyclage d’objets, une myriade de petites sociétés
se constitue, qui propose services et applications destinés à faciliter la
mise en œuvre de ces économies collaboratives, et la grande distribution
elle-même amorce le virage en reprenant le discours émergeant du
« consommer mieux ».
26. MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 220
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 1
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 20 150
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +54%
Additifs, huile de palme, perturbateurs endoctriniens… Selon une
étude récente de Kantar Worldpanel, 80% des Français sont inquiets
au sujet de la sécurité alimentaire. Un sentiment qui a progressé
de 14 points en seulement 6 mois ! En 2017, le Commissariat
Général du Développement Durable soulignait déjà cette inquiétude :
huit consommateurs sur dix estimaient que l’information sur les produits
n’était pas suffisante et un sur deux avouait être prêt à payer au moins
20% plus cher pour un produit mieux noté.
Une défiance qui se traduit notamment par le boom d’applications
mobiles qui décodent nos achats du quotidien en mesurant
l’impact sur la santé ou les conséquences écologiques et sociétales
des produits de grande consommation. Si celles-ci ne sont pas nouvelles
(Shopwise a été lancée en 2011, Noteo, quelques mois plus tard
en 2012 comme la plateforme collaborative Open Food Facts),
leur force de frappe est sans commune mesure. Aujourd’hui, Yuka,
la plus célèbre des applications mobiles sur la qualité des produits,
évalue l’impact sur la santé de 600 000 aliments et 200 000 produits
cosmétiques.
Ces applications donnent la possibilité aux consommateurs de reprendre
le pouvoir face aux marques et aux distributeurs en exprimant
leurs préférences. La scène est devenue banale dans les allées
des hypers et supermarchés : regard rivé sur leur mobile, les français passent
au crible leurs achats du quotidien, jus de fruit, bières yaourts, jambon,
purée, shampoings, crèmes et déodorants.
Preuves du succès de ces applications ? Près de 20% des Français les
utilisent déjà, soit près de 8 millions de personnes. Et les trois quarts d’entre
eux déclarent qu’elles ont changé leur façon d’acheter, d’après l’étude de
Kantar Worldpanel, 2018 : Un vent de révolte sur la grande consommation.
De plus en plus consomm’acteurs, les français arrivent à faire bouger
les lignes. Ne serait-ce qu’en s’emparant du sujet, pendant que
les pouvoirs publics réfléchissaient à un logo facile à interpréter.
Nutri-Score sera finalement lancé en 2017, après 4 ans de tergiversations
et sans être rendu obligatoire aux marques. Pourtant, aujourd’hui,
les marques n’ont jamais autant essayé de se réinventer : discours sur la qualité
des produits, la juste rémunération des producteurs, l’étiquetage plus visible,
les déclinaisons vertueuses des enseignes, des promesses d’engagement
pour mieux manger… De nombreux industriels contactent également ces
applications avant le lancement d’un produit pour vérifier sa composition.
Certains distributeurs ont même lancé leur propre application, à l’image
de Système U avec « Y a quoi dedans ?» qui promet aux consommateurs de
disposer en temps réel d’une information simple et transparente.
D’ailleurs, après l’alimentaire et les cosmétiques, le phénomène devrait
s’étendre à la majeure partie de nos achats, de la mode aux produits
d’entretien, en passant par les peintures. Une quête de transparence
qui risque bien de ne jamais être satisfaite, mais qui devient,
aujourd’hui, de plus en plus un prérequis de la consommation.
26
27. Avec plus de 10 millions
de téléchargements
en à peine deux ans,
l’application Yuka est une
des rares applications mobiles
françaises à avoir franchi ce cap.
Mais au-delà de cette performance,
Yuka est surtout en train
de révolutionner la manière
dont les consommateurs
appréhendent ce qu’ils achètent.
Retour sur une quête
de transparence qui
devrait durer.
27
30. 30
Aujourd’hui, 8 millions
de français désirent quitter la ville
pour se mettre au vert
et changer plus ou moins
radicalement de vie.
Une véritable dynamique
qui se traduit pour certains
par un retour à la terre,
et pour d’autres, par l’adoption
de nouveaux comportements
de consommation plus natures.
31. 31
e
Dans son édition estivale, Zadig a convié les meilleurs connaisseurs de la nature pour nous conter « la relation paradoxale des
Français avec la nature, trop souvent appréhendée dans une logique consumériste : ils l’aiment, la louent, le temps des vacances,
mais rejettent vite ses désagréments ; et si la nature s’invite beaucoup dans leurs conversations, ils oublient souvent d’en prendre soin,
alors qu’elle les fait vivre. » Heurtés par ces contradictions, de plus en plus de Français explorent cependant, un nouveau rapport à
la nature. Parce que « la bataille écologique sera d’abord locale et individuelle », souligne Jean Viard, Directeur de recherche au Cevipof,
« faceàlanaturedéréglée,ledangerdemortaugmenteetlapolitiquereculecommelieudelégitimationpourl’action :seuls34%desFrançaiscroient
en l’Etat pour trouver des solutions et 32% dans les entreprises. Le local reste le lieu de confiance dans l’action publique. »
Les Natures sur mesure le savent déjà et ont fait de la question écologique un mode de vie pour vivre en harmonie avec ce qui les entoure.
Cela se matérialise au quotidien dans une consommation plus frugale et par le choix de circuits courts, de produits issus de l’agriculture
locale, de recyclage ou de fait maison. Une manière de se libérer des diktats du consumérisme, « de s’émanciper de ce système capitalistique qui
veut nous transformer en machine à consommer », souligne Guillaume, père de 3 enfants qui vit en banlieue parisienne. Cette aspiration à la sobriété
est croissante et son moteur est souvent la santé. « Plus jeune, je pouvais enchaîner les achats compulsifs aussi bien pour les vêtements, la technologie
que dans l’alimentation. Je devais toujours avoir un pot de Nutella sur la table », précise Guillaume qui désigne ainsi le symbole de l’aberration de notre
époque, un produit mauvais pour la santé et au coût élevé pour l’environnement. Dans l’alimentation, ce retour à la nature est mis en exergue par le
Fresh Foraged Feasting, littéralement, le festin de produits fraichement récoltés. Une véritable ode à la nature qui consiste à proposer des produits d’origine
biologique, frais, non transformés et locaux, présentés de manière brute afin de renforcer leur aspect naturel et bénéfique pour la santé. C’est la raison
d’être de Bruno Verjus, Chef de Table à Paris. Son objectif : « Cueillir le vivant, le porter jusqu’à l’assiette, approcher l’exception, sans la dénaturer.
Même les découpes se font dans le respect des tissus, des fibres et des formes. »
Les Natures sur mesure n’hésitent pas par ailleurs, à se poser la question de quitter les centres urbains, s’ils n’ont pas déjà pris la clé des champs.
C’est le choix de Karen, 30 ans qui a pris « conscience des aberrations du système, du trop-plein » et a décidé de s’installer dans un tiny house,
ces minimaisons mobiles qui déménagent en même temps que leurs propriétaires : « J’y ai vraiment beaucoup gagné, je me suis rapprochée
de mon lieu de travail, je paie très peu de loyer, j’ai réellement réduit mon impact sur l’environnement et je peux me nourrir avec des
produits de meilleure qualité et m’habiller avec des beaux vêtements. » Une forme de résistance douce qui n’a rien de la radicalité
d’autres subcultures anticonsuméristes. Si Lise, consultante de 44 ans, installée à une dizaine de kilomètres de Montpellier, a engagé
de profonds changements depuis quelques années, elle ne « cherche pas à s’imposer un système brutalement écolo, à vivre
en marge ou à donner des leçons. J’aspire simplement mieux à me connaître et je vis mon cheminement comme une suite de choix
conscients et joyeux. »
MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 1 423
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 3
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 117 470
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +64%
33. 33
Une échappatoire que les Natures sur mesure cultivent aussi par le faire-soi-même.
Nos salles de bains sont ainsi en train de connaître une petite révolution, en passant
de l’ère industrielle à la composition personnelle ou personnalisée. Bénédicte, la gérante
de Miss Terre Verte à Dijon témoigne dans Le Bien Public : « Tous les jours, des jeunes femmes
entrentdansmaboutiquepouracheterunflaconoudelavitamineEpourconserverleurspréparations. »
Un engouement qui traduit à la fois la méfiance grandissante des consommatrices vis-à-vis de la
composition des produits de beauté qu’elles utilisent mais également le souhait de gaspiller moins.
Cette tendance se traduit par la multiplication sur les réseaux sociaux, de chaînes dédiées aux cosmétiques
faits maison. @biotenaturelle, @alynature, ou encore @brin_de_melisse nous accompagnent ainsi dans la
réalisation de baume nourrissant de massage pour bébé que d’huile protectrice pour les cheveux, de baume à
lèvres, de déodorants ou de shampoings.
Et pour celles qui manquent de connaissances (combinaisons, compositions, quantités., conservation,…),
de nouvelles entreprises se sont lancées sur ce créneau en développant la personnalisation des cosmétiques.
Ce mode de fabrication qui comporte de nombreux avantages - économiques, écologiques, créatifs, sanitaires - , s’étend
aujourd’hui aux produits ménagers : lessive, nettoyant, détartrant ou encore poudre de lave vaisselle.
Un mode de vie plus responsable qui s’appréhende de plus en plus en famille car les enfants ont bien souvent
moins de résistance au changement que les adultes. Ils sont d’ailleurs d’excellents garde-fous au gaspillage.
Qui n’a jamais été rappelé à l’ordre par sa progéniture en jetant des Yaourt avec une date périmée ou en faisant
couler de l’eau pendant le brossage de dents ? D’après Solange Martin, Sociologue à l’Agence de l’environnement
et de la maitrise de l’énergie (Ademe), la famille constitue ainsi « un lieu privilégié pour apprendre
ou retrouver des comportements respectueux de l’environnement : acheter les denrées alimentaires
en circuits courts, trier et réduire ses déchets, réparer ou recycler, opter pour des mobilités douces,
favoriser le covoiturage… Certains moments de la vie familiale, comme un déménagement,
une naissance, une période de chômage ou la retraite sont propices aux changements de routines. »
34. 34
Le gouvernement s’est fixé l’objectif de zéro émission de gaz à effet
de serre à l’horizon 2050. À la clé, des changements profonds dans la
consommation d’énergie, l’habitat, les transports et l’alimentation.
Vivre en harmonie avec la nature et les autres ne suffit plus.
Certains citoyens sont en train d’inventer une nouvelle forme
de résistance, plus radicale, plus militante.
35. 35
MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 3 250
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 2
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 82 170
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +201%
36. 36
« Philippine et Abel, la quarantaine, deux enfants, résident dans une maison
à énergie positive - isolation en fibres végétales, ventilation, pompe à chaleur,
toiture et vitrages équipés de cellules photovoltaïques – qu’ils partagent avec
deux autres familles. Ils cultivent un petit potager. Pour se déplacer dans
leur ville moyenne, en complément des transports en commun ils possèdent
une vieille voiture hybride rechargeable, en autopartage. Pour leurs vacances,
ils ont programmé de longue date un grand voyage en Chine, pour lequel
ils ont obtenu de leurs employeurs la possibilité de cumuler les congés payés.
Léa, 30 ans, vit seule avec sa fille en périphérie urbaine, dans un quartier
autrefois difficile qui a fait l’objet d’un programme de rénovation, avec un
centre-ville rapidement accessible en tramway, en bus, en vélo ou en voiture
libre-service. Son logement social a été largement réhabilité pour réaliser
des économies d’énergie. Elle se fournit en produits frais auprès d’associations
pour le maintien d’une agriculture paysanne.
Isabelle et Olivier, octogénaires, ont quitté leur maison, trop grande
et trop chère à entretenir, pour une résidence rurale où cohabitent plusieurs
couples de retraités, au centre d’un bourg. Mutualisant certains services
avec les autres résidents, ils entretiennent un potager avec composteur,
qui leur fournit fruits et légumes, se font livrer leurs courses en commun
par camionnette électrique et, pour leurs déplacements, utilisent une navette
intercommunale fonctionnant au biogaz. »
Voilà, en quelques portraits signés par Le Monde dans son édition
du 27 mars 2019, à quoi pourrait ressembler une France neutre en carbone.
Ces trois portraits sont issus du rapport de l’ADEME, Quels modes de vie
pour demain ?, paru en décembre 2018 afin de susciter l’intérêt de l’opinion
publique et des médias sur le réchauffement climatique et surtout rendre
plus concret l’atteinte du Facteur 4 en 2050, à savoir l’objectif de diviser
par 4 les émissions de gaz à effet de serre générées sur le territoire national
par rapport à 1990. Une vision prospective qui ne repose ni sur des
changements de mode de vie brutaux ni sur le pari d’une rupture
technologique forte, mais plutôt sur la mobilisation de tout un chacun
et une modification profonde de nos comportements de consommation.
À l’heure où nous commençons à percevoir dans notre quotidien
la réalité du changement climatique, le terme solastalgie
réapparaît. Vieux de 15 ans et inventé par un philosophe australien,
Glenn A. Albretch, la solastalgie correspond à l’expérience vécue d’un
changement environnemental perçu négativement. Thibaut Sardier
décrit bien le phénomène dans Libération : Vous êtes-vous déjà désolé
de ne plus voir de neige sur la montagne qui vous fait face le matin quand vous
ouvrez les volets ? De ne plus apercevoir d’oiseaux ni d’abeilles sur votre balcon?
De voir des lieux familiers dévastés par l’usine ou l’aéroport tout juste construit près
de chez vous ?
Les transformations sont si nombreuses que rares sont ceux qui
échappent à ce malaise. L’été 2018 fut ravageur d’un point de vue climatique
mais a certainement donné naissance dans un premier temps à des réactions
individuelles fortes - de la grève de l’école de Greta Thunberg en Suède
à la démission de Nicolas Hulot, alors Ministre de la Transition écologique,
puis dans un second temps, à des mobilisations sans précédent pour défendre
le climat : des Fridays for future, emmenés par Greta Thunberg, 16 ans
et aujourd’hui en lice pour le prix Nobel de la Paix, à la Marche du siècle
le 16/03, en passant par l’attaque en justice de l’Etat Français pour inaction
face au dérèglement climatique. Nicolas Hulot commence à avoir un
début de réponse à sa principale question, posée lors de sa démission
fin Août 2018 : « Ai-je une société structurée qui descend dans la rue pour
défendre la biodiversité ? »
37. 37
La grande force de ces mouvements ? Ignorer superbement les
politicailleries pour interpeller tous les citoyens à sauver la planète,
en passant ses messages auprès d’instances supranationales ou
par de nouveaux canaux d’influence. Une conscience d’un destin
planétaire moins inspiré par le désir de faire table rase que par le désarroi
face aux dégâts environnementaux et sociaux dont nous nous savons
responsables. Pas d’idéologie en -isme donc mais plutôt un choc individuel
qui conduit à un engagement profond et des actes forts. Anuna de Wever
et Kyra Gantois, respectivement 17 et 20 ans, sont les deux étudiantes
qui ont initié le mouvement Youth for climate en Belgique, dans le
sillage de Greta Thunberg. En quelques semaines, elles ont réussi à
mobiliser des milliers de jeunes citoyens pour réclamer une véritable
action des gouvernements face à l’urgence du changement climatique.
Mieux encore, l’ampleur du mouvement est à présent mondiale : ce sont dans
plus de 120 pays que les jeunes se sont mobilisés pour cette cause qui nous
touche tous aujourd’hui. Nahia Briault et Margot Pena, 17 ans également
et représentantes de Youth for Climate France, ont rejoint la mobilisation
pour le Climat à Bruxelles, juste avant les élections européennes pour
« tenter de faire la différence » et voter à leur façon. Le 26 Mai au soir,
elles avaient gagné un premier pari : les écologistes ont remporté un franc
succès en Allemagne, en Irlande et en France, qui s’est soldé par une
augmentation de 40% de la représentation des Verts au Parlement Européen.
« Un véritable mandat pour le changement », comme le résumait la tête de
liste des Verts européens, l’allemande Ska Keller.
38. MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 2 043
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 4
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 144 460
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +21%
38
39. Dans sa série Les vacances en réalité augmentée, Le Monde avait dressé l’été
dernier, le portrait peu reluisant des nouveaux touristes qui « consomment
des lieux plutôt que les contempler », selon l’expression de Eudes Girard
et Thomas Daum, dans leur livre Du voyage rêvé au tourisme de masse.
800 millions de touristes sortent de leur pays d’origine pour parcourir
le monde. Un tourisme omniprésent dans un petit nombre de lieux.
Jusqu’à la suffocation. En effet, de produit de luxe, le voyage est devenu
un produit du quotidien grâce à l’essor du tourisme à prix réduits et des
nouvelles plateformes, comme Airbnb ou Instagram – devenu « une galerie
planétaire plus efficace qu’une brochure touristique » – qui ont permis
de démocratiser l’accès à certaines destinations. Mais la contrepartie ne
s’est pas fait attendre : infrastructures surchargées, plages bondées, villes
surpeuplées, l’industrie du tourisme semble victime de son propre succès.
L’été dernier, Barcelone, Venise, Reykjavik ou encore Dubrovnik suffoquaient
sous le tourisme de masse et les habitants commençaient à manifester leur
agacement ouvertement auprès des touristes. Derniers phénomènes en date :
Le Louvre, monument le plus visité en France avec plus de 10 millions
de visiteurs, a fermé ses portes pour dénoncer « le sous-effectif face
à l’hyper-fréquentation » et, quelques jours auparavant, c’est sur l’arrête
sommitale de l’Everest que les alpinistes faisaient la queue. À 8 848 mètres
d’altitude. Ce bouchon alpin s’est soldé par une douzaine de morts.
Le tourisme de masse a des impacts locaux importants et multiples :
économiques, environnementaux et socioculturels. Les Vénitiens sont ainsi
une espèce en voie de disparition : de 164 000 habitants dans les années
60, ils ne sont plus que 50 000 aujourd’hui. L’île de Skye en Ecosse compte
aujourd’hui 550 Airbnb pour 5 000 habitants. Ce qui entraîne, comme dans
beaucoup d’autres villes, une pénurie de logements pour les habitants.
Cependant, depuis quelques années déjà se développe une nouvelle forme
de tourisme, allant à contre courant du tourisme de masse, trop rapide,
sans charme, et trop instagrammé. Même si la dimension instagrammable
de la destination reste un critère prépondérant dans la réservation d’un séjour
(44% des Français choisissent leur destination de cette manière, 59% chez les
français âgés de 25 à 34 ans, selon une étude mondiale réalisée par One Poll),
de plus en plus d’influenceurs choisissent de ne plus indiquer sur Instagram
le lieu de leur photo pour éviter la venue d’une foule massive qui pourrait
causer soit des dégradations environnementales soit la marginalisation
des populations locales. Sam et Ashley, un couple d’influenceurs,
(@greenshoestringtravel) invitent ainsi leurs followers à ne pas se géolocaliser
sur Instagram afin de préserver les joyaux de la nature.
Dans ce contexte, Thomas Daum et Eudes Girard constatent « une
demande croissante de diversification des parcours et des pratiques. Ainsi
peut se lire l’apparition d’un tourisme qui se veut autre : un tourisme
solidaire ou équitable. » Un tourisme où le slow a pris racine.
En 2009, Isabelle Babou et Philippe Callot, définissaient le slow tourisme
comme :un« tourismeàrythmelent,garantd’unressourcessementdel’être,peu
émetteur de CO2, synonyme de patience, de sérénité, de découvertes
approfondies, d’améliorations des connaissances et des acquis culturels. »
Un tourisme qui s’inspire du slow food, apparu en Italie à la fin des années
80 et qui invitait à prendre le temps de découvrir et de savourer des produits
locaux et de qualité en réaction à la malbouffe. Une philosophie de vie donc,
un état d’esprit.
Une véritable aubaine pour les départements français qui ont vu dans
le tourisme lent, une nouvelle opportunité pour redynamiser leurs territoires
grâce aux mobilités douces - vélo, bateau, à cheval ou à dos d’âne, en chien de
traineau ou encore à pied. La Seine-et-Marne propose ainsi « une alternative
à l’effervescence parisienne », le Lot-et-Garonne « entend structurer
la politique cyclotouristique sur la son territoire », l’Agglo Pays d’Issoire
« parie sur la lenteur et le sensoriel », les Hauts-de-Seine planche sur un label
accueil-vélo avec pour objectif de développer le slow tourisme « qui permet
de découvrir le paysage et le patrimoine en combinant une légère pratique
sportive »,… Cette année, le slow tourisme a même sa journée dédiée dans
le Gers, organisé par le Ministère de l’Economie (Direction Générale des
Entreprises - DGE) avec pour objectif de faire de la France « une destination
phare du slow tourisme ». En effet, s’il est un espace où on aspire à la lenteur
c’est bien la campagne et la montagne.
Tendance en pleine croissance, le slow tourisme privilégie les mobilités
douces et la rencontre avec les habitants. Elle répond également aux besoins
d’authenticité, de ressourcement et de dépaysement exprimés par une
clientèle de plus en plus nombreuse à vouloir prendre le temps de découvrir,
partager et savourer. Rencontre avec les adeptes du tourisme lent.
39
40. 40
Au-delà du calme et du ralentissement de rythme, l’adepte du slow
tourisme va rechercher la découverte, l’expérience, la rencontre.
Sonia et Lucas, la trentaine, ont décidé de vivre toute l’année sur la route
et d’épouser le slow travel comme mode de vie. Nomades certes, mais
pas de façon continuelle : ils s’installent pour plusieurs mois, vivent
grâce à leurs métiers de graphiste et conseil à distance, et n’hésitent pas
à zapper les visites incontournables. Pour eux, « être Slow travellers c’est
réellement vivre dans les endroits où on se pose, se faire des amis, manger
local. » De son côté, Cécile, 23 ans, profite de son année de césure à
l’Université pour voyager. Au début, elle souhaitait faire un tour du monde,
comme beaucoup à son âge. Puis, elle a souhaité ralentir, circonscrire son
voyage à l’Amérique du Sud, en privilégiant le bus ou l’auto-stop et la nuit
chez l’habitant. Un voyage plus lent qui lui permet de ne pas trop dépenser,
de changer de plans selon ses envies, et surtout de prendre le temps de vivre
avec les locaux, et d’apprendre leur langue. Pour Cécile, « voyager lentement,
c’est pouvoir surfer sur la vague au gré des rencontres, plutôt que de me
déplacer en fonction de ce qu’il faut faire selon les guides touristiques. »
Juliette, elle, est journaliste et a choisi de laisser en gare le TGV pour monter
à bord de TER ou d’Intercités et emprunter des itinéraires que la SNCF
ne propose pas sur sa plateforme de réservation. De cette expérience,
Juliette a écrit Slow Train où elle a recensé « 30 échappées ferroviaires pour
citadins en mal de nature. »
Une subculture qui a beaucoup en commun avec les entrepreneurs du slow
tourisme. En effet, ces derniers ont en commun de vouloir souvent changer
de vie. D’après l’étude réalisée en 2018 par le Cabinet Kipik Conseil pour la
DGE, Les entreprises innovantes en matière de slow tourisme, ils « ont opéré ce
changement après avoir expérimenté autre chose, parfois de très différent,
parfois avec beaucoup de succès mais toujours avec une forme d’insatisfaction
manifestant un besoin de rupture, de réalisation d’un rêve, d’une envie.
Cette lassitude était, en particulier, liée au manque de temps pour soi,
au rythme effréné, à l’absence de sens… » Ce point commun fait d’ailleurs
totalement partie du storytelling de cette aventure très personnelle, devenant
même un gage de l’authenticité du projet. Pour eux. Pour les Slow Travellers.
42. 42
Bien plus qu’un régime alimentaire, le véganisme est un véritable mode
de vie qui, selon le Larousse, « allie une alimentation exclusive par les
végétaux et le refus de consommer tout produit issu des animaux ou de
leur exploitation. » Oui, le végan ne mange ni jambon, ni œuf, ni miel et
ne porte pas de vêtements en cuir. Véritable phénomène de société depuis
quelques années, le véganisme a été intronisé comme le phénomène de
société de la fin des années 2010. Il a d’ailleurs fait son entrée dans la
collection Que sais-je? en 2017 et le baromètre de tendances alimentaires
d’Uber Eats, Foodcast, annonçait que 2019 serait l’année du véganisme en
Europe.
Qu’il s’agisse de la montée en puissance du véganisme, de la sensibilité
accrue au bien-être animal, de la remise en cause de la chasse ou de
certaines pratiques traditionnelles, le rapport des Français à l’animal
évolueaujourd’huitrèsrapidement.DansL’archipelfrançais,JérômeFourquet
analyse ce phénomène et constate l’acceptation massive de la population
française, et notamment des générations les plus jeunes, pour la présence
du loup dans la nature ou la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées,
alors que la France d’après-guerre s’accommodait parfaitement de la
disparition de ces 2 espèces. Il note, par ailleurs, que la présence d’animaux
sauvages dans les spectacles de cirque est aujourd’hui rédhibitoire pour plus
de deux tiers des Français et 35% d’entre eux sont mêmes très favorables
à l’interdiction des animaux sauvages dans les cirques. Cette adhésion
est deux fois plus intense parmi les moins de 35 ans que parmi les 65 ans
et plus. Cette sensibilité à la cause animale s’applique aussi bien aux espèces
sauvages qu’aux animaux d’élevage : 70% des citoyens français souhaitent
l’interdiction du gavage des canards et des oies.
Dans Trois utopies contemporaines, Francis Wolff qualifie d’animalisme,
ce courant de pensée visant à abolir la domination de l’homme sur
l’animal au nom d’une nature commune et de l’égalité entre les êtres.
Né aux Etats-Unis, ce mouvement a pris beaucoup d’importance en France
ces dernières années avec les actions chocs de l’association L214, du nom de
l’article du code rural français sur la protection des animaux. Cette dernière
est notamment à l’origine de beaucoup des vidéos dévoilant les actes de
cruauté sur les animaux dans les abattoirs en 2016. Depuis, l’association
n’a pas cessé d’interroger nos modes de production et de consommation, en
inscrivant son action dans le mouvement plus global de l’antispécisme.
Sujet qui suscite aujourd’hui des débats enflammés en France,
avec la radicalisation du mouvement. L’association 269 Life prône ainsi
la désobéissance civile et l’action directe avec pour objectif : l’abolition totale
de l’exploitation animale. Depuis quelques mois, une ébullition s’est emparée
du débat public autour de la cause animale. Pas une semaine ne passe sans
une initiative des antispécistes. Début juin, plusieurs milliers défilaient
ainsi dans les rues de Paris pour demander la fermeture de tous les abattoirs,
ausond’unmessageaccusatoireexplicite :« l’Étatestcompliced’unholocauste
permanent. » Ce jour là, la statue de Marianne, place de la République,
a été aspergée de faux sang pour marquer les esprits. Ces militants, en général
très jeunes, n’hésitent pas non plus à dégrader des restaurants ou boucheries,
voire à agresser leurs propriétaires, quitte à finir devant les tribunaux.
Du simple appel à manger moins de viande, au respect du bien-être animal,
en passant par l’exigence d’un abandon immédiat de toute exploitation
animale, ces actions commencent à porter leurs fruits. Le Parti animaliste,
« Un vote qui a du chien », a ainsi créé la surprise aux dernières élections
européennes, en doublant son score des législatives 2017 et en réunissant
2,2%desvoix.C’estplusquedenombreuxpartisplusanciensetpresqueautant
que le Parti communiste (2,5%). Début janvier, ce sont 500 personnalités
qui ont appelé à observer chaque semaine, un lundi vert. À savoir, une journée
sans viande ni poisson. Déclinant une campagne internationale, l’initiative
pourrait séduire potentiellement beaucoup de monde. D’après une étude
du CREDOC publiée en 2018, la consommation de viande en France
a fortement baissé ces dernières années (-12% en 10 ans) et 35% des
citoyens déclarent avoir limité leur consommation de viande, soit
23 millions de personnes. Si le flexitarisme est donc une tendance lourde,
le comportement de ses adeptes sont beaucoup moins radicaux que les
militants de la cause animale qui représentent moins de 3% des Français
(Végétariens ou Végans).
Code rural, Art L214-1
Tout animal étant un être sensible doit être placé par son
propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs
biologiques de son espèce.
43. 43
MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 2 918
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 3
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 219 270
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +88%
Les tollés entraînés par les actes
de cruauté envers les animaux
ou par la mise en scène de leur
abattage, ne sont pas nouveaux.
Par contre, la mobilisation devient
plus large, notamment auprès des
jeunes générations, et se radicalise
de plus en plus. Cette radicalisation
se manifeste dans notre quotidien
par la montée en puissance du véganisme
et la multiplication récente des agressions
vis-à-vis des bouchers.
46. L’agriculture urbaine devient
un véritable phénomène en France.
Si elle n’a pas vocation à assurer
l’autosubsistance des villes, l’agriculture urbaine
remplit d’autres fonctions essentielles à la construction
de la ville de demain : des fonctions environnementales,
sociales et pédagogiques.
46
47. En ville, la gestion des déchets, les épisodes de canicule, les risques
d’inondations et l’approvisionnement alimentaire sont autant de défis
à relever pour soutenir un développement durable des centres urbains.
Face à ces défis, les scientifiques s’intéressent de près à la végétalisation
des zones urbaines. En effet, celle-ci rend plusieurs sortes de services
écosystémiques à la ville : les toitures végétalisées peuvent retenir
jusqu’à 84% des eaux de pluie, valoriser les résidus urbains, rafraîchir
l’air de la ville pendant les périodes de fortes chaleurs, favoriser
la consommation locale et servir de réservoirs de biodiversité.
Ces dernières années, de tels espaces verts se sont multipliés, notamment
sur les toits, compte tenu de l’espace urbain limité. Toit parisien productif,
projet pilote né sur les toits de l’école d’ingénieur AgroParisTech
est l’un des premiers toits cultivés à avoir vu le jour en 2012.
Perché à 25 mètres de hauteur, le toit d’AgroParisTech est devenu
aujourd’hui un terrain de jeu d’un peu plus de 800 m2 pour toutes sortes
d’expérimentations et la démonstration de son efficacité.
Aujourd’hui, le mouvement autour de l’agriculture urbaine se structure.
L’Association française d’agriculture urbaine professionnelle (AFAUP), créée
en 2016, regroupe aujourd’hui 223 sites de production en France. Fraises
cultivées sur les toits, champignons dans des sous-sols de parkings, fermes
verticales... De plus en plus de projets d’aménagement et de renouvellement
urbains incluent des propositions d’agriculture urbaine.
D’ailleurs, le plan local d’urbanisme de Paris oblige aujourd’hui,
les constructions neuves à végétaliser les toits terrasses de plus de 100 mètres
carrés, encourage les retraits d’alignement des immeubles pour enraciner des
plantes grimpantes et facilite la création de serres agricoles en étage.
D’ici 2020, la ville ambitionne
le développement de 100 hectares
de fermes urbaines sur son territoire.
Des projets gigantesques sont déjà en cours.
Sur 7 000 m2 à la porte de la Chapelle, la start-up
Cultivate se retrouve à la tête de la plus grande ferme
maraichère urbaine d’Europe. Premières récoltes prévues
au troisième trimestre 2019. Au printemps 2020, une exploitation
de 14 000 m2 surplombera le parc des Expositions avec comme objectif
de produire un millier de fruits et légumes par jour. À côté de ces ambitions
XXL figurent de très nombreuses initiatives de potagers urbains.
Entre les ruches sur les toits de l’Opéra Garnier ou des Galeries Lafayette
et le jardin perché du BHV Marais, les cultures en tout genre commencent à
être bien représentées à Paris :on dénombre aujourd’hui 74 lieux agricoles en
plein cœur de Paris.
Mais la capitale est loin d’être la seule à impulser cette dynamique.
Lyon a intégré en 2016 dans son PLU un coefficient de végétalisation
de 30 % pour toutes les nouvelles constructions. À Marseille, la fondation
Veolia et l’association Heko vont créer une ferme sur un hectare de friche.
Comme le soulignait Jean-Louis Missika, adjoint à la maire de Paris chargé de
l’urbanisme, de l’architecture, du projet du Grand Paris, du développement
économique et de l’attractivité, « le nouvel urbanisme sera agricole ou ne
sera pas. »
Les raisons de cet engouement sont nombreux : rafraîchissement de
l’air et dépollution, lutte contre les inondations, captation d’azote,
économies d’énergie, rôle pédagogique et reconnexion des urbains avec
la nature et l’agriculture. Si chiffrer précisément en France le potentiel
de production alimentaire de l’agriculture urbaine reste difficile,
cette dernière fournit actuellement de la nourriture à ¼ de la
population urbaine mondiale, selon l’Organisation des Nations unies
pour l’alimentation et l’agriculture.
Mais au-delà de cette tendance de fond, qui sont ces agriculteurs
d’un nouveau genre, qui investissent toits, friches, hangars ou encore
conteneurs ? L’Afaup compte 80 adhérents, qui représentent 1 600 emplois
et 47 hectares de surface cultivée en milieu urbain. Derrière ces chiffres,
une multitude de réalités se fait jour : ils exercent au sein d’associations,
d’entreprises, de sociétés coopératives et participatives, de sociétés
coopératives d’intérêt collectif... Une diversité qui se retrouve aussi dans
les profils de ces nouveaux fermiers : « il y a beaucoup de jeunes entre
25-35 ans, issus d’écoles d’agronomie et d’agriculture, qui ont grandi
dans la culture digitale, la bouffe industrielle et qui désirent remettre
du bon sens dans l’alimentation des français et de la nature dans la ville.
Il y a aussi et surtout des gens en reconversion professionnelle,
constate Anne-Cécile Daniel, coordinatrice nationale de l’Afaup.
Les formations dédiées à l’agriculture urbaine commencent à voir le
jour mais la plupart des exploitants actuels ne sont pas passés par là.
Nicolas Torossian est par exemple devenu cooltivateur chez Agricool,
après avoir été réalisateur de documentaires, restaurateur et pilote de
drone : « Je n’avais aucune formation, mis à part ma passion pour les fleurs,
les fruits et les légumes. Après tous les métiers que j’ai fait, j’avais envie
de bosser dans un domaine où je faisais du bien à la planète et aux gens,
confie-t-il. J’avais envie de faire partie de ceux qui cherchent des solutions
pour l’avenir. »
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MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 1 163
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 4
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 21 750
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +49%
50. MATURITÉ WEB
NOMBRE DE CONTENUS : 822
NOMBRE DE LIENS DANS L’ÉCOSYSTÈME : 5
APPROPRIATION SOCIALE
VOLUME DE RECHERCHES MENSUELLES : 44 420
ÉVOLUTION DES VOLUMES SUR 1 AN : +257%
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51. Aujourd’hui, établir un menu peut vite virer au casse tête avec la montée
de la bande des Sans - mettez l’aliment qui vous plaît -. Entre radicalisés
et opportunistes, portrait d’une France qui perd un peu beaucoup de son
patrimoine culturel. Ou pas. La rébellion contre le Sans se réveille.
Le végétarien ne mange ni viande ni poisson.
Le végétalien ne mange ni viande ni poisson et ne mange pas non plus tout ce qui provient
de l’animal ou est créé par l’animal (lait, fromage, œuf, miel, etc.).
Le végan est un végétalien qui refuse tout produit issu des animaux, de leur exploitation
ou testé sur eux (cuir, fourrure, laine, soie, cire d’abeille, cosmétiques, médicaments…).
Le pescetarien exclut la consommation de chair animale à l’exception de celle du poisson
ou des crustacés.
Le crudivore se nourrit exclusivement d’aliments crus.
Le flexitarien vise à réduire sa consommation de protéines animales.
Le « no glu » exclut les aliments à base de gluten présent dans de nombreuses céréales,
comme le blé, l’orge ou le seigle.
Le « no milk » vise à supprimer les produits contenant du lactose (lait, fromage, yaourt…).
Le zéro sucre consiste à éviter les aliments contenant du sucre (fruits, miel,...).
LA BANDE
DES SANS
51
52. 52
Comme pour ceux qui ont décidé d’arrêter de boire de l’alcool ou de
réduire drastiquement leur consommation, les personnes qui suivent
un régime Sans ont dû mal à faire passer leurs habitudes alimentaires
auprès de leur entourage. Solène Lhénoret, dans un article du Monde sur
La tectonique des plats, nous invite à faire l’expérience : « Tentez d’annoncer
à votre entourage, à l’occasion d’un dîner, que vous avez arrêté le gluten.
Ou la viande. Ou encore le lactose. C’est quoi cette lubie, une nouvelle mode ?
Tu veux maigrir ? Tu es malade ?… Refuser de partager un plat est souvent source
de commentaires, de critiques plus ou moins agréables, voire de débats. »
Il est vrai que cela peut paraître un sacrilège en France, pays adepte de
la gastronomie et des joies de la table. Ce n’est pas pour rien qu’en 2010,
l’UNESCO décidait de classer « le repas gastronomique des français »
comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Moment festif
par excellence, occasion pour les familles et les amis de se rassembler,
le repas est en France, plus qu’ailleurs, un moment convivial qui a lieu
à heures fixes : 54% des Français sont attablés chaque jour à 12h30.
Claude Fischler, sociologue spécialiste de l’alimentation, humaine détaillait
très récemment « Le repas à la française doit remplir certaines conditions
de temps, d’horaire, de lieu, d’espace - manger à table par exemple -,
de composition du menu - avec une entrée, un plat et un dessert.
Et doit être partagé avec quelqu’un. » D’ailleurs, les Français sont ceux
qui passent le plus de temps à table avec environ 2h13 par jour, d’après
l’Organisation de coopération et de développement économique.
Néanmoins, selon une étude Opinion Way / French Food Capital,
86% des français font aujourd’hui attention à leur alimentation dont
21% très attention. Même s’ils déclarent manger de tout dans leur
grande majorité - 70% d’entre eux -, les Français surveillent de près ce
qu’ils mangent et pour certains, cette surveillance va jusqu’à prendre
des mesures draconiennes en terme d’alimentation. D’après une étude
réalisée par Nielsen à l’occasion du SIAL 2018, les régimes se font
de plus en plus nombreux et traduisent plus « une peur face aux aliments
transformés, et sont donc une forme de protection face aux dangers
perçus par les foyers français. »
Les Sans représentent déjà 9% de la population française,
auxquels il faut rajouter 6% des Français pour qui le bien être animal
a une influence sur leur comportement d’achat alimentaire,
les emmenant à consommer moins de produits carnés et de charcuterie.
Il y a donc toutes les chances de croiser un Sans autour d’une table.
Catherine, 70 ans, quatre enfants et quatre petits-enfants témoigne :
« Chaque année à Noël, trouver un menu est un vrai casse-tête: une de mes filles
ne digère pas le gluten, une autre ne mange que bio et la troisième, enceinte et
non immuniséecontrelatoxoplasmose,estprivéedecrudités,decharcuterie,de
fruits de mer… Sans parler de mes petits-enfants qui n’aiment pas grand-chose.
On a décidé que chacun mettrait la main à la pâte. Les uns se chargent
de la salade, les autres amènent un pâté maison et je cuisine une dinde
qui convient, a priori, à tout le monde.
Elle n’est pas “bio” mais provient d’un élevage
de qualité, proche de la maison. Même s’ils
se nourrissent exclusivement d’aliments bio,
ma fille et son mari ne sont pas casse-pieds quand
ils sont invités. En dessert, je sers des sorbets et
des biscuits faits maison avec mes petites-filles.
Toutsepassebiencarjefaisensortequ’ilyaittoujours
des alternatives pour chacun. Et quand j’oublie,
les invités se débrouillent toujours en piochant
dans le frigo. Avec un peu de tolérance, on n’en fait
pas tout un plat ! »
Si cette montée en puissance des régimes
alimentaires dans l’Hexagone n’est pas nouvelle,
elle s’est accentuée ces dernières années avec la
crise de confiance générale vis-à-vis de l’alimentation.
Pour Claude Fischler, l’explication est assez simple :
« Il y a une cinquantaine d’années, les gens ont commencé
à dire : “Avec l’alimentation moderne, industrielle,
transformée, on ne sait plus ce qu’on mange.” Et ne plus
savoir ce qu’on mange, c’est un gros problème, car “on est
ce qu’on mange”, si vous ne savez pas ce que vous mangez,
vous ne savez pas qui vous êtes. Puis, le discours est devenu
“on ne sait plus quoi manger”. Et nous sommes actuellement
dans l’âge de la défiance. On ne fait plus confiance à rien
et l’on se tourne vers ses propres recettes, ses propres
décisions de protection : le bio, le local, les AMAP…
On cherche à recréer du lien avec la nourriture. »
Comme le soulignait l’ObSoCo dans son premier observatoire
sur les éthiques alimentaires en 2017, l’éthique est devenu
le moteur de l’alimentation des Français : 53% des Français
déclaraient avoir augmenté, réduit ou supprimé la consommation
d’un nombre significatif de produits alimentaires; et 37% d’entre
eux avouaient avoir adopter une alimentation frugale au cours des
dernières années. Une tendance de fond du mieux manger qui a
bien entendu ses radicalisés mais aussi beaucoup d’opportunistes qui
ont déjà une forte propension à suivre un régime amincissant ou un
jeûne et qui adopte un régime Sans pour des motivations égocentrées.
Et si la vie n’est pas toujours facile pendant les repas pour les convaincus
des régimes Sans, les adeptes du modèle alimentaire classique ont
tendance à se rebeller et à le faire savoir : bienvenue dans le monde
des #girlswithgluten, #junkfood, #eatporn.